4. Valoriser l'entrée en vigueur d'une monnaie unique

L'impact négatif des fluctuations monétaires importantes qu'a connues l'Union européenne entre 1992 et 1995 a montré une nouvelle fois le handicap que constituait pour l'industrie européenne l'absence d'une monnaie unique.

L'étude réalisée par la Commission européenne en vue du Conseil européen de Madrid a ainsi établi que ces fluctuations avaient entraîné, sur cette période, un ralentissement de la croissance de l'ordre de 0,25 à 0,5 %, en même temps qu'elles obligeaient les entreprises industrielles, tributaires de décisions d'investissement à long terme, à s'adapter à des variations brutales de la compétitivité-coût des différents pays. Ainsi, l'industrie automobile française a dû modifier de manière drastique ses comportements de marge pour rester présente sur le marché italien, ce qui a pesé sur ses résultats d'ensemble compte tenu de l'importance de ce marché.

La coexistence d'autant de monnaies que d'Etats membres conduisait donc à des distorsions de concurrence, tout en entretenant une incertitude préjudiciable à l'investissement et donc à la compétitivité.

L'entrée en vigueur de la monnaie unique est à un double titre une réponse à cette situation. Par définition, elle supprimera toute fluctuation monétaire au sein de la zone euro ; cet avantage paraît d'autant plus important que celle-ci sera dès le départ une zone large, comprenant onze Etats membres. Mais les effets stabilisateurs de l'Union économique et monétaire se sont fait sentir dès avant l'entrée dans la monnaie unique : la dynamique de la convergence a d'ores et déjà, depuis deux ans, considérablement réduit les fluctuations monétaires au sein de l'Union.

Cependant, pour que l'unification monétaire joue pleinement au bénéfice de l'industrie communautaire, il est nécessaire que la gestion de l'euro soit une gestion équilibrée, fondée à la fois sur l'objectif de stabilité et sur l'objectif de croissance. Certains facteurs pourraient, dans un premier temps, conduire à une certaine surévaluation de l'euro : si la banque centrale européenne se croyait tenue d'asseoir sa crédibilité par une gestion restrictive, l'industrie communautaire ne pourrait tirer tous les avantages de l'unification monétaire.

Les difficultés de l'industrie japonaise, pourtant exemplaire par sa compétitivité, lorsqu'elle a été confrontée à une forte appréciation du yen, montrent bien les risques qu'encourrait l'industrie européenne en cas de surévaluation de l'euro ; à l'inverse, la vigueur de l'économie américaine durant la même période, vigueur qui s'est avérée compatible avec la maîtrise de l'inflation, suggère tout l'intérêt d'une gestion monétaire équilibrée et réaliste.

Par ailleurs, l'unification monétaire va faciliter les comparaisons des prix et des coûts et favoriser une concurrence plus vive dans divers secteurs. Nombre de règles fiscales et sociales devront être repensées en fonction de cette nouvelle donne. Dès lors que l'arme de la dévaluation n'existera plus pour restaurer une compétitivité compromise par des charges sociales et fiscales trop élevées, la maîtrise de ces charges sera essentielle pour faire face à une concurrence accrue.

Enfin, la monnaie unique suppose un effort prolongé de rigueur financière de la part des Etats participants, qui doivent retrouver une marge de manoeuvre budgétaire. La plupart des Etats qui entreront dans la monnaie unique le feront en se situant à la limite des critères fixés par le traité sur l'Union européenne concernant les déficits publics et l'encours de la dette. Sans un effort durable de rigueur, ils ne pourront dès lors prendre des mesures de relance sans risquer les sanctions prévues par le pacte de stabilité. Pour se retrouver en situation de pouvoir exercer, le cas échéant, une action contra-cyclique, les Etats devront donc, préalablement, ramener leurs finances publiques à une situation proche de l'équilibre. C'est bien là une des conditions nécessaires pour que l'unification monétaire puisse être synonyme à la fois de stabilité et de croissance.

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