AUDITION DE M. PIERRE DANIEL, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL
ET DE M. FERNAND GIRARD, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL
DE L'ENSEIGNEMENT CATHOLIQUE

(20 JANVIER 1999)

Présidence de M. Adrien GOUTEYRON, président

Le président lit la note sur le protocole de publicité des travaux de la commission d'enquête et fait prêter serment à M. Pierre Daniel.

M. Adrien Gouteyron, président - Notre commission d'enquête a été constituée par le Sénat. Nous incluons, dans cet intitulé un peu long, l'enseignement privé lié par contrat avec l'Etat. Il est donc plus que normal que nous vous entendions.

Vous avez la parole pour un exposé introductif avant que nous passions aux questions.

M. Pierre Daniel - Vous disposez d'un dossier dont j'ai préparé le contenu afin d'aller le plus rapidement au fait. Ce dossier présente un premier volet sur l'enseignement général et technique relevant du ministère de l'éducation nationale et un deuxième volet sur l'enseignement agricole relevant du ministère de l'agriculture.

Dans ce dossier, vous trouverez quelque chose de particulier par rapport au ministère de l'éducation nationale. L'enseignement privé sous contrat a droit à des heures d'enseignement transformées en emplois à temps plein (ETP), mais calculées au plan budgétaire sur des heures. Vous verrez alors les moyens qui nous sont donnés aujourd'hui. Quand je parle de l'enseignement privé sous contrat, ce sont toutes les catégories régies par la loi de 1959 modifiée, hors instituts médico-pédagogiques qui relèvent de la loi de 1975.

Nous avons fait les ratios (nombre d'élèves par enseignant) : à un professionnel dans l'enseignement privé sous contrat, correspondent, toute heure payée par l'Etat, 13,63 élèves. Pour l'enseignement public, le ratio est de 1 pour 11. Dans le premier degré, c'est la même chose. Nous avons aussi un ratio de 22,93 élèves pour un enseignant. La différence se situe sur des points beaucoup plus particuliers, non pas sur les heures d'enseignement face aux élèves, mais sur ce que nous appelons les heures de suppléance.

Lorsqu'un professeur tombe malade, soit reconnu malade, soit en congé de formation ou autre, reconnu par le ministère de l'Éducation nationale, nous ne connaissons pas l'enveloppe des heures de suppléance mises à disposition de chaque rectorat. Nous savons toutefois que, dans les budgets actuels, en particulier pour 1999, le total des heures de suppléance doit être réduit.

La seconde question par rapport à l'enseignement public, concerne les décharges des directeurs du premier degré qui ne sont acquises, dans l'enseignement privé sous contrat, que dans les unités pédagogiques ayant un minimum de huit classes, alors que dans certaines académies, des décharges pour l'enseignement public sont données à partir de trois ou quatre classes.

Il y a donc difficulté à trouver des comparaisons possibles entre les heures affectées à l'enseignement ou décharges, puisque ce sont des heures d'enseignement considérées comme des décharges, entre l'enseignement privé et l'enseignement public.

Une autre différence, également difficile à calculer car n'étant pas régie par des textes précis, concerne les décharges de représentation syndicale. Nous avons un problème à résoudre. Selon notre calcul, nous serions en retard, d'après les syndicats, d'une cinquantaine de décharges en moins de représentation syndicale, mais aucun texte précis ne gère ces décharges pour l'enseignement privé.

La redistribution annuelle des emplois se fait à partir de calculs théoriques d'heures d'enseignement sur le nombre d'élèves. Après négociations avec le ministère, nous proposons des retraits d'emplois dans certaines académies pour les mettre à disposition dans des académies dont l'effectif scolaire croît, en fonction du besoin scolaire reconnu.

Le ministère a, aujourd'hui, donné un accord de principe pour des moyens nouveaux, quant à nos établissements qui correspondent aux desiderata des zones nouvelles d'éducation prioritaire, en fonction de leur population, de la situation financière des élèves et de leurs familles. Dès lors, nous allons essayer de travailler pour que ces établissements ne soient pas laissés de côté et puissent eux aussi travailler en réseau.

Enfin, l'enseignement privé sous contrat a certainement un retard dans ce que l'on appelle la mixité sociale. Par le fait de son histoire, il est moins implanté que l'enseignement public dans des zones difficiles. Toutefois, il doit, comme nous l'avons demandé pour l'enseignement catholique, faire un effort particulier pour accueillir des jeunes provenant des famille les plus démunies et en fonction de sa localisation à l'intérieur de ces zones, sans pour autant porter atteinte au travail qui se fait dans les établissements publics de ces zones.

Cela signifie que nous ne voulons pas ouvrir n'importe où n'importe comment, au risque de reconstituer des ghettos au sein de certaines écoles publiques si nous ne prenions que les moins mauvais élèves de l'enseignement public.

Toute l'orientation que j'ai donnée à l'enseignement catholique est effectivement une réflexion sur ce principe et une mise en application qui a déjà prouvé ses effets, notamment l'an dernier en Seine-Saint-Denis. En effet, un grand nombre de familles a demandé une inscription dans nos établissements, ce que nous n'avons pu faire sans un rapport très étroit avec les directeurs de l'enseignement public afin de prendre en compte cette mixité sociale avant toute inscription dans nos établissements.

Certes, on peut lire, dans la presse, des déclarations de créations de postes dont on ne dit pas assez souvent qu'elles viennent en contrepartie des réductions d'emplois. Il est trop facile de dire qu'il y aura 3 000 titulaires supplémentaires, mais du fait qu'il y aura 3 000 contractuels de l'enseignement public en moins, le résultat est nul.

Il nous faudra alors voir comment lire plus clairement les prochains budgets pour être en harmonie avec les volontés ministérielles et les décisions de ceux qui ont la responsabilité dans notre pays, au niveau de la représentation nationale, de voter les budgets.

Je soulèverai deux points. Nous nous dirigeons de plus en plus vers une intercommunalité, les syndicats de communes et la mise en commun des moyens de plusieurs communes. Il y a lieu de réfléchir sur le transfert de compétences, et si un tel transfert peut être valable en ce qui concerne la responsabilité de l'école communale. S'il peut y avoir transfert de charges, le transfert de compétences peut être lourd de conséquences.

Dès lors qu'il y aurait lieu, dans l'intercommunalité, de mettre des charges en commun, se poserait la question de l'application des contrats d'association signés avec une commune et non pas avec une intercommunalité. En effet, la loi ne nous le permet pas.

Cependant, tous les élèves d'une école dite intercommunale dépendent, au niveau financier, de la commune dans laquelle ils habitent. Ces communes peuvent-elles être chacune cosignataires d'un contrat d'association avec l'enseignement public ?

S'agissant des DOM-TOM, ceux-ci se retrouvent sous notre responsabilité s'agissant de l'enseignement catholique. Les situations sont très différentes d'un département ou d'un territoire à l'autre. Toutefois, nous notons des retards considérables en Guyane où, quelles que soient les conditions des jeunes illégalement installés sur le département de Guyane, on constate que plus de 20 % de cette jeunesse n'est pas scolarisée. Des efforts particuliers devraient être faits dès lors que l'on ne peut les prendre sur des excédents d'emplois sur la métropole pour les affecter à ces départements d'outre-mer.

Cela n'empêche pas non plus qu'une interrogation forte a été soulevée lors de la loi référendaire sur la Nouvelle-Calédonie. En effet, le transfert des compétences, notamment sur le premier degré privé, fait que le contenu de l'enseignement peut être transféré, mais que les moyens de cet enseignement ne seront pas transférés dans l'immédiat, et ce encore pour quelques années.

On peut craindre un hiatus dans la mise en oeuvre des diverses responsabilités entre l'Etat, le Territoire, les provinces et l'assemblée territoriale.

Tels sont les éléments que je souhaitais souligner sur l'enseignement privé sous contrat dépendant du ministère de l'Éducation nationale.

M. le Président - La parole est à M. Girard.

- M. Fernand Girard, délégué général de l'enseignement agricole privé, prête serment.

M. Fernand Girard - Je parlerai des établissements liés au Conseil national de l'enseignement agricole privé. Ceux-ci relèvent de l'article 5 de la loi Rocard, lequel prévoit une dotation en emplois sur le budget de l'Etat pour ces établissements. Je ne parlerai donc pas de nos amis et collègues des maisons familiale rurales qui ont une dotation forfaitaire et qu'il serait plus difficile de répertorier ici car nous parlons de postes de personnel. Voilà pour ma première remarque.

Deuxième remarque : cette enveloppe est gérée, au niveau national, par le ministre de l'agriculture à la suite de multiples concertations. Toutefois, les moyens ne sont pas décentralisés dans l'enseignement agricole. Il y a donc toute possibilité d'y voir clair. Nous n'avons pas de décisions d'orientation prises ici et de décisions prises ailleurs. Nous sommes sur un système national.

Cette dotation résulte de trois éléments :

- les obligations de service des enseignants, dans l'enseignement agricole, ont été modifiées en 1993 et ont été à l'origine d'emplois supplémentaires ;

- les filières de formation n'ont pas toutes les mêmes horaires et bénéficient donc de dotations spécifiques. C'est le cas dans l'enseignement professionnel ;

- l'évolution des effectifs.

Le tout est géré par un schéma prévisionnel national auquel nous tenons beaucoup, dans l'enseignement agricole, pour la clarté et en raison de notre éparpillement sur le territoire national. C'est une condition pour y voir clair.

Je vous parlerai de cette dotation en enseignants contractuels. Je citerai deux chiffres impressionnants pour l'enseignement agricole. De la rentrée 1993 à celle de 1999, l'enseignement agricole public a vu ses effectifs croître de 16 %. L'enseignement agricole privé à temps plein, géré par l'article 4 de la loi, a vu ses effectifs croître de 25 %.

Premier élément important : dans l'enseignement agricole, on note une forte croissance de la demande sociale des familles et du remplissage des filières de formation.

De ce fait, dans les ratios d'encadrement, on se rapproche des ratios de l'enseignement général. Cependant, il est de moins en moins vrai de dire que l'enseignement agricole, étant plutôt situé à la campagne, coûte plus cher et nécessite plus de moyens pour des effectifs plus limités.

L'autre événement particulier est le protocole d'accord que nous avons dû signer sur la limitation des effectifs, ce qui n'est pas un mince événement. Ce protocole a été signé le 26 février 1997, non pas à la demande des organisations publiques ou privées, mais à la demande instante du ministre de l'agriculture de l'époque, qui nous a demandé la limitation des effectifs. Je ne ferai pas de longs commentaires sur la façon dont nous avons dû l'accepter. Nous étions en fin d'application de la loi de 1984. La limitation des effectifs nous a été demandée pour pouvoir pleinement bénéficier des dispositions de la loi.

Cela se passe de commentaires, mais mérite toutefois d'être souligné. Je ferai remarquer que nous avons tenu tous les engagements signés dans le protocole, bien que ceux-ci aient amené des remarques aiguës de notre part. M. Daniel m'a entièrement soutenu dans ce combat en posant la question de savoir de quel droit on limitait des effectifs scolaires et, par conséquent, la liberté de choix des familles dans un secteur d'enseignement. Cette question reste posée.

S'agissant du nombre d'enseignants contractuels, les chiffres sont dans tous les rapports. Je tiens à saluer la qualité de l'avis budgétaire annuel de M. Vecten au Sénat sur l'enseignement agricole et à dire que, lors de l'examen de la loi de 1984, son rapport, a été pour nous un élément très important pour appréhender ce qui se passe dans les différentes familles d'enseignement. C'est utile pour la gestion, pour la paix scolaire ainsi que pour exposer nos projets et nos orientations à la représentation nationale.

En utilisant le logiciel Géode du ministère de l'agriculture, si nous avions suivi l'évolution des effectifs, il nous manquerait 218 postes d'enseignants lors de cette rentrée 1998. On comprend pourquoi le ministère de l'agriculture, probablement incapable d'assurer ces dotations en personnels, nous a demandé de limiter les effectifs. Tout s'explique sans pour autant se justifier. C'est l'élément le plus clair dont nous disposons aujourd'hui. Si nous voulions un encadrement comparable à celui de 1993, nous pourrions avoir 218 postes d'enseignement supplémentaires.

Sur les 4 730 enseignants, 4 480 sont en poste d'enseignement, c'est-à-dire que 94,7 % de nos enseignants enseignent devant élèves. Je poserai la question et je serai attentif, à l'issue de votre rapport, de savoir si ce ratio est observable pour l'ensemble des enseignants. C'est un ratio élevé. Quant au reste, 47 sont en congé formation, 67 en congé parental et 135 en congés divers non rémunérés.

Du point de vue du ministère de l'agriculture, la dotation est donc utilisée pleinement devant les élèves. Il n'y a pas d'évasion quelle qu'elle soit et l'on ne peut parler ici d'une gestion éparpillée.

Dans la répartition des emplois par région, il existe certains écarts. Toutefois, globalement, on note une certaine harmonisation des taux d'encadrement par région et que, depuis la dotation de 1990-93, nous avons cheminé vers une harmonisation assez grande. On tient cependant compte des contextes régionaux. La plupart des régions sont en sous dotations d'effectifs enseignants par rapport à l'effectif de l'enseignement agricole.

S'agissant de la parité, cette dotation mérite effectivement un examen ainsi que l'application du protocole. Nous sommes passés d'un recrutement en augmentation de 2,90 % en 1997 à 1,60 % en 1998 ; en 1999, nous tomberons plus bas encore. Ce coup de frein très sensible aura des effets durables. Si l'on ne recrute pas dans les classes d'entrée, l'effet se fait sentir des années durant. Pendant trois ou quatre ou six ans, il y a des effets importants. Cela dégonflera peut-être la question du nombre des emplois.

Nous étions à 6 % de recrutement, enseignement public et enseignement privé confondus. Nous constatons une grande qualité de l'enseignement public et privé ainsi que du dialogue au sein des instances créées par la loi Rocard pour gérer ce système. Nous étions " porteurs " et nous sommes passés de 6 % à 2,9 %, puis à 1,6 %. A la rentrée prochaine, je m'attends à 1 % d'augmentation des effectifs dans nos filières de formation.

Globalement, nous constatons une bonne gestion de ces dotations en emplois, mais une difficulté budgétaire certaine pour obtenir les moyens dans le budget du ministère de l'agriculture pour honorer la croissance de l'enseignement agricole et définir son orientation.

M. le Président - J'aurai deux questions. Le protocole que vous avez signé avec l'Etat vous impose-t-il des contraintes exactement parallèles à celles imposées à l'enseignement public ? ( Assentiment de M. Fernand Girard )

Ma deuxième question porte sur le mode de gestion. Monsieur le secrétaire général, vous avez dit tout à l'heure -j'ai cru le comprendre en tout cas- que la répartition des moyens entre les académies était en quelque sorte proposée par vous-mêmes en ce qui concerne l'enseignement général. Pour ce qui est de l'enseignement agricole, il m'a semblé que le mode de gestion était différent et la décision plus ministérielle. Me suis-je trompé ?

M. Fernand Girard - Non, vous avez raison. L'ensemble des moyens est géré au niveau ministériel pour l'enseignement agricole, suite à des propositions locales.

M. Pierre Daniel - S'agissant de l'enseignement général, c'est une proposition que nous faisons par académie. Les services du ministère de l'Éducation nationale travaillent, en collaboration avec nous, sur ces propositions. Nous tombons d'accord sur une nouvelle répartition. Celle-ci est présentée au cabinet du ministre et c'est lui qui décide en personne de l'affectation au rectorat.

M. le Président - Vous proposez les transferts. (Assentiment du secrétaire général) .

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - Je vous demanderai de nous rappeler les chiffres d'élèves de chacun de vos pôles de compétence, l'enseignement agricole et l'enseignement privé, en pourcentage par rapport au chiffre global des élèves scolarisés dans l'enseignement public.

S'agissant du mouvement des personnels enseignants, comment s'opère-t-il ? Comment le gérez-vous ? Quelles sont les modalités d'affectation de ces personnels ?

Concernant le taux d'absentéisme dans chacun de vos domaine respectifs, comment assurez-vous le remplacement de professeurs qui, pour diverses raisons, ne sont pas devant les élèves.

S'agissant des personnels non enseignants, comment sont-ils gérés et comment sont affectées les désignations dans chacun des établissement ?

M. Pierre Daniel - Nous comptons environ 2.100.000 élèves dans l'enseignement privé sous contrat. Les pourcentages sont en fonction des niveaux de formation ; on tourne autour de 20 %.

La répartition des personnels enseignants se fait, non seulement à partir des chiffres bruts que nous relevons et que nous étudions, à savoir les fameux ratios qui existent dans chaque académie : H/E : heures d'enseignement sur nombre d'élèves. Ces ratios bruts pourraient amener à des situation dramatiques dans certains secteurs ruraux notamment.

Il est normal que, dans un collège à Paris par exemple, le ratio d'un nombre d'élèves par classe soit supérieur à celui que l'on pourrait trouver dans un collège en Aveyron. Nous prenons en compte la dimension humaine avant de faire ces propositions et nous essayons de conserver, pour la vie locale, le plus possible d'établissement même en faibles effectifs dès lors qu'ils ne portent pas tort à la pédagogie proposée dans cet établissement. Des seuils de fermeture sont naturellement établis.

Par ailleurs, il est exact que nous réfléchissons avec les communes ou les conseils généraux avant de fermer des établissements du premier degré. Nous devons prendre en considération que la fermeture de ces implantations peut accélérer le départ des populations puisque la vie sociale s'organise souvent autour de l'école. La dimension humaine entre également dans notre réflexion sur la proposition que nous faisons au ministère.

Je suis dans l'incapacité de vous donner le taux d'absentéisme. J'ai prêté serment.

M. le Président - Pourrait-on l'avoir ?

M. Pierre Daniel - Je ne sais pas, pour la bonne raison que seuls les rectorats pourraient nous le donner. Les rectorats ne nous donnent pas l'enveloppe des heures de suppléance qui correspondent à l'absentéisme, puisque le remplacement d'un professeur malade se fait très rapidement. En effet, nous avons des suppléants en attente de travail dont la liste est déposée au rectorat. Le dossier est déposé.

Lors de l'absence d'un professeur, nous pouvons téléphoner au rectorat et dire : "c'est telle personne, si vous acceptez de la nommer." Ce dossier étant prêt, le recteur sort et signe, dans les 48 heures, l'arrêté de nomination du professeur. C'est très rapide, ce qui est un avantage, mais la très grande différence avec l'enseignement public est qu'il a à sa disposition des titulaires remplaçants. Même si ceux-ci sont affectés à un établissement, administrativement parlant, ce ne sont pas des professeurs qui, toute l'année, sont devant l'élève. Ils attendent d'être en remplacement, même s'ils sont payés, alors que nos suppléants ne sont payés que pour les heures de remplacement. Voilà une différence importante.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - Que font-ils s'ils ne sont pas devant les élèves ?

M. Pierre Daniel - Ils sont au chômage ; ils ne sont pas du tout rémunérés. Alors qu'un titulaire remplaçant est rémunéré à l'année.

M. André Vallet, rapporteur adjoint - Monsieur le secrétaire général, j'ai été, comme nombre de commissaires ici présents, étonné par les ratios que vous présentez. Comparés à ceux de l'enseignement public, ils laissent entendre que vous avez moins de moyens que l'enseignement public.

Ma question est la suivante : vous considérez-vous "moins bien servis" que l'enseignement public, et les problèmes de mixité sociale que vous avez évoqués se retrouvent-ils également dans la détermination de ces ratios ?

Par ailleurs, avez-vous des difficultés avec les collectivités locales ? L'enseignement privé, aujourd'hui, éprouve-t-il quelques ennuis avec les collectivités locales ?

Ma troisième question concerne la formation des maîtres. L'image, que vous allez pouvoir rectifier, est que vos maîtres sont un peu moins qualifiés que dans l'enseignement public. Globalement, la formation des maîtres est-elle identique à celle des maîtres du public ?

Quel pourcentage représente l'enseignement catholique dans l'enseignement privé ? Vous avez indiqué que, pour les remplacements, vous disposiez de maîtres qui ne travaillaient pas et qui attendaient une affectation. Avez-vous la possibilité d'utiliser des heures supplémentaires et le faites-vous ?

M. le Président - Dans cette même salle, le ministre de l'éducation nationale a indiqué les mêmes ratios, mais M. Vallet n'est pas membre de la commission des affaires culturelles.

M. Pierre Daniel - Si j'ai souligné la différence des ratios, l'enseignement public a des obligations auxquelles l'enseignement privé n'est pas tenu. Si je les ai soulignées, c'est pour éviter d'entendre dire que l'enseignement privé est mieux servi que l'enseignement public, ce qui n'est pas vrai. Non, il n'est pas mieux servi.

Est-il plus mal servi ? Je crois que non. Il n'est pas non plus mal servi dans le nombre de professeurs devant élèves. Il n'est pas servi du tout quant aux professeurs qui ne sont pas devant élèves.

Les titulaires remplaçants, étant comptés comme des professeurs, entrent donc dans le ratio. Étant donné que nous n'avons que des heures de suppléance, si l'un d'entre eux ne fait que trois mois de suppléance par an, il ne se sera alors compté que pour une période de trois mois. Là se trouve la différence. Je n'attaque pas, mais je ne fais que dire la réalité des chiffres entre les deux ratios.

Par ailleurs, concernant votre question quant aux difficultés avec les collectivités locales, il est certain qu'il en existe. On les retrouve au niveau du calcul du forfait communal selon la commune, par rapport au coût de l'élève de cette commune, avec des difficultés, en Bretagne ou ailleurs. Quand, dans une commune, il n'y a qu'une école privée ou publique, les références ne sont pas faciles. Il est vrai aussi qu'il n'y a pas, au sens même de la loi, un forfait. Il y a une aide calculée par rapport au coût d'un élève de l'enseignement public pour le premier degré.

S'agissant de la formation des maîtres, on ne peut plus dire, depuis 1993, qu'ils sont moins qualifiés que dans le public. En effet, nous avons le même concours pour les maîtres du second degré et nous avons un concours pour les maîtres du premier degré en centre de formation pédagogique. Récemment encore, le conseil d'Etat, sur les recours de certains syndicats, a confirmé la validité de nos accords sur la formation des maîtres du second degré, en accord avec les IUFM. C'est ce que l'on appelait les accords Lang-Cloupet.

M. le Président - Qui ont suscité les réactions de certains.

M. Pierre Daniel - La question est donc tranchée.

Toutefois, demeure une difficulté à laquelle vous trouverez une réponse dans le dossier. Cela concerne les départs en retraite. Nous devons faire attention avec le ministère au nombre de départs en retraite, c'est-à-dire au nombre d'ouvertures de poste au concours dans les IUFM, afin que le nombre de personnes diplômées soit égal à celui de personnes partant à la retraite.

La courbe, qui augmentera jusqu'en 2007 de façon très importante, obligera les IUFM à augmenter le nombre de candidats. C'est un fait très réel.

S'agissant des ratios entre l'enseignement catholique et l'enseignement privé sous contrat, nous tournons autour de 95 %. Un certain développement, peu substantiel en chiffres peut se constater dans les écoles de langues régionales, notamment les écoles bretonnes "Diwan", les écoles basques et quelques écoles qui vont se développer dans l'académie de Montpellier. Reste un problème, celui du Fonds social juif unifié, responsable des écoles : 20 % de ses écoles sont encore hors contrat, et il demande des contrats.

Des heures supplémentaires année (HSA) sont attribuées en fonction de la discipline enseignée, ce dont nous profitons. Le problème des heures supplémentaires aujourd'hui est très différent de celui de jadis. Il est très difficile de calculer le nombre d'heures supplémentaires. Nous avons un nombre d'heures / année et nous sommes informés de la décision du ministère de l'éducation nationale de réduire le coût financier des heures supplémentaires.

La seconde question est la suivante : y aura-t-il encore autant d'heures supplémentaires demain qu'il y en a aujourd'hui, quel qu'en soit le coût ? Cela reste une interrogation.

M. Jean Bernadaux - Je reviens sur le système des remplaçants. Lorsque vous dites que vous avez, au niveau des rectorats, un potentiel de remplaçants, avez-vous un potentiel de remplaçants par discipline ou des professeurs qui peuvent enseigner dans divers domaines ?

M. Pierre Daniel - Sur le premier degré, il n'y a aucun problème. C'est une liste de remplaçants, étant donné qu'il n'y a pas de discipline propre. Sur le second degré, nous avons un certain nombre de remplaçants en fonction de certaines disciplines. Mais un grand nombre sont bivalents, sans être polyvalents.

C'est vrai que c'est plus simple, mais l'enseignement public fait la même chose. Le remplaçant n'est pas obligatoirement le plus spécialisé dans la discipline voulue pour un remplacement.

M. le Président - J'aurai deux questions. Précédemment, vous nous avez expliqué que, dans la gestion des moyens qui vous sont attribués, un dialogue s'instaure avec le ministère auquel vous faites vos propositions. J'imagine qu'il suit vos propositions avec, peut-être, des modifications à la marge. Mais vos propositions portent sur la répartition académique. Que se passe-t-il ensuite au niveau académique ?

Ma seconde question porte sur le mode de gestion de vos enseignants. C'est l'une des spécificités de l'enseignement privé. Quel est le rôle du recteur et quel est le rôle du chef d'établissement, ou éventuellement le vôtre ?

M. Pierre Daniel - Il est exact que la dotation est académique et décidée par le cabinet du ministre. C'est le recteur qui dispose des emplois donnés par le ministère. Dans la majorité des cas, nos représentants académiques, c'est-à-dire le comité académique de l'enseignement catholique, composé de nos directions diocésaines ou départementales, rencontrent le recteur et étudient, bien avant, le plan nécessaire pour la mise en oeuvre de cette dotation donnée à l'académie.

Parmi les académies qui rendent des emplois, je prends comme exemple celle de Nantes. Des discussions ont lieu avec les inspecteurs d'académie, les inspecteurs de l'éducation nationale et le recteur pour déterminer à quels endroits des emplois peuvent être repris. Dans d'autres académies, on va discuter, par contre, d'ouvertures et établir les priorités qui seront défendues par les responsables de l'enseignement privé auprès du recteur qui, en tout état de cause, va lui-même décider.

M. le Président - Mais en enveloppe constante ?

M. Pierre Daniel - L'enveloppe donnée par le ministère n'est pas constante. Par rapport à l'année précédente, dans l'enseignement privé, elle est en plus ou en moins.

Le rôle du recteur est très important. L'enseignement, dans un établissement sous contrat avec l'enseignement public -selon le terme exact de la loi- est confié à des maîtres titulaires de l'enseignement public ou à des maîtres sous contrat par l'Etat. Tout contractuel venant dans nos établissements ne peut y venir que s'il a en main son contrat d'association signé par le recteur, au nom du ministre de l'éducation nationale, et en accord avec le chef d'établissement.

En réalité, avec l'accord du chef d'établissement, le recteur nomme une personne pour remplir telle fonction dans l'établissement.

Par ailleurs, toute la gestion de la carrière de cette personne est faite par l'Etat et le ministère de l'éducation nationale. Tout droit disciplinaire ne peut être que du fait de l'Etat et non du chef d'établissement.

Malheureusement, concernant l'enseignement privé sous contrat c'est un véritable couperet : il n'y a pas de mesures transitoires dans le cas d'une suspension momentanée d'un contrat : ou on le réintègre, ou le ministre casse le contrat d'association. Il n'y a pas d'avertissement, de mise en demeure. Nous réclamons un droit disciplinaire comme dans l'enseignement public, hormis un point précis qui ne peut s'exercer dans l'établissement sous contrat, celui de la mutation d'office. En effet, il faut l'accord du chef d'établissement.

Quand un chef d'établissement, par le biais de sa dotation horaire, fait chaque année la proposition d'emplois de ces heures, sa proposition doit être agréée par le recteur. Il est vrai que le silence du recteur vaut agrément après un nombre donné de jours. Il n'empêche que le recteur peut donner une réponse négative en arguant que trop d'heures ont été affectées en français et en demandant de les mettre sur une autre discipline. C'est son droit le plus absolu, étant donné que, dans une classe sous contrat d'association, les règles de l'enseignement public s'appliquent intégralement.

M. le Président - Pouvez-vous nous donner des précisions quant aux relations des recteurs et des chef d'établissement pour la nomination des enseignants ? C'est le recteur qui prend son arrêté pour affecter telle personne dans tel établissement. Vous avez mentionné l'accord des chefs d'établissement. Est-ce sur proposition ou avec accord ?

M. Pierre Daniel - En 1959, c'était avec accord du chef d'établissement. Après la loi Guermeur, cela a été sur proposition du chef d'établissement. En 1985, on est revenu à la formule initiale de la loi de 1959, c'est-à-dire avec accord du chef d'établissement, sauf pour la loi de 1984 qui est différente sur ce point puisqu'elle parle de proposition. La loi de 1959 précise bien que cela se fait avec l'accord.

En réalité, le processus est plus compliqué. On passe par les commissions consultatives mixtes académiques ou départementales, selon le niveau de l'enseignement. Ces commissions donnent des orientations sur l'affectation éventuelle de telle et telle personne où l'on réclame déjà l'accord du chef d'établissement. Elles font des propositions au recteur qui, ensuite, nomme. Elles sont mixtes parce qu'il y a, à la fois, nos syndicats et l'enseignement public. Ce n'est pas une décision ex abrupto .

M. le Président - Il y a tout de même une différence entre l'enseignement général et l'enseignement agricole.

M. Pierre Daniel - J'ai omis un point sur l'enseignement général. Cela ne concerne pas les fonctionnaires qui viennent enseigner chez nous. Le fonctionnaire venant enseigner dans l'enseignement général ne suit pas exactement le même trajet. Il ne peut demander au recteur de le nommer que s'il a déjà l'accord du chef d'établissement, alors que pour un contractuel, c'est l'inverse. Ceci concerne les titulaires de l'enseignement public.

M. Fernand Girard - Un point nouveau n'a pas été signalé, celui du protocole d'accord sur la formation des maîtres. Les maîtres formés sont prioritaires en emplois. Il est même dit, c'est la règle que nous nous sommes mutuellement imposés, qu'aucun titulaire d'un certificat d'aptitude ne doit être laissé sur le terrain. Tant qu'il n'est pas placé sur le terrain, il n'y a pas d'emploi de contractuel possible. Il y a une priorité absolue.

M. le Président - C'est vrai pour l'enseignement agricole et l'enseignement privé.

M. Fernand Girard - De même que pour l'enseignement général. Les accords Lang-Cloupet ont une portée sociale significative. Chaque année, nous rendons compte aux recteurs des délégués auxiliaires qui sont en contrat précaire.

Il ne faut pas oublier que nous avons aussi, dans l'enseignement général, un contingent très important de délégués auxiliaires qui remettent chaque année leur poste au rectorat en attendant que des titulaires nouvellement agréés et formés les remplacent.

C'est un contexte social de l'emploi qui est géré de très près. Il y a des inquiétudes à chaque rentrée, et des difficultés éventuelles pour ces délégués auxiliaires.

J'espère que les problèmes touchant ces personnels seront prochainement examinés. Ici, on dit qu'ils relèvent du droit privé et là, du droit public. Il existe un certain nombre de problèmes sur l'identification juridique de ces personnels et sur leurs conséquences tant sociales que financières.

Dans l'enseignement agricole, nous avons l'obligation de formation et de qualification, non seulement pour la nomination des maîtres, mais aussi pour celle du chef d'établissement. La formation du chef d'établissement passe par un protocole d'accord avec l'Etat dans lequel il est agréé pour diriger un établissement. C'est un point important et novateur par rapport au concept de la loi Debré.

Ces enseignants nommés sont rémunérés par rapport à des échelles de titulaires. Ensuite, c'est effectivement la DRAF, tenant lieu de recteur d'académie, qui exerce toute l'autorité sur ces enseignants contractuels de droit public. La DRAF signe le contrat et emploie au nom du ministre de l'agriculture. Elle procède aux vérifications pédagogiques et aux sanctions éventuelles. Le statut des enseignants est d'une grande clarté à ce propos et nous en sommes tous satisfaits.

Nous avons gardé la formule "sur proposition du chef d'établissement". Celui-ci fait plusieurs propositions, mais la DRAF peut également en faire. C'est une formule mixte dans laquelle on examine les personnes disponibles. Dans l'enseignement professionnel, parfois très qualifiant en BTS, nous sommes bien contents de prendre les personnes qui ont les qualifications requises, d'où qu'ils viennent, parce que l'on n'en trouve pas toujours.

Mme Hélène Luc - Concernant la comparaison des résultats, du baccalauréat essentiellement, pouvez-vous en dire quelques mots ? Étant membre d'un conseil d'administration à Choisy-le-Roi et représentante du conseil général où j'ai été en charge des collèges, peut-on considérer que, dans l'enseignement privé, existe une certaine sélection ? Vous y avez fait allusion en disant que vous souhaitiez une plus grande mixité. Je le constate à Choisy-le-Roi et dans le Val-de-Marne.

D'autre part, que pensez-vous de la représentation des collectivités locales ? Pour ma part, je représente le Conseil général. J'ai toutefois le sentiment de ne pas servir à grand-chose car je n'ai pas le droit de vote.

M. Pierre Daniel - S'agissant des résultats du baccalauréat, lorsqu'on prend la totalité des résultats, et non pas ce qui apparaît dans les journaux, qui ne montrent que les établissements d'excellence, nous arrivons quasiment aux mêmes résultats que l'enseignement public, parfois légèrement en dessous.

M. Fernand Girard - Idem pour l'enseignement agricole.

M. Pierre Daniel - Je regrette de telles parutions, lorsqu'on n'indique pas ce que ces jeunes représentent socialement, dans les lycées. Je ne suis pas contre les élites, mais je voudrais que la clarification soit faite dans la publication des résultats.

M. le Président - D'autres personnes, occupant des postes très importants à l'éducation nationale, ont exprimé le même regret.

M. Pierre Daniel - Il me paraît curieux que les parlementaires participent au conseil d'administration des établissements qui vote le budget, sans aucun droit de vote. Il aurait fallu donner un droit de contrôle ou de veto sur les investissements faits par la collectivité locale, sur l'organisme bénéficiaire, mais pas sur le reste. Il aurait fallu aller plus loin.

M. le Président - Merci, Madame la Présidente Luc, d'avoir posé cette question. La réponse était intéressante.

M. Claude Domeizel - Je voudrais revenir sur la question des remplaçants. Quelles sont les conditions pour être inscrit sur la liste des remplaçants à votre disposition dans les rectorats ? Quelle est la formation de ces remplaçants ? Qui prend en charge leurs frais de déplacement ?

M. Pierre Daniel - Nous pouvons répondre à toutes vos questions, mais mon voisin pourra sans doute le faire mieux que moi à certaines d'entre elles. La majorité de nos remplaçants ont quasiment les mêmes diplômes que les titulaires, sans toutefois avoir réussi aux concours.

Par ailleurs, nous privilégions ceux qui ont déjà travaillé. Il est vrai qu'il faut débuter, mais aujourd'hui, un remplaçant est une personne ayant déjà remplacé, durant plusieurs années, des maîtres absents.

Ce sont bien souvent, ainsi que l'a mentionné M. Girard, d'anciens délégués auxiliaires dont nous déclarons, de par la loi, le poste vacant. En effet, ils sont remplacés par les capésiens, ceux qui ont réussi un concours. La priorité absolue de ces délégués est d'effectuer des remplacements. Lorsqu'ils ne peuvent trouver une autre orientation, ils s'inscrivent sur des listes de remplaçants qui peuvent être transmises à nos organisations de l'enseignement catholique. Nous préparons les dossiers que nous remettons au rectorat. Le recteur ne prépare ni dossier, ni la demande de candidature.

Par contre, quand on demande au recteur si l'on peut prendre telle personne, c'est lui qui prend la décision. Si le dossier est prêt et la personne déjà dans les services, il y a 90 % de chances pour que le recteur nomme ladite personne.

M. Pierre Martin - S'agissant des transports...

M. Pierre Daniel - Lorsqu'ils sont délégués auxiliaires, ils effectuent des remplacements, mais ils ne sont pas les remplaçants stricto sensu d'une personne en congé pour une maladie courte.

M. Pierre Martin - Ce n'est pas tout à fait la question. J'ai ouï dire que pour accéder au poste de directeur, il fallait suivre une formation. Dans l'éducation nationale, quels que soient les enseignants, des formations sont offertes et même recommandées. On les appelle des formations continuées. Qu'en est-il dans l'enseignement privé et, dans l'affirmative, comment cela se passe-t-il ?

M. Pierre Daniel - Toute l'organisation de la formation continue est faite par une association appelée l'Unapec. Cette dernière a passé convention avec l'Etat et reçoit les fonds de la formation continue répartis de manière équilibrée par rapport au nombre de professeurs dans chaque académie.

S'agissant des plans de formation, normalement nous traitons à égalité de budget avec l'enseignement public sur les formations continues. Ce plan de formation doit être agréé par les autorités académiques. En fonction de ce plan, liberté est donnée aux professeurs de s'inscrire dans ces formations, après accord du chef d'établissement qui propose au recteur d'autoriser cet enseignant à suivre cette formation.

Subsiste là aussi un point d'interrogation pour l'avenir dès lors qu'il y aurait une réduction des suppléants. Il y aurait des difficultés dans la mesure où l'on entend dire qu'une formation ne pourrait plus être suivie pendant le temps scolaire. Cela poserait un grave problème pour la formation continue des maîtres, qu'ils soient de l'enseignement public ou privé.

La question des transports n'entre pas en jeu pour les suppléants de l'enseignement privé. En effet, on leur demande de venir enseigner dans tel établissement. A l'inverse, dans l'enseignement public, les enseignants sont rattachés à un établissement, mais si on leur demande d'aller dans un autre établissement, se pose alors le problème du remboursement, selon les distances, des frais de déplacement. Ce n'est pas le cas dans l'enseignement privé sous contrat.

M. Claude Domeizel - Je n'ai pas eu une entière réponse quant à ma question sur la formation.

M. Fernand Girard - Ils ont une licence ou une maîtrise.

M. Claude Domeizel - Quelle est leur formation ?

M. Fernand Girard - Les suppléants sont nommés pour un certain nombre de mois de travail. C'est un emploi totalement précaire. A l'issue d'un remplacement de congé de maternité par exemple, le suppléant se retrouve au chômage. C'est un facteur très important dans la comparaison parité public-privé. Dans le cadre du corps des titulaires remplaçants, leurs qualifications, les possibilités offertes d'entrer dans la carrière et d'être formés, un volume financier est donné.

Nous devons être comparables en volume, si on ne l'est pas complètement en manière de faire. Nous insistons souvent, auprès du ministère, sur la comparaison en volume, même si nous n'avons pas les mêmes modalités d'exercice.

Nous n'avons pas demandé à avoir des titulaires remplaçants car cela représente un coût énorme pour la collectivité nationale. Pour un système éducatif, il y a là un problème central d'exercice d'une mission de gestion des personnels. Mais c'est un problème compliqué.

D'une part, nous avons une gestion " sécurisée " pour le personnel, mais sans aucune certitude sur le volume de travail à faire et, d'autre part, une gestion " sécurisée " sur le volume de travail à faire sans aucune certitude sur le personnel qui fait le travail.

M. Pierre Daniel - La loi Debré ne peut financer que des professeurs devant élèves. C'est pourquoi nous n'avons pas droit aux titulaires remplaçants.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - En fonction du statut de l'enseignant -agrégé, certifié.. -, les heures dues sont-elles les mêmes que dans l'enseignement public ?

Dans l'enseignement agricole, compte tenu de la limitation des effectifs, que deviennent les élèves refusés ? Pour eux, c'est une seconde chance.

M. Pierre Daniel - Je répondrai par l'affirmative à votre première question. En effet, c'est identique à l'enseignement public.

M. Fernand Girard - Le remplacement des enseignants dans l'enseignement agricole est assuré par une enveloppe gérée par les DRAF. Il y a également une enveloppe de moyens qui permet de gérer les aléas d'une vie professionnelle (congé maladie, congé maternité...) Cette enveloppe a tendance à se restreindre.

La mobilité des enseignants est une question d'importance. En période de rééquilibrage démographique sur un territoire national, l'une des questions posées à toute la collectivité est de savoir comment organiser la mobilité des enseignants.

Nous évoquions tous deux ce matin le problème de professeurs d'école à la campagne pour lesquels, si on veut organiser une mobilité, il faut aussi penser à l'activité du conjoint. Dans l'enseignement agricole, la mobilité des enseignants est extrêmement compliquée. Nous avons beaucoup de femmes dans l'enseignement secondaire. Les femmes vont-elles entraîner leur mari dans la mobilité de l'emploi ? Il n'existe aucune aide à la mobilité. Nous sommes vraiment face à un problème très complexe.

Dans l'enseignement agricole, les établissements sont également éloignés les uns des autres. La mobilité n'est pas simple à organiser dans ce type de profession.

A l'inverse d'une entreprise, il n'y a pas d'aide prévue à la mobilité. On nous demande de rééquilibrer les établissements par rapport à l'évolution démographique, mais nous ne savons pas comment procéder.

Pour répondre à la question de M. Carle sur la limitation des effectifs et le devenir des élèves, l'enseignement agricole public et privé a fait un bon travail social. Je suis d'accord pour accélérer la mixité sociale, mais je m'estime déjà satisfait de ce qu'elle est dans l'enseignement agricole. Nous avons bien souvent servi de système de secours au système éducatif, tout en recevant plus de critiques que de félicitations.

Je le dis avec beaucoup de coeur. Je suis fils de paysan et j'aime ce milieu. J'y travaille depuis vingt ans. J'ai été l'un des négociateurs des lois de 1984. Je souligne très fermement que nous ne souhaitons pas voir disparaître cette mission d'accompagnement des jeunes du milieu agricole. En dépit d'une grande mixité urbaine et rurale dans nos établissements, on y retrouve un grand nombre de jeunes du milieu agricole. Je citerai également les maisons familiales rurales qui rendent de nombreux services.

La limitation des effectifs fait que, quand on ne peut accueillir des jeunes, certains rejoignent l'apprentissage où les places sont également limitées. Certains d'entre eux rejoignent d'autres filières d'enseignement sans être aucunement motivés. Il est grave d'amener des jeunes dans des filières pour lesquelles ils ne sont absolument pas motivés. Cela explique l'ennui, la violence de certains jeunes, les accidents dramatiques que nous connaissons à l'école.

Je me dois de dire que réfléchir sur l'école, c'est également réfléchir sur les capacités des uns et des autres, donner une égale dignité aux filières de formation. Je ne suis pas pour le cloisonnement par filière de formation. Mais en voulant éviter le cloisonnement, ne tombons pas dans la " stabulation " libre et naïve où l'on met tout un chacun sur le même plancher et on observe ce qui se passe.

C'est peut-être valable en matière d'élevage, mais pas en matière d'éducation. Je m'exprime très franchement et clairement. Nous devons continuer à donner leur pleine dignité à toutes les formations technologiques, poussées aujourd'hui et si utiles dans notre pays, de tout ce qui est enseignement technique et professionnel, et les valoriser.

On ne s'en sortira pas avec la massification de l'éducation uniquement par les filières d'enseignement général, même avec l'objectif de la diversification qui est plus vite dite que faite.

M. le Président - Quels sont les moyens de contrôle que se donne l'Etat pour vérifier la bonne application des règles qui sont les siennes et la bonne utilisation des moyens qu'il attribue, en particulier pour vérifier que l'effectif déclaré correspond à l'effectif réel ?

M. Pierre Daniel - Nous avons préparé un dossier sur les contrôles que doit subir un établissement privé sous contrat.

Il y a d'abord les inspections. Chaque année, on peut avoir un contrôle de l'effectif. Chaque année, il y a l'obligation de rendre tous ses comptes au trésorier-payeur général qui peut diligenter une inspection générale de l'éducation nationale. Il a l'obligation, depuis la loi de 1994, lorsqu'il reçoit des subventions des collectivités territoriales, de passer une convention avec cette collectivité, avec le suivi de l'amortissement des bâtiments ou des classes construites. Dans le cas d'une rupture dans cette convention de la part de l'établissement, ce dernier a obligation de rembourser les sommes non amorties.

Sur ce point, nous sommes clairs, il y a aussi un contrôle sur les crédits d'investissement exercé par la commission académique qui doit être entendue avant que ces fonds puissent être versés à l'établissement.

Il y a enfin le schéma prévisionnel des formations qui ne permet pas à un établissement, de décider la création d'une classe technologique, professionnelle... Il faut que cela entre dans ce cadre-là et que le recteur prenne une décision positive pour l'ouverture de la classe, mais aussi que l'avenant au contrat soit signé par le préfet et le recteur.

Je vous ai cité tous les points importants des contrôles.

M. Fernand Girard - Dans l'enseignement agricole, le contrôle des effectifs, par l'Etat, est trimestriel. Je donne un autre chiffre. A la rentrée 1999, dans les établissements relevant du CNEAP, il y avait 52 469 élèves. Au 15 décembre, il y en a 52 315. On ne peut être plus précis. Nous nous sommes réjouis de ces systèmes validants. C'est un contrôle qualité du sérieux de nos formations.

M. le Président - Nous sommes au coeur des préoccupations de notre commission d'enquête.