ACCORD AVEC L'AFRIQUE DU SUD SUR L'ENCOURAGEMENT ET LA PROTECTION RÉCIPROQUES DES INVESTISSEMENTS

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 481, 1995-1996) autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Afrique du Sud sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un protocole). [Rapport n° 8 (1996-1997).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Margie Sudre, secrétaire d'Etat chargé de la francophonie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la France a récemment signé un certain nombre d'accords d'encouragement et de protection réciproques des investissements. Ces accords ont pour objet d'établir un cadre juridique sûr de nature à favoriser l'activité de nos entreprises.
L'approbation de trois de ces accords, ceux qui ont été signés avec l'Afrique du Sud, l'Arménie et Hong Kong, est à l'ordre du jour de la présente séance.
Les textes de ces accords sont presque identiques ; ils contiennent les grands principes figurant habituellement dans les accords de ce type et constituant la base de la protection des investissements telle que la conçoivent aujourd'hui les pays de l'OCDE.
Il s'agit, premièrement, d'octroyer aux investisseurs un traitement juste et équitable, conforme au droit international et au moins égal au traitement accordé aux nationaux ou à celui de la nation la plus favorisée, à l'exclusion des avantages consentis à un Etat tiers en raison de l'appartenance à une organisation économique régionale.
Il s'agit, deuxièmement, de garantir le libre transfert des revenus et du produit de la liquidation des investissements, ainsi que d'une partie des rémunérations des nationaux de l'une des parties contractantes.
Il s'agit, troisièmement, de prévoir le versement, en cas de dépossession, d'une indemnisation prompte et adéquate, dont les modalités de calcul sont précisées dans l'accord.
Il s'agit, quatrièmement, d'ouvrir le recours à une procédure d'arbitrage international en cas de différend entre l'investisseur et le pays d'accueil.
Il s'agit, cinquièmement, de permettre au gouvernement français d'accorder sa garantie aux investissements que réaliseront à l'avenir nos entreprises dans ces pays, conformément aux dispositions de la loi de finances rectificative pour 1971, qui subordonne l'octroi de cette garantie à l'existence d'un tel accord.
Comme vous le voyez, les principes auxquels nous sommes attachés et qui fondent la protection des investissements sont réaffirmés dans ces différents textes. Ils s'inscrivent dans un processus global destiné à offrir la plus grande sécurité possible à nos investisseurs. Cette démarche, suivie avec constance, a permis de passer des accords de ce type avec plus de cinquante pays.
Le premier de ces accords figurant à votre ordre du jour concerne celui qui a été signé le 11 octobre 1995 avec l'Afrique du Sud, et je souhaiterais seulement souligner l'intérêt qu'il présente au regard de nos rapports avec ce pays.
En effet, l'Afrique du Sud est en train d'effectuer des réformes de structures extrêmement importantes. Les investisseurs des pays occidentaux y sont déjà bien implantés, et souvent de manière bien plus significative que nos propres opérateurs.
Ce double constat, à savoir l'importance du développement des investissements étrangers et la faiblesse de notre participation, souligne logiquement le souci qui inspire cet accord : aider, autant que faire se peut, les entreprises françaises à renforcer leur présence et à prendre toute leur place dans cette région du monde.
Dans cette perspective, l'accord qui vous est présenté aujourd'hui m'apparaît comme un instrument nécessaire, et je vous invite à l'approuver.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Le projet de loi qui nous est soumis a en effet pour objet d'autoriser l'approbation d'un accord sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements ; il a été conclu le 11 octobre 1995 entre la France et l'Afrique du Sud.
On retrouve dans cet accord les éléments essentiels de notre doctrine en matière de protection des investissements : traitement juste et équitable des investissements de l'autre partie, libre transfert des revenus et du capital investi, indemnisation en cas de dépossession, recours éventuel à une procédure d'arbitrage international en cas de différend entre l'investisseur et le pays d'accueil.
L'accord du 11 octobre 1995 prévoit également, comme tous les accords de ce type, une définition extensive des investissements et des revenus protégés, afin de limiter les éventuels contentieux susceptibles d'opposer un investisseur à l'Etat d'accueil.
De manière classique, le seul critère véritablement posé par le présent accord est que les investissements doivent avoir été réalisés conformément à la législation de la partie contractante sur le territoire de laquelle sont effectués ces investissements.
Je souhaite évoquer maintenant l'évolution récente de l'Afrique du Sud et de ses relations avec la France.
Parmi les succès, la réussite de la transition politique doit être soulignée. Les deux étapes de cette transition ont été, d'une part, les premières élections démocratiques et multiraciales d'avril 1994 et, d'autre part, l'adoption, en mai 1996, d'une constitution très libérale, fondée sur l'attachement aux droits de l'homme et aux valeurs démocratiques.
En dépit de ces réussites, l'Afrique du Sud est désormais confrontée, dans une perspective à plus long terme, à des défis majeurs. Le moindre n'est pas la construction d'une identité nationale forte, dans un pays aux particularismes très affirmés, où cohabitent onze langues officiellement reconnues et au moins douze groupes nationaux.
La réduction des déséquilibres sociaux est un autre défi, sachant que l'on compte en Afrique du Sud cinq à huit millions de personnes sans abri ou mal logées et que le revenu moyen de la communauté noire est dix fois moins élevé que celui de la communauté blanche, lequel est équivalent à celui de l'Europe. Ce rattrapage social paraît une tâche d'autant plus immense que l'économie sud-africaine est aujourd'hui soumise à la nécessité de rechercher des gains de productivité, afin d'exporter dans les meilleures conditions, alors même que le chômage, qui touche environ 50 % de la population noire, accroît les déséquilibres sociaux, sources d'un développement préoccupant de la délinquance.
Dans ce contexte, quelles peuvent être les perspectives ouvertes au partenariat franco-sud-africain ?
La présence française en Afrique du Sud est fondée sur une longue histoire.
Dans la période actuelle, la condamnation vigoureuse de l'apartheid par la France et son association aux sanctions internationales ont assuré à notre pays la sympathie de la nouvelle Afrique du Sud, et des contacts réguliers de haut niveau sont désormais acquis entre les deux partenaires. Toutefois, les rapports privilégiés qu'entretient naturellement l'Afrique du Sud avec l'Allemagne et le monde anglo-saxon ne sauraient faire de la France un partenaire de premier plan, en dépit des efforts accomplis par notre pays sur le plan commercial et en matière d'aide.
A cet égard, l'aide française est, de loin, avec 86 millions de dollars en 1995, la première des aides européennes apportées à l'Afrique du Sud, devant les aides britannique et allemande. Néanmoins, la France n'est que le sixième partenaire commercial, avec seulement 3,9 % du marché sud-africain en 1996, et le quatrième investisseur étranger en Afrique du Sud.
Notons que le respect scrupuleux - peut-être un peu naïf, selon moi - par la France des sanctions économiques anti-apartheid est à l'origine d'un certain retard en termes de présence économique. Il est cependant possible que cette situation s'améliore.
Les exportations françaises ont progressé de 10 % en 1995. C'est ainsi que l'Afrique du Sud est devenue le premier débouché de la France en Afrique sub-saharienne, devant la Côte d'Ivoire.
Par ailleurs, des intérêts régionaux convergents constituent un atout pour la France, parmi les partenaires de l'Afrique du Sud. La République sud-africaine est intéressée par le développement de ses échanges avec l'Afrique francophone. L'Afrique pourrait donc être un terrain privilégié de la coopération franco-sud-africaine.
D'autre part, l'Afrique du Sud joue un rôle majeur dans la création d'une association des pays riverains de l'océan Indien, dans laquelle la Réunion pourrait trouver sa place. A cet égard, la Réunion est, avec la région Bretagne, un acteur important de la coopération décentralisée entre la France et l'Afrique du Sud.
On ne peut donc que conclure favorablement à l'adoption d'un projet de loi qui vise à autoriser l'approbation d'un accord susceptible de conforter la situation d'un pays où la France dispose d'atouts certains et où notre présence, notamment économique, mérite d'être encouragée.
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Afrique du Sud sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un protocole), signé à Paris le 11 octobre 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

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