II. LA CROISSANCE EUROPÉENNE À MOYEN TERME : L'INVESTISSEMENT, FACTEUR CLÉ

A. LA NOTION DE " CROISSANCE POTENTIELLE "

Le colloque organisé par votre Délégation le 16 juin dernier était consacré aux " perspectives de croissance à moyen terme dans la zone euro ".

A cette occasion, la notion de " croissance potentielle " a été longuement évoquée, en particulier dans le cadre de l'étude présentée par le Centre d'Observation Economique (COE).

La croissance potentielle correspond à l'utilisation des facteurs de production compatibles avec une inflation stable . En effet, à moyen terme, seules les contraintes d' offre sur les deux facteurs de production, travail et capital, subsisteraient, par opposition aux contraintes de demande qui pèsent plus sur les évolutions de court terme .

On comprend, à partir de cette définition, pourquoi cette notion constitue la référence essentielle des analyses à moyen terme.

En effet, une croissance durablement supérieure au potentiel est susceptible d'entraîner des tensions inflationnistes, une réaction de la politique monétaire et une hausse des taux d'intérêt et, partant, un retour de l'économie vers son potentiel.

Les autorités monétaires sont d'ailleurs elles-mêmes extrêmement attentives aux évaluations de la croissance potentielle pour surveiller les risques de " surchauffe " de l'économie 3( * ) .

Il existe deux méthodes d'évaluation de la croissance potentielle :

- une méthode statistique, fondée sur l'observation du passé, qui permet d'extraire la tendance de moyen-long terme de la croissance ;

- une méthode économétrique fondée sur l'analyse des facteurs de production disponibles , travail et capital, et la tendance d'évolution du progrès technique.

Sans entrer dans des considérations techniques sur ces méthodes, qui font l'objet de débats théoriques complexes entre économistes 4( * ) , on peut avancer que des évaluations ont une valeur prédictive toute relative dans la mesure où elles sont, pour l'essentiel fondées sur l' observation du passé .

En particulier, elles ne peuvent pas, par construction, prendre en compte les ruptures qui pourraient intervenir dans l'évolution future du progrès technique ou dans l' accumulation du capital productif.

C'est néanmoins sur cette base, " faute de mieux " pourrait-on dire, qu'ont été construites les hypothèses d'environnement international à moyen terme retenues par l'OFCE pour sa projection à moyen terme de l'économie française. Les hypothèses relatives à la croissance européenne au cours des cinq prochaines années sont ainsi fondées sur l'évaluation de la croissance potentielle dans la zone euro réalisée par l'OCDE, soit 2,5 % par an.

Les limites inhérentes à ce type de méthodes ont clairement été soulignées par les services de la Commission européenne 5( * ) , dans une analyse qui, selon votre rapporteur, apporte une contribution très importante et novatrice aux réflexions sur la croissance à moyen terme en Europe.

Ceux-ci soulignent en effet, qu'" à moyen terme, l'accroissement de la demande intérieure, à condition d'être soutenu par une vive expansion de l'investissement productif, peut, par un processus endogène, entraîner la création des capacités productives nécessaires à son propre maintien. Cela suppose évidemment que l'investissement soit un investissement d'extension et non de rationalisation : en d'autres termes, les investissements fixes devraient viser à augmenter le capital productif et non à en accroître l'intensité. Cette condition a d'autant plus de chance d'être remplie que la rentabilité est élevée et qu'elle bénéficie d'une évolution des salaires en rapport avec la productivité du travail... ".

Les services de la Commission montrent que le taux annuel moyen d'accroissement de la production potentielle pourrait, dans ces conditions, passer de la fourchette actuelle comprise entre 2,25 et 2,5 % à environ 3 à 3,5 % en cinq ans . Cette analyse est corroborée par les simulations réalisées par le COE à la demande de votre Délégation et présentées ci-après.

Elle montre combien les prévisions à moyen terme, fondées sur la notion de croissance potentielle, peuvent avoir un caractère statique : elles présentent en effet généralement la croissance des capacités de production comme un invariant, comme si les prévisions d' investissement n'avaient aucun impact..

L'importance de l'accumulation de capital dans un scénario de croissance élevée est illustrée par les développements récents de l'économie américaine qui sont évoqués ci-dessous.

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