Rapport d'information n° 345 (1997-1998) fait au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques, déposé le 6 mars 1998

Disponible au format Acrobat (3,8 Moctets)

N°771

--

N° 345

--

ASSEMBLÉE NATIONALE

SÉNA T

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE l958

ONZIÈME LÉGISLATURE

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale

le 6 mars 1998

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 5 mars 1998 Enregistré à la Présidence du Sénat le 6 mars 1998

OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION
DES POLITIQUES PUBLIQUES

RAPPORT

sur

LES ACTIONS MENÉES EN FAVEUR DE LA POLITIQUE MARITIME ET LITTORALE DE LA FRANCE,

par

M. Philippe MARINI,

Sénateur

ANNEXE 5

La pêche

Déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale
par M. Augustin BONREPAUX.
Vice-Président de l'Office.

Déposé sur le Bureau du Sénat
par M. Christian PONCELET.
Président de l'Office.

Mer et littoral.

AVANT-PROPOS

Cette évaluation a été effectuée par le Commissariat général du Plan sous l'autorité du Commissaire au Plan, M. H. GUAINO. Les travaux ont été coordonnés par Michel Matheu, Chef du Service "énergie, environnement, agriculture, tertiaire" au Commissariat général du Plan.

Réalisée dans des délais extrêmement brefs, compte tenu de l'étendue du champ couvert, elle est destinée à être discutée et à alimenter le débat public. Il ne s'agit pas d'une conclusion définitive mais bien au contraire du point de départ d'une nouvelle réflexion stratégique autour de la question maritime.

Les résultats de ces travaux, tels qu'ils sont présentés dans le rapport, n'engagent que les services du Commissariat général du Plan.

Rapporteurs :

Melle Lignon (Karine), chargée de mission « Pêche » au Service "énergie, environnement, agriculture, tertiaire" du Commissariat Général du Plan

Melle Lebon Le Squer (Donaïg), chercheur, Service économie maritime, IFREMER, Station de Lorient

M. Leclerc (Georges-François), administrateur civil du Ministère de l'Économie et des Finances, chargé de mission au cabinet du Commissaire au Plan

Experts associés 1 ( * ) :

M. Boude (Jean Pierre), Professeur à l'ENSAR, laboratoire halieutique

M. Briffod (Alain), Inspecteur Général des Finances, Chef de la Mission de contrôle économique et financier des Transports

M. Carré (François), Professeur à l'université d'Orléans

M. Chaussade (Jean), Directeur de recherche au CNRS, laboratoire dynamique et gestion des espaces littoraux, université de Nantes

M. Corlay (Jean-Pierre), Professeur à l'université de Nantes, laboratoire dynamique et gestion des espaces littoraux

Mme Dioré (Valérie), Directeur-adjoint du Cabinet du Commissaire au Plan

M. Domergue (Jean-Marie), Ingénieur général du Conseil général du GREF

Mme Duclos (Danièle), chargée de mission auprès du Commissaire au Plan

M. Escaffre (François), chargé de mission, Secrétariat général de la mer

M. Kalaydjian (Régis), responsable du service « Économie maritime » IFREMER

M. Le Lourd (Philippe), chargé de mission au Service "énergie, environnement, agriculture, tertiaire" au Commissariat Général du Plan

Mme Plisson (Brigitte), Chef de cabinet du Commissaire au Plan

Personnalités auditionnées :

M. Avalone, Président de la prud'hommie des patrons-pêcheurs de Sète

M. Benoish (Maurice), Président de la Confédération de la coopération de la Mutualité et du Crédit maritime

M. Berger (Alain), Directeur du FIOM

M. Boyer (Philippe), Chef du Bureau "concours publics de l'agriculture" à la Direction des Affaires financières et économiques du ministère de l'Agriculture et de la Pêche

M. Carré (Claude), Directeur de la criée de Lorient

M. Cavaco (Antonio), Directeur général de la pêche, DG XIV Commission européenne

M. Fourquet (Laurent), Chef de bureau à la direction du Budget, ministère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie

Melle Gleize (Sophie), Direction du Budget, ministère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie

M. Lebolloc (Michel), Directeur départemental des affaires maritimes de Quimper

M. Magré (Jean-Philippe), responsable du contrôle financier et du développement, Groupe Leclerc

M. Maucorps (Alain), Directeur des ressources vivantes à l'IFREMER

M. Mennillo (Jean-Jacques), Directeur de Agromarchés internationaux

M. Missonnier (Thierry), Directeur administratif du groupe Furic

M. Parrès (Alain), Président du CNPMEM

M. Pichon, Secrétaire général de l'ANOP

M. Plormel, Directeur du FROM Bretagne

Mme Rey (Hélène), Maître de conférences à l'université de Montpellier

M. Serradji (Christian), Directeur des gens de mer, Ministère des Transports

M. Sorain (Dominique), Sous-directeur des pêches maritimes, Ministère de l'Agriculture et de la Pêche

M. Spielrein (Marc), PDG de Semaris

M. Steinitz (Bernard), Secrétaire général de l'Union du mareyage français

M. Sylvestre (Gérard), Directeur de l'ENIM

M. Traska (Pierre), responsable des produits frais, Groupe Leclerc

M. Vardon (Jacques), Directeur des services vétérinaires de Rouen

INTRODUCTION

Quelle est l'étendue de l'effort consenti en faveur de la pèche française ? Quelle est l'ampleur des effets induits ? Les instruments de la politique publique répondent-ils bien aux objectifs qui leur sont assignés, et à quel coût ? Telles étaient les interrogations adressées au Commissariat général du Plan par l'Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques.

Des choix de méthode

La simplicité des questions ne doit pas masquer une difficulté de méthode. Comme toutes les politiques publiques sectorielles, celles concernant la pêche poursuivent inévitablement plusieurs registres d'objectifs. Plus exactement, elles cherchent des compromis entre des objectifs qui ne convergent pas facilement : maintien de l'emploi dans le secteur et dans des zones géographiques, protection du revenu de certains agents économiques, défense de la production nationale contre l'importation, amélioration de la compétitivité de la filière, protection des ressources marines vivantes.

L'évaluation a évidemment tenté de rendre justice aux différents objectifs. Néanmoins, compte tenu des délais impartis, elle a privilégié deux objectifs prioritaires des politiques de la pêche : le renouvellement des ressources halieutiques et la performance économique de la filière française considérée dans son ensemble. Une action publique, dans cette perspective, est jugée efficace si elle contribue à garantir les ressources halieutiques et si elle renforce la compétitivité de la chaîne de production, ou celle de l'un de ses maillons.

L'ensemble des actions publiques, nationales et dans une moindre mesure locales, en faveur de la pêche entrent dans le champ de l'évaluation. En revanche, l'aquaculture et la conchyliculture, qui soulèvent des problèmes différents de ceux de la pêche, ont été écartées du champ de l'analyse S'agissant des actions européennes, l'évaluation ne s'est pas interdit de porter des jugements sur la politique communautaire dans son ensemble, mais elle a concentré ses efforts sur la manière, au demeurant originale, dont la France met en oeuvre les modalités d'application de la réglementation communautaire.

Il n'a pas paru possible d'adopter une conception complètement statique de l'efficacité des politiques publiques. La pression sur les ressources -et la conscience qu'en ont les experts et les décideurs- ainsi que la demande des consommateurs français et européens, connaissent en effet actuellement une évolution rapide, et une politique hier efficace ne le sera pas nécessairement demain. Une action publique doit être jugée au moins autant sur sa capacité à éviter une crise -ou tout au moins à en réduire l'ampleur- que sur la manière de la traiter. C'est pourquoi, avant toute analyse de l'impact des politiques, le rapport débute sur un état des lieux de la pêche française et sur un inventaire des connaissances concernant les tendances lourdes du secteur.

Des ressources menacées, un secteur en mutation

La communauté des experts scientifiques s'accorde à diagnostiquer que les stocks halieutiques sont surexploités ou à la limite de la surexploitation. Il en résulte une situation qui n'est pas jugée irréversible, sauf peut-être pour un petit nombre d'espèces dans quelques zones, mais qui est fortement dégradée. Les mesures de limitation de l'effort de pêche et des captures ont contribué à ralentir le processus de dégradation. Mais elles sont mal respectées, de sorte qu'il n'a pas été possible de stopper la dégradation, ni a fortiori de l'inverser. Elles ont été tardives, et en ce sens les problèmes de raréfaction de la ressource peuvent être considérés comme l'une des deux causes principales de la crise récente du secteur, tout comme d'ailleurs des crises précédentes.

La deuxième cause est l'internationalisation des échanges des produits de la pêche. Contrairement à ce qui se serait produit sur un marché national fermé, la raréfaction des ressources n'a pas déclenché de hausse des prix. C'est l'inverse qui s'est produit. Les cours ont diminué régulièrement pendant une longue période -une baisse de 20% en francs courants entre 80 et 95, soit une division par 2,4 en francs constants- parce qu'au même moment l'ouverture des marchés a suscité l'arrivée sur le marché français de poissons originaires de pays dont la main-d'oeuvre est moins chère et parfois de surcroît la monnaie sous-évaluée. La profession s'en est évidemment trouvée très atteinte.

L'augmentation des importations est une tendance durable qui ne pouvait être contrecarrée. De manière générale les Français consomment plus de poisson que leurs entreprises n'en peuvent pêcher, et si l'on entre dans le détail, les espèces les plus demandées ne sont pas disponibles en quantité suffisante : à la notable exception près du thon, la France importe principalement des poissons qu'elle n'a pas. Tout en étant un gros producteur, le deuxième d'Europe en valeur, la France ne peut espérer avoir une balance équilibrée. Elle est du reste le troisième importateur mais le treizième exportateur mondial de produits de la mer.

Outre ces deux tendances lourdes, pression excessive sur les ressources et internationalisation des marchés, l'évolution du secteur est marquée depuis deux décennies par des mutations économiques de grande ampleur. Tout en restant inférieure à celle de l'Espagne et de l'Italie, la consommation française par habitant est une des plus élevées d'Europe, et elle croît. La demande française est habituée à rencontrer une offre variée, car la pêche française commercialise un nombre d'espèces beaucoup plus élevé que celles des autres pays d'Europe. Par ailleurs, la demande change de nature avec l'évolution des modes de vie, pour privilégier des produits partiellement ou totalement transformés, en tout cas prêts à l'utilisation. Elle est satisfaite par deux canaux qui occupent chacun à peu près la moitié du marché : les grandes et moyennes surfaces et les poissonneries. La part des premières était en progrès important jusqu'à une date récente, mais elle est actuellement stabilisée.

La distribution est donc assez concentrée, en face d'une offre qui est pour sa part fragmentée. La pêche industrielle, en effet, est en déclin depuis les années 1970, et la pêche artisanale, qui se porte mieux -au prix d'une diminution importante des flottilles il est vrai- est atomisée. L'ajustement est difficile, car la diversité des espèces pêchées, qui satisfait la clientèle tant française qu'étrangère, s'accompagne d'une certaine imprévisibilité des captures, qui ne convient pas aux grandes surfaces. Circonstance aggravante, la circulation de l'information dans la filière est très médiocre, si bien que les maillons de distribution préfèrent parfois se tourner vers l'importation faute de pouvoir anticiper suffisamment les captures.

En définitive, l'opposition entre offre atomisée et distribution concentrée se conjugue avec l'internationalisation pour tirer les prix vers le bas. Dans ce contexte, il n'est pas étonnant que la crise de 1992-1993 ait durement frappé les pêcheurs français. Cette période apparaît comme une sorte de choc à l'occasion duquel les tendances durables à la baisse des cours et à l'internationalisation concentrent leurs effets. Bien que les dispositions communautaires aient contraint la flotte française à diminuer -de 40 % en nombre et de 15 % en puissance entre 1988 et 1994- les pêcheurs français n'ont pu faire face à ce choc. Incapables de réagir à la fois à l'augmentation du prix d'achat des navires, à la baisse des cours et à la diminution de la ressource, ils se sont retrouvés lourdement endettés. Les effectifs embarqués se sont certes adaptés ils ont décru de 11 % entre 1990 et 1995. Mais cela n'a pas empêché la rémunération moyenne des pêcheurs de descendre, en francs courants, de 14573 francs mensuels à quelque 8000 francs au plus fort de la crise, pour ne remonter aujourd'hui qu'aux environs de 10000. Certes, dans les métiers comme la pêche et l'agriculture, les évolutions des salaires moyennes cachent de fortes disparités et ne doivent pas être abusivement interprétées, mais enfin il s'agit en fin de compte plus de 40 % de diminution en francs constants.

Une action publique qui n'a pas anticipé la crise, mais a bien traité une part des ses effets .

En réponse à la première question posée à l'évaluation 2 ( * ) , l'effort public en faveur de la pêche apparaît considérable. Le chiffre d'affaires de la production était de 5,7 milliards de francs 3 ( * ) en 1995, tandis que l'aide publique, hors protection sociale, se monte à 1 milliard environ, soit près de 20 % du chiffre d'affaires, qui se répartissent entre France et Union européenne dans les proportions de trois quarts et un quart. La dépense de l'État liée à la protection sociale se monte à 4,6 milliards, soit 80 % du chiffre d'affaires.

Le secteur de la pêche, quantitativement peu important, apparaît ainsi, moins que l'agriculture mais plus que la plupart des autres secteurs, comme assez fortement administré, à la fois réglementé et subventionné. Les mécanismes de stabilisation des prix, consistant à retirer le poisson de la vente lorsque le cours tombe en-dessous d'une valeur-repère, sont plus utilisés en France que dans n'importe quel autre pays d'Europe. Quantitativement, les volumes concernés ne sont pas considérables, environ 6 % des captures au plus fort de la crise, mais cette valeur est une moyenne nationale qui dissimule des valeurs plus fortes localement, et en tout état de cause c'est suffisant pour creuser une différence importante entre les prix intérieurs et les prix à l'importation.

La deuxième question adressée à l'évaluation concernait les effets induits. L'effectif de la profession se montait en 1995 à 17575 personnes. Les estimations qui circulaient avant la crise quant aux emplois induits ont été emploi en mer fait vivre à terre moins de deux emplois, de sorte qu'environ 40 à 50 000 actifs sont concernés par les politiques de la pêche. Ces emplois sont prédominants dans certaines agglomérations côtières, dont la santé économique dépend fortement de l'activité de la pêche.

Il ressort de l'évaluation que, même si le maintien de l'emploi est loin d'être le seul objectif affiché des politiques en cette matière, il a été un souci permanent des pouvoirs publics. Compte tenu de l'ampleur de la crise, il est légitime de considérer que l'emploi n'a pas beaucoup diminué. On verra en revanche que sa stabilité à long terme n'est probablement pas garantie.

La troisième question avait trait aux objectifs des politiques de la pêche et à la manière dont ils ont été atteints. Si l'on s'attache aux deux objectifs principaux choisis, préservation des ressources et compétitivité de la filière, la réponse est mitigée. La crise n'a pas été anticipée, certaines mesures publiques ont sans doute même contribué à l'aggraver. Elle a été assez bien surmontée, probablement à un coût élevé faute d'avoir été anticipée, et elle débouche sur une situation relativement stable, mais pas nécessairement durable.

Dans la période qui a immédiatement précédé la crise, les aides publiques ont favorisé l'investissement - et contribué au renchérissement des navires -, alors même que la baisse des cours avait commencé. Ce faisant, elles ont incité à la surexploitation des ressources, à un moment où la raréfaction de celles-ci était pourtant patente, et donc certainement perçue. Il en est résulté une flottille surdimensionnée aux mains d'entrepreneurs endettés. La crise ne les a que plus durement frappés lorsqu'elle est arrivée.

Les mesures de crise, pour leur part, paraissent avoir atteint au moins une partie de leurs objectifs. La situation financière des entreprises est améliorée. À la suite de la remontée des cours, les salaires se sont redressés, sans revenir au niveau antérieur, et l'aval, en particulier les entreprises de mareyage, est restructuré.

Cela étant, le secteur ne dispose pas de marges de sécurité. Une étude détaillée de la répartition de la valeur ajoutée sur l'ensemble de la filière ne fait guère apparaître de possibilités de compression des coûts, sauf peut-être sur les frais de transport. Par ailleurs, la capacité d'investissement des entreprises de pêche n'est pas reconstituée, bien que des renouvellements restent nécessaires sur certains segments de flottille, et cela dans un contexte de prix élevé des navires. En même temps, l'internationalisation se poursuit, et elle nécessitera de nouvelles adaptations. Quant au système français des retraits, il a l'inconvénient d'autoriser, fût-ce à petite échelle, des gaspillages de la ressource dans un contexte de raréfaction. En outre, il pèse sur la de la ressource dans un contexte de raréfaction. En outre, il pèse sur la trésorerie des organisations professionnelles, et souvent par contrecoup sur le contribuable. Dans ces conditions, la situation de la filière ne peut être considérée comme parfaitement stable, ni l'emploi comme durablement garanti.

Des marges de progression

L'évaluation met cependant en évidence plusieurs domaines où des améliorations de l'efficacité des actions publiques sont possibles, qui par contrecoup pourraient améliorer le contexte économique de la pêche française.

En premier lieu, la circulation de l'information peut être considérablement améliorée. Au-delà d'expériences encore très partielles et diversement appréciées par les acteurs de la pêche, il est possible de mettre en place une véritable information en temps quasi réel. Pour vendre sa production, il faut la faire connaître. C'est permettre une meilleure organisation de la distribution, un moindre recours aux importations, une diminution des retraits et destructions.

Ensuite, les actions de contrôle, essentielles dans un secteur où l'activité est limitée par des contraintes réglementaires, peuvent être rendues plus efficaces. Si la France est un des pays qui a le mieux respecté les engagements de réduction de la puissance de sa flotte -mais moins bien ceux de réduction du tonnage-, par contre elle n'est pas celui qui a le contrôle le plus performant. Les moyens sont inférieurs à ceux d'autres pays, et les sanctions trop faibles pour être vraiment dissuasives.

Par ailleurs, des marges de manoeuvre existent pour diminuer les charges de débarquement. Actuellement, le prix au débarquement en France est souvent plus élevé qu'ailleurs en Europe. Pour une part, l'excès de charges de débarquement s'explique par la dispersion des points de débarquement et des criées. Le nombre de criées en France est très élevé, plus que dans tout autre pays sauf l'Espagne. Il existe une marge de rationalisation du débarquement si l'on souhaite comprimer les coûts.

Plus généralement, les investissements effectués récemment en France dans les ports de pêche apparaissent peu sélectifs. Certes, beaucoup de l'effort accompli il y a quelques années -qui porte pour une bonne moitié sur les infrastructures et un quart sur les criées- était rendu nécessaire par la vétusté des installations. Il reste qu'aujourd'hui les investissements pourraient avantageusement être concentrés sur un nombre raisonnable de sites prioritaires.

Enfin, on peut attendre des résultats positifs des actions, encore peu avancées, menées pour labelliser les produits de la mer. Pour conclure, il reste des possibilités d'amélioration de l'efficacité de l'action publique, au service des deux objectifs prioritaires que constituent la préservation des ressources et l'amélioration de la compétitivité. Certes la situation de la pêche française apparaît fortement déterminée par le cadre de la politique communautaire. En ce sens, la façon dont la France pèsera sur les choix futurs, en essayant d'influer sur ses quatorze partenaires, est déterminante. Il est du reste indispensable qu'elle agisse comme force de proposition dans la perspective de la renégociation de la politique commune qui interviendra en 2002 qu'elle suggère des orientations en vue de préserver les ressources et d'améliorer la compétitivité de la filière.

Mais à côté de cet effort d'orientation de la politique européenne, dont les résultats sont d'autant plus aléatoires que le nombre d'États-membres croît, il y a place pour une politique nationale. Celle de la France est à certains égards originale, notamment en ce qui concerne les retraits. Ce modèle semble avoir assez bien fonctionné pendant la période de crise, même si celle-ci a pris les acteurs de court. En revanche, la question de sa pertinence en régime permanent peut légitimement être posée. Et à côté de cette question, des marges d'amélioration existent dans de nombreux domaines, dont les pouvoirs publics peuvent se saisir dans les années à venir. Ce sera nécessaire, car les ressources ne sont pas encore bien protégées, et seule une vigilance permanente permettra d'améliorer la compétitivité et la stabilité financière des maillons encore fragiles de la filière.

CHAPITRE I - PORTRAIT DES PÊCHES MARITIMES FRANÇAISES

1. La flottille de pêche

La flotte de pêche française se situe au 4 ème rang européen, derrière l'Espagne, l'Italie et le Royaume-Uni, et au 23 ème rang mondial. Elle représente 7 % de la flotte européenne (9 % de la jauge et 12 % de la puissance). En 1997, la flotte française compte 6 509 unités pour une capacité de 176 356 tjb (tonneau de jauge brute) et une puissance de 991 561 kW. Elle emploie 17 500 marins-pêcheurs.

La structure de la flotte française fait apparaître une prédominance des petites unités de moins de 12 m : 4 783 bateaux, soit 73 % du total de la flotte, contre 167 navires industriels et semi-industriels (plus de 25 mètres) et 1 159 navires de pêche artisanale hauturière. Les plus de 38 mètres ne comptent que 79 unités, soit 1,2 % de la flotte française.

La flottille de pêche a été fortement réduite depuis 1988, suite aux effets des différents POP (Programmes d'orientation pluriannuels), du contingentement des permis de mise en exploitation et du plan Mellick. En 1983, la France comptait 11 660 navires armés à la pêche. Entre 1988 et 1994, la flotte a diminué de 40 % en nombre, de 15 % en puissance et de 16 % en tonnage. La puissance et le tonnage n'ont commencé de décroître qu'à partir de 1989.

Évolution de la flotte de pêche française en nombre de navires .

Navires

1983

1990

1995

1990

moins de 12 m

9454

6557

4847

4783

de 12 à 16 m

928

850

652

643

de 16 à 38 m

1166

1144

1019

1006

plus de 38 m

112

100

75

77

TOTAL

11660

8651

6593

6509

(Source DMPCM, ministère de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation.)

Ce sont les petites unités de moins de 12 m qui ont massivement disparu. Le nombre de ces petites embarcations a chuté de 44 % entre 1988 et 1994. Parallèlement, elles ont connu une augmentation de plus de 30 % de leur puissance unitaire. La flotte industrielle a connu un déclin régulier durant les années 1980 : elle débarquait 60 % du tonnage en 1980 et seulement 40 % en 1993. Il y a donc eu modification de la structure de l'offre : régression de la pêche industrielle et croissance de la pêche artisanale. Le nombre des 16-25 m est resté stable dans certaines régions et a même augmenté dans d'autres. Les unités de 16-38 mètres sont particulièrement bien équipées et efficaces en terme de capacités de production : il s'agit d'une flottille jeune et moderne.

Mais ce sous-secteur a connu d'importantes difficultés financières. Les patrons-pêcheurs ont beaucoup investi avant la crise, pour s'équiper et se moderniser. La crise des années 1992-93, provoquée par la baisse des prix du poisson et la diminution de la ressource, a révélé la fragilité latente des entreprises de pêche. Avec la chute des cours, les situations de surendettement se sont multipliées. Cependant, d'après les données du Centre de gestion de la pêche artisanale (CGPA) sur cette partie de la flotte, la baisse du chiffre d'affaires et de l'excédent brut d'exploitation (représentatif de la performance économique du navire), intervenue dès 1990 et qui a atteint son plus bas niveau en 1993, a été enrayée en 1994-1995, sauf pour les fileyeurs. L'EBE 4 ( * ) moyen est passé de 260 000 francs en 1993 à 467 000 francs en 1995 pour les hauturiers de plus de 15 m, soit une amélioration de près de 80 %. Pour les fileyeurs, il a légèrement baissé, de 359 000 francs en 1993 à 349 000 francs en 1995, soit une baisse de 0,03%.

Pour les armements industriels, la situation est plus critique : les résultats d'exploitation de certaines entreprises sont à peine supérieurs aux charges financières. Leurs charges fixes sont plus élevées, notamment le poste carburant (plus de 15 % du chiffre d'affaires pour un navire industriel de plus de 38 m) Il y a plus de marins à bord : le poste des rémunérations et des charges sociales est donc plus élevé.

En revanche, la situation est plus favorable pour les bateaux de moins de 12 mètres, car une grande partie du matériel est déjà amortie et les charges fixes sont moins élevées.

Une analyse géographique révèle que la Bretagne est la principale région de concentration des facteurs de production avec 41 % de la puissance totale, suivie par les Pays de Loire et le Languedoc-Roussillon, puis la région Nord dominée par le port industriel de Boulogne. Les plus fortes réductions de flotte ont eu lieu dans la région Provence-Alpes-Côte-D'azur, en Aquitaine et en Haute Normandie. La Basse Normandie et les Pays de la Loire ont été moins concernés. En Bretagne, certains quartiers maritimes 5 ( * ) comme Lorient. St-Malo, Camaret, Douamenez ont connu des diminutions spectaculaires, traduisant les difficultés de la pêche lointaine, chalutière ou langoustière. D'autres, comme Concarneau ou Audierne, profitent des atouts de la pêche thonière tropicale.

Depuis 1994, la flottille de pêche est stabilisée. Mais avec l'adoption du nouveau programme d'orientation pluriannuel (POP 4), le nombre et la puissance des unités de pêche devront diminuer à l'avenir.

Évolution de la flotte française de pêche .

2. Les marins-pêcheurs

2.1 Les emplois

Les marins-pêcheurs constituent un groupe socioprofessionnel à part dans le monde du travail. Il s'agit de l'héritage du système de l'Inscription maritime, datant de Colbert. Si l'Inscription maritime a disparu en 1965, l'administration des Affaires maritimes continue d'exercer la tutelle de la profession et des relations professionnelles. Selon la durée des marées, les pêcheurs sont classés en quatre catégories administratives : la petite pêche (absence du port inférieure à 24 heures), la pêche côtière (absence entre 24 et 96 heures), la pêche au large (absence supérieure à 96 heures sans correspondre aux critères de la grande pêche), et la grande pêche (navire supérieur à 1 000 kW ou à 150 tjb et absent plus de 20 jours de son port d'armement).

La réduction de la flottille a eu des conséquences sur l'emploi, aussi bien pour les marins-pêcheurs que sur les emplois indirects à terre. Il y avait 19 769 marins en 1990 et seulement 17 565 marins embarqués plus de trois mois en 1995. Si l'on compte les marins embarqués moins de trois mois, le chiffre est de 22 109. Le secteur de la pêche a donc perdu 2 000 emplois en cinq ans. Les marins embarqués moins de trois mois sont des pluriactifs qui travaillent dans des entreprises aquacoles ou dans une autre activité, comme le tourisme. La réduction des emplois a touché surtout les marins embarqués plus de 9 mois sur des unités de pêche côtière ou de pêche au large. Les réductions d'emplois dans la flotte industrielle ont surtout eu lieu dans les années 80.

Parmi les marins embarqués plus de trois mois, la majorité pratique une pêche de proximité. La pêche industrielle n'emploie que 4% des effectifs.

Répartition nationale du nombre de marins en 1995.

2.2 La rémunération des marins

Les marins ont vu leur rémunération décroître suite à la crise de 1992-1993. La diminution des revenus a été d'autant plus brutale qu'il n'existait pas jusqu'à récemment, de minimum garanti, sauf dans la pêche industrielle. Le système de rémunération est différent suivant le type de pêche, artisanale ou industrielle. Dans la pêche artisanale, le système en vigueur est celui de la rémunération à la part, qui dépend directement du chiffre d'affaires du navire, après imputation des « frais communs ». Toute baisse du chiffre d'affaires se répercute sur les revenus des marins, alors qu'ils passent de plus en plus de temps en mer (quarante jours supplémentaires dans le Finistère en 1996 par rapport à 1993). Une circulaire en date du 25/10/1995 précise les conditions de rémunération à la part et crée un SMIC marin : soit l'armateur complète les parts de pêche lorsqu'elles sont inférieures au SMIC, soit il mensualise le marin au SMIC en complétant ce salaire fixe par une prime d'intéressement aux résultats de la pêche. Le principe du SMIC est cependant très peu appliqué aujourd'hui.

Le système de paiement à la part a permis, dans le contexte favorable des années 80, d'assurer aux hommes d'équipage des rémunérations satisfaisantes. Mais elles ont décru par la suite. Un document établi par la Confédération de la coopération maritime, à partir des comptes de gestion de 73 chalutiers de plus de 22 mètres, montre que le salaire mensuel moyen s'établissait en 1989 à 14 573 F par mois pour un matelot. En 1991, ce salaire était de 11 906F (- 21%). Pendant la crise, il est tombé à 8 000 F (-45 %). Aujourd'hui, le salaire des marins est remonté à 10 000 F par mois. Cette cyclicité du revenu doit être bien présente à l'esprit, lorsque l'on étudie le secteur.

Dans la pêche industrielle, les marins ont un salaire minimum garanti. Ils sont rémunérés au « pour mille » du chiffre d'affaires net (CA brut moins frais de débarquement et moins taxes de criée). Ils touchent en plus, une prime d'intéressement aux résultats. Ils prennent moins de risques que dans la pêche artisanale, car une partie des risques est transférée à l'armement. En revanche, en cas de forte diminution des ventes, les salaires ne jouent plus le rôle d'amortisseur financier. Dans ce cas, la probabilité d'une faillite de l'armement est plus élevée et le risque est grand pour les marins qu'il emploie.

2.3 La formation des marins

Le secteur fait face à un problème de recrutement des marins. L'évolution des conditions du métier de pêcheur est souvent perçue négativement, ce qui entraîne une désaffection pour ce secteur d'activité. Depuis 1993, la main d'oeuvre ne se renouvelle plus et le savoir-faire tend à disparaître. Il est difficile, aujourd'hui, de trouver une main d'oeuvre qualifiée : les difficultés du secteur et le nombre d'heures de travail par semaine découragent les jeunes à se lancer dans cette filière. Ils savent, d'autre part, qu'il sera difficile d'acquérir leur propre navire.

La formation est très variable selon la nature du poste du pêcheur : matelot, officier ou capitaine. Le métier varie aussi en fonction de la taille du navire (entre 4 et 80 mètres), de la technique de pêche utilisée (chalut, filet fixe, casier, drague, ligne, etc.), des espèces pêchées (pélagiques ou démersales 6 ( * ) , sédentaires ou migratrices), de la production visée (pêche fraîche ou congelée, transformation à bord du navire ou pas), de la durée d'absence du port (moins de 24 heures ou plusieurs mois). En fonction de tous ces critères, la formation exigée peut être très différente.

Une formation minimale est obligatoire pour travailler à bord des navires français, car le métier de marin est dangereux et l'État responsable de la sécurité de la navigation et de la sauvegarde de la vie humaine. Cette formation obligatoire peut être obtenue par une formation initiale sanctionnée par un « certificat de fin d'études maritimes », ou par une formation continue, avec le « certificat d'initiation nautique », réservé aux adultes âgés de plus de vingt ans. Ces titres sont délivrés par le ministère de l'Équipement, du logement, des transports et du tourisme. L'accès au titre de capitaine ne peut se faire que par la voie de la formation continue. Il faut au moins 48 mois de navigation à la pêche, dont 24 mois dans des fonctions de second sur des navires de pêche au large ou de lieutenant sur des navires de grande pêche.

En fonction de leur grade, les pêcheurs doivent aujourd'hui avoir des connaissances dans plusieurs domaines : la conduite du navire, des machines et des auxiliaires, la sécurité à bord, l'exercice de la pêche (détection des captures, mise en oeuvre d'un engin de pêche), le traitement des captures (tri, transformation, congélation, ...), la maintenance courante du navire, la gestion de l'entreprise (comptabilité) et la définition d'une stratégie de production. Ils devraient être plus sensibilisés à la raréfaction de la ressource.

Le patron pêcheur est devenu un véritable chef d'entreprise, qui doit gérer son outil de production et qui devra aussi progressivement gérer sa matière première : la ressource II doit savoir se situer entre l'offre et la demande, valoriser au mieux sa production. Mais les patrons-pêcheurs ne sont pas encore suffisamment formés à la gestion financière, à la gestion de la qualité et à la commercialisation. Les pêcheurs débarquent encore leurs poissons sans vraiment se soucier de la façon dont ils seront vendus

3. La production

Les captures mondiales se situent autour de 100 millions de tonnes (y compris cultures marines et pêches continentales), selon la FAO. Après une baisse puis une stagnation de la production depuis 1989, les débarquements augmentent après 1992 pour atteindre en 1995, 112,3 millions de tonnes (dont 91 millions de tonnes pour la pêche et 21,3 millions pour l'aquaculture). En Europe, la production augmente légèrement depuis 1993, mais reste inférieure au niveau de 1989. Elle est néanmoins stable sur longue période.

La France est le 24 ème producteur mondial de produits de la mer et le 4 ème producteur européen, derrière le Danemark, l'Espagne et le Royaume-Uni. La France est éloignée des grandes pêcheries : 60 % des captures françaises proviennent, en effet, de zones de pêche sous juridiction d'autres États membres de l'Union européenne (Grande Bretagne, Irlande, Pays-Bas, Espagne). En revanche, elle est le deuxième producteur européen en valeur derrière l'Espagne. La flotte danoise a une production très importante (1,8 million de tonnes en 1994), mais il s'agit essentiellement d'une pêche minotière (pour la fabrication de farines de poisson), qui a une très faible valeur marchande (287 millions d'écus contre 690 millions pour la production française, avec 860 000 tonnes).

Parallèlement à l'évolution mondiale et européenne, la production française a augmenté de 805 078 tonnes en 1990 à 868 571 tonnes en 1996. Mais derrière cette hausse, on note une stagnation des débarquements de pêche fraîche, une augmentation de la production de poissons congelés réalisée dans les eaux extracommunautaires et une légère progression des cultures marines

Production des pêches maritimes et des cultures marines en France.

(Source Ministère de l'Agriculture, de 1'Alimentation et de la Pêche)

Une analyse précise du tableau révèle que les débarquements de poisson ont diminué de 5,4 % par rapport à 1990, les crustacés de 1,43 % et les céphalopodes de 31,7 %. Seules les productions de coquillages et d'algues ont augmenté (81 %). Cette diminution s'accompagne d'une baisse des cours du poisson à la production : de 12 F/Kg en 1980 à 9,66 F/Kg en 1995. La valeur des débarquements est ainsi passée de 5,8 milliards de francs en 1990 à 4,7 milliards en 1996 pour la pêche fraîche, soit une baisse de 18,78 %.

La flotte de pêche française est spécialisée dans la production de produits frais, qui représente près de 65 % des débarquements de produits de la mer (hors cultures marines). Les dix principales espèces débarquées en volume sont : moule de pêche, lieu noir, hareng, maquereau, merlan, sardine, anchois, thon frais, cabillaud et merlu. Elles représentent près de 50 % des tonnages débarqués. En valeur, les dix principales espèces sont : thon, moules de pêche, sole, langoustine, baudroie, merlu, bar, coquille St Jacques et anchois. Ces espèces représentent aussi plus de 50 % du chiffre d'affaires des produits de la mer.

Au-delà de cette concentration sur certaines espèces, la production française est très diversifiée. Les données de commercialisation sous criée font apparaître une centaine d'espèces. Cette diversité est considérée par certains comme un atout, surtout par rapport aux pays d'Europe du Nord, comme le Danemark ou les Pays-Bas, qui ont une production orientée sur quelques espèces cibles. Elle permet, en effet, d'offrir aux consommateurs une gamme étendue de produits et de répondre à une demande plus large. En même temps, cette diversité représente un fort handicap vis-à-vis des GMS (grandes et moyennes surfaces), qui écoulent la marchandise par promotion. Beaucoup des espèces pêchées par la flotte française sont en quantité peu abondante et connaissent de fortes fluctuations saisonnières. Leur débarquement est par conséquent difficilement prévisible. Or pour lancer des promotions, les GMS ont besoin d'acheter des quantités importantes d'espèces déterminées à l'avance. Elles ont donc recours aux importations, surtout celles des pays d'Europe du Nord qui sont producteurs de peu d'espèces mais en grande quantité et toute l'année.

La production française est principalement réalisée en Bretagne. Cette région débarque 51 % de la production en volume et 50 % en valeur. La Normandie représente 31 % des tonnages débarqués, et seulement 21 % du chiffre d'affaires. Le Sud-ouest et la Méditerranée concentrent 7 à 8 % de la production en volume et en valeur.

4. Le poids socio-économique des activités de pêche

Le secteur de la pêche en France ne représente qu'une faible partie de l'activité économique du pays. En 1995, son chiffre d'affaires était de 5,7 milliards de francs, soit 0,06 % du PIB et 8,4 milliards avec les cultures marines, soit 0,14 % du PIB. Le secteur des pêches maritimes emploie entre 60 000 et 65 000 personnes et environ 100 000 avec les cultures marines. Les emplois induits 7 ( * ) en amont et en aval de la pêche peuvent être estimés (d'après les données du CAAM et du FIOM) entre 40 000 et 45 000, soit 2,5 emplois à terre pour un marin embarqué, contrairement à certaines estimations reprises par l'Union européenne 8 ( * ) de 4 emplois à terre pour 1 en mer. Dans certaines régions, le coefficient multiplicateur est inférieur à 2.

La pêche est une activité structurante des zones côtières françaises. Quarante-deux criées ont été aménagées le long du littoral pour organiser la commercialisation des produits de la mer. Il existe 1 500 points de débarquements, lesquels ont nécessité des aménagements portuaires divers : d'un simple quai de déchargement à un port parfaitement équipé pour la commercialisation des produits, leur transformation, l'entretien du navire, etc. L'activité de pêche joue donc un rôle dans l'aménagement du littoral. Sur les 100 000 emplois du secteur, 70 000 se trouvent sur le littoral.

Dans certaines zones littorales et dans les petits ports, la pêche est parfois la seule activité. Elle joue donc un rôle essentiel dans le maintien d'une certaine population sur zone. En Cornouaille, 11 % de la population active travaille dans la filière pêche, 8 % en Vendée, 12,7 % à Boulogne et 9,5 % à Fécamp. Dans le bassin de Marennes-Oléron, la conchyliculture occupe 10 000 personnes. Dans les grands ports, l'activité de pêche entre de plus en plus en concurrence avec d'autres activités, comme le tourisme, l'aquaculture ou la flotte de commerce. Il existe, de ce fait, des conflits d'usage.

Les régions de Bretagne Sud, Sud-ouest et Méditerranée regroupent plus de 50 % des emplois du secteur (environ 13 000 pêcheurs et 39 000 emplois indirects), contre 4 000 pêcheurs et 16 000 emplois indirects en Bretagne

Nord et Manche. La Bretagne Sud concentre, sur 100 km de côtes, quelques uns des quartiers maritimes et des ports de pêche les plus importants du littoral français (Douarnenez, Le Guilvinec, Concarneau, Lorient). Le chiffre d'affaires du secteur, de la Bretagne au Sud, était de 941 millions d'écus en 1993, contre 373 millions en Bretagne Nord et Manche.

En Europe, 300 zones littorales de différentes dimensions (de quelques milliers de personnes à 3 ou 4 millions d'habitants) sont dépendantes de l'activité de pèche. En 1993, ces zones représentaient 106 millions d'habitants (31 % de l'ensemble de l'Union européenne), soit 32,8 millions d'emplois. La flotte de pêche procure plus de 10 % des emplois le long de la côte atlantique espagnole, dans l'est de l'Italie, en Espagne, en Grèce, au Portugal et au Royaume-Uni.

CHAPITRE II - L'ÉVOLUTION DES CONDITIONS D'INTERVENTION

Deux facteurs importants sont venus modifier le contexte de gestion des pêches maritimes françaises :

- une tendance globale à la raréfaction de la ressource,

- l'évolution du marché des produits de la mer, dont la dimension, devenue internationale, met en avant de nouveaux opérateurs et voit se modifier les habitudes et les modes de distribution et de consommation.

L'un et l'autre de ces aspects sont dominés par l'assujettissement de la gestion des pêches françaises à la Politique Commune des Pêches (PCP).

1. Un contexte général de raréfaction de la ressource

L'histoire des pêches maritimes est tributaire de l'état de la ressource exploitée. À l'image des effets de la crise sardinière, qui a durement frappé l'économie des régions littorales atlantiques à la fin du XIX e ou de la crise du hareng de mer du Nord dans les années 70, les pêcheurs exercent aujourd'hui leur activité sous la contrainte forte de la rareté de la ressource halieutique, qu'il s'agisse des aléas naturels ou des effets de la surexploitation.

1.1 Connaissances des ressources halieutiques

Malgré les réductions de l'effort de pêche, les captures ne se reconstituent pas, ce qui peut laisser penser que la pression sur les stocks est encore trop forte et supérieure au rythme de renouvellement de la ressource.

Les évaluations des biologistes sont souvent contestées. Il semble effectivement que les stocks à court terme (1 ou 2 ans) soient difficiles à évaluer, en raison des incertitudes quant à l'importance et à la hiérarchie de facteurs, comme les conditions climatiques, l'existence de prédateurs ou la mortalité naturelle, et en raison de l'imprécision de certaines données statistiques (volumes capturés, origine géographique des captures, engins utilisés, etc.). Par conséquent, il est difficile d'anticiper l'évolution des ressources à court terme. Il peut ainsi y avoir des fluctuations importantes, en particulier si la ressource bénéficie d'un bon recrutement. En revanche selon les experts de l'Ifremer, il n'y a pas de doute sur les tendances lourdes ou les évolutions sur le long terme des principales ressources. L'état de dégradation de ces stocks au cours des dernières décennies est parfaitement connu.

1.2 L'appauvrissement des fonds de pêche

D'après le département des ressources halieutiques de l'IFREMER, les connaissances actuelles sur les ressources sont les suivantes :

- peu de stocks de poissons sont dans un état critique tel qu'un effondrement difficilement réversible soit à craindre. En effet, le seuil de non-rentabilité d'une pêcherie est souvent atteint avant l'extinction biologique d'un stock. Un certain nombre de stocks sont cependant dans un état tel qu'ils ne donnent plus lieu à une pêche commerciale : c'est le cas de la dorade rose, de certaines raies et de certains requins,

- la situation des stocks est moins préoccupante pour les poissons pélagiques (chinchard, sardine, sprat, ...) ou le stock de germon de l'Atlantique, à l'exception du stock de hareng. Le stock de hareng de mer du Nord s'est effondré dans les années 70. La pêcherie a été fermée et le stock s'est reconstitué. Aujourd'hui, la situation est de nouveau préoccupante car la surexploitation a recommencé ;

- entre ces deux situations extrêmes, beaucoup de stocks de poissons de fond (ou démersaux), qui constituent l'essentiel des prises françaises, sont proches de l'effondrement. Ces stocks sont en phase de surexploitation. Cette situation est due essentiellement à deux facteurs : des capacités de capture excédentaires par rapport au potentiel de renouvellement des stocks, et la capture trop fréquente de jeunes individus, réduisant la biomasse des reproducteurs ;

- enfin, la présence de ressources halieutiques importantes non encore exploitées, voire inconnues, est très peu probable.

La plupart des stocks sont pleinement exploités et ne peuvent pas supporter une augmentation de l'effort de pêche. Une partie de ces stocks est même surexploitée. La F.A.O (Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture) arrive aux mêmes conclusions : 60% des stocks de poissons mondiaux sont « soit dangereusement surexploités, soit en nette diminution (morue de l'Atlantique, églefin, lieu d'Alaska, thon rouge tropical, crevette, mérou, etc.) » 44 % des stocks de poissons de la planète se trouvent à leur limite de rendement. En surexploitant le milieu, on a réduit au quart le nombre d'adultes reproducteurs chez de nombreuses espèces, ce qui fait peser une menace sur l'ensemble des populations concernées.

L'état des principaux stocks exploités par les pêcheurs français montre donc que beaucoup de nos ressources présentent des signes inquiétants d'épuisement, en particulier les ressources démersales. Le bilan dressé par Forest et Souplet, dans leur étude : « État en 1995 des stocks halieutiques de l'Atlantique Nord-Est », montre que partout dans cette zone, les stocks de hareng, de morue, de merlan, de sole, de plie et de lieu noir ont atteint un seuil critique (cf annexe 1). En Méditerranée, la situation est aussi préoccupante, et de nombreux stocks démersaux sont surexploités. Cette surexploitation, d'après l'Ifremer, a moins pour effet de mettre en danger la survie des stocks, que d'affecter la santé économique des entreprises de pêche. Quand un stock commence à s'épuiser, les captures diminuent alors que l'effort de pêche est toujours le même. Par conséquent, la productivité des navires, mesurée par les captures par unités d'effort de pêche (CPUE), baisse. Les charges d'exploitation des navires étant constantes, les bénéfices des entreprises se réduisent. Face à cela, certains pêcheurs commencent à renoncer aux stratégies de pêche quantitative, pour adopter une démarche plus sélective en fonction des débouchés commerciaux. Cependant, ceci ne concerne encore qu'une faible partie des pêcheurs.

Bien qu'il ne s'agisse pas là d'une règle commune à l'ensemble des producteurs et que la politique communautaire de gestion de la ressource (TAC) ne soit pas facilement admise ni respectée, on observe une prise de conscience de certains pêcheurs dans le sens d'une responsabilisation vis-à-vis de la raréfaction de la ressource. Ces pêcheurs privilégient une plus grande sélectivité des captures et des pratiques de traitement du poisson à bord favorable à la qualité du produit débarqué. Néanmoins, le lien est encore insuffisamment établi entre la ressource et la compétitivité de la chaîne de production. La ressource devrait être considérée comme l'élément fondamental de la compétitivité du secteur. Une meilleure gestion des ressources permettrait d'obtenir la mise en marché de tailles plus importantes et de mieux valoriser les débarquements. La pêche serait plus rentable et l'investissement nécessaire dans l'outil de production moindre. Plutôt que de pêcher plus, il faudrait pêcher mieux

2. Les mutations économiques globales

2.1 Une offre atomisée face à une modification de la demande

L'atomisation traditionnelle des lieux de débarquement sur 40 criées et 1 500 points de débarquement est renforcée par une grande dispersion des opérateurs de la filière. Le grand nombre d'intermédiaires (criée, mareyeur, transformateur, transporteur, grossiste, distributeur, poissonnier) entre la première vente et la distribution du poisson est l'une des sources de complexité héritée du schéma local et historique des pêches maritimes françaises. Comparativement, la filière traditionnelle des céréales ou de la viande bovine comprend moins d'opérateurs (producteur, abattoir, marché d'intérêt national, grande distribution ou boucher).

Celui-ci entre pourtant de plus en plus en contradiction avec les mouvements d'organisation et de concentration que l'on observe pour la commercialisation des produits, en réponse avec les évolutions de la consommation. Quant à la demande des industries de transformation, elle se distingue des approvisionnements traditionnels par un recours fréquent aux importations. La filière est dominée par la demande : le partage de la valeur ajoutée issu de ce rapport de force est défavorable aux pêcheurs.

a) La consommation des ménages

La consommation totale en produits de la mer (domicile et restauration) en France est de 1,1 million de tonnes en poids net, soit environ 19 kg/an/habitant en 1996 (hors conserve). La restauration hors foyer absorbe le quart de la demande, alors que la consommation à domicile représente 808 000 tonnes annuelles de produits de la mer, pour un chiffre d'affaires correspondant de près de 40 milliards de francs, et connaît une nette augmentation depuis 1992

-Évolution de la consommation française en volume .

La France se situe au troisième rang européen devant l'Allemagne et la Grande-Bretagne, dont la consommation respective par habitant n'excède pas 11 et 18 kg/an, mais loin derrière le Portugal (43 kg/an/hab.) et l'Espagne (32 kg/an/hab.), alors que le Japon est le plus important consommateur, avec 70 kg/an/habitant.

Plus de la moitié de cette consommation concerne les produits frais (58 % en volume et 53 % en valeur 9 ( * ) ) et un quart les produits surgelés (22 % en volume et en valeur). La saurisserie (poissons fumés, séchés, salés et rayon traiteur) ne représente que 6 % du volume de la consommation, alors que les conserves, marquées par une stagnation persistante de la demande, en représentent environ 14 %. Après une diminution régulière de la consommation de poissons frais depuis le milieu des années 1980, le marché du frais est de nouveau en progression depuis 1994, alors que le prix à la consommation est relativement stable, voire décroissant : 51,15 francs en 1992 et 50,20 francs en 1995. Parallèlement, le marché des surgelés régresse depuis 1994 .

Évolution de la consommation de produits de la mer à domicile .

1992

1993

1994

1995

Poissons frais

205 535

204 456

206 378

222 868

Produits surgelés

170 327

177 140

171 825

167 691

(Source FIOM)

Au sein du groupe des produits frais, le classement en valeur de la consommation par espèce souligne l'importance du lieu noir, du merlan, du cabillaud, du saumon, de la (pêche + élevage) et de la sole. Les coquillages (essentiellement les huîtres et les moules), occupent aussi une grande place dans la consommation des ménages, avec respectivement plus de 70 millions de douzaines et près de 80 000 tonnes.

La consommation des produits de la mer n'est pas homogène, ni en volume, ni en type de produits, dans les différentes régions françaises. Les principaux consommateurs de produits frais se trouvent dans l'Ouest (indice 131 sur une base France de 100), dans le Sud (108) et en région parisienne (106) 10 ( * ) .

L'achat en produits de la mer peut être motivé par l'offre de « premiers prix », qui justifie souvent l'attrait pour le saumon frais ou les crevettes roses d'aquaculture, qui sont des produits phares de l'approvisionnement de la grande distribution à l'importation. À certaines périodes, les produits haut de gamme tels que la sole ou la coquille Saint-Jacques, dans la plupart des cas d'origine française, sont fortement demandés.

Le volume consommé dépasse largement la production nationale. Il en résulte un déséquilibre de la balance commerciale française en produits de la mer. Parallèlement au déséquilibre qui s'affirme entre la dispersion de l'offre et la concentration de la distribution, on observe une segmentation croissante des marchés. Les changements de comportement et d'attitude du consommateur sont des facteurs majeurs d'évolution. Celui-ci privilégie toujours les achats de produits frais, mais accorde une place de plus en plus grande aux gammes « traiteur » , ainsi qu'aux plats préparés surgelés. Ces produits « prêt-à-cuire » bénéficient d'une « image de service et de praticité pour tous les profils socio démographiques de consommateurs » 11 ( * ) . Le caractère pratique devient une exigence de plus en plus forte des consommateurs, car ils ont de moins en moins de temps pour cuisiner.

La progression récente 12 ( * ) de la demande profite davantage aux Grandes et Moyennes Surfaces (GMS) qu'aux magasins spécifiques, malgré un fléchissement des prix au détail en poissonnerie.

Évolution de la demande de produits de la mer par gamme de produits et par circuits de distribution .

(1995)

Produits frais

Crustacés

Salés, séchés, fumés

Produits surgelés

GMS

55 %

58 %

84 %

65 %

Détaillants

23 %

21 %

5 %

31 %

Marchés

16 %

15 %

3 %

Autres

6 %

6 %

8 %

4 %

( Source FIOM )

b) Le renouvellement et la concentration des circuits de distribution

L'accroissement général des niveaux de consommation s'accompagne d'un renouvellement des opérateurs et des procédures de distribution, lié au développement des GMS. Les produits de la mer sont des produits nouveaux en GMS. On assiste à l'affirmation de circuits de distribution beaucoup plus regroupés que par le passé, à travers des centrales d'achat et des stratégies d'intégration verticale.

Certaines enseignes ont décidé de s'impliquer directement dans la production, la transformation ou la surgélation, en devenant propriétaires d'armements ou d'entreprises de mareyage ou les deux, de façon à maîtriser une partie de leurs approvisionnements. C'est le cas d'Intermarché, par exemple, qui a fait le choix d'une intégration totale en se portant acquéreur d'un armement (Pétrel), en reprenant un atelier de marée et de transformation (Captain Houat), ainsi que des conserveries. Dans d'autres cas, la stratégie vise une intégration partielle, avec la création d'une centrale d'achat spécialisée pour répondre à l'attente de la GMS. Le groupe Leclerc a ainsi créé sa propre centrale (SCAT Marée) en 1994. Celle-ci répond aujourd'hui à hauteur de 10 % environ du total de la distribution dans les magasins du groupe, principalement sur des espèces d'importation ou d'aquaculture, dont les volumes sont regroupés au niveau national. Les autres sources d'approvisionnement passent par des relations contractuelles directes avec les producteurs, qui demeurent néanmoins encore très réticents à passer des contrats avec les GMS.

Les exigences de ces GMS, qui représentent aujourd'hui plus de la moitié de la distribution du poisson frais sur le marché national (52 %), vont dans le sens d'une garantie d'approvisionnement à la fois quantitative et qualitative et d'une possibilité d'anticipation des livraisons en magasins cinq ou sept jours avant la distribution. Or, ces conditions ne sont pas nécessairement compatibles avec l'organisation éclatée des débarquements de la pêche fraîche française, la diversité des espèces, l'irrégularité des apports et la faiblesse des informations émanant des sites de débarquement. De plus dans certains ports, il peut exister un décalage entre les débarquements des navires concentrés le vendredi ou en début de semaine, et les ventes en magasins réalisées principalement en fin de semaine (environ 20 % des ventes le vendredi et 40 % le samedi). Les GMS ont besoin d'importantes quantités de produits de la mer en fin de semaine, et la production française ne peut pas répondre à cette demande. Le recours aux produits d'aquaculture et aux importations est l'une des solutions apportées par les centrales d'achat, alors que l'on reconnaît aujourd'hui l'effet dépréciateur sur les prix des promotions ponctuelles qui sont menées en grande partie grâce à ces sources d'approvisionnement.

On constate enfin que la persistance de certaines particularités dans le système de commercialisation, en particulier la faible circulation de l'information, pénalisent l'ensemble de la filière pêche. À l'échelle portuaire notamment, cet état de fait se traduit par une faible interaction entre producteurs et mareyeurs, alors que les centrales d'achat sont demandeuses d'une information qui leur est souvent refusée. Par manque de cohésion et par crainte de la concurrence, les pêcheurs et les professionnels du mareyage se privent souvent d'une connaissance anticipée des apports et de celle de la demande. Les démarches de prévision des débarquements et les expériences de prévente commencent seulement de fluidifier les circuits de commercialisation traditionnels. L'accès à l'information est cependant indispensable, notamment pour les GMS. La pêche française doit donc mieux s'organiser et accepter d'annoncer à l'avance ses débarquements, pour mieux répondre aux stratégies de vente des GMS.

c) Des besoins spécifiques aux industries de transformation

La transformation des produits de la mer concerne les conserves (thon, maquereau, sardine), les produits surgelés (entiers, filets, panés, cuisinés), les produits fumés, salés, séchés, marinés et divers produits, comme les plats cuisinés frais (salades de la mer, terrines, produits à tartiner)

Peu de chiffres permettent d'appréhender l'industrie de la transformation en France et les plus récents datent de 1992 : 391 entreprises employaient 8 643 personnes (contre 7 264 en 1988), pour une production de 230 000 tonnes et un chiffre d'affaires de plus de 10 milliards de francs, comparativement à la Grande Bretagne, où 284 entreprises emploient 13 000 personnes pour un chiffre d'affaires de 15 milliards de francs. Le secteur de la transformation est un des points forts du secteur de la pêche en Grande-Bretagne, ce qui n'est pas encore le cas en France.

En France, trois grands groupes dominent : Saupiquet, Findus, Davigel. Les entreprises traditionnelles sont localisées sur la côte, essentiellement en Bretagne pour les conserveries, et dans le Nord pour la surgélation. Le marché des produits transformés est dominé par la conserve : sur une production globale de 230 000 tonnes, les conserves représentent près de 99 000 tonnes.

Il n'est pas permis, à partir de la construction des statistiques nationales, d'extraire la part de la production nationale écoulée par ce biais. Il est en revanche possible d'évaluer la part des produits d'importation dans l'approvisionnement des industries de transformation. Elle est conséquente, avec plus de 50 % de leurs matières premières.

Quelques données par gamme de produits sont disponibles, notamment sur l'industrie de la conserve, qui consomme 293 386 tonnes de poissons entiers (1994) et produit 98 812 tonnes de conserves (rapport de 1 à 3). Chez Findus, pour produire 15 000 tonnes de plaques surgelées, 50 000 à 60 000 tonnes de poissons entiers sont traitées (rapport de 1 à 3 ou 4). Si l'on applique le rapport de 1 à 3 constaté dans l'ensemble de l'industrie de la transformation, on obtient une demande minimale d'environ 700 000 tonnes de matières premières. Au total, les besoins en produits de la mer représenteraient environ 1,8 million de tonnes. En 1995, le montant des importations était de 803 000 tonnes. D'après Guillotreau, les importations de matières premières ont également représenté la condition sine qua non du développement d'une industrie de transformation en France.

La production française n'est pas en mesure de couvrir l'ensemble des besoins, notamment parce qu'elle est principalement orientée vers la vente directe de poisson frais, entier ou en filets. Or, les entreprises de transformation achètent de plus en plus des produits surgelés (thon, sardine, bloc de filets, surgelés mer). On observe d'ailleurs un développement des liens contractuels entre les entreprises de transformation et les armements de navires congélateurs.

De plus, la demande des transformateurs porte essentiellement sur des espèces qui ne sont pas produites par la flotte nationale (saumon, crevette, thon), ce qui explique aussi le recours aux importations. Enfin, ces industries ont besoin d'apports réguliers à des prix compétitifs que la production nationale ne peut pas leur assurer.

Face à des structures traditionnelles de production et de mareyage dispersées et fragiles, la demande en produits de la mer apparaît organisée, concentrée et, dans son contenu, différente de l'offre nationale. Il s'agit de l'une des explications du haut niveau d'importation qui affecte la balance commerciale française, principalement à l'initiative des professionnels de la grande distribution et des industriels de la transformation. C'est donc la demande qui domine sur le marché des produits de la mer : elle oriente le marché et tire les prix vers le bas (cf. tableau p 27). Entre le filet du pêcheur et l'assiette du consommateur, le prix est multiplié en moyenne par 3,5. En 1995, le prix moyen au débarquement était de 13,32 F/kg et le prix à la consommation de 45,32 F/kg. L'analyse des marges des différents intermédiaires (cf. partie II) montre que les marges les plus importantes se font au stade de la vente finale. Les mareyeurs et les grossistes ont des marges relativement faibles : 15 % pour les mareyeurs et 12 % pour les grossistes. Ceci explique aussi les difficultés financières que connaissent certaines de ces entreprises. Les marges des mareyeurs peuvent cependant être améliorées par la transformation du poisson (préparation en filets, en darnes, meilleure présentation du produit, etc.). Les marges des centrales d'achat sont de 6,10 %. Celles des rayons marée des GMS atteignent 25 % et celles des poissonniers 35 %. Le cumul des marges des centrales d'achat avec les marges des rayons de GMS équivaut aux marges des poissonniers s'approvisionnant chez un grossiste. Ces marges peuvent ensuite varier en fonction des circuits de distribution empruntés et du travail de transformation effectué. Plus le circuit est court et plus le poisson est transformé, plus les marges en amont de la filière sont élevées.

2.2 L'internationalisation croissante des marchés

On assiste à une intégration croissante du secteur de la pêche au système économique international. Elle se manifeste par la mondialisation des marchés et des économies, la pénétration des mécanismes marchands dans les fonctions d'allocation et de distribution.

a) Les échanges français sont marqués par un recours fréquent aux importations.

L'internationalisation des échanges n'est pas un phénomène nouveau. Le taux d'internationalisation était déjà de plus de 60 % en 1982. Il a continué à croître jusqu'en 1991, où il a atteint son maximum : 76,1 %. Depuis 1993, le taux d'internationalisation s'est stabilisé autour de 75 %.

La forte pénétration du marché intérieur, régulièrement incriminée par les professionnels, est principalement motivée par la croissance de la consommation. Parallèlement, les mouvements d'exportation de produits de la mer restent limités. La France est le troisième plus gros importateur mondial de produits de la mer. En revanche, elle ne se classe qu'au 13 ème rang des exportations.

La structure de production des pêches maritimes françaises fait, en effet, apparaître une insuffisance de l'offre nationale (près de 870 000 tonnes en 1996) au regard de la demande exprimée par les consommateurs (1,1 million de tonnes) et les industries de transformation. Au total, les besoins en produits de la mer représenteraient environ 1,8 million de tonnes, soit un recours aux importations rendu nécessaire pour plus de la moitié de la demande (cf graphique).

Inadéquation quantitative entre l'offre et la demande
en produits de la mer
.

(Source CNPMEM)

Le déficit de la balance commerciale française s'est confirmé en 1996 (11,5 milliards de francs) et le taux de couverture reste faible, aux alentours de 30 %. La situation de la balance commerciale, qui semble se stabiliser depuis le début des années 1990, masque cependant des évolutions contrastées que l'on peut mieux cerner par une analyse des flux par produit et par région d'importation.

Au cours des années 1990 à 1995, la part des produits frais a baissé dans les exportations totales. La part du poisson frais est ainsi passée de 42 % en 1992 à 30 % en 1995. Le même constat peut être formulé pour les crustacés (de 12% à 8,7%). Inversement, la proportion de produits surgelés a considérablement augmenté, notamment pour les poissons (de 13 % à 20 %). En ce qui concerne les importations, les évolutions sont opposées : augmentation de la part des produits frais, notamment pour les poissons (de 17 % à 23 %) et baisse de la part des produits transformés (de 12,7 % à 5,1 %). La France exporte donc de plus en plus de produits transformés et importe davantage de matières premières

Une analyse plus fine des espèces importées montre que peu de produits étrangers viennent directement concurrencer les débarquements français. En effet, les quatre principales espèces importées (50 % de la valeur des importations de produits de la mer) sont la crevette, le saumon, le thon et le cabillaud. Dans les deux premiers cas, il s'agit d'espèces que l'on trouve rarement dans les eaux communautaires. Pour le cabillaud, la production française est très insuffisante, avec 16 093 tonnes en 1994, alors que la seule consommation à domicile représentait 37 290 tonnes, auxquelles il faut ajouter les besoins de la consommation hors foyer et des industries de transformation.

Le thon constitue un cas particulier. C'est l'espèce la plus importée en volume, avec 104 500 tonnes en 1995, la plus produite en France (178 000 tonnes) et la plus exportée (174 236 tonnes). Les exportations concernent essentiellement des produits congelés à destination des conserveries étrangères et du frais (thon germon, thon rouge) et les importations des conserves en provenance de Côte d'Ivoire, du Sénégal et de Madagascar. La balance commerciale pour le thon est fortement déficitaire. Le déficit s'est aggravé depuis 1995 en raison notamment de la forte hausse du prix des importations de conserves.

Concernant la géographie des échanges français, les évolutions sont moins tranchées : l'Union européenne reste le premier partenaire de la France à l'exportation comme à l'importation. La France continue par ailleurs à jouer un rôle de pays intermédiaire en Europe : importation de produits en provenance d'Europe du Nord (Danemark, Royaume-Uni, Pays-Bas) et exportation vers l'Europe du Sud (Espagne, Italie). Les autres pôles principaux d'échange sont l'Afrique et l'Asie.

Les évolutions les plus frappantes concernent la montée de certains pays d'Amérique du Sud, comme le Chili, qui deviennent fournisseurs de la France (la part de l'Amérique du Sud est passée de 4 % à 6 % entre 1988 et 1994 dans les importations françaises).

On observe, de façon symétrique, le développement de certains marchés à l'exportation pour la France (l'Asie et l'Afrique), alors que ces derniers étaient jusque là principalement fournisseurs. Ceci se traduit par une réduction de la concentration géographique des exportations françaises : la part des cinq premiers pays clients 13 ( * ) est passée de 74 % en 1991 à 62 % en 1995.

Au-delà de l'accroissement sensible du commerce international, il est important de souligner que c'est un commerce intra-branches qui s'effectue entre les pays, voire, mais d'une façon moins systématique, un commerce entre « semblables ». Yves Perraudeau constate ainsi que « les principaux pays exportateurs sont aussi les principaux importateurs » .

L'analyse des flux d'importation français montre qu'il n'est pas possible de se priver de cette source d'approvisionnement, mais qu'il faut reconnaître leur effet sur la baisse des prix, notamment pour les espèces internationalisées, comme le thon ou le cabillaud. Une étude économétrique 14 ( * ) concluait « qu'en l'absence d'importation de cabillaud frais, le prix de ce poisson en France, au premier trimestre 1986, aurait été de 16 % supérieur à celui observé » . Il y a, dans ce cas, convergence des prix nationaux vers un prix défini internationalement.

D'une manière générale, l'augmentation de la pénétration du marché intérieur, liée à la croissance de la demande, s'est traduite par des pertes de marché sur certains points forts 15 ( * ) . La part des produits frais dans les exportations diminue depuis 1992. De 42 % en 1992, elle est passée à 30 % en 1995. Et inversement, la part des produits frais dans les importations a augmenté de 17 % en 1992 à 23 % en 1995. D'autres espèces connaissent cependant des évolutions plus positives, comme les crustacés et les mollusques, qui restent certes très dépendants des importations, mais pour lesquels la compétitivité ne se dégrade plus. Enfin et surtout, les évolutions les plus encourageantes sont observées pour les poissons surgelés et plus généralement pour l'ensemble des produits transformés.

En conclusion, des changements semblent se profiler quant à la place de la France dans le commerce international des produits de la mer. Ces changements sont essentiellement liés à la croissance des produits transformés dans la production et les exportations françaises. Cette spécialisation naissante nécessitera des adaptations de la part des acteurs de la filière et une vigilance quant à la compétitivité, afin d'asseoir la place du secteur français dans la concurrence internationale.

Les importations composent un complément indispensable à la production nationale. Il ne semble pas pertinent de chercher à en réduire les flux, mais plutôt de viser une politique de différenciation des sources d'approvisionnement des produits proposés aux consommateurs et de chercher une source de profit dans la transformation des produits d'importation à bas prix en vue de leur réexportation.

b) Les fluctuations monétaires

Comme pour de nombreuses matières premières, les fluctuations monétaires intervenues ces dernières années au sein de l'Union européenne ont considérablement aggravé les déséquilibres constatés dans les échanges de produits de la mer entre États membres. Elles ont eu pour conséquence immédiate de privilégier certains pays, par rapport à d'autres, pénalisés par une monnaie surévaluée en termes effectifs, comme la France.

Les flux d'exportation de produits de la pêche français sont tournés pour une part importante (environ le tiers de la production nationale) vers l'Espagne et l'Italie. Ces marchés, très rémunérateurs jusqu'à une période récente, sont traditionnellement demandeurs de qualité. Les dévaluations monétaires intervenues en Espagne et en Italie ont donc gravement affecté la compétitivité de la production nationale. Dans le même temps, la livre britannique permettait aux produits originaires de Grande-Bretagne, principal fournisseur de la France, à la fois d'accentuer leur pénétration sur le marché français et de concurrencer les exportations vers ces pays du Sud de l'Europe. Les importations en provenance de la Grande-Bretagne sont constituées principalement de saumons, de langoustines, de coquilles St Jacques et de baudroies. Selon les données du FIOM, les réductions du prix moyen, dues à la dépréciation de la livre, ont été de 8 % pour la langoustine, 15 % pour la coquille St Jacques et 16 % pour la baudroie. De plus, du fait de la concurrence des produits britanniques, la perte de chiffre d'affaires réalisé à l'exportation en Espagne sur certaines espèces est importante : -37 % pour le merlu, -30% pour la baudroie.

La perte estimée du chiffre d'affaires à l'exportation vers l'Espagne pour la période 1991-1994 a ainsi été de 17 %, pour une baisse du prix moyen de 31%. Pour le marché italien, sur la même période, la perte de compétitivité de la production française s'est traduite par une diminution du prix moyen de l'ordre de 26 % et par une forte réduction des volumes exportés (-34%), provoquant une baisse importante du chiffre d'affaires réalisé par les entreprises françaises d'exportation (-52%).

La surévaluation du franc contre les devises espagnoles, italiennes et britanniques était importante en 1995 (de 15 % et 35 % au début de l'année 1995, selon la Société française d'assurance crédit (SFAC)). Le jeu de la concurrence par rapport aux clients étrangers est donc faussé par cette distorsion de change, qui avantage notamment les produits d'importation britanniques (importations dites « sauvages » 16 ( * ) de tourteaux et de langoustines d'Écosse, de saumon irlandais...). Les niveaux de la livre et la peseta ont récemment remonté et jouent moins en défaveur des producteurs français

2.3 Il en est résulté une baisse générale des cours à la première vente

La baisse des prix du poisson, malgré la raréfaction globale de la ressource, est plus ou moins vérifiée selon les espèces et les périodes. Toutefois, la cyclicité des prix caractérise de nombreuses matières premières (sucre, café, céréales), sans que cela conduise à des crises. Dans le secteur des pêches, la situation financière des entreprises était déjà fragile et la baisse des prix à précipité les cessations de paiement et les faillites.

Évolution des prix moyens des produits de la mer depuis 1980 sous criée (hors culture marine) .

1980

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Prix F/kg

12,00

11,78

10,89

11,05

10,58

9,68

9,56

9,66

(Source Ministère de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation).

Autour de la baisse tendancielle du prix du poisson, il existe des variations brutales et ponctuelles qui peuvent faire descendre les prix en dessous du seuil moyen de rentabilité, comme en 1993 et 1994 pour la pêche fraîche française. On peut noter la récente remontée des cours depuis 1995, confirmée en 1996.

Les modalités actuelles d'adaptation des producteurs à ces évolutions traduisent le manque de rentabilité de nombreuses activités et l'ampleur des difficultés rencontrées par les pêcheurs. Elles se manifestent par une augmentation sensible du nombre de jours passés en mer, destinée à compenser la baisse des prix, et par le lancement de campagnes de reconversion sur de nouvelles pêches, selon un objectif de recherche de nouveaux débouchés.

Un problème particulièrement important découle de l'opposition entre la gestion des stocks selon la politique communautaire et le principe, ancré dans l'organisation du marché, de liberté d'approvisionnement du marché. Alors qu'autrefois les pertes dues à un fléchissement des prix pouvaient être compensées par une augmentation des tonnages débarqués, il n'est plus possible de raisonner ainsi du fait des limites posées par les quotas et la ressource elle-même.

Les pêcheurs incités à pêcher plus, donc plus longtemps, pour compenser le manque de prix, courent le risque, outre de voir s'aggraver l'état des stocks exploités, d'accélérer le rythme de consommation des quotas au cours de l'année civile. Les fermetures de pêche de plus en plus courantes, dès l'été ou l'automne, sont révélatrices de cette tendance. Depuis le 25 juillet 1997, les pêcheries de sole, de plie et de maquereau sont fermées dans certaines zones du CIEM 17 ( * ) .

D'une manière générale, l'aggravation des conditions de mise en marché à la première vente est autant à rechercher dans l'internationalisation du marché des produits de la mer, que dans la politique de surinvestissement de la décennie 1980 et les lacunes du système de commercialisation de la production nationale.

Importations françaises de produits de la mer par espèce en 1995

Exportations françaises de produits de la mer par espèce en 1995

CHAPITRE III - LE CADRE REGLEMENTAIRE DE LA POLITIQUE DES PECHES

1. La politique commune de la pêche

Depuis 1970, la politique du Gouvernement français s'inscrit dans le cadre de la Politique Commune de la Pêche (PCP) adoptée par la Communauté puis l'Union européenne. Il y a donc eu transfert de compétences des États membres, en matière de pêche. Désormais, toutes les mesures prises par les États membres pour compléter ou dépasser la PCP doivent être conformes au droit européen et obtenir l'approbation de la Commission.

1-1 La protection des ressources

Cette politique comprend quatre volets : une politique commune de protection et de conservation des ressources, une politique structurelle, une organisation commune des marchés et un volet sur les accords avec les pays tiers qui ne sera pas traité dans le rapport.

La politique commune de protection et de conservation des ressources repose sur le principe d'égalité des conditions d'accès à la ressource pour tous les ressortissants de l'Union. Elle comprend des règles d'utilisation et de répartition des ressources, des mesures techniques de conservation et des dispositions particulières pour la pêche côtière. Ces règles concernent pour l'essentiel :

- l'établissement de TAC (totaux admissibles de captures) et leur répartition en quotas nationaux. Les TAC reposent en partie sur des avis scientifiques et sont renégociés chaque année. La répartition sous forme de quotas entre États membres se fait conformément au principe de stabilité relative 18 ( * ) ;

- des mesures techniques de conservation (réglementation des engins de pêche pour en augmenter la sélectivité, fixation de périodes de pêche, de tailles minimales de capture pour certaines espèces, etc.) Il s'agit de protéger les juvéniles 19 ( * ) et d'assurer le renouvellement des stocks ;

- depuis juin 1995, des niveaux d'effort de pêche sont fixés pour certaines espèces sensibles pour chaque État membre en fonction du type d'engin utilisé et de la zone de pêche ;

- la commission a également instauré, en juin 1995, un système de permis de pêche spéciaux pour certaines espèces, comme les coquilles Saint-Jacques ou pour certains crustacés, afin de limiter l'effort de pêche sur ces espèces.

1.2 La politique structurelle

Elle a pour objectif de restructurer, moderniser et développer le secteur de la pêche et de l'aquaculture. Elle vient aussi compléter la politique de gestion de la ressource, en cherchant à adapter les capacités de capture à la disponibilité en ressource. Cette politique s'appuie essentiellement sur les Programmes d'orientation pluriannuels (POP), qui prévoient des réductions de flottilles. En contrepartie, l'Union européenne verse des compensations financières aux marins qui décident de quitter l'activité. En avril 1997, le quatrième POP, couvrant la période 1997-2002, a été adopté.

Parallèlement, l'Union accorde aussi des aides à la construction et à la modernisation des navires de pêche. Les projets doivent aller dans le sens d'un accroissement de la sélectivité des engins, l'utilisation de meilleures techniques de pêche et l'amélioration des conditions de conservation des produits à bord.

Les aides à la modernisation peuvent aussi concerner les infrastructures portuaires, afin d'améliorer les conditions de débarquement et de première vente, ainsi que les secteurs de la transformation et de la commercialisation des produits de la mer.

Enfin, la commission aide les actions qui cherchent à promouvoir de nouveaux débouchés (certification de la qualité et labellisation des produits, campagnes de promotion, études de marché, etc.).

Les aides structurelles représentent 52 % des crédits communautaires « pêche », soit 451 millions d'écus en 1996 pour tous les pays membres. La France a reçu 228,1 millions d'écus, pour la période 1994-1999, par l'intermédiaire de l'IFOP (Instrument financier d'orientation pour la pêche) et 33 millions d'écus dans le cadre du programme PESCA 20 ( * ) . L'IFOP est une enveloppe financière permettant d'apporter un soutien à tous les acteurs de la filière. L'administration du pays concerné et le pêcheur ou l'entreprise de mareyage ou de transformation doivent toujours participer au financement du projet, en fonction de leur capacité. L'IFOP est doté, pour la période 1994-1999, d'un budget de 2,7 milliards d'écus.

Le programme PESCA favorise les projets qui visent à la rationalisation des circuits de commercialisation, au perfectionnement professionnel ou au recyclage des marins pêcheurs, à l'amélioration des services aux entreprises, à l'étude et à la recherche de marchés et de nouveaux débouchés. Les aides peuvent aller à des collectivités locales, des chambres de commerce, des acteurs économiques individuels ou entreprises ou des marins pêcheurs. Pour 1994-1999, le programme PESCA est doté d'un budget de 250 millions d'écus pour l'ensemble des pays membres.

La France est le troisième pays, derrière l'Espagne et l'Italie, pour le montant des aides structurelles reçues de l'Union européenne.

Ce volet de la PCP cherche aussi à orienter l'activité vers de nouvelles espèces en développant les pêches expérimentales, les opérations de redéploiement, l'association temporaire d'entreprises et les sociétés mixtes.

1.3 L'organisation commune des marchés (OCM)

Les principaux objectifs de l'OCM sont de stabiliser les marchés des produits de la mer, garantir la sécurité des approvisionnements, assurer des prix raisonnables aux consommateurs et améliorer les revenus des producteurs. Elle doit assurer la transparence des échanges, renforcer la solidarité des producteurs, garantir la libre circulation des produits et organiser la compétition internationale dans le secteur des pêches.

L'OCM repose sur :

- l'instauration de normes communes de commercialisation (catégories de qualité, de taille ou de poids, emballage, etc.) ;

- les organisations de producteurs depuis 1971, pour intervenir sur le marché à la première vente ;

- la mise en place d'un régime commun des prix (prix d'orientation pour les principales espèces, prix de retrait communautaires, indemnités compensatoires pour certaines espèces (sardine, thon, ...), primes de stockage). Ces prix sont renégociés chaque année ;

- un régime d'échange avec les pays tiers.

L'OCM a été confortée en novembre 1994, à la demande de la France, avec la reconduction du régime des prix minima pour six espèces d'importation (lieu noir, lieu d'Alaska, merlu, cabillaud, églefin, lotte), afin d'éviter l'effondrement des cours de ces espèces, en raison de l'entrée massive sur le territoire français de produits à bas prix. L'Union européenne a aussi adopté un règlement sur les débarquements directs des navires battant pavillon d'un pays tiers dans un des ports communautaires. Ce règlement vise à renforcer la préférence communautaire et prévoit l'application des mêmes mesures sanitaires et de contrôles aux produits communautaires et aux produits tiers. Cependant, les États membres ont pour seule obligation de respecter les normes communes de commercialisation.

2. Les mesures nationales

Une fois ces mesures adoptées par l'Union européenne, chaque État membre doit les appliquer. Les Gouvernements sont compétents pour prendre toutes les mesures nécessaires au respect de la législation européenne, en vertu du principe de subsidiarité 21 ( * ) . En France, les interventions de l'État n'ont concerné, pendant longtemps, que l'amont de la filière, pour assurer la modernisation de la flottille et lutter contre la diminution des ressources. Depuis la crise des années 90 et la mutation profonde que traverse ce secteur, le Gouvernement a pris conscience de la nécessité de restructurer l'ensemble de la filière

2.1 La gestion de la ressource

Les dispositions générales concernant la gestion de la ressource en France sont fixées par le décret n° 90-94 du 25 janvier 1990 « pris pour l'application de l'article 3 du décret du 9 janvier 1852 modifié, fixant les conditions générales d'exercice de la pêche maritime dans les eaux soumises à la réglementation communautaire de conservation et de gestion » . Ce décret traduit en droit français les mesures fixées par l'Union européenne. Il instaure des mesures techniques pour réglementer l'accès à la ressource et limiter les captures.

a) Les mesures techniques

Ces mesures visent à assurer le renouvellement des ressources halieutiques et la protection des écosystèmes marins. Elles concernent pour l'essentiel :

- la fixation des caractéristiques des navires (longueur, puissance motrice, tonnage), dans certaines zones de pêche ou pour certaines espèces, par arrêté du préfet de région ;

- la limitation du nombre d'engins de pêche autorisés par navire ou par pêcheur, soit dans certaines zones, soit pour la pêche de certaines espèces ,

- la fixation des caractéristiques et des conditions d'utilisation des engins de pêche, la détermination des engins autorisés, la fixation du maillage des filets et de la longueur des filets dérivants ;

- la fixation de tailles minimales ou de poids minimum de commercialisation pour les principales espèces commerciales ;

- la détermination de zones de pêche (l'usage des filets remorqués est interdit dans la zone des 3 milles), détermination de réserves ou de cantonnements ;

- la fixation de périodes ou de temps de pêche, par zone ou par métier de pêche ;

- la fixation de périodes de fermeture de la pêche ;

- la limitation du nombre de navires (régime de licences, permis de mise en exploitation).

Ces dispositions peuvent être différentes suivant les régions. Ces mesures ne sont pas permanentes : elles peuvent être prises seulement pour une campagne de pêche et peuvent ne concerner que certaines espèces ou certains métiers de pêche

b) La limitation du volume des débarquements

Une fois les TAC (totaux admissibles de capture) fixés par le Conseil des ministres européens, ils sont répartis en quotas nationaux. La répartition dépend des captures des trois dernières années, des compensations accordées à certains États (Irlande, Grande-Bretagne) et du jeu des négociations entre les États membres. La France était globalement satisfaite des négociations sur les TAC et quotas 1997. La plupart des quotas sont restés stables, comme celui de l'anchois, de la langoustine ou du cabillaud en Manche et mer du Nord. Certains ont diminué légèrement, comme la sole : le quota de la France a perdu 310 tonnes. La commission européenne voulait fixer le quota de sole français à 3 665 tonnes, mais le ministre français des pêches a réussi à obtenir 4 955 tonnes. Le quota de baudroie a augmenté, de 23 480 tonnes à 26 100 tonnes. La commission a de plus en plus mal à se mettre d'accord avec les États membres et à faire accepter ses réductions de captures et de flottilles.

Ensuite le système d'allocation de ces quotas de pêche varie beaucoup d'un État à l'autre. En France, le décret du 25 janvier 1990 prévoit la répartition des quotas, par le ministre chargé des pêches, « pour une période donnée, par zones géographiques, par types de pêche, par groupements de navires ou par navire » . En pratique, c'est le Comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM), sous la tutelle de l'État, qui répartit les quotas. Une commission « flottilles et quotas », qui regroupe des organisations de producteurs, des membres de l'organisation professionnelle et des administrateurs, a été créée à cet effet.

Le quota national pour une espèce est divisé en sous-quotas par façade maritime, à l'exception de la façade méditerranéenne, qui n'est pas concernée par les TAC. Les sous-quotas sont ensuite distribués par OP, groupe d'OP ou par quartier maritime. Les critères de partage sont les apports antérieurs et les caractéristiques des navires. Ces critères ne prennent pas suffisamment en compte le recul de la pêche industrielle par rapport à la pêche artisanale. Depuis quelques années, la flotte industrielle a fortement décliné. Les critères de partage des sous quotas ne sont pas renégociés chaque année : ils sont figés depuis le début des années 90 par décret, et continuent d'attribuer une part plus importante de quotas à la flotte industrielle, qui participe aujourd'hui pour moins de 40 % au volume des débarquements. Ceci a entraîné des conflits, ces deux dernières années, entre la FEDOPA (fédération des organisations de producteurs artisanales) et les organisations industrielles comme le FROM 22 ( * ) Nord ou le FROM Bretagne La FEDOPA remet en cause les bases de la répartition entre pêche artisanale et pêche industrielle et réclame de nouvelles règles de partage.

En France, il n'y a pas d'allocation individuelle par navire, contrairement à d'autres pays comme le Royaume-Uni ou les Pays-Bas et contrairement à ce que prévoit le décret du 25 janvier 1990. Une loi en préparation prévoit une allocation par organisation de producteurs pour certains stocks.

Au niveau communautaire, les TAC concernent 21 espèces. En France, seules 8 espèces sont réparties en sous-quotas : plie, sole, cabillaud, merlan, lieu noir, anchois, hareng et maquereau. Elles représentent 21 % de la production française. Il s'agit des espèces dont le quota est le plus fréquemment atteint, voire même dépassé. En 1994, seuls les quotas de sole et de maquereau ont été dépassés. Pour les autres espèces, les débarquements restent inférieurs aux quotas : ils ne sont donc pas répartis. Le Royaume-Uni est le pays le plus affecté par les surconsommations de quotas. Une fois le quota d'une espèce épuisé, la pêche doit en être interdite.

Le ministre chargé des pêches peut également fixer, par arrêté, des limitations de captures pour des espèces non soumises aux TAC et quotas, lorsqu'elles sont menacées de surexploitation, ou lorsque l'équilibre économique de la pêcherie est menacé. Les limitations de captures concernent aussi les prises accessoires, c'est-à-dire les espèces qui ne sont pas directement visées, mais qui se retrouvent prises dans les filets ou par les autres engins de pêche. Enfin, des plans de capture peuvent être mis en place par les organisations de producteurs ou les Comités locaux des pêches maritimes (CLPM) pour gérer les ressources. Dans la pratique, les restrictions de pêche mises en place par les OP ou les CLPM, ont souvent plus pour objectif de gérer les aléas de la production et du marché que de préserver la ressource. Par exemple, en mars 1996, face à la mévente et à la baisse des prix sous les criées du bar, les organisations de producteurs ont limité les captures à 2 tonnes par bateau. Même chose dans le port de Sète, où les débarquements de sardines sont limités, en été, à 3 tonnes par chalutier et par jour pour éviter que le cours de la sardine ne chute.

Enfin, la France est membre d'un certain nombre d'organisations internationales. Par conséquent, elle doit aussi prendre en compte les recommandations de ces organismes, comme celles de l'ICCAT (Comité international pour la conservation des thonidés de l'Atlantique) sur les captures de thons. L'ICCAT recommande, par exemple, pour le thon rouge, d'éviter les captures de poissons de moins de 1,8 kg (c'est-à-dire âgés de moins d'un an), de limiter les captures de thons de moins de 6,4 kg et de réduire de façon significative les prises par rapport aux niveaux de captures de 1993 et 1994.

2.2 La gestion de flottilles

Le Gouvernement français cherche à réduire l'effort de pêche, conformément aux POP européens et, en même temps, à assurer le renouvellement et la modernisation de la flottille de pêche française, pour garantir sa compétitivité.

a) L'application des POP et les sorties de flotte

La politique française s'inscrit dans le respect des Programmes d'orientation pluriannuels (POP) européens, instaurés en 1983. Les POP cherchent à favoriser l'adéquation entre les capacités de capture et le volume des ressources halieutiques disponibles, tout en assurant l'équilibre entre États membres. Le critère retenu est la puissance motrice globale exprimée en kW. Trois POP ont déjà été mis en place. Le POP I, couvrant la période de 1983 à 1986, a été peu respecté. Il avait pour objectif de stabiliser l'effort de pêche. Mais la puissance motrice des flottilles européennes n'a cessé d'augmenter durant cette période. Le POP II (1987-1991) a imposé des règles plus précises, afin de réduire l'effort de pêche : 3 % pour le tonnage et 2 % pour la puissance motrice.

Fin 1991, seuls 6 pays respectaient ces exigences : France, Allemagne, Italie, Danemark, Portugal, Espagne. Le Royaume-Uni, l'Irlande, les Pays-Bas et la Belgique étaient très en retard. En cas de dépassement, par un pays, des objectifs du POP, l'Union européenne bloque le versement des aides au renouvellement de la flotte. Ces sanctions ne sont pas suffisamment sévères ni dissuasives. Le Royaume-Uni, les Pays-Bas et l'Irlande accordent très peu d'aides à l'investissement à leurs pêcheurs. Ils ne se préoccupent donc pas des conséquences financières de leur non-respect des POP. D'autre part, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, l'âge moyen des flottes de pêche est plus élevé. Les investissements portent davantage sur les équipements techniques des navires que sur la construction de nouvelles unités.

Le POP III (1992-96) était plus contraignant et tendait à segmenter la flotte par technique et par espèce. Fin 1996, la plupart des pays sont en retard par rapport aux objectifs du POP 3. La France avait un objectif de réduction de 771 341 kW. Fin 1996, il ne lui restait que 20 000 kW à retirer. En termes de réduction du tonnage, seuls quatre pays respectaient les objectifs du POP en 1996 : Danemark, Grèce, France et Portugal. Les pays les plus en retard étaient : les Pays-Bas, le Royaume-Uni et l'Espagne, qui devaient encore retirer, en juillet 1996, respectivement : 88 737 tjb, 70 217 tjb et 28 707 tjb. En termes de puissance, quatre pays étaient encore en retard en juillet 1996 : les Pays-Bas, le Royaume-Uni, l'Italie et la France Les deux premiers pays avaient encore plus de 100 000 kw à retirer et l'Italie 48 997 kw

En avril 1997, un quatrième POP (1997-2001) a été adopté par le Conseil des ministres, alors que la France et le Royaume-Uni ont voté contre. La France estime que les nouvelles réductions prévues par l'Union européenne ne prennent pas suffisamment en compte les efforts déjà fournis par certains États membres, les spécificités de chaque flottille et le fait que certains sous-exploitent leurs quotas de pêche, alors que d'autres les surexploitent. La France sous exploite une grande partie de ses quotas et une part importante de ses captures est constituée d'espèces qui ne sont pas visées par les objectifs de réduction de mortalité. Le POP IV s'appuie sur un rapport scientifique (Rapport LASSEN), une large consultation des professionnels et une étude d'impact. Il prévoit une nouvelle réduction de l'effort de pêche de 30 % pour les espèces qui montrent des signes d'épuisement et de 20 % pour les espèces en surexploitation (maquereau, merlu, baudroie, langoustine). Cela correspond à une diminution de la capacité de pêche française de 6 %, soit encore près de 60 000 kW. La puissance française est, aujourd'hui, de 991 561 kW.

En France, le mouvement de réduction de la flotte par l'application des POP a commencé en 1985. Entre 1983 et 1996, la flotte est passée de 11 660 à 6 509 unités, soit une réduction de 44 %. La puissance motrice a continué d'augmenter jusqu'en 1989. Depuis, elle a baissé de 17 %. Dès le deuxième POP, le régime des permis de mise en exploitation (PME) a été mis en place, par une décision du Comité central des pêches maritimes en septembre 1988, pour adapter l'évolution de la flottille aux objectifs du POP II. Les PME reposent sur un principe de numerus clausus. Ils contraignent les entrées de flotte à une sortie de puissance au moins équivalente. À partir de 1990, les PME permettent d'équilibrer les entrées et sorties de flotte en terme de puissance installée. Les sorties volontaires de flotte peuvent se faire suivant trois modalités : transfert vers une activité différente, exportation du navire vers un pays tiers ou démolition.

À partir de 1991, les PME sont accompagnés de plans de sorties de flotte qui visent à encourager les sorties de navires par le versement d'aides à l'arrêt définitif. Le plan Mellick, mis en place le 13 mars 1991, prévoyait la sortie de 100 000 kW (10 % de la puissance installée à bord des navires). Ce plan a concerné 975 navires. Ses résultats ne font pas l'unanimité. Le rapport d'évaluation de l'Ifremer 23 ( * ) montre qu'il a parfois permis d'éliminer des navires anciens pour racheter, par la suite, des navires plus performants. Dans un premier temps, le plan Mellick a donc eu un effet inverse de celui recherché. D'autre part, la réduction de la puissance motrice d'un navire ne suffit pas à réduire son effort de pêche. Il faut également tenir compte du progrès technique et d'autres facteurs. Ainsi, la puissance de traction d'un chalutier ne dépend pas que de la puissance du moteur, mais aussi du taux de réduction moteur/hélice, etc. Le fait est que le critère de la puissance des moteurs est le seul à être facilement contrôlable. Il y a donc un arbitrage à faire entre le degré de précision de la restriction de l'effort de pêche et la facilité de contrôle et d'application de cette restriction.

Depuis 1991, des plans de sortie de flotte sont redéfinis chaque année. En 1995, le plan a permis la sortie de 200 navires, dont 40 % de chalutiers, soit une réduction de puissance de 20 151 kW. Pour la réalisation de ce plan, l'État a versé 16,5 millions de francs, auxquels viennent s'ajouter 16 millions de francs de l'Union européenne, plus des aides régionales et départementales.

b) Les aides à la construction et à la modernisation

Parallèlement au versement des aides à l'arrêt définitif pour réduire l'effort de pêche, le Gouvernement français et l'Union européenne, dans le cadre de l'IFOP, accordent des subventions à la construction et à la modernisation des navires. Ces aides ont pour but de maintenir la flotte à un niveau satisfaisant de compétitivité et de performance par rapport aux flottilles étrangères. Même si l'Union européenne cherche à réduire les flottilles de pêche, il est indispensable d'assurer le renouvellement et la modernisation des unités restantes. Ces nouveaux navires doivent être plus polyvalents et plus sélectifs, donc plus respectueux des ressources halieutiques (possibilité de transférer l'effort de pêche d'une espèce sur l'autre, moins de captures de juvéniles, moins de rejets, etc.).

Les aides nationales à la construction ont considérablement diminué depuis 1992, tout comme les aides européennes. Pour 1995, les aides à l'investissement pour les flottes de pêche et les entreprises de culture marine, au chapitre 64-36 de la loi de finance, « Pêches maritimes et cultures marines

- Subventions d'équipement », se sont élevées à 25 millions de francs et 40 millions de francs avec les investissements à terre. Ces aides ont toujours été supérieures à 100 millions de francs jusqu'en 1991. D'ailleurs, de nombreux bateaux performants qui ont été construits dans les années 1986-1991 ne trouvent plus d'armateurs en raison des difficultés de la pêche. Pour le Gouvernement, il n'est plus justifié d'aider massivement à la construction et la modernisation des navires. Le marché de l'occasion doit être encouragé. Les aides à la construction ont même été gelées momentanément en avril 1996.

Évolution des subventions à la modernisation
des entreprises de pêche (chapitre 64-36).

La flottille de pêche française semi-hauturière ou hauturière (supérieure à 25 mètres) est effectivement jeune et moderne. Mais ce n'est pas le cas pour les petites unités de pêche artisanale, qui représentent 80 % de la flotte de pêche française. En effet, 65 % des unités de 12-25 mètres ont plus de 10 ans d'âge et les moins de 12 mètres ont souvent plus de 25 ans. La flotte artisanale risque donc d'être confrontée très rapidement à un problème d'obsolescence.

On peut constater aussi qu'il y a un manque de transparence et de contrôle dans l'octroi des aides, principalement en raison du monopole du Crédit Maritime. Les prix des navires sont tellement élevés que les pêcheurs doivent beaucoup emprunter et fortement s'endetter. Ils sont obligés de passer par certains organismes prêteurs, qui sont aussi chargés de monter les dossiers d'aide. Les pêcheurs en deviennent dépendants. Un fileyeur de 12 m coûte environ 1,5 million de francs, un chalutier hauturier de 25 m : 12 millions de francs et un thonier de plus de 65 m : 75 millions de francs. Progressivement, seules les entreprises de pêche pourront acheter des navires et les patrons-pêcheurs artisans risquent de disparaître.

c) Les aides accordées au secteur des pêches

Avec la crise, la situation financière des armements est devenue préoccupante. Les fonds propres des navires étaient faibles et la part de l'endettement court et moyen terme était élevé. En 1993, le niveau moyen des fonds propres des 12-25 m était même négatif : -167 KF pour une dette totale de 1,6 million de francs. La crise a également montré que le cadre financier et comptable des entreprises était inadapté. Les défauts découlent du statut juridique de l'entreprise individuelle : absence d'obligation de constituer des réserves lors des années de forte activité et de haute rémunération, confusion des caisses et possibilité d'effectuer des prélèvements sur le compte de l'exploitant en sus de la rémunération du patron à la part

Face à ces difficultés et à la mobilisation des pêcheurs, en février - mars 1993, qui a conduit au blocage des gares et des aéroports dans le Finistère, à la destruction du pavillon de marée de Rungis et aux grandes manifestation de Quimper, Nantes et Bayonne, le Gouvernement français a dû prendre des mesures d'urgence exceptionnelles dans le cadre du contrat de progrès pour la pêche signé le 28 mai 1993. Ces mesures ont conduit au plan de restructuration financière de la pêche artisanale adopté en février 1995.

Les mesures adoptées se rangent en trois catégories

1/ Certaines ont apporté une compensation ponctuelle à la crise de 1992-93 :

- versement d'une aide compensatoire de 3 024 francs par marin embarqué, soit 42,5 millions de francs versés par l'État à 5 800 entreprises de pêche ;

- aide d'urgence aux familles de 10 millions de francs, versée en deux fois. Une somme d'environ 2 500 francs a été versée aux familles les plus en difficulté. Ces aides ont concerné entre 5 000 et 6 000 familles, en fonction de leurs revenus et du montant de leurs dettes.

2/ Certaines ont apporté un allégement des charges sociales :

- exonération totale des cotisations d'allocations familiales pour les salaires inférieurs à 1,1 SMIC et de 50 % pour les salaires compris entre 1,1 et 1,2 SMIC (soit un effort financier de 29 millions de francs). Ces exonérations ont concerné près de 7 000 marins ;

- réduction à 17,6 % du taux de cotisation ENIM de la part armatoriale des charges sociales pour les navires artisans de 12 à 25 m. Le taux était précédemment compris entre 18,55 et 25 %, soit un allégement de 30 % des cotisations patronales, représentant une dépense de 42 millions de francs. Cet allégement a concerné 1 500 navires. En mars 1994, cette mesure a été étendue à tous les autres armements de pêche. Les taux sont passés de 35,65 % à 17,6 %, soit une réduction de 50 % des charges sociales et une perte de recettes pour l'ENIM estimée à 104 millions de francs comblée par l'État ;

- allégement de 50 % des cotisations sociales des marins du 1 er janvier au 1 er juin 1994. Pour la pêche artisanale, mise en place le 1 er juin d'une caisse mutuelle de garantie des salaires (le compte épargne navire 24 ( * ) : 1,7 million de francs), permettant de garantir un revenu minimum de 5 000 francs aux pêcheurs. Cet allégement a représenté une dépense de 83,5 millions de francs ;

- réduction des cotisations sociales pour les navires de 10 à 30 tjb (tonneau de jauge brute) qui, mis en service avant 1986, étaient taxés en fonction de leur tonnage, soit une réduction de 17,3 % à 8,45 % pour les marins et de 16 % à 7,15 % pour le propriétaire. Cette mesure est survenue après juin 1994 et a représenté une dépense budgétaire de 5 millions de francs et a concerné 289 navires ;

3/ D'autres mesures ont enfin apporté un allégement des charges financières avec le contrat de progrès pour la pêche signé le 28 mai 1993 :

- réduction des charges financières, aussi bien pour la pêche industrielle que pour la pêche artisanale, avec le réaménagement des emprunts en cours, l'allongement de la durée des prêts bonifiés pour les plus de 12m jusqu'à 3 ans supplémentaires. Le taux des prêts bonifiés a été abaissé d'un point. Pour la pêche artisanale et l'équipement des ports de pêche, le taux est passé de 6 à 5 % et pour la pêche industrielle de 8 à 7 %. L'État a d'autre part pris en charge la bonification pour les prêts auparavant non bonifiés des plus petits bateaux, et a maintenu la bonification des armements industriels renégociant leurs prêts, pour un montant total de 240 millions de francs, au lieu des 180 millions initialement prévus ;

- renforcement des fonds propres des entreprises de pêche : 90 millions de francs financés par l'État à cet effet, et 90 millions par les régions ;

- versement du solde des crédits prévus pour la construction et la modernisation des navires (61 millions de francs débloqués).

L'objectif de ces mesures était de rétablir la situation financière des entreprises de pêche et de renforcer leur compétitivité. Certaines de ces mesures ont fait suite au rapport sur la situation financière des armements à la pêche artisanale, commandé par le gouvernement en 1994. Ce rapport, réalisé conjointement par l'Inspection générale des finances et l'Inspection générale des services des Affaires maritimes, a montré que la situation financière de la pêche artisanale était très contrastée suivant les types de bateaux, les ports, les espèces pêchées et les métiers pratiqués. Les fileyeurs bénéficient d'une situation plus favorable que les chalutiers, car leurs charges fixes sont moins élevées. De même les chalutiers pélagiques sont en situation plus favorable que ceux qui pratiquent le chalutage de fond. Les charges fixes d'un chalutier de fond représentent 45,2 % de son chiffre d'affaires, soit

1 707 KF en 1993, contre 38,5 % du CA pour un chalutier pélagique, soit 1 110 KF et 32,2 % du CA pour un fileyeur, soit 1 055 KF en 1993. En outre, les navires orientés vers les espèces communes résistent moins bien, car ces dernières sont plus difficiles à valoriser

Le rapport conclut que les bateaux de moins de 12 mètres ne connaissent pas de difficultés particulières. Cette situation favorable provient d'une bonne valorisation des produits (il s'agit d'espèces de haute valeur marchande et de grande fraîcheur), de l'augmentation des captures de certaines espèces démersales, de la faiblesse des charges d'exploitation et du fait que les investissements initiaux ont été amortis. Pourtant, il s'agit d'une flottille assez âgée.

Pour la flotte des 12-25 mètres, la situation est plus difficile. Un quart des bateaux, soit 373 navires, connaît de réelles difficultés financières pouvant compromettre la pérennité de l'entreprise. Une centaine d'entre eux n'était plus viable après la crise et ces navires ont dû quitter l'activité. Pour ces 373 navires, le montant moyen de la dette totale était 2,8 millions de francs en 1993. 16 % de ces navires avaient un excédent brut d'exploitation négatif, 26 % un EBE inférieur à 5 % du CA et les autres : un EBE inférieur à 10 % du CA. Les frais financiers se situaient en moyenne à 80 % de l'EBE et même à plus de 100 % pour 37 % de ces navires en difficulté. Le rapport souligne qu'il y a une grande concentration géographique des navires en difficulté dans quatre départements principalement : Finistère (qui regroupe 40 % des navires en difficulté), Morbihan, Loire-Atlantique et Charente-Maritime. Les ports de Douarnenez, Concarneau, Le Guilvinec, Lorient et La Rochelle connaissent des difficultés importantes. En revanche, la situation est plus favorable en Méditerranée et dans le Nord. À la suite de cet audit, le "plan Puech" a été mis en place en février 1995.

d) Le nouveau plan de soutien pour la pêche artisanale, dit "plan Puech"

Il a été adopté le 16 février 1995. Il comporte quatre grandes séries de mesures, pour un montant total estimé à plus de 300 millions de francs par la Direction des pêches et des cultures marines, partagés entre l'État, les collectivités territoriales et le Crédit maritime.

- améliorer la situation des marins, en prolongeant la durée de prise en charge du chômage technique, lié aux intempéries et « avaries techniques » (45 millions de francs, pris en charge par l'État), en clarifiant les contrats d'engagement et la définition des charges communes, en étendant aux patrons-pêcheurs les mesures de cessation anticipée d'activité et d'allocation complémentaire de retraite (10 millions de francs) et en débloquant une nouvelle enveloppe pour les secours d'urgence aux familles sur crédits ENIM (10 millions de francs, soit 20 millions en tout pour les secours d'urgence depuis 1993) ;

- désendettement des armements en difficulté mais encore viables, pour les navires de 12-25m, acquis entre 1988 et 1991, ayant supporté une charge d'amortissement due à l'achat d'un navire ancien surcôté, par une prise en charge d'une partie du capital restant dû sur les prêts à l'acquisition. Le surcoût provient de l'instauration, entre 1988 et 1991, des permis de mise en exploitation (PME), qui obligeaient à racheter des navires anciens pour obtenir des kW à sortir de la flotte et avoir ainsi le droit de construire un bateau neuf. Ces PME ont entraîné un renchérissement du prix des navires anciens. L'aide, plafonnée à 1 million de francs, a représenté en moyenne 600 000 francs par navire. Elle a concerné 170 bateaux artisans. Pour les entreprises non viables, deux types de mesures d'apurement du passif ont été mises en oeuvre : en cas de cession du navire, prise en charge du passif hors fournisseur évalué après cession et exonération totale des plus-values ; en cas d'arrêt définitif du navire, apurement du passif hors fournisseur, quel que soit l'âge du navire ;

- conforter la situation des navires de moins de 12 m en allongeant la bonification des prêts bonifiés à 15 voire 18 ans au lieu des 12 auparavant. L'État prend en charge l'équivalent de 5 points d'intérêt pendant la période de remboursement de l'emprunt restant à courir, pour une durée maximum de 6 ans. Exonération des plus-values de cession ;

- allégement des charges portuaires, pour réduire les prélèvements au débarquement et à la première mise en vente. Le Préfet de région et les collectivités territoriales concernés doivent élaborer un plan pluriannuel de réduction des charges portuaires. Cet allégement est très variable selon les ports et leur organisme gestionnaire.

Depuis 1993, les efforts du Gouvernement pour soutenir la filière de la pêche ont été conséquents. Entre 1993 et 1996, les aides au secteur (aides au revenu, prise en charge d'intérêts bancaires, restructuration de la dette, apurement du passif ont représenté une dépense budgétaire pour l'État de plus de 800 millions de francs. En ajoutant toutes les aides pour l'exploitation des ressources ainsi que les aides aux secteurs de la commercialisation et de la transformation, ce sont 1,5 milliard de francs qui ont été dépensés par le Gouvernement pour la filière pêche, auxquelles viennent s'ajouter les aides européennes et les aides régionales.

Aides accordées aux marins-pêcheurs sur la période 1993-1995
(en millions de francs)

Type de mesures

Montant

Nombre de familles concernées

1/ Mesures ponctuelles

- aide compensatoire de 3 024,00

42,5

5800 entreprises de

francs par marin embarqué

pêche

- aide d'urgence aux familles en

20

entre 5000 et 6000

difficulté

familles de pêcheurs

Total mesures ponctuelles

62,5

2/ Aides financières

- renforcement des fonds propres

90

- bonification des taux d'intérêt

347

- versement du solde des crédits

61

prévus pour la construction et la

modernisation des navires

Total aides financières

498

3/ Allégement des charges sociales

- réduction des charges patronales

42

7000 marins

pour les navires de 12-25 m (de

18,55 % ou 25 % à 17,6 %)

- réduction des charges patronales

104

1500 navires

pour les autres armements (35,65 %

à 17,6 %)

- exonération des cotisations

29

d'allocations familiales

- allégement de 50 % des cotisations

75

sociales des marins entre le 1er

janvier et le 1er juin 1994

- réduction des cotisations sociales

5

289 navires

pour les navires de 10 à 30 tjb

(17,3 % à 8,45 % pour les marins,

16 % à 7,15 % pour le propriétaire)

- création d'un compte épargne

1,7

navire

Total charges sociales

256,7

TOTAL

817,2

(Source Direction de l'ENlM et DPMCM)

2.3 L'organisation du marché

Les interventions en faveur du marché concernent les secteurs de la commercialisation et de la transformation, et visent à améliorer l'écoulement de la production en valorisant les produits de la mer. En France, la gestion du marché se caractérise par une large utilisation des mécanismes communautaires : les organisations de producteurs doivent favoriser la concentration et la structuration de l'offre, tandis que le système de prix de retrait doit soutenir les cours à la première vente. Cette politique est ensuite complétée par des mesures nationales orientées vers l'amélioration de la qualité des structures de commercialisation et des produits de la mer.

a) Les interventions à la première vente

Ces interventions, réalisées par les OP, marquent la spécificité française dans l'application de la PCP. Les organisations françaises ont une politique forte de soutien des cours sous criée, alors que dans d'autres États membres, comme le Royaume-Uni, elles sont plus orientées vers la ressource. Il existe 30 OP en France, dont 9 sont spécialisées sur une espèce ou un produit (élevage en mer, conchyliculture...). Les plus significatives sont les 21 structures représentant la diversité des pêches sous criées.

- Les mécanismes d'intervention :

Le système des interventions permet la fixation, pour un certain nombre d'espèces (dont la liste figure dans les annexes du règlement de base marché), de prix planchers au-dessous desquels les produits débarqués par les adhérents ne sont pas vendus, mais retirés du marché. Il existe deux mécanismes principaux d'intervention à la première vente selon les espèces et les conditions du marché : le retrait et le report.

Dans le cas d'une marchandise faisant l'objet d'un retrait, la destination des produits est fixée par l'organisation de façon à ne pas entraver l'écoulement normal de la production. Par « écoulement normal », il faut entendre la commercialisation en vue de la consommation humaine en circuit direct. Les poissons retirés du marché sont donc le plus souvent orientés vers l'alimentation animale, essentiellement sous forme d'huile ou de farine de poisson.

Certains produits, notamment ceux présentant un intérêt qualitatif, peuvent faire l'objet d'une transformation et d'un report sur un second marché, afin que leur réintroduction commerciale (dans un délai minimal de 2 semaines et maximal de 6 mois) n'entraîne aucune perturbation pour la distribution des produits frais

Une aide au stockage privé est également prévue pour les produits congelés à bord des navires, ainsi que l'octroi d'une indemnité compensatoire pour les thons livrés à la transformation. Enfin, des normes de compensation existent pour deux produits : les conserves de sardines et de thon.

Le niveau des prix de retrait dépend du type d'espèces concernées. Pour les espèces « communautaires » (annexe I A et D), qui représentent 73 % des retraits, les prix de retrait sont fixés par le Conseil des ministres européens de la pêche, avec une fourchette de #177;10 % laissée à l'initiative des OP. Ils sont compensés par l'Union européenne selon une règle de dégressivité en fonction du pourcentage des retraits par rapport à la production totale commercialisée par l'OP, dans la limite de 14 %.

Pour les espèces « régionales » (annexe VI), qui représentent 20 % des retraits, les prix de retrait sont définis sur la base d'une concertation des OP, et financés par l'Union européenne à hauteur de 75 % dans la limite de 10 % des quantités commercialisées. Pour les espèces « autonomes », les prix de retrait sont fixés par l'OP elle-même et financés sur ses fonds propres. Pour les reports sur les espèces « communautaires », l'aide est fixée dans la limite de 6 % des quantités mises en vente annuellement, et pour une durée maximale de 6 mois. Il peut également y avoir des aides au stockage privé ou des compensations financières exceptionnelles, en cas de retraits importants.

En France, le pourcentage des retraits calculé sur la base des débarquements dans les criées est de 5,8 %. Une grande partie des OP ont un taux de retrait supérieur, notamment les OP méditerranéennes, basques et vendéennes. La France est le seul pays à pratiquer le système des retraits de manière aussi large, alors qu'il ne fait pas l'unanimité au sein de la profession.

Quelle que soit la conception défendue pour le soutien des cours (retrait et/ou report), les OP françaises, dans leur grande majorité, ont mis en place des politiques contractuelles pour dépasser la stricte intervention à la première vente. Elles choisissent de s'engager dans un partenariat avec des intervenants en aval de la filière (secteur de la distribution et des industries de transformation) en établissant des contrats d'approvisionnement. Outre la commercialisation effectuée en criée, les producteurs disposent, en effet, de la possibilité de vendre leur pêche par le biais de contrats à prix déterminés. Il s'agit d'un moyen de limiter les aléas de la vente aux enchères et de donner aux pêcheurs une certaine indépendance par rapport aux mareyeurs. Il est difficile de chiffrer le nombre de ces contrats, ces procédures commençant à se développer. Ainsi, PROMA (organisation de producteurs Morbihan Finistère Loire-Atlantique) a passé un contrat concernant la livraison de sardines avec Saupiquet en 1993, contrat qui est reconduit chaque année. De même COOPARMOR (organisation de producteurs des Côtes d'Armor) a établi deux contrats concernant la coquille Saint-Jacques : l'un avec un conserveur de Douarnenez (Cobreco) qui concerne la moitié de la production de la baie de Saint-Brieuc et l'autre avec le transformateur Davigel pour environ 20 t de noix congelées. Ces contrats constituent un pré-achat sécurisant pour les producteurs sur des espèces dont la régularité des apports peut être maîtrisée. Il s'agit d'un moyen efficace de réguler et de stabiliser le marché des espèces saisonnières, tout en encourageant la transformation.

- Des choix stratégiques diversifiés

L'intervention des OP françaises, marquée par une priorité donnée à la première vente, n'est cependant pas uniforme dans toutes les structures. Les choix stratégiques peuvent être différents. L'existence de deux fédérations nationales révèle le principal antagonisme entre les OP dites « industrielles », souvent d'origine antérieure à l'Organisation commune des marchés, et les OP « artisanales ». Deux associations nationales, l'ANOP (Association nationale des OP) et la FEDOPA (Fédération nationale des OP à la pêche artisanale), fédèrent respectivement 8 et 13 OP. La FEDOPA est une structure récente, créée en 1989, pour représenter spécifiquement les intérêts de la pêche artisanale. Elle entrait alors en complément de l'ANOP, de création plus ancienne (1975), qui fédérait davantage les armateurs à la pêche industrielle.

Les OP, adhérentes à la FEDOPA, s'efforcent de limiter les retraits et la destruction en intervenant par l'intermédiaire de coopératives de mareyage, ou en procédant au stockage des produits retirés. La création des coopératives de mareyage avait pour objet de nuancer le jeu des éventuelles ententes des mareyeurs sous criée. Cependant, nombre d'entre elles, ainsi que leurs OP connaissent des difficultés financières, en partie due à des objectifs d'intervention surestimés, mettant en péril les seuils de rentabilité économique inhérents à toute structure de commercialisation 25 ( * ) . Au contraire, l'ANOP combine plus souvent ses interventions sur le retrait avec une politique de partenariat pour la commercialisation de certains produits. Les OP, adhérentes à l'ANOP, n'ayant pas réalisé le même niveau d'intégration vers l'aval de la filière, ne connaissent pas de difficultés financières majeures.

Cette distinction traditionnelle tend cependant à s'estomper, du fait d'un brassage accru entre pêcheurs adhérents, qu'ils soient industriels ou artisans. Les FROM comptent ainsi de plus en plus de producteurs artisans dans leurs rangs, alors que leur composante industrielle initiale était caractéristique. Réciproquement, les plus grandes OP artisanales s'ouvrent aux pêcheurs hauturiers et aux armements semi-industriels

b) Les actions en faveur de la filière

Le secteur des pêches en France se caractérise par une grande diversité dans les métiers de pêche, dans les espèces, dans les zones de pêche, dans les points de débarquement, etc. Il y a 1 500 points de débarquement en France, et 40 criées. L'offre y est donc très dispersée et atomisée face à une demande très concentrée. Les producteurs subissent le marché au lieu de l'orienter. Depuis la crise, le gouvernement français a pris conscience de la nécessité d'avoir une approche globale du secteur de la pêche, qui prenne en compte l'ensemble de la filière.

Le gouvernement a ainsi porté une attention particulière à la restructuration du mareyage, maillon essentiel de la filière pêche, qui a beaucoup souffert de la crise. Le mareyage a été confronté à la mondialisation des échanges et à la mise aux normes européennes des équipements de première commercialisation. Beaucoup d'entreprises ont disparu, d'autres se sont concentrées. Elles étaient au nombre de 685 en 1987, 468 fin 1994 et 450 aujourd'hui. Pour venir en aide aux mareyeurs, un fonds de structuration a été créé en novembre 1994. Ce fonds cherche à moderniser et soutenir de façon sélective les entreprises de mareyage présentant un programme de développement viable et nécessitant un apport en capital.

Le décret du 6 septembre 1967 définit le mareyage comme le tri, l'allotissement et le conditionnement des produits de la mer. Mais aujourd'hui, les fonctions du mareyeur sont beaucoup plus vastes :

- fonctions techniques : tri, allotissement, conditionnement, transformation des produits de la mer (étêtage, tranchage, filetage, etc.) ;

- fonctions commerciales : négoce, import-export. Le mareyeur commercialise une gamme de produits qui va des produits frais aux produits congelés et élaborés ;

- fonctions financières : le mareyeur assure un relais financier lié à sa fonction de négociant.

Il est important de tenir compte de ces évolutions et de redéfinir la fonction du mareyage.

D'autre part, le gouvernement cherche à développer les démarches d'identification des produits de la mer, pour que le consommateur puisse différencier les produits, ce qui permettra de valoriser leur qualité. Ces actions s'inscrivent dans le règlement communautaire adopté en octobre

1995 sur les normes de calibrage et de qualité des produits. Toutes ces initiatives ont pour objet de favoriser la transparence et la fluidité du marché des produits de la mer.

Les différentes mesures adoptées par le gouvernement en faveur de la filière ont concerné :

- le renforcement du rôle de coordination du FIOM au sein de la filière. Le FIOM a vu son budget augmenter (151 millions de francs pour 1995, dont 90 millions de l'État). Le budget était de 100 millions en 1994 et 73 millions en 1993. Pour 1997, le budget du FIOM a été voté à 162,4 millions de francs, dont 125 millions de subvention d'État ;

- le renforcement des fonds propres des OP (50 millions de francs). Toutes les OP ont été aidées, sans qu'il leur soit demandé de contreparties ;

- le lancement de campagnes de promotion et d'identification des produits (10 millions de francs sur crédits FIOM). Par exemple, les campagnes publicitaires sur l'huître, la campagne bière et mer ou la campagne sur le merlu ;

- la mise aux normes européennes des ateliers de mareyage (11 millions de francs sur crédits FIOM) ;

- la certification des produits (4 millions de francs sur crédits FIOM) ;

- la création d'un observatoire économique par le FIOM (3 millions de francs) ;

- la recherche de nouvelles opportunités de pêche (5 millions de francs) ;

- l'amélioration de la connaissance anticipée de l'offre. Quinze millions de francs ont été dépensés par le gouvernement pour mieux organiser l'aval de la filière, en améliorant la connaissance anticipée de l'offre et la mise en réseau des opérateurs ;

- la création d'un fonds de caution interportuaire pour faciliter l'intervention des mareyeurs (3 millions de francs) ;

- a création d'un fonds de structuration du mareyage pour améliorer l'efficacité de la commercialisation, moderniser et soutenir les entreprises de mareyage viables qui ont besoin d'un apport en capital. Ce fonds a été doté d'un montant initial de 25 millions de francs répartis entre l'État (10 millions de francs), la Caisse centrale de crédit coopératif (5 millions de francs), le Crédit Maritime (5 millions de francs) et Unigrains (5 millions). Seules les entreprises de mareyage présentant un projet de développement viable, et après une analyse financière et économique de leur situation, ont pu recevoir une aide. Cette aide a consisté en une avance en capital que le bénéficiaire s'est engagé à rembourser dans un délai de 5 à 7 ans ;

- l'extension des règles de discipline des OP aux non adhérents (régulation des captures, prix de retrait), en cas de graves perturbations du marché ;

- le renforcement des contrôles par le service des douanes, les services vétérinaires, etc, sur les importations de produits de la mer, afin de s'assurer de leur conformité avec les réglementations en vigueur ;

- la création d'une commission de suivi de la pêche (administration et profession) pour veiller à la mise en oeuvre de ces mesures. Cette commission se réunit une fois par mois

c) Les incitations en faveur de la qualité

L'un des axes prioritaires du « contrat de progrès », présenté par le gouvernement en 1993 visait le renforcement de la cellule qualité du FIOM, de façon à encourager l'adoption de démarches en faveur de la qualité par les professionnels de la filière des pêches maritimes. La préoccupation immédiate des pouvoirs publics dans ce domaine est d'attirer l'intérêt de l'ensemble des opérateurs sur cette question et de pratiquer une communication dynamique en direction des consommateurs.

Une étude 26 ( * ) réalisée par le BEUC (Bureau européen des unions de consommateurs) sur des produits tests (poissons frais, filets congelés, panés) met en évidence l'insatisfaction des consommateurs concernant la qualité des produits de la mer en Europe. La fidélisation de la clientèle exige donc aujourd'hui davantage que la garantie du simple respect des « normes » sanitaires en vigueur dans un cadre de santé publique. On constate de plus en plus la recherche d'une qualité de consommation qui passe par la différenciation, l'identification du produit par son environnement (présentation, emballage) ou ses caractéristiques intrinsèques. La demande en produits certifiés connaît ainsi une augmentation difficilement chiffrable, mais notée par l'ensemble des distributeurs.

Depuis l'adoption des mesures de conditionnement en caisse de bord, premier pas vers l'amélioration qualitative des produits débarqués, les stratégies se sont multipliées et donnent aujourd'hui lieu à deux types de démarches. L'une

vise des signes de qualité sur un marché de niches spécialisées. L'autre cible la certification officielle. Dans tous les cas, deux étapes successives sont nécessaires :

- la maîtrise de la qualité à tous les stades de la filière, en impliquant les acteurs présents aux différents maillons de la filière ;

- la valorisation du produit par un signe de reconnaissance et un plan de communication.

Les préoccupations en faveur de la qualité des produits fleurissent au sein de la filière des pêches françaises, alors que l'ensemble des acteurs se retrouve autour d'un objectif commun d'augmentation de la valeur ajoutée par la certification.

3. Les dépenses publiques dans le secteur des pêches maritimes

Les dépenses publiques -État et Union européenne- pour le secteur des pêches maritimes et des cultures marines n'ont cessé d'augmenter depuis 1991. Elles sont passées de 4,44 milliards de francs en 1991 à 5,38 milliards en 1996, soit une augmentation de près de 20 % en quatre ans, principalement sous l'effet des dépenses de protection sociale et des mesures d'urgence face à la crise. Si l'on ajoute les aides européennes, les dépenses dans le secteur de la pêche s'élèvent à 5,558 milliards de francs pour 1996.

Les dépenses publiques pour les pêches maritimes et les cultures marines se répartissent en cinq domaines :

- l'appui aux activités d'exploitation de la ressource par la pêche et les cultures marines (domaine 1). Il comprend les aides à l'investissement et à la modernisation des flottilles, les actions en faveur de l'orientation et du soutien des marchés, les primes à l'arrêt définitif, la compensation des handicaps géographiques (du fait du surcoût subi par certaines flottilles en raison de l'éloignement des centres de consommation, par exemple pour la pêche de la crevette en Guyane) et les aides transitoires : aides ponctuelles pour aider les familles en difficulté financière, mais aussi les indemnités de chômage-intempéries et avaries techniques ;

- la valorisation des produits de la mer (commercialisation, transformation et promotion) (domaine 2) Cela concerne les interventions à la première vente, les aides en faveur des industries de transformation, les actions en faveur de la promotion des produits de la mer, etc ,

- la recherche et l'enseignement (domaine 6) Il s'agit des subventions accordées à l'Ifremer et les dépenses de formation des marins-pêcheurs ;

- le financement des services généraux (domaine 7). Ce sont toutes les dépenses de personnel des administrations centrales (Direction des pêches maritimes et des cultures marines) et déconcentrées (Affaires maritimes), ainsi que les dépenses en personnel du FIOM ;

- les dépenses de l'État et d'autres régimes sociaux pour équilibrer le régime de protection sociale et pour la solidarité (domaine 8). Ces dépenses sont constituées de subventions de l'État et de transferts, au titre de la compensation démographique, versés au budget de l'ENIM. Cela comprend aussi les mesures sociales de préretraite et d'aide à la reconversion professionnelle (cessation anticipée d'activité (CAA) et aide complémentaire au revenu (ACR).

Les deux premiers domaines, qui constituent les aides directes au secteur des pêches maritimes et des cultures marines, ne représentent que 10 % des dépenses dans le secteur, avec 560 millions de francs en 1996, dont 318 MF de financement national (cf graphique).

Les concours publics aux activités d'exploitation et à la valorisation des produits pour l'année 1996 (en milliers de franc)

En revanche, les dépenses à caractère social (domaine 8) représentent plus de 80 % du budget de la pêche, soit 4,58 milliards de francs en 1996, uniquement sur financement national. Ceci traduit la situation démographique du régime de retraite des gens de mer ou le poids des retraités est nettement plus important que celui des cotisants (45 541 actifs commerce et pêche pour 121 524 pensionnés). Néanmoins, les dépenses du domaine 8 ont baissé par rapport à 1994/95 où elles représentaient près de 85 % du budget du secteur pêche, alors que les dépenses pour l'exploitation des ressources ont augmenté en 1996 (cf tableau des concours publics au secteur).

Le domaine 8 comprend les financements publics accordés à l'ENIM par l'État et par les autres régimes sociaux, au titre de la compensation démographique, et le financement des mesures de préretraite et d'aide à la reconversion professionnelle. Les subventions à l'ENIM pour la pêche s'élèvent à 4,569 milliards de francs en 1996. Ce chiffre est obtenu en appliquant un coefficient de répartition forfaitaire au total des ressources hors cotisations professionnelles de l'ENIM, car un marin peut être successivement engagé à la pêche et au commerce. Le ratio retenu, soit 63 % est la proportion de la population active des secteurs précités dans active relevant de l'ENIM 27 ( * ) (28 172 pêcheurs actifs pour un ensemble de 45 541 actifs).

Le budget de l'ENIM se répartit en deux caisses : la Caisse générale de prévoyance (assurance-accident, invalidité, maternité et décès) et la Caisse de retraite des marins (assurance-vieillesse). Les dépenses de la Caisse de prévoyance sont en baisse de 1,2 % en 1996 et de 2,2 % en 1997. En revanche, les dépenses de la Caisse de retraite sont en hausse de 3,9 % en 1996 et de 2,7 % en 1997

Ces chiffres montrent le rôle que joue la puissance publique comme soutien au secteur des pêches maritimes et des cultures marines. Pour mémoire, le chiffre d'affaires de la pêche est de 5,7 milliards de francs, 8,4 milliards avec les cultures marines, et les aides nationales et européennes de 5,55 milliards de francs, auxquelles viennent s'ajouter les aides régionales. Les subventions pour le secteur des cultures marines ne représentent que 7 % du total des aides nationales et européennes et 5 % des aides nationales.

Nous avons essayé de faire une synthèse des aides des collectivités territoriales (Conseils généraux et régionaux) dans trois régions françaises parmi les plus importantes en matière de pêche : Bretagne, Pays de Loire et Poitou-Charentes, sur la période 1993-19 %. Ces trois régions regroupent près de la moitié de la flotte française de pêche. Les collectivités territoriales attribuent trois types d'aides : aides aux investissements à la pêche (construction de navires, achats de navires d'occasion, remotorisation et modernisation), aides aux investissements à terre (restructuration des ports de pêche, rénovation et équipement des criées, modernisation des entreprises de mareyage) et aides aux entreprises de pêche en difficulté (aides en fonds propres, mesures de désendettement et sorties de flotte).

Sur la période 1993-1996, les aides se sont élevées à 156 millions de francs en région Bretagne, 77 millions en Pays de Loire et 34 millions en région Poitou-Charentes. Les aides aux entreprises en difficulté ont été particulièrement importantes en Bretagne et en Pays de Loire, deux régions fortement touchées par la crise (respectivement 57 et 31 millions de francs entre 1993 et 1996, soit 36,5 % et 43 % du total des aides). Ces aides ont été très importantes en 1993 et 1994. Elles ont diminué en 1995 et de nouveau augmenté en 1996, suite à la mise en place du plan Puech. Certains Conseils généraux ont même aidé des navires rejetés par le CIRPA (comité interministériel de restructuration de la pêche artisanale). Par exemple, en Pays de Loire, sept dossiers ont été aidés après rejet du CIRPA.

Parallèlement aux mesures de désendettement et de restructuration, ces deux régions ont également accordé d'importantes subventions pour la modernisation des navires et l'achat de navires d'occasion. En Bretagne, ces subventions ont représenté 43 % du total des subventions et ont concerné essentiellement la modernisation des navires hauturiers de Lorient, Concameau et du Guilvinec, mais aussi l'achat de petites unités côtières d'occasion. En Pays de Loire, ces aides ont représenté environ 30 % du total des aides. En région Poitou-Charentes, les subventions à terre ont constitué le premier poste des dépenses. Ces subventions ont surtout permis de financer le transfert du port de la Rochelle à Chef de Baie. Ce transfert a représenté une dépense de 17 millions de francs pour le Conseil régional, uniquement pour les structures portuaires. En revanche, il n'y a eu que très peu d'aides aux investissements à la pêche durant cette période : 3,5 millions de francs au total.

Ces chiffres montrent l'ampleur des aides accordées au niveau régional. Le montant des aides de l'État pour les deux premiers domaines - exploitation des ressources et valorisation des produits de la mer - se monte à 1 319 millions de francs pour la période 1993-1996 pour l'ensemble des 7 régions maritimes françaises (Nord - Pas de Calais, Haute et Basse Normandie, Bretagne, Pays de la Loire, Poitou-Charentes, Aquitaine et Méditerranée), soit 188 millions de francs en moyenne par région. Les aides des Conseils régionaux et généraux de Bretagne sont donc presque aussi élevées que les subventions nationales, celles des Pays de Loire représentent 41 %, et 18 % en Poitou-Charentes. Si l'on agrège toutes les aides et prestations accordées au secteur des pêches, le montant global dépasse le chiffre d'affaires du secteur.

-

CHAPITRE IV - L'EFFICACITÉ DES POLITIQUES PUBLIQUES DES PÊCHES

1. La gestion des ressources naturelles

1.1 La fiabilité des outils statistiques

Pour bien gérer, il faut bien connaître. Or le secteur des pêches est mal connu. Les informations nécessaires ne sont pas toujours disponibles, ou avec un décalage dans le temps important, et ne sont pas toujours très fiables. Cette faiblesse est d'ailleurs soulignée dans le rapport de la commission européenne sur le contrôle de la Politique Commune des Pêches, de mars 1996 : « la qualité des statistiques françaises, qui s'était améliorée, tend à se détériorer depuis quelques années, mais dans une mesure qui varie selon les pêcheries ».

Une bonne gestion nécessite des données sur les ressources et l'état des stocks, sur les débarquements, sur les flottilles de pêche et les infrastructures portuaires, sur le marché des produits de la mer, mais aussi des données socio-économiques sur l'emploi, la rémunération des marins, etc. Si la qualité de certaines de ces informations s'est améliorée ces dernières années, comme les connaissances biologiques sur l'état des ressources halieutiques, d'autres ne peuvent être considérées comme fiables. En particulier, les statistiques de débarquement, transmises par le CAAM, ne tiennent pas suffisamment compte des ventes hors criée, qui sont estimées à environ 40 % du total des débarquements. Ces statistiques ne tiennent pas compte non plus de la pêche récréative. Or dans certaines régions, comme en Méditerranée, elle représente des prélèvements importants sur les ressources côtières. Il y a aussi un problème sur les statistiques des flottilles : les petites unités de pêche artisanale sont très mal connues. Les informations sur le volet social sont faibles, que ce soit l'emploi dans l'ensemble de la filière pêche ou la rémunération du travail

Pour les données de commercialisation, la création de l'Observatoire économique du FIOM et la mise en place du réseau informatique inter-criées (RIC) a permis une très nette amélioration de ces données, mais il ne s'agit que des flux sous criée. En ce qui concerne les informations sur les prix et les marges des acteurs, très peu d'études sérieuses ont été menées. D'autre part, les données de production du FIOM sortent avec un décalage de deux ans, ce qui est trop long pour gérer efficacement le secteur.

Globalement, on constate un manque de suivi d'un certain nombre de données dans l'ensemble de la filière, dû à un manque de moyens techniques et humains. Par exemple, dans plusieurs quartiers maritimes, les parutions de certaines monographies ont été interrompues. Or elles constituaient une information indispensable sur le secteur des pêches. Il y a aussi un manque d'homogénéité des données par région et dans le temps. Le CAAM ne fournit plus de séries statistiques sur 10 ans. On assiste donc à une détérioration, ces dernières années, de la qualité et de la fréquence des données statistiques.

Ce manque d'informations affecte le processus de décision et d'évaluation. La détermination des TAC et quotas repose, par exemple, sur les déclarations de captures antérieures. D'autre part, le manque de traitement global de l'information amène à prendre des décisions cloisonnées sur les flottilles, la ressource ou le marché, sans tenir compte des effets sur l'ensemble de l'économie des pêches et sur la rentabilité des entreprises.

1.2 L'adaptation des capacités de capture à la disponibilité en ressource

1.2.1 Une surcapacité persistante

Dans les années 1980, le secteur de la pêche a connu une période de forte croissance. Le prix du poisson était élevé, les revenus des pêcheurs intéressants et l'activité de pêche rentable. Ceci a motivé un certain nombre de constructions de navires et de modernisations des plus anciens, d'autant que les politiques du gouvernement et de la Communauté européenne allaient dans ce sens. Les aides publiques, dans les années 80, ont favorisé la diffusion du progrès technique et l'augmentation de la capacité en flotte.

Durant cette période, le rythme des constructions se situait entre 40 et 50 par an, avec un record en 1988 de 118 nouvelles constructions, alors que la question de la diminution de la ressource était déjà évidente. Pendant très longtemps, le gouvernement français a subventionné la flotte industrielle pour qu'elle se développe Par la suite, il a aidé la flotte artisanale Ceci a eu un impact négatif sur la ressource. Tout au long des années 1980, les aides de l'État, pour la construction et la modernisation des navires, ont dépassé les 100 millions de francs par an, ce qui a entraîné des constructions très importantes entre 1988 et 1990, alors que le cours du poisson ne cesse de diminuer depuis 1980 (cf. tableau ci-dessous). Ce n'est qu'avec la mise en place du POP 3 en 1992, beaucoup plus strict en matière de réduction de l'effort de pêche, que les aides nationales se sont réduites. Les aides publiques ont donc contribué à aggraver une situation de surexploitation, en particulier des ressources démersales, considérées comme les plus fragiles. À cette époque, il n'y avait aucune restriction aux entrées de flotte. Les PME ont été instaurés en septembre 1988. Ceci montre bien que la puissance publique n'anticipe pas l'évolution des problèmes et laisse la situation se dégrader jusqu'au moment où il faut mettre en place des mesures draconiennes

1988

1989

1990

1991

1995

Constructions

118

111

80

58

36

1987

1988-1990

1991

1994

1995

Aides nationales

166 MF

>100 MF/an

95 MF

14 MF

10 MF

1980

1989

1990

1991

1995

Cours du poisson (F/Kg)

12

11,78

10,89

11,05

9,66

À côté de l'augmentation du nombre de navires, les progrès techniques réalisés dans le secteur de la pêche ont été essentiels. Il s'agit de toutes les innovations concernant le navire, les outils de production, de navigation (informatique embarquée), de transformation et de traitement du poisson à bord... Le progrès technique augmente la mobilité du navire, le tonnage, améliore la détection du poisson, la manutention pour remonter les filets, etc.

En France, une analyse de l'évolution de la capacité de capture, mesurée par la puissance motrice et le tonnage des navires multipliés par le nombre de jours en mer, indique que ces deux indicateurs ont augmenté jusqu'en 1989, alors que le nombre de navires diminue depuis le début des années 80. Parallèlement à cette augmentation de l'effort de pêche, il y a eu une stagnation, voire même une diminution des débarquements. Par conséquent, les captures par unité d'effort de pêche et les rendements des navires, mesurés par le rapport entre la production obtenue en volume et la quantité de moyens mis en oeuvre pour obtenir cette production, ont baissé. Les rendements ont d'autant plus diminué que les navires passent de plus en plus de temps en mer et vont pêcher de plus en plus loin. Le rapport du FIOM de 1996, sur l'évolution récente de la filière pêche, note que « dans toutes les régions visitées, la tendance est générale : le temps passé en mer a augmenté ». Il y a eu allongement des marées et augmentation de la fréquence des sorties en mer (40 jours supplémentaires par an dans le Finistère)

Cette baisse des rendements traduit bien une surcapacité de la flotte qui se retrouve dans tous les pays européens. Il y a là un gaspillage évident de facteurs de production. Le secteur de la pêche est soumis à la loi des rendements décroissants : au-delà d'un certain effort de pêche, la production stagne puis décroît, quels que soient les efforts additionnels.

1.2.2 Le "plan Mellick" et les Permis de mise en exploitation

Pour réduire cette surcapacité et respecter les objectifs des POP européens, le gouvernement français a instauré les PME (permis de mise en exploitation) et des plans de sortie de flotte pour subventionner les arrêts définitifs Le premier a été le "plan Mellick". Il a surtout permis la sortie de flotte d'unités anciennes, de plus de 20 ans et de petites tailles, de moins de 12 mètres. Il a favorisé les départs à la retraite pour les patrons pêcheurs les plus vieux. Il a aussi aidé les jeunes patrons à constituer un capital personnel pour acheter un navire plus performant. Ce plan a pu jouer en faveur d'un accroissement ultérieur de l'effort de pêche. Dans le cadre du "plan Mellick", les subventions moyennes accordées à un navire de moins de 12 m se montaient à 120 000 francs. Les Conseils régionaux et généraux ont aussi participé au financement de ces sorties de flotte, à hauteur de 30 % des aides accordées en moyenne.

Le "plan Mellick" a principalement affecté des navires de moins de 12 mètres exploitant les ressources côtières. Par conséquent, son impact sur les stocks démersaux, qui sont les plus préoccupants et qui représentent le principal objectif des POP, a été minime. Malgré ces effets négatifs (accroissement de l'effort de pêche au départ, impact réduit sur les stocks démersaux), le plan Mellick a, quand même permis une réduction de l'effort de pêche global et de respecter les objectifs du deuxième POP. Il a de plus permis de diminuer la pression sur les ressources côtières.

Depuis, de nouveaux plans de sorties de flotte sont renégociés chaque année-Après la crise de 1993-94, la situation financière de certains navires était telle que leur arrêt définitif était prévisible. Le gouvernement a accordé des aides importantes pour que ces sorties se fassent dans des conditions socialement acceptables. Malgré ces sorties, les objectifs du POP 3 sont difficiles à respecter. La France doit encore retirer 20 000 kW alors que le quatrième POP, qui prévoit une nouvelle réduction de 60 000 kW, vient d'être voté. Il existe un débat en France sur l'efficacité des POP par rapport à celle des TAC et quotas. Les quotas sont jugés plus efficaces, en termes de protection de la ressource, car ils visent directement les espèces menacées et non les pêcheurs. L'administration et les professionnels sont, de manière générale, assez défavorables à la mise en place des POP.

L'annonce de l'instauration des PME a d'abord eu pour conséquence d'augmenter les commandes de navires de pêche, par la mise en oeuvre d'un effet d'anticipation. On a donc assisté à une forte croissance de la puissance motrice et du tonnage. Il y a eu ensuite une décroissance rapide et les PME ont finalement permis une stabilisation de l'effort de pêche.

Les permis de mise en exploitation ont eu deux conséquences négatives 28 ( * ) :

- ils ont introduit une barrière à l'entrée dans la pêche, pouvant jouer contre l'entrée de jeunes dans la profession et conduire au vieillissement de la population des marins-pêcheurs 29 ( * ) . Les jeunes patrons qui s'installent pour la première fois sont obligés d'acheter des kW anciens pour les sortir et avoir ensuite le droit de reconstruire un bateau neuf. Il y a donc un coût à l'entrée des jeunes dans la profession ;

- l'obligation de retirer des kW pour obtenir un PME a entraîné une forte augmentation du prix des navires d'occasion. Ceux qui veulent acheter un navire supplémentaire sont aussi obligés d'acheter des kW anciens. Ce système a donc entraîné une forte augmentation des prix des navires d'occasion, qui a pu les rapprocher sensiblement des prix des navires neufs. Les PME ont aussi entraîné, par la suite, un renchérissement du prix des bateaux neufs, car depuis les demandes de constructions sont très supérieures aux offres. Le surcoût moyen des navires neufs a pu être évalué à 500 000 francs 30 ( * ) .

L'élimination des surcapacités repose donc sur la volonté d'une partie de la profession à vouloir quitter le secteur en contrepartie des primes de retrait. Le montant des primes dépend de la jauge du navire. Il peut varier de 50 000 francs pour un navire de moins de 5 tjb à plus de 2,5 millions de francs pour un navire de 600 tjb. Ces aides sont financées par l'État et les collectivités territoriales, avec une participation de l'Union européenne. Les mesures françaises ont permis une réduction importante de l'effort de pêche, mais les captures ne se sont toujours pas reconstituées et les rendements continuent de décroître. Cela pourrait mettre en péril le développement durable de cette activité.

Paradoxalement, se pose simultanément le problème du renouvellement de la flottille. Le rythme des constructions était, ces dernières années, de quelques dizaines par an (35 en 1995, dont plus de la moitié sont des petites unités inférieures à 12 m), ce qui est insuffisant pour assurer le renouvellement de la flotte. On devrait donc assister, à terme, à un vieillissement des navires de pêche et une perte de compétitivité. Depuis 1996, la Direction des pêches maritimes et des cultures marines a remis des kilowatts en disposition (15 000 kW, dont 10 900 kW réservés aux navires de moins de 25 m) Cette décision a été prise en désaccord avec l'Union européenne. En 1996, 40 nouvelles constructions ont été lancées : 15 unités de moins de 12 m, 11 unités de 12 m, 15 entre 12 et 25 m, un thonier de 37 m et un autre de 67 m En dehors des thoniers, les autres navires sont polyvalents et permettent une activité plus diversifiée. L'Union européenne qui avait décidé de rouvrir les aides à la construction et à la modernisation en 1997 pour les États ayant respecté le POP 3, a décidé de nouveau de les geler pour la France. Ces constructions ne seront donc aidées que par les finances publiques françaises.

1.3 Gestion de la ressource par les TAC et quotas

Le système des TAC repose sur des avis scientifiques, mais les TAC fixés par le Conseil des ministres européen dépassent souvent les niveaux de captures recommandés (TAC de précaution) par les scientifiques.

Exemples de TAC recommandés par les scientifiques et fixés par le conseil des ministres.

TAC de plie de

Mer du Nord

TAC de cabillaud de Mer du Nord

TAC d'églefin dc

Mer du Nord

Année

Recommandés

Fixés

Recommandés

Fixés

Recommandés

Fixés

1964

150

182

182

215

162

170

1985

130

200

259

250

209

207

1986

160

180

130

170

239

230

1987

120

150

125

175

120

140

1968

150

175

148

160

185

185

1989

175

185

124

124

68

68

1990

171

180

113

105

50

50

1991

169

175

92

100

48

50

1992

135

175

82

100,7

61

60

1993

170

175

92

100,7

158

133

De plus, les TAC sont souvent dépassés par les flottilles européennes Le rapport de la commission européenne de 1993 sur la PCP, indique que le respect des TAC et quotas a été dans l'ensemble très limité. Les groupes de travail scientifiques ont procédé, comme ils le font depuis plusieurs années, à des estimations de la réalité des captures indépendantes des chiffres officiels. Ces estimations ont mis en évidence des écarts considérables, qui peuvent aller jusqu'à des différences de 60 % entre captures officielles et réelles. Ce système pourrait donc être plus efficace s'il était mieux respecté. En France, les TAC ne sont contraignants que pour 8 espèces.

L'efficacité des mesures techniques est également remise en cause par leur faible respect. L'application des règles relatives aux engins de pêche (longueur du maillage des filets, nombre d'hameçons, etc.) et celles relatives à la composition des captures est difficile à contrôler. Il faudrait mettre en place des contrôles en mer beaucoup plus systématiques et réguliers. Le contrôle des tailles minimales est a priori plus simple à effectuer. Pourtant, les captures d'individus de petite taille sont fréquentes, car il existe un marché pour ces produits, surtout en Espagne. Les fraudes sur les captures de poissons sous-dimensionnés sont les plus fréquentes en Espagne. Elles sont également importantes en France, où les juvéniles sont exportés vers l'Espagne. D'autre part, les rejets en mer sont importants. Au niveau mondial, la FAO estime les rejets à 1/3 des captures, et seulement 11 % de ces rejets arrivent à survivre. L'interdiction de pêcher dans certaines zones est souvent contournée : le chalutage dans la zone des trois milles est fréquent. Il y a aussi des conflits entre les métiers de pêche dans les eaux européennes.

Les mesures pour gérer la ressource existent, mais elles ne sont pas suffisamment respectées. Selon les scientifiques, les mesures techniques de gestion de la ressource seraient suffisantes si elles étaient appliquées. Ces mesures introduisent plus de sélectivité des engins de pêche et protègent les juvéniles. L'effort de pêche s'exerce ainsi sur les individus plus vieux et de Plus grande taille, ce qui permet au stock de se reconstituer. Plus de sélectivité dans les engins de pêche permet aussi de réduire les prises accessoires.

Les fraudes, dans le secteur des pêches, sont donc importantes et les contrôles insuffisants. Il serait aussi souhaitable que TAC fixés par le Conseil des ministres européens soient conformes aux avis des scientifiques.

1.4 Le contrôle des activités de pêche

1 4.1 La réglementation européenne en matière de contrôle

La Politique Commune de la Pêche (PCP) confie aux États membres la responsabilité du contrôle des activités de la pêche, aussi bien a terre qu en mer Les États sont donc seuls compétents pour contrôler les activités de pêche et la commission européenne ne détient que des pouvoirs d'accompagnement des services nationaux, en vue de la vérification d'une application correcte de la réglementation de la part des États membres. Le dispositif général de contrôle des activités des navires des États membres est défini par le règlement CEE n° 2241/87. Ce règlement prévoit aussi la coopération et la co-responsabilité entre tous les États membres en matière de contrôle et de gestion des quotas.

Afin de mieux contrôler l'application des TAC et quotas, les pêcheurs ont l'obligation d'enregistrer, en mer, la zone et les quantités de leurs captures dans un journal de bord communautaire, et de déclarer les quantités débarquées Depuis le 1er janvier 1996, les navires pêchant les espèces démersales, d'une longueur supérieure à 18 mètres hors tout, doivent également communiquer leur entrée et leur sortie des zones de pêche. Ce système n'est cependant pas opérationnel en France, où les CROSS (Centre régional de surveillance et de sauvetage maritime) ne sont pas équipés pour traiter les déclarations.

Le contrôle du transport des produits de la mer par les États membres est également prévu depuis 1993 (règlement CEE n° 2847/93), afin d'empêcher des importations non déclarées, d'éviter que du poisson sous-dimensionné soit mis en vente, ou que des produits destinés à la destruction soient réintroduits dans les circuits de distribution. Cependant, ces contrôles restent très limités dans tous les pays européens, notamment les contrôles sur le poisson sous-dimensionné qui est toujours commercialisé.

Le contrôle des activités de pêche par les États membres doit porter sur le respect des mesures techniques (maillage, type d'engins utilisés, etc.), sur les captures (espèces autorisées, composition des captures, respect des quotas), sur les cantonnements de pêche, etc., mais aussi sur les aides financières accordées aux navires pour leur modernisation ou leur immobilisation provisoire ou définitive, afin de voir si ces aides ont été correctement utilisées.

Les autorités de contrôle disposent de pouvoirs étendus : droit d'abordage et de fouille, examen du poisson, ouverture d'enquêtes, demande de documents aux fins d'enquête, prélèvements d'échantillons, mesurage et pesage des marchandises, etc.

Les États membres sont tenus de communiquer régulièrement à la commission un bilan de leurs contrôles et inspections qui précise le nombre et la nature des infractions constatées et les mesures prises en conséquence

1.4.2 L'organisation du contrôle en France

En France, le contrôle de l'activité de pêche est soumis à un système complexe et incombe à des services qui relèvent de plusieurs départements ministériels. Le contrôle général de la pêche est déterminé par le ministère de l'Agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Mais ce sont les Affaires maritimes, qui relèvent du ministère de l'Équipement, qui assument la responsabilité du contrôle de tous les bateaux de pêche en activité (immatriculés en France ou non). La gendarmerie nationale, la marine nationale, les services des douanes et les services anti-fraudes peuvent également intervenir.

Le contrôle de la pêche mobilise environ 335 personnes en France, dont 144 inspecteurs (100 inspecteurs des affaires maritimes et 44 de la gendarmerie nationale) et les Affaires maritimes disposent de 35 navires de surveillance de la pêche, dont 21 unités littorales, 8 à grand rayon d'action et 6 unités à autonomie moyenne, qui regroupent au total 202 personnes. Pour le nombre d'inspecteurs des pêches, la France est le troisième pays européen, derrière la Grèce et le Royaume-Uni. Pour les unités navales, elle se situe derrière l'Italie et le Portugal.

1.4.3 Nombre de contrôles effectués

Les données dont nous disposons, proviennent du rapport de la commission européenne sur le contrôle de la Politique Commune des Pêches de mars 1996,

Contrôles à terre

Le nombre des inspections à terre n'a pas été communiqué. Les grandes catégories d'infractions constatées dans les ports, en 1994, portent essentiellement sur :

- des fraudes dans la déclaration des débarquements (journal de bord) : elles ont concerné 184 navires français, 1 navire espagnol et 3 navires belges ;

- l'utilisation d'engins illicites : 49 navires français contrôlés étaient en infraction, ainsi que 3 navires espagnols ;

- la pêche dans des zones interdites : 110 navires français ont été arrêtés ;

- des captures de poissons sous-dimensionnés : 22 navires français en infraction ;

- L'efficacité des politiques publiques des pêches -

- des captures de prises accessoires excessives ou interdites : 1 navire français en infraction ;

- un tonnage excessif : 2 navires français en infraction.

Contrôles en mer

D'après les données fournies par la France, environ 8 700 inspections seraient effectuées chaque année en mer. En 1994, les autorités françaises ont fait état de 1 404 patrouilles en mer et de 49 jours de surveillance aérienne dans les zones CIEM VII, VIII et les eaux de la Guyane. Au total, elles ont inspecté 7 793 navires français, 861 navires espagnols, 6 navires belges, 3 hollandais et 65 de nationalité différente, dans les eaux sous juridiction française. Les infractions constatées en mer ont été les suivantes :

Nature de l'infraction en 1994

Nationalité

Belgique

Espagne

France

Total

Journal de bord /déclaration

1

24

27

52

Engins illicites

14

128

142

Pêche illicite/zones de pêche

2

484

486

Tonnage excessif

1

1

2

Captures illicites : pêche directe

23

23

Prises accessoires

24

24

Poisson sous-dimensionné

12

39

51

Pêche non autorisée

20

48

68

Marquage des engins

11

27

38

Marques d'identification du bateau

1

14

15

Autres

82

321

403

TOTAL

3

165

1136

1304

% des infractions par rapport au nombre de contrôles (calcul CGP)

50 %

19,20 %

14,60 %

(Source Commission européenne)

Comparativement, en Belgique le contrôle de l'activité de pêche n'est pas très développé. La flotte de pêche n'est constituée que de 156 navires (cf annexe 3). C'est le plus petit pays pêcheurs de l'Union européenne et ses moyens de contrôle sont peu importants. Il n'y a que 8 inspecteurs pour contrôler les débarquements, les importations, les lieux de ventes et la gestion des quotas de pêche, ce qui est très insuffisant. En revanche, la Belgique dispose d'un système d'enregistrement des captures assez fiable.

À l'opposé, l'Espagne est le plus grand pays pêcheur de l'Union européenne, avec 18 314 navires armés à la pêche en 1996. Pendant très longtemps, le contrôle des activités de pêche n'était pas une priorité de l'administration espagnole. Progressivement, l'Espagne s'est dotée de moyens de contrôles navals et aériens importants Le nombre des inspecteurs a augmenté. Mais il reste insuffisant et l'organisation du contrôle est encore beaucoup trop complexe. En Espagne, les principales fraudes concernent les captures de poissons sous-dimensionnés (2 755 infractions en 1994 sur un total de 5 881). L'Union européenne conclut qu'en Espagne, des progrès ont été réalisés, mais que le chemin à parcourir est encore long.

Au niveau européen, le Royaume-Uni est le pays le plus efficace en matière de contrôle. Il dispose d'un système de contrôle national moderne et de moyens techniques importants. L'Union européenne constate que malgré certaines défaillances, notamment en ce qui concerne la clôture des pêcheries ainsi que la poursuite des infractions, les efforts et moyens consacrés par le Royaume-Uni au contrôle de la pêche constituent un exemple de la manière dont il convient de faire appliquer la PCP.

1 4.4 Évaluation des contrôles

La France déclare disposer de moyens humains et matériels considérables, mais la multiplicité des tâches des différents services empêche de déterminer avec précision les moyens affectés réellement au contrôle. Les fraudes demeurent importantes, notamment les fraudes aux mesures techniques, en particulier dans la pêche côtière. Les mesures de contrôle sont insuffisantes, tant en mer, pour prévenir l'utilisation abusive des maillages hors nonnes, que dans les ports, pour mettre fin à la commercialisation du poisson sous-dimensionné, comme le merluchon. Afin de résoudre ce problème, le ministère de l'Agriculture veut rendre obligatoire l'affichage des tailles marchandes des poissons dans tous les points de vente. Des doutes subsistent quant à l'efficacité d'une telle mesure.

D'autre part, la poursuite des infractions ne conduit en général pas à l'imposition de sanctions proportionnelles à la gravité du délit. Les sanctions sont toujours légères. Le montant des amendes est très faible par rapport à ce que peut rapporter la fraude. Et comme les inspections sont peu fréquentes, les pêcheurs peuvent considérer les amendes comme des frais d'exploitation, de sorte que l'impact des amendes sur le comportement des pêcheurs est souvent négligeable. En outre, le rapport de la Commission européenne souligne que les tribunaux nationaux n'infligent que des amendes légères, parce qu'ils trouvent la législation communautaire trop complexe pour être bien comprise des pêcheurs. Les inspecteurs reconnaissent qu'il est souvent plus facile de contrôler les navires étrangers, car il n'y a pas de risque de conflit.

Le rapport européen conclut, sur le contrôle des activités de pêche en France, que « les éléments essentiels sont en place, et les améliorations relèvent de la définition d'une stratégie d'ensemble, qui s'appuie sur une ferme volonté de progrès et s'accompagne d'une sensibilisation de l'ensemble des acteurs et opérateurs aux enjeux du contrôle et de l'affectation d'un personnel hautement qualifié aux fonctions clés (informatique, statistique) ». La France ne considère peut-être pas assez le contrôle matériel de la pêche comme une priorité de gestion. On y constate plutôt un climat de tolérance et surtout un système de dérogations très développé.

2. La rentabilité des flottilles

2.1 La situation financière des navires de pêche

Les aides d'urgence qui ont été accordées aux flottilles en 1993 et 1994 ont permis une nette amélioration de la situation des navires, surtout par l'allégement des charges sociales. Grâce à la réduction de 30 % des charges patronales intervenue en 1994, plusieurs patrons-pêcheurs ont pu honorer leurs échéances. Malgré cela, il y a quand même eu, selon le rapport d'audit de février 1995, une certaine inefficacité et dilution des aides. En particulier, si le renforcement des fonds propres des navires a permis à plusieurs armements de réduire progressivement le poids de leur dette, cette aide a été versée à trop de propriétaires, sans suffisamment de discernement. D'autre part, elle a bénéficié aussi à des unités non viables, qui ont fini par sortir de la flotte. Enfin, dans certaines régions, cette aide a été détournée et a servi à financer de nouveaux prêts. Dans une autre, la Caisse régionale l'a utilisée pour apurer un contentieux relatif à 60 navires au titre d'un arriéré de remboursement ancien.

Efficacité du plan Puech

Le "plan Puech", de février 1995, avait pour objet de poursuivre la restructuration de la flotte de pêche française. Ce plan a cherché à être plus sélectif et adapté à chaque situation en analysant les dossiers au cas par cas, afin de limiter l'aide aux navires encore viables et proposer des sorties de flotte acceptables aux autres. Un comité interministériel de restructuration de la pêche artisanale (CIRPA) a été créé en avril 1995, pour assurer la cohérence du plan Puech. Le CIRPA avait pour mission d'examiner la situation réelle des entreprises artisanales, navire par navire, et d'évaluer leurs possibilités de redressement sur le plan financier et économique.

Fin 1996, sur les 651 dossiers déposés au départ, 241 ont été rejetés et 410 ont fait l'objet de propositions de restructuration aux patrons-pêcheurs qui peuvent les accepter ou les refuser. Soixante pêcheurs ont refusé les propositions du CIRPA et 350 décisions ont été mises en oeuvre, dont 116 en allongement de prêt, 93 en désendettement et 141 en apurement du passif.

Au 31 décembre 1996, 98 % des allongements de prêts bonifiés ont été réalisés, près de 90 % des mesures de désendettement ont été mises en oeuvre, ainsi que près de 30 % des mesures d'apurement du passif. En octobre 1997, les désendettements sont terminés à 95 % et les apurements de passif à 83 %. Le désendettement a été plafonné à 1 MF par navire et l'aide moyenne a été évaluée à 510 000 francs par navire. Le coût moyen des apurements de passif est de 1,1 million de francs. Ce nouveau plan s'est voulu plus efficace en ciblant mieux les besoins. Il a conduit à 138 cessations d'entreprise, dont 33 navires ont été sortis de flotte.

Le "plan Puech" a eu des conséquences positives. Pour M. Le Bot, directeur du port de Lorient, il semblerait que la situation financière des navires soit beaucoup plus favorable, surtout pour les 20-25 m (qui étaient les plus en difficulté) par rapport aux 38 m. Les mesures de l'État ont permis d'apurer les comptes des navires qui ont retrouvé une rentabilité acceptable, notamment en allégeant les charges sociales.

Gérard Evin, responsable du Centre de gestion de la pêche artisanale, indiquait, en janvier 1997 qu'en 1996, les navires de pêche artisans adhérant à son organisme auraient vu leur chiffre d'affaires augmenter de 2 %. Même constat pour les salaires des marins, qui retrouvent des niveaux acceptables, environ 10 000 francs net pour un matelot.

Les comptes des navires du Guilvinec examinés fin 1996 par l'Observatoire de la Coopération maritime confirment ces résultats. Le bilan des activités d'un échantillon de 89 navires du quartier du Guilvinec, au premier semestre 96, est en effet nettement positif pour toutes les catégories de navires, à l'exception de quelques chalutiers pénalisés par les frais de courant. Les frais de carburant ont augmenté en 1996. Ils représentent un des premiers postes de dépenses des navires, surtout pour les chalutiers (14 % du total des charges d'exploitation pour un chalutier). Le gazole pêche a augmenté de 50 % par rapport à 1995, en raison de la hausse du cours du dollar. Sur l'année 1996, cela représenterait une dépense de 20 millions de francs supplémentaires pour 1 100 bateaux.

Répartition des différentes charges d'exploitation pour
un chalutier de 20 mètres en 1995 (en % du total des
charges).

Le "plan Puech" a donc été efficace en permettant à un certain nombre de navires de renouer avec la rentabilité, grâce notamment à l'allégement des charges sociales patronales et aux mesures de désendettement. Il a aussi évité un "saupoudrage" des aides. Cependant, on peut lui reprocher sa lenteur. En voulant traiter chaque dossier au cas par cas, le versement des aides a pris beaucoup de temps, ce qui a pu aggraver la situation de certains navires. Un an et demi après le lancement du plan, la majorité des navires, qui devaient faire l'objet d'un désendettement, n'avaient toujours rien reçu. D'autre part, le plan Puech. qui devait permettre aussi un allégement des charges portuaires, afin de réduire les prélèvements au débarquement, n'a pas été très efficace sur ce point. Les investissements portuaires n'étant toujours pas amortis, les organismes gestionnaires ne peuvent pas réduire les charges. Au Guilvinec. les charges ont même augmenté : + 0,2 % à + 0,7 % pour les taxes de criée On peut également souligner l'absence d'un volet « marché » dans ce plan, alors que l'effondrement des cours du poisson a été l'une des principales causes de la crise

Ce plan a représenté une dépense de plus de 300 millions de francs, en intégrant les mesures sociales et celles de prorogations de bonification. Les mesures de désendettement et d'apurement du passif ont été estimées à environ 220 millions de francs, dont 73,5 millions à la charge de l'État, et 150 millions répartis par moitié entre les collectivités territoriales et le Crédit maritime

Les mesures décidées ont bien été appliquées, même si certaines ont été longues à venir, comme les vingt millions d'aides aux familles en difficulté destinées à faire face à des situations d'urgence ou les mesures de désendettement du plan Puech. En revanche, les mesures exceptionnelles de 1993 n'ont pas toujours eu l'efficacité souhaitée. Prises dans l'urgence, ces mesures ont permis à certaines familles de pêcheurs de survivre et de poursuivre leur activité, mais elles n'ont pas permis de sortir de la crise. L'État a dû continuer à verser des aides aux familles jusqu'en 1996.

Les mesures financières de bonification des taux d'intérêt ont eu des effets directs sur le désendettement des navires et ont progressivement permis un redressement de leur situation financière. Depuis 1993, la bonification d'intérêts d'emprunts à la pêche a représenté une enveloppe de 347 MF. Quant aux 90 MF pour le renforcement des fonds propres des navires distribués sans aucune contrepartie, le rapport coût/bénéfice semble plus faible. Ils n'ont pas permis de rétablir la capacité d'emprunt des navires de pêche, soit parce qu'ils ont servi à autre chose que le remboursement des dettes du navire, soit parce que la situation financière était telle que les fonds distribués n'étaient pas suffisants pour rétablir les finances de l'entreprise. La Direction des pêches et des cultures marines indique que ces mesures ont eu pour conséquence de remédier aux effets immédiats de la crise, sans pour autant permettre, compte tenu de l'urgence, d'engager une thérapie durable : ainsi, si les allégements de cotisations sociales et le réaménagement des emprunts ont constitué des premières mesures structurelles efficaces - et appréciées -, les dispositifs d'aide aux fonds propres, qui n'ont donné lieu à aucune contrepartie en termes de restructuration des armements, doivent s'analyser principalement comme étant de nature conjoncturelle.

Les mesures de baisse des charges patronales peuvent avoir trois conséquences : encourager à l'embauche de nouveaux marins ou au maintien des emplois existants en réduisant le coût du travail, et permettre une augmentation des salaires directs en laissant le coût total du travail inchangé, ou peut être utilisée par les entreprises pour améliorer leur situation financière. Il est difficile d'établir un lien de cause à effet direct, car d'autres acteurs peuvent intervenir. Néanmoins, on constate qu'il n'y a pas eu d'augmentation du volume de l'emploi, les effectifs i la pêche ne cessent de diminuer. Les rémunérations nettes des marins ont augmenté ces deux dernières années, sous l'effet du redressement des cours et des baisses de charges salariales. En revanche, on constate dans les comptes d'exploitation des navires que parallèlement aux baisses des charges, les charges financières ont diminué et l'excédent brut d'exploitation s'est redressé. En ce sens, les mesures de baisse des charges ont été les plus rapides et efficaces, en permettant une amélioration de la situation financière des navires de pêche.

Depuis 1996, la situation est beaucoup plus saine. Toutes les unités non viables ont été sorties de la flotte. À présent, il faut assurer aux navires une rentabilité durable, en réduisant leurs coûts d'exploitation, en particulier les charges au débarquement qui pèsent sur leur résultat d'exploitation et qui semblent être les plus faciles à diminuer.

2.2 Le poids des charges au débarquement est principalement lié au surinvestissement dans les ports de pêche

Une fois le navire de pêche arrivé au port, le poisson est lourdement taxé. Ces charges varient beaucoup d'un port à l'autre, mais elles sont en moyenne élevées, de 10 à 12 % sur le chiffre d'affaires des navires et de 5 % sur celui des mareyeurs, et n'ont pas connu de baisse ces dernières années.

2.2.1 Des investissements insuffisamment sélectifs ont été mis en oeuvre dans les ports de pêche

Les taxes sont élevées principalement en raison de l'éparpillement des lieux de vente et des criées. On compte aujourd'hui 40 criées réparties sur les 1 500 km de côtes françaises (soit en moyenne une criée tous les 37 km) : 15 en Bretagne, 7 en Pays de la Loire / Poitou-Charentes, 9 en Normandie, 3 en Aquitaine et 6 en Méditerranée. Elles sont proches les unes des autres. En pays Bigouden, on dénombre 4 criées dans un périmètre de 20 km. La répartition des criées résulte plus du fruit des traditions locales que du résultat d'une logique économique : très peu d'entre elles sont localisées en fonction des grands axes de communication ou des centres de consommation. Cette dispersion réduit le nombre de vendeurs sous chaque place et augmente les frais unitaires. De plus, les dix premières criées (Boulogne, Lorient, Concarneau, Le Guilvinec, Les Sables d'Olonne, Saint-Guénolé, Loctudy, Douarnenez, La Turballe, Port en Bessin) commercialisent les deux tiers de l'ensemble des apports en valeur. Les autres (soit les trois quarts) traitent moins de 10 000 tonnes de poissons par an, ce qui est insuffisant pour les rentabiliser. Ainsi, beaucoup de criées connaissent des difficultés financières importantes.

Cet éparpillement des lieux de vente traduit un surinvestissement dans les ports de pêche ces dernières années. Il y a quinze ans, il y avait une douzaine de ports d'expédition. Aujourd'hui il y en a 27, dont certains produisent des tonnages très faibles, comme Cancale ou Honfleur, qui ont commercialisé respectivement 775 t et 281 t de produits de la mer en 1996. La criée de Honfleur a été fermée en juillet 1997

Ces investissements ont aussi été réalisés dans la perspective des mises aux normes européennes. Ils ont consisté en des aménagements portuaires (bassins, quais, etc.), modernisations des criées (informatisation, installation en froid, ...), modernisations des installations de mise en vente, de manutention, etc. Parfois, il y a eu reconstruction d'anciennes criées, comme à l'Ile d'Yeu, St-Gilles Croix-de-Vie ou La Rochelle. Toutes ces restructurations ont entraîné une augmentation de la capacité portuaire, alors que la production des criées a baissé entre 1990 et 1996 de 312 988 t à 281 207 t (source CAAM). Trois criées ont dû fermer ces trois dernières années : Camaret, Saint-Nazaire et Honfleur.

D'après une étude du FIOM sur les investissements portuaires de 1993, 547 MF ont été investis dans les ports de pêche dotés d'une criée entre 1988 et 1992. Les investissements ont concerne essentiellement les infrastructures portuaires (55 %) et les criées (24 %). Ces réalisations étaient parfois indispensables, car beaucoup de ports de pêche étaient vétustes et inadaptés aux nouvelles exigences du secteur. L'écart se creusait entre des techniques de pêche de plus en plus productives et l'archaïsme des techniques de débarquement. La modernisation des criées, l'accélération des procédures de débarquement et la généralisation des entrepôts réfrigérés étaient devenues indispensables. Cependant, ces investissements auraient dû profiter à une concentration des lieux de débarquement modernes et bien équipés au lieu de conduire, dans certains endroits, à un gaspillage des ressources. Certains investissements ont été beaucoup trop coûteux, alors que la crise commençait déjà à se faire sentir et que les apports diminuaient.

84 millions de francs ont été investis à Concarneau, alors que la production a baissé de 14 % entre 1990 et 1996 (de 31 546 t à 27 196 t). Dans les ports de Lorient et Douarnenez, les modernisations ont coûté 17 et 14 millions de francs. Les apports sous criée ont chuté de 55 % à Lorient et de 43 % à Douarnenez. Le transfert du port de pêche de la Rochelle à Chef de Baie, répondant à une volonté politique de miser sur le service, la qualité et l'attractivité, a représenté un investissement particulièrement important. Le montant total des travaux et des installations serait de plus de 300 millions de francs sur la période 1992-1995, d'après les chiffres du Conseil régional de Poitou-Charentes La production du port a chuté entre 1990 et 19 % de 36 % en volume et en valeur. Il n'y a qu'au Guilvinec, où parallèlement aux investissements d'un montant de 67 millions de francs, la production connaît une légère hausse de plus de 4 % entre 1990 et 1996.

On constate donc une absence de sélectivité dans les projets, favorisée par un financement cumulé de la part des collectivités territoriales, de l'État et de l'Union européenne Des aides ont été octroyées trop facilement, sans aucune coopération entre les différents niveaux de gestion des aides et sans étude des conséquences sur l'ensemble de la filière pêche, en particulier sur les taxes de débarquement payées par les producteurs. Le taux de subvention peut atteindre jusqu'à 80 % du montant des travaux. En moyenne, le taux global de financement sur fonds publics est de 47 %, les dépenses d'emprunt de 30 % et l'autofinancement de 23 %. Pour la modernisation des criées, le taux de subvention est en moyenne de 62 %, de la part des collectivités locales et de l'Union européenne.

Le manque de sélectivité est expliqué par le rôle attribué aux criées pour fixer les navires dans un port de pêche, en raison des avantages qu'elles présentent pour le pêcheur : prise en charge à terre, garanties financières, délais de paiement réduits, etc.) et donc pour maintenir une certaine population dans le port. Mais ces criées se retrouvent en concurrence. Si le projet de construction d'une criée à Marseille est réalisé, elle viendra directement concurrencer la criée de Port-de-Bouc, située à 40 km. Or ce projet représente un investissement de 6 millions de francs, alors que la production marseillaise ne dépasse pas 1 000 tonnes par an. Les gestionnaires des ports de pêche réalisent des travaux sans étudier véritablement ce qui est techniquement indispensable. Le cas de Saint-Brieuc doit être mis à part. Les sept ports de la baie se sont transformés en cinq points de débarquements et deux criées, Erquy i l'ouest de la baie et St-Quay Portrieux à l'est, reliées entre elles et chargées de commercialiser l'ensemble de la production de la baie. Ces aménagements ont représenté un investissement minimum et favorisent la concentration de la production.

D'autre part, la gestion des criées, assurée en majorité par les chambres de commerce et d'industrie, n'est pas toujours rentable. Les criées emploient beaucoup de personnel : 1 350 personnes travaillent à plein temps, affectées aux opérations de déchargement, de tri, d'allotissement, de présentation, d'enlèvement du poisson, d'entretien et de maintenance, de contrôle et de traitement administratif, avec une productivité très variable. Le rapport du FIOM, sur les investissements portuaires, a constaté des productivités allant de 30 tonnes/personne/an à 1 500 tonnes/personne/an et conclut à une sous-utilisation du matériel et à un sureffectif manifestes. Dans les ports où les investissements ont été importants, on constate des productivités du travail assez faibles.

Productivité des criées françaises en 1996

Production (tonne)

Nombre de

personnes travaillant dans la criée

Productivité (tonne/pers/an)

Lorient

22 240

79

345

Concarneau

27 1 %

32

242

Le Guilvinec

38 752

48

807

Douarnenez

7 744

85

261

La Rochelle

5 682

44

129

Parallèlement à l'augmentation des investissements portuaires, la flottille de pêche ne cesse de diminuer

Évolution de la flotte de pêche par quartier

Pourtant huit projets d'investissements à terre ont encore été déposés en 1995, pour un montant total de 27 MF, dont 19,4 MF à Lorient, 3 MF à Douarnenez, 2 MF à Loctudy. 0,4 MF à Saint Guénolé. En 1996, le FIOM a encore accordé 3 MF pour une vingtaine de projets avec des montants, de subvention de 25 000 à 450 000 francs. Il semble donc y avoir une mauvaise orientation des aides, qui ne cherchent pas à concentrer la production et à réaliser des économies d'échelle en rendant le secteur plus compétitif

Classement des criées par valeur des ventes en 1996. Source FIOM.

Nom de la criée

Valeur vendue (T)

Quantité vendue (T)

Prix moyen

(F/kg)

1

Boulogne/mer

498 155

51720

9,63

2

Concarneau

353 853

26265

13,47

3

Loricnt

281 920

22103

12,75

4

LeGuilvinec

271 815

14931

18,21

5

Loctudy

196 031

10526

18,62

6

Les Sables d'Olonne

173 483

8771

19,78

7

Saint Guenolé

172 916

10656

16,23

8

LaTurballe

154 288

13734

11,23

9

Baie de Saint Brieuc

135 622

10169

13,34

10

Port en Bessin

115 513

9 733

18,30

11

Oléron

107 909

3 989

11,87

12

Saint Gilles Croix de Vie

107 704

8287

13,00

13

La Rochelle

97 119

5 307

27,05.

M

Douarnenez

88 336

7312

12,08

15

Granville

87 526

10202

8,58

16

Le Croisic

85 879

2847

30,52

17

Cherbourg

75 515

6507

1160

18

Noirmoutier

65 920

2077

31,74

19

Arcachon

65 051

2251

28,90

20

Ile d'Yeu

59 160

2096

28,22

21

Dieppe

53 712

4202

12,78

22

Sète

48 813

2807

17,39

23

Saint Jean de Luz

47 571

4350

10,93

24

Dunkerque

44 001

1722

25,55

25

Saint Malo

42 032

3399

12,37

26

Roscoff

37 403

2149

17,40

27

Le Grau du Roi

36 924

2528

14,61

28

Royan

36 438

1027

35,49

29

Fécamp

36 245

3917

9,25

30

Port la Nouvelle

33 839

3775

8,96

31

Audierne

32 293

1132

28,53

32

Hendaye

30 592

5709

5,36

33

Grandcamp

29 442

1638

17,98

34

Lesconil

28 525

1042

27,38

35

Quiberon

26 098

1017

25,66.

36

Aude

20 185

1436

14,06

37

Brest

19 004

868

21,88

38

Port de Bouc

18 617

1099

16.94

39

Port Vendres

7 616

513

14,85

40

Cancale

6 727

775

8,69

41

Honfleur

6 652

281

23,71

2.2.2 La diversité des charges portuaires

Malgré les grandes disparités qui existent dans les charges au débarquement, on peut dresser la typologie suivante :

- redevance d'équipement des ports de pêche. Elle est utilisée pour les dépenses d'entretien, d'amélioration et d'équipement du port. Ces taxes représentent environ 2 à 4 % du chiffre d'affaires des navires ;

- taxe de criée, qui rémunère les services de la criée. Elle varie entre 1,3 % et 8,5 % du chiffre d'affaires des navires en fonction des services proposés ;

- tarif correspondant à l'utilisation des outillages et services portuaires (de 1 à 10 %), et pesant uniquement sur les pêcheurs (bacs à poissons, eau, glace, tri, déchargement, etc.). Les services peuvent varier de façon importante entre les ports et les pêcheurs peuvent plus ou moins utiliser les services proposés ;

- la taxe FIOM (0,12 % sur le vendeur et 0,12 % sur l'acheteur) ;

- les cotisations volontaires (de 0,4 % à 3,3 % du montant des ventes). Ces cotisations peuvent être des cotisations sociales (péris en mer, écoles maritimes, syndicats professionnels) ou des cotisations professionnelles (OP, fonds de garantie, association des acheteurs des produits de la pêche, groupement de gestion,...).

Les charges portuaires varient de 2,24 % à 20,70 %. Parmi les ports à forte taxation, on trouve Douarnenez (16,58 %), Saint- Guénolé, Le Guilvinec, Loctudy, Concarneau avec des charges comprises entre 15,77 % et 20,70 % du chiffre d'affaires des navires et Lorient (taxe supérieure à 13 %). La majorité des navires les plus endettés au lendemain de la crise se trouve dans les ports à forte taxation : 57 navires dans le port du Guilvinec, 28 à Lorient, 24 à Concarneau, 15 à Douarnenez. On constate aussi que les ports qui ont réalisé le plus d'investissements sont ceux qui imposent des taxes les plus élevées : Douarnenez, Concarneau, Saint Guénolé, Le Guilvinec et Lorient. Aujourd'hui les organismes gestionnaires doivent faire face aux problèmes de surinvestissement et certains réclament un rééchelonnement de leur dette. Le Conseil économique et social rapporte dans son étude de 1997 31 ( * ) que les coûts de construction des infrastructures portuaires font souvent l'objet d'un amortissement accéléré sur 10 ans qui se traduit par un renchérissement des taxes payées par les usagers. L'étalement de l'amortissement sur 20 ou 30 ans serait préférable.

Si les taxes varient beaucoup d'un port à l'autre, la raison en est que les services rendus à terre sont souvent différents. Par exemple, à Port- en-

Bessin, le poisson supporte une taxe d'écorage de 3,75%, 1,4% de redevance d'équipement, 0,8% de taxe de criée, 0,12% de taxe FIOM, 2,3 % de cotisations OP, 0,05 % de cotisations au syndicat des pêcheurs portais et environ 2 % des frais de débarquement, soit au total 10,4 %. Les mareyeurs doivent, eux, payer une taxe de 8,42% (équipement, FIOM, criée). À Lorient, le poisson supporte une taxe de 12,72 % + 1,15 F/bac qui se décomposent de la façon suivante : taxe d'équipement : 1,5 %, taxe de criée: 1,15%, taxe d'outillage: 0,55%, taxe de vente: 0,09%, taxe FIOM : 0,12 %, taxe de déchargement : 9,21 %.

Ces taxes viennent grever les coûts de production des navires et le prix du poisson, même si d'autres facteurs interviennent dans la formation des prix : l'atomisation des marchés, les prix relatifs des autres produits alimentaires, etc. Ces taxes réduisent la compétitivité des pêches françaises et des navires français. D'après le rapport d'audit de février 1995 sur la situation financière des navires de pêche artisanale, une réduction de 10 % des charges portuaires pendant 3 ans équivaut, sur la base du chiffre d'affaires moyen des navires de 12-25 m, à un accroissement des recettes annuelles de l'ordre de 70 000 francs, soit une amélioration de 35 000 francs de l'EBE des navires et une augmentation des salaires de 7 000 francs par an et par homme. De plus, une baisse des charges pourrait inciter les petites unités i débarquer sous criées, ce qui augmenterait les recettes de ces dernières.

Quand on compare le prix moyen au débarquement pour 5 espèces par rapport à d'autres pays européens, on constate que les prix français sont globalement plus élevés.

Prix moyen des espèces au débarquement dans différents pays de
l'Union européenne en 1992 (Ecu/kg).

Danemark

France

Pays- Bas

Royaume- Uni

Morue

1,64

2,24

1,85

1,83

Lieu noir

1,00

0,71

Merlan

1,19

0,75

Baudroie

4,63

3,51

Merlu

4,24

(Source Eurostat)

Cette différence de prix s'explique principalement par une différence dans les charges au débarquement. De façon générale, l'offre n'est pas aussi dispersée dans les autres pays européens, sauf en Espagne, où il existe 164 criées. Il n'y a que 11 criées aux Pays- Bas et 2 en Allemagne et les charges y sont moins élevées : 5 % en Allemagne (3 % de frais de déchargement plus 2 % de frais de vente sous criée) et 3 % au maximum aux Pays- Bas Cette différence pénalise les produits français par rapport aux produits d'importation. Les produits frais importés, transportés par camion et mis en vente sous criée française (ce qui permet à l'exportateur de bénéficier des garanties de paiement), supportent moins de 5 % de taxes (pas de taxe portuaire ni de frais de déchargement). Afin de réduire ces frais, certains équipages assurent eux- mêmes le déchargement des produits ainsi que le tri et la mise en caisse. Malgré ces efforts, les taxes obligatoires restent élevées (taxe de criée, redevance d'équipement, taxe FIOM, etc.).

3. La compétitivité du marché français

Afin de mieux évaluer l'impact des aides de l'État en faveur du marché des produits de la mer, il est d'abord essentiel de comprendre comment se forme la valeur dans la filière pêche, d'identifier les différents intermédiaires, leur rôle et les marges financières qu'ils captent.

3.1 La formation de la valeur dans la filière pêche

L'opacité de la filière et l'existence de plusieurs circuits de distribution des produits de la mer rendent l'étude de la formation de la valeur difficile. Pourtant, il est indispensable d'expliquer les différences qui existent entre le prix du poisson au débarquement et le prix à la consommation et de connaître les marges bénéficiaires des acteurs pour bien comprendre le fonctionnement de la filière

L'étude 32 ( * ) suivante a été réalisée en relevant le prix d'un certain nombre d'espèces à chaque stade au travers des différents circuits de distribution. Les différences de prix ont ensuite été analysées et les marges des acteurs calculées.

L'échantillon retenu comprend des produits achetés entiers et vendus entiers, ainsi que des produits achetés entiers et proposés au détail transformés.

3.1.1 Le schéma général de la mise en marché des poissons frais

Ce schéma est le suivant :

- le pêcheur apporte ses captures en criée ;

- la criée met en vente les captures, après triage, calibrage et allotissement, auprès d'acheteurs agréés, moyennant une taxe globale voisine de 10 %, payée par moitié par le pêcheur et par moitié par l'acheteur. Sous criée, la fixation du prix se fait par un système d'enchères ascendantes et descendantes. Un certain nombre de facteurs peuvent influencer ces enchères : l'importance des quantités débarquées, la taille ou le poids moyen du poisson, les importations de poissons frais et congelés, les substitutions possibles entre espèces et produits, les effets de saisonnalité et l'évolution du revenu national ;

- l'acheteur agréé enlève ses achats à la criée et les transporte jusqu'à son atelier de transformation. Les frais de ramassage ont été calculés et sont de l'ordre de 0,30 F par kilo. Deux interventions différentes sont généralement pratiquées par les acheteurs : le mareyage simple, qui consiste à ranger les produits dans des boîtes en polystyrène, les glacer et les expédier ou la transformation qui peut être plus ou moins complexe, mais qui en règle générale se résume soit au filetage, soit au découpage en darnes avant mise en boite et expédition ;

- entre le mareyage et le client suivant (qui peut être un grossiste, une centrale d'achats, un rayon marée de GMS, ou un poissonnier privé), le transport est généralement à la charge de l'expéditeur. Le coût de transport dépend de l'éloignement des lieux de vente. La valeur moyenne nationale du transport sur vente est proche de 2,30 F/kg. Dans notre étude, cette valeur est inférieure, pour se situer à 1,49 F/kg ;

- le grossiste, livré par le mareyeur ou s'étant approvisionné directement à l'import, assure la livraison de son client final ou lui remet la marchandise sur son carreau du MIN de Rungis ou d'ailleurs. Dans le cas de la livraison par le grossiste, le prix est franco de port. Dans l'autre cas, il est à la charge du client ;

- la centrale d'achats reçoit les produits importés ou achetés aux mareyeurs. Ces centrales appartiennent aux grandes enseignes de la distribution nationale. Elles collectent les besoins des rayons des magasins, négocient les achats à l'import et auprès des mareyeurs. Elles prélèvent entre 6 et 8 % pour leurs frais de fonctionnement ;

- les rayons dépendants d'une centrale d'achats ont à leur charge les frais de transport et de préparation de commandes entre la plate - forme et le magasin, En moyenne, pour les grandes enseignes ayant des magasins dans toute la France, le prix de la livraison est de 2,50 F/kg. Le coût de la plate - forme est d'environ 0,60 F/kg, soit au total 3,10 F/kg à charge du rayon de marée.

Pour un certain nombre de produits importés, le passage en criée se fait à taux réduit. C'est le cas de Boulogne sur Mer, où les prestations reviennent à 2,5 % à charge de l'acheteur. En outre, beaucoup de produits importés ne passent pas en criée. Ils n'acquittent donc aucune taxe et les frais de transport jusqu'aux ateliers de l'acheteur sont généralement inclus dans le prix. Enfin, pour les coquillages comme les huîtres et les moules, les mareyeurs n'interviennent que très rarement. Les producteurs approvisionnent directement les points de vente, les centrales et parfois les grossistes.

3. 1.2 La formation des prix et les coefficients multiplicateurs :

Nous ne reprenons pas ici la totalité de l'échantillon de l'étude. Nous considérons seulement quatre espèces à travers quatre circuits différents.

Dans ce tableau, le prix du poisson est multiplié par 3,70 entre le filet du pêcheur et l'assiette du consommateur. Sur l'ensemble de l'échantillon de notre étude, ce coefficient est de 3,10. Ces valeurs sont très proches des coefficients réels. En effet, en 1995, le prix moyen des produits de la mer sous criée était de 13,32 F/kg et le prix moyen à la consommation de 45,32 F/kg, soit un coefficient de 3,40. Ce coefficient peut néanmoins être beaucoup plus élevé pour certaines espèces ou certains jours particuliers. Par exemple, pour la saumonette, le coefficient relevé est de 17,32.

À chaque stade de la filière, le prix de vente dépend du prix d'achat du poisson (le mareyeur calcule le seuil de prix qu'il ne doit pas dépasser dans ses achats), des pertes de matière, des charges d'exploitation et de la marge bénéficiaire de l'acteur. Les pertes de matière peuvent être très importantes. Il y en a deux types : les pertes liées aux conditions de conservation et de transport (freinte) et celles liées aux transformations. Ces pertes diminuent le rendement technique du poisson Tout au long de la filière, le poisson connaît une diminution de poids et une augmentation de prix.

L'exemple du merlan :

Le pêcheur apporte le merlan sous criée. Celle- ci prélève une taxe de 5 % sur le pêcheur, qui reçoit 14,16 F/kg et sur le mareyeur qui achète le merlan 15,65 F/kg.

Le mareyeur supporte des coûts de ramassage : 0,30 F/kg, soit un coût d'achat de matière première de 15,95 F/kg.

Les pertes de matière sont évaluées à 4 % lors du transport. Le rendement technique du poisson est donc de 96 %. Le prix de revient de matière première est alors de : 15,95 / 0,96 = 16,61 F/kg. Si le mareyeur transforme le poisson, le rendement technique est beaucoup plus faible. Le rendement dépend du poisson et du type de transformation effectuée (filetage, étêtage, préparation en darne, etc.). Le merlan préparé en filet a un rendement de 35 %, soit un prix de revient de 15,95 / 0,35 = 45,57 F/kg.

Ce jour là, le mareyeur vendait le merlan 25,00 FHT/kg, soit une marge brute de : 25 - 16,61 = 8,39 (33,56 %). Le filet de merlan était vendu 55,00 F/kg. La marge brute est de : 55 - 45,57 = 9,43 (17,15 %).

Avant d'expédier son poisson à son client, le mareyeur doit encore supporter des frais d'emballage (I F/kg) et les frais de livraison (1,49 F/kg). Après déduction du transport et de l'emballage, la marge contributive est de : 25 - (16,61 + 1,00 + 1,49) = 5,90 F/kg, soit 23,60 %. Pour le filet de merlan, la marge contributive est de 12,64 %. Le grossiste achète le merlan 25,00 F/kg franco de port. Le grossiste supporte environ 3 % de pertes lors des diverses manipulations, de l'ouverture des boîtes, ainsi qu'une perte en eau. Le rendement technique du poisson est de 97 %, soit un prix de revient de matière première de : 25 / 0,97 = 25,77 F/kg. Le prix de vente du grossiste est de 30,00 FHT/kg. Sa marge brute est de 30 - 25,77 = 4,23 F/kg (14,1 %). Le grossiste livre sa marchandise au MIN, il n'a donc pas de frais de livraison, ni de frais d'emballage. Dans la réalité, les grossistes livrent la marchandise à leurs clients dans 50 % des cas. Ils répercutent alors les coûts de transport sur leurs prix de vente. Sur un filet de merlan acheté 45 F/kg au mareyeur, la perte est toujours de 3 %, le prix de revient est alors de : 45 / 0,97 = 46,39 /kg Le prix de vente est de 56,00 FHT/kg, donc sa marge est de 9,61 F/kg (17,16 %).

Le merlan peut aussi être acheté par une centrale d'achat. Celle- ci ne subit pas de perte car elle n'ouvre pas la marchandise et les frais de transport sont à la charge du rayon. La centrale facture une prestation qu'elle intègre dans le prix de cession aux magasins. Dans notre étude cette prestation est facturée 6,5% du prix d'achat, correspondant à la moyenne des prix pratiqués par les centrales des groupes Leclerc et Carrefour. Les frais de plate-forme s'élèvent donc à : 25 x 0,065 = 1,63 F/kg, le prix de vente est de 26,63 FHT/kg, soit une marge de : (26,63-25) / 26,63 = 6,10 %. La marge est la même sur le filet de merlan. Les frais sont de : 55 x 0,065 = 3,58 F/kg, le prix de vente de 58,58 F/kg et la marge 6,10 %.

Dans notre étude, le rayon GMS achète la marchandise à sa centrale d'achat ou directement au mareyeur. Dans la réalité, les GMS peuvent aussi s'approvisionner chez les grossistes. Si le merlan est acheté à la centrale, le rayon supporte des frais de transport, le coût d'achat de matière première est donc : 26,63 + 3,10 = 29,73 F/kg. Le prix de revient incluant les pertes de matière est de : 29,73 / 0,94 = 31,63 F/kg. La GMS propose le merlan à sa clientèle à 37,82 FHT/kg. Sa marge brute est donc de: 37,82 - 31,63 = 6,19 F/kg, soit 16,37 % du prix de vente. Sur le filet de merlan, le prix de revient de matière première est de: 58,58 + 3,10 = 61,68 / 0,94 = 65,62 F/kg. Le prix de vente étant de 85,21 F/kg, la marge brute du rayon sur le prix de vente est de 23 %.

Lorsque le rayon s'approvisionne directement chez le mareyeur, ses marges sont plus importantes. Les frais de transport sont à la charge du mareyeur. Si l'on considère la queue de lotte de notre tableau, elle est achetée 67,10 F/kg à la centrale et 65 F/kg au mareyeur. Dans le premier cas, elle est vendue 94,69 FHT/kg avec une marge de 21,14 % et dans l'autre, elle est vendue 90,05 FHT/kg avec une marge de 23,21 %.

Le poissonnier peut s'approvisionner chez un grossiste, un mareyeur, directement à la criée ou encore auprès du producteur.

Chez le grossiste, le merlan est acheté 30,00 F/kg. Les frais de ramassage sont de 1,45 F/kg. Le coût d'achat de la matière première est de :

31,45 F/kg. Les pertes de matière chez le poissonnier ont été estimées à 6 %, elles peuvent aller jusqu'à 13 %, le prix de revient est de : 31,45 / 0,94 =

33.45 F/kg. Le poisson est vendu 42,73 FHT/kg. La marge brute représente donc : (42,73 - 33,46) / 42,73 = 21,70 % du prix de vente.

Chez le mareyeur, prix d'achat : 25, 00 F/kg. Les frais de transport sont à la charge du mareyeur. Le prix de revient après les pertes : 25 / 0,94 = 26,60 F/kg. Le merlan est vendu en poissonnerie 39,24 FHT/kg, soit une marge de 12,64 F/kg représentant 32,22 % du prix de vente. Sur le filet de merlan vendu 73,93 F/kg, la marge est de 20,86 %.

En criée, le merlan est acheté 15,65 F/kg par le poissonnier, il est ensuite revendu 40,38 FHT/kg. Après déduction des frais de ramassage (1,45 F/kg) et des pertes de matière (6 %), la marge du poissonnier est de : 54,96 %.

Le détaillant qui achète en criée effectue lui- même les opérations de transformations, généralement à la charge du mareyeur. Le merlan est acheté 15,65 F/kg. Les frais de transport sont de 1,45 F/kg, soit un coût d'achat de 17,10 F/kg. Le rendement technique du merlan après transformation est de 35 %, soit un prix de revient de : 17,10/0, 35 = 48,86 F/kg. Le prix de vente est de 73,93 FHT/kg, soit une marge de : 33,91 %.

3.1.3 Les marges des intermédiaires :

Sur l'ensemble de notre échantillon, les marges moyennes des différents intermédiaires sont résumées dans le tableau suivant :

Ce tableau montre que les marges les plus importantes se font au stade de la vente finale : 36 % pour les poissonniers et 23 % pour les rayons marée des GMS. Les marges les plus faibles sont celles des grossistes (12,82 %). Ceci explique une partie de la situation actuelle de cette profession, qui est obligée de traiter des volumes de plus en plus importants pour survivre. La fonction de grossiste, si elle n'évolue pas, risque de disparaître assez rapidement. Les mareyeurs ont également des marges faibles qui les obligent à augmenter leurs volumes, mais aussi à évoluer vers une plus grande valorisation des produits par la transformation, la préparation et une meilleure présentation des produits. La faiblesse de ces marges justifie les interventions de l'État pour aider à la restructuration de ce secteur.

Les marges des rayons GMS sont bien moins élevées que celles des poissonniers. Cela s'explique par des frais de transport plus lourds et par les coûts de fonctionnement des plates-formes de distribution. Néanmoins, le cumul des marges de la centrale et celle du rayon est à peu près équivalent à la marge du poissonnier s'approvisionnant auprès d'un grossiste.

Cette étude montre clairement que ce sont les grandes surfaces et les poissonniers qui dominent le marché des produits de la mer. Ils tirent au maximum les marges des autres intermédiaires. Néanmoins, même au stade de la vente finale, les marges de la filière ne sont pas particulièrement élevées. Il n'apparaît donc pas dans la filière de produits de la mer de maillon qui capte la rente et sur lesquels on pourrait agir pour diminuer les prix en bout de chaîne. Le seul poste sur lequel une économie semble être possible est celui des frais de transport. Notre étude a montré que les coûts de

transports des produits de la mer étaient environ le double des coûts pour les autres produits frais. On peut réduire ces coûts d'au moins 1 F/kg ce qui représente un gain non négligeable pour la filière.

Coûts de transport des produits de la mer et des produits frais.

Produits de la mer

Produits frais

Morlaix-Paris

1,68 F/kg

0,80 F/kg

Saint-Brieuc-Paris

1.56 F/kg

0,75 F/kg

Lorient-Paris

1,19 F/kg

0,70 F/kg

Pays Bigouden-Lyon

3,10 F/kg

1,.55 F/kg

Pays Bigouden-Marseille

3,50 F/kg

1,82 F/kg

( Source Equinoxe)

3.2 La restructuration du mareyage

En tant que premier acheteur de produits de la mer, le mareyeur joue un rôle essentiel dans la filière pour l'écoulement du poisson. Mais c'est une profession qui a beaucoup souffert de la crise et qui a dû s'adapter aux contraintes de l'internationalisation des échanges et de la modernisation, pour se mettre aux normes sanitaires européennes. L'étude du FIOM sur « La situation et perspectives du mareyage en France en 1994 » montre que, sur un échantillon de 92 entreprises de mareyage, la perte de chiffre d'affaires a été de 12 % entre 1991 et 1993. Le rapport Guérin de mars 1994 sur « La commercialisation des produits de la mer » souligne également les difficultés financières du secteur. L'étude sur les marges contributives du mareyage confirme cette situation.

Les mareyeurs ont besoin d'une trésorerie importante. Les mareyeurs agrées en criée doivent déposer une caution à l'organisme gestionnaire de la halle à marée. Ceux qui s'approvisionnent sous plusieurs criées doivent déposer plusieurs cautions, ce qui pose des problèmes. Un système d'informations au niveau national permettrait de centraliser les cautions des mareyeurs. D'autre part, ils doivent faire face à la longueur des délais de paiement de leurs clients. Avec la chute des cours à la première vente due à la crise en 1993 (moins 12 % par rapport à 1992) et la perte de certains clients, les mareyeurs ont connu une perte de chiffre d'affaires importante, alors qu'ils devaient faire face aux mises aux normes sanitaires européennes. Ces mises aux normes ont exigé la rénovation des ateliers anciens, voire même la construction d'ateliers neufs dans certains cas, ainsi que l'achat de nouveaux équipements pour la fabrication de produits élaborés ou semi-élaborés.

Ces normes sont fixées par la directive européenne n° 91/493 du 22 juillet 1991 et l'arrêté ministériel français du 28 décembre 1992. Ces textes fixent les normes d'hygiène et de qualité que doivent désormais respecter les entreprises de manipulation des produits de la mer (mareyeur et ateliers de transformation), pour les installations, le traitement et la commercialisation des produits de la mer. Les entreprises ont eu jusqu'au 30 juin 1996 pour se mettre aux normes (au départ la date butoir fixée par l'Union européenne était le 31 décembre 1995). En France, le plan de modernisation du mareyage a été mis en place dès 1988, sur proposition des représentants de la profession. Sa montée en puissance date de 1991-1992 avec les normes européennes. Selon les professionnels, ces mises aux normes seraient désormais achevées dans toutes les entreprises françaises.

En 1993, il existait 600 entreprises de mareyage. 450 établissements sont aujourd'hui agréés, soit une réduction de 25 %. Ce chiffre ne correspond pas au nombre d'entreprises, car une société peut être présente sur plusieurs ports et posséder plusieurs ateliers. Les faillites et les fusions ont donc été nombreuses. Il y avait 120 ateliers de mareyage, à la fin des années 80, à Boulogne. Il n'en reste à peine que la moitié aujourd'hui.

D'après les chiffres de l'Union du mareyage français, les dépenses représentent un milliard de francs entre 1990 et 1996 : 100 millions engagés par l'État à travers le FIOM, 150 millions par les collectivités territoriales et l'Europe, par l'intermédiaire de l'IFOP (Instrument financier d'orientation de la pêche), et 700 millions d'autofinancement des entreprises. Au total, de 1988 à 1996, le plan de modernisation a concerné 285 sociétés (une société peut posséder plusieurs ateliers de marées et donc bénéficier de plusieurs aides). Le taux de couverture de ce plan est de 70 %. Les 30 % restants sont constitués principalement de sociétés exploitant un atelier locatif mis aux normes par l'organisme gestionnaire, et également de sociétés ayant réalisé leurs investissements sans solliciter d'aides nationales.

L'État a aidé à subventionner, au travers du FIOM, les équipements, la création d'un fonds de caution interportuaire et un fonds de structuration du mareyage. Ce fonds a pour objectif le renforcement des fonds propres des entreprises. Ces différentes aides ont permis aux entreprises viables de faire face à leurs difficultés financières. La situation est assainie. On constate une augmentation de la productivité dans le secteur du mareyage, jusqu'à 30 % pour certaines entreprises. Cette mise à niveau est essentielle pour conquérir des marchés.

L'agence de la Banque de France de Quimper établit le même diagnostic. Sur une étude de 30 entreprises de mareyage, 21 connaissent une hausse de leur chiffre d'affaires depuis 1996. Pour 12 entreprises, cette hausse est supérieure à 40 %, ce qui serait le résultat d'un processus de concentration. La situation des entreprises de plus de 20 MF de CA s'est nettement améliorée avec une capacité d'autofinancement de 25,34 %. En revanche l'agence constate que l'écart entre les petites et les grandes entreprises ne cesse de s'accroître et anticipe que le mouvement de concentration devrait se poursuivre. Pour certaines petites entreprises qui ont connu des difficultés financières à cause de la crise, la mise aux nonnes a précipité les choses.

Les aides de l'État ont donc permis aux entreprises de mareyage les plus saines de gagner en rentabilité pour se tourner davantage vers la transformation des produits de la mer, créatrice de valeur ajoutée. Certains mareyeurs ont aussi fait le choix de s'orienter davantage vers le commerce international et de développer leur fonction import-export. Mais les concentrations doivent se poursuivre pour que le secteur du mareyage soit bien organisé et qu'il puisse faire face à la grande distribution de plus en plus exigeante. À moyen terme, l'Union du mareyage français prévoit la disparition de la moitié des entreprises d'ici six ans, mais pas forcément des ateliers, car des rachats sont possibles.

3.3 L'application des prix de retrait et le rôle des organisations de producteurs (OP)

3-3.1 Le soutien des cours à la première vente

L'originalité de l'action des OP françaises tient, pour une grande part, au soutien des cours étendu à toutes les espèces jugées représentatives sur les places portuaires, c'est-à-dire à la fois aux espèces « communautaires » et « régionales » en partie indemnisées par l'Union européenne, mais aussi aux espèces dites « autonomes », dont les compensations sont entièrement à la charge des organisations, selon leur propre initiative. La charge financière d'une telle politique est lourde pour les OP, même si les interventions sur les espèces « autonomes » sont minoritaires (7,33 % du total des retraits en 1995).

Ce respect de prix minima pour l'ensemble de la pêche française correspond à une application maximale des mécanismes prévus dans le cadre de la réglementation communautaire. Il peut se révéler pénalisant pour la compétitivité de la production française, face à des produits d'importation intra ou extra-communautaire qui parviennent sur le marché français à des prix inférieurs.

Cette réalité est en effet quasi quotidienne sous le MIN (Marché d'Intérêt National) de Rungis par exemple, où la sole danoise, la langoustine écossaise - qui sont deux espèces « autonomes » - parviennent à des prix plus bas que ceux de la pêche française. Il s'agit là d'un effet pervers de l'application étendue de la politique de soutien des prix à la première vente, qui peut conduire, si l'on n'y prend pas garde, à un maintien artificiel des cours sous les criées.

La cohérence et l'efficacité des mécanismes d'intervention directs ou indirects (retrait ou report) mis en oeuvre à la première vente restent dépendantes de trois facteurs clés :

- leur recours doit rester ponctuel, au risque d'épuiser les ressources financières des fonds de compensation et de s'engager sur la voie risquée du soutien artificiel des cours ;

- le respect des règles énoncées par les adhérents. L'adhésion à une OP étant fondée sur le volontariat, l'efficience des mesures édictées repose sur l'autodiscipline des producteurs adhérents et l'absence de perturbation notable de la part des indépendants ;

- la mise en place simultanée d'une action dans le domaine de la ressource, par des plans de pêche, de façon à rechercher une adéquation entre l'offre des producteurs et la demande formulée par les distributeurs. Il s'agit d'un point faible des OP françaises : l'adoption des plans de capture répond pour elles davantage à un objectif de limitation des apports en période d'abondance qu'à une préoccupation de gestion de la ressource à long terme.

3.3.2 L'inflation des quantités retirées

À l'interface de la production et de la commercialisation, les OP, qu'elles soient ou non dotées d'outils de mareyage, ont une fonction d'information et de défense des intérêts de leurs adhérents. À ce titre, elles sont amenées à jouer un rôle incitatif auprès des producteurs, pour favoriser l'innovation et leur adaptation au système de commercialisation.

Avec le passage d'un marché commandé par l'offre à un marché davantage dicté par la demande, on constate, en effet, que le secteur productif n'exerce plus une influence significative sur la formation des prix à la première vente. Les pêcheurs subissent de plus en plus le prix imposé par les distributeurs par l'intermédiaire de centrales d'achat, qui disposent d'un large panel d'offres. Les mareyeurs relaient ensuite sous criée ces conditions d'achat, qui leur sont imposées. À travers ce schéma type, on observe un déplacement de l'amont vers l'aval du pouvoir de décision, de contrôle et de l'origine du niveau des prix, renforcé par les flux d'importation. Dès lors, la correspondance des cours sous criée avec les seuils de rentabilité des navires n'est plus acquise, d'autant plus que les volumes de produits importés viennent compléter l'offre nationale.

Pour les OP, cette baisse générale des prix s'est traduite, au début de la décennie 1990, par une inflation des quantités retirées du marché et par la sollicitation croissante des fonds d'indemnisation. Des niveaux exceptionnellement élevés d'intervention ont été atteints en 1993 et début 1994 : on est alors passé d'un niveau de retraits de l'ordre de 7 à 8 000 tonnes au début des années 1990 pour les espèces communautaires et régionales (annexes I et VI), à plus de 14 000 tonnes ces deux années de crise, pour revenir aujourd'hui à environ 10 000 tonnes.

Évolution des retraits - France (1992-1996)
(espèces communautaires et régionales)

Cette tendance connaît un ralentissement depuis 1994. On observe même une baisse depuis 1995, sans que les niveaux d'interventions d'avant la crise soit pourtant retrouvés. Bien que les taux d'intervention dépassent rarement 5 % des quantités mises en vente, la grande majorité des producteurs s'accorde à reconnaître la présence de l'OP sous la criée indispensable pour atténuer l'impact économique des fluctuations sur les flottilles. Pour nombre d'entre eux, le motif d'adhésion principal est ce soutien apporté à la première vente. Cette réalité exprime les difficultés croissantes rencontrées à la fois par les patrons-pêcheurs, dans la rentabilisation de leur outil de travail, et par les OP, dans la gestion de leur trésorerie.

Il s'agit là d'un changement radical du concept d'organisation de marché par rapport à la situation ayant cours lors de la création des OP, au début des années 1970. En passant d'un mode d'intervention occasionnel à une sollicitation très fréquente des fonds de compensation, le rôle des OP a pris une importance croissante. Leur place évolue d'autant plus difficilement que peu de modifications réglementaires sont intervenues entre temps pour réformer les mécanismes d'intervention sur le marché. En cherchant à s'adapter à ce contexte de marché, de nombreuses OP ont été amenées à élargir leur domaine de compétence et à s'impliquer davantage dans la promotion et la distribution des produits de la pêche fraîche.

Un autre effet de cette inflation des quantités retirées est le sentiment commun à de nombreux pêcheurs adhérents d'être pénalisés par le comportement de ceux qui « exploitent » le système des prix de retrait en allant pêcher en quantité de façon à percevoir les indemnités. La garantie d'un prix de vente minimal aux producteurs a des conséquences négatives sur la ressource (destruction des produits retirés et comportement de certains pêcheurs visant à pêcher en quantité pour obtenir les prix de retrait) et sur les fonds de compensation (indemnisations). Elle est, de ce fait, dénoncée par les mareyeurs qui prônent davantage l'adoption d'un système de « prix différentiel ». Celui-ci consisterait à ne payer aux pêcheurs que la différence entre le niveau du prix de vente et celui nécessaire à la rentabilité de l'outil de production. En faisant ainsi preuve de désintérêt pour la préservation de la ressource et d'un manque d'esprit coopératif, certains producteurs détournent et discréditent les principes d'action de l'OP.

Lors de la chute des cours en 1993-1994, beaucoup de pêcheurs ne pouvaient plus faire face au remboursement de leurs emprunts. Ils ne se souciaient alors plus de savoir si leur production serait vendue, mais pêchaient pour obtenir les prix de retrait. Il y a dans ce cas dérive d'une politique économique de régulation des marchés vers une politique sociale de soutien des revenus des producteurs.

3.3.3 Le manque de transparence des relations organisations de producteurs-coopératives de mareyage

Le rapport d'audit Mettling-Hénaff de 1995, repris par le rapport Bassey-Porry de 1996, dénonce le manque de clarté dans les relations financières et fonctionnelles entre les OP et les coopératives de mareyage. La confusion juridique et comptable, ainsi que la présence de dirigeants communs en sont à l'origine, et font souvent l'objet de dénonciations, notamment de la part du mareyage traditionnel, qui n'hésite pas à évoquer des cas de concurrence déloyale.

Certaines coopératives se sont effectivement substituées aux OP, notamment lors des crises de 1993 et 1994, dans le rôle de soutien du marché, par des interventions étendues ne respectant pas les contraintes de rentabilité financière et alourdissant les charges financières (achats « à découvert » sans garantie de revente, constitution de stocks coûteux, concessions aux clients sur l'allongement des délais de paiement,..). De fait, la situation financière de plusieurs d'entre elles est à présent critique et nécessite la mise en place de procédures de restructuration, voire de recapitalisation.

L'intégration, ainsi conçue, conduit à une dérive vers un assistanat des producteurs, producteurs à la fois adhérents de l'OP et sociétaires de la coopérative de mareyage. De ce fait, certaines organisations connaissent des équilibres financiers précaires, nécessitant dans certains cas de profondes restructurations Pourtant, malgré l'adoption de révisions réglementaires ponctuelles, aucune réforme du statut des OP n'a visé leur adaptation aux nouvelles conditions du marché des produits de la mer.

D'autre part, l'association entre une OP, qui doit défendre les intérêts des pêcheurs et garantir les cours les plus élevés possibles et une coopérative de mareyage, qui doit augmenter son chiffre d'affaires et donc acheter au plus bas, semble contradictoire, surtout lorsque le dirigeant des deux structures est le même. Ceci a conduit les OP à passer des alliances avec d'autres acteurs de la filière, en particulier des entreprises de transformation, pour garantir les débouchés. C'est le cas pour la Coquille-Saint-Jacques de la Baie de Saint-Brieuc. L'OP prélève systématiquement une part de la production pour la transformation, avec un cofinancement de l'OP et du FIOM, qui verse des aides à la transformation. Ce système est louable lorsque la production est excédentaire. Aujourd'hui la Coquille-Saint-Jacques se raréfie et les prélèvements pour la transformation continuent avec les aides du FIOM. Or la production pourrait être achetée à un prix supérieur et sans aide par les autres circuits de distribution. Cet exemple traduit le manque de souplesse et de cohésion de la filière, qui ne sait pas s'adapter aux évolutions du marché et constitue un exemple de la mauvaise orientation de certaines aides du FIOM.

Un autre cas souvent dénoncé est la remise sur le marché des quantités retirées par l'intermédiaire de l'outil de la coopérative de mareyage. L'insuffisance de contrôle par l'Administration laisse en effet libre court à des suspicions de ce genre, sans que la preuve formelle en ait jamais été apportée.

3-4 La prévision des apports et la circulation de l'information

La circulation de l'information est indispensable au bon fonctionnement de la filière. Si les acteurs veulent vendre leur production, ils doivent la faire connaître. On assiste dans certains ports à des incohérences. Lorsque les volumes débarqués sont importants, les cours s'effondrent et certains tonnages peuvent partir au retrait, alors que dans le même temps, des grossistes et des mareyeurs très éloignés, qui ont besoin de ce produit et qui l'achèteraient à un cours supérieur, importent pour garantir leur approvisionnement, faute d'accès à l'information. La libre circulation de l'information réduirait le gaspillage des ressources, les interventions des OP et du FIOM sur les retraits, ainsi que les sorties de devises. Les GMS ont besoin, en permanence, de quantités importantes de certaines espèces, pour pouvoir mettre en place des promotions et en même temps une grande diversité de produits, afin de proposer une gamme variée à leur clientèle. Elles ont besoin de connaître à l'avance ce qu'elles pourront acheter et, pour cette raison, importent la marchandise. La libre circulation de l'information pourrait donc réduire les importations de certaines espèces.

Après plusieurs essais à l'échelle locale au début des années 1990, un réseau d'informations de portée nationale a été lancé par la Coopération Maritime en janvier 1995. Piloté par une structure légère, CODIMAR, il est assorti d'une structure destinée à proposer des animations pour les espèces dont la commercialisation pose problème (cellule « marketing »). Par téléphone, télécopie, minitel ou messagerie, les données sont récoltées quotidiennement sur 24 ports et transmises à la grande distribution. Cependant, cette cellule « marketing » n'a donné que très peu de résultats concrets et les animations ne sont pas toujours réalisées.

Le réseau de prévision d'apports du FIOM, actuellement en phase préopérationnelle, doit reprendre les acquis de cette expérience pour la développer. Il s'agit d'un système plus sophistiqué et plus ambitieux avec une large part laissée à l'automatisation. La possibilité est également ménagée d'un retour d'informations au patron-pêcheur sur l'évolution du marché.

La réalisation de la prévision des apports, inscrite dès 1994 parmi les cinq grandes missions structurelles du FIOM, a ainsi pour but d'anticiper les quantités débarquées par type de produits, afin d'en améliorer l'écoulement sur le marché. La première phase de cette opération consiste à équiper les bateaux en matériel de communication. Au cours des années 1994 et 1995, ce sont ainsi 200 patrons de pêche qui ont fait l'acquisition d'un ensemble de transmission Inmarsat C, financé à 50 % par le FIOM. Le FIOM investit environ 3 MF chaque année pour la mise en place du réseau informatique. Près d'une trentaine de ports est concernée par la démarche, qui touche les flottilles de plus de 16 mètres pratiquant une pêche de plus de trois jours.

L'émetteur de l'information est le bateau doté d'un micro-ordinateur, équipé d'un logiciel de bord, et d'un système de communication par satellite (Standard C). Le récepteur est le gestionnaire local, le plus souvent la criée, qui dispose d'un équipement informatique et d'un « logiciel terre » permettant de récupérer les informations, de les vérifier et de les réexpédier vers un serveur national basé à Paris. Celui-ci, accessible 24h/24h, compile et réactualise automatiquement les données au niveau national.

Cependant le cahier des charges élaboré par le FIOM pour l'équipement informatique des criées et des navires de pêche n'est pas suffisamment précis. Il est juste indiqué l'obligation de transmissions des données statistiques et le format de la transmission, sans aucune autre indication sur la compatibilité des systèmes entre eux. Le FIOM a ainsi distribué des subventions pour informatisation des criées et des navires sans aucun contrôle de la pertinence et de la compatibilité du système. En conséquence, la collecte des prévisions élaborées en 1991 n'est toujours pas opérationnelle. Face à ces défaillances, des systèmes privés se sont développés, comme le système IKTUS de la société Agro-marchés Internationaux.

D'autre part, le problème du contrôle de l'information n'est toujours pas réglé. Le FIOM considère qu'il doit contrôler la circulation des informations. Dans le cas de la CODIMAR, les organisations de producteurs sont à la source de l'information et en maîtrisent la diffusion. Ce principe est pourtant rejeté par une majorité de mareyeurs privés, qui dénoncent la possible appropriation des données.

D'un côté, l'intérêt des producteurs fournisseurs de l'information est de stimuler la demande, donc de la diffuser le plus largement possible. D'autre part, le mareyeur privilégie davantage un fonctionnement de nature à limiter la concurrence et qui lui permettra de savoir où et quand s'approvisionner au moindre coût. C'est dans le contexte d'ouverture du réseau à la grande distribution que les points d'achoppement sont les plus vifs au sein de la profession. Le choix qui semble être fait, à travers le réseau du FIOM, est celui d'une gestion collégiale, dont les modalités de fonctionnement sur le terrain restent pilotées par les producteurs.

Dans le cas des armements, la question de la maîtrise de l'outil de prévision des apports est beaucoup moins délicate dans la mesure où les intérêts sont communs et regroupés au sein d'une même entreprise. L'armement concarnois Delhemmes en est un exemple, puisque, depuis mai 1995, ses 14 navires sont équipés d'un système de communication satellitaire. Celui-ci, un peu différent du Standard C, permet une gestion de flotte avantageuse, avec des possibilités de localisation permanente des bateaux et la transmission de messages. Les bateaux peuvent communiquer entre eux et avec leur armement en toute confidentialité. Il est ainsi permis aux dirigeants à terre d'anticiper les débarquements importants par la négociation de contrats et d'aviser avec l'OP des meilleures options de débarquement (date, lieu). De plus, l'armement prévient les mareyeurs de l'offre à prendre en compte dans les deux ou trois jours.

Il revient au FIOM, structure d'organisation du marché, d'encadrer les systèmes d'informations et de prévisions des apports. Il doit inciter à toutes les initiatives qui vont dans le sens d'une plus grande transparence de la filière et d'une homogénéisation des procédures de commercialisation. Il doit garantir la libre circulation de l'information et, pour cela, assurer la cohérence des systèmes. Or le FIOM ne remplit pas aujourd'hui cette mission de manière satisfaisante.

3.5 Les incitations en faveur de la qualité

Alors que la motivation des producteurs est l'obtention d'une rentabilité immédiate, la difficulté majeure des démarches portant sur la qualité reste l'évolution des mentalités et l'inscription des stratégies d'entreprise dans le moyen terme.

3.5.1 Les expériences françaises en matière de qualité

Parmi les expériences françaises entreprises en faveur de la qualité (cf. annexe 12), deux exemples permettent de mieux situer les choix des opérateurs en fonction du produit ciblé et de l'extension géographique définie pour le programme.

- Les poissons pélagiques frais de Méditerranée

La première certification de conformité pour un produit de la pêche revient à COPEMART. L'initiative de l'OP de Port-de-Bouc vise les petits poissons pélagiques, fortement concurrencés par les importations marocaines. Depuis août 1992, les producteurs de sardines et d'anchois se sont engagés sur un cahier des charges La définition des procédures de traitement du poisson à bord et à la vente offre une garantie de qualité et de délai au premier acheteur, qui est formalisée par l'étiquetage du produit. L'extension de la démarche au niveau méditerranéen, à travers l'AMOP (Association Méditerranéenne des OP), est en cours avec un prolongement possible à moyen terme vers un second marché : celui de la conserverie. Pour l'instant, le niveau des cours ne permet pas d'établir un bilan financier de l'opération. L'encouragement vient surtout d'une meilleure organisation du marché, avec la recherche de nouvelles formes de conditionnement et le soutien promotionnel d'une appellation « Golfe du Lion ».

- La pêche fraîche bretonne

Constituée à l'initiative des OP bretonnes coopératives en 1993, « Bretagne Qualité Mer » (BQM) est une association destinée à défendre le savoir-faire régional et à valoriser la qualité des produits en garantissant la provenance. Ce programme met l'accent sur l'identification, la sélection et la « traçabilité » du produit, en combinant des actions d'amélioration auprès de tous les opérateurs de la filière. La marque commerciale collective BQM est aujourd'hui étiquetée sur des produits sensibles et relayée jusqu'au distributeur. La plus-value de la qualité est avérée : on observe des prix supérieurs de l'ordre de 10 à 15 % pour des lots de sardines et langoustines étiquetés BQM. En abordant à la fois l'identification et la valorisation des produits, ces démarches devraient inciter à une meilleure sélectivité des captures et à de meilleures pratiques de traitement.

Les stratégies de qualité requièrent une mobilisation de moyens en rapport avec les caractéristiques du produit et le type de consommation visé. Elles nécessitent un potentiel valorisable du produit (fraîcheur, origine, spécificité) et un soutien technique et financier important. Un secteur particulièrement concerné est celui de la pêche fraîche, dans la mesure où le produit frais est un atout potentiel souvent mal valorisé, en raison d'un manque de relais tout au long de la filière.

Cette dernière remarque met en évidence l'indispensable engagement collectif des professionnels de la filière pour préserver le niveau qualitatif existant au moment de la capture. Les stratégies qualité constituent ainsi un élément fédérateur qui mérite d'être renforcé au sein d'une filière traditionnellement marquée par l'individualisme de ses acteurs et l'atomisation de l'offre.

3.5.2 Le financement

Les premières incitations publiques ont été adoptées pour le respect des exigences sanitaires, dans le cadre de la mise aux « normes » des ateliers de marée, des criées ou des entreprises de transformation. Il s'agit essentiellement de subventions pour l'amélioration des locaux et des équipements. Ces progrès sont à la source de gains de productivité dans de nombreuses entreprises (continuité de la chaîne du froid, notion de « marche en avant »...).

Une autre perspective s'inscrit dans le prolongement des démarches précédentes, avec la formation des personnels. À la différence des mesures de mises aux normes, les pouvoirs publics ne soutiennent peu ou pas ces actions, qui sont souvent issues des plans de formation internes aux entreprises. Les subventions publiques touchent ainsi majoritairement les équipements matériels, en délaissant les compétences humaines.

La faiblesse des aides est également préjudiciables aux démarches d'autocontrôlé. Un seul exemple de fonctionnement d'autocontrôle bactériologique existe en France : sur le bassin de Marennes-Oléron avec le concours de la Section régionale conchylicole, sous tutelle des Affaires maritimes.

Les démarches de filière ont souvent été initiées par le FIOM ou les Conseils régionaux et généraux, à l'image de Bretagne Qualité Mer et de Marennes-Oléron. Il s'agit de démarches collectives mettant en avant un raisonnement intégrant l'ensemble de la filière et un souci promotionnel. Le travail des opérateurs est coordonné par le respect d'un cahier des charges commun sur le produit ou les procédés. Il est garanti par un plan de contrôle interne et externe. Le taux de financement par les collectivités publiques est au maximum de 50 % sur ces projets, avec une base de renouvellement annuel souvent difficile à gérer pour des programmes pluriannuels.

Les démarches d'entreprise sont des stratégies qualitatives individuelles pouvant conduire à la certification ISO 9001 ou 9002. Il est souvent établi un co-financement avec des organismes locaux tels que les Chambres régionales du commerce et de l'industrie, à travers des aides et fonds divers (FRAC : Fonds régionaux d'aide au conseil, aides à l'embauche de personnels « qualité »...).

Enfin, il existe des financements pour des projets d'intérêts généraux (réflexion, études prospectives), dont le FIOM est parfois maître d'oeuvre (normalisation, réseau statistique...), et d'autres destinés à des opérations de promotion, au déroulement de colloques ou de conférences.

3.5.3 Les difficultés rencontrées

L'un des points critiques de la mise en place des démarches qualité dans la filière pêche est celui de la « lourdeur » administrative (délais de traitement des dossiers...) et du manque de transparence des processus de décision. La complexité des procédures induit des délais de prise de décision allongés et connaît parfois des décalages entre le moment de la notification d'accord et les aides afférentes. Ces dysfonctionnements peuvent être une cause de découragement des professionnels pour l'acquisition d'une certification.

L'indécision régnant pour l'adoption de mesures d'application des règlements communautaires ou des décisions nationales, ainsi que l'absence de maître d'oeuvre, sont ainsi dommageables à la mise en place opérationnelle des projets. On assiste ainsi ponctuellement à d'importants retards dans le traitement des dossiers de certification, voire à leur suspension, dans la mesure où les critères justifiant leur validation ou leur rejet ne sont pas établis. La définition des critères de qualité liée à la provenance (IGP : Indication géographique protégée) en est un exemple, puisque le choix du critère de provenance n'est pas tranché entre la zone de pêche, le point de débarquement, le lieu d'immatriculation du navire, etc. La seule indication géographique protégée attribuée est celle des coquilles St Jacques de Côtes d'Armor, pour lesquelles la question de la provenance est amplifiée par l'existence d'une zone de pêche limitée à un gisement naturel.

L'identité régionale ou locale assortie d'une reconnaissance du métier est le meilleur support de communication pour valoriser la pêche côtière française ou l'aquaculture (huître, moule) et mettre en valeur ses spécificités au regard des produits d'importation intra ou extra communautaires. Il est ainsi permis d'établir une liaison entre la provenance et la qualité et de fonder une politique d'aménagement du territoire basée sur des identités.

CHAPITRE V - LA COHÉRENCE DES POLITIQUES PUBLIQUES

Outre les faiblesses des politiques mises en oeuvre par l'État, les principaux dysfonctionnements observés au sein de l'interprofession relèvent plus ou moins directement d'un manque d'entente des opérateurs entre eux pour la prise de décision et l'application des mesures. Les désaccords structuraux, les rivalités portuaires et les oppositions stratégiques marquent les contextes de gestion. Outre les divergences de vues politiques, la superposition du cadre réglementaire européen avec la législation française n'est pas étrangère au manque d'harmonisation des interventions.

1. La superposition de la législation européenne et du cadre français

Indépendamment des considérations particulières et des différentes conceptions d'intervention, certains contentieux et lacunes sont nés d'un manque de clarification et de partage des compétences. Celui-ci est lié à la superposition du cadre d'action institué par l'Union européenne avec celle des institutions issues de la législation antérieure de gestion des pêches maritimes françaises d'après l'Ordonnance de 1945, révisée par la Loi de 1991.

À titre d'exemple, le cas des Comités locaux anciennement dotés d'une compétence économique et de gestion de la ressource est significatif. Ainsi, depuis la création des trois Fonds régionaux d'organisation des marchés (FROM) au début des années 1960, relayés par les Organisations de producteurs communautaires en 1971, aucune politique tranchée n'a été établie pour redéfinir leur cadre d'intervention.

Le problème de la coordination et de la répartition des attributions réglementaires se pose également pour la gestion de la ressource. Dans de nombreux cas, les Comités locaux gèrent les licences et autres droits de pêche et font appliquer les dispositions réglementaires techniques de limitation de l'effort de pêche, alors que les OP sont en principe chargées de la mise en oeuvre des plans de capture et du respect des quotas 33 ( * ) . Cette réalité instaure une mauvaise répartition des rôles, ainsi qu'une cohabitation surtout marquée par une ignorance réciproque, et trop rarement par des interventions concertées.

Enfin, la traduction en droit français de la réglementation européenne ne tient pas toujours suffisamment compte des spécificités de la pêche française. La superposition des deux cadres conduit à une multitude de règlements, de lois, de décrets, auxquels viennent s'ajouter les arrêtés préfectoraux des régions. Les professionnels évoluent donc dans un contexte réglementaire particulièrement obscur.

2. Le problème de la répartition des compétences

Une lacune fréquente se pose en obstacle à la réalisation des politiques ou des applications réglementaires décidées, par manque d'attribution des compétences entre les différents intervenants institutionnels. Ce problème se vérifie dans les ports français avec d'autant plus d'acuité quand il s'agit de la mise en place du contrôle nécessaire au respect des mesures de gestion de la ressource ou d'organisation du marché. Le grand nombre de services administratifs concernés et le partage des compétences pour la réalisation des contrôles sont souvent des obstacles à la mise en oeuvre de ces contrôles et à leur efficacité. De plus, on note un manque de volonté et de moyens pour contrôler réellement le secteur des pêches maritimes et faire appliquer les réglementations.

Pour l'application des exigences sanitaires communautaires, il n'existe aucune autorité compétente pour attribuer officiellement les niveaux de fraîcheur aux lots de poisson sous les criées (règlement 103/76 décrivant les critères de commercialisation). Les services vétérinaires ont en charge le respect sanitaire selon des normes de salubrité, mais ils ne sont pas mandatés pour intervenir sur l'aspect qualitatif à travers la classification E, A et B. De fait, l'interprétation de la qualité est très variable selon les ports 34 ( * ) . Il existe donc un réel problème de contrôle de l'application des critères selon la grille de l'Union européenne, dans la mesure où aucun service indépendant et impartial n'a été désigné comme compétent pour définir les niveaux de qualité.

Les gestionnaires portuaires qui s'en chargent la plupart du temps ne sont pas à l'évidence les mieux placés, puisque leur rémunération se fait au prorata de la valeur débarquée et que leur intérêt est d'attirer le maximum de producteurs à la vente, ce qui dissuade les classements trop « rigoureux ». La concurrence entre les ports et les criées est ici ressentie comme négative. Les démarches actuelles manquent ainsi d'indépendance, avec l'emploi fréquent de « qualiticiens » par les armements producteurs et le manque d'impartialité qui en découle.

Dans le même ordre d'idée, on constate, au vu des premières expériences en matière de certification, qu'il n'existe pas d'harmonisation nationale d'appréciation des exigences sanitaires. Chaque département, à travers les DDCCRF (Directions départementales de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes) et les DSV (Directions des services vétérinaires), émet une interprétation individuelle sur les modalités d'application des règlements en vigueur. Il n'existe pas de guide national, malgré la nouvelle approche communautaire, qui vise à responsabiliser les professionnels en les incitant à faire des propositions pour la réalisation des mesures édictées. Cette situation conduit à une formulation disparate des recommandations et des procédures de reconnaissance des critères qualitatifs.

Nous avons également pu constater précédemment combien le fonctionnement des QP pouvait présenter des risques de dérive par manque d'encadrement suffisant (relations OP-coopératives de mareyage). Ceci est d'autant plus vérifié en temps de crise, où le soutien des producteurs réclame des mesures d'urgence à efficacité immédiate.

Ces quelques études de cas nous informent sur les conséquences de la dispersion des acteurs et leur manque de volonté à coopérer et coordonner leurs actions. Il s'agit à l'évidence d'une source de fragilité pour la filière des pêches maritimes et d'amplification des crises conjoncturelles.

CONCLUSION

Une situation assainie

À l'issue du diagnostic sur les pêches maritimes françaises, il apparaît que le secteur des pêches se porte mieux : les navires ont retrouvé une certaine rentabilité, même si leur capacité d'emprunt n'est pas encore reconstituée, les cours du poisson se sont redressés, ainsi que les rémunérations des marins-pêcheurs. La consommation des produits frais est de nouveau en progression depuis 1994-1995. La récente remontée des cours des devises espagnoles, italiennes et britanniques ont permis aux producteurs français de regagner des parts de marché à l'exportation et sur le marché intérieur. La production s'écoule bien, et les retraits ont été très faibles ces deux dernières années.

Les pouvoirs publics ont accompagné la restructuration du secteur à travers deux plans d'action : le contrat de progrès pour la pêche en 1993 et le plan de restructuration pour la pêche artisanale en 1995 (plan Puech). Ces plans avaient comme premier objectif le redressement de la situation financière des navires, par le versement d'aides d'urgence aux familles en difficulté, l'adoption de mesures financières (renforcement des fonds propres et bonification d'intérêt) et l'allégement des charges sociales. Les pouvoirs publics ont aussi réussi, malgré l'ampleur de la crise, à limiter la décroissance de l'emploi. Ils ont également soutenu les organisations de producteurs et ont aidé à la restructuration et à la modernisation des ateliers de manipulations et de transformations des produits de la mer (halle à marée, atelier de mareyage, etc.), confrontés aux mises aux normes européennes et à la mondialisation des échanges.

Néanmoins, on peut reprocher aux pouvoirs publics de ne pas avoir anticipé les problèmes plus tôt. Ils ont laissé s'installer des situations critiques, notamment en poussant les entreprises de pêche à se moderniser au mauvais moment et à s'endetter lourdement.

Mais les causes de la crise sont toujours latentes

D'autre part, si la situation est assainie aujourd'hui, elle n'est certainement pas durable, car toutes les causes de la crise sont encore présentes : la raréfaction de la ressource, l'internationalisation du marché, des charges sociales et financières élevées et un marché toujours peu organisé et concentré.

Si les mesures de limitation de l'effort de pêche et de limitation des captures ont permis de freiner la dégradation des ressources, elles n'ont certes pas permis de l'enrayer. La préservation des ressources nécessitera une volonté politique plus affirmée et pourrait exiger de nouvelles réductions d'emplois.

L'internationalisation du marché « qui participe d'un phénomène global et séculaire, va se poursuivre, obligeant les acteurs des pêches françaises à s'adapter à cette évolution : recherche de compétitivité, capacité d'écoute et de réponse aux sollicitations de la demande, exigence en matière de qualité, incorporation du progrès technique à tous les niveaux de la filière ...apparaissent comme les meilleurs garants de la pérennité des pêches françaises » 35 ( * ) . La France est le troisième importateur mondial de produits de la mer et seulement le treizième exportateur. Plutôt que d'essayer de lutter contre les importations, développer les exportations de produits à haute valeur ajoutée semble être une solution plus durable et le seul moyen de réduire le déficit commercial de la France en produits de la mer, qui représente 11,5 milliards de francs.

Même si le Gouvernement a pris un certain nombre de mesures en faveur du désendettement des navires, la plupart des patrons-pêcheurs doivent encore faire face, tous les mois, à des échéances élevées. Dès lors une nouvelle chute des cours du poisson entraînerait les mêmes effets qu'en 1993-1994. D'autre part, même si les charges sociales ont été considérablement diminuées, le coût total de la main d'oeuvre en France reste un des plus élevés d'Europe. Dans ces conditions, le secteur des pêches ne peut être considéré comme complètement redressé. Il reste très vulnérable, en particulier, à la baisse des cours, et on ne peut exclure de nouvelles aides qui appelleraient de nouveaux plans d'action.

S'agissant des ports de pêche et, d'une manière générale, des points de débarquement et des criées, le rapport conclut que l'éparpillement caractéristique de la France est à l'origine d'une augmentation des taxes de débarquement. Dans ces conditions, les dépenses d'équipement devraient plutôt être concentrées prioritairement sur les ports et les criées dont les apports sont fortement croissants. L'une des questions majeures est, dès lors, de savoir ce qui sera fait des autres sites, qui constituent un patrimoine très important, une source de richesse pour les territoires concernés. Sans doute conviendrait-il d'avoir moins de sites de criée que de ports.

Enfin, le marché des produits de la mer est toujours fragmenté. L'information ne circule pas entre les maillons de la chaîne de commercialisation. Il est souvent plus facile pour la distribution d'avoir recours aux importations que de s'approvisionner sur le marché français. La production est atomisée et dispersée, entraînant des frais de transport élevés pour le ramassage des produits. De plus, les frais de débarquement sont plus élevés que dans les autres pays européens, car les lourds investissements portuaires réalisés depuis la fin des années 80 (parmi les plus importants d'Europe) ne sont toujours pas amortis. Les restructurations doivent donc se poursuivre, certains maillons doivent continuer leur évolution, en particulier le secteur du mareyage, pour pouvoir face à la concurrence internationale.

La loi d'orientation des pêches maritimes et des cultures marines : des réponses importantes

Les points de réforme, qui apparaissent nécessaires à la suite de ce bilan, concernent essentiellement trois thèmes : clarifier le rôle des opérateurs institutionnels, favoriser la transparence du marché et contrôler pour faire respecter.

Le projet de loi d'orientation des pêches maritimes et des cultures marines, actuellement en lecture à l'Assemblée Nationale, semble répondre à ces besoins. Il constitue un réel progrès dans la filière pêche. C'est, en effet, la première fois qu'une loi d'orientation similaire aux lois d'orientations agricoles est élaborée. Il témoigne de la volonté des pouvoirs publics à maintenir en France un secteur des pêches compétitif et de qualité. Issu d'une large concertation avec les professionnels et les experts scientifiques, ce projet vise à poursuivre les efforts de restructuration. Il fixe cinq objectifs 36 ( * ) : une meilleure gestion de la ressource, une plus grande organisation de la filière, la transformation du statut légal et fiscal des entreprises de pêche, la modernisation des relations sociales et la promotion des cultures marines.

Le secteur des pêches est fortement administré, au niveau communautaire, national et local, sans qu'il y ait forcément une cohérence entre tous ces niveaux d'intervention. Les pêcheurs se plaignent souvent de la lourdeur de la réglementation et d'un manque de liberté dans l'exercice de leur profession. Clarifier le rôle des opérateurs institutionnels est donc indispensable pour faire accepter la réglementation aux professionnels.

La transformation du FIOM en Ofimer, prévue dans la loi d'orientation, peut aussi contribuer à clarifier le rôle des opérateurs et à introduire plus de transparence dans la filière. Pour cela la transformation du FIOM ne doit pas représenter qu'un simple changement de nom, mais surtout un changement de méthode, pour organiser véritablement le marché des produits de la mer, non pas uniquement en développant la promotion et les démarches qualitatives, mais surtout en améliorant la connaissance du marché : des espèces débarquées, des ports de débarquement, de la qualité des produits, des cours de vente, afin d'améliorer l'écoulement de ces produits. Les pêcheurs doivent avoir un retour de l'information qui leur permettra de gérer leur jour de débarquement pour éviter les goulots d'étranglement, mais aussi de ne pas pêcher les espèces dont le marché ne veut pas. Cela permettrait aussi de mieux responsabiliser les pêcheurs vis-à-vis de la ressource. L'Ofimer doit garantir la libre circulation de l'information et l'amélioration de la collecte et de la qualité des données statistiques qui sont d'une manière générale d'une fréquence et d'une robustesse très variables, afin de rétablir le bon fonctionnement économique dans la filière pêche, de rendre les acteurs plus responsables et de rentabiliser la filière. Seule condition pour pouvoir réduire progressivement les aides publiques, presque égales aux chiffres d'affaires du secteur.

Il est aussi important de renforcer les contrôles dans le secteur des pêches maritimes. La France dispose des moyens nécessaires mais les compétences sont trop dispersées entre différents ministères et différents services pour que le contrôle soit vraiment opérationnel et efficace.

La réussite n'est pas acquise

Ainsi, il apparaît que les mesures d'urgence ont contribué à un certain assainissement, et que la loi d'orientation organise des actions publiques qui, à la lumière de l'évaluation, paraissent bien concerner des enjeux essentiels. Il reste que, même dans un secteur aussi fortement encadré par l'État, les professionnels ont un rôle décisif à jouer. Il reviendra à l'Ofimer, dont la fonction sera centrale, d'encourager les initiatives, de responsabiliser les professionnels, de renforcer l'efficacité économique de la filière. Tous les efforts doivent être conjugués pour faire face au mieux aux deux dangers majeurs qui résistent : la poursuite du processus d'épuisement des ressources, d'une part, et la divergence entre l'évolution des coûts et celle des cours d'autre part. Si l'on veut éviter une pression accrue sur les budgets publics, il est nécessaire à la fois que les pêcheurs ne pèchent que ce qu'ils peuvent écouler, que les ressources soient préservées et que tous les acteurs unissent leurs efforts pour renforcer la compétitivité.

ANNEXES

ANNEXE 1 - Salaires forfaitaires des marins-pêcheurs

ANNEXE 2 - CLASSEMENT DES PRINCIPALES ESPECES PAR ORDRE DÉCROISSANT DES TONNAGES DEBARQUES

(Source FIOM)

ANNEXE 3 - CLASSEMENT DES PRINCIPALES ESPÈCES PAR ORDRE DÉCROISSANT DU CHIFFRE D'AFFAIRES REALISÉE

(Source FIOM) - 137-

Annexe 4 - ÉVALUATION DE L'ÉTAT ACTUEL DES RESSOURCES

HALIEUTIQUES

1.1 État des principaux stocks pour la France

A- Forest, directeur du département des ressources halieutiques de l'Ifremer et A. Souplet, chercheur Ifremer, dressent le bilan des principales ressources pour la France, dans une étude intitulée « État en 1995 des stocks halieutiques de l'Atlantique Nord-Est » .

1.2 Les ressources de la Mer du Nord

Le stock de hareng de mer du Nord s'est effondré dans les années 1970. La pêcherie a été fermée, ce qui a permis une reconstitution du stock. Mais aujourd'hui, la surexploitation recommence et les captures diminuent, elles sont passées de 646 000 t en 1988 à 395 000 t en 1994 (tous pays de l'Union européenne confondus). Le stock de maquereau s'est également effondré dans les années 70, mais contrairement au hareng, le stock ne s'est jamais reconstitué. Pour la morue, la situation est très inquiétante. Les biologistes estiment « qu'avec l'effort de pêche et le diagramme d'exploitation actuels, seulement 1 % des individus d'au moins un an parviennent à maturité sexuelle » . Les captures de morues se sont effondrées de 350 000 t en 1972 à 88 000 t en 1994 Pour l'églefin, l'état du stock est resté inquiétant pendant longtemps mais les derniers recrutements ont été bons, ce qui a permis au stock de revenir à un niveau acceptable. Le merlan a connu de fortes variations durant les années 70 et au début des années 1980, mais le stock des géniteurs semble s'être stabilisé à un niveau acceptable. Le stock de lieu noir, qui est particulièrement important pour les navires hauturiers du nord de la France, est en très mauvais état. La biomasse de géniteurs a atteint son plus bas niveau au début des années 90. Cependant, la mortalité par pêche a fortement baissé, ce qui devrait permettre au stock de se reconstituer un peu. En ce qui concerne le stock de sole, il n'y a pas d'inquiétude particulière.

Enfin, pour la plie, le stock de géniteurs diminue depuis plusieurs années et le renouvellement du stock n'est plus assuré.

1.3 Les ressources de la Manche

Pour la morue et le merlan de Manche Ouest, il n'y a pas de donnée sur l'état des stocks, mais on constate une chute des apports de ces deux espèces entre 1988 et 1994 (2 700 t de morue en 1988 et 600 t en 1994, 2 700 t de merlan en 1988 et 1800 t en 1994). Le stock de sole de Manche Est connaît une amélioration ces dernières années et les perspectives à moyen terme sont plutôt bonnes, les captures sont relativement stables autour de 4 000 à 5000 t par an. L'état du stock de plie de Manche Est semble également être satisfaisant. En revanche, les stocks de sole et de plie de Manche Ouest ont connu une forte diminution de leur biomasse et l'abondance des géniteurs ne permet plus d'assurer le renouvellement des stocks. Même chose pour le stock de maquereau qui a atteint son plus bas niveau de géniteurs.

1.4 Les ressources des eaux écossaises :

Le stock de morue est en dessous de son niveau acceptable et les captures qui atteignaient 20 000 t en 1980 sont aujourd'hui de 9 000 t. En revanche, la biomasse de hareng se reconstitue d'autant plus que la mortalité par pêche est très faible. Même chose pour l'églefin, dont le stock augmente ainsi que les captures (43 000 t en 1987, 15 500 t en 1990 et 26 400 t en 1994). La situation du merlan est plus préoccupante, notamment en raison des rejets qui sont très importants. La situation de ce stock est mal connue. En ce qui concerne le lieu noir, le stock est surexploité et est en train de s'effondrer. En 1994, les captures ont atteint leur niveau minimal de 10 400 t, soit deux fois moins que dans les années 70 et 80.

1.5 Mer d'Irlande

Les stocks de morue et de merlan sont surexploités. Pour la morue, les débarquements français ont chuté ces dernières années de 2 500 t en 1988 à 15 t en 1992. Pour le merlan, les apports au niveau européen sont passés de 17 000 t au début des années 80 à moins de 10 000 t aujourd'hui.

1.6 Mer Celtique et golfe de Gascogne

Le taux d'exploitation du hareng de mer Celtique est trop élevé, ce qui met en danger le renouvellement de cette espèce. L'anchois du golfe de Gascogne connaît de fortes fluctuations, mais globalement l'abondance de ce stock a baissé sans que les causes soient clairement identifiées (mortalité par pêche ou mortalité naturelle). Pour la morue de la mer Celtique, le stock est surexploité et la biomasse des géniteurs a fortement diminué. En revanche, pour le merlan il n'y a pas d'inquiétude particulière dans cette région. Les stocks de sole et de plie de la mer Celtique sont surexploités. Le stock de sole du golfe de Gascogne ne connaît pas encore de surexploitation car l'abondance des reproducteurs est stable. La situation risque de se dégrader dans l'avenir car le taux d'exploitation continue d'augmenter. En ce qui concerne le merlu, la situation est très préoccupante. Ce stock présente des risques graves d'effondrement biologique. Alors que les débarquements internationaux atteignaient près de 100 000 t par an au début des années 60, ils ont progressivement chuté et se situent actuellement autour de 55 000 t.

Une étude, réalisée en 1995 par la FAO sur « l'état des ressources ichtyologiques marines mondiales » confirme ces résultats. D'après cette étude, certains stocks sont même dramatiquement surexploités. Il s'agit de la morue de l'Atlantique et de certaines espèces de raies. La majorité des autres stocks est pleinement exploitée. Les seules ressources qui offrent quelques possibilités pour l'avenir sont les stocks de sprat et de chinchard, ainsi que certains stocks de tacauds et de harengs. En Méditerranée, la situation est aussi préoccupante pour de nombreux stocks, à l'exception du maquereau, du chinchard et de la sardine dans certains secteurs. Certaines espèces de haute valeur marchande, comme le merlu ou le rouget en Adriatique et dans le golfe du Lion, sont surexploitées.

2. Reconstitution des stocks :

Une fois que les stocks se sont effondrés, même si l'on interdit la pêche de l'espèce, la reconstitution n'est pas systématique ou elle peut être très longue. Le temps de reconstitution varie selon les espèces et leur cycle de vie. Certaines espèces ont une longévité pouvant aller jusqu'à 70-150 ans et atteignent leur maturité sexuelle vers les 25 ans. Dans ce cas là, la reconstitution est très longue. À l'opposé, des espèces comme l'anchois atteignent leur maturité sexuelle entre 12 et 18 mois. La reconstitution est donc très rapide. La majorité des espèces se situe entre ces deux extrêmes. Parfois l'arrêt de la pêche ne suffit pas à la reconstitution des stocks : c'est le cas du maquereau de la mer du Nord ou du hareng de l'Atlantique Ouest. C'est pourquoi, il est nécessaire de prendre des mesures réglementaires pour assurer la gestion des stocks de poissons, en particulier de déterminer des niveaux de captures autorisés.

ANNEXE 5 - Tableau de la flotte communautaire de pêche au 1er juillet 1996

(Source Commission des Communautés européennes

ANNEXE 6 - BILAN DES CONTROLES EFFECTUES DANS LES ETATS MEMBRES EN 1994

ANNEXE 7 - BILAN DES SANCTIONS DISTRIBUEES PAR LES ETATS MEMBRES EN 1994

ANNEXE 8 - RESTRUCTURATION DE LA FLOTTE DE PECHE ARTISANALE

ANNEXE 9 - INVESTISSEMENTS RÉALISÉS DANS LES PORTS DE PÊCHE ENTRE 1988 ET 1992

ANNEXE 10 - QUANTITES DEBARQUEES ET RETRAITS ANNUELS FRANCAIS EN 19936-1994

ANNEXE 11 - LES DÉMARCHES EN FAVEUR DE LA QUALITÉ DES PRODUITS DE LA MER

1. La politique "qualité" sous l'égide du FIOM

Elle s'oriente autour de trois grands axes :

- une contribution à l'amélioration constante de la qualité des produits en impliquant les professionnels, en les aidant à investir pour la mise aux normes des ateliers de mareyage, en équipant les criées ;

- l'apport d'une garantie de la qualité des produits en développant la mise en place de systèmes de certification des produits et des entreprises ou l'élaboration de marques collectives ;

- la mise en oeuvre de campagnes promotionnelles dans le but d'informer les consommateurs sur les espèces saisonnières, sur la diversité des espèces pêchées par les producteurs français et sur la manière de préparer les produits de la mer. Pour cela, les supports publicitaires sont nombreux, avec la réalisation d'affiches, des matériels de PLV (Publicité sur les Lieux de Vente)...

Cette politique nationale, sous l'égide du FIOM, relève d'une volonté d'informer et de diffuser une image porteuse de la filière française pour revaloriser aux yeux du consommateur les produits de la pêche nationale. La politique communautaire favorise également l'adoption de plans d'amélioration de la qualité et de la commercialisation en attribuant des aides financières spécifiques aux organisations de producteurs (OP) qui les mettent en place. Ces deux niveaux politiques sont ponctuellement complétés à l'échelle locale par les contributions des collectivités territoriales.

2. Les signes de la qualité

Les signes de qualité obtenus sur les produits de la mer

Produits

Signe

Caractéristiques certifiées

Date d'obtention

Huîtres Marennes-Oléron

Label Rouge

"Fine de claire" à pigmentation verte

1989

Poissons pélagiques frais (COPEMART)

- AMOP)

Certification de

conformité

Respect chaîne du froid et livraison au 1 er acheteur moins de 24h après la

capture

1992

Saumon écossais

Label Rouge

Caractéristiques fraîcheur. DLC

1992

Saumon fumé (Labeyrie)

Certification de conformité

Dates de pêche et de fumage

Absence de congélation

1994

Saumon fumé (Alanska, LeSaumon, Le Borvo)

Label Rouge

Filetage, salage, fumage et tranchage

main. DLC < 21 jours. Sans

congélation

1994

Espèces nobles du Bassin d'Arcachon

Certification de conformité

Pêche d'Arcachon et livraison moins

de 24h après le débarquement sous

criée

1994

Coquilles St-Jacques des Côtes d'Armor

Certification de conformité et IGP

Date de pêche et zone de pêche :

"gisement naturel classé"

1995-96

-

Ils peuvent être, soit une marque commerciale, individuelle ou collective, mettant en oeuvre un cahier des charges et des contrôles par un organisme tiers, soit un signe officiel de la qualité validé par les pouvoirs publics selon les réglementations :

- nationale : label rouge, appellation d'origine contrôlée, certification de conformité, marque collective,

- communautaire : appellation d'origine protégée, indication géographique protégée, attestation de spécificité,

- et internationale : assurance qualité - ISO 9000.

3. Les expériences françaises en faveur de la qualité des produits de la mer

La maîtrise de la qualité passe par la formation à bord des navires, l'adoption de démarches qualité dans les ports, le respect de guides de bonnes pratiques dans les ateliers de mareyage, l'analyse des points critiques dans les processus des entreprises de transformation et auprès des distributeurs. Elle ouvre ainsi la voie à une identification d'origine du produit aux différents stades de la filière.

Les principales expériences françaises entreprises en faveur de la qualité

Opérateurs et associations d'opérateurs

Démarche et Objectif

Date d'initiative

À bord des navires

Armement Delhemmes

Technicien qualité embarqué.

1993

Bretagne Qualité Mer

Guides techniques de pêche.

1994

Pêcheurs de bar-Pte Bretagne

Identification du navire, de la technique de pêche à la ligne.

1995

Armement Nord Bretagne

Fiches techniques à faire respecter par l'équipage.

1995

Centre Qualité Pêche Fraîche

Techniciens conseil présents sur le port de Concarneau.

1995

Dans les ports

Port de Lorient

Certification de criée.

1995

Port de Cherbourg

Service de conseil qualité.

1995

Dans les entreprises de transformation

Bretagne Qualité Mer

Référentiels métiers et produits. Cahier des charges produits.

1995

Dans les entreprises de transformation

FSFSS (Saurisserie)

Norme AFNOR sur le hareng fumé.

1994

CITPPM

Norme AFNOR sur les produits à base d'anchois.

1994

Auprès des distributeurs

FCD (ex FEDIMAS)

Guide des bonnes pratiques en rayon marée.

1993

Poissonniers CORAIL

Cahier des charges achat et guide des bonnes pratiques.

1994

ANNEXE 12 - LA LOI D'ORIENTATION SUR LES PÊCHES MARITIMES ET LES CULTURES MARINES

Suite à la crise de 1993-94, les pouvoirs publics ont pris conscience que le cadre législatif de l'activité de pêche n'était pas adapté à l'organisation du secteur et des entreprises de pêche. C'est pour remédier à ces difficultés qu'un projet de loi d'orientation des pêches maritimes et des cultures marines a été élaboré en 1995, après une large concertation avec l'ensemble des professionnels de la filière.

Ce projet de loi s'articule autour de cinq axes :

- une meilleure gestion de la ressource. Il consacre le rôle directeur de l'État dans la détermination des conditions d'accès à la ressource. La non-patrimonialisation des droits de pêche (quotas et licence) est affirmée, ainsi que l'incessibilité des droits ;

- une meilleure organisation de la filière. Le projet prévoit le renforcement du rôle économique du FIOM, pour en faire un véritable office des produits de la mer (Ofimer). Il prévoit également une plus grande implication des organisations de producteurs dans la gestion des quotas de leurs adhérents. Il redéfinit le rôle du mareyage. Il envisage le renforcement du système de contrôle des débarquements et de sanction, ainsi qu'une rationalisation des infrastructures portuaires et le renforcement des normes sanitaires et d'enregistrement statistique des points de débarquement. Il vise à mieux organiser le marché pour mieux vendre la production, mais aussi mieux protéger les ressources halieutiques. D'autre part, il est prévu la création d'un conseil supérieur d'orientation de la pêche, pour assurer la cohérence des différents volets de la politique des pèches, et des commissions régionales consultatives, dans chaque région littorale, pour veiller à la bonne organisation des marchés et à la rationalité des investissements en matière de débarquements des produits de la pêche ;

- la modernisation du statut légal et fiscal des entreprises de pêche. Le projet de loi entend favoriser la mise en société de l'entreprise de pêche artisanale, qui reste de manière très générale une entreprise individuelle, en assurant la neutralité de cette transformation au regard du droit fiscal et social de sa situation économique (exonérations, abattements, etc.). Pour permettre la modernisation du secteur, le projet de loi prévoit une aide fiscale à l'autofinancement des investissements sous forme d'étalement de l'entreprise des plus values de cessions. Enfin, comme en agriculture, l'adoption de dispositions favorables à la première installation et à la pluriactivité est proposée ;

- l'adaptation des cultures marines. Ce secteur subit la concurrence d'autres activités comme le tourisme ou l'agriculture et doit faire face à des contraintes environnementales fortes. Le projet de loi affirme le caractère agricole de ces activités et vise, par l'adoption de plusieurs mesures techniques, à renforcer le rôle de ses activités dans le développement économique de plusieurs régions littorales ;

- la modernisation des relations sociales. Il s'agit d'améliorer le régime de travail à la pêche et aux cultures marines en mettant fin à la pratique du dérôlement et d'aligner le régime de licenciement sur le droit commun, de créer un fonds national d'aide à la préretraite et de clarifier les conditions de rémunération à la part, ainsi que le versement d'aides au financement à la formation professionnelle. Le projet de loi vise aussi à concilier l'application du SMIC avec le système particulier de rémunération à la part.

Ce projet de loi constitue un véritable progrès. C'est, en effet, la première fois qu'une loi considère la filière pêche dans son ensemble et vise, à la fois, la protection de la ressource, l'organisation du marché et l'amélioration des conditions sociales des pêcheurs. Le projet de loi est actuellement en troisième lecture à l'Assemblée Nationale et devrait être adopté dans les prochaines semaines avec peu d'amendements du texte initial.

ANNEXE 13 - LISTE DES SIGLES UTILISES

ANOP Association nationale des organisations de producteurs

CAAM Centre administratif des affaires maritimes

CCMCM Confédération de la coopération de la Mutualité et du Crédit maritime

CIEM Conseil international pour l'exploitation de la mer

CIRPA Comité interministériel de restructuration de la pêche artisanale

CLPM Comité local des pêches maritimes

CNPM EM Comité national des pêches maritimes et des élevages marins

CRPM Comité régional des pêches maritimes

ENIM Établissement national des invalides de la Marine

FEDOPA Fédération des organisations de producteurs de la pêcheartisanale

FEOGA Fonds européen d'orientation et de garantie agricole

FIOM Fonds d'intervention et d'organisation des marchés

FROM Fonds régional d'organisation des marchés des produits de la

pêche
GMS Grandes et moyennes surfaces

IFOP Instrument financier d'orientation de la pêche

IFREMER Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer

MIN Marché d'intérêt national

OCM Organisation commune des marchés

OFIMER Office interprofessionnel des produits de la mer

OP Organisation de producteurs

PCP Politique commune des pêches

POP Programme d'orientation pluriannuelle

QIT Quota individuel transférable

TAC Total admissible de captures

TDC Tarif douanier commun

UAPF Union des armateurs à la pêche de France

UE Union européenne

ANNEXE 14 - REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

Actes du colloque de Saint Nazaire 16-17 janvier 1997,

Nouvelles donnes commerciales et financières des pêches maritimes.

Catanzano J.,

Éléments sur les interventions financières de l'État dans le secteur des pêches artisanles

Ifremer, 1988.

Catanzano J., Weber J., Lantz F.,

Adéquation entre effort de pêche et ressource : les actions publiques dans le secteur des pêches

Ifremer, 1989.

Commission des Communautés européennes,

Rapport 1991 de la commission au Conseil et au Parlement sur la Politique Commune de la Pêche 1991.

Commission des Communautés européennes,

Étude statistique du secteur de la transformation des produits de la pêche et de l'aquaculture dans la Communauté européenne 1993.

Commission des Communautés européennes,

Rapport de la commission sur le contrôle de la Politique Commune de la Pêche 1996

D'Artigues M., Catanzano J., Lebon Le Squer D., Rey H.,

Les organisations de producteurs : situation et typologie Ifremer 1995.

De Lesquen K.,

Étude des évolutions récentes de la filière pêche

FIOM, CEREOPA octobre 1996.

De Rohan J.,

Rapport du Sénat au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan sur le projet de loi d orientation sur la pêche maritime et les cultures marines 1996

Direction des Affaires maritimes et des gens de mer, L'emploi maritime

1997.

Durand J., Gueguen J., Catanzano J,

Efficacité d'un outil de politique structurelle dans le secteur des pêches : le plan Mellick

Ifremer, 1992.

FIOM, Cofrepêche,

Étude sur les investissements portuaires

Rapport final, 1993.

FIOM,

Situation et perspectives du mareyage en France en 1994

Mars 1995.

Guérin P., Schillinger C, Jacquot J.C.,

Commercialisation des produits de la mer

Ministère de l'agriculture et de la pêche, 1994.

Le Bihan V., Perraudeau Y.,

Suivi de la pêche et de l'aquaculture en pays de la Loire : année 1995-1996

Université de Nantes, laboratoire LEN-CORRAIL, 1997.

Lory B.,

La Politique Commune de la Pêche

Commission des Communautés européennes, 1993.

Mettling B., Hénaff P.,

Rapport d'audit sur la situation financière des navires de pêche artisanale

et des organismes d'intervention

Ministère de l'Agriculture et de la Pêche, 1995.

OCDE,

Examen des pêcheries dans les pays de l'OCDE

1996.

Parrès A.,

Affirmer la place des pêches maritimes françaises face aux défis mondiaux

Conseil économique et social, 1997.

Revue Pour n° 149/150,

Pêches maritimes françaises : bilan et perspectives

Grep, Paris, 1996.

Revue Économie et gestion agroalimentaire, n°32,

Nouvelles dimensions concurrentielles et financières des pêches maritimes Juillet 1994.

Rey H., Catanzano J,. Mesnil B., Biais G.,

Système halieutique : un regard différent sur les pêches

Institut Océanorgaphique de Paris, Ifremer, 1997.

Weber J, Lantz F.,

L'information économique et les besoins de la politique économique et de la gestion du secteur des pêches et cultures marines

Ifremer 1989.

Weber J, Grimbert E.,

Les PME un an après : analyse globale des effets d'un système de régulation

Ifremer, 1990.

* 1 Les fonctions indiquées sont celles occupées au moment de la mise en place du groupe.

* 2 1 La suite de la présente introduction rassemble, de façon très agrégée et donc inévitablement simplificatrice, les grandes lignes des conclusions de la deuxième partie

du rapport

* 3 2 8,4 milliards de francs en tenant compte des cultures marines, qui n'ont pas été étudiées dans la présente évaluation

* 4 Excédent brut d'exploitation

* 5 Il s'agit d'une subdivision administrative la littoral français est divisé en 39 quartiers

maritimes

* 6 Les espèces pélagiques sont des espèces marines qui évoluent en plein eau, loin du fond. Les espèces démersales, par opposition, vivent sur le fond ou à proximité du fond des mers.

* 7 Les emplois induits concernent les emplois des activités en amont (armement, préparation et maintenance des navires, construction et réparation navale, structures coopératives, encadrement administratif et financier et la recherche) et en aval de la filière pêche (distribution, du mareyeur au poissonnier-détaillant en passant par le MIN , transformation et transports. Au contraire, les emplois indirects concernent les emplois dans les autres secteurs économiques non dépendants directement de la pêche, comme la café ou le coiffeur de proximité.

* 8 « Actuellement, on considère qu'un emploi en mer contribue à créer quatre à cinq emplois à terre... ». Office des publications officielles des Communautés européennes, 1994, Luxembourg, p. 2.

* 9 Source : Secodip, 1994.

* 10 Régions de consommation d'après définition SECODIP (8 grandes régions françaises) .

* 11 Meurou Ch. 1996 .

* 12 Le marché des produits de la mer n'augmente que depuis 1993-1994, après avoir été orienté à la baisse depuis 1986.

* 13 L'Italie, l'Espagne, l'Allemagne, la Belgique et la Côte d'Ivoire.

* 14 Meuriot, Gilly, 1987

* 15 D'après Bernard P. Guillotreau P. et Péridy N., 1997 .

* 16 1 C'est-à-dire à des prix inférieurs aux prix de référence fixés dans le cadre de la PCP .

* 17 Conseil international pour l'exploration de la mer.

* 18 Le principe de la stabilité relative se traduit par l'attribution à chaque État membre d'un pourcentage fixe du TAC de chaque stock auquel cet État membre a accès

* 19 2 Jeunes poissons, dont l'exploitation intensive diminue la biomasse des reproducteurs.

* 20 PESCA est une initiative communautaire de la commission européenne (DG XIV) spécialement consacrée aux zones dépendantes de la pêche.

* 21 Il s'agit d'un principe selon lequel l'Union européenne n'agit, sauf pour les domaines de sa compétence exclusive, que lorsque son action est plus efficace qu'une action entreprise au niveau national, régional ou local.

* 22 Fonds régional d'organisation des marchés.

* 23 Durand, Gueguen, Catanzano. Efficacité d'un outil de politique structurelle dans le secteur des pèches : le plan Mellick, Ifremer, novembre 1992, 23 p.

* 24 Le compte épargne navire est un dispositif mis en place par Jean Puech le 1er juin 1994 pour garantir aux pêcheurs un revenu mensuel minimum de 5000,00 francs. Le financement est assuré par une cotisation des marins de 300.00 francs par mois et une participation de l'État. Participation de 100 %, soit 300,00 francs par marin, du 01/06/1994 au 30/08-1994. Participation de 50 %, soit 150,00 francs par marin, entre le 01/09/1994 et 30/11/1994 et de 30 %, soit 90,00 francs par marin, entre le 01/12/1994 et 31/05/1995.

* 25 Rapport Mettling, Hénaff, IGF, 1995

* 26 Enquête menée, début 1995. par International Consumer Research and Testing sur un panel de consommateurs européens.

* 27 L'ENIM a du mal à bien distinguer ce qui relève, dans l'ensemble de ses prestations, de la pèche et des autres domaines.

* 28 1 CATANZANO J. LANTZ.F. WEBER.J, Adéquation entre effort de pèche et ressource : les actions publiques dans le secteur des pêches, juillet 1989, Ifremer, 11 p

* 29 L'âge moyen de la population des pécheurs a légèrement augmenté en dix ans : 37 ans et demi en 1996 contre 36 ans en 1986. En 1986. 56 % des pêcheurs étaient âgés de plus de 35 ans et 58 % aujourd'hui.

* 30 METTLING.B. HENAFFP, M1NGASSON.A. MENANTEAU.J.P, Rapport d'audit sur la situation financière des navires de pèche artisanale et des organismes d'intervention, février 1995, p 15.

* 31 Conseil Économique et Social, Affirmer la place des pêches maritimes françaises face «« défis mondiaux. A.PARRES, 9 juillet 1997, 229 p.

* 32 L'étude a été commandée au cabinet Mennillo. Elle a été réalisée entre juillet et septembre 1997 et s'intitule: La formation de la valeur dans la filière pêche française, p aris, 60 p.

* 33 Ce rôle n'a jamais été institutionnalisé en France. Il fait l'objet d'un article dans la Loi d'orientation en discussion au Parlement.

* 34 Ainsi, dans certains ports, la catégorie B correspond au poisson "blessé", dans d'autres, il s'agit du poisson "maigre" ou "abîmé"... De même, la classe E (Extra) est parfois attribuée systématiquement aux produits de la pêche côtière...

* 35 Bernard P., Guilllotreau P. Péridy N. L'internationalisation des marchés. Communication au colloque de Saint-Sazaire : « Nouvelles donnes commerciales et financières des pêches maritimes », 16-17 janvier 1997.

* 36 Le projet de loi d'orientation des pêches maritimes et des cultures marines est présenté plus en détail en annexe 13.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page