2. La place résiduelle laissée au Parlement

M. Jean ARTHUIS a estimé, lors de son audition devant votre commission, que la discussion du projet de budget au Parlement était " un exercice extrêmement confortable pour le gouvernement : c'est du pilotage automatique ".

Pourtant, entre la présentation du projet de loi de finances, à la mi-septembre, et son adoption définitive, à la fin décembre, se passent plus de trois mois au cours desquels la situation des finances publiques peut évoluer de façon importante.

a) L'arbitrage sur les dépenses : une prérogative exclusive du gouvernement

Le rôle du Parlement dans l'élaboration du volet dépenses des projets de loi de finances est confronté à un paradoxe fort : la représentation nationale est historiquement et constitutionnellement amenée à autoriser le plafond des dépenses de l'Etat, mais ne joue aucun rôle dans la détermination de ces plafonds. Son vote revêt un caractère purement formel alors qu'il est le fondement de la démocratie. Au demeurant, la Constitution de 1958 a limité le pouvoir budgétaire des Assemblées, son article 40 notamment leur interdisant d'introduire une disposition, non seulement qui réduirait les ressources de l'Etat ou créerait ou aggraverait ses charges, mais encore qui proposerait une nouvelle répartition de crédits entre les différents chapitres budgétaires.

En outre, les procédures de régulation budgétaire -gel et annulation de crédits-, qui interviennent parfois quelques jours après la promulgation de la loi de finances, comme ce fut le cas en 1998, démontrent les limites de l'exercice que constitue le débat budgétaire au Parlement.

b) Le Parlement trop rarement écouté

Il convient de déplorer que le gouvernement ne tire quasiment jamais profit des travaux et analyses budgétaires du Parlement pour modifier son projet, comme si les finances publiques étaient trop importantes pour être traitées par les élus du peuple.

Ainsi le gouvernement n'a-t-il tiré aucune conclusion, sur le plan budgétaire, de la commission d'enquête du Sénat sur la gestion des personnels du ministère de l'éducation nationale. Il a au contraire décidé d'accroître ses moyens en crédits et en effectifs, alors que le nombre des élèves diminue de façon durable, et que la gestion des personnels de ce département ministériel fait apparaître de nombreux dysfonctionnements, à commencer par l'impossibilité de connaître avec précision le nombre de ses fonctionnaires.

L'examen des projets de loi de finances consiste donc essentiellement pour le Parlement à approuver les services votés, qui représentent environ 92 % des dépenses inscrites au budget de l'Etat. Sa marge de manoeuvre porte donc sur les mesures nouvelles, soit environ 8 % des crédits. Par ailleurs, le gouvernement n'accepte qu'avec parcimonie les dispositifs fiscaux proposés par les Assemblées.

c) Un débat d'orientation budgétaire encore largement formel et partiel

Ce n'est que depuis 1996 qu'un débat d'orientation budgétaire est organisé chaque année au Parlement. Cet exercice est certes intéressant, notamment parce qu'il oblige le gouvernement à déposer un rapport sur l'évolution des finances publiques en France et dans l'Union européenne, dont le contenu est, du reste, régulièrement enrichi. Mais il n'en reste pas moins lui aussi très formel, puisque le gouvernement fait une déclaration qui ne présente pas de caractère contraignant en matière de politique budgétaire.

Or, ce débat intervient au mois de juin, soit à une période où ni les principaux arbitrages budgétaires, ni les grandes décisions fiscales ne sont encore arrêtés. De plus, contrairement au souhait du Sénat, il n'implique pas les responsables des finances sociales alors qu'un débat consolidé sur l'évolution globale des finances publiques apparaît aujourd'hui indispensable.

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