LES TRAVAUX DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE A L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE DU CONSEIL DE L'EUROPE(Session ordinaire de 1997)

DURRIEU (Josette)

RAPPORT D'INFORMATION 435 (98-99) - délégation française à l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe

Table des matières




N° 435

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 16 juin 1999

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom des délégués élus par le Sénat (1) sur les travaux de la Délégation française à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe au cours de la session ordinaire 1997 de cette Assemblée, adressé à M. le Président du Sénat, en application de l'article 108 du Règlement ,

Par Mme Josette DURRIEU,

Sénateur.

(1) Cette délégation était composée en 1997 : MM. Nicolas About, Michel Alloncle, Daniel Hoeffel, Pierre Jeambrun, Jean-François Le Grand, Jean-Pierre Masseret, membres titulaires : M. Charles-Henri de Cossé-Brissac, Mme Josette Durrieu, MM. Jacques Legendre, Edouard Le Jeune, François Lesein, Serge Vinçon, membres suppléants. Au 17 septembre 1997 : MM. Nicolas About, Michel Alloncle, Mme Josette Durrieu, MM. Daniel Hoeffel, Pierre Jeambrun, Jean-François Le Grand, membres titulaires : MM. James Bordas, Marcel Debarge, Jacques Legendre, Edouard Le Jeune, François Lesein, Serge Vinçon, membres suppléants.

Conseil de l'Europe.

INTRODUCTION

Le présent rapport retrace les travaux de l'Assemblée du Conseil de l'Europe au cours de sa session de 1997 dont les quatre parties se sont tenues à Strasbourg, respectivement du 27 au 31 janvier, du 21 au 25 avril, du 23 au 27 juin et, enfin, du 22 au 26 septembre, ainsi que les travaux des réunions groupées de commission, qui se sont tenues à Bucarest du 26 au 28 mai.

Il récapitule les activités des membres de la Délégation française, en particulier leurs interventions dans les débats inscrits à l'ordre du jour des quatre parties de cette session 1997, et présente un bref résumé des rapports.

En annexe, figure la liste de tous les textes adoptés pendant la session de 1997.

*

* *

Cette introduction a pour objet de rappeler, d'une part, l'évolution de la composition de la délégation française pendant la session de 1997 et, d'autre part, l'évolution générale de l'Organisation.

A. COMPOSITION DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE À L'ASSEMBLÉE DU CONSEIL DE L'EUROPE DURANT LA SESSION DE 1997

La délégation parlementaire française, commune aux Assemblées du Conseil de l'Europe et de l'UEO, comprend vingt-quatre députés (douze titulaires, douze suppléants) et douze sénateurs (six titulaires, six suppléants). L'Assemblée nationale renouvelle ses délégués après chaque élection législative générale et le Sénat, après chaque renouvellement triennal. En outre, des remplacements peuvent intervenir entre ces dates, notamment pour cause de démission d'un délégué. La présente section a pour objet de retracer la composition de la délégation au cours de l'année 1997 et ses évolutions.

1. Représentants de l'Assemblée nationale en 1997

Au nombre de 24, les représentants de l'Assemblée nationale durant les trois premières parties de la session ordinaire de 1997 de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe étaient :

Délégués titulaires (12) : MM. Jacques BAUMEL (RPR), Claude BIRRAUX (UDF), Jean-Michel BOUCHERON (Soc), Georges COLOMBIER (UDF), René COUVEINHES (RPR), Robert GALLEY (RPR), Aloys GEOFFROY (UDF), Denis JACQUAT (UDF), Gabriel KASPEREIT (RPR), Bernard SCHREINER (RPR), Jean SEITLINGER (UDF), Jean VALLEIX (RPR).

Délégués suppléants (12) : MM. Augustin BONREPAUX (Soc), Jean-Guy BRANGER (UDF), Jean BRIANE (UDF), Christian DANIEL (RPR), Jean-Claude DECAGNY (UDF), Xavier DENIAU (RPR), Charles EHRMANN (UDF), Michel HUNAULT (RPR), Jean de LIPKOWSKI (RPR) (1( * )) , Jean-Louis MASSON (RPR), Jean-Claude MIGNON (RPR), Jean PRORIOL (UDF).

A la suite des élections législatives des 1er et 8 juin 1997, l'Assemblée nationale a désigné le 25 juin une nouvelle délégation :

Délégués titulaires (12) : MM. Jacques BAUMEL (RPR), Jean BRIANE (UDF), Claude EVIN (Soc), Raymond FORNI (Soc), Guy LENGAGNE (RCV), Martin MALVY (Soc), Jean-François MATTEI (UDF), Gilbert MITTERRAND (Soc), Henri NALLET (Soc), Jean-Claude SANDRIER (Com.), Bernard SCHREINER (RPR) et Jean VALLEIX (RPR).

Délégués suppléants (12) : MM. Claude BIRRAUX (UDF), Paul DHAILLE (Soc), Mme Laurence DUMONT (Soc), MM. Charles EHRMANN (UDF), François FILLON (RPR), Maxime GREMETZ (Com.), Georges LEMOINE (Soc), Jean-Pierre MICHEL (RCV), Jean-Claude MIGNON (RPR), Mme Yvette ROUDY (Soc), MM. Philippe SÉGUIN (RPR) et Kofi YAMGNANE (Soc).

Le 24 décembre 1997, M. Michel HUNAULT (RPR) a remplacé M. François FILLON, démissionnaire.

2. Représentants du Sénat en 1997

Les 12 représentants du Sénat en 1997 étaient :

Délégués titulaires (6) : MM. Nicolas ABOUT (Ap. RI), Michel ALLONCLE (RPR), Daniel HOEFFEL (UC), Pierre JEAMBRUN (RDSE), Jean-François LE GRAND (RPR), Jean-Pierre MASSERET (Soc).

Délégués suppléants (6) : M. Charles-Henri de COSSE-BRISSAC (RI), Mme Josette DURRIEU (Soc), MM. Jacques LEGENDRE (RPR), Edouard LE JEUNE (UC), François LESEIN (RDSE), Serge VINÇON (RPR).

M. Jean-Pierre MASSERET ayant été nommé Secrétaire d'Etat aux anciens combattants le 4 juin 1997 dans le Gouvernement de M. Lionel JOSPIN, son remplaçant n'a pu être désigné qu'à l'expiration du délai d'option entre ses fonctions ministérielles et son mandat de sénateur, délai arrivant à échéance le 4 juillet, soit après la fin de la session du Parlement. La désignation d'un nouveau membre pour compléter la délégation du Sénat est intervenue le 17 septembre, au cours de la session extraordinaire réunie depuis le 16 septembre 1997.

Afin de pourvoir à cette vacance, M. Marcel DEBARGE, sénateur (Soc) a été élu délégué suppléant tandis que Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc), précédemment délégué suppléant, était élue délégué titulaire.

Au cours de la même séance, le Sénat a désigné M. James BORDAS, sénateur (RI) délégué suppléant en remplacement de M. Charles-Henri de COSSÉ-BRISSAC (RI), démissionnaire depuis le 5 septembre 1997.

3. Bureau de la délégation en 1997



- Président :

M. Jean VALLEIX

Député

(RPR)

- Vice-Présidents :

M. Pierre JEAMBRUN

Sénateur

(RDSE)

 

M. Jean SEITLINGER

Député

(UDF)

 

M. Jean-Pierre MASSERET

Sénateur

(Soc)

 

M. Jean de LIPKOWSKI

Député

(RPR)

- Secrétaire général :

M. Daniel HOEFFEL

Sénateur

(UC)

A la suite du renouvellement des délégués de l'Assemblée nationale, la Délégation s'est réunie le 16 septembre 1997 pour procéder à l'élection de son bureau, ainsi composé à la suite de cette réunion :


- Présidente :

Mme Josette DURRIEU

Sénateur

(Soc)

 
 
 
 

- 1er Vice-Président :

M. Bernard SCHREINER

Député

(RPR)

 
 
 
 

- Vice-Présidents :

M. Pierre JEAMBRUN

Sénateur

(RDSE)

 

M. Georges LEMOINE

Député

(Soc)

 

M. Raymond FORNI

Député

(Soc)

 

M. Marcel DEBARGE

Sénateur

(Soc)

 

M. Jean-François MATTEI

Député

(UDF)

 
 
 
 

- Secrétaire Général :

M. Daniel HOEFFEL

Sénateur

(UC)

 
 
 
 

- Secrétaire Général
Adjoint :

M. Claude EVIN

Député

(Soc)

B. COMPOSITION DE L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE DU CONSEIL DE L'EUROPE

1. Etats membres pléniers du Conseil de l'Europe

de 1949 à 1989

Plus ancienne organisation de coopération européenne, le Conseil de l'Europe est fondé par le traité signé à Londres le 5 mai 1949, entre cinq pays : Belgique, France, Luxembourg, Pays-Bas, Royaume-Uni - rejoints par le Danemark, l'Irlande, l'Italie, la Norvège et la Suède.

Les adhésions d'Etats de l'Europe occidentale se sont bientôt succédé : 1949-1950 - Grèce, Turquie ; 1950 - Islande ; 1951 République Fédérale d'Allemagne ; 1956 - Autriche ; 1961 - Chypre ; 1963 - Suisse ; 1965 - Malte ; 1976 - Portugal ; 1977 - Espagne ; 1978 - Liechtenstein ; 1988 - Saint-Marin ; 1989 - Finlande.

de 1989 à fin 1997

Si la réunion des Etats d'Europe occidentale est à peu près parachevée en 1989 avec l'adhésion de la Finlande (Andorre n'a pu adhérer qu'en 1994, après une réforme constitutionnelle), l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe anticipait sur l'union de tout le continent en créant le statut d'" invité spécial " proposé dès le 11 mai 1989 à quelques pays d'Europe centrale et orientale afin d'associer, sans voix délibérative, des délégations de leurs parlements aux travaux d'une Assemblée creuset du modèle démocratique paneuropéen.

Réservé aux Etats qui " appliquent et mettent en oeuvre l'Acte final d'Helsinki du 1er août 1975 et les instruments adoptés au cours des conférences de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) ainsi que les deux pactes internationaux des Nations Unies du 16 octobre 1966 relatifs aux droits civils et politiques et aux droits économiques, sociaux et culturels " selon les résolutions 917 du 11 mai 1989 et 920 du 5 juillet 1989, le statut d'invité spécial fut conféré à des délégations des Parlements de quatre Etats qui étaient alors l'URSS, la Pologne, la Tchécoslovaquie et la République socialiste fédérale de Yougoslavie, dès le 8 juin 1989.

Bientôt étendu aux Parlements de la plupart des Etats d'Europe centrale et orientale, au fur et à mesure de la formulation de leurs demandes et de leurs progrès démocratiques, ce statut a peu à peu fait place à des adhésions formelles dès lors que le Comité des Ministres et les commissions compétentes de l'Assemblée ont pu constater l'établissement des principales règles de l'Etat de droit et par conséquent le respect des dispositions du statut du Conseil de l'Europe, dans les différents Etats candidats.

Ainsi sont devenus membres pléniers du Conseil de l'Europe les Etats suivants : 1990 - Hongrie - Pologne ; 1991 - République fédérative tchèque et slovaque (dissoute le 31.12.92) ; 1992 - Bulgarie ; 1993 - Estonie - Lituanie - Slovénie - République tchèque ; - République slovaque - Roumanie ; 1994 - Andorre ; 1995 - Lettonie - Moldova - Albanie - Ukraine - Ex-République yougoslave de Macédoine ; 1996 - Russie - Croatie.

Les délégués des Etats membres pléniers siégeant à l'Assemblée parlementaire étaient, au 1er janvier 1997 , au nombre statutaire de 286 titulaires et autant de suppléants.

2. Parlements bénéficiant du statut d'" invité spécial " à l'Assemblée au 1er janvier 1997

Arménie (4 sièges)

Azerbaïdjan (6 sièges)

Biélorussie (7 sièges) (voir ci-dessous, § 3)

Bosnie-Herzégovine (5 sièges)

Géorgie (5 sièges)

(Le statut d'invité spécial ne comporte pas de délégués suppléants).

3. Evolution au cours de l'année 1997

Accordé à la Bosnie-Herzégovine en 1995, et, en 1996, à l'Arménie, l'Azerbaïdjan et la Géorgie, le statut d'invité spécial avait été conféré au Parlement de la Bielorussie en 1992, statut que le Bureau a décidé de suspendre à son égard le 13 janvier 1997.

Initialement fixé à 3, lors de l'octroi du statut d'invité spécial, le 28 janvier 1994, le nombre de représentants du Parlement de Bosnie-Herzégovine a été porté à 5 par décision du Bureau de l'Assemblée du Conseil de l'Europe, le 18 mars 1997, pour tenir compte des effets démographiques de la nouvelle organisation politique de la Bosnie-Herzégovine définie par les Accords de Dayton en 1996.

L'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Bosnie-Herzégovine ainsi que la Géorgie ont formulé des demandes d'adhésion à titre de membre plénier de l'Organisation, qui suivent la procédure d'examen par les commissions compétentes de l'Assemblée parlementaire, la Géorgie obtenant ce statut en 1999.

4. Etats bénéficiant des différents statuts d'observateur

Observateur permanent auprès de l'Assemblée

Dès 1961, le Règlement de l'Assemblée a été modifié pour instituer une nouvelle disposition (article 53 devenu l'article 55) qui prévoyait la possibilité d'admettre des représentants d'Etats non membres du Conseil de l'Europe, à titre d'" Observateurs permanents ", sans droit de parole (sauf autorisation du Président de l'Assemblée) et sans droit de vote. Ce statut fut conféré à la Knesset , Parlement de l'Etat d'Israël dès 1957. Le nombre des délégués est actuellement de trois titulaires et trois suppléants.

Observateurs auprès du Conseil de l'Europe

Par une Résolution du 14 mai 1993, le Comité des Ministres créait à son tour un statut d'observateur auprès du Conseil de l'Europe. C'est ainsi que le statut d'Observateur auprès de l'Organisation a été successivement conféré aux Etats suivants :

- les Etats-Unis d'Amérique (1995),

- le Canada (1996),

- le Japon (1996).

*

* *

La Résolution du Comité des Ministres prévoit que " le statut d'observateur ne donne le droit d'être représenté ni au Comité des Ministres, ni à l'Assemblée parlementaire, sauf décision spéciale de l'un ou de l'autre de ces organes en ce qui le concerne ".

Si ni les Etats-Unis, ni le Japon ne semblent avoir demandé à assister aux travaux de l'Assemblée parlementaire, en revanche, le Parlement Canadien a obtenu, par une Résolution de l'Assemblée du 28 mai 1997, une invitation comme observateur permanent et délègue 6 membres à l'Assemblée.

Ainsi, à la fin de 1997, le Conseil de l'Europe comptait 40 Etats membres pléniers et 3 Etats observateurs. L'Assemblée parlementaire comptait, quant à elle, 286 délégués titulaires (et autant de suppléants) représentant les Parlements des 40 Etats membres, tandis que les Parlements de 4 Etats bénéficiaient du statut d'Invité spécial à l'Assemblée parlementaire dont les délégations comptaient, au total, 20 membres , avec voix consultative , le statut d' Observateur associant de même aux travaux de l'Assemblée, des délégations parlementaires de deux Etats comptant 9 membres titulaires au total, toujours avec voix consultative .

LES TRAVAUX DE L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE
DU CONSEIL DE L'EUROPE
AU COURS DE LA SESSION DE 1997

I. LA PREMIÈRE PARTIE DE LA SESSION (STRASBOURG - du 27 au 31 janvier 1997)

1. Introduction

A l'ouverture de cette session 1997, après l'allocution de M. Charles EHRMANN , député (UDF), Président d'âge, l'Assemblée a procédé au renouvellement de son bureau. Mme Leni FISCHER (Allemagne - CDU-CSU) a été réélue pour un deuxième mandat de même que M. Jacques BAUMEL , député (RPR), réélu Vice-Président au titre de la France.

Au cours de cette session, l'Assemblée parlementaire a entendu des allocutions de :

- M. Tiit VAHI , Premier ministre d'Estonie ;

- M. Mourtouz ALESKEROV , Président de l'Assemblée nationale d'Azerbaïdjan ;

- M. Javier SOLANA , Secrétaire général de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord - OTAN -

L'Assemblée a délibéré des questions suivantes :

- Le Rapport d'activité du Bureau et de la Commission permanente (Rapport 7699 et ad. I, II, III, IV, V et VI), dont l'Assemblée a pris acte ;

- La structure des commissions de l'Assemblée (Rapport 7723, proposition de Directive 7737). Un amendement s'opposant à la réduction du nombre des membres de la Commission de la Science et de la Technologie a été adopté comme la Résolution ainsi modifiée (n° 1107). L'Assemblée a également adopté la Directive (n° 529) visant à étudier la transformation de la Commission ad hoc sur l'égalité entre les femmes et les hommes en Commission permanente de plein exercice ;

- En application des orientations retenues, l'Assemblée a débattu ensuite de la création d'une Commission pour le respect des obligations et des engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe - "Commission de suivi". L'Assemblée ayant adopté la Résolution 1115, sur le Rapport 7722, cette Commission devrait être constituée à la fin de la prochaine partie de la session 1997, soit le 25 avril prochain :

- La Conférence intergouvernementale 1996 de l'Union européenne. Le Rapport (7721) sur cette question a été présenté par M. Jean-Pierre MASSERET , sénateur (Soc), suivi d'un exposé de M. Jacques SANTER, Président de la Commission européenne, avant que ne s'ouvre le débat, commun avec la discussion du Rapport (7711) et de l'Avis (7731) sur les conséquences pour l'Europe d'une Union Economique et Monétaire. Sont intervenus dans ce débat M. Jean-Pierre MASSERET , sénateur (Soc), M. Jacques BAUMEL , député (RPR), M. Jean VALLEIX , député (RPR), M. Jean-François LE GRAND , sénateur (RPR) Mme Josette DURRIEU , sénateur (Soc). A l'issue de ce débat commun, l'Assemblée a adopté les Résolutions 1108 (CIG) et 1109 (UEM) :

- La sûreté nucléaire dans les pays d'Europe Centrale et Orientale. Rapport 7714 - M. Claude BIRRAUX , député (UDF) - et adoption, à l'unanimité, de la Recommandation 1311 :

- La situation à Chypre. M. Nicolas ABOUT , sénateur (ap. RI), est intervenu dans ce débat (Rapport 7717, Avis 7747 et proposition de Directive 7743 - Résolution 1113) :

- La situation en République fédérale de Yougoslavie. Mme Josette DURRIEU , sénateur (Soc) est intervenue dans ce débat (Rapport 7744 et Résolution 1110) ;

- Le respect, par la Russie et l'Ukraine, des engagements pris lors de leur adhésion au Conseil de l'Europe de mettre en place un moratoire sur l'exécution des peines capitales. Dans le débat qui porte sur les Rapports 7746 (Russie) et 7745 (Ukraine), M. Nicolas ABOUT , sénateur (ap. RI) a pris la parole dans ce débat qui s'est conclu par l'adoption des Résolutions 1111 (Russie) et 1112 (Ukraine) ;

- Le respect des obligations et des engagements contractés par l'Albanie. Dans le débat portant sur le rapport 7716, M. Jean-Claude MIGNON , député (RPR), est intervenu (Rapport 7716, Avis 7738, Recommandation 1312 et Résolution 1114) ;

- La mise en oeuvre des Accords de Dayton pour la paix en Bosnie et Herzégovine. Mme Josette DURRIEU , sénateur (Soc) est intervenue dans ce débat au cours duquel M. Robert FROWICK , chef de la mission en Bosnie-Herzégovine de l'Organisation de la Sécurité et de la Coopération en Europe (OSCE) a présenté des observations (Rapport 7733 et Résolution 1116) ;

- Le respect des obligations et engagements contractés par l'Estonie (Rapport 7715, Avis 7730, Résolution 1117, Recommandation 1313) ;

- Les nouvelles technologies et l'emploi, M. Claude BIRRAUX , député (UDF), intervenant dans ce débat (Rapport 7713, Avis 7727, Recommandation 1314) ;

- La demande, par le Comité des Ministres, de l'Avis de l'Assemblée sur le projet de Convention européenne sur la nationalité (Rapport 7718 et Avis 7719, Avis de l'Assemblée 200) ;

- L'âge minimal concernant le droit de vote (Rapport 7724 et Recommandation 1315).

2. Discours de M. Charles EHRMANN, député (UDF), à l'ouverture de la session de 1997 (Lundi 27 janvier)

A l'ouverture de la session annuelle de 1997, M. Charles EHRMANN, député (UDF) , a prononcé, en sa qualité de doyen d'âge, l'allocution suivante :

" Il m'échoit pour la troisième fois l'honneur de prononcer le discours du Président d'âge. C'est un privilège redoutable car l'âge est synonyme de sagesse et d'expérience. Peut-être me jugerez-vous trop passionné par mon sujet.

Les institutions européennes : Conseil de l'Europe, Union de l'Europe occidentale, Union européenne des Quinze sont en crise : l'avenir de l'Europe est en jeu. Ou elles seront adaptées et l'Union européenne des Quinze pourra valablement s'élargir à vingt-cinq et créer un ensemble ayant une armée commune, une monnaie commune, une politique extérieure commune et apparaître comme la première puissance économique et financière du monde capable de discuter à armes égales avec les grands Etats d'Amérique ou d'Asie. Ou les réformes échoueront, et l'Europe restera une masse politique informe, vaste zone de libre-échange comme le veulent le Royaume-Uni et certains Etats. Cette Europe sera incapable de réussir son entrée dans le XXIe siècle, qui sera celui des grands ensembles américains et asiatiques.

L'opinion européenne - frappée par la crise, traumatisée par les mass-médias qui ne s'intéressent qu'à ce qui est anormal - oublie ce qui a été fait et doute de l'avenir. Il est du devoir de votre doyen qui a vécu la fin de la guerre 1914-1918, la crise mondiale de 1929, prolongée jusqu'en 1939, la guerre 1939-1945, les dizaines de millions de morts, de rappeler ce que les pères fondateurs - Monnet, Schumann, Gasperi et bien d'autres, prolongés par les de Gaulle, Adenauer, Giscard d'Estaing, Schmidt, Mitterrand, Kohl, et j'en passe - ont apporté à la résurrection de l'Europe.

Il faut rappeler à l'opinion, qui l'oublie trop, que le Conseil de l'Europe - il rassemble aujourd'hui quarante Etats - a donné aux Etats qui en font partie le goût de la liberté. Il y a 8 ans, en 1989, avant la chute du mur de Berlin, la moitié de l'Europe ployait sous le joug des dictatures. Aujourd'hui, elle s'est libérée en Pologne, en République Tchèque, en Hongrie, et même dans la Serbie, difficilement, la Roumanie, la Bulgarie. La démocratie est en marche. Certes, elle reste fragile et il y aura des retours en arrière mais peu à peu la démocratie triomphera.

Le Conseil de l'Europe admet même des pays ne remplissant pas tous les critères, mais avec l'espoir que, les ayant accueillis dans son sein, la démocratie fera des progrès. Rappelez-vous ce que nous avons dit au sujet de la Russie : eh bien, dans ce pays, depuis cinq ans, des élections ont eu lieu au suffrage universel.

Mme la Présidente Leni Fischer, pour accroître encore le rôle du Conseil de l'Europe, a pris l'initiative de réunir un prochain sommet à l'automne 1997, sous la présidence française, qu'elle en soit félicitée.

L'opinion ignore trop que l'Union de l'Europe occidentale, UEO, qui devrait être le bras armé de l'Europe, mais n'en a pas les moyens, qui souffre de la comparaison avec l'Otan et du rôle très important des Etats-Unis, a cependant joué un rôle dans la crise yougoslave par le blocus de l'Adriatique et de Belgrade.

Certes, il n'y a pas encore d'armée européenne, mais il y a coopération entre la France, le Royaume-Uni, l'Espagne, l'Italie, l'Allemagne. De plus, à Nuremberg, tout récemment, une défense concertée, une imbrication des forces armées françaises et allemandes due à : " des intérêts de sécurité devenus indissociables " vont se concrétiser, puisque L'UEO sera présidée en 1997 six mois par la France, six mois par l'Allemagne et, durant le premier semestre 1998, par l'Italie.

Enfin, la pièce essentielle des institutions c'est l'Union européenne des Quinze. Les peuples ne doivent pas oublier qu'elle a apporté cinquante-deux ans de paix entre l'Allemagne et la France. En 1919, les Français parlaient de " la der des der ", la dernière des dernières. Vingt ans après on recommençait  ! A nouveau, des dizaines de millions de morts et des ruines gigantesques !

Vous permettrez, je l'espère, à un orphelin de la guerre 1914-1918 - en septembre 1914, quand mon père a été tué, je n'avais pas trois ans et ma mère en avait dix-neuf - de vous dire que la pire des choses qui puisse arriver, c'est de voir des millions de femmes perdre leurs maris, des millions de mamans perdre leurs enfants.

Or la paix est plus fragile qu'on ne le croit, comme le prouve ce qui s'est passé en Yougoslavie. La guerre en 1914 a éclaté à Sarajevo. Quatre-vingts ans plus tard la guerre n'a pas éclaté à Sarajevo parce que l'entente France-Allemagne ne s'est pas rompue malgré des points de vue différents.

Même si l'Europe n'apportait que la paix entre les anciens ennemis héréditaires, elle mériterait d'être faite.

Toutefois la Communauté économique européenne, puis l'Europe des Six, des Neuf, des Douze et des Quinze a apporté aux peuples la richesse économique. La guerre de 1914-1918 a fait perdre à l'Europe sa prééminence financière au bénéfice des Etats-Unis ; celle de 1939-1945 a accentué son recul.

Son réveil, aidé, nous le reconnaissons, par les 45 milliards de dollars du plan Marshall, est dû avant tout au marché commun des Six, dont le succès a été tel que des pays qui n'en faisaient pas partie - je pense notamment au Royaume-Uni -ont voulu y adhérer : il est passé de six à neuf, puis à douze, enfin à quinze et d'autres Etats attendent avec impatience d'y accéder en Europe et en Asie. Je pense à la Turquie.

Les peuples qui doutent ne doivent pas oublier que la libre circulation des personnes et des biens a fait de l'Union européenne des Quinze la première puissance économique du monde : 70 % de son commerce se font entre les Quinze ; l'Allemagne est la deuxième puissance économique du monde et si, par malheur, je le pense profondément, l'Europe politique ne se faisait pas, beaucoup pensent, comme moi, que l'Europe deviendrait, pour une grande part, économiquement allemande et que le mark remplacerait facilement l'euro.

Quant à la France, elle est la quatrième puissance commerciale du monde, l'Allemagne étant son premier fournisseur et premier acheteur ; un Français sur quatre travaille pour l'exportation et son agriculture, qui a triplé de volume depuis le marché commun, est la principale bénéficiaire des 45 % du budget de l'Union européenne consacrés à l'agriculture. Socialement, le niveau de vie s'est beaucoup élevé dans l'Europe des Quinze : en valeur constante, trois fois, dit-on. Les peuples ont cru que ces progrès allaient toujours continuer et, dans l'histoire de France, on apprend aux élèves qu'il y a une période de " trente années glorieuses " qui vont à peu près de 1950 à 1980.

Les Etats sont devenus des Etats de providence, d'assistance généralisée ; les budgets de sécurité sociale ont parfois dépassé ceux des Etats, comme en France, preuve que les Etats étaient riches pour se permettre de tels efforts sociaux.

Socialement aussi, des dizaines de millions d'étrangers attirés par ces Eldorado se sont précipités pour y vivre, y être soignés. Et puis, hélas, la crise est venue, s'ajoutant à des gouvernements imprévoyants. Le résultat, c'est 18 200 000 chômeurs dans l'Europe des Quinze, dont 3,3 millions pour la France. Pour lutter contre cette crise, les gouvernements prévoient des sacrifices, des pertes d'avantages acquis, afin d'équilibrer les budgets ; d'où des conflits sociaux.

C'est dans cette atmosphère difficile que l'on veut créer l'euro et réformer les institutions des Quinze, qui, prévues à l'origine pour six, sont entièrement obsolètes pour quinze et le seraient encore davantage si d'autres Etats entraient dans l'Union européenne.

Le second souffle dont l'Europe a tant besoin doit être apporté par la monnaie unique, l'euro. Aux Etats-Unis, le dollar est le facteur essentiel de la grandeur, puisqu'il représente 70 % des transactions commerciales du monde. En Europe, l'euro facilitera le tourisme, permettra aussi de discuter à égalité avec les grands Etats. Il provoquera même une réforme fiscale, qui est nécessaire, un parallélisme entre tous les peuples et permettra de résoudre en partie le problème social en réduisant les lourdes charges qui pèsent sur les 17 millions de petites et moyennes entreprises - ce qui leur permettra d'embaucher une bonne partie des 18 millions de chômeurs.

Au début, les conditions imposées - moins de 3 % de déficit budgétaire du PNB, moins de 6 % de dette du PNB - feront que seuls quelques Etats entreront dans le système de l'euro - le plus possible seront autour de la locomotive France-Allemagne, mais le succès de l'Euro obligera les autres, et je pense au Royaume-Uni par exemple, à y participer comme il l'a fait pour l'Europe des Six.

Quant à la réforme des institutions de l'Union européenne, elle consiste à donner aux grands Etats une place plus importante qu'aux petits. C'est très difficile, car il y a parmi eux des Etats fondateurs de l'Europe des Six et des hommes d'Etat de qualité. Et puis, il y a le Royaume-Uni et son droit de veto, il y a les Cinq neutres ?

Pourtant, peut-on continuer - avec une présidence tous les six mois dans l'Union européenne de vingt-cinq membres - à voir les grands Etats moteurs n'être chacun Président que tous les douze ans ? Peut-on voir la Commission européenne de vingt membres - deux par pays pour les cinq grands, un par pays pour les dix autres - déjà deux fois trop importante, être portée à trente-deux membres, si les onze candidats étaient admis ? Peut-on penser que le Conseil des Ministres qui, en réalité, décide de tout et avec 87 membres - dont 40 pour 4 grands - soit porté à 130 et qu'une coalition des petits puisse mettre les quatre grands en minorité ? Enfin, que penserait-on d'un Parlement européen qui, ayant déjà 626 membres, en aurait 874 ?

L'approfondissement est donc une nécessité absolue avant tout élargissement. D'ailleurs, cet élargissement n'amènera-t-il pas des Etats agricoles dont les exportations nombreuses seraient une ruine pour une Europe occidentale déjà excédentaire ?

Ces Etats qui veulent entrer, et dont beaucoup sont pauvres, ne seront-ils pas demandeurs de fonds structurels de l'Union européenne, ce qui obligerait à beaucoup à augmenter les contributions des Etats qui déclarent, n'est-ce pas, Monsieur Hoeffel, avoir atteint les limites du possible ?

Cette Europe qui se cherche et qui veut dominer son destin historique d'Etats rivaux ne doit-elle pas accentuer davantage son unité, en pensant - c'est un méditerranéen qui vous le dit - au danger intégriste musulman menaçant la Turquie, qui veut adhérer à l'Union européenne, l'Europe du Sud, avec le sud de la Méditerranée, et même l'Europe de l'Est avec l'Asie centrale ?

Puissent tous ces points d'interrogation, trop nombreux, nous inciter à construire une Europe plus unie. Puissent la France et l'Allemagne, conduites par le Chancelier Kohl et le Président Chirac, plus européens que jamais, créer un axe mobilisateur qui fera des réformes difficiles et transcendera le droit de veto : mais réformes nécessaires pour la création d'une Europe plus unie, plus maîtresse de son destin !

Tel est le voeu ardent que votre doyen d'âge vous présente pour l'année 1997. "

3. Rapport d'activité du Bureau et de la Commission permanente (Lundi 27 janvier)

Le rapporteur indique d'abord que l'année 1997 sera marquée par d'importants jalons, puisqu'il s'agira de préciser les missions des différentes organisations européennes afin de définir, conformément à la demande émise au sommet de l'OSCE, un concept commun et global de défense du continent. L'Union européenne devra décider une réforme en profondeur susceptible de lui permettre de faire face à son élargissement et aux défis économiques et sociaux. L'année sera également cruciale pour la monnaie unique. On devra aussi définir les conditions d'adhésion des nouveaux membres à l'Otan. Quant au sommet des chefs d'Etat et de gouvernement du Conseil de l'Europe, il sera également déterminant pour l'avenir.

Compte tenu de ces échéances, il estime impératif de réfléchir aux méthodes de travail du Conseil et conclut qu'au seuil du deuxième millénaire, le Conseil de l'Europe aura un rôle déterminant à jouer pour la paix du continent.

A l'issue de l'exposé, l'Assemblée a donné acte du rapport d'activité du Bureau et de la commission permanente (rapport 7699 et ad. I II III IV V VI).

4. Structure des commissions de l'Assemblée - Intervention de M. Claude BIRRAUX, député (UDF) (Lundi 27 janvier)

Selon le Rapport 7723, les commissions ont été mises en place à l'époque où le Conseil de l'Europe comptait vingt-trois membres. Avec quarante membres aujourd'hui, la structure doit s'adapter pour être le reflet de l'évolution. En outre, de nombreux membres de l'Assemblée estiment que le nombre de réunions est trop important.

Il y a aujourd'hui treize commissions. Si on devait augmenter ce nombre, les petits pays éprouveraient de plus en plus de difficultés à assister aux réunions. En outre, certains parlements nationaux estiment qu'ils dépensent trop d'argent pour le Conseil de l'Europe. Il convient, dès lors, de rationaliser la structure des commissions.

La nouvelle structure est plus simple et se fera sans charge supplémentaire. La proposition de créer une nouvelle commission sur l'égalité des sexes sera étudiée. On a avancé l'idée de supprimer la commission des relations avec les pays européens non membres car elle a rempli son mandat, pour l'essentiel du moins, puisque l'on arrive au bout du processus d'élargissement. Une structure plus simple est également envisagée pour le monitorage.

Dans un esprit de rationalisation, les commissions à soixante-cinq membres pourront créer jusqu'à trois sous-commissions et celles à quarante-cinq membres jusqu'à deux sous-commissions. Il est en outre proposé de nommer trois vice-présidents au lieu de deux pour chaque commission.

L'amendement de M. Schieder en ce sens est une bonne chose. Le rapporteur indique que la question de la création d'une nouvelle commission, dite du suivi, sera examinée mercredi et qu'elle implique à ses yeux la fin de la commission des relations avec les pays non membres. La nouvelle structure devrait être mise en place en avril.

Le rapporteur conclut en indiquant que le projet de résolution est le fruit d'une large concertation et a recueilli l'approbation des différents groupes politiques.

M. Claude BIRRAUX, député (UDF), a pris la parole dans le débat en ces termes :

" J'aimerais intervenir sur le rôle de la commission de la science en me réjouissant par avance que la Commission du Règlement ait accepté notre amendement. La question posée est simple : la commission de la science a-t-elle sa place au sein de notre Assemblée, l'Assemblée des Droits de l'Homme.

La première réponse et le premier exemple qui viennent à l'esprit, concerne la Convention de bioéthique, pour laquelle la commission de la science était saisie au fond. Je me permets de rappeler, mes chers collègues, que notre ancien collègue Pallacios a travaillé dix ans sur ce dossier et nous ne pouvons l'oublier.

Ce dossier de bioéthique est à l'exemple de beaucoup d'autres dossiers dont nos parlements sont saisis : nous sommes amenés à légiférer sur de plus en plus de textes à base scientifique. Il nous faut pouvoir déchiffrer et comprendre un minimum du contenu scientifique, pour que nos discussions juridiques et nos votes aient un sens.

Nous avons récemment voté au Parlement français, une loi sur l'air, largement inspirée par un rapport de l'Office parlementaire des choix scientifiques sur la relation entre l'environnement et la santé.

Notre Assemblée a commencé à se préoccuper des technologies de l'information. Par delà l'aspect spectaculaire de la révolution économique, culturelle et sociale que constitue Internet, je pense qu'il est urgent et de notre devoir de nous pencher sur les aspects éthiques, moraux, de respect et de la protection des droits fondamentaux des citoyens.

Tout ce que est scientifiquement possible n'est pas moralement admissible. La commission de la science est à même de faire le lien entre le monde scientifique et les préoccupations fondamentales de notre assemblée. Intrinsèquement, il n'y a aucune raison de rétrograder notre commission de la science et de la technologie. Il y a d'autant moins de raison que la commission a pris une autre dimension dans deux domaines.

D'abord, les liens étroits et réguliers qu'elle a établis avec diverses institutions internationales, comme l'Agence pour l'énergie nucléaire de l'OCDE, l'Agence internationale pour l'énergie atomique, l'Agence spatiale européenne, la Fondation européenne de la science, le Comité des ministres de la Science de l'OCDE, le réseau EPTA, des Offices parlementaires d'évaluation, la Commission de la recherche du Parlement européen.

Ensuite, pour les pays d'Europe centrale et orientale elle joue un rôle nouveau, mais essentiel en permettant des échanges et des débats sur le rôle de la science et des scientifiques dans la société. Il n'y a pas que l'économie à être en transition. Le potentiel scientifique était orienté quasi exclusivement au service du parti communiste et de ses objectifs politiques, au mépris bien souvent des vérités scientifiques. Replacer l'appareil scientifique, voire, selon son ancienne terminologie " politico-scientifique " dans une perspective de société de liberté et de responsabilité, au service de l'économie et des citoyens c'est une nouvelle " Révolution d'octobre " à réaliser et une révolution de grande envergure.

Je me permets de vous rappeler l'excellent rapport que nous avons adopté sur le rôle des sciences sociales pour ces pays de transition.

Enfin, à notre ordre du jour de demain, est inscrit un rapport sur la sûreté nucléaire dans les pays de l'Europe centrale et orientale.

Nulle autre commission que celle de la science n'est mieux placée pour organiser le débat, confronter les analyses et faire prévaloir que les progrès de la démocratie se mesurent aussi au respect que l'on porte à la sûreté, pour les citoyens eux-mêmes, car il n'y a pas de concept ou de valeur supérieur à l'homme.

J'espère vous avoir convaincu que la commission de la science a toute sa place au sein de notre Conseil de l'Europe et que le rôle qu'elle a joué, comme celui qui l'attend, justifient de son importance. Je remercie d'ores et déjà la Commission du Règlement d'avoir accepté cela. "

Assortie de plusieurs amendements, la résolution n° 1107 contenue dans le rapport n° 7723 est adoptée, ainsi que la Directive n° 529.

5. Conférence intergouvernementale (CIG) 1996 de l'Union européenne et conséquences pour l'Europe d'une union économique et monétaire - Interventions de M. Jean-Pierre MASSERET, sénateur (Soc), rapporteur, de MM. Jacques BAUMEL, député (RPR), Jean VALLEIX, député (RPR), Jean-François LE GRAND, sénateur (RPR) et de Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc) (Mardi 28 janvier)

Présentant son rapport (7721) M. Jean-Pierre MASSERET , sénateur (Soc), a formulé les observations suivantes :

" La Conférence intergouvernementale qui s'est ouverte il y a quelques mois concerne les Etats membres de l'Union européenne de sorte que nous sommes là en situation de spectateurs, mais de spectateurs intéressés parce que tout ce qui touche à la construction de l'Europe dans ses différents aspects, économiques, sociaux et culturels, ne peut pas laisser dans l'indifférence l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.

Nous avons déjà eu sur ce sujet un premier débat en présence d'un ministre espagnol à l'époque et je ne crois pas que la situation ait beaucoup changé depuis. Ce débat nous avait permis de marquer deux ou trois de nos priorités, notamment dans les domaines où nous exerçons une réelle compétence : les droits de l'homme, le suivi de la situation démocratique et de l'Etat de droit.

Nous approchons maintenant de la fin de la Conférence intergouvernementale, puisque les négociateurs ont marqué à Amsterdam, les 13 et 14 janvier 1997, leur volonté d'aboutir avant la fin de la présidence néerlandaise, c'est-à-dire avant le 30 juin 1997. Les questions en suspens dans cette négociation portent principalement sur les notions d'élargissement, sur la démocratisation des prises de décision - des questions se posent au sujet de la majorité qualifiée, de la co-décision, de la pondération des voix.

On a observé que l'axe franco-allemand continuait à fonctionner puisqu'une lettre commune signée par le Chancelier Kohl et le Président de la République française, M. Chirac, a été adressée aux différents partenaires, témoignant d'une certaine volonté politique pour cette Conférence intergouvernementale. Il est probable que l'accord se fera sur la base d'une synthèse entre le document irlandais et la lettre franco-allemande.

Le débat de ce jour doit nous permettre de rappeler quelques-unes de nos suggestions, de marquer quelques-unes de nos préoccupations. Mais il ne faut que nous nous fassions trop d'illusions en cette affaire. Les négociateurs de la CIG ne portent pas un réel intérêt aux observations ou aux réflexions de notre Assemblée parlementaire. Disons les choses comme elles sont. Soyons suffisamment lucides et réalistes pour bien comprendre que, selon l'expression française, " nous comptons pour du beurre ". On a beau avoir de bonnes intentions, de bonnes réflexions, de bonnes suggestions, encore faut-il que la réalité suive. Or la réalité est ce que je viens de dire : la CIG porte peu d'intérêt à ce que nous sommes capables de dire ou de produire.

Cela ne nous empêche pas, avec la lucidité et le réalisme nécessaires, de rappeler nos nécessités et nos préoccupations, de faire part de nos suggestions en espérant au bout du compte qu'il en sera malgré tout un tout petit peu tenu compte.

Quelles sont nos deux nécessités principales dans ce débat ? D'abord, la nécessité d'unifier les mécanismes de protection des droits de l'homme en Europe, ce qui est notre travail principal à nous depuis l'après-guerre. Nous avons mis en place un dispositif, la Convention européenne des Droits de l'Homme, pour intervenir dans ce domaine fort important. Nous souhaiterions qu'il y ait en quelque sorte unité de jurisprudence. On comprendrait mal qu'il y ait une approche des droits de l'homme par l'Union européenne et une autre approche par le Conseil de l'Europe. Sur ces questions fondamentales, qui organisent la vie quotidienne, nous devons avoir une approche commune, une unité de jurisprudence.

Nous rappelons ici régulièrement que nous sommes en faveur notamment de l'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des Droits de l'Homme. Nous l'avons rappelé en plusieurs occasions. Mais les informations que l'on peut recueillir au sujet des négociations de la CIG manifestent les réticences d'un certain nombre d'Etats. Il en est de nombreux qui ne souhaitent pas l'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des Droits de l'Homme. En effet, ils ne veulent pas subordonner la règle communautaire, la norme communautaire finalement, à une institution autre que l'Union européenne.

Sur ce point essentiel, nous rencontrons donc une difficulté majeure alors que logiquement ce point aurait dû être le plus apte à réunir la vocation du Conseil de l'Europe et la vocation de l'Union européenne, qui a une compétence très large dans tous les domaines. A l'évidence, l'élargissement de l'Union européenne à l'ensemble des Etats européens dans un délai à déterminer, l'évolution des prises de décision à l'intérieur de l'Union conduisent nécessairement l'Union à absorber l'ensemble des problèmes politiques posés au continent européen : politique générale, politique économique, politique sociale, compétence dans les droits de l'homme bien évidemment. Cela viendra également... On a vu quelques rapports de l'Union européenne venir contester le Conseil de l'Europe sur son proche champ de compétence.

Ensuite, la nécessité d'unifier les mécanismes d'appréciation sur le respect des principes démocratiques en Europe. Il s'agit du fonctionnement de l'Etat de droit, de ce que nous appelons dans notre Assemblée le monitoring. C'est tout le débat qui a été engagé hier au sujet de la commission du suivi des engagements. Dans ce domaine, il serait anormal que le Conseil de l'Europe ne joue pas un rôle essentiel compte tenu de sa compétence. Tout ce qui a été fait depuis une dizaine d'années pour faire évoluer l'Etat de droit en Europe et toutes les résolutions, les décisions, les contrôles qui ont été exercés à partir de cette Assemblée parlementaire ont fait évoluer positivement l'Etat de droit dans tout le continent européen à partir des adhésions des pays qui se sont libérés du modèle soviétique. De ce point de vue, l'apport de l'Assemblée parlementaire a été remarquable au cours des dernières années. Il serait dommage que l'on ne tienne pas le plus grand compte du travail fait par notre Assemblée et par le Conseil de l'Europe dans ce domaine. Telles sont les deux nécessités principales. Le projet de résolution évoque d'autres questions, l'Union économique monétaire, la monnaie unique pour se satisfaire des perspectives qu'elle ouvre mais en insistant bien sur le fait qu'elle doit concerner un grand nombre d'Etats, que sa mise en oeuvre unique ne doit pas servir de prétexte à la destruction de la cohésion sociale, des systèmes de protection sociale. Il faut au contraire inscrire cette politique dans le cadre de la Charte sociale européenne : on ne pourrait pas concevoir une monnaie unique, une évolution économique qui ne tiendraient pas compte des réalités sociales. Il ne faudrait pas que le mécanisme mette en cause finalement toute l'identité européenne affirmée dans la recherche d'une meilleure cohésion sociale et d'une meilleure protection sociale.

Est évoqué également le conflit en ex-Yougoslavie, mais de façon très modeste, pour démontrer la nécessité d'une intervention européenne, la nécessité de mettre en place demain une identité européenne de défense. Parce qu'après tout le premier bien dû à nos concitoyens, n'est-ce pas la paix et la sécurité ? Sans paix et sécurité, aucune autre politique n'est possible, ni économique, ni sociale, ni culturelle, ni des droits de l'homme. C'est bien la paix et la sécurité qui sont la base de toute l'évolution européenne depuis l'après-guerre et qui justifient notamment la construction de l'Europe aussi bien du Conseil de l'Europe, que de la CEE devenue Union européenne.

Tels sont les points sur lesquels la commission des questions politiques souhaite engager le débat, non sans rappeler que l'essentiel est la nécessité d'unifier, d'une part les mécanismes de protection des droits de l'homme, d'autre part les mécanismes de l'Etat de droit - du suivi de l'Etat de droit. J'espère que sur ces deux points l'Assemblée saura formuler les observations qui s'imposent et que ces observations seront entendues par les négociateurs de la CIG, avec la lucidité et le réalisme auxquels j'appelais tout à l'heure. Il faut toujours garder un peu d'espoir parce que les bonnes idées finissent toujours par triompher. "

M. Jacques BAUMEL, député (RPR), intervient dans le débat en ces termes :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, la révision du traité de Maastricht, qui était prévue, a naturellement suscité une certaine espérance. En effet, pour parler franchement, comment ne pas constater la faiblesse des progrès de la Conférence intergouvernementale et le peu de résultat qu'elle a obtenu jusqu'à maintenant ?

Pourtant, il s'agit d'une occasion exceptionnelle de réaffirmer un certain nombre de principes essentiels pour l'avenir de l'Europe, car le monde, tel qu'il est aujourd'hui, a plus que jamais besoin de l'Europe : d'une Europe réelle qui ne soit pas seulement une Europe des marchands, mais également une Europe des peuples ; d'une Europe de la puissance et non pas d'une Europe des mots.

Croyez-vous que l'Europe continuera à intéresser nos peuples si elle ne s'attache pas réellement aux problèmes essentiels qu'ils rencontrent, tels que le chômage, l'inquiétude de l'avenir, les difficultés de la vie quotidienne ou l'avenir des jeunes ?

Quels sont les véritables problèmes auxquels nous sommes confrontés ? Le débat de ce jour, qui vient à point, doit déboucher sur trois points précis comme l'a parfaitement réaffirmé notre rapporteur, M. Masseret.

Il convient, en premier lieu de renforcer la légitimité démocratique de l'Union européenne. Aujourd'hui, quelles que soient les promesses de la campagne de Maastricht, il reste deux Europe ; non pas l'Europe occidentale et l'Europe orientale, mais l'Europe des puissants contre l'Europe des peuples. Il y a là une coupure, une véritable " fracture sociale " européenne, avec un certain nombre de responsables et d'institutions qui, vivant en vase clos, ont une existence complètement artificielle et ne tiennent pas réellement compte de la situation de la grande majorité des Européens. C'est la raison pour laquelle le rôle des parlements nationaux est essentiel et ne doit pas disparaître au profit du Parlement européen, qui a déçu.

Le rôle des opinions publiques nationales est important pour tenter d'impulser l'Europe des réalités par rapport à l'Europe des songes, notamment en ce qui concerne la mise au point de la monnaie unique.

Aujourd'hui, le problème est différent : il ne s'agit pas de se demander s'il faut ou non une monnaie unique, mais de savoir quand elle sera possible, comment on y arrivera et le pourquoi de cette monnaie unique. Il ne faut pas une monnaie unique pour M. Soros, mais une monnaie unique pour l'amélioration du sort des peuples ; pas une monnaie unique pour les marchés qui sont aujourd'hui les maîtres de la situation - au-dessus des gouvernements, mais une monnaie unique pour affirmer une puissance européenne dans la globalisation du monde, une monnaie mettant fondamentalement en question l'économie et les relations de l'Europe avec le monde.

Il faut donc renforcer, et c'est un point essentiel, la légitimité démocratique de l'Union. Il convient également de réaffirmer davantage son rôle en matière de politique étrangère et de sécurité. Comment n'avons-nous pas honte de l'impuissance de l'Europe devant les événements intervenus ces dernières années ? Comment ne voyons-nous pas que les divisions européennes ont permis d'abord la prolongation de l'affreuse tragédie de l'ex-Yougoslavie puis sa solution provisoire par l'intervention - au dernier moment et après trois ans de combats et d'assassinats - de la puissance américaine ?

Il n'y a pas d'Europe sans une Europe de la puissance, pas d'Europe sans une Europe de la défense. Aujourd'hui, la puissance n'existe pas !

Il n'y a pas non plus d'Europe sans politique étrangère commune. Or, il n'y a pas de politique étrangère commune européenne : c'est bien pourquoi nous devons insister sur cet aspect de l'avenir de la CIG.

Il me faut terminer, et rapidement, puisque, malheureusement, sur des sujets aussi importants, on nous mesure chichement quelques minutes, bien que je parle au nom d'un groupe important de cet Assemblée. Voilà d'ailleurs qui laisse à penser ce que nous représentons réellement : quelques bavardages et quelques écrits qui finiront dans les dossiers du Conseil de l'Europe !

Pour finir, je félicite M. Masseret, en espérant que le présent débat puisse inspirer plus profondément et plus sûrement la suite de la Conférence intergouvernementale, dont il est essentiel d'espérer le succès pour l'avenir même de notre continent. "

M. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC), intervient à son tour :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, après avoir remercié le rapporteur, notre collègue, M. Masseret, j'annonce que j'adhère aux grandes orientations sur lesquelles il a fondé son intervention ainsi qu'aux grandes lignes de la résolution proposée. Elle recommande que l'élargissement de l'Union européenne préserve sa capacité de décision et son caractère démocratique.

Elle insiste également à juste titre sur le fait qu'il est indispensable que les relations entre l'Union européenne et le Conseil de l'Europe soient clarifiées et renforcées car ces relations doivent être fondées sur une étroite coopération et sur la complémentarité, gages d'efficacité. Nos concitoyens attendent cette efficacité pour que l'Europe puisse à la fois garantir notre sécurité intérieure et extérieure mais aussi préserver, restaurer ou renforcer sa capacité à lutter contre le chômage.

Ce sont ces objectifs que doit viser la Conférence intergouvernementale, laquelle doit respecter trois principes.

Premièrement, elle doit veiller à ce que soient respectés les engagements et les calendriers fixés par le Traité de Maastricht. Je pense particulièrement à l'Union monétaire.

Deuxièmement, elle doit affirmer la primauté du politique sur le monétaire et sur l'économique qui ne doivent pas oublier le social, point qui a été rappelé ce matin. Une volonté politique forte est indispensable à l'efficacité de l'Europe.

Enfin, c'est une Europe qui, en s'élargissant, doit être fondée sur une politique véritablement communautaire qui ne saurait se réduire au plus petit dénominateur commun d'un vague consensus intergouvernemental.

Quatre exigences de réforme s'en dégagent.

Il faut d'abord un exécutif politique visible et des procédures simplifiées.

Il convient ensuite que le contrôle démocratique soit exercé par le Parlement européen et que les parlements nationaux soient et restent associés à ce contrôle démocratique.

On doit par ailleurs élargir les compétences de l'Union européenne à la sécurité et à la politique étrangères mais dans le strict respect du principe de subsidiarité, laissant aux Etats mais aussi aux collectivités territoriales le soin de traiter les problèmes parce qu'ils sont plus proches du terrain.

Enfin, il faut que l'Europe avance au rythme de ceux qui ont la volonté de la faire avancer car le temps presse.

Dans un tel contexte, il convient de ne pas oublier qu'il est fondamental que cette Europe, quel que soit l'aspect institutionnel, ne saurait s'imposer que dans le respect de valeurs morales, culturelles et spirituelles. C'est là que le rôle du Conseil de l'Europe est fondamental. Il incarne en effet le respect des droits de l'homme, le respect de la primauté du droit, le respect des règles démocratiques. Comme le rappelait le Président Santer, il exerce un véritable magistère démocratique - et telle est bien la mission qui lui incombe.

En cette période de Conférence intergouvernementale, il faut que le Conseil de l'Europe s'affirme ainsi sans complexe pour que sa voix se fasse entendre et soit entendue. "

M. Jean VALLEIX, député (RPR), prend également la parole :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, je voudrais d'abord exprimer un regret, celui qu'à l'occasion de cette session ne soit pas prévue du tout une réflexion sur la préparation du deuxième sommet du Conseil de l'Europe même si, ce matin et cet après-midi, nous avons eu l'occasion d'aborder des problèmes touchant à cette question. Ce sommet doit se dérouler dans huit mois. Nous n'avons pratiquement plus qu'une session, celle d'avril, pour nous y pencher de plus près.

J'en viens aux deux rapports dont l'Assemblée est saisie.

D'abord, en ce qui concerne la Conférence intergouvernementale, je partage les analyses du rapporteur, mon collègue et ami M. Masseret. Je renforcerai ses analyses par les observations que vient de faire à l'instant Lord Mackie et celles que M. Jacques Baumel a présentées ce matin, relatives à la nécessité que s'accélère la réflexion pour en arriver à une réelle avancée en matière de défense et de diplomatie. L'Europe n'est pas qu'une Europe de marchands, cela a été dit. Elle doit avoir une personnalité, une identité ; l'une et l'autre se défendant et s'organisant de la diplomatie pour l'organiser ; des structures militaires pour la défendre. Il est vrai sur ce dernier point que nous passons le relais plus spécialement à l'UEO.

Cela dit, je m'étonne, et nous nous étonnons tous, que la Conférence intergouvernementale avance petitement, dans l'attente, vraisemblablement, du renouvellement de la représentation parlementaire d'un de nos partenaires importants, je pense à la Grande-Bretagne. C'est un vrai handicap. On se demande comment, en si peu de temps - avril, mai, juin - tout sera résolu à Amsterdam.

Il ne faudrait surtout pas qu'il s'agisse seulement d'une grande et nouvelle fuite en avant qui conduirait à bondir vers l'élargissement sans avoir réglé les problèmes, problèmes institutionnels et difficultés de l'approfondissement.

Notre collègue M. Masseret, a élaboré, en notre nom à tous, une série de propositions à l'intention de la CIG. Elles concernent d'une part, la révision de l'article 230 du Traité de Rome pour faire reconnaître le rôle du Conseil de l'Europe, notamment dans des domaines couverts par le troisième pilier de l'Union - sécurité intérieure et justice, d'autre part, l'articulation entre le dialogue politique au sein du Conseil de l'Europe et la PESC.

Qu'est-il advenu de nos propositions ? Rien ! Dans l'intervention de M. Santer, ce matin, nous avons pu relever, sans aucune satisfaction, qu'il n'y avait pas davantage de réponses. Voilà qui me paraît préoccupant.

Mme Halonen, en revanche, a fort bien posé le problème en soulignant que le Conseil de l'Europe disposait d'une expérience dont l'Union européenne pourrait profiter dans le cadre de son propre élargissement. De tels propos me paraissent beaucoup plus constructifs, davantage que ceux qui nous invitent à vouloir apporter notre concours à je ne sais quel " modèle de sécurité intégré pour le XXIe siècle ", concept qui est l'apanage de l'OSCE. Le Conseil de l'Europe doit donc se faire mieux entendre. Notre inquiétude doit être celle de ne pas être assez écoutés.

Le second rapport complète celui de nos deux rapporteurs, qui ont conjugué leurs actions très complémentaires dans la présentation de leur document.

Notre collègue M. Hoeffel a parlé de la volonté politique qui paraît échapper à l'Union européenne : cette volonté politique est autre chose qu'une simple volonté économique financière, monétaire ou bancaire. Nous préférons, au Conseil de l'Europe, que tous les dispositifs, monétaire, bancaire et financier, soient au service de l'homme. Nous préférons servir l'homme au lieu que les hommes, notamment les Européens, soient gentiment invités à prendre le train de l'Union européenne et monétaire, sans savoir très bien dans quel état ils arriveront, le conducteur du train se préoccupant peu apparemment de ses voyageurs.

Dans cette affaire je veux mettre en évidence un projet resté en rade, celui des grands travaux européens. J'aimerais savoir - nous aimerions savoir - où ils en sont !

Il est important aussi que nous traitions des problèmes relatifs à l'avancée technologique et aux modifications que ce progrès va entraîner sur l'emploi.

Il n'est ni honteux, ni sot, de penser que de grands travaux traditionnels d'infrastructure dans les pays de l'Est et - pourquoi pas -dans certains des nôtres, je pense à ma région Aquitaine, gagneraient fort à une volonté un peu plus affirmée d'aménagement du territoire, au niveau tant français qu'européen. Ces grands travaux font partie de ces relances possibles et nous ferions bien d'y songer.

S'agissant des amendements relatifs à la monnaie unique européenne, je voudrais dire combien je les soutiens car ils sont indispensables à une approche plus parlementaire, et plus populaire. Je soutiens également l'amendement, en forme de considérants, de M. Atkinson.

Mes chers collègues, je souhaite que le Conseil de l'Europe se rende indispensable dans sa mission humaine. "

M. Jean-François LE GRAND, sénateur (RPR), s'exprime alors en ces termes :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, qu'à mon tour il me soit permis de féliciter le rapporteur pour la qualité de son travail ainsi que pour la pertinence de ses observations. C'est une redite pour nous, membres du Sénat, puisque nous avons le bénéfice des observations de M. Masseret assez régulièrement.

Il ne faut pas que la Conférence intergouvernementale, une fois de plus, paraisse trop étrangère aux préoccupations des citoyens de l'Europe communautaire comme de la grande Europe, bref, que l'Union européenne n'apparaisse pas toujours aussi technocratique, malgré les efforts des gouvernements, dont le Gouvernement français qui fait de l'Europe un enjeu citoyen et humaniste. Un orateur précédent déclarait : " Ils doivent se demander s'il s'agit d'un point final ". Souhaitons qu'il s'agisse d'un point d'exclamation suivi d'effets !

Il faut des réformes institutionnelles, personne ne le conteste.

Il faut plus d'égalité dans les représentations des pays membres, des institutions plus conformes aux règles démocratiques. L'extension du vote à la majorité qualifiée ne peut se faire sans cette indispensable réforme de la pondération des votes au Conseil et des sièges au Parlement européen.

Une association réelle des parlements nationaux au processus de décision communautaire est nécessaire, en particulier pour éviter les dérives de compétences et veiller à une réelle subsidiarité.

De même, la Conférence intergouvernementale doit organiser une réelle coopération avec le Conseil de l'Europe. Il est déraisonnable de dupliquer les institutions d'assistance démocratique ou encore de lutte contre le racisme et autres actions diverses et variées. Cela constitue des sources de gaspillage de crédits publics que nos concitoyens admettront de moins en moins, en même temps qu'une sous-utilisation de capacités d'ingénierie dans les domaines du Conseil de l'Europe.

Il convient également de rappeler le rôle de la Cour de justice qui ne doit pas constituer une sorte de gouvernement des juges, privé de toute légitimité démocratique.

Il faut affirmer le caractère politique de la PESC avec la création d'un secrétariat spécifique confié à une personnalité nommée par les chefs d'Etat et de gouvernement.

Bien plus encore, les réformes institutionnelles, quelles qu'elles soient, doivent être au service des attentes de nos concitoyens, qui vont d'abord vers la préservation des modèles socio-économiques européens, au lieu de privilégier un marché incontrôlé ou les grands financiers mondialistes.

L'Europe technocratique, dans ses comportements actuels, prend un très grand risque quand elle aboutit d'abord, au démantèlement des services publics, principal instrument d'un développement harmonieux du territoire alors que toutes les régions doivent bénéficier de l'égalité d'accès aux grands services publics, notamment les transports, la poste et les télécommunications ; ensuite, à ouvrir sans contrôle un grand marché unifié de 350 millions de consommateurs à une concurrence mondiale faussée par le non-respect de normes minimum en diverses matières : dans le domaine social, où la globalisation doit respecter les normes de l'OIT, en matière environnementale, où le dumping écologique menace tous les équilibres de la planète, à long terme ; en matière de protection des consommateurs, menacés par des contrefaçons dangereuses ; enfin, en matière de propriété intellectuelle, sous peine de tuer la recherche, et donc le progrès pour tous.

Tels sont les vrais enjeux de la réforme de l'Union européenne. En disant cela, je pense non seulement aux actuels Etats membres, mais aussi à ceux d'Europe centrale et orientale qui ne se sont pas libérés d'un certain nombre de jougs pour goûter à des normes sociales rétrogrades.

Nous devons imposer les vraies réformes qu'attendent tous les citoyens de l'Europe. Ils ne peuvent se réunir qu'autour d'un modèle de civilisation, adapté sans doute, mais renforcé et non démantelé. Méfions-nous des technocrates et des idéologues qui font bon marché de toutes les règles qui sont à la source de l'harmonie sociale. D'une part, nos plus grands partenaires, les Etats-Unis ou le Japon, savent parfaitement protéger leurs économies. D'autre part, ces idéologues, politiquement irresponsables, ignorent les risques d'explosion sociale d'une Europe communautaire comportant vingt millions de chômeurs et d'une Europe centrale abandonnée à la misère et aux spéculations mafieuses.

Telles sont les réalités politiques qu'il convient de rappeler aux négociateurs de la réforme du Traité de Maastricht. Donnons-leur mandat impératif de ne pas manquer une deuxième fois le rendez-vous exaltant de l'Europe avec elle-même, avec les peuples qui la composent, avec les citoyens européens. Ne pas le faire engagerait notre responsabilité devant les générations futures.

En espérant que l'Assemblée adoptera les amendements qui ont été déposés au nom de la commission des questions économiques et du développement, je voterai ce rapport. "

Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc), s'exprime en ces termes :

" Nous sommes partisans de l'euro mais nous voyons certaines conditions à sa réussite : une monnaie unique pour l'Europe, oui, mais le système monétaire européen a démontré ses carences. Les Américains ont une monnaie, le dollar, et non pas cinquante-deux, une par Etat. L'euro doit être un instrument de puissance. Il doit renforcer le poids économique et politique de l'Europe.

Le rééquilibrage du rôle des monnaies est nécessaire alors que 60 % des échanges dans le monde se font en dollars, bien que le PIB des Etats-Unis ne représente que 23 % de la masse mondiale.

Le dollar fluctue et se dévalue. En quinze ans, de 1980 à 1995, il a perdu les deux tiers de sa valeur par rapport au Deutsche Mark, ce qui a causé des préjudices économiques et industriels.

L'euro ne doit pas être surévalué mais le dollar ne doit pas être sous-évalué ! L'euro pourra opposer une meilleure résistance aux chocs et aux spéculations ; il peut favoriser une réforme du système monétaire international.

Un pacte de croissance et de stabilité, pourquoi pas ? Mais le pacte qui a été adopté à Dublin par les Quinze ne vas pas dans le bon sens. Oui, l'euro doit être crédible, l'euro doit être un succès durable et les politiques de tous les gouvernements doivent converger vers plus de rigueur. L'euro doit optimiser le marché unique et favoriser les investissements, la croissance, les échanges par la réduction du coût des transactions. L'euro doit contribuer aussi à harmoniser les systèmes sociaux et surtout il faudra bien élaborer un protocole social établissant les normes communes essentielles, à inclure cette fois-ci dans le traité.

Un Gouvernement européen ? La vraie question est là. Comment faire émerger la volonté politique afin de ne pas laisser à une banque centrale, fut-elle " un organe démocratique responsable ", le pouvoir ou plutôt le monopole du pilotage des économies européennes ?

Il faut à l'Europe une plus grande intégration politique. Il faut renforcer l'Union européenne avant de l'élargir. Sinon, dans une simple zone de libre-échange, elle se désintégrera. "

M. Jean-Claude MIGNON, député (RPR), intervient dans le débat :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, je suis heureux de poursuivre aujourd'hui, avec vous, la réflexion sur la mise en place d'une union économique et monétaire que nous avons engagée lors de la dernière session de l'Assemblée du Conseil de l'Europe en décembre dernier. Depuis, j'ai réfléchi aux questions que nous nous étions alors posées et auxquelles nous avions tenté de répondre. Je souhaiterais, avec votre accord, vous exposer mon opinion sur ce que seront les conséquences d'une union économique et monétaire.

" Nul ne veut l'Europe plus que moi " a récemment déclaré Philippe Séguin, Président de l'Assemblée nationale française. Permettez-moi de reprendre cette affirmation. Si j'ai fait campagne contre le Traité de Maastricht, j'ai toujours été un fervent défenseur de l'Europe. Ce traité a été voté par les Français et ratifié par les pays membres de l'Union européenne ; il ne s'agit plus de savoir s'il faut ou non faire l'UEM, mais d'en cerner les conséquences, d'en déceler les dangers afin que chaque pays puisse en tirer le meilleur parti.

Le temps de parole imparti pour ce type d'allocution étant relativement court, j'insisterai de façon plus approfondie sur quelques thèmes relatifs à l'union économique et monétaire qui me tiennent à coeur.

Tout d'abord l'indépendance de la future banque centrale européenne et le rôle qui lui est dévolu sont des sujets qui, je dois le reconnaître, me préoccupent.

Cette indépendance de la banque centrale européenne est, à l'origine, une idée défendue par l'Allemagne, nos voisins d'outre-Rhin ayant une banque centrale, la Bundesbank, en principe indépendante. Je tiens toutefois à faire remarquer que, dans les faits, il n'en a pas toujours été de même. Ainsi, lors de la réunification, sous la pression politique de Bonn, la Bundesbank n'a pas réussi à imposer un taux de conversion de un Deutsche Mark ouest-allemand pour deux Marks est-allemands. Faut-il se trouver face à un événement de cette importance pour que le pouvoir politique puisse faire entendre sa voix et participer à la prise de décision dont les conséquences concernent l'ensemble des citoyens ? Ma réponse est claire : non !

Le rôle dévolu à la banque centrale européenne est un problème crucial. Peut-on accepter que la politique monétaire soit décidée par un organisme unique, technique, aux attributions encore plus étendues que la Federal Reserve Bank aux Etats-Unis ? La politique monétaire est un instrument autant politique qu'économique : elle doit être en priorité au service de la croissance et de l'emploi. Il serait donc, à cet égard, logique d'entreprendre une redistribution des responsabilités en rendant au politique, seule expression légitime de la volonté des peuples, sa juste place. La politique ne doit pas découler du monétaire comme cela est prévu. Ce raisonnement est dangereux ; il risque d'enfermer le projet d'union économique et monétaire dans une mécanique trop abstraite où l'autorité légitimement investie n'aurait plus place.

Il convient aujourd'hui de parvenir à un équilibre entre l'indépendance et les compétences dévolues à la banque centrale européenne et la responsabilité de cette institution devant les citoyens. On ne peut pas construire l'Europe monétaire sans légitimité politique. C'est pour cela que je réaffirme ma volonté de voir les gouvernements des pays participants à l'UEM exercer un contrôle politique sur les activités de la banque centrale européenne.

Je me réjouis de remarquer que certaines dispositions ont déjà été prises. Ainsi, le président et les membres du comité de direction de la banque centrale européenne seront nommés par les chefs d'Etat et de gouvernement des pays participant à l'union économique et monétaire, après consultation du Parlement européen, ce qui constitue à mon avis, déjà une certaine garantie. De même, le fait que ce président devra rendre compte des actions de la banque centrale européenne et présenter sa politique monétaire devant le Parlement européen va dans le sens d'un contrôle démocratique des activités de la banque centrale européenne.

Ces dispositions déjà prises sont-elles suffisantes ? Les gouvernements ne pourront certainement, dans les faits, n'exercer qu'une représentativité limitée. Et le Parlement européen, certes démocratiquement élu mais trop éloigné des préoccupations quotidiennes des citoyens, ne dispose d'aucun pouvoir législatif. Je souhaite donc que des dispositions supplémentaires soient décidées afin que les citoyens, par la voix des représentants politiques qu'ils ont désignés, puissent se faire entendre.

Je veux ensuite appeler votre attention sur les délais de mise en place d'une union économique et monétaire et sur ce que cela suppose quant à l'acceptation de la monnaie unique par les citoyens.

N'oublions pas que les critères de Maastricht ont été fixés à un moment où la conjoncture économique était plus favorable qu'elle ne l'est maintenant. N'oublions pas également que l'euro sera la première réalisation de l'Union européenne qui concernera les citoyens dans leur vie de tous les jours. De plus, comme l'a déclaré M. Dehaene, Premier ministre du Royaume de Belgique, lors de la table ronde sur l'euro de janvier 1996, " l'obstacle majeur pourrait bien ne pas être les critères de Maastricht en tant que tels, mais bien l'opinion publique ".

Si l'on confisque au peuple son droit naturel de participer à la prise de décision, si nos concitoyens ont l'impression que cette union monétaire se fait dans la précipitation, un vent de mécontentement social risque de se lever et le projet peut ainsi échouer. N'entraînons pas le peuple dans une fuite en avant, vers un inconnu qui lui fait peur. Les échecs de l'histoire européenne ont été les tentatives de fédérer par la force. Ne lui imposons pas, par simple souci de respect du calendrier, une union économique et monétaire tant que nous n'en avons pas cerné les conséquences. " On ne fera pas l'Europe si on ne la fait pas avec les peuples et en les y associant " déclarait, il y a vingt-cinq ans, le général de Gaulle. Ses propos sont, aujourd'hui plus que jamais, d'actualité.

Il est nécessaire d'ouvrir un débat, véritable forum démocratique, dans lequel nous prendrons le temps de réfléchir et de repenser, en toute sérénité, les conditions de réalisation de l'UEM. " La monnaie unique doit être au moins aussi bonne que la meilleure des monnaies européennes ", selon l'avis du commissaire européen Yves-Thibault de Silguy. Pour que l'euro remplisse ces conditions, je vous invite aujourd'hui non pas à remettre en question le processus d'UEM engagé - qui a été démocratiquement décidé - mais à faire attention à ne pas entraîner nos concitoyens dans une entreprise aux résultats incertains et à analyser comment nos pays peuvent aborder ce tournant de la construction européenne.

Enfin, je tiens à vous faire partager mon inquiétude sur la question du taux d'entrée de nos différentes monnaies nationales dans le système de l'euro. Je rejoins ici les déclarations récentes de Valéry Giscard d'Estaing, ancien Président de la République française, lui aussi Européen convaincu. Il ne faut pas rater l'entrée de nos devises dans ce processus, ce dernier étant définitif, irréversible : nous n'avons pas droit à l'erreur ! Là encore, je désire ouvrir un dialogue et débattre sur cette question.

Enfin, je souhaiterais conclure mon intervention en essayant de répondre à cette question : l'Europe, qualifiée à juste titre par Jacques Delors d' " objet politique non identifié ", est-elle suffisamment unie du point de vue politique pour assurer la réussite du projet d'union économique et monétaire ?

A l'heure actuelle, nous ne pouvons pas dire que l'Union européenne est réellement unifiée au plan politique. Les pays membres ne disposent d'aucune représentation démocratique : la Commission européenne est composée de bureaucrates et de commissaires nommés et non élus. Insuffisamment visibles, jugées trop lointaines, les institutions européennes apparaissent au fur et à mesure que les transferts de souveraineté se réalisent comme peu démocratiques. Ce déficit de démocratie tient tout à la fois au rôle insuffisant du Parlement européen, à la parcellisation des responsabilités politiques au Conseil des ministres et à l'insuffisance assise politique de la Commission.

Avec l'Union économique et monétaire, ce déficit démocratique se renforcera certainement. Actuellement, les parlements nationaux voient, entre autres, leur politique économique et étrangère se décider à Bruxelles par la Commission. Avec l'union économique et monétaire, leur politique monétaire sera menée depuis Francfort par la banque centrale européenne. Voulons-nous vraiment qu'un tel scénario se déroule sous nos yeux ?

L'Europe monétaire exige un contrepoids politique, c'est à nous, au sein de cette Assemblée parlementaire, de faire entendre la voix de nos citoyens afin de parvenir à une union économique et monétaire réussie. "

M. Jean-Pierre MASSERET, sénateur (Soc), reprend la parole en ces termes :

" A mon tour, je veux remercier les différents orateurs. Leurs interventions ont permis d'approfondir la réflexion, notamment sur les changements institutionnels nécessaires dès lors que l'on envisage l'élargissement de l'Union européenne.

Sur cette question, les intervenants ont souligné les points qui leur paraissent devoir être approfondis lors de la Conférence intergouvernementale, en particulier le besoin de démocratie, de prise de décisions démocratiques, pour une meilleure adhésion des citoyens européens.

La lutte contre le chômage est un sujet qui est revenu très souvent et, il est vrai, cette question sociale est au coeur des préoccupations de nos sociétés. Tous les orateurs y ont porté un grand intérêt.

A été également soulignée la nécessité de faire prévaloir la question de la sécurité en Europe.

Enfin, confirmation de ce que nous avions indiqué ce matin en préliminaire, a été mise en avant la défense des points forts du Conseil de l'Europe dans le cadre des relations entre notre Organisation et l'Union européenne, à savoir les droits de l'homme et le suivi de l'Etat de droit dans les divers pays membres de la Communauté européenne.

Sur ces deux derniers points, je ne suis pas sûr que nous aurons obtenu de M. Santer toutes les garanties. En particulier, l'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des Droits de l'Homme ne paraît pas quelque chose d'acquis. J'aurais même tendance à penser que la Conférence intergouvernementale n'aboutira pas sur ce point pourtant élémentaire et que l'adhésion ne se produira pas. Un enfant de l'école maternelle comprendrait aisément la nécessité de ne pas avoir de différences dans les normes juridiques ou dans les jurisprudences relatives aux droits de l'homme. Il y a donc incompréhension totale de la part de l'Union européenne vis-à-vis de la revendication simple que nous avons avancée.

Nous avons essayé de nous faire entendre, tout au long de cette journée : y sommes-nous parvenus  ? L'avenir qui le dira. En tout cas, merci à celles et à ceux qui ont appuyé le projet de résolution et le rapport que j'ai présenté au nom de la commission des questions politiques. "

A la suite de ce débat, sont adoptées la résolution 1108 contenue dans le rapport 7721, amendée, ainsi que la résolution 1109 contenue dans le rapport 7711 également amendée.

6. Exposé de M. Jacques SANTER, Président de la Commission européenne - Intervention de M. Jacques BAUMEL, député (RPR) (Mardi 28 janvier)

Au Président de la Commission européenne, qui souligne le nouveau partenariat existant entre le Conseil de l'Europe et l'Union européenne dans la construction de l'architecture du continent et rappelle que l'Europe élargie se fera dans le respect de la dignité de chaque être humain grâce à l'apprentissage de la démocratie, M. Jacques BAUMEL, député (RPR), adresse la question suivante :

" Monsieur le Président, pourquoi la Conférence intergouvernementale accorde-t-elle si peu d'importance aux problèmes de défense et de sécurité ? Qu'adviendra-t-il, puisqu'il est prévu que l'UEO sera placée sous l'autorité de l'Union européenne, quand l'élargissement de l'Union européenne fera participer des pays neutres ou qui n'acceptent de faire aucun effort de défense, si des décisions doivent être prises sur des problèmes de sécurité européenne ? "

M. Jacques SANTER , Président de la Commission européenne, répond ainsi :

" Monsieur Baumel, il est évident que les questions de sécurité doivent revêtir une forme tout à fait particulière. Jusqu'à ce jour, la Conférence intergouvernementale n'a pas encore traité de ce point important, mais elle l'abordera certainement, car c'est l'un des sujets cruciaux qui fait partie de ce que l'on appelle aujourd'hui dans notre jargon " le deuxième pilier " ensemble avec la politique étrangère commune.

A cet égard, la sécurité commune doit faire l'objet d'une révision dans le Traité. Jusqu'à présent, aucune décision n'a été prise ; seules des propositions ont été présentées par certains Etats membres comme, du reste, par la Commission européenne. Elles visent à de plus larges relations entre l'Union européenne et l'UEO et, à travers cette dernière, au renforcement du pilier européen de défense au sein de l'Alliance atlantique.

Tel est brièvement exposé notre objectif. Bien entendu, cela pose nombre de problèmes. Vous avez souligné celui des pays neutres. Lorsque je suis dans ces pays, je leur demande de m'indiquer le contenu d'une politique de neutralité. Au demeurant, la neutralité revêt-elle aujourd'hui la même signification qu'il y a une vingtaine d'années? Sur le sujet, un grand débat s'est instauré au sein des Etats membres. Il convient d'étudier de quelle façon régler la question en relation avec les problèmes liés à la sécurité. "

7. Sûreté nucléaire dans les pays de l'Europe centrale et orientale - Intervention de M. Claude BIRRAUX, député (UDF), rapporteur (Mardi 28 janvier)

Présentant son rapport écrit (Rapport 7714), M. Claude BIRRAUX, député (UDF), s'exprime ainsi :

" C'est en été 1991 que l'Agence internationale pour l'énergie atomique, qui n'est pas précisément une organisation antinucléaire, lançait un cri d'alarme concernant la sûreté de la centrale bulgare de Kozloduy. Le monde découvrait qu'il y avait du danger nucléaire lié aux conceptions soviétiques en général et non plus seulement à Tchernobyl.

Ce cri d'alarme de l'AIEA a été relayé par de nombreux organismes, en particulier le G7. Les initiatives se sont multipliées : programmes Phare et TACIS de l'Union européenne, compte sûreté nucléaire ouvert à la BERD et alimenté par des dons volontaires, coopération bilatérale, prêts Euratom. Force est de constater que le signal d'alarme tiré par notre Assemblée, comme l'urgence affirmée par chaque réunion du G7 ou sommets européens, n'ont pas eu les effets immédiats escomptés.

La fermeture de Tchernobyl devenait le symbole de cette urgence déclamée et réclamée sur les tréteaux internationaux. Le système soviétique n'était pas tombé en même temps que la statue de Lénine et faisait de la résistance. Il a fallu attendre décembre 1995 pour que la décision soit formellement prise, et il faudra attendre l'an 2000 pour que Tchernobyl s'arrête. Les problèmes liés à la centrale ne s'arrêteront pas à cette date.

Notre Assemblée a adopté en 1993 une recommandation qui constituait déjà un document avancé à cette époque et qui tenait compte des réalités énergétiques et des possibilités techniques : amélioration de l'exploitation, modernisation ou fermeture des réacteurs. Nous insistions sur la nécessité de la création d'un mécanisme de décision à haut niveau et d'un engagement financier à la hauteur des enjeux.

Le rapport que je présente au nom de la Commission de la science et de la technologie dresse un tableau global de la situation dans chaque pays et des différentes initiatives internationales et leur financement.

Il faut reconnaître que l'Union européenne, malgré les défauts que j'avais dénoncés en 1993, a été le principal financeur de ces actions d'assistance. Il faut aussi porter à son crédit les améliorations apportées à son environnement technique, en dépit de la pesanteur persistante d'idéologies propres et de cohérences internes parfois peu lisibles - en d'autres termes, des conflits entre directions.

Je souhaite préciser d'emblée plusieurs points : ce rapport traite de la sûreté des installations nucléaires exclusivement ; il n'englobe pas les aspects déchets, combustibles, réacteurs militaires ; la sûreté nucléaire, c'est tout ce qui a trait au fonctionnement de la Centrale ; la sécurité nucléaire, c'est tout ce qui concerne l'extérieur de la Centrale : les rejets, la protection des populations, les plans d'urgence.

Comment a évolué, depuis 1993, le contrôle international ?

La Convention sur la sûreté nucléaire, négociée sous les auspices de l'Agence de Vienne, ou AIEA, entrée en vigueur le 24 octobre 1996 et ratifiée par soixante-trois pays, prévoit l'élaboration par les Etats concernés des rapports sur la sûreté des installations nucléaires et l'examen de ces rapports, régulièrement, lors de réunions communes. Elle affirme des principes connus à l'Ouest, souvent ignorés à l'Est, comme l'indépendance des autorités de sûreté, leur pouvoir réel ou la transparence sur les incidents.

Le Memorandum of Understanding sur Tchernobyl présente l'engagement du G7 et de l'Ukraine pour arriver à la fermeture de la centrale en l'an 2000 : amélioration à court terme des unités encore en fonctionnement, construction d'un nouveau sarcophage, achèvement des centrales de Rovnoa, Khmelnitsky, l'élaboration d'un plan d'impact social, pour atténuer les effets économiques et sociaux de la fermeture de Tchernobyl.

On peut espérer que tous les engagements seront tenus, mais il n'y a pas de certitude absolue, l'Ukraine, qui consacrerait près de 10 % de son budget pour faire face aux conséquences de l'accident de 1986, pouvant être tentée de faire monter les enchères.

Le Sommet de Moscou sur la sûreté nucléaire a permis dans ses conclusions d'affirmer par tous les participants, y compris la Russie, le principe de la primauté de la sûreté sur toute autre considération. Cela semble évident, mais ce n'était pas le cas dans le système communiste soviétique. Le Sommet de Moscou a confirmé par les signataires, le Memorandum of Understanding sur Tchernobyl et la Russie a accepté de signer la Convention de Vienne sur la responsabilité civile en cas d'accident nucléaire.

En ce qui concerne les initiatives financières, un constat s'impose : le décalage flagrant entre les besoins estimés pour une remise à niveau de la sûreté et les moyens mis en oeuvre par les différents financeurs.

Il faut y ajouter la complexité des procédures, où il n'existe pas des critères d'intervention communs. Je pense à la BERD, où chaque pays contributeur peut imposer, sur des motivations diverses, des critères supplémentaires avant de donner son accord au financement.

Le rapport présente un bref aperçu des différents types de centrales et de la situation dans les différents pays.

Je serais tenté de classer les pays en deux catégories : ceux qui ont intégré les exigences de sûreté avec tout ce que cela implique dans les procédures et dans la pratique : Hongrie, Slovaquie, Tchéquie ; ceux qui continuent à travailler avec un discours, certes sur la sûreté, mais où les habitudes néfastes héritées du communisme sont toujours vivaces ou bien qui manquent de moyens, ou bien encore où le nucléaire est un enjeu politique : Russie, Ukraine, Bulgarie laissée orpheline par le départ des soviétiques en 1989.

Par-delà les sensibilités politiques ou philosophiques de chacun sur l'utilisation de l'énergie nucléaire - débat que nous ne sommes pas en mesure de trancher - nous devons avoir à l'esprit que la sûreté nucléaire s'impose à tous.

La sûreté nucléaire n'est pas un luxe pour pays riches, mais une nécessité pour tous. La sûreté nucléaire n'est pas non plus un enjeu de pouvoir. Elle est constituée d'un ensemble de règles, de comportements que l'on ne saurait ignorer, ni oublier ou combattre selon son positionnement politique.

La sûreté nucléaire n'est pas une étiquette que l'on colle sur un dossier que l'on range sur une étagère. Cela ne s'achète pas non plus à l'extérieur pour être porté comme un badge. Cela se construit chaque jour, à tous les niveaux des intervenants du nucléaire.

La sûreté nucléaire passe par l'amélioration du cadre juridique, qui définit le rôle et les compétences des différents intervenants et les principes qui régissent leurs rapports ; par la création ou le renforcement de véritables autorités de sûreté, qui doivent voir leur indépendance et leur pouvoir reconnus et garantis par le pouvoir politique. Les intérêts des exploitants et les nécessités de la sûreté peuvent être en opposition. Il faut donner les moyens aux autorités de sûreté de faire prévaloir en toutes circonstances les impératifs de la sûreté par l'instauration d'une véritable culture de sûreté. La culture de sûreté, c'est cet état d'esprit qui anime chaque jour tout travailleur du nucléaire - de l'ouvrier au directeur - et qui lui fait se demander : " Que puis-je faire, à mon poste, pour améliorer la sûreté ? ". C'est porter au plus haut point la conscience de son rôle quotidien au service de la sûreté.

Des jumelages entre centrales de l'Est et de l'Ouest ont permis des échanges de travailleurs qui ont pu ainsi voir et mesurer comment se vivait la culture de sûreté. Ces types de jumelages doivent être encouragés car c'est par la pratique que l'esprit de sûreté progressera. Il faut dire, pour la bonne information de l'Assemblée, que dans les régimes communistes, seule comptait la production et que toute manoeuvre qui arrêtait la production était sanctionnée.

Je reconnais que ce message de la sûreté n'est pas toujours facile à faire passer et que les discours tenus par les occidentaux gagneraient à être clarifiés. Il leur faut aussi éviter l'attitude " impérialiste " : il y a des compétences dans les pays d'Europe centrale et orientale, mais elles étaient mal utilisées dans le système communiste. Nos procédures sont encore souvent trop compliquées, trop longues. J'ai toujours pensé qu'il y avait beaucoup plus à se partager le fardeau de l'amélioration de la sûreté de l'Etat, qu'à faire des bénéfices pour les entreprises. On a souvent parlé de Plan Marshall pour la sûreté nucléaire. On devrait se souvenir des modalités de son application qui ont fait son succès et son efficacité.

Enfin, dans des pays en transition, où les problèmes économiques et sociaux sont aigus, il faut une très grande volonté politique et une stratégie bien affinée pour réorienter la politique énergétique ou décider de la fermeture d'une centrale.

Néanmoins, depuis quatre ans, date de l'adoption de notre recommandation, les choses ont évolué. La prise de conscience semble s'être étendue, le Sommet de Moscou tend à le prouver. Vous me trouverez prudent. En effet, car j'ai toujours en mémoire la réponse que me faisait le Président ukrainien ici-même, à propos d'incidents demeurés cachés plusieurs mois : " Tout est très clair chez nous et si nos procédures d'information ne vous plaisent pas, nous allons réfléchir pour les changer ".

Ce n'est pas parce que les choses changent dans le bon sens que la partie est définitivement gagnée. Nous ne devons pas tomber en léthargie et nous laisser gagner par l'habitude, l'accoutumance. Ce n'est pas fini. Il reste beaucoup à faire et beaucoup plus qu'il n'a été fait. Notre Assemblée ne doit pas se lasser de le répéter. L'instauration d'une véritable culture de sûreté dans les pays d'Europe centrale et orientale dans toutes ses dimensions est aussi une mesure des progrès de la démocratie dans ces pays.

La démocratie est inséparable de la transparence sans laquelle la sûreté ne peut progresser. La démocratie suppose la prédominance de l'homme sur le système. Faire que la sûreté prime sur la production, c'est inverser l'échelle des valeurs par rapport aux régimes communistes ; c'est replacer l'homme au coeur de la démocratie et nos efforts doivent tendre à ce qu'à travers la sûreté nucléaire, ce soit aussi la démocratie qui progresse.

J'en aurai terminé, Monsieur le Président, en remerciant le Secrétariat pour son aide et l'Agence pour l'énergie nucléaire de l'OCDE, pour les informations qu'elle nous a données lors d'une très intéressante audition. "

Au terme d'un long débat, le rapporteur de la commission de la Science et de la Technologie, M. Claude BIRRAUX, député (UDF), répond aux orateurs :

" Monsieur le Président, je remercie, d'abord, les orateurs qui ont apporté leur contribution à ce débat. Leur nombre même montre tout l'intérêt porté à ce rapport et je les remercie pour les félicitations qu'ils m'ont adressé.

Je souhaite apporter quelques précisions supplémentaires.

Premièrement, je répète ce que j'ai déjà dit au sujet du titre du rapport qui traitera donc de " la sûreté des installations nucléaires ".

Deuxièmement, je confirme à MM. Staes et Ruffy que je proposerai, dans le cadre de notre sous-commission de la politique technologique et de l'énergie, d'initier un rapport relatif non seulement à la gestion des déchets et aux réacteurs de recherche, mais également aux autres types de déchets nucléaires et de réacteurs qui plus ou moins se promènent de par le monde. Il y aura un rapport spécifique devant cette Assemblée.

Nos amis ukrainiens nous disent que l'Est doit tenir ses engagements et apporter des financements. J'ai envie de leur répondre que certaines choses sont à leur portée et qu'elles ne coûtent rien ! Cela relève de leur responsabilité politique. D'abord, les économies d'énergie et l'utilisation rationnelle de l'énergie. Lorsqu'il fait trop chaud dans une pièce, on peut poser une vanne thermostatique réglant la température du radiateur au lieu d'ouvrir la fenêtre. Cela, qui ne coûte rien, peut rapporter beaucoup en termes d'énergie.

La transparence, indissociable de la culture de sûreté, ne coûte rien non plus. J'ai en mémoire, comme si c'était hier l'audition de M. Koutchma, au mois d'avril 1995. Ses réponses sur les procédures d'information ne nous satisfont pas. La transparence, c'est tout de suite. La transparence ne se discute pas. C'est le seul moyen de faire progresser la sûreté. La culture de sûreté est dans la transparence.

Dans le système qui était le vôtre sous le régime soviétique, l'important c'était de produire, de produire encore pour remplir les obligations du Plan. Et plus on produisait, plus on était fort, plus on était reconnu, plus on était puissant. Au mépris de la sûreté ! Aujourd'hui, si vous signez la Convention sur la sûreté nucléaire, qui garantit la primauté de la sûreté sur toute autre considération, vous aurez fait un progrès considérable sur la voie de la sûreté et le monde entier vous en sera reconnaissant.

J'apporterai encore une précision technique, sans toutefois entrer dans les questions liées aux frontières entre la Turquie, l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Les réacteurs fonctionnent à l'uranium enrichi. Il s'agit d'uranium à 3 %, 3,5 %, voire 5 % d'uranium enrichi. Nous sommes loin de la qualité militaire. Il y a au moins un facteur vingt, si ce n'est trente pour atteindre la qualité militaire. Dans l'intérêt même de votre démonstration, si vous voulez être crédibles, n'exagérez pas. Si les VVER présentent des défauts, ils ont aussi des qualités ! J'ajoute que la sûreté ne se mesure pas au rendement.

Dernier point : ce ne doit pas être un enjeu de pouvoir. Chez vous, des véhicules circulent, et ils obéissent au code de la route. Qui oserait imaginer, lorsque le gouvernement est tenu par des progressistes, des conservateurs ou des libéraux, que le code de la route s'en trouve bouleversé ? Il en va de même pour la sûreté nucléaire : ce ne doit pas être un enjeu de pouvoir, mais la préoccupation constante et permanente de tous les gouvernements quelle que soit leur couleur politique.

A M. Jirinovski, je dirai que la démocratie est inséparable de la transparence. Il vient de nous apporter une preuve supplémentaire qu'il n'avait rencontré ni l'un ni l'autre ! "

La recommandation 1311 contenue dans le rapport 7714, amendée notamment sur le problème du suivi médical et de la protection radiologique des travailleurs avec l'accord de M. Claude BIRRAUX est adoptée.

8. Situation à Chypre - Intervention de M. Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI) (Mercredi 29 janvier)

Le rapport 7717 constate que les négociations en vue d'un règlement pacifique et global de la situation à Chypre se trouvent actuellement dans l'impasse. Il rappelle que cette absence de progrès, dont les dirigeants politiques des deux communautés portent la responsabilité, a créé le climat politique qui a abouti à l'assassinat de quatre Chypriotes grecs et d'un Chypriote turc au cours du deuxième semestre 1996.

La perspective des négociations pour l'adhésion à l'Union européenne semble pourtant être un moment propice pour de nouvelles propositions, selon le rapporteur.

Se fondant sur les deux exemples existants de coopération entre les deux communautés à Nicosie, il demande l'extension de telles pratiques, notamment aux télécommunications et aux services postaux. Rappelant que le traitement des Chypriotes grecs et des Maronites vivant dans la zone de Karpass suscite de vives inquiétudes, il demande à l'administration chypriote turque de rendre effectives les améliorations annoncées.

Le rapport fait également des propositions pour améliorer le dialogue de l'Assemblée avec les deux Communautés. Il invite les représentants élus des deux communautés à entamer des négociations sur la possibilité d'assurer une vraie représentation de tout le peuple de Chypre à l'Assemblée.

M. Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI), est intervenu dans le débat en ces termes :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, je remercie les rapporteurs pour la qualité de leur travail, et je tiens à rendre hommage en particulier à notre collègue disparu, Lord Finsberg.

La situation qui prévaut actuellement à Chypre relève du non-sens historique eu égard à la nouvelle donne en Europe et en Méditerranée orientale. Comment peut-on encore justifier la ligne de démarcation qui scinde en deux parties la capitale Nicosie ? Ce " Mur de la Honte " rappelle étrangement le Mur de Berlin.

Pourtant, à Chypre il n'y a pas de ligne de fracture idéologique : Grecs et Turcs sont membres de l'OTAN et du Conseil de l'Europe. Il s'agit plutôt du résultat de surenchères de nationalisme d'un autre temps, utilisées par Athènes et Ankara pour flatter un certain électorat et justifier auprès de celui-ci l'augmentation des dépenses militaires. Tout cela se fait au détriment de la sécurité régionale et du bien-être de la population chypriote.

Suivant l'exemple des Français et des Allemands après 1945, celui des Polonais et des Allemands en 1989 et plus récemment des Palestiniens et des Israéliens, Turcs et Grecs doivent emprunter le chemin de la réconciliation, se tourner vers le XXIe siècle en cessant de se référer aux antagonismes historiques qui font le jeu des extrémismes.

La Grèce doit se montrer digne de son appartenance à l'Union européenne et cesser de bloquer le dossier chypriote sinon l'île n'adhérera pas à l'Union européenne. La Turquie de son côté est assurée par l'OTAN et l'UEO d'une sécurité maximale. Elle a donc tout à gagner dans l'intégration de l'île à l'Union européenne.

Je demande donc aux parlementaires grecs et turcs, ici présents, de faire pression sur leurs gouvernements respectifs pour qu'ils engagent dès à présent des négociations, sous l'égide de l'ONU et de l'Union européenne afin d'aboutir d'ici à l'an prochain à une fédération bizonale et bicommunautaire mais aussi à la démilitarisation, conditions sine qua non de son adhésion à l'Union européenne. Evidemment, l'objectif de démilitarisation doit être atteint - il ne pourra l'être que si les producteurs d'armes adoptent une attitude responsable, ce qui n'a pas été le cas de la part de la Russie dans ce dossier chypriote - et là je m'adresse à nos collègues russes afin qu'ils fassent annuler la livraison des missiles sol-air. Voilà une décision de bon sens de nature à restaurer la confiance.

Je sais que, pour les Chypriotes, seule une initiative américaine serait susceptible de faire progresser le règlement du conflit. Avons-nous déjà oublié les accords de Zurich et de Londres imposés par les Américains ? Avons-nous oublié que ces accords ont mécontenté les deux parties ? Avons-nous oublié le rôle joué partout par les Américains ou pour le moins leurs encouragements qui devaient faciliter les événements de 1974 et aboutir à la situation actuelle ?

Nous sommes, nous Européens, à nouveau devant un défi important, nous qui souhaitons vivre ensemble dans le respect les uns des autres, avons-nous la capacité de régler nos différents ou sommes-nous condamnés à nous déchirer ?

En ce début d'année, je forme le voeu d'un règlement rapide et global de la question de Chypre. "

Au terme du débat, la résolution 1113 contenue dans le rapport 7717, amendée, est adoptée, alors que la proposition de directive figurant dans le rapport 7743 est rejetée.

9. Situation en République fédérale de Yougoslavie - Intervention de Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc) (Mercredi 29 janvier)

M. Peter BLOETZER, co-rapporteur sur le rapport 7744, considère que ce débat d'urgence, suivi d'une discussion et, espère-t-il, de l'adoption d'un projet de résolution, permettra à l'Assemblée de jouer son rôle de garante des droits de l'homme et de la liberté, mais aussi d'assumer la responsabilité qui est la sienne dans l'application des Accords de Dayton. La République fédérale de Yougoslavie connaît actuellement une crise dont l'issue est incertaine, mais qui peut représenter la chance d'un tournant décisif au bénéfice de la démocratie et de l'Etat de droit.

L'Assemblée doit condamner sans ambiguïté l'annulation du résultat des élections locales de cet automne et exprimer sa solidarité avec une population qui manifeste de façon déterminée et pacifique en faveur de l'Etat de droit. Cependant, il ne lui appartient pas de porter un jugement politique : il ne s'agit que d'encourager le processus démocratique et de défendre les valeurs du Conseil.

L'Assemblée ne saurait non plus accorder trop d'attention à la bonne application des Accords de Dayton, dont le Conseil est co-responsable. Tous les experts s'accordent à penser que la situation ne pourra être stabilisée en Bosnie-Herzégovine sans démocratisation des Etats limitrophes. La communauté internationale se doit donc de tendre la main à la République fédérale de Yougoslavie pour lui ouvrir des perspectives européennes, en souhaitant que cette aide soit acceptée. C'est pourquoi le rapporteur demande à ses collègues d'adopter le projet de résolution.

Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc), prend alors la parole en ces termes :

" A ce stade de notre débat, on peut se permettre de poser un certain nombre de questions de façon brutale. Ma première sera la suivante : M. Milosevic peut-il provoquer de nouveau une guerre dans les Balkans ? Ce pouvoir n'a peut-être pas dit son dernier mot après soixante-dix jours de crise ! Mes collègues ayant bien résumé la situation ; je serai très brève.

M. Milosevic, il est vrai, a perdu une grande partie de sa popularité ; les Etats-Unis semblent ne plus le protéger et le rapport de Felipe Gonzales, présenté à l'OSCE, paraît le désavouer. Cependant, il contrôle encore les médias et il est soutenu par le milieu des affaires. Il bénéficie donc du soutien de l'argent et de la JUL, le parti fondé par sa femme. Il a donc des possibilités de reprendre la situation en main.

En effet, il peut durcir son attitude face à l'opposition, décréter l'état d'urgence et reprendre la politique " panserbe " d'avant 1993 - le slogan passe et passera toujours auprès des nationalistes nombreux dans ce pays - ainsi que faire monter la tension au Kosovo ou provoquer un conflit avec les Albanais. Une nouvelle guerre froidement provoquée pourrait aboutir à la reconstitution d'une cohésion nationale autour de lui.

Par ailleurs, la transition politique peut-elle s'effectuer sans heurts ? Avec ce régime autoritaire et les intérêts en jeu, cela paraît peu probable. Les dernières élections fédérales ou municipales ont montré qu'il y avait eu une très forte abstention. M. Milosevic a obtenu près des deux tiers des sièges serbes au parlement.

Il est évident qu'une bonne partie des manifestants ne sont pas favorables à l'opposition et ne soutiennent pas tous l'opposition " Ensemble ". Les personnes qui protestent aujourd'hui manifestent aussi contre les rigueurs de l'existence et le coût de la vie, si bien que, pour réussir une politique de transition dans ce pays, il ne suffira pas de dire que l'on est contre Milosevic.

La question essentielle est la suivante : l'opposition " Ensemble " a-t-elle la capacité de rassembler tous les opposants ?

Tout d'abord, il convient de noter que les nationalistes sont nombreux dans ses rangs. Il y a également des nationalistes ou d'anciens nationalistes parmi ses leaders. Je cite Draskovic qui a longtemps prôné le nationalisme serbe, mais il s'est maintenant converti au pacifisme et je le crois sincère. Ensuite, les Albanais représentent 20 % de l'électorat et ils ne se rallieront pas facilement aux nationalistes. Enfin, l'autre leader d'" Ensemble ", Zoran Djindjic a été, un temps, proche des Serbes de Pale.

Nous relevons donc beaucoup de points négatifs. Ce qui manque aujourd'hui à cette opposition, c'est un vrai programme, c'est-à-dire une réelle proposition d'alternative qui pousserait Milosevic dehors. Il lui manque également une certaine clarté pour affirmer effectivement sa volonté démocratique, sa volonté de respecter les droits de l'homme et de mettre en oeuvre les Accords de Dayton. Par conséquent, on attend de voir plus clairement affichées les nouvelles convictions de l'opposition.

Je souhaite donc entendre le Conseil de l'Europe affirmer et réaffirmer ses principes fondamentaux qui ne doivent être affaiblis par aucune appréciation politique : le respect des hommes dans leur différence et leur pluralisme, le respect de leurs droits et le respect de la démocratie et de ses institutions.

Le Conseil de l'Europe doit condamner sans hésitation, chaque fois que nécessaire, toutes les formes de violence, xénophobes ou autres, et toutes les méthodes qui arrêtent un processus démocratique en empêchant une élection, que ce soit à Belgrade, à Zagreb, en Albanie ou en Arménie.

Nous devrions dénoncer, de façon plus systématique, les hommes qui procèdent à de tels agissements ; il n'y a pas que Milosevic. Je rappelle que le tribunal international a prononcé soixante-quatorze condamnations, mais qu'il n'a été procédé qu'à huit arrestations.

Fuite ou renoncement : au-delà de notre crédibilité, c'est le devenir de l'Europe et de la paix qui est en jeu. "

La résolution 1110 contenue dans le rapport 7744 est adoptée, amendée.

10. Respect des engagements souscrits par la Russie et par l'Ukraine lors de leur adhésion au Conseil de l'Europe de mettre en place un moratoire sur les exécutions capitales - Intervention de M. Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI) (Mercredi 29 janvier)

Réunis ici aujourd'hui, selon le rapporteur Mme Renate WOHLWEND, ce n'est pas pour débattre une fois de plus la question de la peine de mort, mais pour lancer un appel à ceux d'entre nos pays membres qui semblent n'être pas encore disposés à se conformer aux principes et aux normes du Conseil de l'Europe, qui ne semble pas encore disposés à respecter leurs engagements de mettre en place un moratoire immédiat sur les exécutions capitales. Et cet appel, nous le lançons tant à la Russie qu'à l'Ukraine. Toutefois, notre commission a décidé d'établir deux rapports distincts, estimant que deux pays souverains, dont les efforts et les progrès en matière de démocratisation diffèrent sur bien des points, ne sauraient faire l'objet d'un rapport commun.

Selon l'enquête effectuée par M. Bindig, en Russie la dernière exécution capitale a eu lieu le 1 er août 1996. Le rapport reprend une triste statistique relative au nombre d'exécutions intervenues ces dernières années.

Le deuxième rapport concerne l'Ukraine. Là encore, les chiffres, tels qu'ils apparaissent dans les statistiques, sont alarmants.

La Russie et l'Ukraine doivent enfin honorer leurs promesses et respecter leur engagement d'introduire un moratoire sur les exécutions capitales.

Puisse l'Assemblée voter massivement en faveur du rapport !

M. Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI), intervient dans le débat en ces termes :

" Monsieur le Président, la dernière fois que nous avons eu l'occasion de débattre de ce sujet, j'avais déjà fait un rappel au Règlement pour remarquer qu'il était dommage que tous les orateurs prévus ne puissent s'exprimer et donc aborder tous les problèmes soulevés par la peine de mort, en particulier s'agissant de la position des Etats-Unis.

Il m'avait été répondu par Mme la Présidente que nous verrions cela une autre fois. Nous y voici, et je m'aperçois qu'aujourd'hui, à nouveau il n'est pas possible de nous exprimer. Pendant que nous adressons des reproches à un certain nombre de pays de l'Est on oublie que le pays qui sert de modèle à la démocratie - particulièrement aux pays de l'Est - est celui dans lequel on tue le plus et où la peine de mort est le plus souvent mise en oeuvre : quarante-cinq personnes ont été exécutées aux Etats-Unis l'an dernier et une centaine le seront l'année prochaine.

La question est de savoir si nous pouvons tolérer le fait qu'un pays observateur se permette de maintenir chez lui la peine de mort, alors qu'il sert d'exemple à la démocratie ? Si le rapporteur n'est pas favorable à la suspension du statut d'observateur des Etats-Unis, nous ne pourrons pas approuver les rapports proposés. "

Interrompu, M. Nicolas ABOUT reprend la parole :

" Monsieur le Président, chers collègues, tout en reconnaissant le bien-fondé de la demande du Conseil de l'Europe relative à l'exécution des peines capitales, il me semble nécessaire de prendre en considération la situation générale de la Russie et de l'Ukraine pour nuancer nos propos. Comme chacun le sait, à l'ordre ancien, synonyme d'aliénation des droits de l'individu, a succédé un désordre dans lequel se sont engouffrés les réseaux criminels et mafieux.

Quant à la situation pénale et carcérale en Russie, permettez-moi de la comparer à celle des Etats-Unis, pays parfois présenté comme la meilleure des démocraties : 1996 aura vu l'exécution de quarante-cinq personnes de l'autre côté de l'Atlantique, et l'année 1997 s'annonce des plus morbides puisque ce sont 3 200 personnes - dont quarante-neuf femmes et quarante-sept mineurs - qui attendent dans les couloirs de la mort et une centaine d'exécutions prévues, soit plus que la Russie en 1995.

La peine capitale est désormais appliquée dans trente-huit Etats. Un renforcement de la législation qui correspond à l'accroissement de la criminalité et à l'engorgement des prisons. L'Amérique qui fait rêver l'Europe de l'Est, c'est aussi cela, on a tendance à l'oublier. Inutile donc d'incriminer des pays comme l'Ukraine et la Russie qui, sortant de soixante-dix ans de communisme, n'ont rien à envier à l'Amérique dans le domaine criminel.

Le Conseil de l'Europe doit aider ces pays à retrouver le chemin de l'Etat de droit en soutenant leurs demandes d'aide économique. Ces pays se sortiront de l'engrenage de la violence par le biais de l'expansion économique, source de stabilité et de prospérité. N'oublions jamais que la liberté des individus ne vaut rien sans la sécurité et la dignité de ces derniers. Les Etats-Unis devenus observateurs au Conseil de l'Europe doivent accepter un dialogue avec notre Assemblée sur ce sujet car l'Amérique doit montrer l'exemple et offrir un autre visage que celui de ces vieillards de plus de 80 ans ou de ces gamins de 17 ans que l'on exécute sur la chaise électrique. Si un tel dialogue ne peut être établi, je ne vois pas l'intérêt d'une telle présence même comme observateur au sein de notre Assemblée, censée défendre la dignité humaine.

Je termine mon propos sur une question au rapporteur : " Etes-vous pour la suspension du statut d'observateur accordé aux Etats-Unis ? "

Si la réponse est oui, nous serons cohérents. Dans le cas contraire, comment peut-on faire la morale aux autres ? "

Le rapporteur, Mme Renate WOHLWEND répond alors en ces termes :

" Monsieur le Président, j'aimerais, pour commencer, revenir sur l'argument avancé par M. About. Lors de notre session de juin, c'est son collègue qui s'était chargé de soulever ce point. Je crois qu'il est malvenu ici d'ouvrir le débat sur la question de la peine de mort aux Etats-Unis. Certes, nous connaissons tous la situation qui règne dans le pays et nous la déplorons. Certes, il convient d'agir. Cependant, notre débat d'aujourd'hui ne porte pas sur la peine de mort, il porte sur le respect des engagements relatifs à la mise en place immédiate d'un moratoire sur les exécutions en Russie et en Ukraine. "

Au terme de ce débat, la résolution 1111 contenue dans le rapport 7746, amendée, est adoptée, ainsi que la résolution 1112 contenue dans le rapport 7745, également amendée.

11.  Respect des obligations et engagements contractés par l'Albanie - Intervention de M. Jean-Claude MIGNON, député (RPR) (Mercredi 29 janvier)

Devenu membre il y a un an et demi, l'Albanie a notamment ratifié la Convention européenne des Droits de l'Homme, plusieurs de ses Protocoles ainsi que la Convention pour la prévention de la torture. Elle a instauré, sans l'avoir officiellement déclaré, un moratoire sur les exécutions des peines de mort.

Des progrès énormes, certes, estime le rapporteur qui regrette cependant que l'Albanie ait limité le droit à des élections libres. Selon une réserve formulée, pour une durée de 5 ans, au Protocole n° 1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, les élections sont soumises à des lois albanaises qui privent une catégorie de personnes de toute participation au niveau national et local. Ces lois, incompatibles avec les principes d'un Etat de droit doivent, selon le rapporteur, être abrogées ou modifiées substantiellement dans un proche avenir.

En ce qui concerne la police, le rapport stipule que des actions illégales commises par des policiers doivent être sanctionnées sans délai. Une coopération renforcée avec le Conseil de l'Europe en matière de réforme de l'Académie de police lui paraît également nécessaire.

Des progrès ont été enregistrés, notamment en matière d'indépendance du pouvoir judiciaire et de réforme du Parquet. Des réformes concernant la nomination, la révocation et l'immunité des juges et procureurs devraient cependant être poursuivies.

Le rapporteur souligne la nécessité d'un régime fiscal équitable pour la presse et souhaite une amélioration de l'accès des médias aux informations officielles, ainsi que des reportages politiques impartiaux à la télévision.

Pour permettre à l'Albanie de poursuivre ses réformes, le rapporteur demande un renforcement de l'assistance financière et d'experts du Conseil de l'Europe.

M. Jean-Claude MIGNON, député (RPR), s'est exprimé dans les termes suivants :

" Monsieur le Président, chers collègues, nous sommes réunis aujourd'hui pour faire le point sur le respect des obligations et des engagements contractés par l'Albanie. Je tiens avant tout à témoigner, de par mon expérience et mes discussions avec des Albanais, qu'ils soient dirigeants ou simples citoyens, de leur formidable volonté de s'inscrire dans la lignée des pays respectant leurs engagements. Je tiens vraiment à saluer cette volonté qui ne se traduit pas seulement par la signature d'accords, mais qui se manifeste aussi de façon concrète à travers le vaste plan de réformes engagé.

Il y va désormais de notre devoir d'aider ce pays à franchir les obstacles sur la voie qu'il a choisie et qui le mène vers la démocratie. Je ne voudrais pas seulement limiter notre rôle à celui d'observateurs qui se contentent de faire le bilan sur ce qui a été fait et sur ce qui reste à faire en Albanie. Bien évidemment, cette étape est nécessaire et s'inscrit dans un processus plus large de partenariat. La fin de la division de l'Europe nous a offert une chance historique, celle de parvenir à un continent où " démocratie pluraliste et parlementaire, universalité des droits de l'homme et prééminence du droit " seront les mots clés.

L'Albanie a choisi la démocratie et tout ce que cette notion suppose réellement : le respect des droits et des libertés de chacun. Depuis que l'Albanie est devenue Etat membre du Conseil de l'Europe, cette république a fait d'énormes progrès dans le respect des obligations et des engagements qu'elle avait alors contractés. Je ne souhaite pas faire aujourd'hui point par point l'inventaire de ces progrès ou des manques à combler. Je me contenterai de souligner les avancées qui, à mes yeux, m'apparaissent significatives et les efforts que l'on pourrait attendre de l'Albanie, pays démocratique.

Sur le plan de la situation extérieure, on ne peut qu'encourager la République d'Albanie à poursuivre dans la voie de la tolérance et du dialogue. Comme le soulignait un de mes collègues de la Commission des affaires étrangères à l'Assemblée nationale française, auteur d'un rapport au nom de cette commission sur l'Albanie : " La politique extérieure de l'Albanie est sage en dépit d'une situation des nationalités dans les Balkans qui l'intéresse directement ".

En effet, la situation de l'Albanie est unique en Europe centrale et orientale : sa diaspora est estimée à 2,5 millions de personnes alors que sa population est de 3,4 millions. La population issue de cette diaspora s'est installée sur les territoires jouxtant l'Albanie. La tentation de reconstituer une grande Albanie était forte, mais ce pays a su y résister. Même sur la question du Kosovo, province rattachée à la République de Yougoslavie et peuplée à 90 % d'Albanais, l'Albanie se borne à demander l'autonomie. Par ailleurs, depuis la signature d'un traité d'amitié avec la Grèce en mars 1996 sur l'ouverture d'écoles grecques pour la minorité grecque, les relations entre ces deux pays sont devenues plus sereines.

Sur le plan de la politique intérieure, l'Albanie a fait preuve, dans des délais relativement courts, de beaucoup de volonté et de pragmatisme pour parvenir au respect des engagements qu'elles avaient pris lors de son adhésion au Conseil de l'Europe. Il convient, entre autre, de noter les progrès effectués dans le sens de l'indépendance du pouvoir judiciaire, la ratification récente de la Convention européenne des Droits de l'Homme et de la Convention pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, la signature de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, l'adoption et la mise en vigueur de lois de décommunisation.

D'énormes progrès ont déjà été réalisés dans le sens d'une plus grande démocratie mais d'autres doivent l'être. Les élections de mai 1996 qui ont conduit le Parti démocratique albanais du Président Berisha à la majorité absolue ont été contestées par l'opposition et par le bureau des élections locales d'octobre 1996. L'Albanie a refusé les services de l'OSCE préférant que ce soit notre Conseil de l'Europe qui observe le scrutin. La délégation du Conseil de l'Europe s'est déclarée " satisfaite du déroulement des élections tout en regrettant quelques cas d'irrégularités ".

Je ne prétendrai pas que cette situation est normale, ni que la liberté d'expression des médias, la liberté de réunion, l'indépendance du pouvoir judiciaire soient entièrement assurés. Je pense cependant qu'il faut en chercher les raisons dans les circonstances qui ont présidé à la libération de l'ancien régime communiste. N'oublions pas d'où revient l'Albanie et le chemin qu'elle a déjà parcouru ! Et est-il vraiment nécessaire, comme les Etats-Unis le réclament, de demander l'adoption d'une nouvelle Constitution et des élections anticipées ? Je ne crois guère au bien-fondé de ce type d'action. Il faut être plus modéré dans ses propos et ne pas sous-estimer les efforts déjà entrepris par l'Albanie.

Je souhaiterais que par un dialogue ferme mais ouvert, tous ensemble, dans un processus consensuel et en douceur, nous parvenions à retrouver une vie institutionnelle normale en République d'Albanie.

Enfin, en tant que parlementaire français, je me réjouis du traité d'entente, d'amitié et de coopération qui a récemment été conclu entre la République d'Albanie et la République française. Aidons l'Albanie à devenir comme elle le souhaite, une vraie démocratie. Le Président Berisha affirme ses priorités, à savoir le rapprochement avec l'Union européenne pour ce qui concerne l'économie et avec les Etats-Unis pour les questions de sécurité. Dans cette perspective, il serait peut-être souhaitable de soutenir, comme la France le fait déjà, le principe de la conclusion d'un accord d'association entre l'Albanie et l'Union européenne. "

A l'issue du débat, la résolution 1114, amendée, contenue dans le rapport 7716 a été adoptée à l'unanimité, ainsi que la recommandation 1312, amendée, contenue dans le rapport 7716.

12. Création d'une commission de l'Assemblée pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe (Mercredi 29 janvier)

Actuellement, le suivi des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe au niveau de l'Assemblée parlementaire, est régi par la Directive 508 (1995). Deux Commissions sont chargées de veiller de près au respect par tous les Etats membres des obligations et engagements contractés au moment de leur adhésion : la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme, pour rapport, et la Commission des questions politiques, pour avis. La Commission des relations avec les pays non membres est également saisie pour les Etats ayant bénéficié du statut d'invité spécial.

Or, l'importance et la nature durable de la fonction de suivi augmentent considérablement la charge de travail de ces commissions.

Pour remédier à ce problème, et éviter d'éventuels conflits de compétences entre les commissions concernées, l'Assemblée propose la création d'une nouvelle commission à cet effet.

Le projet de Résolution indique que cette Commission de suivi devrait être composée de 40 membres et des présidents des trois commissions compétentes jusqu'ici. Elle devra tenir compte d'un certain équilibre régional. Deux membres de la délégation parlementaire de l'Etat pour lequel une procédure de suivi est ouverte pourront y participer, sans droit de vote.

L'Assemblée pourra sanctionner les ruptures persistantes des obligations par un Etat et le manque de coopération dans le processus de suivi, en refusant de ratifier les pouvoirs de sa délégation parlementaire. Elle pourra également demander au Comité des Ministres d'engager une action contre cet Etat pour sa suspension du Conseil de l'Europe (articles 8 et 9 du Statut).

Le projet de Résolution proposé au vote de l'Assemblée prévoit que dès la réunion constitutive de la Commission de suivi, aucune nouvelle procédure de suivi ne pourra être engagée sur la base de la Directive 508 et que toutes les procédures de suivi en cours seront transmises à la Commission de suivi pour les mener à terme.

La procédure actuelle, comme celle que propose le rapporteur, comporte toujours un débat public à l'Assemblée en séance plénière.

L'Assemblée organise, au cours de cette session, les premiers débats publics sur la situation en Albanie et en Estonie. Le débat d'urgence sur la situation en Russie et en Ukraine au regard de la peine de mort fait d'ailleurs partie de la procédure de suivi des engagements de ces Etats.

Des procédures sont également en cours pour la Bulgarie, la République tchèque, la Lituanie, l'" ex-République yougoslave de Macédoine ", la Moldova, la Roumanie, la Slovaquie et la Turquie.

A l'issue du débat qui s'est instauré, la résolution 1115 contenue dans le document 7722, amendée, est adoptée.

13. Mise en oeuvre de l'Accord de Dayton pour la paix en Bosnie-Herzégovine - Intervention de Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc) (Jeudi 30 janvier)

Les rapporteurs, qui se sont rendus à Belgrade et à Sarajevo les 16 et 17 décembre dernier afin de faire le point des progrès de la mise en oeuvre des Accords de Dayton, soulignent l'importance des élections municipales qui se dérouleront en Bosnie-Herzégovine au cours du premier semestre de 1997.

Ces scrutins seront influencés par la manière dont les résultats des élections organisées dans les Etats voisins, à savoir la Croatie et la Serbie, seront respectés. Les rapporteurs mettent en garde contre toute politique, action ou omission imputables aux Gouvernements de ces Etats et qui seraient de nature à compromettre la restauration de la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat démocratique souverain et indépendant.

Se référant aux événements de Belgrade, les rapporteurs rappellent leur solidarité avec les manifestants de la capitale serbe et déplorent que les journalistes aient été privés de rendre compte des événements du fait du contrôle exercé par l'Etat sur les médias, notamment sur radio B.92.

Les médias " joueront un rôle significatif dans les campagnes des partis politiques et exerceront une influence importante sur le climat général de sécurité pour les élections municipales de 1997 " et " il est temps que les Gouvernements et les autorités de la radio et de la télévision à Belgrade et à Zagreb définissent et annoncent des politiques et des directives claires en matière de couverture médiatique des événements et des problèmes en Bosnie-Herzégovine ", précise le rapport.

Constatant le manque de progrès en matière de libre circulation entre les entités, de respect des droits de l'homme, de volonté de traduire devant le Tribunal pour les crimes de guerre les personnes mises en accusation, de retour des réfugiés et des personnes déplacées, le rapport lance un appel pour que les obligations qui découlent des Accords de Dayton soient respectées.

Le rapport préconise par ailleurs que le mandat du Haut représentant soit renforcé et que les ressources mises à sa disposition soient augmentées. Il demande à la République fédérale de Yougoslavie d'accepter les conclusions de la récente mission de l'OSCE présidée par Felipe Gonzales et propose qu'une enquête soit mené sur les allégations des autorités de Sarajevo concernant les actions de la République croate dans la région de Mostar.

Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc) , a pris la parole en ces termes :

" 1995, Dayton, Paris, première année de la mise en oeuvre des accords, année lourde de conséquences. Faisons le point rapidement.

Les accords de Dayton, qui ne satisfaisaient personne, ont été acceptés par tout le monde. La paix est une réalité ; paix fragile, relative, mais réelle.

Les élections générales qui ont eu lieu en septembre 1996 ont été relativement maîtrisées, relativement calmes et, selon l'expression de Karl Bildt, " raisonnablement démocratiques ". Aucune surprise dans ce contexte : le HDZ croate de Tudjman a élu son candidat en Bosnie-Herzégovine, le SDS serbe de Karadjic le sien ; le SDA musulman a élu Izetbegovic à la Présidence bicéphale de l'Etat de Bosnie-Herzégovine.

Mais, et c'est important, en ce pays l'opposition démocratique et laïque existe : je l'ai rencontrée ! Je me suis rendue à deux reprises en Bosnie-Herzégovine en l'espace de six mois. A mon avis, cette opposition s'exprimera aux prochaines élections locales.

La paix est fragile. L'IFOR a rempli en partie sa mission - en partie seulement. Elle avait des objectifs, elle en a fixé strictement les limites, elle a interprété à sa façon les accords de Dayton. Mais sa présence a été réelle et son action souvent exceptionnelle. Voilà pour la première phase des accords.

Sommes-nous pleinement satisfaits ? Certainement pas. Il faut donc poursuivre. La paix n'est pas assurée, c'est évident. Il faut la bâtir. Elle était sous condition, sous condition elle reste. J'en vois quatre.

Première condition : maintien d'une force de stabilisation de l'OTAN. C'est fait, c'est accepté. Je le rappelle, car ce fut une erreur malgré l'avis du Conseil de l'Europe qui considérait que l'IFOR devait partir en 1996. La SFOR, qui remplace l'IFOR, a pris le relais le 20 décembre 1996. Elle compte 33 000 hommes : 121 000 Américains, 11 000 Français, 9 800 Britanniques, 3 000 Allemands. Trente pays sont représentés au sein de cette armée. Sa mission est de 18 mois. Elle doit contrôler avant le mois d'avril 1997 le stock de l'armement et le nombre des dépôts.

Deuxième condition : l'organisation d'élections locales. Elles n'ont pu avoir lieu en même temps que les élections générales. Des difficultés subsistent. La mission de l'OSCE se poursuivra. Les élections auront probablement lieu en juin et juillet 1997 même si les problèmes restent identiques : vote des réfugiés, vote des personnes déplacées. Tout retard supplémentaire serait préjudiciable. Si elles ont lieu, les élections locales seront un moment essentiel qui permettra de faire le point réel de la situation en Bosnie-Herzégovine.

Troisième condition : maintien de la pression internationale. C'est absolument nécessaire. Deux exemples.

La situation à Mostar est encore grave. La purification ethnique se poursuit. L'on assiste à des expulsions de musulmans sous la pression croate. En janvier 1997, les cas furent nombreux. Il faut le dire et le dénoncer ! Les militaires de la SFOR présents à Mostar, qu'ils soient français ou espagnols, estiment qu'ils ne sont pas chargés de faire la police. Quant aux policiers de l'ONU, ils déclarent ne pas être mandatés pour intervenir. Ce foyer de tensions est dangereux ; c'est une réalité.

Le TPI, le Tribunal international est lui aussi relativement impuissant. Il a inculpé 74 personnes pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité ou génocide. Soixante-six sont toujours en liberté et nous narguent en toute impunité.

Quatrième condition : la reconstruction. La mise en oeuvre de ce volet de l'accord est impératif. La paix est à cette condition. En 1996, près de 2 milliards de dollars avaient été potentiellement récoltés, c'est-à-dire consentis par divers pays et structures internationales. Moins de 1 milliard a été versé. Par conséquent, la reconstruction n'est réellement pas engagée.

Si j'avais à conclure sur le bilan, je dirais : 1995 est l'année de la guerre et de la paix ; 1996, l'année de la paix et de la mise en place des institutions politiques ; 1997 sera une année décisive avec la mise en oeuvre du volet civil des accords de Dayton.

La paix définitive est à ce prix et la fin de ce drame aussi ! "

A l'issue du débat, la résolution 1116 contenue dans le document 7733, amendée, est adoptée.

14. Exposé de M. Javier SOLANA, Secrétaire général de l'OTAN - Intervention de M. Jean VALLEIX, député (RPR) (jeudi 30 janvier)

Au secrétaire général de l'OTAN, M. Javier SOLANA, M. Jean VALLEIX, député (RPR), pose la question suivante :

" Le Conseil de l'Europe est l'un des acteurs de l'application du volet civil des accords de Dayton-Paris s'agissant des droits de l'homme et de la reconstruction de l'Etat de droit et de la démocratie.

Monsieur le Secrétaire général, quelle appréciation portez-vous sur le rôle que pourrait jouer à l'avenir le Conseil de l'Europe dans le cadre de missions civiles de consolidation de la paix, déployées avec le concours de l'OTAN ? "

M. Javier SOLANA répond alors en français :

" Je répondrai à M. Valleix que, si l'année qui vient de s'écouler a été celle des opérations militaires avec l'IFOR, le centre de gravité devrait se déplacer en 1977 vers le volet civil de l'application des accords de Dayton.

En 1996, le centre de gravité était l'IFOR. En 1997, le centre de gravité doit se déplacer vers le volet civil. Notre responsabilité est le maintien de la sécurité. A cet égard, les différents responsables du volet civil peuvent jouer un rôle important. La présence ici, aujourd'hui, de M. Frowick, chargé de veiller à la bonne organisation des élections municipales, montre clairement les relations qui existent entre vous et nous, entre la partie militaire de l'OTAN et sa partie civile, représentée par M. l'ambassadeur Frowick.

Le Conseil de l'Europe peut jouer un rôle important. J'espère qu'avec votre leadership, avec le leadership du Secrétaire Général et de la présidence, il continuera à jouer un rôle important, puisque c'est l'année du volet civil. 1996 était l'année de la séparation, cette année doit être celle de la reconstruction. A mes yeux, le plus important est la réconciliation, pour ce qui est des questions morales et aussi des questions de caractère politique. Le fait que les institutions politiques aient déjà été établies est un bon signe pour l'année en cours et pour les années à venir. "

15. Respect des obligations et engagements contractés par l'Estonie (Jeudi 30 janvier)

Le rapporteur constate les progrès considérables réalisés par l'Estonie pour remplir les engagements qu'elle a souscrits lors de son adhésion à l'Organisation en 1993. Il estime néanmoins que l'Etat balte devra faire des efforts supplémentaires en ce qui concerne l'abolition de la peine de mort, le traitement des réfugiés et des demandeurs d'asile, le traitement de la minorité russophone non historique (le rapporteur précise que cette expression désigne les personnes venues résider en Estonie après l'occupation soviétique de la deuxième guerre mondiale) et les conditions de garde à vue et de détention.

Le rapporteur souligne que l'Estonie a ratifié, en l'espace de quatre ans, la Convention européenne des Droits de l'Homme, la Convention contre la torture, ainsi que la Convention sur la protection des minorités, et a signé diverses conventions dans le domaine du droit pénal.

Confirmant que les autorités estoniennes avaient marqué leur intention de procéder à l'abolition de la peine de mort d'ici au 1er février 1998, le rapporteur précise que dans l'intervalle un moratoire sur les exécutions serait respecté.

Le texte de résolution demande aux autorités estoniennes de s'abstenir d'interner les réfugiés et les demandeurs d'asile et de respecter les normes internationalement reconnues, notamment la Convention des Nations unies sur la protection des réfugiés.

Elle recommande l'intégration de la minorité russophone, et préconise dans ce contexte l'amélioration de l'enseignement de l'estonien comme langue étrangère, grâce à des cours gratuits ou assortis de droits d'inscription réduits pour ceux qui demandent la nationalité estonienne.

Estimant que l'Estonie a respecté ses obligations les plus importantes, l'Assemblée propose de clore la procédure de suivi tout en se laissant la possibilité de la rouvrir dans la mesure où l'Estonie ne réglerait pas les points en suspens dans un délai d'une année.

L'Estonie est le premier pays -simultanément avec l'Albanie- à avoir fait l'objet d'un suivi sur le respect des engagements pris au moment de l'adhésion au Conseil de l'Europe. Cette procédure de contrôle parlementaire permet, conformément à la Directive n° 508 adoptée par l'Assemblée en 1995, de faire le point, pays par pays, de la situation en matière de respect de la prééminence du Droit, des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

A l'issue du débat qui s'est instauré, la résolution 1117 contenue dans le rapport 7715, amendée, est adoptée, ainsi que la recommandation 1313 contenue dans le rapport 7715.

16. Nouvelles technologies - Intervention de M. Claude BIRRAUX, député (UDF) (Jeudi 30 janvier)

Présentant ses observations, le rapporteur explique que les nouvelles technologies entraînent des transformations profondes dans la société, comme l'ont fait en leur temps la machine à vapeur, l'électricité et l'automobile, et leurs effets positifs ne se feront vraiment sentir que longtemps après les premiers bouleversements.

Les autoroutes de l'information défient le temps et l'espace, et rendent le savoir immédiatement accessible. Leurs conséquences sur l'emploi sont difficiles à prévoir, mais elles pourraient bien entraîner le développement d'un marché du travail très intéressant pour de nombreux Européens.

Il propose quelques mesures pour coordonner la mise en place des nouvelles technologies et garantir une transition en douceur vers la future société de l'information :

- renforcer les liens entre l'industrie, les universités et la recherche ;

- préparer les enfants à l'avenir qui les attend en accordant une plus grande place aux sciences et aux technologies dans les programmes scolaires ;

- prévoir les incidences sur la société par la mise en place d'un " observatoire sur les technologies " ;

- encourager les bonnes pratiques de gestion et optimiser les retombées bénéfiques du point de vue de la compétitivité et de la création d'emplois ;

- aider les petites et moyennes entreprises à accéder aux réseaux d'innovation internationaux ;

- utiliser ces technologies pour aider les villes à encourager les arrivées d'informations en provenance des pouvoirs locaux et régionaux.

M. Claude BIRRAUX, député (UDF), a pris la parole dans le débat en ces termes :

" Mes chers collègues, je voudrais d'abord remercier et féliciter notre collègue Beaufays pour la qualité remarquable de son rapport.

Je voudrais aussi signaler qu'avec ce rapport, la commission de la science et de la technologie et notre Assemblée continuent leur travail de réflexion sur les mutations technologiques et leurs conséquences, sur la vie et l'environnement, au sens large du terme, des citoyens, comme je le rappelais lundi dans le débat sur les structures de notre Assemblée.

Nous avions commencé à aborder le thème des nouvelles technologies avec l'excellent rapport de notre collègue Lentzer sur les technologies stratégiques.

Ces deux rapports se complètent et montrent à l'évidence que l'économie d'aujourd'hui, et encore plus celle de demain, sera dominée par le savoir. Quelles en seront les conséquences pour les citoyens ? Quels sont les enjeux pour la société ?

Lors du colloque organisé par notre commission à Lyon, M. Lasfargue distinguait huit types d'enjeux pour la société de l'information : techniques, industriels, économiques, sociaux, culturels, politiques et militaires, juridiques et moraux, écologiques et médicaux.

Ces enjeux ne sauraient être dissociés les uns des autres et, pris globalement, c'est à une véritable révolution de notre société qu'ils conduisent : révolution dans les actes de production, par les nouvelles technologies ; révolution dans les métiers : le temps où l'homme apprenait une fois pour toutes un métier qu'il exercerait toute sa vie est résolu.

Cela peut être une chance de promotion et de qualification, à condition de mettre en place un système régulateur qui donne à chacun une chance égale d'accéder à cette formation et à ce savoir. Cela suppose aussi que le système de formation soit suffisamment souple, ouvert et interactif pour s'adapter aux données nouvelles des besoins en formation. A n'en pas douter, il y a là un problème de démocratie réelle.

Autre problème lié à la démocratie : l'attention que la société portera aux exclus de la société de l'information.

Je suis frappé, dans mes rencontres de parlementaire, au temps de la " société de l'information ", où il semble que chacun dispose sur son écran de télévision ou d'ordinateur d'une abondance inégalée d'informations, du décalage flagrant entre cette abondance d'informations et l'ignorance des citoyens ou leur perception erronée.

Cette révolution dans les métiers et leur apprentissage conduira aussi à une forme d'exclusion : les exclus de l'abstraction.

Ces enjeux conduisent, enfin, à une révolution dans les rapports sociaux.

L'indicateur du temps de travail est la pierre angulaire des rapports sociaux, dans la société industrielle traditionnelle. Avec le développement de nouvelles formes d'activités à distance, avec la diversification des lieux de travail, le temps de liaison entre ces lieux, le temps passé à communiquer avec son bureau, comment mesurer réellement le temps de travail ?

Les rapports sociaux s'organisent aussi au sein de branches professionnelles, régies par des règles spécifiques et conventions collectives. Ces branches professionnelles, survivances des activités du XIXe siècle, sont remises en cause par la société de l'information. Elles étaient classées, soit par la notion de matière première - par exemple le bois ou la métallurgie -, soit par produits - comme le textile - , soit par technologie - telle que la chimie -.

Dans quelle catégorie ranger l'industrie de l'information, qui compte une seule matière première : l'information, et une seule famille de technologies : celle des outils de traitement de l'information ?

Pour réussir la société de l'information, il faudra établir de nouveaux rapports sociaux fondés sur de nouveaux critères, en évitant les exclusions dont je parlais à l'instant.

On peut se demander quel rôle les pouvoirs publics peuvent et doivent jouer. Bien sûr, il peut y avoir la tentation du laisser faire - le marché et lui seul - et de se retrouver à gérer les conséquences sociales.

Je crois que, dans la perspective qui est celle de notre Assemblée, les valeurs démocratiques, les pouvoirs publics doivent s'investir, car il y a aussi un enjeu démocratique : enjeu démocratique dans l'accès égal des citoyens à la formation à ces nouveaux métiers ; enjeu démocratique dans la solidarité de la société à l'égard des exclus de la société de l'information ; enjeu démocratique dans la correction des effets pervers de mécanismes de marché, lorsqu'ils produisent des effets indésirables ; enjeu démocratique dans l'accès aux connaissances, à leur diffusion ; enjeu démocratique dans l'emploi permettant aux PME aussi bien qu'aux grandes entreprises de développer leur potentiel d'innovation ; enjeu démocratique dans la création de mécanismes régulateurs, afin d'éviter les décalages entre évolution technologique en évolution sociale ; enjeu démocratique en renforçant l'enseignement des sciences et technologies à l'école, afin de mieux préparer les jeunes aux bouleversements futurs.

Enfin, les enjeux politiques et démocratiques se posent à tous les niveaux. National, avec les questions du rôle de l'Etat, du type de financement des investissements, des aides publiques ou non à la recherche. Européen : quel rôle pour la Communauté ? quel type de réglementation, modéré ou sans contrainte. Mondial : problème de la normalisation et, par conséquent, monopole et domination d'un pays ou bien coopération entre eux ?

La maîtrise de l'information - ou de la désinformation - est, à l'évidence, un enjeu politique ou militaire important. Quelle influence sur la vie démocratique ?

Par delà les bouleversements économiques, culturels et sociaux qu'apportent la société de l'information, par delà l'incidence sur l'emploi, c'est toute la hiérarchie des valeurs qui fondent notre société qui se trouve bouleversée. La valeur du travail, à la fois droit et devoir, conditionne dans toutes les catégories sociales nos modes de vie, nos jugements, nos rapports à la société. C'est du travail que nous vient une partie de notre morale.

Ce sont bien les valeurs fondatrices de notre société et de notre civilisation qui sont en jeu. Nous sommes au coeur même de notre engagement politique et de la raison d'être de notre Assemblée. Comment façonner cette société pour en préserver les valeurs qui en font l'essence et accompagner les mutations technologiques en gardant à l'esprit les repères qui font précisément notre raison d'être ? "

Le rapporteur M. Pierre BEAUFAYS a apporté à M. Claude BIRRAUX la réponse suivante :

" Je vous remercie d'avoir rappelé les enjeux et vous avez bien dit qu'ils doivent tous être pris globalement. Je vous remercie aussi pour votre participation personnelle au travail de la commission, notamment en ce qui concerne la réunion de Lyon fort importante. Vous avez terminé en parlant de l'enjeu démocratique, c'était véritablement opportun. "

Après un débat et l'adoption de plusieurs amendements, la recommandation 1314 figurant dans le rapport 7713, amendée, est adoptée.

17. Projet de convention européenne sur la nationalité (Vendredi 31 janvier)

Le rapporteur propose que l'Assemblée accueille favorablement et adopte dans les meilleurs délais le projet de convention soumis à son avis. Ce texte reflète le souci du Conseil de l'Europe de répondre aux situations d'urgence qui se posent actuellement en Europe : partition d'Etats, conflits ethniques, immigration, statut des réfugiés. Il prend également en compte la nouvelle donne démocratique dans les pays d'Europe centrale et orientale.

La future convention contribuera à prévenir l'apatride, en limitant notamment les possibilités de retrait de la nationalité. Elle vise à faciliter l'acquisition de la nationalité ainsi que la réintégration dans la nationalité d'origine, à limiter les possibilités de perte de la nationalité à des cas dûment justifiés, à garantir des procédures justes et équitables et à assurer aux personnes possédant plusieurs nationalités de ne remplir les obligations militaires qu'à l'égard d'un seul Etat.

Certains amendements lui semblent néanmoins indispensables, et notamment :

- la modification du titre en " Convention sur la citoyenneté ", le terme de " nationalité " pouvant prêter à confusion dans des pays à fortes minorités " nationales " ;

- l'inclusion dans les motifs de discrimination (que la convention veut empêcher) de l'origine sociale ou ethnique et l'appartenance à une minorité nationale ;

- la limitation du champ et de la durée des réserves que les Etats ont la possibilité de formuler ;

- le développement de la convention dans 3 domaines :

• la succession d'Etats (attitude plus volontariste notamment pour les garanties et droits des ressortissants d'un Etat prédécesseur),

• la coopération internationale dont les modalités, les structures et les moyens ne sont pas précisés,

• les incidences d'une citoyenneté commune pour l'Union européenne. A défaut, la convention risque de devenir rapidement caduque si l'Union venait à élargir ses compétences dans ce domaine.

La Commission des migrations, des réfugiés et de la démographie a également présenté un avis sur ce projet de convention. Son rapporteur, Mme Manuela Aguiar (Portugal, LDR), souscrit au texte dans ces grandes lignes, mais estime qu'il ne donne pas au demandeur de nationalité une protection suffisante face aux lenteurs et aux aléas de l'administration. Elle propose en conséquence de l'amender en précisant que ce délai ne saurait dépasser un an et soit explicitement mentionné dans le projet de convention.

A la suite du débat, l'avis 200 contenu dans le rapport 7718, amendé, est adopté.

18. Age minimal concernant le droit de vote (Vendredi 31 janvier)

Le rapporteur, estimant que les jeunes seraient ainsi davantage responsabilisés et mieux intégrés dans la société en tant que citoyens à part entière, se prononce en faveur de l'octroi du droit de vote -actif et passif- dès l'âge de 18 ans, pour toutes les élections, dans l'ensemble des Etats membres du Conseil de l'Europe.

D'autres droits, tels que ceux de s'engager dans un parti politique, de passer le permis de conduire ou de se marier, leur sont déjà accordés à cet âge, souligne le rapport. Leur donner également le droit de vote pourrait susciter un regain d'intérêt des jeunes pour la politique et contribuer à la lutte contre leur exclusion de la société.

A l'issue du débat, la recommandation 1315 contenue dans le rapport 7724 est adoptée.

II. LA DEUXIEME PARTIE DE LA SESSION (STRASBOURG - du 21 au 25 avril 1997)

1. Introduction

L'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe s'est réunie à Strasbourg du 21 au 25 avril (deuxième partie de sa session ordinaire de 1997).

Cette partie de session a permis à l'Assemblée d'entendre des allocutions de :

- Mme Judith STAMM , Président du Conseil national suisse ;

- M. Constantinos STEPHANOPOULOS , Président de la République hellénique ;

- M. Daniel TARSCHYS , Secrétaire général du Conseil de l'Europe, qui a notamment répondu à une question de M. Jean BRIANE , député (UDF) ;

- M. Peter STOYANOV , Président de la République de Bulgarie.

A l'ouverture des travaux de l'Assemblée, lors de la fixation de l'ordre du jour, M. Daniel HOEFFEL , sénateur (UC), a pris la parole pour regretter la suppression de la communication du Président en exercice de l'OSCE, qui eût fourni l'occasion de faire le point sur la coordination entre toutes les organisations européennes, coordination dont un événement comme la crise albanaise manifeste l'urgence.

Puis, l'Assemblée a délibéré des questions suivantes :

- Le Rapport d'activité du Bureau et de l'Assemblée et de sa Commission permanente, Rapport dont l'assemblée a pris acte (n°7803 et addenda I et II) ;

- Le renforcement du mécanisme de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements dégradants (Rapport 7784, l'Assemblée adoptant, avec des amendements, la Recommandation 1323 et la Directive 530) ;

- La contribution de l'Assemblée parlementaire au deuxième Sommet des Chefs d'Etat et de Gouvernement du Conseil de l'Europe ; après la présentation du Rapport (7786), l'Assemblée a adopté la Recommandation 1324 ;

- Les conflits en Transcaucasie ; dans le débat sur le Rapport (7793), Mme Josette DURRIEU , sénateur (Soc), a pris la parole avant que l'Assemblée n'adopte la Résolution 1119 ; le mercredi 24 avril, M. Nicolas ABOUT , sénateur (ap. RI), a invité l'Assemblée à se souvenir, parmi les victimes de tous les génocides, du massacre des Arméniens dont ce jour marque la commémoration ;

- Les incidences des nouvelles techniques de communication et d'information sur la démocratie ; le débat, qui s'est engagé sur la présentation par M. Jean-Pierre MASSERET , sénateur (Soc), de son Rapport (7772) (faisant suite aux nombreux travaux qu'il a conduits sur ce thème, notamment dans le cadre du Conseil de l'Europe) et sur l'avis 7805 ainsi que deux avis oraux, a débouché sur l'adoption, avec amendements, de la Directive 531 :

- Les instruments de la participation des citoyens dans la démocratie représentative (Rapport 7781) ; M. Daniel HOEFFEL , sénateur (UC) a pris la parole dans ce débat qui s'est conclu par l'adoption de la Résolution 1121 ;

- Les progrès de la réforme économique en Europe centrale et orientale (Rapport 7712 et addendum ) ; M. Jean-Pierre MASSERET , sénateur (Soc) est intervenu dans ce débat qui a donné lieu à l'adoption de la Résolution 1122 ;

- La traite des femmes et la prostitution forcée dans les Etats membres du Conseil de l'Europe (Rapport 7785, Avis 7808 et Recommandation 1325) ;

- Le respect des obligations des engagements de la Roumanie. Outre le rapport 7795, Mme Josette DURRIEU , sénateur (Soc), a présenté un avis oral au nom de la commission des relations avec les pays non membres avant que l'Assemblée n'adopte la Résolution 1123 et la Recommandation 1326 ;

- La protection et le renforcement des droits de l'Homme en faveur des réfugiés et des demandeurs d'asile en Europe. M. François LESEIN , sénateur (RDSE) a pris la parole dans le débat (Rapport 7783 et Recommandation 1327) ;

- La situation en Albanie. M. Nicolas ABOUT , sénateur (ap. RI) est intervenu dans le débat (Rapport 7806, Avis 7807 et 7810, Recommandation 1328 et Directive 532) ;

- Les politiques de transport aérien : l'aviation civile en phase de transition. M. François LESEIN , sénateur (RDSE) est intervenu dans ce débat (Rapport 7778 et Résolution 1124).

A l'occasion de cette session, l'Assemblée a procédé à la réforme de ses commissions, en application de la Résolution 1107 sur la structure des commissions, adoptée en janvier dernier et entrée en vigueur le 25 avril 1997, portant le nombre des membres de la commission des migrations, des réfugiés et de la démographie de 59 à 65 membres, tandis que la commission de l'agriculture ne comptera plus que 45 membres au lieu de 50, de même que la commission du règlement, ramenée également de 50 à 45 membres ; enfin, la commission des relations avec les pays européens non membres est supprimée pour tenir compte de l'adhésion de tous les Etats du continent européen au Conseil de l'Europe, à l'exception encore de 5 Etats dont les Parlements bénéficient du statut d'invité spécial à l'Assemblée parlementaire, en attendant leur adhésion plénière. Enfin, a été instituée une nouvelle " Commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe ", qui compte parmi ses 65 membres, M. Michel ALLONCLE , sénateur (RPR), Mme Josette DURRIEU , sénateur (Soc) et M. François LESEIN , sénateur (RDSE).

2. Rapport d'activité du Bureau et de la Commission Permanente - Rapport de M. Jacques BAUMEL, député (RPR) (Lundi 21 avril)

M. Jacques BAUMEL présente son rapport en ces termes :

" J'ai, en effet, la responsabilité de présenter le rapport d'activité du Bureau de l'Assemblée et de la Commission Permanente.

Compte tenu des nombreuses décisions et des multiples activités de ces deux organismes, je vous ferai la grâce de ne pas vous donner en détail tout ce qui concerne le travail permanent de ces deux organes. Sur des pages et des pages, vous pourrez lire les résumés des différentes propositions de résolution et les décisions tant de la Commission permanente que du Bureau. Je ne retiendrai que quelques éléments marquants, notamment sur le plan de l'action politique.

Passons rapidement sur le renouvellement des membres de commissions que le Bureau a été amené à opérer et sur les divers textes adoptés, notamment les recommandations qui ont été transmises.

Je signale, pour ceux que cela pourrait intéresser, que ce rapport contient la liste précise des réunions qui ont été autorisées par le Bureau en dehors de Strasbourg et de Paris. Je ne crois qu'il soit d'un grand intérêt pour notre Assemblée d'en donner tout le détail aujourd'hui.

Je signale aussi la demande de statut d'observateur auprès de l'Assemblée présentée par le Parlement canadien. Elle a été examinée, il en va de même de la demande formulée par le Japon en vue d'obtenir un poste d'observateur.

Après avoir évoqué rapidement les relations de la Commission permanente ou des autres organes du Conseil de l'Europe avec le Comité des Ministres, j'appelle votre attention sur le groupe de travail mixte avec le Comité des Ministres chargé de la préparation du cinquantième anniversaire du Conseil de l'Europe.

Je vais donner des précisions, car cela me paraît être le plus important, sur l'activité du Bureau et de la Commission permanente en ce qui concerne les problèmes de politique étrangère et de relations extérieures.

Un sujet est, hélas, de grande actualité : à savoir l'Albanie. La Commission Permanente a adopté, le 19 mars, une recommandation sur l'état d'urgence en Albanie. Dans ce texte, elle a notamment demandé au Conseil des ministres de prendre l'initiative de constituer une équipe spéciale tripartite -Conseil de l'Europe, Union européenne, OSCE - afin d'apporter un soutien international à la nouvelle coalition gouvernementale. Elle a demandé au Secrétaire général de réexaminer les programmes d'assistance à l'Albanie pour apporter une contribution significative aux équipes d'assistance multi-institutionnelles. Enfin, elle a demandé aux chefs des groupes politiques de se rendre en Albanie pour favoriser le processus de réconciliation.

Je dois dire que, depuis, nos collègues MM. van der Linden, Columberg et Ruffy se sont rendus en Albanie et feront jeudi rapport sur leur dernière mission. Je ne veux pas m'étendre sur la situation préoccupante de ce pays, car elle est loin d'être réglée, même avec les missions humanitaires d'alimentation qui ont été envisagées ou l'arrivée de forces de paix qui ont commencé à débarquer sur ce territoire.

Le Président Berisha et le Président du Parlement albanais ont exprimé le souhait que l'Assemblée participe à l'observation des élections législatives prévues pour la fin du mois de juin. Les modalités de cette participation seront arrêtées après que les chefs des groupes politiques en auront discuté avec les partis politiques albanais. Le consensus doit être l'objectif de notre Assemblée et il faut y parvenir. La commission des questions politiques a abordé tout à l'heure encore ce sujet de très grande préoccupation pour chacun d'entre nous.

Le deuxième sujet que j'évoquerai aussi rapidement est la préparation du sommet des chefs d'Etat et de gouvernement. La prochaine réunion du Comité mixte, qui aura lieu jeudi prochain, sera consacrée en grande partie à discuter de l'état d'avancement des travaux de préparation du deuxième sommet des chefs d'Etat et de gouvernement du Conseil de l'Europe, qui se tiendra à Strasbourg les 10 et 11 octobre de cette année.

L'Assemblée, dans son premier rapport sur le sommet, présenté par nos deux collègues MM. Martínez et Seitlinger, a déjà formulé une série de propositions quant aux thèmes à aborder. Dans le second rapport, qui sera examiné demain, les rapporteurs formulent des recommandations précises quant aux décisions qui devraient être incluses dans le projet de déclaration finale du sommet.

Il s'agit essentiellement de renforcer les mécanismes existants, notamment la Cour unique des Droits de l'Homme, et la ratification des conventions existantes ; de relever les nouveaux défis avec, notamment, la création d'un commissariat aux droits de l'homme, un protocole additionnel à la Convention "biomédecine" sur le clonage ou la Charte européenne du service public ; enfin, de renforcer la cohésion sociale, avec la ratification de la Charte sociale, le projet "dignité humaine et exclusion sociale".

Dans ce domaine, notre Assemblée fait preuve de plus d'imagination et de créativité que les autorités gouvernementales. Je n'en dirai pas plus, c'est préférable.

Mon troisième point concerne le Bélarus. Le 31 janvier, vous le savez, notre Bureau a transmis à la Commission des questions politiques la proposition de la délégation russe d'organiser sur la situation préoccupante du Bélarus, un séminaire avec la participation des représentants des forces politiques de ce pays. Dans sa réunion du 2 avril, la Commission politique est convenue d'examiner au cours de cette session la possibilité d'organiser le séminaire à Strasbourg ou éventuellement, si les conditions le permettaient, à Minsk au cours des prochains mois. Mais je ne vous le cache pas, et je représente un peu l'opinion générale que la situation actuelle du Bélarus, compte tenu de l'évolution politique que nous y consacrons, est de nature à susciter un grand nombre d'inquiétudes sur le maintien et le développement de la démocratie.

Le quatrième point que je voudrais évoquer rapidement, en vous priant de m'excuser d'être un peu lent, a trait à la mise en oeuvre des accords de Dayton pour la paix en Bosnie-Herzégovine.

Le 18 mars, votre Bureau a décidé de porter à cinq le nombre de sièges alloués à la délégation d'invités spéciaux de Bosnie-Herzégovine afin d'en élargir la représentativité, de constituer le moment venu, une commission ad hoc pour observer les élections locales prévues pour septembre 1997 - et il me paraîtrait d'ailleurs judicieux que notre Assemblée parlementaire soit présente à l'occasion de ces élections - et d'autoriser les commissions intéressées à inviter des parlementaires de Bosnie-Herzégovine pour des échanges de vues sur des sujets spécifiques au sujet des élections et de la reconstruction du pays.

En ce qui concerne le cinquième point de mon rapport, quelques mots seulement au sujet de l'importante convention sur les droits de l'homme et la biomédecine qui vient de se tenir à Oviedo. Notre présidente étant présente à la cérémonie d'ouverture à la signature de cette convention - à l'origine de laquelle se trouve l'Assemblée, une délégation de l'Assemblée a également participé à cette cérémonie et, ce matin même, notre présidente nous a marqué l'importance et le cérémonial spécial de cette manifestation à laquelle elle a assisté.

Mon dernier point porte essentiellement sur l'observation des élections. Je crois que c'est maintenant un élément important de notre action politique que d'être présent dans les élections, d'y déléguer des observateurs et de jouer le rôle naturel qui est celui du défenseur de la démocratie et des droits de l'homme en Europe.

Pour ce qui est de la Croatie, le Bureau a créé, le 18 mars, une commission ad hoc pour observer les élections locales et les élections à la Chambre des régions du parlement croate en Slavonie orientale. Elles ont eu lieu le 13 et 14 avril et M. Jansson, rapporteur de la commission ad hoc, en informera directement l'Assemblée.

S'agissant de la Bulgarie, un point plus récent et, à mon avis, très important, des élections législatives viennent de se tenir, dont vous avez vu les résultats impressionnants. Le Bureau a également constitué une commission ad hoc pour observer ces élections législatives samedi dernier. M. Onaindia, rapporteur de la commission ad hoc en informera directement l'Assemblée.

Pour donner des informations de dernière heure, de ce matin, le Bureau a pris note du rapport de la commission ad hoc sur les élections locales et régionales de Croatie. Il a pris également acte des opérations de l'Albanie, après avoir entendu une déclaration de M. van der Linden. D'autre part, le Bureau sous réserve de ratification, a renvoyé pour avis un certain nombre de questions en commission.

Enfin, pour la commission de suivi, le Bureau a, sous réserve de ratification par l'Assemblée, décidé de remplacer M. Per Stig Moeller par M. Tomas Ingi Olrich d'Islande. "

3. Renforcement du mécanisme de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants - Intervention de M. Bernard SCHREINER, député (RPR), rapporteur pour avis (Lundi 21 avril)

L'année 1997 marque le dixième anniversaire de l'ouverture à la signature de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CEPT) et la huitième année d'activité du Comité (CPT) qu'elle a créé. A la lumière des évolutions qui se sont produites et, notamment, de l'expansion des activités du CPT en Europe centrale et orientale, l'Assemblée a identifié certains domaines dans lesquels des améliorations sont nécessaires afin que l'efficacité et la crédibilité du CPT soient sauvegardées.

En particulier, elle constate la nécessité :

a) d'un accroissement de ressources humaines et budgétaires pour le CPT ;

b) d'une composition plus équilibrée du CPT, en termes de formation professionnelle, de sexe et d'âge ;

c) de l'entrée en vigueur rapide du protocole n° 2 à la CEPT qui prévoit le renouvellement régulier des membres du CPT et la possibilité qu'ils soient réélus deux fois ;

d) d'une meilleure sensibilisation aux activités du CPT ;

e) d'un surcroît de coopération entre le CPT et l'Assemblée (notamment sa commission des questions juridiques et des droits de l'homme et sa commission de suivi) ainsi qu'avec le Comité des Nations unies contre la torture.

M. Bernard SCHREINER, député (RPR), présente ses observations sur le rapport :

" Mes chers collègues, c'est au nom de la commission du budget et du programme de travail intergouvernemental que j'ai le privilège de vous exposer l'avis de la commission qui a examiné avec un très grand intérêt l'excellent rapport de M. Jaskiernia sur le renforcement du mécanisme de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants. La commission partage également l'avis du rapporteur quant à l'importance politique de cette convention et du travail remarquable accompli par le Comité pour la prévention de la torture.

A cet égard, la commission du budget ne peut qu'appuyer la proposition du rapporteur pour que des ressources humaines et budgétaires suffisantes soient mises à disposition du comité en tenant compte notamment du nombre de jours de visite effectués par le comité, ce nombre allant croissant suite à l'adhésion prochaine à la Convention de l'Ukraine et de la Fédération de Russie.

Il va sans dire, comme le souligne le rapporteur, que cette augmentation des jours de visite entraînera non seulement une charge de travail supplémentaire mais également la nécessité d'une plus grande disponibilité de la part des membres du comité et du secrétariat.

La commission du budget se félicite que le Comité des Ministres ait prévu la création d'un poste d'administrateur de grade A2/A3 pour le secrétariat du CPT en 1997. Toutefois, malgré l'augmentation du nombre du personnel depuis 1991, la commission estime que les effectifs actuels du secrétariat risquent d'être insuffisants pour que le CPT conserve son efficacité.

La commission du budget que peut qu'appuyer le souhait du rapporteur pour que le Comité puisse avoir une composition plus équilibrée et qu'il puisse compter sur une plus grande participation de spécialistes des questions pénitentiaires et de médecine légale.

Enfin, la commission du budget ne peut que saluer l'initiative du Président actuel du Comité pour améliorer l'efficacité du travail du Comité en mettant notamment en place une procédure accélérée pour l'examen des rapports de visite ainsi qu'en réduisant de quatre à trois le nombre de ses réunions plénières en 1997.

Cette diminution du nombre de réunions permettra aussi de consacrer aux visites plus de ressources humaines et financières.

Par conséquent, la commission du budget soutient le projet de recommandation que la commission des questions juridiques et des droits de l'homme présente à l'Assemblée et dans lequel le Comité des Ministres est invité à poursuivre le renforcement des structures du Comité et à lui donner les ressources nécessaires afin d'assurer son bon fonctionnement et lui donner tout son dynamisme. "

A l'issue du débat, la recommandation 1323, ainsi que la directive 530, contenues dans le document 7784, amendées, sont adoptées.

4. Contribution de l'Assemblée parlementaire au deuxième sommet des chefs d'Etat et de gouvernement du Conseil de l'Europe - Intervention de M. Jean SEITLINGER, député (UDF) (Mardi 22 avril)

Le deuxième Sommet du Conseil de l'Europe devrait être axé sur les défis spécifiques auxquels sont confrontées les sociétés européennes et sur le rôle du Conseil, les " quarante ", en tant que forum majeur de dialogue et de concertation politiques paneuropéens.

Selon les rapporteurs, le Sommet des Chefs d'Etat et de gouvernement, qui se tiendra les 10 et 11 octobre 1997 à Strasbourg. devrait porter, entre autres. sur les questions suivantes : la lutte contre le crime organisé, la régulation du génie génétique et des technologies de l'information, la cohésion sociale et l'égalité entre les femmes et les hommes.

Par ailleurs. le Sommet devrait se pencher sur les besoins urgents des nouveaux pays membres d'Europe centrale et orientale et obtenir des engagements fermes de la part des Etats membres quant à leur coopération dans les procédures de suivi menées par le Conseil.

La rapport constate que l'aide internationale aux pays membres touchés par une crise politique s'étant " révélée inadaptée ", il conviendrait de confier une responsabilité accrue en ce qui concerne la mise oeuvre des programmes d'aide, afin de renforcer la sécurité démocratique (démocratie pluraliste, droits de l'homme et Etat de droit).

Au nombre des propositions contenues dans le rapport figure l'élaboration :

- d'un protocole additionnel à la Convention européenne des Droits de l'Homme qui contiendrait une clause générale sur l'égalité des droits (l'actuel article 14 ne garantit la non discrimination que pour les droits énoncés dans la convention) ;

- d'un protocole additionnel à la Convention européenne des Droits de l'Homme protégeant les droits culturels des minorités ;

- d'une Convention européenne sur la protection et les droits des réfugiés et des demandeurs d'asile ;

- d'un protocole sur le clonage à la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine,

- d'une Convention sur les technologies de la communication ;

- d'un plan d'action pour faire progresser l'égalité entre les hommes et les femmes ;

- d'un ensemble de principes - d'une portée pratique - applicables à l'action gouvernementale en matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale ;

- de concepts visant à sensibiliser l'opinion à l'écart croissant entre le nord et le sud.

M. Jean SEITLINGER, député (UDF), intervient alors en ces termes :

" Madame la Présidente, comme vient de l'indiquer mon collègue, M. Martínez, vous avez pris une initiative à la fois heureuse et opportune. Car, nous sommes à la fin de l'élargissement, et les sommets des chefs d'Etat et de gouvernement sont devenus le moteur dans toutes les institutions. Un moteur qui fonctionne d'autant mieux qu'il est alimenté et que le travail est préparé. C'est ce à quoi les deux rapporteurs se sont appliqués afin de présenter des propositions pertinentes pour meubler ce sommet.

La place du Conseil de l'Europe dans l'architecture de demain, nous n'avons pas à la revendiquer. Elle nous appartient. Nous sommes un pôle d'excellence dans les domaines des droits de l'homme, de l'éthique et des valeurs fondamentales qui constituent les leviers de notre action. Nous devons donc confirmer des acquis qui donnent à notre Assemblée une autorité exceptionnelle et nous permettent d'être un centre de propositions et d'initiatives.

En Europe, nous sommes l'institution la plus large : elle couvre tout le continent sans ligne de partage, sans clivage interne. Nous sommes aussi l'institution qui a une composante parlementaire, notre Assemblée, particulièrement efficace. Sans nommer d'autres institutions, mais vous les aurez reconnues comme moi, je crois pouvoir affirmer que notre Assemblée, parce qu'elle est constituée de parlementaires issus de parlements nationaux, a une légitimité particulière pour conduire le dialogue politique en Europe.

J'en viens aux quelques grands axes que nous avons proposés pour éviter de nous disperser. En particulier, nous avons retenu l'espace juridique européen avec la cour unique des Droits de l'Homme, la création d'un commissaire aux Droits de l'Homme, proposée par la présidence finlandaise, qui a recueilli un avis favorable des autres Etats. Pour nos concitoyens, il y a aussi bien sûr les défis de l'Europe au quotidien : la lutte contre le terrorisme, la drogue et autres maux de notre société. Enfin, un domaine émerge, celui de la cohésion sociale. Sur ce plan, la Charte sociale, de manière souple, flexible et non pas rigide peut apporter une contribution utile.

Le troisième axe concerne la culture et la formation. En clair, il s'agit de l'identité européenne à laquelle nous sommes particulièrement attachés.

Tels sont les trois grands axes de réflexion que nous proposons pour la tenue de ce sommet. Nous sommes persuadés, de ce fait, que notre Conseil de l'Europe sera un des socles irremplaçables d'une Europe unie. "

A l'issue du débat, M. Jean SEITLINGER reprend brièvement la parole :

" Je serai très bref car il y a identité de vues entre M. Martínez et moi-même.

A mon tour, je remercie l'ensemble des orateurs. Ils ont surtout souligné certains aspects du rapport et ont reconnu que leur présentation était intégrée dans le document soumis à l'Assemblée. Il s'agit essentiellement du partage des compétences, de la question des droits de l'homme et de la ratification du Protocole n° 11.

Pour terminer, je réparerai bien volontiers une omission : notre gratitude va également à M. Bruno Haller, qui a été, dès le départ, une des chevilles ouvrières de notre action. "

La recommandation 1324 contenue dans le rapport 7786, amendée, est adoptée.

5. Conflits en Transcaucasie - Intervention de M. Jean SEITLINGER, député (UDF), rapporteur - Intervention de Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc) (Mardi 22 avril)

M. Jean SEITLINGER, député (UDF), rapporteur pour avis de la commission des relations avec les pays européens non membres, présente les observations suivantes :

" Madame la Présidente, mes chers collègues, je prends la parole pour la dernière fois au nom de la commission des relations avec les pays européens non-membres qui est en voie de disparition puisqu'elle n'existera plus à la fin de cette semaine. Cette commission a été créée en 1950, pour veiller aux intérêts des non membres, non représentés au Conseil de l'Europe. En 1956, c'était une commission générale, sous le nom de commission des Nations non représentées, puis des pays non représentés, enfin, en 1970, elle est devenue la commission des relations avec les pays européens non membres ; surtout, bien sûr, avec les Assemblées législatives nationales de ces différents pays.

Durant toute cette période, elle a dû se borner à des rapports sur la situation dans les pays d'Europe centrale et orientale, à des actions telles que la publication de listes de prisonniers politiques, dont certains d'ailleurs ont pu obtenir leur libération grâce à l'activité de la commission. Elle s'est prononcée, à l'époque aussi, pour la coopération culturelle Est-Ouest.

La date importante qui a marqué un tournant, non seulement pour la commission mais aussi pour notre Assemblée, fut le 11 mai 1989, quand fut voté à l'unanimité, par notre Assemblée, la création du statut d'invité spécial, à l'initiative de notre collègue député libéral suisse, Peter Säger, président de la commission. Ce statut a permis aux nouvelles démocraties d'Europe centrale et orientale d'être admises, mais pas à part entière. Néanmoins, ces démocraties ont pu intégrer le forum démocratique du Conseil de l'Europe sans un grand délai d'attente.

C'est ainsi que le Président Björck a pu, de cette tribune, en février 1992, déclarer que, grâce à ce statut, le Conseil de l'Europe s'était établi durablement sur la scène politique européenne.

Sous la présidence de David Atkinson, notre collègue britannique qui a succédé à Peter Säger à la présidence de la commission, quinze pays ont obtenu le statut d'invité spécial. M. Atkinson a également fait procéder à de très nombreuses auditions concernant, notamment, la Roumanie, et aussi et surtout, l'Azerbaïdjan, l'Arménie et la Géorgie.

Moi-même, j'ai accédé à cette présidence en janvier 1995 et nous avons poursuivi l'élargissement. En particulier, nous avons enregistré l'adhésion, à part entière, de la Fédération de Russie le 28 février 1996. A présent, quarante Etats sont membres du Conseil de l'Europe, cinq sont encore invités spéciaux et la commission a donc été favorable à la délivrance de ce statut à vingt-trois Etats. Il est vrai que deux l'ont perdu dans l'intervalle.

Je veux donc rendre hommage à mes prédécesseurs, Peter Säger et David Atkinson ; particulièrement au premier qui, par son initiative lucide, a permis cette politique du statut d'invité spécial. Je remercie aussi Guy Dufour qui est à mes côtés et qui a été, tout au long de ces années, le collaborateur de notre commission.

Je me devais de faire cette introduction parce que c'est la dernière occasion que j'ai pour remercier les membres de cette commission, ceux qui ne sont plus des nôtres, et ceux qui encore, jusqu'à ce matin à 8 heures, ont encore participé activement à nos travaux.

Dans notre dernier rapport, après notre visite en Géorgie, il y a quelques semaines, nous avons évoqué les conflits en Transcaucasie, région située entre la Turquie et la Russie, deux pays membres à part entière de notre Assemblée. Ces deux conflits ne sont pas de même nature, mais font l'objet d'un même rapport, parce que leur règlement doit reposer sur les mêmes principes, sur les mêmes normes de Droit International que sont l'inviolabilité ou l'intégrité des frontières, les garanties de sécurité, souvent par des forces multinationales, le statut de large autonomie pour l'Abkhazie et le Haut-Karabakh, et enfin, le droit de retour des réfugiés et leur réintégration.

Ce dernier point n'est pas la moindre exigence que nous devons formuler car il faut savoir que pour ces trois pays qui comptent au total 12 millions d'habitants, il y a entre 1,3 million et 1,5 million de réfugiés. Cela signifie qu'un dixième des habitants sont des déracinés. Nous avons pu nous rendre compte sur place dans quelles conditions difficiles ils font face.

L'exposé des motifs, bien évidemment, n'est pas le document soumis au vote. Seule la résolution fera l'objet d'une approbation. Nous ne sommes pas des médiateurs entre les différentes thèses des historiens, car je sais que, sur ce point, certains de nos collègues de ces pays ne sont pas d'accord. Il y a forcément parmi eux différentes thèses. Nous ne sommes pas ici pour faire l'histoire, pour remonter à des siècles avant Jésus-Christ. Nous sommes confrontés à une actualité, à une situation latente de conflit avec 1,5 millions de réfugiés. Nous devons essayer de notre mieux de trouver des solutions. Nous savons, bien sûr, que la clé n'est pas uniquement parmi nous. Néanmoins, nous pouvons contribuer à la trouver.

S'agissant de l'Abkhazie, qui est un problème interne à la Géorgie, nous sommes allés à Soukhoumi et nous avons rencontré M. Ardzinba. Nous avons pu constater la purification ethnique à laquelle il a procédé après l'arrêt des combats, le cessez-le-feu de mai 1994. J'ajoute qu'il a également fait détruire systématiquement les maisons et les récoltes.

Dans un document, en réponse à nos questions, nous avons constaté qu'il existait des éléments raisonnables pour une négociation. Mais sur un point essentiel, la réponse n'est pas satisfaisante : il s'agit du retour des réfugiés ; M. Ardzinba ne veut pas qu'il y ait à nouveau une prépondérance démographique de population non abkhaze. Bien sûr, cela est inacceptable.

Depuis 1988, le Haut-Karabakh a connu des conflits dramatiques avec près de 20 000 morts. Le cessez-le-feu est intervenu en mai 1994 et il est respecté des deux côtés.

Dès 1992, l'OSCE a créé le Groupe de Minsk. En 1994, à Budapest, lors d'une réunion, il a demandé la présence de forces multinationales mais le Conseil de Sécurité n'a jamais donné suite à cette proposition. Il n'a pas donné mandat à des forces de l'ONU pour se rendre dans le Haut-Karabakh alors qu'elles sont présentes en Abkhazie mais uniquement avec un mandat d'observation donc sans armes.

Pour essayer de lever ce blocage, une réunion a eu lieu à Luxembourg entre les deux Présidents. Le Président de l'Azerbaïdjan, M. Aliev, et le Président de l'Arménie ont chacun nommé des représentants personnels, qui se rencontrent afin d'essayer de faire avancer les choses.

Pour notre part, nous avons aussi organisé, en janvier, un séminaire, qui a permis aux différentes délégations de ces pays de s'exprimer.

Il faut également mentionner le Sommet de Lisbonne, en décembre 1996, qui a réuni les chefs d'Etat et de gouvernement de l'OSCE. Ce sommet s'est conclu par une déclaration de M. Flavio Cotti, président de l'OSCE, qui a été acceptée par cinquante pays, mais pas par le Président de l'Arménie.

Ce que nous pouvons dire, c'est que ces pays, parce qu'ils sont voisins sont condamnés à vivre ensemble et donc obligés de pratiquer l'école de la tolérance, de manière que cette région, au passé si riche, puisse à nouveau redevenir la route de la soie ou, de manière moderne, la route du pétrole.

De toute façon, ne soyons ni trop exigeants ni trop impatients : ces pays n'ont que cinq ans d'indépendance. Dans l'histoire des peuples, c'est très court, et nous ne devons pas juger en occultant ce fait. Nous devons faire confiance à ces pays et les aider afin qu'ils trouvent rapidement la voie de la paix et de la coopération. "

Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc), intervient dans le débat en ces termes :

" L'état de guerre persiste dans les pays dont nous parlons. En Abkhazie, c'est évident. Au Haut-Karabakh, il y a encore eu des morts ces derniers jours.

La situation économique dans ces pays est désastreuse. En Abkhazie, nous avons pu constater récemment, avec la délégation de la commission, que c'était le cas : la situation est comparable à celle de la Bosnie. J'ai visité la Bosnie, je n'ai pas vu de différence.

Le nombre des personnes déplacées se chiffre par centaines de milliers, et probablement plus d'un million pour l'ensemble de ces pays.

Mon propos aura trait essentiellement à la Géorgie et à l'Abkhazie. Je ne souhaite pas, volontairement, l'élargir à l'Ossétie ou à l'Adjarie.

Je résumerai mon propos en trois points.

Premier point : il y a urgence à établir un règlement politique. Les principes communs, vous les avez tous avancés : les frontières, la sécurité, une large autonomie, le droit de retour des réfugiés.

A propos de l'Abkhazie, je voudrais rappeler un certain nombre d'éléments que peut-être nous ignorons trop en Europe.

La guerre a commencé en août 1992 ; le cessez-le-feu est intervenu en juillet 1993 ; il a été rompu après cette date par les Abkhazes ; un exode massif a eu lieu, déplaçant 120 000 personnes, venues s'ajouter aux 70 000 qui étaient déjà parties ; plus de 200 000 personnes ont donc quitté l'Abkhazie.

La destruction qui a suivi cet exode est totale. Et je me dois d'insister sur cet événement : la composition ethnique dans cette région de la Géorgie est complètement inversée. Oui, on peut parler de "nettoyage ethnique", de "purification", au même titre que pour la Bosnie, mais on ne le précise pas.

L'atteinte aux droits de l'homme est caractérisée. Les Abkhazes ont une certaine légitimité, mais leur cynisme est absolu. Aucun retour n'est possible : 311 personnes sur près de 250 000 réfugiés qui ont quitté ce pays. L'horreur et la douleur, nous les avons vues à Tbilissi, le lendemain, en visitant les camps de réfugiés.

Le second point de mon intervention concerne le rôle de la Russie, un rôle réel et direct. Oui, il faut rappeler ce rôle pour la Géorgie : en novembre 1992, des forces russes participent à la guerre et repoussent les Géorgiens - cela a été dit ; en juillet 1993, la Russie participe au cessez-le-feu ; mais il sera rompu par les Abkhazes ; en septembre 1993, la Géorgie entre dans la CEI ; en octobre 1993, la Géorgie demande l'assistance militaire de la Russie ; en 1994, un accord de coopération est signé avec la Russie sur des bases russes en Géorgie ; en 1995, a lieu le blocus de l'Abkhazie.

Oui, le rôle de la Russie dans la guerre et dans la paix est évident. Par conséquent, son rôle sera essentiel, aux côtés de l'ONU et de l'OSCE, pour assurer la sécurité, parce qu'elle est garante dans le Caucase de la stabilité, mais aussi de l'instabilité, qui relève de sa responsabilité.

Enfin, oui, cette région du Caucase existe. Elle constitue un trait d'union entre l'Asie et l'Europe. C'est une zone d'intérêts communs entre trois Etats, intérêts culturels, géographiques, historiques et surtout économiques et stratégiques. La politique du pétrole est un instrument de politique étrangère et le tracé des pipe-lines du Kazakhstan à la Caspienne et à la Mer noire est un enjeu et un objet de transactions, un objet de récompenses, un objet de sanctions.

Oui, cette région a le droit d'exister sur ses richesses, ses valeurs. Elle est l'Europe. Je souhaite l'adhésion rapide de ces trois Etats afin qu'ils soient vite parmi nous. "

M. Jean SEITLINGER, député (UDF), reprend la parole en sa qualité de rapporteur de la commission des relations avec les pays européens non membres, pour répondre aux orateurs en ces termes :

" Madame la Présidente, notre collègue David Atkinson aura reconnu dans le paragraphe 10 du projet de résolution son initiative sur le plan de paix. Certes, nous y avons ajouté les mots "à terme", et l'intervention du président Bársony montre que le "terme" n'est pas encore venu où nous pourrons constituer une Assemblée parlementaire commune aux trois pays du Caucase.

Tel est notre souhait, tel est notre voeu ardent, mais il est clair aussi qu'il appartient aux trois pays concernés de répondre à cette invitation et de nous accompagner.

Le Conseil de l'Europe se veut impartial, a dit ce matin M. Igitian. C'est notre culture. Nous nous efforçons à l'impartialité. Nous essayons d'être conciliants, sans sacrifier pour autant les principes qui sont les nôtres : respect des droits de l'homme, démocratie parlementaire pluraliste et état de droit.

M. Igitian a demandé : " comment espérer apporter une réponse politique en quelques heures de débat ? " Nous n'apportons pas de réponse politique au sens de solution, nous rappelons le cadre dans lequel doivent se dérouler la négociation et s'établir la solution. Le cadre, ce n'est pas nous qui l'inventons : c'est celui des normes du droit international, qui sont - dois-je le rappeler ? - l'inviolabilité des frontières, l'autonomie de certains territoires concernés et la réinstallation des réfugiés. Ce sont des exigences sur lesquelles nous ne pouvons pas transiger.

Mme Severinsen et Mme Durrieu se sont prononcées contre toute mention à l'Ossétie du Sud et l'Adjarie. Je crois qu'il n'y a pas lieu de citer encore d'autres zones d'éventuels conflits - nous avons déjà suffisamment de soucis avec l'Abkhazie et le Haut-Karabakh. Par conséquent, là ou il n'y a pas de conflit, de demande d'indépendance, il faut, certes, toujours veiller au respect de certains statuts d'autonomie, au respect de l'identité des différentes régions, mais dans un cadre national.

Sous le bénéfice de ces observations, nous allons pouvoir examiner ce texte qui est un compromis, le reflet d'une tentative de conciliation. Il n'est sans doute pas parfait, mais je suis sûr que les participants aux travaux de la commission, tant le 7 avril, à Paris, que ce matin, voudront bien reconnaître que nous avons essayé, dans un large esprit de conciliation, d'élaborer un texte acceptable par toutes les parties, de manière à faire avancer ce difficile problème que l'OSCE, qui en est saisie depuis 1992, n'a pas encore réussi à résoudre.

Nous disons très modestement que nous souhaitons y contribuer. Nous espérons que cet appel à une coopération indispensable, cet appel à l'écoute de l'autre, à l'école de tolérance dont parlait M. Bársony, soit entendu.

Evidemment, Messieurs, vous n'avez accédé à l'indépendance que depuis cinq ans, et nous devons ne pas être trop impatients à votre égard. Nous devons aussi faire preuve de compréhension. Si nous faisons chacun un bout de chemin, nous devrions nous retrouver autour de ces normes qui devraient vous permettre de faire partie de la famille européenne. "

Au terme du débat, la résolution 1119 contenue dans le document 7793, modifiée par des amendements, est adoptée.

6. Communication de M. Daniel TARSCHYS, Secrétaire général du Conseil de l'Europe - Intervention de M. Jean BRIANE, député (UDF) (Mardi 22 avril)

A M. Daniel TARSCHYS qui - à la veille du deuxième sommet du Conseil de l'Europe - dresse un bilan de l'état des démocraties européennes, M. Jean BRIANE, député (UDF), s'adresse en ces termes :

" Monsieur le Secrétaire Général, l'an dernier, le Congrès des pouvoirs locaux et l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe ont adopté un projet de charte européenne des régions de montagne, aboutissement d'une vingtaine d'années de travaux du Conseil de l'Europe et des pays membres.

Plus récemment, à l'initiative de la commission de l'agriculture et du développement rural, a été adoptée par l'Assemblée parlementaire une Charte européenne des régions rurales. Le Comité des Ministres a bien compris l'importance et la spécificité des deux instruments, puisque, conformément à la réponse qu'il a donnée à l'Assemblée concernant ces deux textes, réponse d'ailleurs consignée dans le document 7768 disponible à la distribution, il a décidé de confier à un groupe de travail la tâche d'accomplir les deux instruments juridiques mentionnés précédemment.

Pourquoi le Secrétariat peut-il prendre la liberté d'interpréter ou plutôt d'ignorer les directives claires qu'il reçoit du Comité des Ministres et d'orienter ainsi des travaux dans une direction opposée à celle demandée ? "

M. Daniel TARSCHYS apporte la réponse suivante :

" Il s'agit là de deux domaines importants. C'est donc à juste titre que l'Assemblée parlementaire a pris l'initiative de demander l'élaboration d'instruments juridiques pertinents. A cet égard, je crois savoir qu'un débat est ouvert sur la question de savoir s'il convient de se doter d'un instrument unique ou de deux instruments séparés. Les avis diffèrent, mais je dois avouer que je n'ai, pour ma part, pas de point de vue particulier en la matière. Je me contente d'espérer que les discussions déboucheront sur un résultat positif. Comme je le disais, il s'agit là de deux domaines importants et je ne manquerai pas d'encourager et de soutenir tous les efforts qui seront déployés en vue de dégager les principes qui régiront les normes européennes en la matière. "

7. Incidences des nouvelles technologies de communication et d'information sur la démocratie - Rapport de M. Jean-Pierre MASSERET, sénateur (Soc) (Mardi 22 avril)

Présentant son rapport (7772) au nom de la commission des relations parlementaires et publiques, M. Jean-Pierre MASSERET, sénateur (Soc), formule les observations suivantes :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, en quelques mots je vais lancer le débat sur les nouvelles technologies de communication et d'information et sur leurs incidences sur le fonctionnement de la démocratie.

Ce sujet nous intéresse tous puisque nous avons pu observer, au fil des années, les difficultés que les élus rencontraient dans leurs discussions avec les citoyens. Nous avons constaté que le fossé se creusait entre l'action des élus politiques et la compréhension qu'en avaient les citoyens.

Il est apparu à la commission qu'un sujet de préoccupation se faisait jour, à savoir la mise en oeuvre des nouvelles technologies de la communication et de l'information et leurs incidences sur l'ensemble de notre vie quotidienne. En effet, ces nouvelles technologies de communication et d'information - NTCI - rassemblent, dans des instruments complexes, transfrontaliers, des technologies anciennes, existantes, mais organisées maintenant en réseaux, très compacts, qu'il s'agisse du son, de l'image, de la communication ou de l'informatique.

Nous sommes probablement au début de ce que l'on pourrait appeler une "nouvelle civilisation" puisque toutes les révolutions importantes de l'histoire de l'Humanité sont d'abord des révolutions fondées sur les moyens de communication. Aucun aspect de notre vie quotidienne ne va échapper au développement de ces technologies qu'il s'agisse du travail, des relations entre les producteurs et les consommateurs, qu'il s'agisse des liaisons entre les citoyens et les élus, entre les citoyens eux-mêmes, entre les administrations, les services publics et les usagers. Bref, qu'il s'agisse également de la formation, de la culture, il n'y a pas d'aspect de notre vie en société qui échappera à l'influence, à l'incidence et au comportement issu de ces nouvelles technologies de la communication et de l'information.

La démocratie n'est pas quelque chose qui se découpe : il y a des aspects juridiques, culturels, sociaux, des aspects touchant directement à la démocratie et des aspects technologiques. L'important, pour notre Assemblée, c'est de percevoir ces enjeux et d'approcher modestement une série de réflexions parce que, nous le savons tous, il y a une évolution permanente, quotidienne de ces instruments.

Il faut donc se garder d'un certain nombre d'erreurs à ne pas commettre. Il ne s'agit pas de fixer des normes que nous ne pourrions pas ensuite assumer et faire respecter, de poser des contraintes qui ne permettraient pas le développement, la valorisation de tous ces instruments de la communication et de l'information.

Nous devons avoir une approche extrêmement pratique, réaliste et qui manifeste beaucoup d'humilité par rapport à l'ensemble des événements auxquels nous sommes confrontés.

Néanmoins il est de notre responsabilité de positionner ces problèmes. Dans leur ensemble, les commissions de notre Assemblée sont concernées. Il y a des aspects juridiques et notre commission des affaires juridiques doit s'en saisir, suivant ses réflexions et proposer à notre Assemblée un certain nombre d'avancées, de cadres juridiques chaque fois que notre commission l'estimera nécessaire.

La commission des affaires technologiques ne doit pas ignorer les évolutions permanentes du sujet. Nous avons intérêt à les suivre pour être à un niveau d'information suffisant qui nous permettra d'exercer notre jugement.

La commission culturelle est concernée par les conséquences et les approches de ces technologies sur l'information, sur l'enseignement, sur la vie culturelle, sur la formation du citoyen.

La commission des affaires parlementaires et publiques, naturellement a le souci des conséquences de ces technologies sur le fonctionnement de la vie démocratique.

C'est donc l'ensemble de nos activités qui doit être dirigé en termes de réflexion et probablement en termes de propositions dans les mois et années à venir. Quel est l'essentiel ?

Les nouvelles technologies de communication et d'information sont des produits du génie humain, et comme de tous les produits du génie humain, on peut en faire un bon et un mauvais usage. L'objectif de notre assemblée doit être d'obtenir un bon usage, c'est-à-dire le service de nos concitoyens dont nous nous préoccupons dans l'ensemble de leur vie quotidienne. Les instruments doivent servir si possible le développement de la démocratie, du progrès économique, du progrès social, la justice et la paix. Notre réflexion doit porter sur les initiatives que notre Assemblée peut prendre aujourd'hui.

Naturellement l'approche proposée dans le projet de résolution est extrêmement modeste. Parce que nous devons être modestes ! Il ne faut pas vouloir combattre des moulins à vent contre lesquels nous n'aurions pas de sortie possible. Il faut donc, après avoir posé les principes - le service de la démocratie, du progrès économique et social, savoir comment nous pouvons avancer.

Nous devons poser quelques principes mais pour aboutir à quoi ? A ne pas créer des inégalités entre les citoyens d'un même pays, entre celui qui pourrait accéder à ces technologies de la communication et de l'information et celui qui serait laissé au bord du chemin. Il faut veiller à établir aussi un équilibre entre les pays qui pourraient financer l'ensemble de ces activités technologiques et ceux qui ne le pourraient pas.

Une fois ces principes posés, il faut aborder la question de la sphère publique et de l'initiative privée. Nous savons tous très bien que l'initiative privée sera à l'origine de beaucoup d'avancées. Il faut que nous protégions un espace public parce que l'intérêt général n'est pas toujours compatible avec la somme des intérêts particuliers. Nous devons rappeler ces principes.

A partir de là, des problèmes juridiques se posent. Des législations existent déjà dans différents domaines. Il ne s'agit pas de superposer des législations à celles qui peuvent déjà exister. Pas plus qu'il ne s'agit de poser des principes inacceptables ou des normes juridiques invérifiables.

Dès lors que les nouvelles technologies de la communication et de l'information s'affranchissent volontiers de normes juridiques parfois, des frontières en toute occasion, il faut donc vouloir "laisser l'église au milieu du village", selon la forte expression française.

Nous avons à travailler dans la réalité et à nous poser quelques questions tranquilles. Comment favoriser l'accès de l'ensemble de nos concitoyens à ces technologies ? Par le travail à l'école, par exemple, ou en offrant à toutes les collectivités publiques et territoriales des moyens d'accès aux différents instruments de communication et d'information.

C'est quelque chose de très pragmatique, de très simple qui figure dans le projet de résolution. Il faut naturellement mettre l'accent sur l'usage que l'on doit faire de ces instruments pour favoriser la participation des citoyens à la vie politique, pour améliorer la relation entre les élus et les citoyens.

Telle a été la préoccupation dominante de la commission des relations parlementaires et publiques, commission qui a apprécié les différents amendements. Sept amendements ont été soumis à l'appréciation de notre commission. Deux ont été acceptés sans difficulté, les autres ont été refusés. Un par principe, les autres parce que nous estimions qu'ils étaient déjà satisfaits par le texte. Inutile d'ajouter quelque chose qui se trouve déjà dans la résolution ! Nous avons été très heureux de la participation des autres commissions et certains amendements sont venus compléter la résolution présentée.

Les nouvelles technologies de la communication et de l'information créent probablement le début d'une nouvelle civilisation. Notre responsabilité consiste à examiner les différentes possibilités, toutes les utilisations positives et les utilisations négatives. C'est tout le problème de la responsabilité politique qui est posé. Je suis persuadé que notre commission sera entendue par l'Assemblée plénière. "

M. Claude BIRRAUX, député (UDF), au nom de la commission de la science et de la technologie, a rédigé un Avis qui expose que la société de l'information est le fruit d'un long processus fondé sur des découvertes qui se sont succédées depuis longtemps.

" De l'imprimerie de Gutenberg au XVe siècle à Internet au XXe siècle, ces inventions ont révolutionné la diffusion de l'information, de la culture et des progrès scientifiques. Mais aujourd'hui, la mutation s'est beaucoup accélérée par suite des percées de l'informatique, de la numérisation, conjuguées à une baisse du coût des équipements.

L'ère du multimédia et les facilités de communication qui en découlent ont pénétré tous les secteurs d'activité : culturel, éducatif, économique, privé, public. Au début réservé aux grandes entreprises, l'ordinateur est devenu un outil de travail diffusé dans les petites et moyennes entreprises, les professions libérales et parmi les étudiants. L'Etat et les collectivités locales voient dans les nouvelles technologies un moyen au service de la cohésion sociale et de l'aménagement du territoire par les multiples applications que sont le télétravail, les téléservices culturels, éducatifs, ou liées à la santé.

Dès lors, l'accès au savoir semble plus facile et donc plus démocratique. Le demos peut être plus étroitement associé à la vie de la cité par des réseaux locaux interactifs.

Je souligne l'énorme importance de ces nouvelles technologies, qui peuvent être très positives et qui constituent un secteur porteur en terme de croissance économique et d'emploi. Mais le continent nord américain, soutenu par ses pouvoirs publics, domine le marché. L'Europe s'est, à un moindre degré, lancée dans les années 80 dans un certain nombre de projets bien connus : le programme RACE de recherche sur les réseaux numériques à haut débit, le programme ESPRIT sur les technologies de l'information.

Il est clair que nous sommes devant un premier danger ou, si vous préférez, un énorme défi. L'avance notable d'un autre continent dans ce domaine ne risque-t-elle pas d'avoir pour conséquence la diffusion à l'échelle mondiale d'une seule culture, d'un seul mode de vie ? Nous sommes en droit de nous poser la question. L'industrie cinématographique, la télévision sont largement dominées par les Etats-Unis.

Un autre danger, peut-être encore plus important, dont certains collègues ont d'ailleurs déjà parlé, est l'absence de contrôle démocratique du contenu des informations. La diffusion sur Internet de réseaux de pédophilies, ou de propagande nazi, entre autres, pose très clairement le problème.

Certains objecteront la liberté d'expression, mais je tiens à rappeler que toutes les valeurs ont une hiérarchie et que celle-ci doit se concilier avec la primauté de la dignité de la personne humaine, des droits de l'homme en général et avec la protection de l'ordre public. J'ajouterai la primauté du respect du droit des enfants.

C'est pourquoi je tiens à redire devant cette assemblée combien il me semble indispensable de mettre en place en Europe des cadres institutionnels et juridiques pour présenter des garanties contre un certains nombres de dérives. Il y va de l'avenir de la démocratie, auquel le Conseil de l'Europe est très attaché depuis sa fondation, il y a presque cinquante ans. La propagation d'informations tous azimuts, sans restriction, sans garantie, ne peut pas être la démocratie du XXe siècle.

Naturellement, il est impossible d'empêcher l'usage des nouvelles technologies, qui, je le répète ont des aspects très positifs, mais il nous faut construire le cadre juridique qui permette aux idéaux démocratiques que notre assemblée entend promouvoir de se développer et s'épanouir aux travers des nouveaux moyens, aux travers de la démocratie électronique. "

M. Jean-Pierre MASSERET, sénateur (Soc), répond aux orateurs au nom de la commission des relations parlementaires et publiques :

" J'exprime des remerciements aux collègues qui ont bien voulu intervenir dans ce bref débat sur un sujet important, un sujet de civilisation. Il est d'ailleurs dommage que nous ayons si peu de temps pour le traiter.

Des désaccords ont été soulignés, et c'est bien parce qu'il s'agit d'un sujet de société qui appelle des réflexions à caractère idéologique pour certains d'entre nous. Il est donc tout à fait naturel que s'expriment ici des oppositions nettes et tranchées.

Personnellement je n'éprouverais aucun regret et aucun malaise à être battu sur un texte : c'est chose normale en démocratie qu'une majorité et une minorité puissent s'exprimer. Simplement il conviendrait de distinguer le projet de résolution et l'exposé des motifs. Celui-ci engage directement le rapporteur. Il comporte des analyses qui reflètent mes positions personnelles et mes vues sur tel ou tel sujet. Quant au projet de résolution, il est pour l'essentiel à l'eau de rose. Il recherche un consensus minimum dans cette assemblée sur des sujets qui n'appellent pas entre nous de grandes divergences sur les problèmes d'éducation, par exemple, eu égard à l'intérêt de ces nouvelles technologies et aux difficultés qu'elles posent.

Parfois, j'ai été taxé de pessimisme parce qu'effectivement j'ai eu tendance à mettre le doigt sur des sujets qui me paraissaient être des sujets de préoccupation. Quand les choses vont bien, on n'en parle pas. On parle plus volontiers des choses qui préoccupent que des choses qui paraissent aller naturellement de soi.

A d'autres moments, on a dit que j'étais plutôt optimiste. On nous a même assimilés à des prophètes, mais sans la pertinence des prophètes de la Bible. Cela veut dire tout simplement que nous sommes dans un sujet extrêmement délicat dont personne n'a en réalité la maîtrise, que nous évoluons à une vitesse extraordinaire - probablement plus vite que nos systèmes de pensée et de réflexion - et que personne ne peut dire comment les choses seront faites demain. Mais notre responsabilité d'hommes et de femmes politiques consiste à essayer quand même de poser des questions.

Je m'accorde à reconnaître avec mon collègue, M. Probst, que nous nous posons quasiment les mêmes questions. Si je suis en désaccord avec la commission des questions économiques et du développement, c'est parce qu'un point me trouble. Mon collègue rapporteur s'interroge : pourquoi instituer des contrôleurs sur Internet ? Qui contrôlera les contrôleurs ? Si l'on poursuit cette logique jusqu'au bout, il n'y a plus de règles nulle part puisqu'une règle est nécessairement appelée à être contrôlée par un certain nombre de personnes à qui l'on confie une mission de contrôle et que l'on suspecte a priori de devoir réunir cette mission avec justesse et sous éventuellement le seul contrôle qui compte, à savoir nous qui assurons ici la représentation nationale, celle des citoyens de nos pays respectifs.

Mme Bribosia-Picard a bien noté, me semble-t-il, à travers l'exemple du cryptage, toute la difficulté du sujet parce qu'il faut concilier à la fois la confidentialité et le contrôle. Le système du cryptage assure la confidentialité, mais il faut aussi assurer le contrôle. Je suis convaincu qu'aucun système de cryptage ne résistera au génie humain parce qu'il est lui-même le produit du génie humain. Il est toujours démontré que ce que l'homme entreprend il est capable de le surpasser, de surmonter, à un moment donné, la difficulté et de trouver la solution. Nous sommes face à une donne de civilisation qui heurte notre capacité de jugement. C'est de cela qu'il faut se méfier.

Les propos tenus par mes collègues rapporteurs ont toujours été frappés au coin du bon sens, de la pertinence. J'espère que nous parviendrons à un accord sur les amendements, et si tel n'est pas le cas, la terre continuera, malgré tout, de tourner ! Certes, nous serons soumis aux mêmes préoccupations et nous devrons nous exposer pour trouver les réponses démocratiques à cette société.

Je suis cependant d'accord pour reconnaître avec vous que les nouvelles technologies de communication et d'information présentent de fantastiques potentialités. Certes, je ne les ai peut-être pas assez soulignées dans ce rapport, mais je viens de m'en expliquer à l'instant.

S'agissant des amendements déposés sur l'article 1 du projet de résolution, il est possible, me semble-t-il, de trouver ensemble des termes d'accord. J'ai déposé à l'instant un texte synthétisant deux amendements présentés l'un par la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, l'autre par la commission de la culture et de l'éducation. Je crois que l'on peut parvenir à un compromis satisfaisant, du moins sur ce thème-là.

Pour le reste, j'exprimerai tout à l'heure le sentiment de la commission des relations parlementaires et publiques sur les amendements. "

Après observations de M. Jean-Pierre MASSERET, sénateur (Soc) , sur les amendements, certains étant adoptés, la résolution 1120 contenue dans le rapport 7772 a été adoptée, amendée , au terme de ce débat .

La directive 531 a été adoptée sans amendement.

8. Instruments de la participation des citoyens dans la démocratie représentative - Intervention de M. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC) (Mardi 22 avril)

Selon le rapporteur, - un fossé qui ne cesse de s'élargir entre les citoyens et les hommes politiques, - une absence de véritable participation des électeurs : ces deux constatations forment le point de départ de ce rapport, qui examine différents modèles de démocratie directe appliqués dans les Etats membres du Conseil de l'Europe.

Les référendums permettent une participation de tous les citoyens à la démocratie et leur usage devrait être développé. Toutefois, ils ne sont efficaces et équitables que si les électeurs sont correctement informés et qu'un équilibre est respecté entre l'exercice du pouvoir politique et le rôle des citoyens.

Le rapport engage les gouvernements à favoriser la démocratie représentative par diverses mesures, notamment :

- considérer pratiquement tous les sujets comme susceptibles de donner lieu à un référendum ;

- établir une distinction entre les référendums entraînant une décision et les référendums purement consultatifs ;

- prévoir la possibilité d'organiser des référendums sur l'abrogation de lois en vigueur ;

- veiller à ce que les citoyens soient correctement informés ;

- limiter le nombre de référendums tenus simultanément ;

- faire précéder tout référendum d'un débat au parlement ;

- fixer un seuil de participation afin de s'assurer que le résultat est représentatif ;

- permettre à des groupes minoritaires d'avoir l'initiative d'un référendum s'ils réunissent un nombre de signatures supérieur à un seuil.

M. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC), prend alors la parole dans ce débat :

" Je voudrais tout d'abord féliciter notre rapporteur dont les travaux approfondis et l'expérience viennent enrichir notre réflexion sur le fonctionnement du système démocratique.

Je partage, pour l'essentiel, les éléments du projet de résolution qui nous est soumis.

Ainsi, notre assemblée préconiserait l'élargissement des modes de participation directe des citoyens à la vie politique. En clair, nous inviterions les Etats membres de notre Organisation à développer l'usage du référendum, y compris le référendum d'initiative populaire.

Je crois cependant fort sage l'introduction de nuances par notre rapporteur lui-même ; ainsi, tout en considérant que, je cite, " tous les sujets sont susceptibles d'être soumis à référendum ", notre rapporteur a la sagesse de tempérer cet élargissement par une restriction qui me semble particulièrement opportune, puisque ne pourraient être soumis à référendum les sujets, je cite là encore, " qui mettent en cause des valeurs universelles et intangibles telles que les droits de l'homme " selon la définition de la Déclaration de l'ONU et de notre Convention européenne des Droits de l'Homme.

Dans mon propre pays, nous avons récemment procédé à la réforme des dispositions constitutionnelles qui régissent le référendum. Par un consensus entre les principaux groupes politiques représentés au Parlement, les questions susceptibles d'être soumises directement aux électeurs par référendum ont été élargies à " tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique ou sociale de la Nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d'un Traité... ".

A contrario , sont donc exclus les sujets qui touchent directement aux droits de l'homme. Je crois cela doublement sage puisque, d'une part, dès lors qu'il s'agit des droits de l'homme consacrés par les grands textes internationaux comme par le préambule de la Constitution française, la loi ne saurait y déroger, qu'elle émane du Parlement ou du référendum ; d'autre part, dans des périodes de fragilisation du lien social, un référendum portant sur une question aussi grave pourrait consacrer et aggraver la fracture de la communauté nationale.

Pour la même raison, je suis, quant à moi, réservé sur l'organisation de consultations nationales à la demande d'une fraction des citoyens.

La consultation facultative , au niveau local, des citoyens sur certaines décisions d'aménagement peut apporter d'utiles éclairages aux élus en charge de la décision à prendre.

Mais prenons garde à ne pas donner au référendum un rôle qui fragiliserait les mécanismes de la démocratie représentative en apparaissant comme une sorte de procédure d'appel concurrente avec le mode éminent de représentation de la volonté générale qu'exprime le Parlement.

En effet, régulièrement soumis à travers les élections au renouvellement de sa légitimité, le Parlement est le cadre le plus approprié pour l'élaboration des grandes lois appelées à régir la vie nationale. En France, la refonte du code pénal ou l'élaboration d'un droit de la bioéthique n'ont pas pris moins de trois ou quatre années de débats parlementaires. Je rappelle que ces débats se déroulaient publiquement et ont permis de très fructueux échanges et l'enrichissement des projets du Gouvernement par des amendements venus de tous les groupes politiques avant l'adoption de ces textes importants à une très large majorité.

Je ne crois pas qu'une consultation populaire unique aurait permis de parvenir à un résultat aussi satisfaisant et je pense même que dans certains cas le référendum peut quelque peu caricaturer la démocratie qui, au contraire, ressort plus vivante de débats prolongés, pour peu qu'ils se tiennent sous les yeux des citoyens.

Je félicite donc notre rapporteur de formuler ses suggestions en ménageant une large marge d'appréciation aux Etats membres dans le recours aux instruments de la démocratie directe. Dans cet esprit, je voterai le projet de résolution qu'il nous propose. "

La résolution 1121 contenue dans le rapport 7781, amendée, est adoptée.

9. Progrès de la réforme économique en Europe centrale et orientale - Interventions de MM. Jean BRIANE, député (UDF) et Jean-Pierre MASSERET, sénateur (Soc) (Mercredi 23 avril)

La Conférence de l'Assemblée parlementaire tenue en 1996 à Varsovie a permis d'examiner les progrès accomplis par les pays d'Europe centrale et orientale sur la voie des réformes économiques.

Le présent rapport indique que certains pays ont fait des progrès notables : les économies polonaise, slovaque et roumaine ont connu une croissance de 7 % en 1995, et plusieurs autres ont progressé de 5 %. En revanche, certains pays ont du mal à instaurer une économie de marché ; un addendum au rapport donne notamment une image assez sombre de la situation en Albanie et en Bulgarie.

Selon le rapport, les réformes devraient se poursuivre en fonction des conditions prévalant dans chacun des pays. Toutefois, l'absence de soutien international pourrait mettre en danger la démocratie ; il faut donc impérativement protéger les groupes les plus vulnérables de la société par des politiques nationales et par un soutien international.

Le rapport préconise :

- la stabilité et la légitimité démocratique des institutions politiques ;

- une législation claire, que l'on puisse faire respecter, et qui régisse l'ensemble de la vie économique, y compris les faillites et les investissements étrangers directs ;

- des programmes de privatisation qui garantissent un régime de propriété équitable et la loyauté de la concurrence ;

- la promotion des petites et moyennes entreprises ;

- la protection des groupes vulnérables, et un régime spécial pour les familles comptant des enfants en bas âge ;

- le développement de l'enseignement et des possibilités de se recycler ;

- la protection de l'environnement et les économies d'énergie ;

- l'amélioration du système bancaire grâce à la privatisation de banques publiques et à la création de nouvelles institutions financières privées ;

- une meilleure administration fiscale ;

- l'intensification du commerce au sein des régions, et une plus grande ouverture des échanges commerciaux avec l'Europe occidentale.

M. Jean BRIANE, député (UDF), intervient en ces termes dans le débat :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à féliciter mes collègues pour leurs rapports tout à la fois riches et complets.

La conférence de Varsovie a permis de dresser un nouveau bilan des réformes économiques engagées dans les pays d'Europe centrale et orientale.

La chute du mur de Berlin en novembre 1989, a signifié pour ces pays la possibilité immédiate de s'engager sur la voie du changement politique et économique. A ce titre, les sondages réalisés par la Commission européenne me semblent tout à fait intéressants puisque, si la majorité des personnes interrogées considère que l'économie de marché est le seul avenir possible pour leurs pays, elle se déclare en revanche beaucoup moins favorable concernant les droits de l'homme et l'évolution de la démocratie.

Certes, il ne s'agit que d'un sondage, mais je le trouve assez révélateur de la situation de ces pays. Les réformes économiques incessantes depuis six ans déjà, commencent à porter leurs fruits, contrastant sans doute avec l'évolution sociale tant attendue en termes de niveau de vie et de libertés fondamentales. Or, c'est la revendication de droits réels et non purement formels qui est à l'origine du renversement des gouvernements communistes. Nous souhaiterions à ce sujet faire quelques remarques.

En premier lieu, les pays d'Europe centrale et orientale ont réalisé d'importants efforts et remporté de notables succès dans le domaine économique. L'adhésion de la République tchèque, de la Hongrie et de la Pologne comme membres de l'OCDE en témoigne, certains parlant déjà de "post transition".

Toutefois, l'amélioration générale demeure assez disparate, chacun se différenciant par la façon dont il combine politique monétaire, financière et de change.

La transition économique des ex-pays du bloc soviétique s'accompagne d'un coût social important, où chômage, baisse du niveau de vie et absence de protection sociale se cumulent.

Dès lors, le danger existe de voir se produire, à cause de l'attirance de conditions d'existence plus favorables, une fuite des cerveaux à l'étranger et une désorganisation des équipes de chercheurs. Or, ces pays ont un besoin fondamental de leurs élites scientifiques pour assurer la transition économique.

C'est pourquoi mon collègue M. Claude Birraux avait proposé en janvier 1996 la création d'un observatoire sur la coopération scientifique et technique permettant de suivre la réorientation du potentiel scientifique vers les besoins civils et la coopération avec l'Ouest.

Si l'on s'en tient à l'exemple du nucléaire, les instruments de coopération peuvent être très nombreux : de l'assistance pour la mise en place d'une autorité de sûreté à l'échange de cadres et de techniciens.

En deuxième lieu, nous souhaiterions mettre l'accent sur la finalité de cette transformation économique. Le développement économique n'est pas une fin en soi mais un moyen au service du progrès en général et du progrès social en particulier. Il est évident aussi que le maintien d'une cohésion sociale contribue au développement économique.

C'est pourquoi, nous pensons que des efforts particuliers doivent être menés dans le domaine de la protection sociale, notamment à l'égard des catégories les plus vulnérables de la population. C'est une condition indispensable à la poursuite du processus de transformation de l'économie. Nous tenons à rappeler, comme le rapporteur, la Charte sociale européenne du Conseil de l'Europe qui prévoit entre autres le droit à la protection sociale pour l'ensemble de la population et une protection particulière en-dehors du milieu du travail pour les enfants et les personnes âgées.

En revanche, la transition économique a des retombées positives en matière d'environnement. Ces pays sont, pour la plupart, déjà signataires de la Charte internationale de l'énergie. Celle-ci dispose en effet, conformément aux principes posés par le Conseil de l'Europe, que la mise en valeur des ressources énergétiques devra être respectueuse de l'environnement.

L'adhésion à de telles dispositions manifeste une double volonté de changement : un changement des modes de production jadis axés sur une industrie lourde, polluante et obsolète pour se rapprocher du fonctionnement de celui des économies de marché ; un changement politique où le concept de sûreté à l'Est tend à se rapprocher du concept occidental, ce qui est un gage d'ouverture à la démocratie.

Des résultats sensibles ont été obtenus pour nombre de ces pays, même si la Russie a encore de vastes régions menacées par la pollution. Le risque nucléaire est toujours largement présent, de nombreux réacteurs non conformes aux normes occidentales étant en fonctionnement.

En conclusion, nous estimons que les progrès des réformes économiques dans les PECO ne sauraient se mesurer au seuls critères de l'économie de marché et de la privatisation au sens ultralibéral.

La prise en compte de la dimension sociale, environnementale, énergétique doit compléter l'aspect économique. A cette seule condition, les réformes économiques accompagneront et renforceront la voie vers la démocratie et le changement d'échelle des valeurs par rapport aux régimes communistes.

Voilà les observations qu'avec mon collègue Claude Birraux, nous souhaitions exprimer ce matin devant cette Assemblée. "

M. Jean-Pierre MASSERET, sénateur (Soc), intervient à son tour :

" Je crois ce débat particulièrement opportun :

- à la fois parce qu'il donne un large écho aux travaux de la Conférence parlementaire de Varsovie l'année dernière ;

- et aussi parce que le désastre albanais montre que le " laisser-faire, laisser-passer " ne saurait à lui seul apporter une réponse aux aspirations d'un peuple.

L'addendum au rapport qui expose l'aggravation de la situation économique en Albanie et en Bulgarie nous rappelle que la transition vers la démocratie et l'économie de marché ne peut pas relever de la mise en oeuvre abstraite d'un chapitre de cours de macro-économie.

J'apprécie, pour ma part, la formulation du projet de résolution. Notre rapporteur souligne, à juste titre, la nécessité de tenir compte de la protection des groupes les plus vulnérables : personnes âgées ou handicapées, chômeurs ou encore famille comportant de jeunes enfants.

Je ne peux qu'approuver également l'invitation aux pays d'Europe centrale et orientale d'établir une économie de marché tenant compte de la protection de l'environnement, d'une utilisation rationnelle de l'énergie ; ou encore d'établir un système bancaire, une fiscalité, un régime des investissements nationaux et étrangers présentant les garanties nécessaires au fonctionnement d'une économie de marché.

Tout au plus, je m'interroge sur l'invitation adressée aux seuls " Etats membres du Conseil de l'Europe, de faciliter l'accès de leurs marchés aux exportations des Etats d'Europe centrale et orientale, en particulier en ce qui concerne les produits agricoles et d'éviter toute mesure protectionniste ". La même invitation ne pourrait-elle être adressée aux Etats qui ont demandé le statut d'observateur au Conseil de l'Europe : les Etats-Unis d'Amérique, le Canada ou le Japon, dont les économies devraient s'ouvrir également, y compris aux exportations agricoles ?

Je voterai ce projet de résolution, mais en souhaitant que ses destinataires réfléchissent également à l'addendum consacré à l'Albanie et à la Bulgarie. La situation de ces deux Etats montre que la transition vers l'économie de marché ne peut se faire dans l'anarchie, menée par la seule " main invisible " des forces du marché. Pour être, de fait, plus ou moins invisible, cette main n'est pas toujours innocente. L'Albanie et la Bulgarie sont toutes deux membres pléniers de notre organisation. Comment ne pas être consterné de la situation actuelle, des espoirs déçus, des efforts anéantis parce que nous n'avons pas su accompagner suffisamment l'instauration d'un Etat de droit en même temps que la libération des forces du marché dans des pays si peu préparés à ce choc. Un Etat de droit, c'est aussi une communauté nationale où est respectée la foi publique, c'est-à-dire où les salaires et les retraites sont payés, où les épargnants ne sont pas bernés par des publicités mensongères et finalement ruinés.

Peut-être devrions-nous faire évoluer les programmes de coopération avec les pays d'Europe centrale et orientale au fur et à mesure de l'adoption des textes organisant les pouvoirs publics, afin d'aider ces pays à mettre en oeuvre, par exemple, la résolution 1005 que nous avions adoptée en 1993 pour les inviter à accorder " une attention particulière à la nécessité de mettre en place une législation appropriée dans le secteur de la propriété privée, du commerce et de l'industrie, ainsi qu'un ordre juridique équitable et contraignant... ".

De même que l'appropriation collective des moyens de production avait peu à peu paralysé tout développement économique dans ces pays, la dérégulation anarchique a ruiné une deuxième fois des Etats déjà en grande difficulté.

Vous ne vous étonnerez pas mes chers collègues, que je souhaite que cette résolution s'accompagne d'une réflexion politique à côté de l'exhortation à, je cite, " reprendre de plus belle " les efforts de réforme déjà entrepris.

Je regrette seulement que cette réflexion politique se développe dans l'urgence car elle est toujours indispensable. "

Après amendement, la résolution 1122 figurant dans le rapport 7712 est adoptée à l'unanimité.

10. Traite des femmes et prostitution forcée dans les Etats membres du Conseil de l'Europe (Mercredi 23 avril)

Selon le rapport de Mme Renate WOHLWEND, le phénomène de la traite des femmes et de la prostitution forcée se déroule " à une échelle ahurissante ". Pour la seule année 1995, au moins 500.000 femmes auraient été victimes de la traite en direction d'Etats membres de l'Union européenne (chiffres de l'Organisation internationale des migrations). Depuis 1989, la part de femmes venant d'Europe centrale et orientale a plus que triplé. La traite est si lucrative et le taux de condamnation si faible qu'un nombre croissant de groupes criminels se sont engagés dans cette activité, qui leur permet par ailleurs de développer d'autres activités criminelles telles que le trafic de drogue ou d'armes. Le rapporteur souligne qu'il s'agit là d'une évolution très alarmante contre laquelle il faut prendre des mesures urgentes, d'autant plus que la coopération internationale entre les Etats membres du Conseil de l'Europe n'est pas à la hauteur de l'internationalisation croissante des groupes criminels.

Parmi les solutions possibles, le rapporteur préconise un accroissement de la coopération policière et judiciaire bilatérale ou multilatérale, l'instauration d'organes de police spécifiques, des mesures de saisie et de confiscation des bénéfices des délits, et la fermeture des établissements dans lesquels des victimes sont exploitées sexuellement.

Mais elle recommande surtout l'élaboration d'une convention du Conseil de l'Europe qui, centrée sur les droits de la personne humaine, devrait énoncer des mesures répressives destinées à combattre la traite notamment par une harmonisation des législations ainsi que la communication, la coordination et la coopération policière et judiciaire. Elle devrait également prévoir des possibilités d'assistance juridique, médicale, psychologique et de protection physique pour les victimes de la traite surtout lorsqu'elles sont prêtes à témoigner devant un tribunal (octroi de permis de résidence temporaire par exemple). La convention devrait, en outre, instaurer un mécanisme pour contrôler le respect de ses dispositions et coordonner la lutte sur le plan européen.

La recommandation 1325 contenue dans le rapport 7785, amendée, est adoptée à l'unanimité.

11. Respect des obligations et engagements contractés par la Roumanie - Intervention de Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc), rapporteur pour avis de la commission des relations avec les pays européens non membres (Jeudi 24 avril)

Le Rapport invite l'Assemblée à constater les progrès considérables accomplis par la Roumanie dans le respect des obligations et engagements qu'elle a contractés depuis qu'elle est devenue membre du Conseil de l'Europe le 7 octobre 1993. La Roumanie a ratifié, en particulier, la Convention européenne des Droits de l'Homme et tous ses protocoles y compris le Protocole 6 (abolissant la peine de mort), le Protocole 11 (qui instaurera une Cour unique), la Convention européenne pour la prévention de la torture et la Convention pour la protection des minorités nationales.

Par ailleurs, la Roumanie a fait connaître son intention de ratifier prochainement la Charte européenne de l'autonomie locale et la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, ainsi que plusieurs conventions dans les domaines du droit pénal et de l'enseignement.

Le rapporteur, M. Gunnar JANSSON (Finlande) observe cependant que la Roumanie doit encore résoudre un certain nombre de problèmes. C'est pourquoi le texte soumis à la discussion de l'Assemblée demande à la Roumanie :

- de modifier certaines dispositions du Code pénal qui mettent en cause l'exercice des libertés fondamentales (par exemple, l'article 200 relatif aux actes homosexuels et les articles 205, 206, 238 et 239 relatifs à l'insulte et à la diffamation qui constituent notamment une atteinte à la liberté de la presse) ;

- de poursuivre sa réforme judiciaire afin de garantir l'indépendance de la justice et de clarifier le rôle du Parquet ;

- d'améliorer les conditions de détention déplorables qui règnent dans les prisons et de modifier les dispositions législatives qui permettent les abus de la détention provisoire ;

- d'améliorer les conditions des enfants abandonnés dans les institutions de l'Etat, de faciliter leur adoption et de développer une campagne contre l'abandon ;

- de modifier la législation afin de restituer les biens confisqués notamment aux particuliers et aux Eglises ou, à défaut, de prévoir un dédommagement équitable ;

- d'engager une lutte efficace contre le racisme, la xénophobie et l'intolérance et d'adopter toutes mesures utiles en faveur de l'intégration sociale de la population Roumaine.

L'Assemblée, considérant que la Roumanie a respecté ses engagements les plus importants, propose de clore la procédure de suivi. Elle se réserve cependant la possibilité de rouvrir cette procédure si dans un an, ses recommandations n'étaient pas respectées ou si des évolutions significatives le justifiaient.

Le rapporteur propose également que l'Assemblée demande au Comité des ministres de seconder la Roumanie dans ses efforts notamment dans le cadre du programme conjoint de coopération entre le Conseil de l'Europe et la Commission européenne pour la réalisation de sa réforme pénitentiaire, l'organisation d'une campagne d'information contre l'abandon de enfants et la lutte contre le racisme, la xénophobie et l'intolérance.

Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc), rapporteur pour avis de la commission des relations avec les pays européens non membres, fait les observations suivantes en présentant son rapport :

" Je voudrais insister sur deux points évoqués par mon collègue, M. Schwimmer. Effectivement, au sein de cette commission, nous avons travaillé dans une très grande harmonie. J'en remercie mes collègues, ainsi que le secrétariat qui a fait un travail exemplaire.

M. Schwimmer a insisté sur quelques anecdotes qui traduisent bien l'ambiance qui règne en Roumanie. Un certain nombre de choses changent très vite en ce moment. Nous éprouvons beaucoup de sympathie pour ce pays, pour ce peuple qui a vécu comme les autres, et parfois plus que les autres, un certain nombre de problèmes délicats qu'il est difficile d'évacuer complètement et rapidement.

Au nom de la commission des relations avec les pays européens non membres, j'exprime un avis favorable au document proposé et à la clôture de la procédure de suivi relevant de la directive 508, étant entendu que la Roumanie a rempli nombre d'obligations. Elle ne les a pas toutes assumées, mais la tendance est extrêmement positive. Nous manifestons donc toute notre confiance à ce pays.

Je vais maintenant revenir sur un problème douloureux évoqué par M. Schwimmer : parce que c'est un problème et parce qu'il est douloureux. Il s'agit des enfants abandonnés qui vivent dans l'enfermement. S'ils ne sont pas placés dans des orphelinats, ils errent carrément dans la rue. Les chiffres, certes approximatifs, sont significatifs : il existe environ 600 institutions et entre 40 000 et 100 000 enfants seraient abandonnés et placés. Actuellement, 20 000 enfants seraient encore abandonnés chaque année.

Comme l'a rappelé notre collègue, M. Schwimmer, il y a, à l'origine, une loi datant des années 70, et donc votée sous Ceaucescu. Elle obligeait les femmes et les familles à procréer et à avoir au minimum cinq enfants, pour que la population de la Roumanie puisse doubler, étant entendu que ces enfants seraient abandonnés dans un réseau d'institutions d'Etat. Le problème est que le réseau existe toujours et la loi aussi !

La Roumanie a ratifié, et c'est à son honneur, la Convention de l'ONU sur les droits de l'enfant et elle a déclaré que le milieu normal pour l'épanouissement de l'enfant est la famille. Certes, c'est un progrès, mais ce n'est pas suffisant puisque le nombre des enfants abandonnés est toujours important et ne diminue pas.

Naturellement, la situation économique est difficile. Sachant que les abandons sont toujours très nombreux, j'aurais tendance à dire à nos amis roumains : attention ! il est impératif d'avoir une prise de conscience plus forte de ce problème douloureux et vraiment difficile pour vous. Il ne faut pas qu'il ternisse l'image de la Roumanie. Il faut que s'exprime une volonté politique plus forte.

Or, je n'ai pas senti, au moment des élections, que ce problème était au coeur des préoccupations. En revanche, lors de notre dernier voyage en Roumanie, j'ai pu voir quelque chose que je n'avais pas encore vu précédemment : des affiches qui montraient une jolie tête d'un petit enfant blond demandant : Qui veut m'adopter ?

Une campagne est actuellement menée mais, je le répète, il faut une démarche politique plus offensive et plus volontariste ; ce problème l'exige. Naturellement, en termes politiques, la législation est complexe. Trois lois sur l'adoption datant de 1990, 1991 et 1993 ont été effectivement promulguées, mais la loi communiste de 1970 demeure en vigueur et elle bloque le processus de l'adoption. Il faut sortir de ces contradictions, de cette complexité. Certes, il est facile de dire : il faut, il faut, il faut pourtant bien trois choses.

En premier lieu, il faut une politique de prévention de l'abandon commençant par une réelle politique de la contraception. Si la contraception est libre, elle n'est cependant pas possible dans ce pays sans information et sans formation. Une vraie politique de la prévention de l'abandon passe aussi hélas ! par un certain nombre de considérations économiques.

En deuxième lieu, il faut une vraie politique de placement familial. Ce qui signifie qu'il faut mettre un terme à l'enfermement des enfants dans des instituts, qui se traduit par des problèmes psychologiques irréversibles. Le processus est actuellement engagé puisqu'il existe effectivement des lois. Je pense notamment à une allocation consentie par l'Etat depuis 1993 aux familles pour recueillir des enfants, lesquels seront ainsi placés dans ces familles. Il s'agit d'un processus non pas d'adoption mais de placement, ce qui marque déjà un progrès.

En troisième lieu, il faut une politique de l'adoption. Je comprends que les Roumains souhaitent observer une certaine prudence dans ce domaine : il faut éviter tout trafic, tout commerce, tout profit. Il n'en demeure pas moins urgent et indispensable que ces enfants puissent grandir dans le milieu familial.

Aidons les Roumains. L'Union européenne le fait dans le cadre du projet PHARE. De nombreuses associations - j'en connais en France - le font. Le Conseil de l'Europe doit le faire davantage. Le Fonds de développement social peut le faire. Je proposerai que, dans ce cas très concret, le Fonds de développement social vienne en aide à la Roumanie et cherche, dans le cadre des institutions, des orphelinats ou de l'aide aux familles, des moyens d'intervenir.

Amis Roumains, vous avez toute notre sympathie, vous le savez. Nous voyons vos efforts et nous les encourageons. Vous avez également toute notre confiance. Je pense que vous la méritez. "

A l'issue du débat, la résolution 1123, amendée, et la recommandation 1326 contenues dans le rapport 7795 sont adoptées.

12. Protection et renforcement des droits de l'homme, des réfugiés et des demandeurs d'asile en Europe (Jeudi 24 avril)

Ces dernières années ont vu le nombre de demandeurs d'asile augmenter régulièrement dans les Etats membres du Conseil de l'Europe : en 1992, treize pays industrialisés d'Europe ont reçu 692 686 demandes contre 65 400 en 1983.

Parallèlement, les difficultés économiques et les tensions sociales ont rendu l'opinion publique de plus en plus hostile aux arrivées massives de demandeurs d'asile et ont conduit les Etats à modifier leur législation pour la rendre plus restrictive.

Dans de nombreux pays, les procédures appliquées en la matière ont cessé d'être conformes aux normes minimales sur certains points fondamentaux.

Le rapport propose que ces normes protègent davantage les droits de l'homme des réfugiés et sauvegardent le plus important d'entre eux : le principe de non-refoulement. Il préconise la coordination des politiques et l'harmonisation des législations en matière d'asile à l'échelle de l'Europe, par la conclusion d'un accord contraignant entre les Etats membres du Conseil de l'Europe.

Il faudrait également prendre des mesures pour améliorer les conditions de détention et d'expulsion, et pour s'opposer à tout acte de racisme, de xénophobie, d'antisémitisme et d'intolérance.

A l'issue du débat, la recommandation 1327 contenue dans le rapport 7783, après amendements, est adoptée.

13. Etat d'urgence en Albanie - Intervention de M. Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI) (Jeudi 24 avril)

Présentant ses observations, le rapporteur rappelle que la commission s'est rendue à Tirana pour la deuxième fois au début du mois d'avril et y a constaté que la situation s'était nettement améliorée, même si les inquiétudes restent vives. Le climat entre les partis politiques, aussi, est bien meilleur, mais il faut rappeler qu'ils ont une lourde responsabilité à porter. Le rapporteur se réjouit de la bonne coopération au sein du gouvernement de coalition. Il est heureux de la présence des représentants du parti socialiste albanais, ce qui signifie qu'ils vont contribuer à donner des ailes au processus de démocratisation dans leur pays. Depuis quelques jours, la force de protection multinationale soutient fortement le retour à la normale et il faut rendre hommage à l'Italie et aux pays qui ont envoyé des hommes sur place.

On ne peut qu'être déçu que l'Union européenne ait mis tant de temps à agir, alors que le Traité de Maastricht le lui imposait pourtant.

Le rapport énonce les conditions qui devront être remplies pour que la campagne électorale et les élections à venir se déroulent de façon libre et équitable afin que les résultats ne puissent être mis en doute ni en Albanie ni à l'extérieur. Le Conseil de l'Europe devra envoyer un grand nombre d'observateurs.

Des inquiétudes peuvent être nourries quant à la situation dans le sud du pays. Il faudra faire des efforts pour que tous les intéressés oeuvrent à la restauration de pouvoirs locaux légitimes.

La coopération internationale semble insuffisante. L'UEO ne joue pas le rôle qui devrait être le sien et semble, comme l'OSCE, vouloir limiter l'intervention du Conseil de l'Europe.

La priorité à court terme du processus de normalisation et de démocratisation est bien le déroulement démocratique et régulier des élections dans ce pays que l'on aimerait voir devenir membre à part entière.

M. Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI), intervient dans ce débat en ces termes :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, puisque plusieurs orateurs précédents ont évoqué des génocides, permettez-moi, en ce jour anniversaire du génocide arménien de 1915, d'avoir une pensée pour toutes les victimes de tous les génocides, en particulier de tous ceux qui ont frappé des Européens. J'en viens à mon propos.

Pour la première fois, à ma connaissance, nous débattons de la situation intérieure d'un Etat ayant le statut de membre plénier de notre Organisation, un Etat en proie à l'anarchie, voire à des menaces de guerre civile. Comment est-ce possible, alors même que l'appartenance à notre Organisation devrait symboliser à la fois la reconnaissance et la garantie de l'établissement d'un Etat de droit, c'est-à-dire d'abord du règlement pacifique de conflits et de divergences politiques ? Il est normal de voir apparaître des conflits d'intérêts dans toute société.

La crise albanaise illustre, à mes yeux, l'incapacité des Etats européens à mettre en place des stratégies globales de prévention des crises qui, bien naturellement, dégénèrent en conflits ou en guerres civiles.

Comment peut-on nous faire croire que cette crise n'était pas prévisible ? Depuis un an, le FMI et la Banque mondiale nous ont alertés des risques d'effondrement de ces sociétés pyramidales.

Comment ne pas prévoir le soulèvement populaire qui déboucherait naturellement de ce fiasco politico-financier quand on sait que la somme totale de l'épargne collectée représente plus de la moitié du PNB albanais ? Il ne faut être ni voyant, ni expert financier pour prévoir une telle catastrophe.

Enfin, on peut ajouter à tout cela un pouvoir qui a manifesté une totale irresponsabilité - n'en déplaise à nos collègues ! - sa complice inaction ayant miné l'image de la démocratie libérale et de l'économie de marché que nous vantons depuis maintenant des années au peuple albanais.

Les Européens, en particulier l'Union européenne, ont péché par manque de lucidité, de courage et d'engagement envers ce pays dont l'ancrage à l'Europe est désormais fragilisé. La prévention de ce type de crise et celles potentielles, liées aux multiples trafics mafieux en Europe, à la fragile transition économique des PECO et à la sécurité nucléaire, implique une action de la part de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe. Pourquoi trouve-t-on toujours de l'argent et des soldats une fois que le pays est à feu et à sang ? Pourquoi n'en trouve-t-on pas ou rarement avant pour prévenir les incendies ? S'est-on aperçu que les fameuses opérations de maintien de la paix ne sont que le symbole de l'échec de ce que les occidentaux osent appeler la diplomatie préventive ? Ces opérations militaro-humanitaires nous permettent d'avoir bonne conscience, mais les dépenses qu'elles engendrent pourraient être mises au service d'une intelligente et courageuse politique de prévention.

S'agissant de l'Albanie, je pense que la force multinationale devrait rester jusqu'à ce que le désarmement de la population civile soit effectif. Le climat d'insécurité mine les chances d'un retour à la normale pour le fonctionnement des institutions nationales et locales de ce pays.

Ensuite, le FMI et l'Union européenne doivent mettre en place rapidement un plan de reconstruction de l'économie et exiger la condamnation des dirigeants des sociétés pyramidales, ainsi que l'indemnisation des milliers d'épargnants spoliés. C'est à cette condition que la confiance et l'Etat de droit seront restaurés dans ce pays.

Enfin, il convient de prévenir tout risque de contagion en Macédoine où se trouve une importante minorité albanaise. La libre circulation des armes en Albanie risque, en effet, d'alimenter un trafic au profit des extrémistes des deux bords. L'Union européenne et l'OSCE devraient ainsi contrôler la frontière entre ces deux pays pour empêcher ce trafic.

La diplomatie préventive que les Européens prétendent vouloir mener, implique des moyens et une sérieuse volonté politique. Elle suppose également que l'on agisse sur les origines du mal et non ses conséquences.

Sérieuse volonté politique ? Je suis pour ma part fort déçu de la récente communication du Comité des Ministres en réponse à notre dernière recommandation sur l'Albanie. Je n'y trouve à peu près rien de substantiel et, en tout cas, rien qui soit à la mesure de la crise albanaise.

En revanche, le projet de recommandation qui nous est soumis par notre collègue M. Van der Linden m'apparaît nettement plus concret. Je voudrais seulement insister sur la nécessité de s'attaquer aux causes de cette crise et de ne pas se contenter d'un traitement humanitaire d'urgence essentiellement médiatique, j'allais dire cosmétique, c'est-à-dire largement inadapté. "

A l'issue du débat, la recommandation 1328 figurant dans le rapport 7806, assortie d'amendements, est adoptée.

Puis, la directive 532 est adoptée à l'unanimité.

14. Politiques européennes de transport aérien - Intervention de M. François LESEIN, sénateur (RDSE) (Vendredi 25 avril)

Selon son rapporteur, le transport aérien risque de subir une profonde mutation au cours des prochaines années avec l'augmentation continue du nombre de passagers.

L'évolution technologique et les transformations du marché - notamment la déréglementation de l'aviation en Europe - vont modifier la configuration du transport aérien. La congestion dans le ciel et au sol obligera aussi les compagnies aériennes à adopter de nouveaux usages.

Les mesures proposées par l'Assemblée pour améliorer le transport aérien consistent notamment :

- à aider l'aviation européenne à faire face à la concurrence mondiale tout en lui conservant son aptitude à répondre aux besoins des consommateurs, sa santé économique et son respect de l'environnement ;

- à mieux intégrer les pays d'Europe centrale et orientale au sein d'un " Espace aéronautique européen commun " ;

- à préparer le secteur au doublement du transport aérien de passagers et de fret qui devrait intervenir d'ici à l'an 2005, en augmentant la capacité des aéroports et en assurant une meilleure intégration avec les autres moyens de transport ;

- à rendre les aéroports plus efficaces en prévoyant pour s'y rendre des moyens de locomotion qui soient à la fois rapides et respectueux de l'environnement, avec possibilité d'enregistrement sur des trains directs ;

- à aider l'Europe à s'adapter aux innovations technologiques, par exemple avec la réservation sans billet et les systèmes de navigation par satellite.

L'Assemblée parlementaire constitue le forum parlementaire de la Conférence européenne de l'aviation civile. La CEAC compte 23 membres qui sont aussi, à l'exception d'un seul (Monaco), tous membres du Conseil de l'Europe.

M. François LESEIN, sénateur (RDSE), prend alors part au débat :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, je suis évidemment gêné d'intervenir aujourd'hui dans un débat sur l'avenir de l'aviation civile. Je suis parfaitement conscient des difficultés que vous causent les mouvements de grève qui affectent les transports notamment au départ de Strasbourg.

Nous ne pouvons pas, ici, seconder des revendications qui auraient pour objet le maintien de privilèges ou de rentes de situations liés à des monopoles aujourd'hui condamnés. Aussi, je vous demande, mes chers collègues qui n'êtes pas français, d'accepter les excuses de la France pour la gêne que vous subissez aujourd'hui.

Nous nous devons d'être attentifs à l'ampleur du mouvement de dérégulation en cours après la complète libéralisation des dessertes intra-européennes. La prochaine étape verra, dès le 1er janvier prochain, la libre circulation des brevets et des licences du personnel navigant et technique.

Plus que jamais, l'union de l'Europe s'impose pour accompagner cette libéralisation de mesures d'harmonisation techniques et sociales, car il convient d'éviter non seulement le dumping des salaires, mais surtout la concurrence par le bas des qualifications et des contrôles. L'avantage apparent qu'apporte au consommateur la concurrence par l'abaissement des coûts, et donc des prix, aurait peu de sens, et c'est un euphémisme, si l'avantage de prix s'obtenait par un affaiblissement de la sécurité.

Plus que jamais encore, la concertation et l'union de l'Europe sont nécessaires pour négocier une libéralisation harmonieuse au niveau international.

En effet, si l'Europe ouvre peu à peu ses transports aériens à la libre concurrence, non seulement intra-européenne mais mondiale, certains Etats, tout en prêchant le libéralisme le plus extrême se gardent bien d'en offrir les avantages dans leur propre ciel à la concurrence étrangère.

Ainsi, les Etats-Unis d'Amérique ont pour volonté d'obtenir des accords de "ciel ouvert" avec l'Europe, accords déjà largement établis en raison d'une fâcheuse dispersion des négociations. En revanche, ils refusent aux compagnies étrangères des droits de cabotage sur le vaste territoire des Etats-Unis et ils interdisent aux compagnies étrangères de prendre le contrôle effectif de compagnies américaines.

Je voudrais encore citer un événement très préoccupant pour l'industrie aéronautique européenne. Le plus grand constructeur d'avions américain, qui vient d'ailleurs de se renforcer en absorbant un concurrent et qui domine largement le marché mondial, est en train de négocier avec des compagnies aériennes des contrats de fourniture exclusive d'avions pour vingt, voire trente ans. Il y a là, à l'évidence, une entente qui entrave la libre concurrence. Je m'interroge sur la conformité de ces contrats de fourniture exclusive aux règles de l'Organisation mondiale du commerce.

Il est évident que ces contrats créent des marchés captifs pour ce constructeur, déjà dominant, et interdisent aux constructeurs européens de proposer en toute transparence des avions aux compagnies ainsi liées. Tandis que le fournisseur exclusif, sûr de ses débouchés, peut tout à loisir mettre au point et amortir ses modèles, les constructeurs européens, eux, se voient exclus des marchés les plus rentables par ces ententes verticales, qui d'ailleurs auront un effet négatif sur le progrès technique et affaibliront, bien sûr, la concurrence.

Le libéralisme ne peut être, selon le mot fameux, " un renard libre dans un poulailler libre ".

Plus que jamais, avec vous, je pense, l'Europe doit s'unir pour maintenir des normes sociales conformes aux attentes de nos concitoyens, pour soutenir le progrès technique au bénéfice de tous et, surtout, pour garantir la sécurité du transport aérien. "

La résolution 1124, amendée, contenue dans le rapport 7778 est adoptée.

III. LES RÉUNIONS GROUPÉES DE COMMISSIONS (BUCAREST - du 26 au 28 mai 1997)

Les commissions des questions juridiques, des questions économiques et des questions politiques, ainsi que le Bureau et la Commission permanente, ont tenu leurs réunions de printemps à BUCAREST (Roumanie) du 26 au 28 mai 1997.

M. Jacques BAUMEL , député (RPR), et M. Jean SEITLINGER , député (UDF), ont participé à ces réunions ainsi que MM. Daniel HOEFFEL , sénateur (UC), Pierre JEAMBRUN , sénateur (RDSE), et Jean-François LE GRAND , sénateur (RPR).

M. Jean-François LE GRAND a présenté, en commission permanente, un rapport (7800) sur " L'établissement de normes internationales pour l'audit de l'impact sur l'environnement des entreprises industrielles ", la Recommandation ayant été adoptée à l'unanimité.

La Commission permanente a également adopté des textes portant sur :

- le statut d'observateur auprès de l'Assemblée pour le Parlement canadien (rapport 7792 et résolution 1125) ;

- la Communauté des Etats Indépendants -C.E.I.- et son Assemblée parlementaire (rapport 7791 et résolution 1126) ;

- la Charte européenne du Bassin du Danube (rapport 7797 et recommandation 1330) ;

- les dépenses relatives à l'Assemblée pour l'exercice budgétaire 1998 (rapport 7817 et avis 201).

En revanche, la Commission permanente, saisie d'une motion de renvoi émanant notamment de M. Daniel HOEFFEL a voté le renvoi devant l'Assemblée plénière du rapport 7816 sur " Les effets de la détention sur le plan familial et social ".

Ces réunions ont été en outre l'occasion de rencontres avec des responsables politiques roumains, parmi lesquels MM. Petre ROMAN et Jon DIACONESCU , respectivement Président du Sénat et Président de la Chambre des Députés, ainsi que M. Victor CIORBEA , Premier ministre roumain, qui a répondu aux questions des membres de la Commission permanente.

IV. TROISIEME PARTIE DE LA SESSION (STRASBOURG - du 23 au 27 juin 1997)

1. Introduction

L'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a tenu à Strasbourg, du 23 au 27 juin 1997, la troisième partie de sa session ordinaire de 1997.

Ont pris la parole devant l'Assemblée les personnalités suivantes :

- M. Janez PODOBNIK , Président du Parlement de Slovénie,

- M. Vlodzimierz CIMOSZEWICZ , Premier ministre de Pologne ;

- M. Daniel TARSCHYS , Secrétaire général du Conseil de l'Europe, qui a répondu à une question de M. Daniel HOEFFEL , Sénateur (UC) ;

- M. Niels HELVEG PETERSEN , ministre des affaires étrangères du Danemark, Président en exercice de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

- M. Herbert SCHAMBECK , Président du Bundesrat autrichien.

L'Assemblée a également délibéré des questions suivantes :

- Le rapport d'activité du Bureau et de la Commission permanente (n° 7830 et ad. I, II et III) dont l'Assemblée a pris acte ;

- Les nouvelles technologies d'information et de communication - M. Nicolas ABOUT , sénateur (ap. RI), est intervenu dans ce débat (Rapport n° 7832 et adoption de la Recommandation n° 1332) ;

- Les Aroumains (Rapport n° 7728 et Recommandation n° 1333) ;

- Les réfugiés et les personnes déplacées dans la CEI et en Transcaucasie - (Rapports n° 7829 et n° 7837, adoption des Recommandations n° 1334 et n°1335 et de la Directive n° 533) ;

- Les conséquences pour la santé de l'accident de Tchernobyl - Dans le débat M. Nicolas ABOUT , sénateur (ap. RI) est intervenu (Rapport n° 7680 et Avis n° 7751, adoption de la Résolution n° 1127) ;

- Les institutions de Bretton Woods (Banque mondiale et Fonds monétaire international) - (Rapport n° 7835 - adoption de la Résolution n° 1128) ;

- Les activités de la Banque européenne de reconstruction et de développement (BERD) - Le débat s'est engagé sur la présentation de son rapport par Mme Josette DURRIEU , sénateur (Soc) et l'exposé de M. Jacques de LAROSIERE , président de la BERD (Rapport n° 7834 et Résolution n° 1129) ;

- La priorité de la lutte contre l'exploitation du travail des enfants - M. Michel HANSENNE , Directeur général du Bureau international du travail a pris la parole dans ce débat où est également intervenu M. Nicolas ABOUT , sénateur (ap. RI), (Rapport n° 7840 et adoption de la Recommandation n° 1336) ;

- La mise en oeuvre de l'accord de Dayton pour la paix en Bosnie et Herzégovine (Rapport n° 7833 et adoption de la Recommandation n° 1337) ;

- Le débat commun sur ces deux rapports a été introduit par des allocutions de Mme Gret HALLER , médiatrice pour les droits de l'homme pour la Bosnie et Herzégovine et de M. Robert FROWICK , chef de la mission de l'Organisation sur la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en Bosnie et Herzégovine.

- Le Traité sur la Charte de l'énergie - M. François LESEIN , sénateur (RDSE), est intervenu dans ce débat (Rapport n° 7838 et adoption de la Résolution n° 1130).

- Enfin, l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a validé les pouvoirs de la nouvelle délégation de l'Assemblée nationale française élue le 25 juin 1997 composée de : MM. Jacques BAUMEL (RPR), Jean BRIANE (UDF), Claude EVIN (Soc), Raymond FORNI (Soc), Guy LENGAGNE (RCV), Martin MALVY (Soc), Jean-François MATTEI (UDF), Gilbert MITTERRAND (Soc), Henri NALLET (Soc), Jean-Claude SANDRIER (Com.), Bernard SCHREINER (RPR) et Jean VALLEIX (RPR), membres titulaires, et de MM. Claude BIRRAUX (UDF), Paul DHAILLE (Soc), Mme Laurence DUMONT (Soc) MM. Charles EHRMANN (UDF), François FILLON (RPR), Maxime GREMETZ (Com.), Georges LEMOINE (Soc), Jean-Pierre MICHEL (RCV), Jean-Claude MIGNON (RPR), Mme Yvette ROUDY (Soc), MM. Philippe SEGUIN (RPR) et Kofi YAMGNANE (Soc), membres suppléants.

2. Rapport d'activité du Bureau et de la Commission (Lundi 23 juin)

Le rapporteur, M. VASILE, présente devant l'Assemblée son rapport 7830 ; brièvement, il renvoie à son rapport écrit pour les décisions d'ordre administratif qu'ont pu prendre le Bureau et la Commission Permanente depuis la précédente partie de session. Il insiste en revanche sur la décision prise par le Bureau lors de sa dernière réunion : en dépit des problèmes que cela pose, dix membres du Secrétariat et trente parlementaires se rendront en Albanie pour observer les élections du 29 juin.

A l'issue de discussions approfondies, le Bureau a décidé que, malgré le grand nombre de manquements, l'Assemblée se devait d'observer les élections dans ce pays, estimant que c'était là le seul moyen de venir en aide à l'Albanie et à la population albanaise.

Le rapporteur souligne que la réunion jointe tenue à Saint-Pétersbourg avec le groupe de travail des Délégués des Ministres pour préparer le 2 ème sommet de Strasbourg a constitué un autre point fort des activités du Bureau, réunion au cours de laquelle ils ont entendu un exposé de M. Ivanov, premier vice-ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie, sur le rôle et la place du Conseil de l'Europe dans le développement de l'architecture européenne.). Il rappelle également que les réunions de l'Assemblée qui se sont tenues à Bucarest en mai ont permis de mieux connaître la Roumanie et, en même temps, aux citoyens roumains avertis de se familiariser un peu plus avec le Conseil de l'Europe.

Il souligne que l'Assemblée devrait donner davantage de publicité à ses activités, que ce soit par rapport à l'OSCE ou par rapport à l'Union européenne. Les réunions en Roumanie ont également permis aux dirigeants du Conseil de l'Europe et aux commissions de l'Assemblée d'avoir des contacts avec les plus hautes personnalités politiques du pays.

A cet égard, la présence du Président de l'Assemblée et du Secrétaire Général du Conseil de l'Europe lors de la cérémonie de la signature des accords roumano-hongrois de protection de l'environnement, aux côtés des Présidents Göncz et Constantinescu a été d'une importance toute particulière. Les représentants du Conseil de l'Europe ont considéré comme impressionnantes les réformes appliquées et les mesures prises par la Roumanie ces derniers temps, qu'il s'agisse de la protection des minorités, des réformes juridiques et économiques ou des traités de bon voisinage conclus.

A l'issue de l'exposé du rapporteur, l'Assemblée a donné acte du rapport d'activité du Bureau et de la Commission permanente n° 7830 et addendums I, II et III, et a ratifié les renvois en commission.

3. Aspects scientifiques et techniques des nouvelles technologies de l'information et de la communication - Interventions de MM. Claude BIRRAUX, député (UDF) et Jean VALLEIX, député (RPR) (Lundi 23 juin)

Le Rapporteur expose que, à la fin du siècle, plus d'un milliard d'humains seront reliés à l'Internet, ce réseau de communication qui permet à l'information de passer en quelques secondes d'un endroit du globe à l'autre.

Cette nouvelle technique représente, selon le Rapport, une aubaine pour les scientifiques, car les chercheurs travaillent à présent dans un " village mondial ", mais la déréglementation des télécommunications en Europe risque de restreindre les capacités de recherche. Dans le monde entier, le système bancaire international ressentira les effets du phénomène, car l'argent électronique va se répandre, et des problèmes de sécurité se poseront dans la mesure où il est permis de craindre que des terroristes puissent saboter le contrôle du trafic aérien ou les systèmes financiers.

Le rapport invite les gouvernements à faire évoluer les techniques nouvelles dans un sens favorable à la société. Il leur conseille d'établir un partenariat avec l'industrie privée pour élaborer des solutions propices aux citoyens, parmi lesquelles :

- l'adaptation des techniques nouvelles aux personnes âgées ou handicapées ;

- l'informatisation des services médicaux ;

- des systèmes de contrôle de l'environnement et de gestion des réseaux de transport

- une promotion de la coopération internationale en vue de rendre possible l'interaction des systèmes ;

- l'encouragement de la création des sociétés informatiques en Europe ;

- la recherche des moyens de crypter l'information pour contrecarrer l'action des terroristes.

Dans le débat qui s'instaure sur ce rapport, M. Claude BIRRAUX, député (UDF), intervient en ces termes :

" Monsieur le Président, mes chers Collègues, je voudrais d'abord remercier et féliciter notre collègue Frey pour la qualité tant de son rapport que du colloque qu'il avait organisé à Neuchâtel. Je me permettrai quelques commentaires.

Il est bien clair que les technologies dont nous parlons se développent très rapidement. Le premier risque de leur essor est celui d'une société à deux vitesses : ceux qui savent les utiliser et ceux qui ne savent pas. L'appropriation d'une technologie, son utilisation, sont des instruments de pouvoir. Permettre au plus grand nombre d'avoir accès aux technologies, d'être formé à leur utilisation sont aussi des enjeux démocratiques qu'il faut relever.

Si le développement du télétravail peut être une chance pour l'aménagement du territoire, en permettant la création d'emplois dans des zones isolées, il peut aussi avoir des aspects négatifs : délocalisation à grande distance et chômage ; risques d'atteintes aux libertés individuelles dans l'entreprise, avec des systèmes informatiques de surveillance par exemple ; isolement, perte de contact avec l'entreprise et empiétement sur la vie privée, confusion travail-domicile.

S'agissant des enjeux d'éducation et de formation, la place des nouvelles techniques d'information et de communication est déterminante pour acquérir la connaissance elle-même, pour une éducation de meilleure qualité, voire un enseignement personnalisé. C'est dans le domaine éducatif que l'on pourra acquérir la maîtrise, facteur d'égalité.

Outre à la familiarisation à l'outil informatique, il convient de réfléchir aux conséquences de l'usage de l'ordinateur sur les apprentissages classiques. Travailler sur des ordinateurs sans projet éducatif et sans enseignants formés, c'est avoir une voiture sans permis de conduire. Il faut aussi intégrer dans la pédagogie une réflexion sur l'image comme vecteur d'information. Il convient de réduire le retard de l'Europe dans les systèmes d'enseignement puisque 10 % seulement des écoles ont accès à Internet, contre 60 % aux Etats-Unis, comme l'a rappelé notre rapporteur.

Les nouvelles techniques de communication et d'information présentent des avantages pour la télémédecine puisqu'il devrait s'ensuivre une amélioration des services de santé rendus à la population.

Télédiagnostic, téléchirurgie, télésurveillance médicale... Toutes ces " télépossibilités " peuvent éviter le transport des malades, les données dont le médecin a besoin pouvant être transmises grâce à ces nouvelles technologies. S'y ajoute pour les médecins la possibilité d'une mise à jour de leur savoir, grâce au support multimédia.

Le développement de la télémédecine n'est pas exempt de quelques interrogations éthiques.

Se pose d'abord le problème du secret médical. Le codiagnostic et la téléchirurgie envisagent la communication entre médecins comme un élément naturel en vue de la santé du patient. Dès lors est soulevé le problème du partage du secret médical. Quelle sera la place du patient et comment obtenir son consentement ? D'autre part, quels seront les effets à long terme, tant du point de vue médical que financier, de l'amélioration de la qualité des soins ? La collectivité est-elle décidée à assumer les coûts de la formation professionnelle des médecins ? Dans quelles conditions ?

La déréglementation en cours devrait permettre un abaissement des coûts, donc faciliter le développement de ces technologies, avec l'apparition de nouveaux acteurs. L'appropriation des technologies par davantage d'acteurs risque fort de nous conduire à voir la recherche délaissée. C'est le rôle des gouvernements que de trouver les voies et moyens pour soutenir les centres de recherche, d'une part, et faciliter le transfert des connaissances vers l'industrie et les PME, d'autre part.

Un cadre juridique est à inventer.

J'avais déjà développé, lors de la discussion du rapport de M. Beaufays traitant des relations entre nouvelles technologies et emplois, les enjeux sociaux. Toute notre législation du travail est à réinventer car elle est aujourd'hui dépassée. De même s'agissant du commerce, le développement du commerce électronique est en avance sur la législation ce qui laisse la porte ouverte aux abus, aux fraudes et aux délits.

Le cadre juridique approprié à l'exercice de l'ensemble de ces nouvelles technologies d'information et de communication est à inventer dans une approche globale et mondiale. L'autorégulation des opérateurs est un leurre, une vision angélique. Qui peut croire en l'autorégulation des maffieux, des proxénètes et des pédophiles ?

Lorsque l'on considère les différents paramètres qui font une société, c'est dans tous les aspects que les nouvelles technologies d'information et de communication modifient les éléments fondamentaux que l'on pensait intangibles de notre société. Le rôle du Politique s'en trouve renforcé et sa responsabilité n'en est que plus grande. C'est à travers ses choix que le Politique façonne la société.

La société des nouvelles technologies d'information et de communication recèle en elle-même des chances extraordinaires pour le développement économique, éducatif, culturel et scientifique de l'homme. Elle contient aussi en germe des dangers graves de déviance, d'exploitation mal intentionnée, de manipulation.

Le prisme à travers lequel le Politique doit les considérer est celui des valeurs qui fondent nos sociétés démocratiques, en plaçant au centre de l'édifice l'homme dans toutes ses dimensions, y compris spirituelle.

Notre Assemblée dont c'est la vocation, se doit de jouer un rôle prépondérant, avant-garde et moteur tout à la fois ".

M. Jean VALLEIX, député (RPR), prend alors la parole :

" Monsieur le Président, mes chers Collègues, ce rapport nous concerne tous, non seulement pour le présent, mais pour l'avenir. Il est évident qu'il concerne nos populations.

Comme les orateurs qui m'ont précédé, je soulignerai la qualité du rapport de M. Frey, ainsi que la qualité des travaux qu'il a organisés à Neuchâtel, au mois d'avril, et qui nous ont permis d'engager une réflexion approfondie. Il est évident que nous sommes embarrassés par les dix-huit propositions formulées - car elles ne sont pas seize, mais dix-huit - entre lesquelles il importe de réaliser un classement, de définir un ordre de priorité.

S'agissant d'une autre réflexion, sur le débat permanent entre le virtuel et le réel, je rejoindrai volontiers les propos tenus à l'instant. J'avoue que j'ai été également très sensible aux qualités d'intervention de nos collègues MM. Birraux et Olrich.

Nous débattons aujourd'hui, en fait, d'une approche d'abord technique et technologique, ce qui est bien normal dans la mesure où le sujet est traité par la commission de la science et de la technologie.

Quitte à me placer quelque peu hors du sujet, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je voudrais précisément insister sur ce qui n'est pas que technique et technologique, et par conséquent, sur les défis qui entourent ce vaste débat.

C'est d'abord un défi pour l'Europe, dans la mesure où en définitive, nous devons considérer que cette dernière n'est pas, dans cette affaire, la mieux placée. Distancée par les Etats-Unis, elle risque d'être dépassée par l'Asie dans la course à l'équipement en matériel informatique. Les chiffres sont éloquents : selon des études récentes, le marché a progressé, l'an dernier, de 7,2 % en Europe de l'Ouest contre 21 % aux Etats-Unis, 33 % au Japon, 15 % en Russie, sans parler des très rapides progrès de la Chine.

Bref, sommes-nous, face à Internet, des attardés ou des retardés ? J'espère que nous ne serons que retardés ! Toujours est-il que la réalité est là et l'Europe, qui a su être à l'avant-garde dans les domaines de l'espace, de l'aéronautique et du nucléaire, doit aujourd'hui, de toute évidence, redoubler d'efforts.

Le deuxième défi - de taille ! - est " démocratique " et " juridique " a-t-il été ajouté à juste titre -les deux notions étant, à mon avis, assez complémentaires -par l'orateur précédent. Il faut bien reconnaître que la démocratie représentative, telle que nous la connaissons, devra -saura-t-elle le faire ? -s'adapter profondément pour survivre dans les conditions d'une société nouvelle d'information.

Citons un troisième défi qui nous concerne, nous, en tant que politiques parce que nous avons à la fois à " piloter " techniquement ces données et à assumer des responsabilités directes.

Ce troisième défi, que vous avez, me semble-t-il, moins traité dans votre rapport, monsieur Frey, mais qui a été très bien évoqué tout à l'heure, est culturel. Je signale que j'ai été impressionné, et je le suis toujours, par la qualité du français de notre collègue M. Làzàrescu et par la qualité de sa pensée.

Dans le domaine culturel, la mondialisation a pour effet de véhiculer actuellement, à l'échelle planétaire, un mode de pensée qui est essentiellement le reflet disons de la culture américaine pour laquelle j'ai d'ailleurs beaucoup d'estime mais qui risque tout de même de nous entraîner vers une sorte de sous-culture uniforme.

La planète risque de devenir plus un marché de consommateurs qu'un monde de citoyens. Il s'agit d'ailleurs d'un débat qui a déjà été évoqué avec le GATT lorsqu'il s'agissait de défendre l'exception culturelle. Certes, ce débat difficile nous engage dans la mesure où nous devons défendre des réflexes identitaires propres à notre civilisation, aux civilisations nationales mais aussi, bien évidemment, européennes.

Le quatrième défi est économique et social. Voilà vingt ans, des débats de cette nature que l'on retrouve dans les textes du Conseil de l'Europe ont eu lieu au sujet de ce qui démarrait alors et qui prenait forme sous la qualification de traitement de texte ou d'informatique. A l'époque, la commission des questions économiques et du développement évoquait les 15 ou 20 millions de chômeurs à appréhender en Europe à cause du développement de ces pratiques. Certes, il y a des compensations.

En vérité, le phénomène n'est pas nécessairement si différent. Après avoir dépassé l'âge de la pierre, du fer et du bronze - n'est-ce pas, Monsieur le Rapporteur ? - à des époques plus récentes, nous sommes parvenus, après l'ère de l'informatique, à celle d'aujourd'hui, à l'ère d'Internet, du virtuel et de la multicommunication qui engageront nécessairement des révolutions profondes en matière d'activités et d'emplois.

A cet égard, il me semble opportun d'approfondir la réflexion, et je vous soumets une proposition : à partir de vos travaux, monsieur le rapporteur, et de ceux de la commission, il convient de rechercher un complément de réflexion et d'orientation, par exemple, auprès de la commission des questions économiques et du développement. Bref, faisons travailler l'ensemble de nos commissions qui peuvent examiner ce problème capital.

En guise d'ultime réflexion, je citerai un auteur que vous connaissez tous, Saint-Exupéry, lequel a eu un mot qui, pour m'avoir frappé, me revient souvent en mémoire et nous rappelle cette époque où nous sommes menacés par une civilisation plus éclatée, éventuellement plus localisée, avec le risque cependant, qu'elle soit beaucoup moins humaine : " La grandeur d'un métier, c'est aussi d'unir les hommes ". Comment allons-nous procéder pour que les procédures modernes, indispensables, nous permettent toujours d'unir les hommes ? Il s'agit aussi d'un des problèmes dont le Conseil de l'Europe doit se préoccuper ".

La recommandation 1332 contenue dans le rapport 7832 est adoptée, amendée.

4. Les Aroumains (Mardi 24 juin)

Grâce aux relations plus étroites nouées ces dernières années avec les pays des Balkans, l'Assemblée, souligne le rapport, a pris conscience du risque de disparition de la langue et de la culture des Aroumains, peuple qui vit aujourd'hui principalement en Albanie, Bulgarie, Grèce, dans " l'ex-république yougoslave de Macédoine ", en Serbie et en Roumanie.

Apparentés aux Roumains de la rive gauche du Danube, les Aroumains n'ont jamais connu d'Etat indépendant. Leur communauté, forte d'environ 1.500.000 personnes -y compris la diaspora que l'on trouve en Allemagne, aux Etats-Unis et en Australie- compte 250.000 personnes qui pratiquent encore la langue aroumaine ou macédo-roumain.

Bien assimilés dans les pays où ils vivent, les Aroumains demandent le soutien de leurs Etats pour l'apprentissage de leur langue maternelle, la possibilité de suivre les services religieux en aroumain dans leurs églises et de disposer de médias dans leur langue minoritaire.

Se référant aux textes déjà adoptés par l'Assemblée relatifs aux problèmes d'éducation et de culture posés par ces langues minoritaires et les dialectes en Europe, le rapporteur propose -outre la mise en oeuvre par leurs pays de résidence de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires- que les Etats répondent aux souhaits de cette communauté.

Il préconise également toute une série de mesures, dont la promotion de textes dans la langue aroumaine et la création de bourses pour des artistes et écrivains issus de ce groupe minoritaire.

La recommandation 1333, contenue dans le rapport 7728, amendée, est adoptée.

5. Exposé de M. Daniel TARSCHYS, Secrétaire général du Conseil de l'Europe - Interventions de MM. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC), et Jean VALLEIX, député (RPR) (Mardi 24 juin)

M. Daniel TARSCHYS, Secrétaire général du Conseil de l'Europe souligne combien à l'occasion de son 50 ème anniversaire l'Assemblée pourra être fière de son bilan : cent soixante-cinq conventions et bon nombre des activités du Conseil de l'Europe découlent de ses initiatives. Il rappelle que le Conseil de l'Europe est une Organisation qui n'est ni très riche ni très puissante, mais qui a montré, dans la pratique, comment des accords intergouvernementaux volontaires parviennent à nous ménager un espace juridique commun s'étendant peu à peu au gré des décisions prises par des Etats indépendants et souverains. Si l'on veut un continent stable et pacifique, une coopération beaucoup plus étroite doit se développer entre toutes les démocraties européennes, sans exception. Le vieil adage reste vrai : la solidarité est la façon la plus intelligente d'être égoïste.

Parallèlement, il faut avoir le courage de réévaluer les menaces qui pèsent sur notre sécurité. Si les dangers d'agression militaire ont diminué avec la fin de la guerre froide, de nombreux risques liés au dysfonctionnement des sociétés démocratiques sont apparus.

Il coûte infiniment moins cher de prendre des mesures conjointes pour soutenir et renforcer la stabilité démocratique que de ramasser les morceaux une fois que celle-ci s'est effondrée .

Aussi le Secrétaire général a-t-il plaidé lors de la dernière partie de session pour que le Sommet adopte un programme d'action substantiel. Ce programme est en préparation et les idées de l'Assemblée parlementaire ont été soigneusement examinées par le Comité des ministres. M. Tarschys se réjouit de constater l'influence grandissante de l'Assemblée, comme l'a encore confirmé la récente réunion de Saint-Pétersbourg.

Un programme d'action, pour être crédible, doit être substantiel, ambitieux et refléter les convictions communes. Ceux qui nous dirigent auront-ils le courage de le mettre en oeuvre ? Les membres de l'Assemblée peuvent jouer là un rôle décisif d'inspiration et d'impulsion non seulement ici mais aussi dans les pays où se prépare le Sommet. Cent jours nous en séparent, conclut le Secrétaire général. Il faut saisir cette occasion d'aider les dirigeants à insuffler une nouvelle vigueur à la coopération entre les démocraties européennes.

M. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC), adresse la question suivante :

" Monsieur le Secrétaire général nous a rappelé à juste titre le rôle et l'expérience du Conseil de l'Europe sur le plan du droit et de la démocratie. Aussi lui demanderai-je quelles initiatives il compte prendre pour que cette mission du Conseil de l'Europe soit pleinement valorisée, notamment à l'occasion du contrôle des élections et de l'assistance juridique ?

Par ailleurs, quelles initiatives comptez-vous prendre, monsieur le Secrétaire général, pour renforcer la coordination entre toutes les organisations qui fonctionnent sur le plan de la coopération européenne sans que cela aboutisse à une subordination de fait du Conseil de l'Europe ? "

Le Secrétaire général lui répond en ces termes :

" Il convient de préciser que le Conseil de l'Europe et l'OSCE ont eu de nombreux contacts et ont tenu de nombreuses discussions sur les mesures internationales à prendre en vue de soutenir le retour à l'Etat de droit, à l'ordre et à la démocratie en Albanie. L'observation des élections sera dirigée par un trio composé de Mme Catherine Lalumière, nommée par le Président en exercice de l'OSCE, de Sir Russell Johnston, nommé par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et de M. Rupérez nommé par l'Assemblée parlementaire de l'OSCE, trio qui sera chargé de coordonner les opérations. L'idée de cette " troïka " a été adoptée après discussion avec la présidence de l'OSCE.

La question de la couverture géographique de l'observation des élections en Albanie est fort importante ; elle a fait l'objet de consultations entre les dirigeants des différentes équipes d'observateurs sur le terrain, qui en ont défini l'ampleur. J'espère que la plus grande partie, voire l'ensemble du territoire albanais pourra être couvert par les opérations de surveillance.

En ce qui concerne l'organisation pratique de ces opérations, elle dépend de la coopération qui sera instaurée entre le Conseil de l'Europe et les autres partenaires internationaux concernés. Le Conseil de l'Europe est prêt à envoyer ses experts pour soutenir la mission de la force internationale déployée en Albanie ainsi que celle des experts de l'OSCE. Ce n'est pas la première fois que nous intervenons en Albanie pays pour lequel nous disposons d'un programme portant sur les médias, les institutions juridiques et démocratiques, et sur l'organisation d'élections, programme dont la mise en oeuvre se poursuivra après les élections et qui, j'en suis convaincu, nous permettra d'oeuvrer utilement à ce moment-là. L'effort de stabilisation doit être renforcé grâce à la coopération internationale. "

A son tour, M. Jean VALLEIX, député (RPR), pose une question :

" Monsieur le Secrétaire général, vous avez fort utilement évoqué la préparation du prochain Sommet du Conseil de l'Europe, en octobre, qui réunira les chefs d'Etat et de gouvernement des quarante pays de notre Organisation. A cette occasion, est-il prévu de renforcer les moyens du Fonds social européen ? Ce fonds, vous le savez aussi bien que moi, est un instrument important du Conseil de l'Europe, notamment pour les pays qui s'appliquent à passer à l'économie de marché.

Dans le même esprit, est-il prévu des mesures permettant de dégager des moyens nouveaux afin de conforter les actions de ce fonds, assez mal connues, qui méritent beaucoup plus d'attention ? "

M. Daniel TARSCHYS apporte les éléments de réponse suivants :

" On peut renforcer les moyens du Fonds de développement social soit en élargissant le nombre des pays contributeurs, soit en augmentant la contribution des Etats qui y participent déjà. Je suis heureux de pouvoir vous annoncer un élargissement considérable du fonds qui verra augmenter ses moyens dans un proche avenir. La Slovénie, la Bulgarie, la Lituanie et la Roumanie en sont devenues Parties et, ce matin, la Croatie m'a fait parvenir une déclaration m'informant de son intention d'y adhérer prochainement. De plus, je sais que l'Estonie, " l'ex-République yougoslave de Macédoine ", la Hongrie et la Moldova ont également manifesté leur intérêt à cet égard.

Il serait bien entendu souhaitable que les anciens membres augmentent leur participation soit au capital soit au garanties du fonds. Je déplore qu'aucun engagement n'ait encore été pris dans ce sens, mais je partage l'avis de M. Valleix selon lequel il importe de renforcer les moyens du fonds dont la mission est particulièrement importante puisqu'il a pour tâche de mettre en oeuvre et de financer les mesures propres à résoudre les problèmes de réfugiés et de flux migratoires. C'est pourquoi il convient de le doter des ressources qui lui permettront de travailler efficacement à la réalisation de ses objectifs ".

M. Jean VALLEIX, député (RPR), prend à nouveau la parole en ces termes :

" J'insiste auprès du Secrétaire général afin que soit bien soulignée l'importance des actions engagées par cette structure. Je souhaite vivement que le prochain sommet soit l'occasion de mettre en valeur cet instrument ".

6. Réfugiés, demandeurs d'asile et personnes déplacées dans la Communauté d'Etats indépendants, et réfugiés et personnes déplacées en Transcaucasie - Intervention de M. Jean SEITLINGER, député (UDF) (Mardi 24 juin)

L'Assemblée aborde la discussion commune de deux rapports : le premier sur les réfugiés dans la CEI et le second sur la situation des réfugiés en Transcaucasie.

a) Les réfugiés et les personnes déplacées en CEI

Selon le HCR, depuis 1989, neuf millions de personnes se sont déplacées dans la région de la Communauté des Etats indépendants (CEI), beaucoup d'entre elles involontairement, rappelle le Rapporteur. Il s'agit là des mouvements de population d'une ampleur et d'une complexité sans précédent depuis la deuxième guerre mondiale. Leur origine est diverse : la détérioration économique, sociale et écologique, les conflits armés, le nationalisme violent, les violations des droits de l'homme et des droits des minorités, l'insécurité, etc. Ces déplacements ont de très graves conséquences humanitaires et risquent également d'influencer la stabilité et la paix dans cette région.

L'Assemblée considère que le Conseil de l'Europe a un rôle important à jouer tant pour garantir le respect des droits des réfugiés, des demandeurs d'asile et des personnes déplacées que pour contribuer à l'élimination des causes de déplacement. Par conséquent, elle formule des recommandations aux Etats européens de la CEI et invite les Etats membres du Conseil de l'Europe à contribuer généreusement au financement des programmes d'assistance pour ces pays.

b) La situation des réfugiés en Transcaucasie

La Transcaucasie compte environ un million et demi de réfugiés et de personnes déplacées qui vivent dans des conditions humanitaires très difficiles. L'Azerbaïdjan en recense environ 900.000, l'Arménie 300.000 et la Géorgie 300.000. Après l'ancienne Yougoslavie, la Transcaucasie est à présent la région européenne la plus touchée par ce problème.

Faute, de disposer de moyens suffisants pour faire face à cet afflux humain, les trois pays du Caucase, sont toujours largement dépendants de l'aide internationale, tant humanitaire que destinée aux projets de développement. De même, le rapatriement des personnes déplacées n'avance pas en raison de progrès insuffisants dans la solution des conflits en Abkhasie et en Haut-Karabakh.

L'Assemblée souhaite attirer l'attention sur cette crise humanitaire qui passe largement inaperçue dans le reste de l'Europe. Elle recommande au Comité des ministres d'intensifier, en coopération avec d'autres organisations internationales compétentes, les programmes à l'intention de ces pays. Elle invite le Fonds de développement social du Conseil de l'Europe à établir une " task force " pour examiner ses moyens d'intervention en Transcaucasie et recommande aux Etats caucasiens concernés de faire du rapatriement la priorité dans leurs négociations de paix.

M. Jean SEITLINGER, député (UDF), intervient dans le débat en ces termes :

" Monsieur le Président, mes chers Collègues, au nom du Groupe du parti populaire européen, je voudrais remercier la commission des migrations, des réfugiés et de la démographie, plus particulièrement ses deux rapporteurs, Mme Guirado et M. Filimonov, pour s'être à nouveau penchée sur cette question des réfugiés. En effet même si, depuis plusieurs années, il y a un cessez-le-feu, il était important d'alerter encore une fois notre Assemblée, et, au-delà, la communauté internationale, sur la situation de plusieurs millions de réfugiés dans les républiques de la CEI, plus spécialement dans les trois pays de Transcaucasie.

En effet, il ne faudrait pas que ces réfugiés tombent dans l'oubli. Les médias, par définition, sont focalisés sur un seul événement. C'était hier la Yougoslavie ; c'est aujourd'hui l'Afrique, notamment le Zaïre et le Rwanda. Il faut absolument que nous, ici, qui comptons, en tant qu'invités spéciaux et, prochainement, comme membres à part entière, des pays de Transcaucasie, nous préoccupions du sort de ces réfugiés.

Vous le savez, l'aide humanitaire ne dure pas éternellement ; nous devons en fixer les limites car il faut éviter de créer un syndrome de dépendance. Il faut progresser vers des systèmes globaux d'assistance aux personnes vulnérables, réfugiées ou non. Nous devons donc continuer à marquer nos préoccupations pour ces millions de personnes.

Je veux également insister sur le fait que nous ne devons pas faire de procès d'intention. Le débat d'aujourd'hui n'est nullement la remise en cause de la résolution votée le 22 avril dernier. Je sais gré à Mme Guirado, d'avoir souligné à deux reprises, au début et à la fin de son intervention, le caractère spécifique, particulier de son rapport et du présent débat.

De même, ne faisons pas de procès d'intention aux auteurs de certains des amendements déposés. Je me suis entretenu avec M. Gross et M. Ruffy. J'ai beaucoup travaillé avec eux en commission et je me porte garant de leur parfaite honnêteté intellectuelle. En la circonstance, ils ont uniquement utilisé une terminologie géographique et non une terminologie historique ou politique. Ne cherchons aucune arrière-pensée dans leur démarche. Ils ont voulu seulement poser le problème des réfugiés et insister sur leur triste sort. Par conséquent, ne faisons ici aucun procès d'intention.

Alors, que peut faire le Conseil de l'Europe ? Nous avons déjà plusieurs conventions sur les droits de l'homme, contre la torture, la Convention de Genève de 1951. Au-delà, nous devrions demander - si ce n'est déjà fait - qu'au prochain Sommet des chefs d'Etats et de gouvernement de notre Organisation, soit élaborée une charte pour la protection des réfugiés. Je ne vais pas énumérer ici tout ce que pourrait contenir une telle charte ou convention. Je ne citerai que le droit au retour, l'interdiction du refoulement, le respect de la propriété ou, pour le moins, l'indemnisation des biens ou des pertes subies par les réfugiés.

J'ajoute qu'il ne faut pas confondre le problème des réfugiés avec celui de l'immigration, deux problèmes tout à fait différents. Je sais que certains Etats ont émis des réserves à propos d'une telle charte.

Il s'agit en l'espèce de réfugiés et de personnes déplacées et pas du tout de problèmes de travailleurs migrants.

Je rappelle également que, parmi les engagements prévus à l'article 9 au mois d'avril 1996, on demandait à la Croatie de respecter le droit pour les réfugiés des autres républiques de recouvrer leurs biens et d'obtenir réparation.

Enfin, pour conclure, je tiens à souligner qu'aucune garantie juridique ne saurait dispenser de la nécessité absolue de trouver des solutions politiques aux conflits et aux tensions.

Dans la résolution que nous avons adoptée le 22 avril dernier, nous avons inscrit le droit au retour des réfugiés, tant ceux d'Abkhazie que ceux du Haut-Karabakh, avec une garantie de sécurité. La seule vraie réponse que nous pouvons apporter est la solution politique, préalable à l'exercice réel du droit au retour des réfugiés ".

Au terme du débat, la recommandation 1334, contenue dans le rapport 7829, amendée, est adoptée.

Puis, la recommandation 1335, contenue dans le rapport 7837, amendée, est également adoptée.

Enfin, la directive 533 figurant dans le rapport 7837 est adoptée sans amendement.

7. Conséquences sur la santé de l'accident de Tchernobyl - Rapport de M. Denis JACQUAT, député (UDF) - Interventions de MM. Claude BIRRAUX, député (UDF), Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI) (Mardi 24 juin)

Présentant son rapport, M. Denis JACQUAT, député (UDF) , a présenté les observations suivantes au nom de la commission des questions sociales, de la santé et de la famille :

" Monsieur le Président, mes chers Collègues, cet avis est la suite logique des conclusions d'un précédent rapport de 1993 qui, présenté par une de nos collègues islandaise, demandait de faire le point sur les conséquences sanitaires de Tchernobyl dix ans après la catastrophe. Nous avons eu ici même il y a quelques mois, une discussion sur ce thème. Aussi m'exprimerai-je brièvement afin d'éviter les répétitions.

Pour mémoire, je rappelle que l'accident lui-même est dû à une très grave combinaison, la déficience de la conception et des violations de procédures. On peut affirmer que l'iode radioactif en Ukraine, en Russie et surtout en Bélarus, a provoqué dans les zones fortement contaminées une multiplication par dix des cancers de la thyroïde chez l'enfant - ce qui représente à peu près mille cas - et par deux des cancers de la thyroïde chez les liquidateurs. Il faut y ajouter de nombreuses maladies psychosomatiques dues au stress.

Si l'accident n'avait pas été occulté par les autorités locales et surtout si les mesures sanitaires préventives avaient été mises en place en temps voulu, notamment la distribution d'iode stable aux populations concernées, nous n'aurions pas eu en particulier des cancers de la thyroïde chez les enfants. Il est à noter que ces cancers, prévisibles, sont apparus plus tôt que prévu.

Actuellement, le diagnostic et le traitement chirurgical des cancers de la thyroïde de l'enfant ne présentent aucune difficulté majeure pour les médecins et les chirurgiens dans les trois pays concernés. Les problèmes se posent pour le traitement isotopique postopératoire chez l'enfant présentant des métastases. En effet, les conditions hospitalières locales ne permettent presque pas, malgré le souhait du corps médical local et des familles des malades, un traitement sur place. Ces traitements sont donc très souvent effectués à l'étranger dans des services parfaitement équipés.

Cependant, il est indispensable que le nombre de prises en charge de patients soignés à l'étranger augmente car, malheureusement, les enfants atteints de métastases dans le cas de cancers de la thyroïde ne sont pas traités, et/ou que des moyens financiers soient donnés aux trois pays concernés pour équiper parfaitement leurs hôpitaux afin d'effectuer ces traitements. C'est un devoir moral.

" Science sans conscience n'est que ruine de l'âme " : c'est la raison pour laquelle je vous propose que nous continuions à suivre attentivement les problèmes sanitaires engendrés par la catastrophe de Tchernobyl car le nuage radioactif d'iode et de césium fera encore malheureusement des ravages ".

M. Claude BIRRAUX, député (UDF), intervient dans le débat en ces termes :

" Permettez-moi de féliciter M. Denis Jacquat pour la qualité de son rapport, qui donne des orientations et des informations raisonnées sur l'état sanitaire des populations.

Son approche doit être saluée, car sur le sujet, entre ceux qui multiplient les cas douloureux par un facteur cent, voire mille, et même davantage, et ceux qui nient tout impact de l'accident de Tchernobyl sur la santé des populations et qui pensent qu'il n'y a eu que trente-deux morts, il est difficile de porter un jugement de valeur. Les uns comme les autres, essaient contre vents et marées de justifier leur attitude pro ou antinucléaire. Je ne suis pas sûr qu'ils défendent au mieux leurs propres intérêts.

Permettez-moi aussi de remercier M. Jacquat d'avoir rappelé, dans son rapport, que Tchernobyl fut une catastrophe intolérable que le temps ne doit ni effacer, ni banaliser et ce n'est pas une clause de forme.

La fermeture de Tchernobyl, comme symbole de la fin de l'ère soviétique dans le domaine nucléaire et symbole du changement d'échelle de valeurs dans la société ex-soviétique post-communiste, est réclamée depuis plus de dix ans ! Ce n'est que fin 1996 que le principe en a été enfin admis, même si les modalités sont toujours incertaines. Tout cela est " la faute de la perestroïka" , comme dirait M. Jirinovski.

Merci, Monsieur Jacquat, de contribuer avec ce rapport à la transparence, car la transparence est liée fortement à la démocratie, n'en déplaise encore à M. Jirinovski.

Nos pays occidentaux savent aujourd'hui quelle est la situation technologique et humaine des réacteurs jugés les plus dangereux. Un plan d'urgence avait même été appelé en un moment où l'on parlait de plan Marshall pour le nucléaire à l'Est. De G7 en G8, en passant par le G24, l'Union européenne, la BERD, l'urgence s'est enlisée dans le formalisme et la bureaucratie.

Pour assurer un suivi correct des populations, il est indispensable de disposer d'un maximum de données médicales. Or, il est vrai que les données sur la santé des populations avant l'accident sont rares. Néanmoins, il était possible de commencer une étude épidémiologique d'envergure.

Je regrette d'autant plus vivement que cette étude n'ait pu avoir lieu, que c'est le gouvernement français qui s'est opposé à ce projet. Le projet Système informatisé d'aide à la décision médicale dans le cadre de l'accord partiel ouvert sur les risques majeurs n'a pu voir le jour. En effet, il permettait de relier par satellite sept ou huit hôpitaux qui auraient pu échanger des informations sur les symptômes ou maladies observés chez des patients contaminés par Tchernobyl.

Je crois qu'il serait utile qu'une telle étude voie le jour, car elle serait un complément indispensable à l'observation des effets des rayonnements chez les survivants d'Hiroshima et Nagasaki.

Pour cette dernière, la Life Span Study, actualisée tous les cinq ans, montre dans sa récente actualisation qu'il y a des effets significatifs au-dessus de 50 mSv alors que les précédentes études ne notaient rien. Cette étude épidémiologique serait complétée par les données concernant les populations qui sont restées à vivre et à travailler dans les zones contaminées.

A ceux qui considèrent que les restrictions alimentaires ou autres sont excessives, je rappellerai que le principe de précaution doit guider toute autorité responsable. S'il y a un risque pour la santé de la population, il ne doit pas être pris.

C'est dans cette perspective que la Commission internationale de protection radiologique (CIPR), dans sa recommandation n° 60, demande un abaissement des normes sanitaires pour la radioprotection. L'Union européenne a adopté en mai 1996 cette directive et ces normes - 20 mSv pour les travailleurs et une augmentation de radioactivité induite non volontaire pour le public de 1 mSv.

Que dire enfin des liquidateurs, qui ont été renvoyés dans leurs foyers et dont on ne sait pas s'ils ont un suivi médical quelconque ?

Je suis d'accord avec les différents points du projet de résolution.

J'ajoute cinq propositions :

- relancer l'idée d'une étude épidémiologique ; former les responsables du nucléaire et les autorités, à la gestion de crise, afin que le " retour d'expérience de Tchernobyl " soit analysé et que des actions correctrices soient intégrées dans des plans d'urgence et de sécurité pour les autres sites nucléaires dans la C.E.I.

- se mobiliser pour apporter une assistance à la sûreté des réacteurs les plus vulnérables et à la formation et la gestion des personnels,

- ne plus tergiverser pour la fermeture définitive de Tchernobyl,

- prendre rapidement des décisions et surtout engager des actions pour le deuxième sarcophage avant qu'une deuxième catastrophe ne se produise à Tchernobyl,

- enfin, traduire encore de manière concrète notre compassion pour les victimes et ne pas se lasser de rappeler le drame de Tchernobyl, afin que nul n'oublie, ni ne s'habitue à l'inacceptable, comme furent oubliées les victimes de Cheliabinsk, d'Omsk et bien d'autres lieux ".

M. Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI), prend à son tour la parole :

" Monsieur le Président, mes chers Collègues, permettez-moi tout d'abord de féliciter notre rapporteur M. Jacquat pour son très sérieux et excellent travail sur ce sujet extrêmement délicat.

Effectivement, il aurait pu céder à la manipulation donnant dans le sensationnel et l'exagération, ou encore à des motifs économiques qui peuvent pousser certains à aller au-delà de ce qu'est la réalité. Il s'est imposé la rigueur, il s'est imposé l'honnêteté qu'exige sa formation de médecin et de scientifique. Et je tiens, en tant que confrère, à l'en remercier.

La situation qu'il nous a présentée, rappelée avec talent par notre collègue M. Birraux, ne peut qu'obtenir mon accord quant aux chiffres statistiques. Ne délirons pas au-delà du drame réel qu'est Tchernobyl. Ce drame se suffit. N'allons pas imaginer je ne sais quelle leucose aujourd'hui pas du tout établie. A moins que l'on nous présente des statistiques solides !

N'allons pas délirer dans nos amendements sur la nécessité de dénoncer des troubles observés dans le développement du foetus. Nous verrons tout cela. Laissons le temps aux scientifiques pour faire le point réel sur ces désagréments, ces anomalies, ces scandales engendrés éventuellement, dans le futur, par Tchernobyl. Mais aujourd'hui, soyons sérieux.

Tchernobyl, c'est le symbole même du fonctionnement de l'Union Soviétique pendant près de soixante-dix ans, un état totalitaire qui a privilégié les instruments de puissance au détriment des personnes, de l'être humain en général. Ce furent d'abord les essais nucléaires dans les zones habitées du Kazakhstan, mais enfin l'on a aussi connu cela aux Etats-Unis, malheureusement. Ce fut ensuite la construction de dizaines de centrales nucléaires sur le territoire soviétique et celui des PECO sans qu'aucune attention ne soit apportée à la sûreté des installations et encore moins à la sécurité des personnes.

Cela donne le résultat que l'on connaît : un accident nucléaire aux conséquences sanitaires et écologiques très graves, catastrophiques ! Un héritage que les futures générations auront bien du mal à gérer !

Cette réflexion doit nous amener, nous, Européens, à prendre conscience des nouvelles méthodes de gouvernement que l'opinion publique attend de la part des dirigeants européens.

Il n'est plus acceptable, à l'heure des satellites, qu'un Etat dissimule un accident nucléaire à ses habitants et à ses partenaires européens. De même, il est inacceptable d'entendre un gouvernement - comme cela a été le cas en France - affirmer que les nuages radioactifs s'arrêtent aux frontières du pays ! Depuis Tchernobyl, le nucléaire civil est sur la sellette, car tout incident peut avoir de graves conséquences sur la santé publique.

Les promoteurs de ce type d'énergie, incontournable, se doivent d'offrir un maximum de garanties en matière de sûreté des installations. Cela suppose d'importants investissements à l'Est car le bricolage actuel ne tient que grâce à la providence, si l'on y croit. Cela implique enfin une transparence totale, ce qui très souvent, et pas seulement à l'Est, n'est pas toujours le cas.

Je terminerai, même si je m'écarte de notre sujet, en rappelant mon inquiétude quant à l'absence de convention internationale portant sur l'interdiction du rejet des déchets radioactifs dans les mers en Europe et dans le monde. Ce problème du stockage et de leur recyclage devra de toute façon être abordé, et plusieurs fois, par nos dirigeants s'ils ne veulent pas léguer à nos enfants des zones maritimes complètement irradiées. Que Tchernobyl serve au moins à l'avenir ".

M. Denis JACQUAT, député (UDF), rapporteur de la commission des questions sociales, de la santé et de la famille, répond en ces termes :

" Je remercie publiquement M. Gusenbauer, président de la commission, qui, avec les membres de celle-ci, a bien voulu me faire confiance pour présenter ce rapport.

A la suite du rapport de Mme Ragnarsdóttir, il nous a été demandé de faire à nouveau le point sur les conséquences sanitaires de l'accident de Tchernobyl. Et nous devrons dans quelque temps établir un autre rapport pour continuer à suivre la situation de cet état sanitaire.

Ces données sanitaires, scientifiques, ont été définies avec des professeurs des trois pays les plus concernés par le nuage radioactif.

Dans ce débat, un orateur a parlé des " liquidateurs " - il ne faut pas les oublier - qui viennent de toute l'ex-Union Soviétique. Les enfants, les liquidateurs sont malades. Des enfants ont des métastases et ils doivent être traités, de préférence, dans leur propre pays, comme nous le demandent leurs parents. N'oublions pas que des adolescents, qui étaient des enfants au moment de l'accident, ne développent actuellement aucune maladie. Ils peuvent présenter dans les années à venir des cancers de la thyroïde avec des métastases. Nous ne devons donc pas relâcher notre vigilance.

Des données sanitaires qui nous ont été communiquées dans les trois pays les plus concernés - Ukraine, Russie et Bélarus - il ressort que, pour le moment, il n'y a pas de leucose. C'est un point important. Nous avons échangé, lors d'une mission du Conseil de l'Europe, à l'occasion d'un congrès à Minsk, des informations à ce sujet avec des savants japonais, et nous avons pu faire des comparaisons.

Tels sont les quelques mots que je voulais ajouter, en remerciant les différents orateurs qui sont intervenus ".

Parmi les cinq amendements déposés sur le projet de résolution, le numéro deux fait état " des retards constatés dans le développement psychique des enfants conçus mais pas encore nés au moment de la catastrophe ".

M. Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI), prend la parole en ces termes contre l'amendement : " Certes, il est important de penser à ceux qui ont subi un préjudice lorsqu'ils étaient enfants ou en situation foetale : mais ; et c'est une obligation intellectuelle et scientifique, nous ne devons aborder ce sujet que si nous en avons une démonstration.

Or, à ce jour, à moins qu'on ne nous présente des documents officiels prouvant ce préjudice, grâce à des statistiques, je n'ai pas personnellement connaissance de tels cas, si ce n'est que toute personne qui subit, dans son enfance ou dans son état adulte, un choc, quel qu'il soit, et pas seulement du type de celui de Tchernobyl, peut avoir des troubles. Pour ce qui est du foetus, je ne suis pas du tout assuré de la démonstration qui nous est faite.

Je ne peux pas proposer à l'Assemblée de voter un texte qui n'est pas conforme à une position scientifique démontrée ".

L'amendement n° 2 est alors modifié oralement en supprimant la phrase contestée par M. Nicolas ABOUT.

A l'issue du débat, la résolution 1127 contenue dans le rapport 7680, amendée, est adoptée à l'unanimité.

8. Activités des institutions de Bretton Woods (Banque mondiale et Fonds monétaire international) (Mercredi 25 juin)

Selon le rapporteur, le développement des pays plus pauvres est certes maintenant davantage l'oeuvre d'investissements privés plutôt que de l'aide gouvernementale ; certes, il se peut que le monde se soit largement détourné des taux de change fixes au profit des taux de change flottants. Il n'en reste pas moins que la Banque mondiale et le FMI, piliers des établissements de prêt établis par les Nations Unies après la guerre, ont encore un rôle important à jouer dans l'économie mondiale, même s'il semble à la fois nécessaire et urgent d'introduire quelques réformes dans leur fonctionnement.

Le rapport a pour a pour objectif de brosser le tableau des principaux domaines d'activités de ces deux institutions, en s'attardant aussi sur certains aspects de leurs activités susceptibles d'être encore améliorés pour s'adapter aux rapides changements en cours sur la scène internationale. Il étudie les programmes du Groupe Banque mondiale liés au développement du capital humain et ceux ciblés contre la pauvreté, ses activités visant à promouvoir le développement durable du point de vue de l'environnement. Il décrit le développement des secteurs privé et financier, ainsi que son expérience avec des organisations non gouvernementales. Il passe également en revue l'essentiel des programmes d'assistance du FMI, le traitement de la question de la dette et le problème de la corruption, et propose un " programme structurel " de réforme pour les deux institutions.

Le rapport encourage la Banque et le Fonds à tenir davantage compte de leur responsabilité à l'égard du public dans leurs opérations, à inclure dans leurs mandats statutaires l'obligation de défendre et de promouvoir les droits de l'homme, à intégrer dans leurs stratégies de développement les critères de développement durable des points de vue social et écologique. Il les invite à promouvoir la " bonne gestion des affaires publiques ", à lutter contre la corruption, et à renforcer l'efficacité des projets de développement grâce à des stratégies personnalisées selon les pays.

A la suite du débat, la résolution 1128 contenue dans le rapport 7835, amendée, est adoptée.

9. Activités de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) - Rapport de Mme Josette DURRIEU, sénateur, (Soc) - Intervention de M. Claude BIRRAUX, député, (UDF) (Mercredi 25 juin)

Présentant son rapport (7834) au nom de la commission des questions économiques et du développement, Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc), formule les observations suivantes :

" Je salue chaleureusement M. le Président de la Berd, M. de Larosière, et je le remercie vivement pour l'extrême courtoisie dont il a fait preuve à notre égard et pour la collaboration fort harmonieuse et efficace qu'il a apportée à notre travail, donc, à la rédaction de ce rapport. Je souhaite également remercier M. Malleret, M. Lecavalier ainsi que Mme Pissarides qui ont contribué, avec nos services, à l'élaboration du rapport qui vous est présenté.

La banque que vous présidez, monsieur de Larosière, créée en 1991, compte soixante membres, cinquante-huit Etats et deux institutions : l'Union européenne et la BEI. Tous les pays des PECO sont actionnaires et les Quinze représentent dans le capital plus de 55 %.

En 1992, un accord de coopération, signé entre la Berd et le Conseil de l'Europe, prévoyait un certain nombre de visites, de rencontres et ce débat sur les activités de la Berd.

En 1994, prenant la présidence de cette banque, vous aviez une mission extrêmement difficile mais urgente, celle de la réorganisation interne de la Berd.

Je dois dire, en tant que rapporteur et française, que vous avez parfaitement réussi, Monsieur de Larosière, et si j'avais à synthétiser votre action, je la résumerais en deux mots : rigueur et efficacité. Nous vous en remercions et je vous en remercie doublement. Tel sera le point 1 du projet de résolution.

En 1996, une décision importante a été prise à Sofia, celle qui a consisté à doubler le capital de la Berd et à le porter de 10 milliards à 20 milliards d'ECU. Cette décision n'a pas encore été ratifiée. Il faut obtenir une majorité que vous n'avez pas encore, mais cela semble nécessaire et urgent. Tel est le point 10 du projet de résolution.

Le bilan de l'action de la Berd est positif. Vous intervenez dans vingt-six pays regroupant plus de 400 millions d'habitants. La Berd a engagé plus de 370 projets et il est évident qu'une évaluation régulière des résultats positifs est nécessaire ; elle est d'ailleurs demandée. Tel est le point 2 du projet de résolution.

Je rappelle les missions de la Berd, ainsi que les principes qui doivent guider son action : faciliter la transition et promouvoir l'initiative privée. Sur ce point, statutairement, l'objectif qui vous est fixé est dans l'orientation des minima de votre portefeuille d'atteindre 60 % en faveur de l'initiative privée et de la libre entreprise. Vous avez atteint ce point statutaire du règlement ; vous l'avez même dépassé puisque vous êtes au-delà des 60 %. Je suppose que vous nous apporterez des précisions à cet égard.

Vos missions visent également à promouvoir la démocratie, les droits de l'homme, la prééminence du droit, le progrès social. Nous sommes tous - et partout - très attachés à cette avancée dans le domaine social. Tel est le point 5 du projet de résolution.

Nous admettons tous que ces principes sont nécessaires à l'établissement d'une véritable croissance durable. Certes, les risques existent, mais il n'empêche que c'est un défi qui vous est posé. Tels sont les points 4 et 10 du projet de résolution.

L'essentiel porte sur le démantèlement des monopoles, la décentralisation, la privatisation. Il semble que soient réclamées des actions plus fortes sur trois points : renforcement des institutions financières locales, renforcement de l'investissement en capital, accompagnement de tous les projets concernant les infrastructures. Tel est le point 6 du projet de résolution.

Insistance également et demande de vigilance en ce qui concerne, non seulement la protection de l'environnement, mais aussi pour toute forme de transparence et toutes les façons de prévenir les gaspillages des fonds que vous prêtez.

Il est relevé dans trois points du projet une certaine demande d'investissements ou d'accompagnement d'investissements directs étrangers en tenant compte du fait qu'ils sont encore insuffisants dans la plupart des pays, ce que l'on comprend. Cela suppose qu'ensemble, nous consolidions l'environnement législatif et juridique, et nous luttions contre la corruption et la criminalité organisée.

Il est également demandé que, dans le domaine de l'accompagnement du progrès social, la Berd travaille en étroite collaboration avec le Fonds de développement. C'est le point 8 du projet de résolution. De nombreux projets pourraient être menés en commun ; à cet égard, des suggestions peuvent être formulées.

Une politique graduelle de retrait progressif a été décidée en 1996. Elle a été confirmée en 1997. C'est un point d'interrogation très préoccupant. A partir d'un certain moment, vous réduirez, vous arrêterez les prêts aux pays qui auront atteint un certain niveau de développement. En la matière, les questions sont très précises Monsieur le Président : quels critères prendrez-vous en compte ? Le retrait sera-t-il total dans ces pays plus avancés qui, naturellement, le refusent ?

Mon rapport a porté essentiellement son éclairage sur les sept pays de la CEI, pour plusieurs raisons, non seulement à cause de la Russie, objet de toutes les préoccupations voire de toutes les sollicitudes, mais aussi parce qu'un certain nombre d'autres pays qui ont leur importance, notamment les trois pays du Caucase sont, dans leur ensemble, moins avancés. Alors que les pays des PECO sont en expansion avec une croissance supérieure à 5 %, les pays de la CEI sont en déclin même s'il y a une reprise actuellement. L'inflation est inférieure à 20 % dans les PECO ; elle est supérieure à 50 % dans ceux de la CEI. Par conséquent, ces derniers ont besoin de notre accompagnement. C'est la première raison qui justifie mon choix.

La deuxième, non moins importante, est l'instabilité politique de ces pays. Elle est sensible, elle est forte : en Tchétchénie, le problème est en voie de règlement ; en mer Noire, à Odessa, en Transnistrie, en Abkhazie, en Ossétie, dans le Haut-Karabakh ; cette instabilité autour du pôle qu'est la Russie concerne l'ensemble de l'Europe.

Par ailleurs, les problèmes nucléaires et pétroliers - qui se posent surtout dans les pays, qui détiennent ces richesses - constituent aujourd'hui des leviers pour la politique étrangère. Or, Monsieur le Président, il existe un déséquilibre dans les aides au sein de la CEI. Alors que la Russie a reçu en 1996 plus de 900 millions d'ECU, les trois pays du Causase en ont perçu moins de 200 millions. Pourtant, ils ont besoin de notre accompagnement, de même que la Moldavie. Vous avez eu raison de geler les projets de la Biélorussie, accompagnant ainsi la décision du Conseil de l'Europe.

Pour conclure, j'indique que les pays de la CEI et ceux du Caucase, ont des besoins urgents car ils sont dans des zones à risques. En termes politiques, j'insiste sur le fait que si nous ne les accompagnons pas économiquement, ils ne pourront jamais conquérir leur indépendance économique, donc leur véritable souveraineté. Nous entretenons une instabilité qui est dangereuse et qui, au-delà de leur propre devenir, concerne l'ensemble de l'Europe. "

M. Claude BIRRAUX, député (UDF), s'exprime alors en ces termes :

" Madame la Présidente, Monsieur le Président de la Berd, mes chers Collègues, je veux d'abord féliciter Mme Durrieu pour la qualité et la précision de son rapport.

La commission de la science et de la technologie se limitera à donner un avis sur le seul aspect qui relève strictement de sa compétence, à savoir le compte de sûreté nucléaire. Je rappelle que ce dernier est alimenté par des contributions volontaires des Etats, avec un minimum de 1,5 million d'ECU. Au 31 décembre 1996, quatorze pays plus l'Union européenne avaient alimenté ce fond, pour un montant de 257,2 millions d'ECU.

Au 31 décembre 1996, cinq projets avaient été approuvés par l'assemblée des contributeurs, et les accords de financement signés par les gouvernements concernés, les compagnies d'électricité et la banque. Ils concernent : la centrale de Kozloduy en Bulgarie, pour 24 millions d'ECU, accord signé en juin 1993 ; la centrale d'Ignalina, en Lituanie, pour 35 millions d'ECU en février 1994 ; en Russie, la centrale de Léningrad - 4 RBMK - pour 30 millions d'ECU, les centrales de Kola et de Novovoronezh - 4 VVER 440/230 - pour 45 millions d'ECU, accords signés en juin 1995 ; enfin un projet de 118 millions d'ECU, pour Tchernobyl, a été signé en novembre 1996. Ce projet représente une partie du vaste programme de soutien à l'Ukraine pour fermer Tchernobyl en l'an 2000. Cela est conforme au memorandum of Understanding cosigné par l'Ukraine, le G7 et l'Union européenne.

Pour chacun des projets, des accords précis engagent les signataires sur les travaux, les échéances, leurs engagements réciproques. Pour la Russie, un comité commun a été constitué afin de suivre les progrès de la mise en oeuvre des accords.

Je me réjouis de cette initiative, qui répond en partie à ma demande de l'an dernier, de voir une évaluation et un suivi des projets, mais en partie seulement, car aucun mécanisme régulateur n'est prévu si les cocontractants ne tiennent pas leurs engagements.

Tout ce qui précède représente la partie statutaire de mon rapport et résume les éléments contenus dans le rapport annuel de la banque, que j'ai découverts en temps voulu sur Internet.

Je veux ensuite aborder une partie plus politique qui n'y figure pas.

L'an dernier, je m'étais déjà interrogé sur la capacité du compte de sûreté nucléaire de la Berd à répondre à sa vocation, compte tenu des obstacles que peuvent dresser, selon leur bon ou mauvais vouloir, les contributeurs. J'avais cité le cas de l'achèvement de la centrale slovaque de Mochovce : la banque avait fini par être " recalée " et, finalement, elle avait choisi d'empêcher l'achèvement de la centrale ce qui entraînait, de facto, la continuation de celle de Bohunice, qui est l'une des plus vétustes de l'Est. S'est substitué à la banque un consortium tchéco-germano-franco-russo-slovaque.

De même en Ukraine, la presse nous apprend qu'une étude dite at least cost effectuée par un cabinet britannique empêcherait la banque de financer l'achèvement de deux centrales et proposerait de construire des centrales à gaz. Or, ces centrales, de Rivne 4 et Khmelnitsky 2, sont achevées à 80-90 %, et il s'agit de les mettre aux normes occidentales, pour un investissement de 330 millions de dollars.

De plus l'accord avec l'Ukraine, qui a été long à obtenir, est un accord politique où chacune des parties doit pouvoir dire qu'elle a obtenu et un bénéfice et une concession, mais que globalement il y a bénéfice.

Comment politiquement faire accepter à l'Ukraine de fermer Tchernobyl et aussi de passer sous la coupe de la Russie pour la fourniture de gaz ? Cela impossible. C'est tout le fragile équilibre de l'accord entre le G7, l'Ukraine et l'Union européenne qui est remise en cause. Aussi, ai-je trois questions à poser : Qui sont ces distingués consultants, d'un libéralisme ultra-orthodoxe ? La banque a-t-elle fréquemment recours à ces consultants ? Défiant un accord conclu au plus haut niveau des chefs d'Etat et de gouvernement du monde, j'ai envie de demander : " Qui vous a fait roi ? "

Nous avons adopté hier une recommandation relative aux conséquences sanitaires de l'accident de Tchernobyl. La fermeture de Tchernobyl est un symbole et un signal fort : un symbole, car Tchernobyl représente encore l'archétype du système soviétique, où la production primait sur toute autre considération, en particulier de sûreté ; un signal fort, car sa fermeture signifiera que l'on a changé d'échelle de valeurs, qu'une autre conscience a vu le jour : celle de la primauté de la sûreté sur toute autre considération. Ce renversement d'échelle de valeurs est un gage positif pour le développement de la démocratie.

Il a fallu des années d'efforts pour tenter de faire comprendre comment intégrer dans les esprits et dans les formes cette notion de sûreté et ses exigences. Vous comprenez alors que le fond engage beaucoup plus que la forme et que la pédagogie de l'exemple et du respect des engagements est capitale.

La question qui se pose, devant un problème d'une telle ampleur est celle de savoir non pas tant si les procédures internes de la banque permettent d'honorer l'accord conclu sous l'égide du G7, mais comment adapter ces procédures pour répondre à l'attente de vos créateurs.

De votre réponse dépend toute la crédibilité et la confiance que des démocraties naissantes et balbutiantes peuvent avoir envers ceux qui sont sensés en représenter le berceau ".

Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc), reprend la parole en ces termes :

" M. le Président de Larosière a reçu de nombreux messages tout en recevant des témoignages de confiance et de crédibilité. Je retiens, pour ma part, deux points de son discours introductif : d'abord, il a voulu affirmer un nouveau défi, celui qui consiste à consolider les réalisations faites, ensuite il a tenu à nous rassurer quant au retrait progressif qui inquiète certains pays, disant qu'il n'y avait pas de retrait d'Europe centrale, seulement - et malgré tout - un glissement des priorités vers l'est.

J'ai aussi pu constater une insistance sur des aspects nouveaux. Le problème de l'environnement est devenu central. J'ai également relevé des interventions concernant les nouvelles techniques de communications, la protection du patrimoine et cette autre forme d'industrie que sont le loisir et le tourisme, lesquels peuvent, effectivement, être créateurs de richesses et d'activités.

Je précise à Lady Hooper que les 60 % destinés à l'investissement privé sont 60 % du portefeuille global de la Berd, et même plus.

En ce qui concerne la collaboration étroite qui pourrait être établie entre le Conseil de l'Europe et la Berd dans d'autres domaines, notamment avec le Fonds de développement social, je citerai - tout simplement parce qu'il peut être concrétisé dans un proche avenir - l'exemple de l'accompagnement des orphelinats en Roumanie. Cette opération pourrait être menée conjointement. Je vous la livre puisque vous avez demandé que l'on vous donne quelques exemples.

En conclusion, je tiens à dire que nous avons à nous féliciter, les uns et les autres, du travail harmonieux que nous élaborons avec cette Banque. Je pense que nous pouvons être ainsi les artisans de l'expansion économique et de la stabilisation politique de l'Europe.

Permettez-moi de remercier le président de notre commission ainsi que M. Barsony et M. Torbiörn, secrétaire de la commission, pour le travail qu'ils ont accompli à mes côtés ".

A l'issue du débat, la résolution 1129 contenue dans le rapport 7834, amendée, est adoptée.

10. Priorité à la lutte contre l'exploitation du travail des enfants - Intervention de MM. Jean-Claude MIGNON, député (RPR) et Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI) (Jeudi 26 juin)

Le Conseil de l'Europe s'est engagé à lutter contre le travail des enfants, et sa Charte sociale européenne interdit le travail des enfants de moins de quinze ans.

La presse a révélé dernièrement que dans les pays en voie de développement, il y a 250 millions d'enfants qui travaillent. Mais le travail des enfants n'a pas pour autant disparu d'Europe. Souvent approuvé par la société, il correspond à un phénomène social souvent invisible dont la réalité est difficile à prouver, mais il comporte des dangers : exploitation sexuelle à des fins commerciales, cruautés infligées aux travailleurs domestiques, trafic d'enfants, risques pour la santé et conditions d'existence précaires des enfants se trouvant à la rue.

Le rapport met en lumière les faits suivants :

Au Royaume-Uni, la moitié environ des enfants de treize à quinze ans occupent un emploi à temps partiel, et beaucoup ont au moins deux emplois. Il y a de plus en plus d'enfants à la rue, et la prostitution enfantine pose un énorme problème.

L'Italie est le pays d'Europe occidentale qui a la plus nombreuse population d'enfants au travail (un million et demi). C'est dans le sud que la situation est la plus grave : une enquête réalisée à Naples sur les enfants qui travaillent a révélé que la plupart sont occupés plus de six heures par jour à des tâches qui leur rapportent moins du tiers du salaire correspondant d'un adulte et ne leur ouvrent droit à aucune prestation sociale.

En Espagne et au Portugal, environ un million et demi d'enfants sont employés illégalement, souvent dans le commerce ou l'exploitation agricole de leur parents. Le travail saisonnier des moissons leur fait manquer l'école pendant des mois. Il y a aussi des enfants vendeurs de rue, cireurs de souliers, mendiants et ramasseurs d'ordures.

En Bulgarie, la police et les " skinheads " s'en prennent aux enfants des rues qui mendient, se livrent à des " petits boulots ", ramassent des ordures, volent ou se prostituent.

Des enquêtes conduites récemment en Roumanie ont révélé que 6 % des enfants de sept à quinze ans y travaillent plus de six heures par jour.

La vulnérabilité des enfants rom (tsiganes) s'est répandue dans toute l'Europe. Etant donné la structure de la famille rom, beaucoup d'entre eux travaillent à temps plein - après l'âge de douze ans - dans la métallurgie, la ferraille, le commerce des chevaux, le spectacle, l'agriculture et la mendicité. Certains s'organisent en bandes.

La Turquie a fait l'objet d'une étude du Bureau International du Travail (BIT) qui a révélé que près de deux millions d'enfants - dont plus de 800.000 âgés de moins de seize ans y travaillent comme salariés dans leur famille.

Le rapport invite les gouvernements à :

- mettre en oeuvre un plan d'action pour lutter contre l'exploitation économique des enfants ;

- rassembler des données afin de mettre les problèmes en lumière ;

- aligner tours législations nationales sur les normes européennes et internationales ;

- promouvoir l'inspection scolaire et l'inspection du travail ;

- consulter les partenaires sociaux, les ONG, les enfants et les parents ;

- favoriser la lutte contre le travail des enfants dans les pays en voie de développement en appliquant, non pas des sanctions risquant de nuire aux économies locales, mais des programmes spéciaux visant à contenir les pires excès.

Il préconise aussi une évaluation de la situation régnant dans les quarante pays membres du Conseil et l'adoption, en la matière, d'une politique européenne exhaustive inspirée des normes sociales du Conseil de l'Europe.

La question doit faire l'objet d'une convention du BIT. Michel Hansenne, Directeur général du BIT, exposera des idées à cet égard lors du débat.

M. Jean-Claude MIGNON, député (RPR), intervient dans le débat en ces termes :

" Madame la Présidente, mes chers Collègues, je tiens tout d'abord à féliciter Mme Irena Belohorská, pour la qualité de son rapport. Elle attire l'attention sur un problème souvent nié et longtemps négligé en Europe bien qu'il soit beaucoup plus grave dans nombre de pays d'Asie, d'Afrique et d'Amérique du Sud .

Le rapporteur a tout à fait raison quand elle écrit qu'il faut d'abord donner la priorité à la lutte contre les modes les plus intolérables du travail des enfants, à la lutte contre les causes principales qui sont la pauvreté et l'exclusion sociale. Je souhaiterais faire quelques remarques concernant le rapport, la situation des enfants et les mesures en cours ou envisagées.

D'abord, force est de constater que le nombre d'organismes qui s'occupent de ce dossier est important. De même, il convient de noter qu'il existe déjà un certain nombre de chartes, recommandations, conventions ou programmes oeuvrant pour un bon encadrement législatif ainsi que social des enfants et contre les pratiques abusives de travail des enfants.

En effet, il est impressionnant de constater, combien d'interlocuteurs sont en charge du problème : l'ONU dont dépendent l'UNESCO et l'Organisation internationale du travail, le programme IPEC pour l'abolition du travail des enfants, le Bureau international du Travail, le Conseil de l'Europe, l'Organisation mondiale du commerce, l'Union européenne ainsi que nombre d'ONG et de syndicats. Cela étant, il est frappant et paradoxal de constater qu'il n'existe presque pas de données précises sur la situation des enfants ni dans les pays membres du Conseil de l'Europe, ni dans d'autres pays.

Malheureusement on voit que les Etats adaptent souvent leur discours en fonction des circonstances des organisations internationales diverses luttant contre le travail des enfants.

L'idée de compléter par exemple la Convention n° 29 de l'Organisation internationale du travail me semble raisonnable. De manière plus générale, l'exploitation des structures déjà existantes et la coopération étroite avec et entre les organismes cités est vivement souhaitable. Je vous le rappelle afin d'éviter la prolifération des systèmes qui rend la coordination et la coopération encore plus difficile.

Il faudrait également distinguer davantage la situation en Europe de celle d'autres continents et prendre en considération les spécificités européennes de ce phénomène scandaleux. Au niveau européen, nous devons profiter de la structure du Conseil de l'Europe pour nous mettre d'accord le plus rapidement possible sur une stratégie permettant de lutter contre les causes de ce type d'exploitation.

En tout cas, nous devons faire preuve de plus de coordination entre les politiques nationales et d'une volonté ferme pour entamer des recherches et des inspections afin d'évaluer ensemble les situations pour pouvoir élaborer à long terme une stratégie concrète, adaptée et cohérente de lutte contre les abus.

Une priorité doit être accordée à la lutte contre les formes les plus inacceptables de l'exploitation du travail des enfants comme vous le constatez au point 6 du projet de recommandation.

En ce qui concerne la consultation des enfants, il sera très difficile de trouver ou de créer des instances représentatives pertinentes. Dans ce contexte, je tiens à souligner que les enfants eux-mêmes sont tout à fait conscients du problème ; ils prennent des initiatives pour y répondre comme, par exemple, samedi dernier à l'Assemblée nationale à Paris où, dans le cadre du Parlement des enfants, les élèves d'une académie ont déposé une proposition de loi donnant la possibilité aux fabricants ou aux importateurs de faire figurer un logo sur les étiquettes ou les emballages de produits afin d'assurer les consommateurs français qu'aucun enfant n'a travaillé à leur fabrication. J'irai même encore plus loin en proposant - et je rejoins par cette proposition l'initiative citée dans votre rapport - l'instauration d'un label européen, facultatif dans un premier temps, afin de réveiller la conscience des consommateurs et du public. Cela s'inscrit dans la logique du point 13 VI du projet de recommandation.

Nous devons tous ensemble oeuvrer pour que l'opinion publique et les consommateurs prennent conscience du problème, qu'ils aient la possibilité de faire un choix actif et de l'exprimer à travers leur comportement d'achat. Cela montrera aux producteurs que l'exploitation du travail des enfants n'est pas acceptée, et surtout plus tolérée, d'une manière plus subtile que par le biais de simples sanctions commerciales qui - on le sait - sanctionnent avant tout les enfants.

Nous avons besoin d'un changement profond de mentalité qui ne sera possible que si l'on arrive à sensibiliser la société dans son ensemble. Nous devons continuer à agir dans ce sens. "

M. Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI), prend alors la parole dans les termes suivants :

" Je veux d'abord féliciter notre collègue, notre rapporteur le Dr Belohorská, pour son important rapport. Elle a mis dans son travail sa compétence professionnelle et sa valeur personnelle. Elle sait mieux que quiconque, que si le Conseil de l'Europe est la maison des droits de l'homme, il nous faut toujours rester très attentifs au développement de ces droits.

La Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, l'acte fondateur en la matière, adoptée dès sa première année d'existence par le Conseil de l'Europe, était tout entier un texte de liberté, presque libertaire, une véritable machine de guerre contre le carcan soviétique alors triomphant. Cependant nous savons, et ce de façon constante, qu'entre le fort et le faible, c'est paradoxalement la liberté qui opprime et la loi qui protège. Tout l'effort de notre civilisation européenne est de substituer à la liberté du plus fort d'exploiter les plus faibles, la protection légale des plus vulnérables et, d'abord, des enfants.

Cette protection a pris notamment la forme d'une interdiction du travail des enfants en deçà d'un âge qui s'est peu à peu relevé. C'est là, désormais, une valeur partagée par tout notre continent européen. Comment ne pas s'en réjouir ? Sans doute subsiste-t-il, çà et là, des disparités quant à cet âge minimum ou même des lacunes qu'il convient bien entendu de combler.

J'approuve totalement la démarche proposée, subordonnée, " au principe de l'intérêt supérieur de l'enfant ". Selon cette démarche, nous sommes invités, en Europe, à éliminer sans délai " les modes intolérables de travail des enfants " et à lutter plus généralement contre toute forme d'exploitation du travail des enfants.

Toujours selon cette démarche, les sanctions commerciales ou le développement de labels certifiant que les produits n'incorporent pas de travail d'enfant, peuvent être envisagés par l'Europe dans ses relations économiques extérieures, mais seulement à titre subsidiaire, en complément de programmes de réhabilitation et de développement.

Je voudrais, pour ma part, insister sur le fait que les familles qui tolèrent, voire encouragent, le travail de leurs enfants, ne le font - cela a été souligné par plusieurs orateurs - pas toujours par malignité ou goût du profit mais parce que c'est souvent pour elles une question de survie. Le magazine de notre Assemblée parlementaire Les Européens rappelle que c'est en Afrique que l'on observe le taux le plus élevé d'enfants au travail, jusqu'à 55 % au Mali, encore que ce chiffre ne distingue pas entre les fillettes et les jeunes garçons : on observerait sans doute que près de trois quarts des petites filles sont astreintes à divers travaux et ne reçoivent aucune éducation scolaire.

Notre Assemblée se doit de consacrer un rapport spécifique à cette inégalité qui est non seulement choquante en termes de respect des individus, mais absurde et dangereuse, puisqu'il est désormais établi que l'éducation des filles est le seul élément déterminant de la maîtrise de la démographie et par conséquent du développement. Lutter contre le travail des enfants, c'est d'abord s'attaquer aux conditions qui le rendent indispensable dans des familles où chacun, et dès le plus jeune âge doit gagner son pain.

C'est pourquoi, je félicite notre rapporteur de suggérer une recommandation qui vise non seulement des mesures réglementaires directes mais également une action plus générale de réhabilitation subordonnée à l'intérêt supérieur de l'enfant.

Je voterai donc pour la recommandation, tout en souhaitant interroger notre rapporteur sur la formulation de la fin du paragraphe 4 dont une phrase me semble superflue, voire contraire même au sens de l'ensemble du rapport, car elle risquerait d'être interprétée comme un consentement de notre part au travail des enfants. Il s'agirait en effet, d'après le rapport, d'assurer aux enfants qui combinent l'école et le travail " une forme d'enseignement adéquate et souple ". Si notre rapporteur et nos collègues en étaient d'accord, peut-être vaudrait-il mieux renoncer à cette formulation ".

Après lecture du projet de recommandation par le Président, M. Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI), reprend alors la parole lors de la discussion des amendements pour soutenir l'amendement oral suivant :

" Je veux simplement poser de nouveau la question formulée dans mon intervention. Il s'agit de supprimer l'avant-dernière phrase du paragraphe 4 du projet de recommandation : " Il faut assurer à ces enfants au travail une forme d'enseignement adéquate et souple . "

Même si ma proposition n'a pu faire l'objet d'un amendement écrit, je crois qu'elle est importante. Car la phrase en cause équivaut à admettre que l'on maintient la situation de l'enfant au travail, puisqu'on lui reconnaît aussi la nécessité d'une forme d'enseignement adéquate et souple.

Nous nous sommes battus toute la matinée contre le travail des enfants. Si c'est pour simplement constater que les enfants vont rester au travail, et qu'il s'agit de leur assurer un " enseignement adéquat et souple ", Nous allons en sens contraire de l'esprit du rapport.

La phrase dont je parle est supprimée, la phrase suivante explique le souhait du rapporteur, à propos de ceux qui resteront quand même au travail - car on ne peut pas tout régler : " Tout enfant doit bénéficier d'une éducation gratuite et appropriée ... ". Voilà qui répond bien au souci du rapporteur ! ".

Dans le débat qui a suivi, la proposition de M. Nicolas ABOUT , présentée comme un amendement oral, n'a pas été retenue par le rapporteur de la Commission des questions sociales, de la santé et de la famille dans la mesure où cette proposition apportait, selon lui, un changement de fond auquel il s'opposait. Il en a donc repoussé l'examen.

A l'issue du débat, la recommandation 1336 contenue dans le rapport 7840 a été adoptée, amendée.

11. Mise en oeuvre de l'Accord de Dayton pour la Paix en Bosnie et Herzégovine, et fonctionnement des institutions de protection des droits de l'homme en Bosnie et Herzégovine (Jeudi 26 juin)

L'objectif de ce rapport est de faire le point sur l'application de l'Accord de Dayton en prévision des élections municipales qui doivent avoir lieu les 13 et 14 septembre prochain.

Les rapporteurs constatent - non sans réserve - que des progrès ont été accomplis ces 18 derniers mois : le fonctionnement des structures politiques communes s'est amélioré, mais le dialogue reste difficile entre les deux entités - Fédération de BIH et Republiki Srpska- ; 200.000 réfugiés sont retournés dans les lieux où ils habitaient avant la guerre, mais la plupart ont rejoint les " zones majoritaires ", c'est-à-dire celles sous la contrôle de leur groupe ethnique ; l'information est plus objective et équilibrée grâce à des médias indépendants qui bénéficient d'un soutien international, mais ce sont toujours les radios et télévisions qui sont aux mains des partis au pouvoir qui jouent un rôle décisif dans la formation de l'opinion publique.

Toutefois, le renforcement des relations de la Bosnie et Herzégovine avec le Conseil de 1'Europe exigera des progrès supplémentaires, notamment en ce qui concerne le respect des droits de l'homme, la coopération avec la Tribunal criminel international pour l'ex-Yougoslavie et la liberté de déplacement, y compris celle passant par le rétablissement des communications téléphoniques et postales entre les deux entités.

Le texte de la résolution de l'Assemblée demande à la République fédérale de Yougoslavie et à la Croatie de contribuer activement, avec les autorités et les deux entités de Bosnie et Herzégovine, à la création des conditions qui permettront la tenue d'élections municipales.

Une nouvelle délégation d'invités spéciaux du Parlement de Bosnie et Herzégovine, dont les cinq membres sont des parlementaires venant de deux entités - Fédération de Bosnie et Herzégovine et Republika Srpska - et appartenant aux partis au pouvoir ou aux partis d'opposition devrait assister aux travaux de l'Assemblée pour la première fois pendant la session de juin.

La résolution 1130 contenue dans le rapport 7842 est adoptée, amendée, à l'issue du débat. Puis la recommandation 1337 est adoptée à l'unanimité, telle que proposée dans le rapport 7833.

12. Traité sur la Charte européenne de l'énergie - Intervention de M. François LESEIN, sénateur (RDSE) (Vendredi 27 juin)

Le rapport rappelle que, en décembre 1991, 51 Etats ont adopté la Charte européenne de l'énergie qui vise à faciliter la coopération dans le domaine de l'énergie entre des Etats autrefois séparés par le rideau de fer. Cette Charte a donné naissance à un instrument juridique contraignant en droit international, le Traité sur la Charte de l'énergie ouvert à signature en décembre 1994.

Ce texte vise à améliorer la sécurité énergétique en Europe, à stimuler le commerce et le transport d'énergie à échelle du continent et à promouvoir la reprise et la croissance économiques dans les pays d'Europe centrale et orientale et dans la CEI. Il a été signé, depuis lors, par 49 Etats ainsi que par l'Union européenne.

Le Traité sur la charte de l'énergie constitue un progrès majeur dans la réglementation d'activités du secteur énergétique comme l'investissement (surtout ceux déjà réalisés), le commerce et le transfert des bénéfices, ainsi que dans l'élaboration d'un mécanisme consacré au respect des obligations et au règlement des différences (il octroie explicitement des droits aux entreprises au dépend des Etats et les obligations entre ces derniers sont également contraignantes).

Le Traité reconnaît explicitement les droits souverains des Etats sur les ressources énergétiques, tout en proposant un système d'investissement ouvert dans le secteur de l'énergie.

Il donne un cadre juridique à la coopération paneuropéenne Est-Ouest dans un secteur qui revêt une importance capitale pour l'économie et la politique mondiales. Il doit néanmoins être ratifié par 30 Etats pour entrer en vigueur et, actuellement, seulement 18 ont mené à terme le processus de ratification. Des négociations ont par ailleurs été entamées et progressent dans des domaines complexes qui ne sont pas suffisamment réglementés par la Traité tels que l'environnement ou les équipements liés à l'énergie.

Les politiques énergétiques peuvent jouer un rôle prépondérant dans la maintien de la paix et de la stabilité en Europe et c'est pourquoi il est urgent que ce Traité soit appliqué. Le rapport de M. Tomas Olrich invite donc les Etats membres du Conseil de l'Europe à renforcer leur collaboration dans le secteur énergétique, aussi bien dans le cadre du Traité qu'en dehors de celui-ci. Il appelle les Etats à ratifier le Traité et à mettre pleinement en oeuvre ses dispositions afin de parvenir à une plus grande cohérence des politiques énergétiques.

M. François LESEIN, sénateur (RDSE), intervient en ces termes :

" Monsieur le Président, mes chers Collègues, je veux, bien sûr, féliciter notre collègue, M. Olrich, pour le travail approfondi dont rendent bien compte le rapport et son annexe.

Si les effets sur la santé humaine de l'accident de Tchernobyl sont, dix ans après, mesurables - sinon hélas ! toujours curables - qui peut en évaluer les effets sur l'environnement dans toute la région ? Mais il est un effet de l'accident de Tchernobyl plus difficile encore à cerner : l'irruption violente, dans le débat politique, de l'impératif international de la protection de l'environnement.

La charte signée en 1991 par cinquante et un Etats tend à organiser la coopération dans le domaine de l'énergie, c'est-à-dire dans un domaine capital pour la vie économique mais, nous le savons également désormais, extrêmement sensible pour la protection de l'environnement, non seulement dans l'immédiat, mais aussi pour les générations à venir.

J'y vois un texte exemplaire qui concilie des mesures de libéralisation du marché, de sécurité des investissements et des approvisionnements, et la protection de l'environnement. D'ordinaire, ces impératifs font l'objet de textes distincts quand ils ne sont pas présentés comme antagonistes.

Je me félicite donc que notre Assemblée vienne appuyer cette charte dont la procédure de ratification est précisément en cours devant le Parlement français. Je partage également le souci de notre rapporteur de voir ratifier simultanément le protocole annexé à la charte. Il précise des dispositions visant à l'efficacité énergétique et impose le respect des aspects environnementaux.

Pour que ce traité produise tous les effets bénéfiques qu'en attendent aussi bien les consommateurs que les investisseurs ou encore les Etats producteurs d'énergie, il manque sans doute encore un texte complémentaire assurant la protection des investissements, notamment pendant la phase dite de préinvestissement particulièrement importante dans le développement des projets d'exploitation d'énergie.

Je me réjouis également de la constitution d'un espace de solidarité à l'échelle de tout le continent européen et même d'une large partie de l'Asie, qui devrait, à terme, ne constituer qu'un seul grand marché de l'énergie régi non seulement par les règles de transparence, d'ouverture et de concurrence qui doivent assurer la stabilité des approvisionnements et l'offre au meilleur prix, mais également par les mêmes règles de respect de l'environnement.

Je voudrais cependant évoquer les questions connexes auxquelles la charte, dans son état actuel, n'apporte pas encore les réponses nécessaires.

Tout d'abord, le fait que ni les Etats-Unis ni le Canada n'adhèrent au traité me semble préoccupant. En effet, il s'agit d'un texte de libéralisation économique et l'on ne peut que s'étonner de voir certains champions de la libre concurrence et de la globalisation invoquer la protection de leurs intérêts nationaux pour refuser leur signature.

Là encore, risque de se poser le problème de la réciprocité des avantages dans les relations entre un espace où la libre concurrence va devenir effective et un espace, quoi qu'on en dise, toujours protégé.

Enfin, le relatif échec de la récente Conférence des Nations Unies qui devait faire le point sur les engagements de " l'Agenda 21 " adopté à la Conférence mondiale de Rio montre bien que le problème d'une gestion rationnelle de l'énergie et particulièrement des énergies fossiles, donc non renouvelables, reste entier. D'autant plus que la mesure précise des pollutions créées par telle ou telle sorte d'énergie reste à inventer.

Il y a là un défi que notre Assemblée s'attachera certainement à relever pour développer une culture de l'efficacité énergétique permettant un développement durable, culture qui se diffusera à travers tous les parlements du continent européen représentés ici à Strasbourg.

Lorsque l'on sait que le continent européen représente près du quart de la consommation mondiale d'énergie, un consensus sur une vision à long terme de la gestion des approvisionnements énergétiques et des effets sur l'environnement peut être un élément d'entraînement pour les zones où l'on refuse encore cette prise de conscience.

Je souhaite donc que notre Assemblée continue d'étudier ces questions déterminantes pour notre avenir commun et qu'elle soit le creuset du nécessaire consensus paneuropéen ".

La résolution 1131, contenue dans le rapport 7838, amendée, est adoptée à l'unanimité.

V. QUATRIEME PARTIE DE LA SESSION (STRASBOURG - du 22 au 26 septembre 1997)

1. Introduction

L'Assemblée parlementaire a tenu à Strasbourg la quatrième partie de sa session ordinaire de 1997 du lundi 22 septembre au vendredi 26 septembre.

Au cours de cette quatrième et dernière partie de sa session ordinaire, l'Assemblée a entendu :

- le mardi 23 septembre, une allocution de M. Pierre MOSCOVICI , ministre délégué aux Affaires européennes, qui a répondu en particulier aux questions de Mme Josette DURRIEU , sénateur (Soc), de MM. Jacques BAUMEL , député (RPR) et Daniel HOEFFEL , sénateur (UC) (documents 7907 et 7919).

- le jeudi 25 septembre, une allocution de M. Juan Ignacio BARRERO VALVERDE , Président du Sénat espagnol.

Au cours de cette quatrième partie de session, l'Assemblée a également délibéré des points suivants :

- le rapport d'activité du Bureau de l'Assemblée (rapport 7902 et ad I, II et III) ; Mme Josette DURRIEU , sénateur (Soc), a pris la parole dans ce débat avant que l'Assemblée ne prenne acte du rapport et de ses annexes ;

- les obligations et engagements de la République tchèque en tant qu'Etat membre du Conseil de l'Europe (Rapport 7898 et ad et adoption de la Recommandation 1338 clôturant la procédure de suivi) ;

- les obligations et engagements de la Lituanie en tant qu'Etat membre du Conseil de l'Europe (Rapport 7896 et adoption de la Recommandation 1339 clôturant la procédure de suivi) ;

- les effets de la détention sur le plan familial et social ; M. Daniel HOEFFEL , sénateur (UC), est intervenu dans ce débat (Rapport 7816 et adoption de la Recommandation 1340) ;

- la demande d'avis du Comité des ministres sur un protocole à la Convention du Conseil de l'Europe sur la bio-médecine, et visant à interdire le clonage d'êtres humains ; MM. Jean-François MATTEI , député (UDF) et Claude BIRRAUX , député (UDF), sont intervenus dans ce débat (Demande d'avis révisé 7884 révisé, Rapport 7895, Avis 7906 et adoption de la Directive 534) ;

- les politiques spatiales européennes : dans ce débat, introduit par exposé de M. Antonio RODOTÀ , Directeur de l'Agence spatiale européenne, M. Jean-François LE GRAND , sénateur (RPR), Mme Josette DURRIEU , sénateur (Soc) et M. Claude BIRRAUX , député (UDF), ont pris la parole (Rapport 7875 et adoption de la Recommandation 1341) ;

- la protection de la vie privée ; ce point a été inscrit à l'ordre du jour selon la procédure du débat d'actualité, à la demande, notamment, de Mme Josette DURRIEU , sénateur (Soc), au nom de la délégation française qu'elle préside ;

- l'organisation d'une conférence parlementaire pour renforcer les systèmes démocratiques en Europe et la coopération dans la lutte contre le terrorisme (Rapport 7876, Avis 7904 et adoption de la Résolution 1132) ;

- la situation en Albanie : M. Daniel HOEFFEL , sénateur (UC), est intervenu dans ce débat (Rapport 7892 et adoption de la Résolution 1133) ;

- la contribution de l'Assemblée parlementaire au deuxième sommet des chefs d'Etat et de Gouvernement des pays membres du Conseil de l'Europe, débat organisé selon la procédure d'urgence (Rapport 7921 et Recommandation 1342) ;

- les mines terrestres antipersonnel et leurs conséquences humanitaires, le débat étant introduit par un exposé de M. Cornelio SOMMARUGA , Président du Comité international de la Croix-Rouge, et se poursuivant notamment par l'adoption d'un amendement présenté par MM. Jean BRIANE , député (UDF) et Claude BIRRAUX , député (UDF) (Rapport 7891, adoption de la Recommandation 1343 et de la Directive 535) ;

- l'élargissement du Conseil de l'Europe : compétences budgétaires et administratives de l'Assemblée, débat dans lequel sont intervenus M. Bernard SCHREINER , député (UDF), en qualité de Président de la commission du budget et du programme de travail intergouvernemental, et Mme Josette DURRIEU , sénateur (Soc), (Rapport 7900, adoption de la Recommandation 1344 et de la Directive 536) ;

- la protection des minorités nationales : M. Nicolas ABOUT , sénateur (ap. RI), a pris la parole dans ce débat (Rapport 7899, Avis 7922 et adoption de la Recommandation 1345) ;

- les activités de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), le débat étant traditionnellement élargi à des délégations d'Etats non membres pléniers du Conseil de l'Europe, comme le Canada ou le Japon (qui ont cependant le statut d'observateur depuis 1996) ou encore le Mexique. Après une allocution de M. Donald J. JOHNSTON , secrétaire général de l'OCDE, M. Jean BRIANE , député (UDF), en sa qualité de Président de la commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et des pouvoirs locaux, ainsi que M. Jean VALLEIX , député (RPR), sont intervenus dans ce débat (Rapport 7877, Avis 7908 et adoption de la résolution 1134) ;

- les implications pour l'Europe et pour le monde de la " Loi sur la démocratie cubaine " (dite Loi Helms-Burton ) votée par le Congrès des Etats-Unis d'Amérique (Rapport 1881 et adoption de la Résolution 1135) ;

- le partenariat européen des parlements nationaux au sein de l'Assemblée parlementaire (Rapport 7903, adoption de la Résolution 1136 et de la directive 537) ;

- la création d'une commission sur l'égalité des chances pour les femmes et les hommes : M. Daniel HOEFFEL , sénateur (UC), s'exprimant au nom du groupe PPE, ainsi que Mme Yvette ROUDY , députée (Soc), sont intervenus dans ce débat (rapport 7890), le vote sur la proposition de Résolution ayant dû être reporté, faute du quorum réglementaire ;

- l'éducation aux droits de l'homme (Rapport 7887 et adoption de la Recommandation 1346) ;

- au cours de cette session, l'Assemblée a élu le Secrétaire général adjoint du Conseil de l'Europe en la personne de M. Hans Christian KRUGER , de nationalité allemande.

Enfin, plusieurs membres de la délégation française ont contribué aux travaux de l'Assemblée :

Mme Josette DURRIEU , sénateur (Soc), a déposé une Déclaration écrite au sujet des événements en Algérie, cosignée par plusieurs de ses collègues ;

Elle a également déposé une proposition de Recommandation et une proposition de Directive sur la relance de l'Europe politique cosignée par plusieurs de ses collègues.

MM. Jacques BAUMEL , député (RPR) et Jacques LEGENDRE , sénateur (RPR), ont déposé une proposition de Recommandation visant à la protection du patrimoine hospitalier et militaire de caractère historique, cosignée par plusieurs de leurs collègues.

2. Rapport d'activité du Bureau - Intervention de Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc) (Lundi 22 septembre)

Le rapporteur fait observer que le Bureau a tenu trois réunions depuis la session de juin. Il s'est consacré à la préparation de sa mission d'observation aux élections en Albanie et en Bosnie et Herzégovine et au suivi des travaux concernant le 2e Sommet du Conseil de l'Europe.

S'agissant de la surveillance des élections, le Conseil de l'Europe s'est attaché à favoriser le dialogue entre les forces politiques albanaises et à développer les conditions propices au rétablissement de la démocratie dans ce pays. Le rapporteur rend hommage aux collègues présents sur le terrain et en particulier à Sir Russel Johnston, président de la délégation. Le déroulement des élections a été considéré comme satisfaisant ainsi qu'en témoigne le rapport de M. Hadjidemetriou contenu dans le document 7902, addendum n° 1.

L'Albanie doit avant tout penser à bâtir son avenir. Le Conseil de l'Europe doit apporter sa contribution à cette tâche et aider l'Albanie à engager les réformes nécessaires au rétablissement de la stabilité démocratique.

Des observateurs du Conseil de l'Europe ont également participé au suivi des élections municipales en Bosnie et Herzégovine. Une forte participation a marqué ces élections pacifiques, en net progrès par rapport aux élections nationales de l'année dernière. Pour la première fois, des collectivités locales ont été élues démocratiquement en Bosnie et Herzégovine. Dans le cadre de ce processus électoral, la situation des droits de l'homme dans ce pays a pu être utilement analysée, ce qui permettra de donner une juste information lors de l'examen de la demande d'adhésion de la Bosnie et Herzégovine au Conseil de l'Europe.

Le Bureau a établi la liste des candidats au Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Le rapporteur lance un appel aux différentes délégations et demande la plus grande attention de celles-ci lors de la désignation des candidats au CPT.

Mme DURRIEU, sénateur (Soc), prend alors la parole en ces termes :

" Madame la Présidente, je ne souhaite pas intervenir dans le débat qui vient de s'engager, mais uniquement dans la perspective du prochain sommet et sur le travail préparatoire réalisé par le Bureau, sous votre présidence, ce dont nous vous remercions, avec le concours des deux rapporteurs, MM. Jean SEITLINGER et Miguel MARTÍNEZ.

Ce sommet est un événement important. Nous nous réjouissons qu'il ait lieu sous la présidence de la France. Je pense qu'il concrétisera les avancées normales que nous enregistrons nous-mêmes dans le domaine de la démocratie, des droits de l'homme, de la cohésion sociale, de la sécurité, de la diversité culturelle. Mais j'observe qu'il est un point sur lequel nous n'avons peut-être pas suffisamment poussé les prospectives, à savoir l'avenir politique et institutionnel de l'Europe. Une fois de plus, cette préoccupation n'aura pas été la préoccupation essentielle du sommet. C'est dommage.

J'évoquerai un autre problème qui ne semble pas non plus avoir trouvé de réponse satisfaisante et sur lequel, par conséquent notre vigilance reste grande. Il s'agit tout simplement de la question budgétaire et des moyens du Conseil de l'Europe. Ses missions sont importantes et il s'est élargi mais ses moyens sont insuffisants : son autonomie n'existe pas !

Il est évident qu'il est temps d'envisager que le crédit global de cette assemblée composée de parlementaires élus, venant de leurs parlements respectifs, soit débattu en amont avec le Comité des Ministres. En cela, nous pourrions suivre les propositions formulées par notre collègue Miguel Angel Martínez, afin que nous fonctionnions de la même façon que l'Union de l'Europe occidentale.

Pour terminer, j'aborderai un sujet qui ne fait pas directement l'objet du rapport, mais qui fait partie de nos préoccupations. En tant que présidente de la sous-commission Nord-Sud du Conseil de l'Europe et, donc, membre du Centre Nord-Sud qui siège à Lisbonne, je poserai le problème de la tragédie algérienne.

Les populations algériennes sont victimes d'un terrorisme aveugle. La défense des droits de l'homme ne s'arrête pas à nos frontières. Nous pouvons difficilement continuer à être préoccupés par ce qui se passe sur notre continent et rester silencieux sur ce qui se passe à l'extérieur de nos frontières.

Enfin, aujourd'hui, le Secrétaire général de l'ONU commence à s'exprimer et tente d'engager le dialogue. Le président de la Fédération internationale des droits de l'homme a rappelé que la communauté internationale avait non seulement des droits mais aussi des devoirs pour " défendre le caractère sacré de la vie ". L'Union européenne commence à aborder le problème.

Madame la Présidente, je vous pose la question : le moment n'est-il pas venu pour notre Assemblée de donner publiquement son point de vue sur cette stratégie et de prendre des initiatives ? "

A l'issue de la discussion, l'Assemblée a donné acte du rapport d'activité du Bureau (Rapport 7902 et addendums).

3. Obligations et engagements de la République tchèque en tant qu'Etat membre (lundi 22 septembre)

Les rapporteurs font une évaluation globale positive de l'évolution de la République tchèque, quoiqu'ils considèrent qu'elle doive encore faire des efforts dans certains domaines, il s'agit notamment de la fonction publique et de la citoyenneté ainsi que de la minorité Rom.

En effet, les rapporteurs ont mis l'accent sur la prorogation de la loi d'épuration des structures administratives, qui peut sur certains points, entrer en contradiction avec la Convention européenne des Droits de l'Homme. Cette loi empêche les personnes ayant occupé certains postes au gouvernement ou au parti communiste ou anciens membres de la Sûreté ou de la milice populaire de faire partie de l'administration de l'Etat ou de l'armée, ainsi que des radio et agence de presse publiques. Cependant, la République tchèque n'est pas le seul pays où une telle loi est en vigueur, dans l'attente de l'adoption d'une loi définitive sur la fonction publique. C'est dans ce contexte que les rapporteurs appuient l'initiative visant à ce que le Comité européen de coopération juridique mette au point un code européen de la fonction publique.

Les rapporteurs relèvent, d'autre part, que la loi sur la citoyenneté, même si elle a été largement améliorée depuis l'année dernière, pose encore quelques problèmes pour les membres de la minorité Rom.

Lors de leur visite en République tchèque les 27 et 28 août dernier, les rapporteurs (qui ont rencontré le Président du Parlement, différents ministres, des représentants de la communauté Rom, de divers ministères, de la Cour constitutionnelle, et le maire de la ville de Most, entre autres), ont eu aussi l'occasion d'aborder d'autres problèmes auxquels sont confrontés les Rom. Tout en reconnaissant l'effort fourni dans le domaine culturel, le gouvernement tchèque, selon eux, devrait s'engager plus activement contre la discrimination que subissent les Rom. Dans ce contexte, la coopération de la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance est jugée indispensable.

La recommandation 1138 contenue dans le rapport 7898, amendée, est adoptée.

4. Obligations et engagements de la Lituanie en tant qu'Etat membre (Lundi 22 septembre)

Selon les rapporteurs, l'évaluation de base effectuée par la Commission de suivi de l'Assemblée parlementaire sur l'évolution en Lituanie apparaît comme étant essentiellement positive. Effectivement, l'Assemblée se félicite des progrès réalisés par la Lituanie en vue de consolider la prééminence du droit, de promouvoir le respect des droits de l'homme, de mettre sa législation et sa politique en conformité avec les principes du Conseil de l'Europe et d'établir des relations de bon voisinage avec les pays qui l'entourent.

Néanmoins, même si la plupart des engagements pris par la Lituanie lors de son adhésion au Conseil de l'Europe (14 mai 1993) ont été respectés, il existe certaines questions sur lesquelles l'Assemblée tient à poursuivre son dialogue avec les autorités lituaniennes : les réformes de l'administration locale, la nouvelle loi sur la prévention de la criminalité organisée, la révision des dispositions du Code de procédure pénale sur la durée de la détention provisoire, le projet de résolution sur l'abolition de la peine de mort (comme base juridique pour l'actuel moratoire), les questions relatives aux minorités nationales.

L'Assemblée recommande au Comité des ministres de reconduire les domaines prioritaires définis pour la Lituanie dans le cadre des programmes de coopération et d'assistance du Conseil de l'Europe (notamment le programme commun avec la Commission des Communautés européennes), de maintenir le niveau actuel des ressources qu'il affecte à ces programmes et d'examiner, dans le cadre de sa propre procédure de suivi, la question de la mise en oeuvre par la Lituanie de sa nouvelle loi sur la prévention de la criminalité organisée, eu égard à son engagement quant à la protection des droits de l'homme.

La recommandation 1139 contenue dans le rapport 7896 est adoptée, amendée.

5. Effets de la détention sur les plans familial et social - Intervention de M. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC) (Lundi 22 septembre)

Le rapporteur estime que la détention à vie n'est pas seulement une privation de liberté, elle engendre une quantité de problèmes sociaux, en privant les conjoints de leur partenaire et les enfants d'un parent, en plongeant la famille dans les difficultés financières et en lui faisant perdre son statut. L'absence de travail en prison peut conduire à l'aliénation mentale -voire au suicide- et les anciens détenus ont du mal à reconstruire leur vie.

Le rapport étudie nombre de problèmes sociaux liés à la détention et examine des projets pilotes mis en oeuvre en Allemagne, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis pour améliorer la vie des détenus. Diverses mesures sont proposées aux gouvernements :

- des systèmes de " semi-détention " permettant au détenu de conserver son travail et ses liens familiaux ;

- des prestations sociales, des services d'assistance et de secours d'urgence pour les familles des détenus ;

- l'humanisation des conditions de visite des conjoints et des enfants par l'aménagement d'espaces où les détenus peuvent s'isoler avec leurs visiteurs ;

- une amélioration des services médicaux et psychiatriques dans les prisons ;

- le développement de la réinsertion professionnelle par une éducation et une formation réelles, adaptées aux conditions du marché ;

- des mesures spéciales pour les détenus étrangers, par exemple l'accès à des services d'interprétation et de traduction, la liberté de culte et de relation avec leurs consulats.

M. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC), formule les observations suivantes :

" Monsieur le Président, mes chers Collègues, je n'ai pas d'observation particulière à formuler sur le projet de recommandation lui-même et je tiens à rendre hommage, comme tous les intervenants précédents, au travail de grande qualité réalisé par notre rapporteur.

En revanche, plusieurs des propositions de l'annexe jointe à ce rapport - elle reproduit le projet d'une association - me semblent se tromper de priorité. Je ne m'étendrai pas sur les actions qui valent à certaines personnes de se trouver en prison. Malheureusement, mes chers collègues, nous savons qu'elles marquent trop souvent nos sociétés actuelles.

Sans doute notre devoir de responsables politiques est-il de tout mettre en oeuvre pour réinsérer socialement les délinquants et notre foi en l'homme ne doit-elle jamais se décourager. Sans doute aussi faut-il repenser les systèmes de détention pour qu'ils préparent davantage et mieux la réhabilitation. Sans doute nous faut-il nous préoccuper des familles des détenus - je suis à cet égard très sensible aux propositions formulées par le rapporteur ainsi qu'aux observations exprimées par Mme Bribosia-Picard.

Cependant, tout en nous préoccupant du régime alimentaire ou de l'extension des droits de visite aux prisonniers, je souhaiterais que nous pensions aussi et davantage aux victimes qui souvent sont laissées non seulement dans un désarroi moral très grand mais qui doivent aussi affronter les conséquences matérielles de l'agression subie.

Aussi, mes chers collègues, m'abstiendrai-je dans le vote sur le projet de recommandation parce que je ne voudrais pas que ce texte qui, en lui-même, je le répète, ne pose guère de problème, puisse être interprété à la lumière de considérations partisanes, par trop étrangères à la souffrance des victimes comme aux nécessités de l'ordre public.

Prenons garde au risque de favoriser le recours d'une opinion publique désorientée à des thèses sécuritaires lorsque nous adoptons des recommandations qui peuvent, dans l'esprit de certains, apparaître plus favorables aux délinquants, y compris les auteurs des crimes les plus odieux, qu'à leurs victimes.

Telle est la position que je tenais à expliquer tout en rendant encore une fois hommage à la qualité du travail de notre rapporteur, mais il faut tenir compte des préoccupations et de l'état d'esprit des uns et des autres. "

M. Andreas GROSS intervient alors en tant que représentant du président de la commission des questions sociales, de la santé et de la famille pour répondre à M. Daniel HOEFFEL , que ce débat très instructif a permis de parler de ceux qui se trouvent en prison comme de ceux qui ne devraient peut-être pas y être car ils sont soumis à des peines courtes pour lesquelles une solution de substitution serait possible.

L'orateur rappelle que les détenus auxquels sont destinés les travaux d'intérêt général sont par essence des délinquants et non des criminels. Il n'y a donc pas lieu de craindre que l'on oublie les victimes.

La recommandation 1340 figurant dans le rapport 7816, amendée, est adoptée à l'unanimité.

6. Communication du Comité des ministres à l'Assemblée - Interventions de Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc), MM. Jacques BAUMEL, député (RPR) et Daniel HOEFFEL, sénateur (UC) (Mardi 23 septembre)

M. Pierre MOSCOVICI , ministre délégué aux Affaires européennes du Gouvernement français, prononce l'allocution suivante en sa qualité de Président en exercice du Comité des Ministres :

" Madame la Présidente, Monsieur le Secrétaire général, Mesdames, Messieurs les parlementaires, les circonstances particulières liées à la mise en place du nouveau Gouvernement français n'ont pas permis au nouveau ministre délégué chargé des affaires européennes que je suis de venir vous présenter, au mois de juin dernier, le rapport statutaire du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe dont la France exerce, depuis le mois de mai dernier, et pour quelques semaines encore, la présidence. Je vous prie de m'en excuser.

Il est vrai - ceci compense cela - que j'ai déjà eu le plaisir de rencontrer, le 1er septembre à Paris, certains d'entre vous, membres de la commission des questions politiques et du groupe ad hoc du Bureau chargé de la préparation du sommet, pour un premier échange de vues. Mais aujourd'hui, c'est devant vous tous, qui représentez la seule assemblée parlementaire réunissant les délégués de l'ensemble des parlements démocratiques du continent, que j'ai l'honneur de me présenter. Je vous remercie de l'occasion qui m'est offerte d'avoir avec vous cet échange.

Si vous en êtes d'accord, je voudrais tout d'abord vous exposer, dans les grandes lignes, les activités du Comité des Ministres et de leurs délégués - MM. les ambassadeurs, que je salue ici très cordialement - au cours des trois derniers mois.

Un rapport écrit est à votre disposition, mais je voudrais, pour ma part, mettre l'accent, s'agissant des activités du programme intergouvernemental, sur la tenue de deux conférences ministérielles.

Tout d'abord, celle des ministres de la Justice des 10 et 11 juin à Prague, avec la participation de ma collègue, Mme Guigou, dont chacun connaît l'attachement à l'Europe. Ensuite, celle des ministres de l'Education des 22 et 24 juin à Kristiansand, qui a permis au Conseil de jouer son rôle de lieu de rencontres et d'échanges paneuropéens sur tous les problèmes de l'éducation.

La quatrième session du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, où siègent vos collègues représentant les collectivités territoriales, s'est tenue au début du mois de juin et a débattu de questions importantes, telle celle de la Charte de l'autonomie régionale.

De manière générale, le Conseil de l'Europe n'a rien perdu de son dynamisme pour élaborer de nouvelles normes juridiques : après la signature de la Convention d'Oviedo sur la bioéthique ce printemps, un protocole additionnel relatif à l'interdiction du clonage des êtres humains est en cours de négociation et nous attendons votre avis, cette semaine, sur ce sujet.

D'autres conventions sont en voie de finalisation, sur des thèmes aussi variés que la protection de l'environnement par le droit pénal, la protection des animaux vertébrés utilisés à des fins scientifiques ou le transfert des personnes condamnées : ce sont là des thèmes auxquels l'opinion est sensible et qui prouvent que l'Europe des citoyens se construit ici aussi.

Deuxième point dont je voudrais vous entretenir : ces développements conduisent tout naturellement à vous parler des relations entre le Conseil de l'Europe et l'Union européenne. Je sais que votre Assemblée, et en particulier les délégués des pays candidats à l'Union, y portent - et c'est compréhensible - une attention particulière.

Je note d'ailleurs d'intéressantes propositions de votre Assemblée pour un renforcement de ces liens, par exemple, en ce qui concerne la protection des minorités, la référence à certains textes du Conseil de l'Europe dans les traités d'association entre l'Union et les Etats candidats. Je ne peux que vous inciter à resserrer également vos contacts avec le Parlement européen, qui siégera encore pendant quelque temps dans cet hémicycle, pour contribuer à renforcer cette coopération.

S'agissant du Comité des Ministres - Mme la Présidente y a fait allusion - depuis la relance des " réunions quadripartites " au cours de la présidence française de l'Union européenne et la conclusion de l'échange de lettres de novembre 1996 entre le Secrétariat et la Commission, d'importants progrès ont été enregistrés.

Ainsi, lors de la dixième réunion " quadripartite ", qui s'est tenue le 15 septembre dernier à Bruxelles, en présence de mon collègue et ami luxembourgeois Jacques Poos, Président du Conseil de l'Union européenne, du Commissaire Hans Van den Broek et du Secrétaire général Daniel Tarschys, j'ai évoqué plusieurs questions qui mettent en jeu les relations entre les deux organisations et qui mériteraient, à mon sens, de faire l'objet d'une concertation plus approfondie.

Il s'agit, tout d'abord, du renforcement de l'action dans le domaine social, qu'il s'agisse de la ratification de la Charte sociale ou du développement du rôle du Fonds de développement social du Conseil de l'Europe.

Deuxième question : la consolidation de la démocratie, la protection des droits de l'homme et la primauté du droit dans la Fédération de Russie, en Ukraine et dans les nouveaux Etats indépendants, membres ou candidats à l'adhésion au Conseil de l'Europe.

Troisième question : la lutte contre la xénophobie et l'intolérance, par l'instauration d'une coordination étroite entre l'Observatoire européen de Vienne et la Commission contre le racisme et l'intolérance du Conseil de l'Europe.

Quatrième question, fondamentale : la coordination en cas de crise. A ce sujet, j'évoquerai quelques situations.

D'abord, celle de l'Albanie, où le Conseil de l'Europe, l'Union européenne et d'autres acteurs doivent continuer, dans le cadre de la coordination interinstitutionnelle que la communauté internationale a confiée à l'OSCE, à conjuguer leurs efforts - car il s'agit bien de conjuguer les efforts et non pas de se concurrencer - pour restaurer la stabilité de ce pays et la confiance de ses habitants.

Ensuite, celle du Bélarus, dont vous avez suspendu le statut d'invité spécial, mais où se poursuivent - difficilement, il faut le reconnaître - les contacts menés conjointement par l'Union et le Conseil de l'Europe au sein d'un groupe tripartite.

Enfin, celle de la Bosnie et Herzégovine, dont vous venez d'observer les élections municipales, avec le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux d'Europe et d'autres experts, alors que le Conseil de l'Europe et l'Union européenne poursuivent sans relâche leurs efforts pour encourager les forces de paix contre les mouvements nationalistes, en contribuant au bon fonctionnement des institutions et à la reconstruction économique et civique.

C'est la raison pour laquelle le Comité des Ministres vient de désigner un nouveau juge à la Chambre des droits de l'homme. Je voudrais vous rappeler, à cet égard, que la France a posé sa candidature pour prendre la présidence de cette chambre et vous annoncer qu'elle a décidé de verser une contribution volontaire de 600 000 francs pour lui permettre de faire face à ses dépenses de fonctionnement.

Enfin, nous avons souligné l'importance, lors de cette réunion quadripartite, y compris à la lumière du futur traité d'Amsterdam, du Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement et du plan d'action qui devrait être adopté à cette occasion. La France souhaite une large contribution de l'Union, et en particulier de la Commission, que nous appelons à faire preuve d'esprit d'ouverture à cet égard, à la mise en oeuvre de ce plan, notamment en ce qui concerne ses aspects sociaux, la protection des jeunes contre la toxicomanie et l'aide à la démocratisation.

Pour résumer mon propos, il est clair que dans mon esprit, les liens du Conseil de l'Europe et de l'Union doivent être ceux d'une complémentarité saine, d'une collaboration efficace et non pas d'une concurrence stérile et dénuée de sens.

Le Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement, qui se tiendra les 10 et 11 octobre dans cette salle même, sera l'occasion pour votre Assemblée, et tout particulièrement pour votre présidente, Mme Fischer, qui en a été l'initiatrice, de recueillir le fruit de votre travail de préparation et de propositions, auxquelles MM. Martínez et Seitlinger ont apporté une contribution qui mérite d'être soulignée et que je salue ici.

Cette " réunion de famille " très exceptionnelle devrait permettre l'adoption d'un plan d'action dont je voudrais dire quelques mots, car le Comité des Ministres compte sur votre soutien, à Strasbourg et dans vos capitales - comme le demande un rapport sur le partenariat entre parlements nationaux et votre Assemblée que vous examinerez dans quelques jours - pour sa mise en oeuvre pour les années qui viennent.

De ce plan d'action, je ne rappellerai que les grandes lignes, pour me féliciter qu'elles coïncident avec vos préoccupations.

Son premier axe est la démocratie et les droits de l'homme.

Le respect des engagements pris dans ce domaine requiert une vigilance constante du Comité des Ministres, comme de votre part, et un dialogue constructif entre nous et les Etats concernés. L'adoption hier de deux recommandations sur la Lituanie et la République tchèque nous en fournira l'occasion.

La deuxième direction est la cohésion sociale.

Le Conseil de l'Europe devra renforcer son action dans ce domaine pour éviter que la " fracture sociale " - pardonnez cet emprunt à un illustre Français - qui frappe nos sociétés ne devienne une menace pour la démocratie, et pour veiller à ce qu'à la division idéologique de l'Europe ne succède pas une frontière économique et sociale, que nos Etats soient membres ou non de l'Union européenne, puisque demain, cette question se posera à nous.

La troisième direction est la sécurité des citoyens.

Je me félicite de l'inscription à votre programme de travail de la lutte contre le terrorisme, comme de la manifestation constante de votre préoccupation et de votre intérêt devant les multiples menaces qui pèsent sur l'enfance et la jeunesse, qu'il s'agisse des questions d'abus sexuels, sur lesquelles nous avons récemment légiféré en France, ou du traitement de la violence dans les médias par exemple.

Quatrième direction : les valeurs démocratiques et la diversité culturelle.

Là aussi votre Assemblée fait diligence, avec le débat que vous allez consacrer à l'éducation et aux droits de l'homme, c'est-à-dire à la citoyenneté moderne. Cela implique aussi la maîtrise des nouvelles technologies de l'information, dans le respect des droits d'autrui.

Bref, nous attendons de ce 2e Sommet de Strasbourg qu'il soit le sommet de l'adaptation du Conseil de l'Europe à ce nouveau contexte européen qui doit être, avant tout, celui de la démocratie.

Je n'ai pas eu la prétention d'être exhaustif, mais j'ai voulu montrer combien nous sommes, dans la préparation du sommet, attentifs à vos préoccupations et à vos travaux.

Mesdames, Messieurs, le Comité des Ministres est pleinement conscient des conséquences, y compris administratives et budgétaires, de l'élargissement du Conseil de l'Europe, pour l'Assemblée parlementaire comme pour l'ensemble de l'Organisation, dans la perspective de son cinquantenaire qui interviendra, je le rappelle, en 1999.

C'est pourquoi le plan d'action appelle à entreprendre, d'ici ce cinquantenaire, dans deux ans, un réexamen approfondi de ses méthodes et de ses structures, afin de mieux adapter notre Organisation à ces nouvelles tâches.

Je suis persuadé qu'avec votre aide, nous pourrons le mettre rapidement en oeuvre, dans un souci de réalisme et d'ambition pour notre Conseil. Par delà les divergences bien naturelles, nous devons nous mobiliser avec ardeur dans ce but. Je suis confiant qu'avec la future présidence allemande, qui prendra le relais le 6 novembre, nous obtiendrons d'excellents résultats dans cette voie.

Madame la Présidente, Monsieur le Secrétaire Général, Mesdames, Messieurs les parlementaires, Mesdames, Messieurs les ambassadeurs, au terme de cette brève présentation des travaux du Comité des Ministres, laissez-moi vous redire ma très vive satisfaction d'être parmi vous et ma disponibilité pour répondre à vos questions. "

Une série de questions portant sur les relations du Conseil de l'Europe avec l'Union européenne est alors posée :

Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc), demande au Président du Comité des Ministres comment il entend faire progresser la coopération entre le Conseil de l'Europe et l'Union européenne et quelles clarifications entre les compétences des deux organisations il souhaite établir afin de consolider en Europe un réseau d'institutions internationales complémentaires et plus efficaces, notamment en période de crise (par exemple en Bosnie et en Albanie), mais aussi pour renforcer la démocratie, la primauté du droit et le respect des droits de l'homme qui sont les principes fondamentaux du Conseil de l'Europe.

M. Jacques BAUMEL, député (RPR), demande au Président du Comité des Ministres quelles conséquences peut comporter pour le Conseil de l'Europe l'orientation qui résulte du Conseil européen d'Amsterdam qui semble privilégier un rapide élargissement des adhésions au détriment d'un renforcement des structures de l'Union européenne prenant ainsi le risque de brouiller et d'affaiblir les différents processus de coopération en Europe.

M. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC), demande au Président du Comité des Ministres quelles sont les initiatives qu'il envisage pour assurer une meilleure coordination entre les institutions européennes, et plus concrètement comment il compte valoriser le Conseil de l'Europe afin que l'expérience de l'Organisation acquise dans le domaine du respect de l'Etat de droit soit pleinement reconnue, notamment à l'occasion des missions de contrôle d'élections et d'assistance juridique dans les pays d'Europe centrale et orientale. "

M. Pierre MOSCOVICI leur fait la réponse suivante :

" A Mme DURRIEU, je répondrai que notre attitude, qui est en train de porter ses fruits et que nous entendons conserver et prolonger, est fondamentalement pragmatique. La clarification des compétences, au sens aussi d'une stricte dissociation des tâches, est impossible.

L'objectif que nous devons avoir est au contraire celui de la reconnaissance réciproque des compétences pour lesquelles chaque organisation a des qualités particulières, une valeur ajoutée à faire valoir, sachant qu'elle peut mobiliser les ressources humaines, financières et techniques de ses partenaires pour réaliser l'objectif commun.

Comme je l'ai expliqué, l'un des thèmes importants de notre dernière réunion " quadripartite " était la coordination dans les pays en situation de crise. Avec moi, les autres participants, Commissaire Van der Broke, M. Tarschys et le Président Jacques Poos ont exprimé le souhait que le Sommet du Conseil de l'Europe contribue plus avant à la réalisation de l'objectif consistant, en Europe, à consolider un réseau d'institutions se renforçant mutuellement.

Ils ont également convenu que l'Albanie était un bon exemple de la façon dont on allie les compétences et les avantages comparatifs des organisations internationales concernées. En outre, nous nous sommes félicités de l'étroite coopération existant entre l'Union européenne et le Conseil de l'Europe sur la question du Bélarus sur laquelle, je répète, que pour l'heure, nous sommes dans une convergence de vues dont on connaît les conséquences, mais dont le pays concerné pourrait le premier tirer les enseignements.

Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc), complète alors sa question en ces termes :

" J'ai bien entendu le message de notre ministre et les réponses qu'il a faites, anticipant sur nos questions d'ailleurs.

Je voudrais simplement insister un peu plus. Si la définition des compétences est difficile je l'admets, la concertation doit être, elle, mieux organisée. Je ne prendrai que deux exemples à ce propos et je reviendrai sur l'Albanie. A un certain moment il a été dit que le rôle de coordonnateur reviendrait à l'OSCE. Cela avait été décidé par la Communauté internationale. Je pose la question : qu'est-ce que la Communauté internationale ?

Deuxième point : et pour le futur, lorsqu'il sera question de l'élargissement, on murmure déjà que serait peut-être mise en place une conférence européenne. Quelle sera la place du Conseil de l'Europe dans cette conférence européenne, sachant que sa compétence est grande ? "

M. Pierre MOSCOVICI , Président du Comité des Ministres, répond en ces termes :

" Mme Josette DURRIEU , que je salue en tant que présidente de la délégation française, au nom du Comité des Ministres et j'en suis sûr en votre nom, soulève beaucoup de questions. Le temps qui m'est imparti est bref, j'irai donc vite.

La répartition des compétences est impossible mais la clarification des compétences de chacun est possible. C'est notamment ce que nous attendons du 2e Sommet, une sorte de recentrage des missions du Conseil de l'Europe, sur ce vers quoi il a une valeur ajoutée plus grande que les autres. Je pense que si on procède ainsi, on verra plus aisément vers où on doit se tourner dans telle ou telle situation.

Il me semble que le Conseil de l'Europe n'a pas à rougir, n'a pas à être inquiet. Il a des spécificités. Tout ne doit pas passer par l'OSCE même si cette institution prend une place spécifique importante dans la résolution des crises.

Quant à la conférence européenne, que la France appelle effectivement de ses voeux, je voudrais dire ici qu'elle ne sera pas une institution permanente, qu'elle ne sera en aucun cas concurrente du Conseil de l'Europe, qu'elle aura une mission spécifique, celle de constituer le forum dans lequel les pays de l'Union, les Quinze, les pays candidats à l'adhésion qui seront onze, douze si on y inclut la Turquie - en tout cas la Turquie dans notre esprit fait partie de la Conférence. Cette Conférence aura une mission bien spécifique, qui ne recoupe en aucun cas celle du Conseil de l'Europe, qui sera tout simplement de préparer ces pays à l'adhésion.

Je sais qu'il y a ici de très nombreux représentants des pays candidats. Ils comprendront que tout le monde doit être sur la même ligne de départ et que pour ça, il faut non pas une institution, mais un forum où on puisse débattre et débattre de tout. "

M. Pierre MOSCOVICI poursuit sa réponse :

" J'apprécie la question de M. Jacques BAUMEL relative aux conséquences pour le Conseil de l'Europe du Traité d'Amsterdam - qui n'est pas encore entré en vigueur, je le rappelle puisqu'il devra être ratifié par les assemblées des pays concernés ou par les peuples lorsqu'il y aura référendum. Certes, les dangers qu'il évoque existent, mais justement, le prochain sommet, en réaffirmant la mission propre, intrinsèque du Conseil de l'Europe, doit nous permettre de les conjurer. Les différentes enceintes de coopération existantes sont une force pour l'idée européenne : il appartient aux gouvernements et aux institutions d'entretenir un dialogue permanent pour éviter les doubles emplois, sachant que le renforcement des structures de l'Union européenne n'est pas incompatible avec le développement du rôle du Conseil de l'Europe.

M. Jacques BAUMEL connaît également pour le reste la position du Gouvernement français sur ce Traité d'Amsterdam qu'il convient de ratifier, à notre sens, compte tenu des avancées qu'il contient. Mais il convient aussi de le compléter, notamment dans le domaine institutionnel. C'est pour nous un préalable à la conclusion du processus d'élargissement qui va commencer. Nous sommes favorables à l'élargissement, mais un élargissement qui se réalise avec des institutions qui existent et qui fonctionnent. "

M. Jacques BAUMEL, député (RPR), intervient de nouveau :

" Pour gagner du temps, je voudrais remercier monsieur le ministre de sa réponse qui confirme effectivement la position du gouvernement français. Je suis tout à fait satisfait des précisions qu'il a apportées, notamment sur le rôle futur du Conseil de l'Europe dans le cadre de l'élargissement de l'Union européenne. "

Le Président du Comité des Ministres continue en ces termes :

" A l'attention du président Daniel HOEFFEL , j'indiquerais volontiers que les exemples de l'Albanie et du Bélarus, où un expert juridique du Conseil de l'Europe fait partie intégrante de la délégation de l'Union européenne aux travaux du groupe " tripartite ", montrent que les Quinze, l'Union, ont compris tout l'intérêt qu'ils pourraient retirer de l'expertise du Conseil de l'Europe pour consolider la démocratisation des pays d'Europe centrale et orientale, là où c'est encore nécessaire. Je crois que cette expérience irremplaçable est justement ce qui fait la force, la spécificité du Conseil de l'Europe. C'est là justement un de ces éléments de valeurs ajoutées dont j'ai parlé à plusieurs reprises. "

M. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC), intervient de nouveau :

" Je vous remercie Monsieur le Ministre, en effet cette coordination entre les différentes institutions européennes est indispensable et dans cet effort de coordination, le Conseil de l'Europe doit être un élément moteur et non un sous-traitant, son expérience et son savoir-faire le lui permettent. "

M. Pierre MOSCOVICI conclut alors :

" Je ne peux que manifester mon accord avec ce qu'a ajouté M. Daniel HOEFFEL . "

7. Interdiction du clonage d'êtres humains - Interventions de MM. Jean-François MATTÉI, député (UDF) et Claude BIRRAUX, député (UDF) (Mardi 23 septembre)

L'objet du rapport est de soumettre à l'Assemblée parlementaire, pour avis, un projet de Protocole à la Convention du Conseil de l'Europe sur les droits de l'homme et la biomédecine récemment ouverte à la signature des Etats, sur l'interdiction du clonage d'être humains.

Ce protocole a été élaboré par le Comité directeur du Conseil del'Europe sur la bioéthique afin d'apporter une réponse de droit international au clonage d'être humains dont le débat est né de l'expérience réussie du clonage d'une brebis au début de cette année.

Le rapporteur ne traite que du clonage de cellules humaines et établit une différence entre les différentes situations possibles : le clonage de cellules somatiques (non reproductrices), parfaitement acceptable sur le point de vue éthique ; le clonage de cellules embryonnaires, comme technique, qui appelle des réflexions approfondies et sera examiné dans le contexte du protocole à " la Convention de biomédecine " sur la protection de l'embryon, actuellement en cours de préparation.

La troisième situation, celle du clonage d'être humains et qui fait l'objet du rapport, est éthiquement inadmissible car elle porterait atteinte à la dignité, à l'intégrité et au caractère unique de l'être humain.

Le rapporteur estime en conséquence que toute intervention de cette nature doit être interdite et assortie de sanctions et propose que l'Assemblée recommande au Comité des Ministres d'adopter le projet de Protocole soumis à son avis.

Le texte propose également que l'Assemblée générale de l'ONU adopte des dispositions qui interdiront le clonage d'êtres humains dans le monde entier en s'inspirant du texte du Conseil de l'Europe.

M. Jean-François MATTÉI, député (UDF), s'exprime en ces termes :

" Madame la Présidente, mes chers Collègues, sur le plan scientifique, les récentes expériences de clonage chez l'animal constituent une avancée considérable. Cette technique révolutionnaire doit permettre de mieux comprendre les mécanismes du développement, les causes de certaines malformations et maladies génétiques et de certains cancers. Sous réserve de l'aspect encore expérimental et d'une éthique qu'il convient de ne pas oublier vis-à-vis de l'animal, il faut admettre que ces techniques peuvent être extrêmement bénéfiques pour la santé de l'homme si l'on sait correctement les utiliser.

Mais dès lors qu'on évoque la seule hypothèse du clonage humain, le problème change radicalement de nature car il conduit à s'interroger sur le fond de l'humanité de l'homme et ce n'est pas un des moindres succès de la science que de conduire à cette interrogation-là.

Plus les mécanismes biologiques sont élucidés et plus l'homme se rebelle pour affirmer qu'il ne peut pas se situer seulement au niveau biologique. Chacun comprend qu'on peut certes cloner un corps, une enveloppe, une apparence, mais qu'on ne peut pas cloner une expérience, un vécu et encore moins une conscience.

A cet égard, le clonage est donc pour l'homme une double trahison. Trahison quant à la singularité de la personne qu'on prétend recopier car c'est bien une atteinte à la dignité de la personne que de vouloir la reproduire à l'identique comme un objet. Mais trahison plus grande encore en laissant croire qu'il est possible de considérer l'homme sous sa seule dimension biologique.

Sommes-nous donc protégés réellement comme il convient d'un acte de folie qui transgresserait l'interdit ? On sait la force du mythe de l'immortalité. Ne pourrait-elle pas faire apparaître de nouveaux Prométhées désireux de distribuer ou vendre le moyen d'accéder à l'éternité ?

Si le regard porté sur l'homme et son histoire à l'aune des millénaires passés invite plutôt à la confiance, certains événements tragiques douloureusement gravés dans nos mémoires invitent aussi à la méfiance.

C'est pour cette raison que la France s'est dotée dès 1994 d'un ensemble de mesures législatives pour préserver la dignité de l'homme dans son corps, dans sa personne et pour contrôler les procédés qui permettent à la science d'avancer. Pour autant, les dispositions purement nationales ne sauraient suffire. Chacun perçoit bien que le danger cellulaire comme le danger nucléaire est d'ordre planétaire puisque c'est l'essentiel qui est en cause. Quelle que soit sa volonté, il n'est pas un pays seul qui puisse se croire à l'abri. Notre devoir est donc de proclamer avec la force de nos convictions communes ici l'idée que nous avons de l'homme et de sa dignité en redéfinissant au regard du clonage humain un des interdits fondateurs de notre humanité. L'homme ne peut être manipulé, recopié, transformé et instrumentalisé au motif premier qu'il est une personne avec sa dignité qui impose le respect. Cinquante ans après Nuremberg, ce serait l'honneur du Conseil de l'Europe que de se prononcer unanimement pour l'interdiction du clonage humain et de préciser notre socle commun de valeurs.

Cette étape est indispensable mais encore insuffisante. Il serait également à l'honneur de notre Assemblée que d'induire au niveau de l'Organisation des Nations Unies une réflexion éthique au regard du progrès scientifique car c'est la conscience universelle qui est interrogée.

Enfin, pour plus de solennité et souligner l'importance que nous accordons à ces problèmes, nous pourrions proposer de compléter la Déclaration des droits de l'homme. Nous vivons aujourd'hui la troisième grande révolution sociale des temps modernes, la révolution scientifique, et il est probablement temps, et plus que jamais nécessaire de préciser les nouveaux droits et devoirs de l'homme face aux progrès de la science.

C'est la raison pour laquelle je voudrais apporter tout mon soutien au rapport présenté par M. Plattner et dire véritablement que l'honneur de notre Assemblée aujourd'hui serait d'interdire ce qui est une atteinte au droit fondamental de la personne humaine. "

M. Claude BIRRAUX, député (UDF), intervient à son tour de la façon suivante :

" En juillet 1996, une équipe de chercheurs d'Edimbourg réussissait, pour la première fois dans l'histoire de la biologie, le clonage d'une brebis à partir d'un mammifère adulte. Obtenu par le prélèvement d'une cellule sur une brebis, puis le transfert de son matériel génétique dans un ovule dénucléé, l'agneau Dolly est en fait la réplique exacte de l'animal adulte lui ayant transmis son patrimoine génétique.

S'il s'agit certes d'une avancée spectaculaire dans le domaine de la recherche cellulaire, cette expérience ne manque pas de susciter des interrogations au regard des possibles publications.

Réalisée sur un mammifère, cette technique est-elle transposable à cet autre mammifère qu'est l'homme ?

Indépendamment du caractère " faisable " d'une telle pratique, et dans le domaine scientifique le mot impossible n'existe pas, je souhaiterais au préalable faire quelques remarques.

D'une part, l'éventuelle application de cette technique à l'espèce humaine porterait gravement atteinte à la dignité de la personne humaine qui repose sur l'unicité de chaque être humain.

D'autre part, elle pourrait ouvrir la voie à l'eugénisme par la sélection qu'elle serait susceptible d'opérer entre les gènes et j'entends déjà les discours passés et malheureusement encore présents sur la supériorité ou l'infériorité de certaines races.

Le Conseil de l'Europe, particulièrement attaché aux droits de l'homme, ne peut que se montrer extrêmement vigilant à ce sujet.

Enfin, cette technique pourrait conduire à une instrumentalisation de l'être humain où certains êtres ne seraient qu'une réserve d'organes en vue de greffes plus faciles.

C'est notre conception même de l'homme qui serait battue en brèche puisque celle-ci repose sur le principe kantien selon lequel l'homme est une fin et ne peut être considéré comme un moyen.

C'est pourquoi, compte tenu de l'évolution rapide des connaissances, je pense que nos législations nationales respectives doivent prévoir dès aujourd'hui le principe d'interdiction du clonage humain.

Mais, pour être vraiment efficace, notre action doit se situer sur un plan européen et international car le problème soulevé dépasse le cadre strict des frontières étatiques. On comprend aisément que l'interdiction du clonage à un endroit ne prohibe pas les recherches dans un autre pays.

Au plan européen, il nous faut oeuvrer pour que le processus de ratification de la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine de notre Assemblée s'intensifie.

Cette convention pose en effet, à l'échelle européenne, le respect de l'intégrité de l'homme à l'égard des applications de la biologie et de la médecine, ce qui interdit tacitement le clonage. Jeter les bases communes d'une éthique est préférable à l'émergence de législations disparates.

Nous ne pouvons que recommander l'adoption rapide d'un protocole additionnel, afin qu'un cadre internationalement reconnu permette aux législations nationales de se mettre en place efficacement.

J'ai entendu ça et là, en commission, certains collègues soulever l'objection de la liberté de la recherche et du chercheur.

Ici, il ne s'agit pas de recherche sur de la poudre à lessive. Il s'agit de l'homme dans son acceptation globale, physique (génétique) et spirituelle, qui reconnaît chacun comme un être unique dans l'espèce humaine. Chaque homme est sacré.

Notre Assemblée, Assemblée des droits de l'homme, se doit de rappeler inlassablement ce message, et se doit d'être le fer de lance de l'éducation des citoyens comme des scientifiques aux valeurs éthiques et morales qui sont sa raison d'être. "

Lors de la discussion des amendements sur le projet d'avis contenu dans le rapport 7895, un amendement n° 5 est présenté, visant à rappeler qu' " est interdite toute intervention ayant pour but ou pour effet de créer un être humain génétiquement identique à un autre être humain vivant ou mort. Le présent article ne s'applique pas à la stimulation ovarienne pratiquée dans le cadre d'un processus de procréation médicalement assisté "

M. Jean-François MATTÉI, député (UDF), intervient en ces termes :

" Madame la Présidente, je comprends bien les motivations qui ont conduit à proposer cet amendement mais je ne l'approuve pas pour deux raisons.

La première, c'est que notre protocole s'en tient aux principes généraux de la dignité et du respect de la personne humaine. Or là, nous entrons dans une procédure de détails puisqu'on mentionne la stimulation ovarienne et une technique médicale, la procréation médicalement assistée. Nous changeons donc réellement de niveau de préoccupation. Le texte perd de sa force. Nous devons véritablement nous en tenir aux grands principes généraux sans entrer dans le détail de ce que serait un livre de thérapeutique.

La seconde, relève d'une confusion. La stimulation ovarienne a pour but d'entraîner une polyovulation, donc la production simultanée de plusieurs ovocytes. Certes, cela conduit à la gémellité, non pas du tout à la gémellité monozygote, mais à la gémellité plurizygotique. Il n'y a donc, à ma connaissance, aucun lien entre la stimulation ovarienne et la production d'une gémellité monozygote. C'est avant l'ovulation qu'intervient la stimulation ovarienne et pas au moment de la division zygotique. Autrement dit, il existe, à mon avis, une inexactitude scientifique et, plus grave, sans doute une confusion des niveaux de nos préoccupations. "

L'amendement est alors retiré par son auteur.

Puis l'avis 202, amendé, est adopté ainsi que la directive 534, figurant tous deux dans le rapport 7895.

8. Politiques spatiales européennes - Interventions de M. Jean-François LE GRAND, sénateur (RPR), Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc) et M. Claude BIRRAUX, député (UDF) (Mardi 23 septembre)

Ce rapport de l'Assemblée sur les activités de l'Agence spatiale européenne (ESA), le premier depuis 1992, s'intéresse aussi pour la première fois aux programmes spatiaux de la Russie Il dresse également un bilan des retombées industrielles et économiques de la recherche spatiale et examine les moyens de renforcer la coopération internationale en ce domaine.

Selon le rapporteur, quarante années d'investissements massifs ont donné à l'Europe une infrastructure spatiale cohérente et opérationnelle qui débouche sur un grand nombre d'applications, depuis l'observation traditionnelle du climat et de l'environnement jusqu'à l'utilisation prospective des données satellitaires pour le maintien de la paix et la gestion des catastrophes naturelles. Les programmes d'application spatiale représentent plus de 80 % des activités de l'ESA ; le programme spatial russe, réaménagé depuis 1992, se concentre désormais sur les applications civiles. La Russie est à l'origine de près des deux tiers des vaisseaux spatiaux lancés dans le monde et 65 % de sa flotte civile sur orbite est utilisée à des fins de communication et de radiodiffusion ainsi que de surveillance géologique et environnementale.

Les agences spatiales coûtent en moyenne 200 milliards de dollars par an mais rapportent sous forme de bénéfices directs environ 500 milliards de dollars ; en outre, pour 100 unités payées par l'ESA à l'industrie européenne, environ 300 unités en moyenne vont à des entreprises sous forme de gains indirects. Il est donc probable que les forces du marché seront prêtes à prendre le contrôle de l'investissement des programmes spatiaux, mais un retrait brusque de l'engagement de l'Etat serait une erreur grave ; la recherche spatiale, par exemple, qui a récemment subi des coupes budgétaires, a besoin d'être relancée. Mais l'engagement du marché modifiera le rôle des agences spatiales. En effet, leurs projets devront être plus étroitement liés à des applications pratiques et les usagers potentiels devront être associés beaucoup plus tôt à la conception des projets.

Avec l'internationalisation croissante des programmes spatiaux, la coordination en ce domaine reste insuffisante ; le rapport propose donc des mesures destinées à la renforcer. Les ambitions de l'exploration spatiale et la concurrence du marché entraînent l'Europe vers un engagement global plus actif, qui passe notamment par un renforcement des liens entre l'ESA et la Russie. Les programmes spatiaux européens peuvent retirer un grand profit de cet engagement du double point de vue de l'innovation technologique et de l'amélioration de leur compétitivité.

M. Jean-François LE GRAND, sénateur (RPR), intervient dans le débat en ces termes :

" Monsieur le Président, mes chers Collègues, je suis heureux que notre Assemblée ait inscrit à son ordre du jour ce débat sur les politiques spatiales européennes et je tiens, d'entrée de jeu, à féliciter M. Lorenzi pour la qualité de son rapport.

Il me semble, en effet, tout à fait opportun d'envisager aujourd'hui les développements techniques et économiques et les coopérations nécessaires sous l'angle des industries civiles.

Je l'apprécie d'autant plus que j'ai moi-même présenté un rapport devant l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale sur l'utilisation de moyens satellitaires dans la prévention et la gestion des risques majeurs.

Nos collègues membres de l'Assemblée de l'UEO ont bien voulu adopter ce rapport à l'unanimité en juin dernier.

L'une des mesures recommandée portait sur le développement d'usages civils des technologies spatiales pour en permettre le développement optimal, par exemple la surveillance des risques tels que séismes, éruptions volcaniques, inondations, cyclones, ouragans ou encore incendies de forêt.

La même recommandation invitait à développer également parmi les usages civils des technologies spatiales, la protection de l'environnement et la prévention des risques technologiques - prévention dont l'urgence nous a été révélée en Europe avec des catastrophes comme celle de Seveso, survenue en 1976, ou plus grave encore, celle de Tchernobyl.

Afin de pouvoir gérer les risques de façon adéquate, les utilisateurs intéressés, les ministères de l'environnement, les agences gouvernementales ou encore les institutions européennes ont besoin d'une information fiable en temps utile et lisible par tous.

L'étude de l'agence spatiale européenne montre que le retour aux technologies spatiales peut compléter efficacement d'autres sources d'information.

Cinq technologies ont d'ailleurs fait l'objet de cette étude : la météorologie, le recueil de données et la localisation, la navigation, les télécommunications et l'observation de la Terre depuis l'espace, qu'il s'agisse d'images optiques ou de radar.

En ce qui concerne les quatre premières technologies, il existe déjà des systèmes spatiaux complètement opérationnels et répondant pleinement aux besoins des utilisateurs ; ces systèmes se trouvent en Europe, Russie comprise.

Sans entrer plus avant dans le détail, un consortium conduit par Nuova Telespazio a établi, en septembre 1996, les besoins précis des utilisateurs par rapport à chaque phénomène pris en compte.

Les systèmes spatiaux en projet doivent apporter à la fois une amélioration des performances et une réduction des coûts opérationnels.

Il y a obligation de rechercher les synergies puisque nous nous trouvons tous dans une situation où les charges financières et budgétaires de nos pays nous amènent à gérer plus scrupuleusement que jamais les dépenses publiques et donc à exploiter au mieux les ressources et les moyens disponibles.

Il nous faudra aussi veiller à ce que les moyens mis en oeuvre évitent les distorsions de concurrence de la nature entre les USA et l'Europe de celles que nous connaissons par exemple en matière de constructions aéronautiques - distorsions de concurrence qui, compte tenu des nouvelles règles de l'organisation mondiale du commerce, pénalisent les entreprises européennes.

Enfin, dans le même temps, nous nous devons de ne rien abandonner aux Américains. J'ai été très sensible aux propos tenus tout à l'heure par M. le directeur général de l'Agence spatiale européenne sur le sujet : il s'agit d'un formidable enjeu économique, mais d'un enjeu culturel tout aussi important. Sous réserve que l'Europe ait réellement envie d'abandonner aux Américains leur american way of life , il lui faudra se battre pour que le mode culturel européen continue de vivre.

C'est dans cet état d'esprit que je voterai les recommandations du rapport. "

Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc), prend la parole à son tour en ces termes :

" Je félicite M. le rapporteur et je reviens sur le propos de M. Rodota qui évoquait les relations Europe/Etats-Unis en même temps que les défis lancés. Le dernier est la fusion de Boeing et de Douglas.

Avec la commission technique et aérospatiale de l'UEO, nous étions aux Etats-Unis au mois de juillet. Nous avons appris, le 30 juillet, que la commission autorisait la fusion entre Boeing et Douglas sous conditions et obligations. Or, comme nous avons vécu au coeur de ce problème pendant plusieurs jours, aussi bien au Pentagone qu'à Seattle chez Boeing, nous pouvons témoigner de l'ambiance qui régnait et dire combien l'indifférence des Américains était grande par rapport à nos avis, combien leur arrogance était parfois dérangeante et leur puissance évidente.

Quelques chiffres qui situent bien le rapport des forces. Le chiffre d'affaires de Boeing-Douglas après la fusion s'élèverait à environ 48 millions de dollars ; dans le même temps, le chiffre d'affaires de Aérospatiale France, de British aerospace et de Dasa réunis représenterait environ 10 milliards de dollars. Voilà où se situe la réalité. Il y a là une menace évidente pour l'Europe. Elle se situe à trois niveaux : les contrats d'exclusivité avec trois compagnies américaines ; les brevets, les licences et leur accès ; et surtout, les aides, les subventions du Pentagone à l'activité militaire, c'est-à-dire à Douglas, avec possibilité de transfert de ces fonds au sein du groupe vers la construction civile.

Dans ces conditions, la fusion était à la fois une menace pour l'Europe et pour Airbus. Elle ouvrait une réelle guerre économique. L'Europe a su, dans une fermeté qui nous a peut-être surpris, mais qui nous a, en même temps fait plaisir, affirmer à l'unanimité une certaine cohésion - mais un instant seulement ! Brutalement, il y a eu, semble-t-il, revirement de Bruxelles et, sans vote et sans débat, la commission a autorisé l'acquisition de Douglas par Boeing.

Boeing semble avoir offert certains engagements s'agissant d'une levée partielle des contrats, mais n'a pas renoncé pour autant aux 244 avions inclus dans des contrats déjà signés. Les Américains ont ouvert l'accès à certains brevets, à certaines licences ; ils ont promis d'isoler des fonds militaires de Douglas à l'intérieur du groupe. Ces engagements sont-ils donc suffisants ? A l'évidence non pour certains commissaires qui ont formulé beaucoup de réserves. Le risque existe-t-il toujours, malgré la vigilance de la commission ? Fort probablement. Boeing détient 70 % du marché aérospatial, 84 % de la flotte mondiale, 90 % du marché des avions de transport et le quasi monopole sur les avions de cent places.

Quoi que l'on dise, il y a atteinte au droit de la concurrence et danger pour Airbus. Il faut donc réagir.

J'exprime deux souhaits. Premièrement que la commission désormais ne soit pas plus exigeante pour les entreprises européennes qu'elle ne l'a été pour les entreprises américaines. Deuxièmement, qu'une telle stratégie européenne et offensive se mette en place. A l'évidence, il n'y a de place que pour un seul avionneur civil et militaire. Cela implique une restructuration de l'industrie. En France, elle suppose, par exemple, le rapprochement de Dassault et de Aérospatiale. Toutefois, il ne s'agit que d'une simple composante du système. Par contre et sûrement, il convient de rapprocher les partenaires qui participent à la construction d'Airbus. Là est l'essentiel ! "

M. Claude BIRRAUX, député (UDF), intervient dans le débat de la façon suivante :

" Je voudrais tout d'abord féliciter notre collègue M. Lorenzi pour la qualité de son rapport.

L'Europe, grâce aux investissements réalisés depuis une trentaine d'années, obtient de bons résultats dans le domaine spatial. On pense évidemment aux succès du programme Ariane qui devrait effectuer ce soir son centième lancement.

L'Europe maîtrise ainsi 60 % du marché commercial du lancement. Elle dispose de complexes techniques comme l'Agence spatiale européenne, ainsi que d'opérateurs de satellites tout à fait compétitifs comme Eutelsat et Astra.

Le paysage spatial est toutefois dominé par les Etats-Unis qui consacrent 0,35% de leur produit intérieur brut - 30 milliards de dollars en 1997, répartis équitablement entre civil et militaire - soit cinq fois plus que l'Europe. L'Europe investit de manière dispersée : la France 0,11 % du PIB, l'Allemagne 0,056 %, l'Italie 0,048 %, la Grande-Bretagne 0,026 %.

Je souhaiterais mettre l'accent sur quelques points qui me semblent importants.

En dépit de ces succès européens, on ne peut que constater, au regard de la partie applicative, un certain nombre de faiblesses et je rejoins l'avis de notre rapporteur.

Je regrette ainsi que l'Europe ne soit pas davantage présente dans un secteur aussi prometteur que l'observation de la terre. Un certain nombre de services d'intérêt général comme les prévisions des catastrophes naturelles ou l'observation de l'évolution des sols en découlent. Il me semble fort souhaitable que ce domaine entre dans les programmes obligatoires de l'ESA.

Concernant les lanceurs, la mise en service d'Ariane 5 est primordiale, et aucune erreur n'est désormais permise.

Il importe aussi qu'Ariane 5 soit optimisée pour la dominante du marché, les satellites en orbite géostationnaire, et réponde à la concurrence des lanceurs américains Atlas 2 AR et Delta 3.

L'Europe doit prendre garde à ne pas se laisser distancer par les Etats-Unis et le Japon dans le domaine des lanceurs réutilisables. Se pose également le problème de l'élargissement de la gamme des lanceurs pour s'adapter au marché. Pour le moment, en dehors de l'alliance entre la Russie et la France qui a permis la commercialisation du lanceur Soyouz, l'Europe se montre hésitante sur la stratégie à adopter.

Les succès passés et les parts de marché gagnées ne doivent pas altérer notre lucidité pour affronter les défis de l'avenir. Nous devons avoir conscience que nous sommes entrés dans l'ère de la domestication de l'espace et de son exploitation croissante par l'homme.

Des enjeux nouveaux, liés aux nouvelles technologies de l'information et de la communication ou à l'observation précise de la terre, justifient une politique européenne ambitieuse, volontariste et coordonnée.

En l'absence d'une homogénéité suffisante, l'Europe souffre de difficultés d'adaptation à la donne géopolitique et géostratégique, entre autre à cause de ses efforts trop peu coordonnés de recherche. De plus, elle ne bénéficie pas, comme les Etats-Unis, des avantages touchant à la fois au civil et à la défense.

Elle doit se livrer à une réflexion stratégique pour savoir comment conforter, valoriser ses acquis et répondre aux besoins croissants des utilisateurs de l'espace.

En une phrase et en résumé, à la structure multiétatique et aux programmes à la carte, ne convient-il pas de substituer une structure européenne qui rassemble et les compétences et les fonds budgétaires pour une synergie porteuse d'ambitions partagées ?

N'est-ce pas là une question très liée à la construction de l'Europe politique et à ses incidences socio-économiques ? La réponse politique est entre les mains des décideurs politiques et d'eux seuls. "

La recommandation 1341, figurant dans le rapport 7875, amendée, est adoptée à l'unanimité.

9. Protection de la vie privée (Mardi 23 septembre)

Le débat d'urgence n'a pas débouché sur l'adoption d'un texte à ce stade mais il a été suivi d'un débat ultérieur qui s'est engagé notamment sur la présentation de l'avis de M. Gilbert MITTERRAND , rapporteur pour avis de la commission des questions sociales, de la santé et de la famille. Le débat s'est conclu le 26 juin 1998 par l'adoption d'une résolution 1165 sur le droit au respect de la vie privée.

10. Organisation d'une conférence parlementaire pour renforcer les systèmes démocratiques en Europe et la coopération dans la lutte contre le terrorisme (Mardi 23 septembre)

Selon le rapporteur, l'Europe a connu, au cours de ces dernières années, une recrudescence des activités terroristes sur son sol. Non seulement le terrorisme a pris des formes nouvelles et a changé de nature, mais il a également fait son apparition dans certains pays d'Europe centrale et orientale, depuis l'effondrement du communisme. Ces activités terroristes sont le fait de réseaux organisés à l'échelle internationale, établis parois même dans des Etats membres du Conseil de l'Europe, et bénéficiant de soutiens logistiques et financiers puissants. Les moyens classiques de coopération judiciaire et policière se révèlent insuffisants pour les combattre.

L'Assemblée réitère sa condamnation vigoureuse et sans réserves des actes de terrorisme et appelle une nouvelle fois au renforcement de la coopération entre les Etats membres du Conseil de l'Europe.

Toutefois, une réflexion commune approfondie sur les moyens de renforcer la lutte contre le terrorisme s'impose aujourd'hui. La tenue d'une conférence parlementaire sur la question constituerait le cadre approprié pour étudier le phénomène actuel du terrorisme et identifier les problèmes qui en découlent. Une telle Conférence pourrait envisager les moyens de prévention, de protection et de surveillance, ainsi que les mesures destinées à renforcer la coopération internationale, et élaborer des propositions concrètes pour mieux le combattre, notamment par la révision de la Convention européenne pour la répression du terrorisme de 1977.

La résolution 1132 contenue dans le rapport 7876 est adoptée à l'unanimité.

11. Situation en Albanie - Intervention de M. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC) (Mercredi 24 septembre)

Le rapporteur fait part de la première visite de travail effectuée après les élections à Tirana et souligne que le programme était intensif.

Les temps forts de cette visite se sont concentrés sur une analyse de la situation économique et politique, de la sécurité dans le pays, des médias et de la Constitution.

En ce qui concerne la situation économique dans le pays, de nettes améliorations ont été constatées bien qu'une situation préoccupante subsiste encore dans le sud du pays. Les informations fournies à cet égard par les milieux gouvernementaux albanais manquent de clarté tandis que les représentants internationaux manifestent des doutes quant aux allégations du gouvernement. La commission de suivi devrait permettre à l'Assemblée de se forger une conviction en la matière.

La situation au regard de la circulation des armes est encore extrêmement préoccupante en Albanie. Le nombre d'armes en circulation a certes diminué mais cette amélioration ne constitue qu'un premier pas.

Puis, le rapport examine la situation politique qui est la plus décevante. On sent un climat de confrontation plus que de coopération. Le pays, en plein marasme, ne peut continuer à souffrir des disputes entre opposition et majorité. Les règles du jeu politique démocratiques doivent être respectées à l'intérieur du pays et l'opposition doit apprendre à jouer un rôle constructif. Le dialogue politique est à l'état embryonnaire. La procédure de suivi prend toute son importance dans un tel climat. Il est nécessaire d'obtenir des certitudes quant à l'épuration et au nettoyage administratif inacceptables dont parle l'opposition et que contestent les partis gouvernementaux. Des coups de feu ont récemment été échangés au Parlement. Ils constituent un signal du climat qui règne dans le pays. Cette situation ne peut durer éternellement.

Le point suivant concerne les médias : un des principes essentiels défendus par le Conseil de l'Europe est la liberté d'expression. L'opposition s'est livrée à de graves accusations concernant le respect de celle-ci. La libre circulation de l'information et le libre accès à celle-ci constituent des points importants à surveiller pour le Conseil de l'Europe.

Le dernier point se rapporte à la Constitution. Les opinions divergent aussi bien sur son contenu que sur la procédure à suivre. Pour le Conseil de l'Europe, la Constitution doit avant tout contribuer à la stabilité politique et institutionnelle. C'est la condition sine que non . Cette condition ne peut être remplie que s'il existe un consensus large sur la teneur de cette Constitution. Il faudra du temps pour y parvenir.

M. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC), intervient dans ces termes :

" Je tiens à remercier très vivement notre collègue, M. Van der Linden, pour la qualité et les conclusions de son rapport.

Les élections n'ont pas mis un point final à l'instabilité du pays où des menaces sérieuses continuent à peser sur la liberté et la démocratie.

Le Conseil de l'Europe doit, plus que jamais, insister sur l'absolue nécessité de restaurer la sécurité, d'assurer le fonctionnement des collectivités locales, de veiller à la liberté de la presse, de mettre fin au noyautage de la fonction publique et des forces de sécurité, et de permettre l'élaboration de lois conformes aux principes du Conseil de l'Europe.

Il faut que, sur tous ces plans, le Conseil de l'Europe soit à la place à laquelle son expérience, sa compétence et sa capacité d'expertise le portent naturellement.

Espérons enfin que le dialogue politique indispensable entre majorité et opposition pourra s'instaurer ou se poursuivre. Car, sans ce dialogue, l'espérance que nous avons pu placer dans les récentes élections retombera très vite. "

Après amendements, la résolution 1133, figurant dans le rapport 7892 est adoptée.

12. Contribution de l'Assemblée parlementaire au deuxième sommet des chefs d'Etat et de gouvernement du Conseil de l'Europe (Mercredi 24 septembre)

Le rapporteur souligne que se déroulera prochainement dans l'hémicycle le 2e Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement qu'aura connu le Conseil de l'Europe en cinquante ans.

Il lui paraît essentiel de mettre l'accent sur la collaboration toujours plus étroite entre l'Assemblée, le Comité des Ministres et les ambassadeurs tout au long de la préparation du sommet. Cette collaboration laisse espérer que les travaux des chefs d'Etat et de gouvernement auront une conclusion positive.

Malgré de nombreux motifs de satisfaction, certaines préoccupations demeurent. On sait que deux textes sont en préparation : une déclaration et un plan d'action. Il ne faudrait en aucun cas qu'après avoir adopté une noble déclaration d'intention, le sommet se contente de faire sien un plan d'action aux ambitions réduites qui ne serait pas en pleine cohérence avec les principes affirmés dans la déclaration. Le plan se doit de reprendre toutes les idées essentielles énoncées dans la déclaration sur la parité, l'égalité et la démocratie au niveau des autorités locales. S'il ne reflétait pas fidèlement ces idées, la déclaration serait vidée de son sens.

Le rapporteur espère que les convictions des membres de l'Assemblée trouveront un écho favorable chez les chefs d'Etat et de gouvernement et que ces derniers accorderont au Conseil de l'Europe les ressources qui lui sont nécessaires pour poursuivre ses multiples tâches.

La recommandation 1342 contenue dans le rapport 7291 est adoptée à l'unanimité.

13. Mines terrestres antipersonnel et leurs conséquences humanitaires - Intervention de M. Jean BRIANE, député (UDF) (Mercredi 24 septembre)

Le rapport sur les mines terrestres antipersonnel et leurs conséquences humanitaires inspiré du " Processus d'Ottawa " a pour objectif de renforcer l'appel en faveur d'une interdiction mondiale de ces mines. Il met en lumière les conséquences humanitaires que leur utilisation entraîne -leur impact médical, social et économique, les difficultés du déminage, etc. Les rapporteurs insistent sur le fait que l'utilité et la valeur militaire des mines sont aujourd'hui très fortement contestées. Ils examinent les lacunes du droit international humanitaire sur ce plan et mettent en exergue le besoin d'une réglementation plus stricte.

Ainsi, l'Assemblée recommande-t-elle au Comité des ministres de condamner la fabrication, l'emploi, le transfert et le stockage des mines antipersonnel et de déclarer ces activités contraires aux principes du Conseil de l'Europe. Elle recommande également d'établir auprès du Conseil de l'Europe une liste des sociétés productrices de mines dans les Etats membres.

Dans le projet de recommandation, les Etats membres du Conseil de l'Europe sont invités à signer, lors de la prochaine Conférence d'Ottawa en décembre 1997, un traité international interdisant les mines antipersonnel. De même, ils devraient adopter une législation nationale à cet égard, promouvoir l'établissement d'une zone exempte de mines antipersonnel en Europe, soutenir les programmes internationaux de déminage et accroître l'aide aux victimes de ces mines.

Par ailleurs, le rapport précise que sur les 40 pays membres du Conseil de l'Europe, 27 sont favorables à une interdiction totale des mines. En outre, 13 d'entre eux (Allemagne, Autriche, Belgique, Croatie, France, Luxembourg, Italie, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Suède, Suisse et Royaume-Uni) ont déjà commencé à détruire tout ou une partie de leurs stocks et 4 (Autriche, Belgique, Irlande et Suisse) ont introduit une législation nationale interdisant la production, le transfert et l'emploi des mines antipersonnel.

MM. Jean BRIANE, député (UDF), et Claude BIRRAUX, député (UDF), ont présenté sur le projet de recommandation un amendement visant à recommander au Comité des Ministres :

" de demander à l'Accord du Conseil de l'Europe EUR-OPA Risques majeurs au travers de son programme sur les technologies spatiales au service des risques, en coopération avec la Commission européenne, l'Agence spatiale européenne et les agences spatiales nationales, d'examiner la contribution que les satellites des pays de l'Est et de l'Ouest de l'Europe pourraient apporter :

- à la détection des mines ;

- aux soins à apporter par les techniques de télémédecine aux populations vivant dans les zones minées et aux équipes de déminage. "


M. Jean BRIANE défend cet amendement en ces termes :

" Nous avons proposé un additif au projet de recommandation après le paragraphe 8.ii. Pourquoi cet additif ?

Concernant les mines antipersonnelles - j'écris antipersonnelles avec " lles " et non " antipersonnel " comme dans le rapport, car ces mines agissent actuellement contre des personnes civiles, innocentes victimes, et non contre le personnel militaire comme en temps de guerre. Ces mines, réparties dans le monde, font actuellement 30 000 victimes par an ; elles sont au nombre d'environ 200 millions et l'on démine à un rythme de 100 000 unités par an. Par voie de conséquence, il faudra plus de 2 000 ans pour les neutraliser. C'est dire l'ampleur du problème !

Les technologies spatiales, à partir de leur fonction d'observation spatiale de la terre et de télécommunication, peuvent apporter une aide significative à la détection de ces engins de mort et, à partir des techniques de télémédecine pour les soins des victimes, de leurs familles et des équipes de déminage, en incluant les aspects psychologiques.

Dans le cadre du Conseil de l'Europe, a été établi un accord intergouvernemental, " l'accord EUR-OPA Risques Majeurs ", qui, à la suite de l'adoption d'une résolution par la session ministérielle du 4 octobre 1994 à Bruxelles, travaille sur la mise en place d'un programme européen sur les technologies spatiales au service de la gestion des risques, programme fondé sur la mise en commun des moyens spatiaux de l'Est et de l'Ouest de l'Europe, en étroite coopération avec la Commission européenne, l'Agence spatiale européenne et les agences spatiales nationales : le programme STRIM.

Il conviendrait de demander à cet accord d'examiner la contribution concrète qu'il pourrait apporter au problème hautement humanitaire posé par l'existence de zones infestées par les mines antipersonnelles, en proposant de mettre les technologies spatiales, en particulier le programme STRIM, au service de la protection des populations habitant dans ces zones.

Je souhaite que l'Assemblée parlementaire soutienne notre proposition dont l'objectif est essentiellement humanitaire. Cette démarche, qui partirait du Conseil de l'Europe, serait un exemple fort de coopération concrète entre l'Est et l'Ouest fondé sur l'utilisation commune du potentiel spatial de la Grande Europe au service des populations affectées par cette tragédie du XXe siècle.

J'ai pu personnellement me rendre dans un pays - le Cambodge - où les mines antipersonnelles ont fait d'énormes dégâts. Je souhaiterais que toutes les populations à travers le monde puissent travailler en paix et en toute sécurité, et donc que ces champs de mines soient supprimés et interdits. "

Personne n'ayant souhaité s'exprimer contre l'amendement et après avis favorable de la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, l'amendement est adopté à l'unanimité .

La recommandation 1343 figurant dans le rapport 7891, ainsi amendée, est alors adoptée à l'unanimité, ainsi que la directive 535, également adoptée à l'unanimité.

14. Elargissement du Conseil de l'Europe : compétences budgétaires et administratives de l'Assemblée - Interventions de Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc) et M. Bernard SCHREINER, député (RPR) (Mercredi 24 septembre)

Partant de l'analyse des compétences budgétaires et administratives actuelles de l'Assemblée, le rapporteur constate qu'il existe un déséquilibre entre le rôle politique important que joue l'Assemblée au sein du Conseil de l'Europe et celui qu'elle exerce dans la préparation du budget de l'Organisation (du budget général comme son propre budget) et à l'égard de son secrétariat.

Le rapporteur souligne que des propositions ont déjà été faites dans ce sens par l'Assemblée qui n'ont pas été suivies d'effet jusqu'ici. C'est pourquoi il propose que l'Assemblée recommande au Comité des ministres un certain nombre de mesures pratiques donnant à l'Assemblée la maîtrise de son budget et de ses conditions de travail.

Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc), prend la parole dans les termes suivants :

" Tout d'abord, je veux remercier notre rapporteur, M. Miguel Angel Martínez.

Mes chers collègues, il est assez surprenant que dans cette institution, qui va avoir cinquante ans, qui regroupe quarante Etats, nous soyons encore en train de revendiquer. Depuis hier, c'est un leitmotiv : nous revendiquons une reconnaissance, nos pleines responsabilités, un peu plus d'autonomie et tout simplement un peu plus de moyens.

Dans ce temple des droits de l'homme, les parlementaires des quarante Etats que nous sommes, doivent défendre leurs droits et les faire valoir. Miguel Angel Martínez a demandé de la véhémence. Eh bien oui, mettons de la véhémence ! Nous sommes en train de revendiquer les droits d'une assemblée à qui, vraisemblablement, un comité de tutelle semble ne pas vouloir les accorder.

Demain, une décision sera à prendre concernant la création d'une commission. La pire des choses serait d'opposer un argument financier pour ne pas la créer. Ce n'est vraiment pas celui-là qu'il faut avancer ; pas plus que celui tendant à en supprimer une autre parce qu'on ne peut pas en financer deux ; ou celui qui voudrait créer une sous-commission parce qu'on ne peut pas créer une commission.

Notre contradiction sera mise à l'épreuve demain. Il faut créer la commission parce qu'elle a besoin d'exister en termes d'image et d'action. C'est urgent ! Attention, nous risquons demain, encore une fois, d'être confrontés à une épreuve de vérité. Ne nous trompons pas de débat demain, après avoir tenu celui-ci aujourd'hui.

Je voudrais terminer par un autre aspect concernant le Greffier, auquel il a été fait référence tout à l'heure. Il est élu par nous. Je ne veux pas redéfinir ses fonctions. Entre autres, il gère et administre son secrétariat. Mais pour la francophone que je suis, le nom de greffier est assez gênant, dérangeant. Il introduit une certaine confusion. En France, le greffier fait partie du système judiciaire. Une autre appellation serait mieux indiquée. Dans nos démocraties parlementaires, on dit " secrétaire général du parlement ". Il suffirait donc de modifier le terme anglais. C'est une proposition que je fais à la commission du Règlement et j'espère qu'elle sera traduite concrètement. "

M. Bernard SCHREINER, député (RPR), intervient dans le débat en ces termes :

" Madame la Présidente, mes chers Collègues, j'aimerais tout d'abord appuyer les interventions et les commentaires présentés cet après-midi - ils ont d'ailleurs fait l'unanimité.

Comme l'a très justement souligné notre rapporteur M. Martínez, que je voudrais féliciter pour son travail et sa force de conviction dus à sa très grande compétence, la situation de l'Assemblée n'a guère évolué au cours de ces dernières années, ce qui rend encore plus perceptible le déséquilibre entre le rôle politique que l'Assemblée joue au sein du Conseil de l'Europe et le rôle mineur qu'on lui réserve en ce qui concerne ses compétences budgétaires et administratives.

Pour ma part, j'ai vécu ces frustrations en tant que rapporteur des avis budgétaires de l'Assemblée. La plupart du temps, ces avis ont été élaborés sans que la commission du budget disposât en temps voulu des informations nécessaires. Leur adoption intervenait trop souvent alors que la procédure budgétaire était pratiquement close.

En outre, parmi toutes les interventions qui ont été faites cet après-midi, j'aimerais appuyer les remarques très pertinentes de Mme Durrieu. Comme elle le disait, en effet, la dénomination de greffier prête en français à confusion et ne correspond en rien à la réalité des fonctions du Greffier de l'Assemblée. Sans doute vaudrait-il mieux parler de Secrétaire général de l'Assemblée parlementaire.

En conclusion, je demande donc instamment que ce rapport puisse être rapidement suivi d'effet et qu'à l'avenir, notre Assemblée établisse des avis budgétaires après avoir été dûment consultée, ce dernier point étant essentiel, avant la fixation du plafond global.

En ce qui concerne les compétences administratives, je pense que les demandes de la commission sont plus que raisonnables et ne font que formaliser une pratique existant déjà depuis de longues années.

La recommandation 1344 contenue dans le rapport 7900 est adoptée, ainsi que la directive 536, adoptée à l'unanimité.

15. Protection des minorités nationales - Intervention de M. Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI) (Mercredi 24 septembre)

Selon le rapporteur, la protection des minorités nationales demeure un élément essentiel de la paix et de la sécurité en Europe et les instruments juridiques et politiques internationaux ne manquent pas ; seule la volonté politique de les accepter et de les mettre en oeuvre reste insuffisante.

La protection des minorités est encore trop souvent assimilée à un problème de politique étrangère plutôt qu'intérieure.

Il importe que les Etats membres du Conseil de l'Europe ratifient, mettent en oeuvre et respectent les instruments juridiques de l'Organisation : la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales et la Charte européenne des langues régionales et minoritaires.

Seules quelques ratifications sont encore nécessaires pour que ces instruments entrent en vigueur à l'occasion du deuxième sommet des chefs d'Etat et de gouvernement, qui se tiendra les 10 et 11 octobre 1997 à Strasbourg.

Le rapport invite l'Union européenne à utiliser les résultats des exercices de monitoring du Conseil de l'Europe afin d'évaluer dans quelle mesure les droits des minorités sont respectés. De plus, il demande un accroissement des fonds consacrés aux mesures de confiance du Conseil de l'Europe dans le but de prévenir les conflits entre minorités.

M. Nicolas ABOUT, sénateur (ap. RI), intervient en ces termes :

" Le débat sur la protection des minorités nationales en Europe me permet de rappeler à l'Assemblée les risques d'une politisation de ce sujet et d'en faire une nouvelle idéologie.

La richesse culturelle et linguistique de notre continent est liée à son histoire mouvementée, faite de conquêtes militaires, de mouvements migratoires volontaires ou de populations déplacées Le résultat en fut un morcellement de l'Europe en de multiples entités nationales. Jusqu'à récemment, l'affirmation d'une identité se faisait au détriment d'une autre, l'exemple yougoslave étant le dernier en date. Le Conseil de l'Europe, dans sa défense des droits de l'homme, s'attache à inverser cette logique en permettant aux différentes identités culturelles et linguistiques de s'exprimer dans le cadre national. L'adhésion des pays européens au Conseil de l'Europe contribue d'ailleurs à améliorer cette protection.

Pourtant, il serait faux de croire que la protection des minorités nationales passe forcément par l'élaboration de nouveaux textes juridiques contraignants. Le Conseil de l'Europe et l'Union européenne ont inscrit le respect des droits de l'homme et des libertés individuelles dans leurs textes fondateurs. Toute adhésion à ces institutions implique le respect de ces droits fondamentaux.

Enfin, il ne faut pas oublier que les minorités nationales n'ont pas les mêmes caractéristiques : quoi de commun entre les Basques et les Russes en Lettonie ; les Corses et les Allemands des Sudètes, entre les Tchétchènes et les Gallois. Il serait donc naïf, voire dangereux, de vouloir régler un problème aux multiples facettes avec l'adoption d'un texte unique et valable pour tous les cas relevés en Europe.

La définition même de minorités nationales suscite de vives polémiques. Le pragmatisme et la subsidiarité sont les meilleures réponses à cet épineux dossier.

L'Europe, la construction européenne, ne doivent pas être à l'origine de déchirements au sein des Etats qu'elle se propose de réunir et de fédérer. En effet, ce n'est pas par des dispositions telles celles prévues à l'article 11 du Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme que l'on favorisera la ratification par les Etats.

Le rôle du Conseil de l'Europe doit rester celui de promouvoir les droits de l'homme en Europe, notamment ceux des enfants, mais certainement pas d'inciter les minorités à faire sécession ou de contester l'autorité centrale d'une manière plus ou moins violente. Pour ma part, je considère que la ratification de nouveaux instruments juridiques n'est pas nécessaire à la protection des minorités nationales. Les textes existants sont suffisants et le bilan est plutôt positif, même si des améliorations doivent être apportées dans certains pays.

Pour conclure, je m'interroge sur la pertinence de l'adoption de textes par le Comité des Ministres, que les gouvernements ne ratifient pas par la suite. C'est une étrange conception de leur rôle au Conseil de l'Europe. S'il s'agit de se donner bonne conscience, ils feraient mieux d'intervenir politiquement auprès de pays récemment admis, qui ont d'énormes progrès à faire sur la protection des minorités nationales et, pourquoi pas, auprès de certains invités spéciaux au Conseil de l'Europe. "

La recommandation 1345, figurant dans le rapport 7899, amendée, est adoptée à l'unanimité.

16. Activités de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) en 1997 - Interventions de MM. Jean BRIANE, député (UDF) et Jean VALLEIX, député (RPR) (Jeudi 25 septembre)

Lors du débat sur le rapport annuel de l'OCDE, les gouvernements membres de l'Organisation seront appelés à agir pour combattre le chômage et à mettre en oeuvre des plans visant à réduire le nombre toujours élevé de sans-emploi parmi les jeunes et les plus défavorisés.

Le rapport de l'OCDE recommande de prendre des mesures d'incitation à la création d'emplois, d'investir dans l'éducation, d'améliorer les qualifications et la réinsertion sociale, et de mettre en place des réformes visant à dynamiser les marchés du travail. Il conseille aux Etats membres de partager leurs expériences pour tenter de trouver un moyen terme entre la politique des pays qui ont stoppé le chômage au prix d'une réduction de la protection et de la cohésion sociales, et celle des nations dont la protection sociale a été sauvegardée, mais qui conservent un fort taux de chômage et une croissance faible.

Le rapport établit la croissance économique des pays de l'OCDE à 3 % en 1997, contre 2,6 % en 1996, et la situe à 2,7 % pour 1998. Il relève des taux de croissance impressionnants en Amérique latine, en Asie du sud-est (y compris en Chine) et dans certaines régions d'Europe centrale et orientale. Il salue le renforcement de la coopération entre l'OCDE et la Russie, exprimant le voeu que ses réformes internes ouvriront à celle-ci les portes de l'Organisation.

Le secrétaire général de l'OCDE, Donald Johnston, prendra la parole à l'occasion du débat. Des parlementaires de quarante-huit pays y assisteront.

M. Jean BRIANE, député (UDF), porte-parole de la commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et des pouvoirs locaux, intervient alors :

" Bien qu'il ait été décidé de concentrer le débat de cette année sur des thèmes précis repris par le rapporteur, que je félicite pour la qualité de son rapport - celui-ci nous donne une vision exhaustive et claire des problèmes que traverse l'économie mondiale - les commissions, qui, les années précédentes, se livraient au même exercice dans les limites de leur mandat, ont souhaité néanmoins pouvoir apporter leur contribution.

En ma qualité de président de la commission de l'environnement, je me réjouis de pouvoir intervenir pour réitérer l'intérêt et l'importance que notre commission porte aux activités de l'OCDE en matière d'environnement.

C'est en effet à l'OCDE que nous devons la définition des grands principes que l'on considère désormais comme les principes fondamentaux de toute politique de l'environnement : l'intégration des préoccupations environnementales dans les politiques sectorielles, les politiques intégrées - que ce soit de l'environnement ou des ressources, comme l'eau - ou le principe de pollueur-payeur, pour n'en citer que quelques-uns.

Rappeler ces acquis fondamentaux dans toute politique de l'environnement suffit pour montrer la portée des travaux de l'OCDE en cette matière, travaux qui prennent toute leur importance face à la globalisation de l'économie.

En effet, cette globalisation est désormais une réalité et elle exige des mesures adéquates, d'une part, pour éviter le dumping social et écologique, d'autre part, pour " internaliser " les coûts environnementaux, voie obligée pour assumer de la façon la plus équitable les charges qu'entraîne l'utilisation des ressources.

Dans ce contexte, on ne peut qu'encourager l'OCDE à poursuivre ses travaux dans des domaines tels que l'environnement et le commerce, les standards de production et de consommation voire les problèmes de la globalisation économique et environnementale. Cependant le budget de l'OCDE, comme celui de plusieurs organisations internationales, est malheureusement à la baisse. Les pays membres se trouvent donc dans l'obligation de devoir opérer des choix et établir des priorités.

Permettez-moi, Monsieur le Secrétaire général, de saluer votre initiative. A l'occasion de cette politique d'austérité, vous avez recentré les activités de l'organisation, de façon que les ressources - déjà peu importantes - soient utilisées au mieux. Mais cette tâche est ardue, voire dangereuse lorsque l'obligation de restriction budgétaire coïncide avec le constat d'une dégradation de l'environnement. Cela nous imposerait plutôt de concentrer notre volonté politique, notre énergie et nos moyens financiers sur la protection et la gestion des ressources.

Dans ce contexte difficile, on ne peut que se féliciter de votre choix, la mise en place d'un comité de haut niveau, chargé de faire des propositions, avant la fin de l'année, afin de connaître les priorités à retenir en ce qui concerne les activités de l'organisation dans ce domaine. Nous ne pouvons que souhaiter, comme vous, que cela permette de concentrer les moyens sur les priorités les plus élevées et de garder haut le profil de l'organisation en matière de protection de l'environnement.

Depuis l'élargissement de l'Union européenne et la prise en compte, par les organisations internationales, des problèmes de l'environnement des pays d'Europe centrale et orientale, dans le cadre des conférences ministérielles paneuropéennes - la prochaine se tiendra au Danemark en mai 1998 - la contribution de l'OCDE a été très appréciée, en raison de sa prise en charge des travaux portant sur le programme de coopération avec ces pays. Il est donc difficile de ne pas déplorer la baisse d'activité envisagée dans le programme du Centre de coopération avec les économies en transition. Celle-ci est compensée par les processus d'adhésion de certains de ces pays, néanmoins il s'agit d'un signal inquiétant.

Il est important que l'OCDE garde son rôle dans le domaine de la coopération en matière de développement durable. Pour ce faire, il est également essentiel d'explorer les possibilités concrètes, d'optimaliser les travaux des uns et des autres. Cela peut se faire - à l'instar de l'action que vous avez engagée - non seulement au stade de l'organisation elle-même, mais aussi, et cela n'est pas négligeable, en veillant à la bonne coordination entre les différentes organisations oeuvrant dans le domaine de l'environnement et en renforçant cette coopération.

A ce propos, permettez-moi de terminer avec un exemple et une proposition. La commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et des pouvoirs locaux de l'Assemblée parlementaire a décidé de préparer un rapport sur l'état de l'environnement en Russie. Son but ne sera pas de passer en revue tous les problèmes de l'environnement de ce pays mais plutôt de sélectionner les sujets et d'identifier les problèmes pour lesquels le Conseil de l'Europe, à ses différents niveaux d'intervention, peut apporter une contribution à la recherche de solutions.

Or, nous savons que la Commission économique pour l'Europe, des Nations Unies, prépare un rapport sur cette même question dans le cadre de son programme permanent d'activités. Pour sa part, l'OCDE envisage également de préparer un tel rapport, et ce, dans le processus d'adhésion de la Russie.

Ces trois initiatives ne sont évidemment pas identiques, mais elles pourraient devenir parfaitement complémentaires si une concertation entre les trois instances pouvait être organisée. L'Assemblée parlementaire pourrait offrir l'opportunité d'un débat qui pourrait déboucher sur des propositions concrètes correspondant aux spécificités de chacune des organisations.

En conclusion, j'insisterai sur la nécessité pour l'OCDE de continuer à oeuvrer dans le domaine du développement durable, y compris, par exemple, dans celui du développement spatial auquel le Conseil de l'Europe est aussi très attaché. Coopération et concertation doivent se développer entre partenaires habituels ou potentiels, afin d'optimaliser le plus possible les investissements en ressources humaines et financières consacrés à l'environnement dans une perspective de développement durable. "

M. Jean VALLEIX, député (RPR), prend à son tour la parole en ces termes :

" Monsieur le Secrétaire général, vous avez fait ce matin un exposé fort intéressant. Pour cette deuxième communication, nous prenons acte avec confiance de la volonté de renouveau que vous avez manifestée dans les actions de l'OCDE. Cette rencontre est pour nous toujours très importante, en raison de la compétence de votre institution et parce qu'elle est l'unique occasion que nous ayons de dialoguer mutuellement vous, institution intergouvernementale, et nous-mêmes parlementaires. Cette tradition reste pourtant encore assez originale, même si nous avons pu l'étendre grâce à cette pratique en direction de la BERD.

Ce rendez-vous est moderne et tout à fait d'actualité. Ce que vous évoquiez ce matin, en nous rappelant la mise en oeuvre de ce comité de haut niveau, est tout à fait conforme à l'évolution de notre époque, compte tenu de vos difficultés, financières, face au développement de vos missions et également à la restriction de vos moyens. Il y a là une volonté de choix, une volonté de déterminer des priorités, tout à fait importante et responsable. Par conséquent, nous serons intéressés à connaître les résultats de vos travaux.

S'agissant des moyens, nous regrettons qu'ils ne suivent pas toujours car des contributions tardent à être versées. Certaines sont importantes. Je suis désolé de citer à cet égard, nos amis des Etats-Unis.

Je voudrais également, après avoir écouté Mme Lalonde avec énormément d'attention tout à l'heure, non seulement en raison de son excellent français mais aussi compte tenu de la qualité de son intervention, dire combien nous apprécions la participation de nos partenaires d'outre-mer. Nous nous réjouissons aujourd'hui de la présence du Mexique, du Brésil, regrettant, là également, que nos amis américains ne soient pas plus participants.

Monsieur le Président, mes chers Collègues, je voudrais exprimer mes compliments au rapporteur, à son équipe et à la commission pour leur excellent travail, ainsi que pour une présentation originale. Cette sélection de sujets est une bonne méthode pour pousser plus loin nos investigations.

Je souligne également la compétence des commissions qui donnent un avis. J'ai été intéressé ce matin par l'intervention de notre collègue M. Jean Briane sur tous les problèmes d'environnement et de développement durable.

Je tiens également à marquer combien ce débat nous rapproche, parfois au-delà des cloisonnements politiques. En tant que gaulliste français, j'ai été très intéressé de suivre les interventions tant du rapporteur d'abord, lui-même socialiste autrichien, que de M. Elo, au nom du groupe socialiste, relevant les différences entre structures et orientations politiques de nos pays, le socialisme français étant en cela assez original.

Tout cela pour souligner deux points particuliers.

D'abord celui du commerce électronique. A cet égard, je voudrais insister sur l'importance du débat engagé. L'affaire est " partie ", comme on dit. Les travaux que nous avons tenus à Neufchâtel ont été très éclairants à ce sujet. Il y a d'abord un aspect technique, technologique finalement irréversible, mais qui sera de plus en plus difficile à maîtriser. Il y aussi un aspect purement humain qu'il ne faut pas oublier : celui de l'emploi.

Dans ce domaine, nous avons un précédent au Conseil de l'Europe puisque nous nous étions beaucoup penchés sur ce domaine des techniques informatiques. A l'époque, on disait notamment " traitement de textes ". Voilà quinze ou vingt ans de ça, le Conseil de l'Europe prédisait déjà les difficultés de cette progression technique et technologique en termes d'emploi. Des bouleversements considérables vont apparaître. Il faut essayer de les maîtriser. Ce sont sans doute là les problèmes les plus difficiles et ils vont montrer combien la mondialisation est un sujet d'actualité.

Ensuite, et là je vais me borner à reprendre, très directement le rapport, je demanderai : faut-il réduire considérablement le chômage et parvenir ainsi à une croissance plus rapide au prix du recul de la protection sociale de certains groupes vulnérables ? Ou bien peut-on parvenir à un fort degré de cohésion sociale mais au prix d'un surcroît de chômage et d'un ralentissement de la croissance ?

La question posée par notre rapporteur, " L'homme doit-il exister pour le marché ou le marché pour l'homme ? " me rappelle singulièrement un Français. Le personnage est connu. Je pense surtout au général de Gaulle qui parlait de la querelle de l'homme.

En cette affaire, nous sommes dans le débat modèle rhénan, modèle anglo-saxon. Chaque pays a son histoire, chaque pays a ses pratiques et par conséquent aucun n'est tout à fait comparable à l'autre. Il reste qu'il faut tendre vers une certaine harmonisation et que la paix et l'équilibre du monde reposent aussi sur cette approche commune.

Puis-je à cet égard, Français que je suis, voir arriver l'euro avec un optimisme, dès lors que nous aurions 12 ou 13 % de chômage ? Il y a là une conception à infléchir selon que nous sommes dans un état de libéralisme plus productif ou dans un état social plus avancé, mais avec une production moins grande. Il y a là des efforts à faire sur lesquels il est bon, monsieur le Secrétaire général, que vous puissiez continuer à nous éclairer.

Ces méditations doivent être poursuivies au niveau de l'Europe dans son ensemble, mais il ne faut pas oublier non plus la notion " Nord-Sud ". Je me permets de le rappeler. Je souhaite donc que dans les temps qui viennent, monsieur le Secrétaire général, vous puissiez toujours nous aider à cheminer davantage en direction d'une économie plus humaine ou finalement liberté et solidarité s'équilibreront mieux. C'est le pari aussi du Conseil de l'Europe. Au-delà de la notion de droits de l'homme, vous le rappeliez, Mme Lalonde, il y a aussi la notion de civilisation et de culture.

Après l'intervention de M. Donald J. JOHNSTON, Secrétaire général de l'OCDE, et au terme du débat qui a suivi, la résolution 1134, contenue dans le rapport 7877, est adoptée à l'unanimité.

17. Implications pour l'Europe et pour le monde du Cuban Liberty and Democratic Solidarity Act (dite " loi Helms-Burton ") voté par le Congrès des Etats-Unis (Jeudi 25 septembre)

Le rapport demande l'abrogation, ou une modification substantielle, de la Cuban Liberty and Democratic Solidarity Act (LDC), plus connue sous le nom " Helms-Burton " qui prévoit des poursuites judiciaires à l'encontre de toute entreprise exploitant des biens américains nationalisés après la Révolution cubaine de 1959.

Le rapport critique tout particulièrement la manière dont cette loi pénalise les citoyens d'autres pays en permettant de refuser des visas aux cadres de sociétés étrangères ayant des liens avec des biens nationalisés et à leur famille. Le projet de résolution demande qu'à tout le moins, les dispositions à caractère extra-territorial de la loi soient abrogées.

Depuis la révolution, les Etats-Unis ont imposé un embargo strict sur les échanges commerciaux avec Cuba et les investissements étrangers dans l'île. Les préoccupations concernant la sécurité américaine et la crainte d'une propagation du communisme ont, selon le rapport, déclenché un processus d'asphyxie de l'économie cubaine et un ostracisme politique à l'égard de Cuba. La LDC a été signée par le Président Clinton en mars 1996 après que l'aviation cubaine ait abattu deux avions civils.

Le rapporteur estime que la LDC entrave le développement économique de Cuba et nuit aux effort déployés par la communauté internationale pour s'assurer que Cuba continue à progresser dans la voie de la démocratie, du respect des droits de l'homme et de la prééminence du droit.

La résolution 1135, contenue dans le rapport 7881, amendée, est adoptée.

18. Partenariat européen des parlements nationaux au sein de l'Assemblée parlementaire (Jeudi 26 septembre)

Le rapport met l'accent sur les efforts que déploie l'Assemblée pour travailler avec les parlements nationaux afin de s'assurer, d'une part, de la pertinence des travaux du Conseil de l'Europe par rapport aux situations nationales et, de l'autre, que les gouvernements donnent suite à ses résolutions et à ses propositions.

Bien que des progrès aient déjà été accomplis, le rapport souligne la nécessité d'aller plus loin encore et demande instamment aux délégations nationales :

- de présenter les résolutions et les recommandations de l'Assemblée aux commissions parlementaires nationales compétentes ;

- d'adresser régulièrement aux gouvernements des questions orales ou écrites sur les suites données aux travaux du Conseil de l'Europe ;

- d'élaborer toute proposition de loi qui pourrait être jugée nécessaire pour accélérer la signature ou la ratification des conventions du Conseil de l'Europe ;

- de promouvoir un débat en séance plénière sur les rapports relatifs aux activités du Conseil de l'Europe.

La résolution 1136, figurant dans le rapport 7903, est adoptée après amendement.

La proposition de directive figurant dans le rapport 7925 n'est pas adoptée.

19. Création d'une commission sur l'égalité des chances pour les femmes et les hommes - Interventions de MM. Bernard SCHREINER, député (RPR) rapporteur pour avis, Daniel HOEFFEL, sénateur (UC), et de Mme Yvette ROUDY, députée (Soc) (Jeudi 26 septembre)

Une démocratie véritable est impossible sans l'égalité. C'est ce qu'affirme l'auteur du rapport, qui préconise donc la constitution d'une commission permanente chargée de l'égalité des chances pour les hommes et les femmes.

Cette commission, composée de 45 membres, remplacerait l'actuelle commission ad hoc du Bureau de l'Assemblée, créée en 1993.

Elle aurait notamment pour mission :

- de réfléchir aux questions touchant à l'égalité des chances et de faire des propositions d'action à l'Assemblée ;

- de contrôler le respect des engagements pris par les Etats dans ce domaine ;

- de promouvoir l'égalité des chances par le biais de séminaires, de conférences et d'auditions parlementaires ;

- d'encourager la coopération entre les instances parlementaires des Etats membres du Conseil de l'Europe ;

- d'examiner la situation en matière d'égalité des chances au sein du Secrétariat du Conseil de l'Europe.

M. Bernard SCHREINER, député (RPR), rapporteur pour avis de la commission du budget et du programme de travail intergouvernemental, formule les observations suivantes :

" Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, je remercie et je félicite Mme Pulgar pour son rapport concernant la création d'une commission sur l'égalité des chances pour les femmes et les hommes ainsi que Mme Lentz-Cornette pour son excellente présentation.

Je tiens à préciser que l'avis de la commission du budget et du programme de travail intergouvernemental portera sur les implications budgétaires d'une telle création pour l'Assemblée et non sur son opportunité car il s'agit, en définitive, d'une décision politique. Cela étant, une large majorité des membres de la commission saisie pour avis s'est exprimée favorablement. Il s'agit en effet d'un enjeu important pour le Conseil de l'Europe.

Le rapport qui vous est soumis le décrit bien, l'incidence financière d'une commission supplémentaire s'élèverait à environ 900 000 francs français. Cette somme a été calculée sur la base de la tenue théorique de deux réunions en dehors de Paris et de Strasbourg ; celle-ci pourrait donc être largement dépassée dans la pratique. La somme n'est pas exorbitante mais elle est toutefois importante compte tenu des ressources dont nous disposons et de l'austérité budgétaire appliquée par les gouvernements de nos Etats membres.

La commission du budget a donc examiné plusieurs solutions.

Premièrement, l'Assemblée pourrait demander un crédit supplémentaire de l'ordre de 900 000 francs français pour 1998. Cette solution présente toutefois un inconvénient ; elle suppose que l'on ouvre à nouveau la discussion sur le montant du budget alloué à l'Assemblée pour le prochain exercice budgétaire alors que la procédure d'élaboration est sur le point d'être finalisée.

Deuxièmement, l'Assemblée pourrait demander à la nouvelle commission de ne se réunir que lors des sessions plénières à Strasbourg, ne serait-ce que la première année. Cela éviterait des frais supplémentaires liés aux missions des agents du secrétariat et au travail d'interprétation ; cependant, cela aurait pour inconvénient de limiter les activités de la commission et de lui imposer d'établir des priorités.

Troisièmement, l'Assemblée pourrait également demander à d'autres commissions de ne se réunir que lors des sessions plénières à Strasbourg. Cela entraînerait les mêmes inconvénients en ce qui concerne la limitation des activités et les priorités à établir mais de toute façon il y a des économies à faire en la matière.

Quatrièmement, l'Assemblée pourrait décider de demander un regroupement obligatoire des réunions à Paris et à Strasbourg. Cette solution permettrait également de faire des économies importantes pour les dépenses de secrétariat et, surtout, en ce qui concerne les frais d'interprétation.

Cinquièmement, compte tenu de l'avancement de la procédure budgétaire, l'Assemblée pourrait décider, comme mesure transitoire, de maintenir le statu quo en 1998 en renouvelant le mandat de la commission ad hoc sur l'égalité des sexes et prendre une décision finale sur la mise en oeuvre de la création d'une nouvelle commission l'année prochaine.

Sixièmement la commission du budget, comme celle du Règlement, a évoqué la possibilité que l'Assemblée propose de faire de cette commission une sous-commission de la commission des questions juridiques et des droits de l'homme.

Enfin, l'Assemblée pourrait décider de supprimer une commission. Cela a été déjà évoqué par la commission du Règlement et une solution en ce sens a été adoptée par l'Assemblée en janvier 1997, au moment de la création de la commission du suivi, avec la suppression de la commission des relations avec les pays européens non membres. A cet égard, je précise que la commission du budget, ne disposant pas des éléments d'appréciation nécessaires, n'a pas voulu choisir la commission à supprimer.

Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, je viens d'exposer brièvement l'analyse faite par la commission du budget et du programme de travail intergouvernemental sur les incidences et les solutions budgétaires à envisager. Il vous appartient maintenant d'en débattre et de décider de l'opportunité d'une telle création. "

M. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC), intervient en ces termes :

" Madame la Présidente, mes chers Collègues, notre groupe tient à exprimer ses remerciements à Mme Pulgar, pour son excellent rapport, et à Mme Lentz-Cornette, qui s'en est fait l'avocat convaincant. Je dirai d'emblée que nous approuvons les conclusions qui ont été présentées.

Notre groupe, en effet, est attaché à l'égalité des chances et nous devons rechercher la manière la plus efficace d'y parvenir. Il en existe plusieurs.

L'une consiste à se contenter de la structure actuelle qui, manifestement, a montré ses limites.

Une autre solution consiste à demander à toutes les commissions de mieux intégrer cette recherche de l'égalité des chances dans leur action. Mais nous risquons, là encore, de passer à côté de la solution efficace.

Une autre, enfin, consiste à créer une nouvelle commission permanente. C'est la solution proposée par la commission. Nous l'approuvons totalement.

Reste à trouver les moyens matériels permettant à cette commission de fonctionner dans les meilleures conditions.

Manifestement, c'est par le redéploiement des moyens budgétaires existants que nous devons y parvenir, car nous ne saurions approuver une solution condamnant l'existence de telle ou telle commission, en particulier la commission des relations parlementaires et publiques, dont l'expérience, la crédibilité et l'utilité ne sont plus à démontrer.

Il faut donc parvenir à ce résultat par redéploiement budgétaire. Ce n'est pas une tâche facile. Nous faisons confiance à la commission du budget et du programme de travail intergouvernemental. Puisse, dans l'avenir, l'Assemblée parlementaire jouir d'un maximum de liberté d'action dans la définition et dans l'élaboration de son propre budget.

La cause de l'égalité des chances pour les hommes et les femmes est une cause importante. C'est une cause noble. Nous adhérons donc sans réserve à la proposition qui nous est présentée.

Madame la Présidente, permettez-moi de terminer par une remarque qui se situe en dehors de ce cadre, mais qui concerne les femmes.

Le Conseil de l'Europe a souvent su être, dans le passé, à l'écoute des femmes. L'an dernier, nous avons écouté avec émotion l'appel à la paix lancé ici même par les femmes d'Algérie. Des événements dramatiques ne cessent de remettre en cause cette difficile recherche. Puissions-nous, Conseil de l'Europe, ne pas rester insensibles à l'appel qu'elles nous ont lancé ! Puisse le Conseil de l'Europe relayer cet appel émouvant et faire en sorte que le recours à la violence soit définitivement banni ! "

Mme Yvette ROUDY, députée (Soc), prend la parole à son tour :

" Madame la Présidente, mes chers Collègues, c'est la première fois que je prends la parole dans cet hémicycle puisque je suis parmi vous seulement depuis cette semaine.

Je commencerai en vous rappelant, Madame la Présidente, que le 8 mars 1996 vous aviez eu l'occasion de déclarer que la création d'une commission de l'Assemblée parlementaire chargée de l'égalité permettrait d'aborder sérieusement ces questions. Vous espériez qu'elle interviendrait rapidement et vous aviez raison, Madame la Présidente.

Pourquoi aviez-vous raison ? Parce que ces problèmes, pour l'heure, sont dispersés, éclatés, mêlés aux autres questions. Ils sont transversaux. On les trouve partout, dans les questions sociales, dans les questions de santé, d'emploi, de culture, de justice, de droits civiques. On peut estimer que c'est bien puisqu'ils concernent tous ces domaines. Oui, bien sûr mais la conséquence, c'est qu'ils sont dilués et qu'ils ont donc une certaine invisibilité. C'est la dissolution qui crée l'invisibilité, voilà le problème. Car lorsqu'ils sont invisibles, il est facile de les nier. Nous savons que ce qui n'est pas nommé, ce qui n'est pas visible, n'existe pas vraiment.

Regrouper ces problèmes dans une commission leur donnerait une visibilité, une identification, une reconnaissance, car ils sont spécifiques. Ils concernent la moitié de l'humanité et méritent d'être traités avec dignité.

Je parlerai, pour ce qui me concerne, de droits, de droits de la personne. Pas de protection, Monsieur Zhebrovski ! Nous n'avons pas besoin de votre protection ! Nous voulons qu'on reconnaisse nos droits, des droits de personnes à part entière. Nous sommes la moitié de l'humanité, vous êtes l'autre. Nous devons gérer toutes les questions concernant les sociétés, les pays, ensemble, à part égale et, certainement et surtout, pour ce qui est des décisions importantes, des décisions graves : la paix, la guerre, les grandes décisions financières. Nous avons droit à la parole. Nous sommes des êtres humains à part entière.

Je suis étonnée que l'on puisse faire état de " frais de fonctionnement ", étonnée que l'on puisse soumettre cette question à des questions de frais. De quoi parlons-nous ? Nous parlons d'inégalités flagrantes, de violences spécifiques, nous parlons d'oppressions qui dévalorisent, oppriment, humilient - on a parlé récemment du cas tragique des algériennes.

Quel est le poids de l'argument relatif aux frais de fonctionnement au regard du signe fort, lisible, que va signifier, je l'espère, notre décision dans divers pays et je dirai même au-delà, dans le monde entier ? Ne sous-estimons pas le retentissement de cette décision. Le Conseil de l'Europe bénéficie d'une forte autorité morale. Les signes que nous donnons seront entendus.

Pour conclure, je soumettrai à M. Zhebrovsky, cette réflexion qui n'est pas la mienne, mais celle de grands hommes politiques dans le monde : " Lorsque l'on veut mesurer le degré de démocratie et de développement humain d'un pays, le meilleur critère est de regarder le degré d'avancement des droits des femmes ". Méditons cette réflexion. "

M. Bernard SCHREINER, député (RPR), rapporteur de la commission du budget et du programme de travail intergouvernemental, reprend la parole pour répondre aux orateurs en ces termes :

" Madame la Présidente, mes chers Collègues, j'ai suivi le débat avec beaucoup d'attention. Mon intervention sera très brève, puisqu'elle ne portera pas sur l'opportunité, mais sur les moyens budgétaires.

Certes, il est possible de trouver le million de francs nécessaire, mais, de même que de nombreux orateurs, je considère qu'il s'agit de faire un effort ensemble, afin qu'il y ait également, dans la recherche d'une solution budgétaire, une égalité et une solidarité entre toutes les commissions. Naturellement, la commission du budget et du programme de travail intergouvernemental se doit d'examiner ces questions peut-être bassement matérielles, mais j'ai été très sensible au fait que notre avis ait été entendu et qu'il en soit tenu compte. "

A la suite d'une demande de vérification du quorum au moment du vote, il s'est avéré que le quorum n'était pas réuni. Le vote sur ce point de l'ordre du jour a été ajourné et renvoyé à une partie de session ultérieure.

20. Education aux droits de l'homme (Vendredi 26 septembre)

Le rapporteur rappelle que la Convention européenne des droits de l'homme a été adoptée par les Etats membres du Conseil de l'Europe il y a presque 50 ans. Toutefois, des problèmes ayant trait aux droits de l'homme existent toujours en Europe.

L'Assemblée souligne que l'ignorance est la base de ces problèmes et recommande par conséquent qu'une plus grande priorité soit accordée à l'éducation aux droits de l'homme.

La recommandation 1346 contenue dans le rapport 7887 est adoptée à l'unanimité.

VI. LE DEUXIÈME SOMMET DES CHEFS D'ETAT ET DE GOUVERNEMENT DES ETATS MEMBRES DU CONSEIL DE L'EUROPE (STRASBOURG - 10 et 11 octobre 1997)

A la suite du rapport de M. Jean SEITLINGER, député (UDF), proposant la tenue d'un deuxième sommet des Chefs d'Etat et de gouvernement des Etats membres du Conseil de l'Europe, ce Sommet s'est tenu à Strasbourg les 10 et 11 octobre 1997.

Ouvert par une allocution de M. Jacques CHIRAC, Président de la République française, qui présidait ce deuxième Sommet, et clos par une allocution de M. Lionel JOSPIN, Premier ministre, cet événement a réuni les participants suivants :

ALBANIE

M. Rexhep MEIDANI, Président de la République

M. Paskal MILO, Ministre des Affaires Etrangères Andorre

M. Marc FORNÉ MOLNÉ, Chef du Gouvernement

M. Albert PINTAT SANTOLARIA, Ministre des Relations Extérieures

AUTRICHE

M. Thomas KLESTIL, Président Fédéral

Mme Benita FERRERO-WALDNER, Secrétaire d'Etat aux Affaires Etrangères

BELGIQUE

M. Jean-Luc DEHAENE, Premier Ministre

M. Erik DERYCKE, Ministre des Affaires Etrangères

BULGARIE

M. Petar STOYANOV, Président de la République

Mme Nadejda MIHAYLOVA, Ministre des Affaires Etrangères

CROATIE

M. Franjo TUDJMAN, Président de la République

M. Mate GRANIC, Ministre des Affaires Etrangères et Vice-Premier Ministre

CHYPRE

M. Glafcos CLERIDES, Président de la République

M. Ioannis KASOULIDES, Ministre des Affaires Etrangères

RÉPUBLIQUE TCHÈQUE

M. Václav HAVEL, Président de la République

M. Cyril SVOBODA, Vice-Ministre des Affaires Etrangères

DANEMARK

M. Poul NYRUP RASMUSSEN, Premier Ministre

M. Niels HELVEG PETERSEN, Ministre des Affaires Etrangères

ESTONIE

M. Lennart MERI, Président de la République

FINLANDE

M. Martti AHTISAARI, Président de la République

Mme Tarja HALONEN, Ministre des Affaires Etrangères

FRANCE

M. Jacques CHIRAC, Président de la République

M. Lionel JOSPIN, Premier Ministre

ALLEMAGNE

M. Helmut KOHL, Chancelier Fédéral

M. Helmut SCHÄFER, Ministre d'Etat aux Affaires Etrangères

GRÈCE

M. Constantinos STEPHANOPOULOS, Président de la République

M. Giorgos PAPANDREOU, Ministre suppléant aux Affaires Etrangères

HONGRIE

M. Gyula HORN, Premier Ministre

M. László KOVÁCS, Ministre des Affaires Etrangères

ISLANDE

M. David ODDSSON, Premier Ministre

IRLANDE

M. Bertie AHERN, Premier Ministre

Mme. Liz O'DONNELL, Ministre d'Etat au Ministère des Affaires Etrangères

ITALIE

M. Romano PRODI, Président du Conseil des Ministres

M. Piero Franco FASSINO, Secrétaire d'Etat aux Affaires Etrangères

LETTONIE

M. Guntis ULMANIS, Président de la République

M. Valdis BIRKAVS, Ministre des Affaires Etrangères

LIECHTENSTEIN

M. Mario FRICK, Chef du Gouvernement

Mme Andrea WILLI, Ministre des Affaires Etrangères

LITUANIE

M. Algirdas BRAZAUSKAS, Président de la République

M. Algirdas SAUDARGAS, Ministre des Affaires Etrangères

LUXEMBOURG

M. Jean-Claude JUNCKER, Premier Ministre

M. Jacques POOS, Vice-Premier Ministre et Ministre des Affaires Etrangères

MALTE

M. Alfred SANT, Premier Ministre

M. George W. VELLA, Vice-Premier Ministre et Ministre des Affaires Etrangères et de l'Environnement

MOLDOVA

M. Petru LUCINSCHI, Président de la République

M. Nicolae TABACARU, Ministre des Affaires Etrangères

PAYS-BAS

M. Wim KOK, Premier Ministre

M. Hans VAN MIERLO, Vice-Premier Ministre et Ministre des Affaires Etrangères

NORVÈGE

M. Thorbjørn JAGLAND, Premier Ministre

M. Bjørn Tore GODAL, Ministre des Affaires Etrangères

POLOGNE

M. Aleksander KWASNIEWSKI, Président de la République

M. Dariusz ROSATI, Ministre des Affaires Etrangères

PORTUGAL

M. António GUTERRES, Premier Ministre

M. Jaime GAMA, Ministre des Affaires Etrangères

M. Francisco SEIXAS DA COSTA, Secrétaire d'Etat aux Affaires Européennes

ROUMANIE

M. Emil CONSTANTINESCU, Président de la République

M. Adrian SEVERIN, Ministre d'Etat et Ministre des Affaires Etrangères

FÉDÉRATION DE RUSSIE

M. Boris ELTSINE, Président de la Fédération

M. Yevgeni PRIMAKOV, Ministre des Affaires Etrangères

SAINT-MARIN

M. Luigi MAZZA, Capitaine Régent

M. Marino ZANOTTI, Capitaine Régent

M. Gabriele GATTI, Ministre des Affaires Etrangères et Politiques

SLOVAQUIE

M. Michal KOVÁC, Président de la République

SLOVÉNIE

M. Janez DRNOVEK, Premier Ministre

M. Boris FRLEC, Ministre des Affaires Etrangères

ESPAGNE

M. José Maria AZNAR LÓPEZ, Président du Gouvernement

M. Ramon DE MIGUEL, Secrétaire d'Etat aux Affaires Européennes

SUÈDE

M. Göran PERSSON, Premier Ministre

M. Jan ELIASSON, Secrétaire d'Etat aux Affaires Etrangères

SUISSE

M. Arnold KOLLER, Président de la Confédération suisse et Chef du Département Fédéral de Justice et Police

M. Flavio COTTI, Vice-Président de la Confédération suisse et Chef du Département Fédéral des Affaires Etrangères

" L'ex-République yougoslave de Macédoine "

M. Kiro GLIGOROV, Président de la République

M. Blagoj HANDZISKI, Ministre des Affaires Etrangères

TURQUIE

M. Mesut YILMAZ, Premier Ministre

M. Ismail CEM, Ministre des Affaires Etrangères

UKRAINE

M. Leonid KOUTCHMA, Président de la République

M. Anton BUTEYKO, Premier Vice-Ministre des Affaires Etrangères

ROYAUME-UNI

M. Tony BLAIR, Premier Ministre

M. Tony LLOYD, Ministre d'Etat aux Affaires Etrangères et du Commonwealth

INVITÉS SPÉCIAUX :

ARMÉNIE


M. Lévon TER-PETROSSIAN, Président de la République

M. Alexandre ARZOUMANIAN, Ministre des Affaires Etrangères

AZERBAÏDJAN

M. Heydar ALIEV, Président de la République

M. Hassan HASSANOV, Ministre des Affaires Etrangères

BOSNIE ET HERZÉGOVINE

M. Alija IZETBEGOVIC, Président de la République

GÉORGIE

M. Edouard CHEVARDNADZE, Président de la République

M. Irakli MENAGARICHVILI, Ministre des Affaires Etrangères

OBSERVATEURS :

SAINT-SIÈGE


Monseigneur Jean-Louis TAURAN, Secrétaire pour les Relations avec les Etats

CANADA

M. Richard THOMPSON, Sous-Ministre délégué, Secteur des activités juridiques, Département de la Justice

- Communication écrite du Gouvernement du Canada

JAPON

M. Koichiro MATSUURA, Ambassadeur en France

- Message de Son Excellence M. Ryutaro HASHIMOTO, Premier Ministre du Japon

ETATS UNIS D'AMÉRIQUE

M. John H.F. SHATTUCK, Secrétaire d'Etat pour la Démocratie, les Droits de l'Homme et le Travail

- Lettre du Président Bill CLINTON à M. Jacques CHIRAC, Président de la République française

Secrétaire Général du Conseil de l'Europe

M. Daniel TARSCHYS

Commission européenne

M. Jacques SANTER, Président

M. Hans van den BROEK, Membre de la Commission Président en exercice de l'OSCE

M. Niels HELVEG PETERSEN, Ministre des Affaires Etrangères du Danemark

Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe

Mme Leni FISCHER, Présidente

Cour européenne des Droits de l'Homme

M. Rolv RYSSDAL, Président

Commission européenne des Droits de l'Homme

M. Stefan TRECHSEL, Président

Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe

M. Claude HAEGI, Président

M. Josef HOFMANN, Président de la Chambre des Pouvoirs Locaux du CPLRE

M. Jean-Claude VAN CAUWENBERGHE, Président de la Chambre des Régions du CPLRE

Fonds de développement social

M. Giorgio RATTI, Président du Conseil de Direction

M. Raphaël ALOMAR, Gouverneur

Commission européenne pour la démocratie par le droit

M. Antonio LA PERGOLA, Président

Commission de liaison avec les ONG

M. Pierre ARMAND, Président

Les deux documents ci-après ont été adoptés :

- la déclaration finale

- le plan d'action

DÉCLARATION FINALE

Nous, Chefs d'Etat et de Gouvernement des Etats membres du Conseil de l'Europe, réunis à Strasbourg les 10 et 11 octobre 1997 pour le Deuxième Sommet de notre Organisation,

Convaincus que les profondes mutations en Europe et les grands défis posés à nos sociétés requièrent une coopération accrue entre toutes les démocraties européennes, Encouragés par l'élargissement significatif de notre Organisation, qui a créé les bases d'un espace plus vaste de sécurité démocratique sur notre continent,

Ayant examiné les développements intervenus depuis notre Premier Sommet tenu à Vienne en 1993, ainsi que la mise en oeuvre de nos décisions prises alors au sujet de la création d'une Cour européenne unique des Droits de l'Homme, de la protection des minorités nationales et de la lutte contre le racisme, la xénophobie, l'antisémitisme et l'intolérance,

Saluant les résultats obtenus par le Conseil de l'Europe pour préparer les candidats à l'adhésion et assurer leur pleine intégration dans la famille européenne élargie, et soulignant la contribution de l'Assemblée parlementaire, ainsi que celle du Congrès des Pouvoirs locaux et régionaux, au soutien de l'évolution démocratique dans les Etats membres, réaffirmons solennellement notre attachement aux principes fondamentaux du Conseil de l'Europe - la démocratie pluraliste, le respect des droits de l'homme, la prééminence du droit - ainsi que l'engagement de nos gouvernements à se conformer pleinement aux exigences et aux responsabilités qui découlent de l'appartenance à notre Organisation, soulignons le rôle essentiel du Conseil de l'Europe dans la création de normes en matière de droits de l'homme, ainsi que sa contribution au développement du droit international à travers les Conventions européennes, et marquons notre détermination à ce que ces normes et conventions soient pleinement mises en oeuvre, notamment par le renforcement des programmes de coopération pour la consolidation de la démocratie en Europe, confirmons notre but de réaliser une union plus étroite entre nos Etats membres en vue de construire une société européenne plus libre, plus tolérante et plus juste, fondée sur des valeurs communes, telles que la liberté d'expression et d'information, la diversité culturelle et l'égale dignité de tous les êtres humains, décidons en conséquence de donner un nouvel élan aux activités du Conseil de l'Europe qui ont pour but de soutenir les efforts des Etats membres pour faire face aux changements de société au seuil d'un nouveau siècle, donnons notre plein appui au Conseil de l'Europe pour qu'il intensifie sa contribution à la cohésion, la stabilité et la sécurité de l'Europe, et nous félicitons du développement de sa coopération avec les autres Organisations européennes et transatlantiques, en particulier l'Union Européenne et l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe, et, sur cette base, déclarons ce qui suit :

Convaincus que la promotion des droits de l'homme et le renforcement de la démocratie pluraliste sont autant de contributions à la stabilité de l'Europe :

Décidons de renforcer la protection des droits de l'homme en veillant à ce que nos institutions soient en mesure d'assurer la défense effective des droits des individus à l'échelle du continent, appelons à l'abolition universelle de la peine de mort et insistons sur le maintien, entre-temps, des moratoires existants sur les exécutions en Europe, manifestons notre détermination à renforcer les moyens de prévenir et de combattre la torture et les peines ou traitements inhumains ou dégradants, appelons à l'intensification du combat contre le racisme, la xénophobie, l'antisémitisme et l'intolérance,

Soulignons l'importance d'une représentation plus équilibrée des hommes et des femmes dans tous les secteurs de la société, y compris dans la vie politique, et appelons à la continuation des progrès pour parvenir à une réelle égalité des chances entre les hommes et les femmes,

Déclarons notre détermination à intensifier la coopération en ce qui concerne la protection de toutes les personnes appartenant à des minorités nationales,

Reconnaissons le rôle fondamental des institutions de la démocratie locale dans la préservation de la stabilité en Europe,

Nous engageons à continuer à soutenir activement l'évolution démocratique dans tous les Etats membres et à renforcer nos efforts pour promouvoir un espace de normes juridiques communes en Europe ;

Reconnaissant que la cohésion sociale constitue une des exigences primordiales de l'Europe élargie et que cet objectif doit être poursuivi comme un complément indispensable de la promotion des droits de l'homme et de la dignité humaine :

Décidons de promouvoir et de mettre pleinement en oeuvre les instruments de référence et d'action que constituent notamment, pour les Etats et les partenaires sociaux, la Charte Sociale Européenne, dans le domaine juridique, et le Fonds de Développement Social, dans le domaine financier,

Convenons de réexaminer nos législations sociales en vue de lutter contre toute forme d'exclusion et d'assurer une meilleure protection des plus faibles,

Soulignons l'importance d'une approche commune et équilibrée, fondée sur la solidarité internationale, des questions relatives aux réfugiés et demandeurs d'asile, et, à cet égard, rappelons l'obligation pour l'Etat d'origine de réadmettre ces personnes sur son territoire, conformément au droit international,

Rappelons la protection due aux victimes des conflits, ainsi que l'importance du respect du droit international humanitaire et de la connaissance de ses règles au plan national, en particulier au sein des forces armées et de police,

Affirmons notre détermination à protéger les droits des travailleurs migrants en situation régulière et à faciliter leur intégration dans les sociétés où ils vivent ;

Partageant les préoccupations des citoyens devant l'ampleur nouvelle des menaces pesant sur leur sécurité et les dangers qu'elles font courir a la démocratie :

Réaffirmons notre ferme condamnation du terrorisme et notre détermination à utiliser pleinement les moyens existants pour lutter contre toutes ses manifestations, dans le respect de la légalité et des droits de l'homme,

Décidons de rechercher des réponses communes aux défis posés par l'extension de la corruption, de la criminalité organisée et du trafic de drogue à l'échelle du continent,

Décidons d'intensifier notre coopération en vue de renforcer la protection juridique des enfants,

Affirmons notre détermination à combattre la violence contre les femmes et toute forme d'exploitation sexuelle des femmes,

Appuyons l'action du Conseil de l'Europe et des autorités locales, régionales et nationales, visant à améliorer la qualité de la vie dans les zones défavorisées : urbaines et industrialisées ;

Conscients de la dimension éducative et culturelle des principaux enjeux de l'Europe de demain ainsi que du rôle essentiel de la culture et de l'éducation dans le renforcement de la compréhension mutuelle et de la confiance entre nos peuples :

Exprimons notre volonté de développer l'éducation à la citoyenneté démocratique fondée sur les droits et responsabilités des citoyens, et la participation des jeunes à la société civile,

Réaffirmons l'importance que nous attachons à la protection du patrimoine culturel et naturel européen et à la promotion de la prise de conscience de ce patrimoine,

Nous engageons à rechercher des réponses communes au développement des nouvelles technologies de l'information, sur la base des normes et des valeurs du Conseil de l'Europe et en assurant un équilibre adéquat entre le droit à l'information et le respect de la vie privée,

Reconnaissons le rôle du sport comme moyen de favoriser l'intégration sociale, en particulier chez les jeunes,

Encourageons la compréhension entre les citoyens du Nord et du Sud, notamment par l'information et la formation civique des jeunes, ainsi que par des initiatives visant à promouvoir le respect mutuel et la solidarité entre les peuples.

Ayant à l'esprit la nécessité de redéfinir nos priorités et d'adapter les missions de notre Organisation au nouveau contexte européen, nous avons établi un Plan d'Action. Ce document, joint à la présente Déclaration, vise à définir les tâches principales du Conseil de l'Europe pour les années à venir, notamment dans la perspective de son 50e Anniversaire.

PLAN D'ACTION

Les Chefs d'Etat et de Gouvernement, réunis à Strasbourg, les 10 et 11 octobre 1997, ont tracé les grandes lignes d'un Plan d'Action pour renforcer la stabilité démocratique dans les Etats membres et ont défini, à cet effet, quatre grands domaines où des avancées immédiates et des mesures concrètes sont possibles, et un cinquième secteur qui concerne les réformes de structure.

I. Démocratie et Droits de l'Homme

1.  Cour unique des Droits de l'Homme : les Chefs d'Etat et de Gouvernement se félicitent de la ratification du Protocole N° 11 à la Convention européenne des Droits de l'Homme par toutes les Parties Contractantes, qui rend possible la mise en place de la nouvelle Cour unique des Droits de l'Homme, et chargent le Comité des Ministres de prendre les mesures nécessaires à son installation au 1er novembre 1998.

2.  Commissaire aux Droits de l'Homme : les Chefs d'Etat et de Gouvernement accueillent avec satisfaction la proposition de créer un poste de Commissaire aux Droits de l'Homme pour promouvoir le respect des droits de l'homme dans les Etats membres et chargent le Comité des Ministres, d'en examiner les modalités de mise en oeuvre, en respectant les compétences de la Cour unique.

3.  Respect des engagements pris par les Etats membres : les Chefs d'Etat et de Gouvernement décident de veiller au respect des engagements pris par les Etats membres, sur la base d'un dialogue confidentiel, constructif et non discriminatoire mené au sein du Comité des Ministres et tenant compte des procédures de suivi de l'Assemblée parlementaire ; ils réitèrent leur volonté de travailler ensemble pour résoudre les problèmes auxquels les Etats membres se trouvent confrontés et considèrent que ce processus de suivi doit être accompagné, en tant que de besoin, d'une assistance pratique fournie par le Conseil de l'Europe.

4.  Interdiction du clonage d'êtres humains : les Chefs d'Etat et de Gouvernement s'engagent à interdire tout usage des techniques de clonage ayant pour but de créer un être humain génétiquement identique à un autre et donnent mandat au Comité des Ministres d'adopter, à cette fin, un protocole additionnel à la Convention d'Oviedo sur les droits de l'homme et la biomédecine dans les meilleurs délais.

5.  Lutte contre le racisme, la xénophobie, l'antisémitisme et l'intolérance : les Chefs d'Etat et de Gouvernement se félicitent des actions menées par le Conseil de l'Europe dans ce domaine depuis le Sommet de Vienne et décident de renforcer à cet effet les activités de la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance, en soulignant l'importance d'une coopération étroite avec l'Union européenne.

6.  Protection des minorités nationales : les Chefs d'Etat et de Gouvernement, prenant en considération l'entrée en vigueur imminente de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, décident de compléter l'acquis normatif du Conseil de l'Europe en la matière par des initiatives pratiques, telles que des mesures de confiance et une coopération renforcée, impliquant à la fois les gouvernements et la société civile.

II. Cohésion Sociale

1.  Promotion des droits sociaux : les Chefs d'Etat et de Gouvernement s'engagent à promouvoir les normes sociales, telles qu'elles résultent de la Charte sociale et d'autres instruments du Conseil de l'Europe, et appellent à l'adhésion la plus large possible à ces instruments ; ils décident d'améliorer les échanges de bonnes pratiques et d'informations entre les Etats membres et d'intensifier leur coopération dans ce domaine.

2.  Nouvelle stratégie de cohésion sociale : les Chefs d'Etat et de Gouvernement chargent le Comité des Ministres de définir une stratégie de cohésion sociale pour répondre aux défis de société et de procéder aux restructurations appropriées au sein du Conseil de l'Europe, notamment par la création d'une unité spécialisée dans l'observation, la comparaison et l'approche des problèmes liés à la cohésion sociale.

3.  Programme pour l'enfance : les Chefs d'Etat et de Gouvernement encouragent l'adoption d'un programme pour promouvoir les intérêts des enfants, en partenariat avec les organisations internationales et non-gouvernementales concernées.

4. Fonds de Développement Social : les Chefs d'Etat et de Gouvernement décident de renforcer les activités du Fonds de Développement Social, l'invitent à participer activement à l'action du Conseil de l'Europe en matière de cohésion sociale et lui demandent instamment d'accroître son effort d'investissements dans le domaine social et la création d'emplois.

III. Sécurité des Citoyens

1.  Lutte contre le terrorisme : les Chefs d'Etat et de Gouvernement demandent l'adoption de mesures complémentaires pour prévenir le terrorisme et pour renforcer la coopération internationale dans la lutte contre le terrorisme, dans le respect des dispositions pertinentes du droit international, y compris celles relatives à la protection des droits de l'homme, et à la lumière des recommandations de la conférence ministérielle sur le terrorisme, tenue à Paris le 30 juillet 1996 ; ils notent avec intérêt la tenue prochaine d'une conférence parlementaire visant à étudier le phénomène du terrorisme dans les sociétés démocratiques.

2.  Lutte contre la corruption et le crime organisé : Afin de promouvoir la coopération entre les Etats membres dans la lutte contre la corruption, y compris ses liens avec le crime organisé et le blanchiment de l'argent, les chefs d'Etat et de gouvernement chargent le Comité des Ministres :

- d'adopter, avant la fin de l'année, des principes directeurs qui doivent recevoir application dans le développement des législations et des pratiques nationales ;

- de conclure rapidement les travaux d'élaboration d'instruments juridiques internationaux, conformément au Programme d'Action du Conseil de l'Europe contre la Corruption ;

- d'établir sans délai un mécanisme approprié et efficace pour veiller au respect des principes directeurs et à la mise en oeuvre des instruments juridiques mentionnés.

Ils appellent tous les Etats à ratifier la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime.

3.  Lutte contre la toxicomanie : les Chefs d'Etat et de Gouvernement décident de renforcer leur coopération, par l'intermédiaire du Groupe Pompidou, pour le traitement des problèmes touchant à l'usage et au trafic de drogues illicites ; ils marquent leur approbation pour le nouveau programme de travail du Groupe et saluent en particulier les activités destinées à prévenir l'abus de drogue chez les jeunes et à faciliter la réinsertion des toxicomanes et usagers de drogue dans la société.

4.  Protection des enfants : les Chefs d'Etat et de Gouvernement décident de réexaminer leurs législations nationales en vue de parvenir à des normes communes de protection des enfants victimes ou menacés de traitements inhumains ; ils conviennent de développer leur coopération, dans le cadre du Conseil de l'Europe, en vue de prévenir toute forme d'exploitation des enfants, y compris par la production, la vente, la commercialisation et la détention de matériel pornographique impliquant des enfants.

IV. Valeurs Démocratiques et Diversité Culturelle

1.  Éducation à la citoyenneté démocratique : les Chefs d'Etat et de Gouvernement décident le lancement d'une action pour l'éducation à la citoyenneté démocratique en vue de promouvoir la prise de conscience par les citoyens de leurs droits et de leurs responsabilités dans une société démocratique, en mobilisant les réseaux existants, et comprenant un nouveau programme d'échanges de jeunes.

2.  Mise en valeur du patrimoine européen : les Chefs d'Etat et de Gouvernement, décident de lancer en 1999 une campagne sur le thème " l'Europe, un patrimoine commun ", dans le respect de la diversité culturelle, en se fondant sur des partenariats existants ou à créer entre l'administration, les institutions éducatives et culturelles et l'industrie.

3.  Nouvelles technologies de l'information : les Chefs d'Etat et de Gouvernement décident de développer une politique européenne pour l'application des nouvelles technologies de l'information, afin d'assurer le respect des droits de l'homme et de la diversité culturelle, de promouvoir la liberté d'expression et d'information, et de valoriser leur potentiel éducatif et culturel ; ils invitent le Conseil de l'Europe à rechercher à cet effet les partenariats appropriés.

V. Structures et Méthodes de Travail

1.  Réforme des structures : les Chefs d'Etat et de Gouvernement, dans la perspective du 50e anniversaire du Conseil de l'Europe en 1999, chargent le Comité des Ministres d'entreprendre les réformes structurelles nécessaires pour adapter l'Organisation à ses nouvelles missions et à sa composition élargie et pour améliorer son processus de décision.

2.  Mise en oeuvre du Plan d'Action : les Chefs d'Etat et de Gouvernement chargent le Comité des Ministres à prendre les mesures appropriées pour s'assurer que ce Plan d'Action soit rapidement mis en oeuvre par les différents organes du Conseil de l'Europe, en coopération avec les organisations européennes et d'autres organisations internationales.

Mme Josette DURRIEU , en sa qualité de Présidente de la délégation française à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, assistait à cette manifestation.

A N N E X E
LISTE DES TEXTES ADOPTES
AU COURS DE LA SESSION DE 1997

Ces textes peuvent être obtenus auprès du Conseil de l'Europe.

Adresse postale :

Point I

Conseil de l'Europe

F-67075 Strasbourg Cedex

Tél. : (33) 03 88 41 20 33 ; Fax : (33) 03 88 41 27 45

E-Mail : information.point@seddoc.coe.fr

Le Conseil de l'Europe sur Internet :

http://www.coe.fr

PREMIERE PARTIE

(27-31 janvier)

Avis n° 200 : sur le projet de convention européenne sur la nationalité

Recommandation 1311 : sur la sûreté des installations nucléaires dans les pays de l' Europe centrale et orientale

Recommandation 1312 : sur le respect des obligations et engagements contractés par l' Albanie

Recommandation 1313 : sur le respect des obligations et engagements contractés par l' Estonie

Recommandation 1314 : sur les nouvelles technologies et l' emploi

Recommandation 1315 : sur l'âge minimal concernant le droit de vote

Recommandation 1316 : sur l'état d'urgence en Albanie

Recommandation 1317 : relative aux vaccinations en Europe

Recommandation 1318 : relative au Conseil de l'Europe et l' Expo'98

Recommandation 1319 : par le Conseil de l'Europe d'une seconde campagne européenne sur l'interdépendance et la solidarité Nord-Sud

Recommandation 1320 : relative à l' enseignement , à la formation et aux services de conseil dans les domaines de l'agriculture, de la pêche et de la sylviculture

Recommandation 1321 : relative à l'amélioration de la situation des femmes dans la société rurale

Recommandation 1322 : relative à la fonction publique dans une Europe élargie

Résolution 1107 : sur la structure des commissions de l'Assemblée

Résolution 1108 : sur la Conférence intergouvernementale 1996 de l'Union européenne

Résolution 1109 : sur les conséquences pour l'Europe d'une Union économique et monétaire

Résolution 1110 : relative à la situation en République fédérale de Yougoslavie

Résolution 1111 : relative au respect de l'engagement souscrit par la Russie lors de son adhésion au Conseil de l'Europe de mettre en place un moratoire sur les exécutions capitales

Résolution 1112 : relative au respect de l'engagement souscrit par l'Ukraine lors de son adhésion au Conseil de l'Europe de mettre en place un moratoire sur les exécutions capitales

Résolution 1113 : sur la situation à Chypre

Résolution 1114 : sur le respect des obligations et engagements contractés par l' Albanie

Résolution 1115 : sur la création d'une commission de l'Assemblée pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe (commission de suivi)

Résolution 1116 : relative à la mise en oeuvre de l' Accord de Dayton pour la paix en Bosnie et Herzégovine

Résolution 1117 : sur le respect des obligations et engagements contractés par l' Estonie

Résolution 1118 : relative à l'avant-projet de charte européenne de l' autonomie régionale du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe (CPLRE)

Directive n° 529 : relative à la structure des commissions de l'Assemblée

DEUXIEME PARTIE

(21-25 avril)

Avis n° 201 : sur les dépenses relatives à l'Assemblée pour l'exercice budgétaire 1998

Recommandation 1323 : relative au renforcement du mécanisme de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants

Recommandation 1324 : relative à la contribution de l'Assemblée parlementaire au 2 e Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement du Conseil de l'Europe

Recommandation 1325 : relative à la traite des femmes et à la prostitution forcée dans les Etats membres du Conseil de l'Europe

Recommandation 1326 : relative au respect des obligations et engagements contractés par la Roumanie

Recommandation 1327 : relative à la protection et au renforcement des droits de l'homme des réfugiés et des demandeurs d'asile en Europe

Recommandation 1328 : relative à l'état d'urgence en Albanie

Recommandation 1329 : relative au suivi de la Conférence méditerranéenne sur la population, les migrations et le développement (Palma de Majorque, 15-17 octobre 1996)

Recommandation 1330 : relative au projet de charte européenne du Bassin du Danube

Recommandation 1331 : relative à l'établissement de normes internationales pour l'audit de l'impact sur l' environnement des entreprises industrielles

Résolution 1119 : relative aux conflits en Transcaucasie

Résolution 1120 : relative aux incidences des nouvelles technologies de communication et d'information sur la démocratie

Résolution 1121 : relative aux instruments de la participation des citoyens dans la démocratie représentative

Résolution 1122 : relative aux progrès de la réforme économique en Europe centrale et orientale

Résolution 1123 : relative au respect des obligations et engagements contractés par la Roumanie

Résolution 1124 : relative aux politiques de transport aérien - l'aviation civile en phase de transition

Résolution 1125 : relative à la demande de statut d' observateur auprès de l'Assemblée parlementaire déposée par le Parlement canadien

Résolution 1126 : relative à la Communauté d'Etats indépendants (CEI) et à son Assemblée interparlementaire

Directive n° 530 : relative au renforcement du mécanisme de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants

Directive n° 531 : relative aux incidences des nouvelles technologies de communication et d'information sur la démocratie

Directive n° 532 : relative à l'état d'urgence en Albanie

TROISIEME PARTIE

(23-27 juin)

Recommandation 1332 : relative aux aspects scientifiques et techniques des nouvelles technologies de l'information et de la communication

Recommandation 1333 : relative à la langue et à la culture aroumaines

Recommandation 1334 : relative aux réfugiés , aux demandeurs d'asile et aux personnes déplacées dans la Communauté d'Etats indépendants (CEI)

Recommandation 1335 : relative aux réfugiés et aux personnes déplacées en Transcaucasie

Recommandation 1336 : relative à la priorité à la lutte contre l' exploitation du travail des enfants

Recommandation 1337 : relative au fonctionnement des institutions de protection des droits de l'homme en Bosnie et Herzégovine

Résolution 1127 : relative aux conséquences de l'accident de Tchernobyl sur la santé

Résolution 1128 : relative aux activités des institutions de Bretton Woods (Banque mondiale et Fonds monétaire international)

Résolution 1129 : relative aux activités de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement

Résolution 1130 : relative à la mise en oeuvre de l'Accord de Dayton pour la paix en Bosnie et Herzégovine

Résolution 1131 : relative au traité sur la Charte de l'énergie

Directive n° 533 : relative à la situation des réfugiés et des personnes déplacées en Transcaucasie

QUATRIEME PARTIE

(22-26 septembre)

Avis n° 202 : relatif au projet de protocole additionnel à la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine, portant interdiction du clonage d'êtres humains

Avis n° 203 : sur les budgets du Conseil de l'Europe relatifs aux exercices 1997 et 1998

Recommandation 1338 : relative aux obligations et aux engagements de la République tchèque en tant qu'Etat membre

Recommandation 1339 : relative aux obligations et aux engagements de la Lituanie en tant qu'Etat membre

Recommandation 1340 : relative aux effets de la détention sur les plans familial et social

Recommandation 1341 : relative aux politiques spatiales européennes

Recommandation 1342 : relative à la contribution de l'Assemblée parlementaire au 2 e Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement du Conseil de l'Europe

Recommandation 1343 : relative aux mines terrestres antipersonnel et à leurs conséquences humanitaires

Recommandation 1344 : relative à l' élargissement du Conseil de l'Europe : compétences budgétaires et administratives de l'Assemblée

Recommandation 1345 : relative à la protection des minorités nationales

Recommandation 1346 : relative à l' éducation aux droits de l'homme

Recommandation 1347 : relative à l' élargissement de l'Union européenne

Recommandation 1348 : relative à la protection temporaire de personnes obligées de fuir leur pays

Recommandation 1349 : relative au projet de charte européenne de l' autonomie régionale du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe (CPLRE)

Recommandation 1350 : relative aux défis globaux auxquels l' agriculture est confrontée (y compris la sylviculture, la pêche et l'aquaculture)

Recommandation 1351 : relative aux disponibilités alimentaires dans le monde

Résolution 1132 : relative à l'organisation d'une conférence parlementaire pour renforcer les systèmes démocratiques en Europe et la coopération dans la lutte contre le terrorisme

Résolution 1133 : relative à la situation en Albanie

Résolution 1134 : relative à l'OCDE et l' économie mondiale

Résolution 1135 : relative aux implications pour l'Europe et pour le monde de la " Cuban Liberty and Democratic Solidarity Act ( Libertad ) " votée par le Congrès des Etats-Unis

Résolution 1136 : relative au partenariat européen des parlements nationaux au sein de l'Assemblée parlementaire

Résolution 1137 : relative au Centre Nord-Sud du Conseil de l'Europe : réforme interne, rôle et réalisations

Résolution 1138 : relative à la promotion des petites et moyennes entreprises en Europe centrale et orientale

Résolution 1139 : relative aux défis globaux auxquels est confrontée l' agriculture (y compris la sylviculture, la pêche et l'aquaculture)

Résolution 1140 : relative aux disponibilités alimentaires dans le monde

Résolution 1141 : relative au rôle des organisations professionnelles agricoles , en tant que partenaires de l'Etat, dans l'élaboration et dans la mise en oeuvre des politiques

Résolution 1142 : relative aux parlements et médias

Résolution 1143 : relative aux méthodes de travail et à la fréquence des réunions de la Commission Permanente

Directive n° 534 : relative à la recherche et au clonage d'êtres humains

Directive n° 535 : relative aux mines terrestres antipersonnel et à leurs conséquences humanitaires

Directive n° 536 : relative à l' élargissement du Conseil de l'Europe : compétences budgétaires et administratives de l'Assemblée



(1) M. Jean de Lipkowski est décédé le 20 septembre 1997.



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