M. le président. « Art. 1er. _ La politique des pêches maritimes, des cultures marines et des activités halio-alimentaires a pour objectifs, en conformité avec les principes et les règles de la politique commune des pêches et dans le respect des engagements internationaux :
« a ) de permettre d'exploiter durablement et de valoriser le patrimoine collectif que constituent les ressources halieutiques auxquelles la France accède, tant dans ses eaux sous juridiction ou souveraineté que dans les autres eaux où elle dispose de droits de pêche en vertu d'accords internationaux ;
« b ) de faciliter l'adaptation aux marchés intérieurs et extérieurs de la filière des pêches maritimes et des cultures marines, qui comprend les activités de production, de transformation et de commercialisation ;
« c ) de créer les conditions assurant le maintien et le renouvellement d'une flotte adaptée à ces objectifs ainsi que le développement et la modernisation des entreprises de l'aval de la filière ;
« d ) de développer les activités de cultures marines, notamment en veillant à la qualité du milieu ;
« e ) d'assurer la modernisation et le développement d'activités diversifiées au bénéfice de l'économie des régions littorales. »
Par amendement n° 35, M. Darniche propose de compléter le premier alinéa de cet article par les mots suivants : « , notamment le principe de la préférence communautaire des produits de la pêche ».
La parole est à M. Darniche.
M. Philippe Darniche. Les professionnels de la pêche en France - en particulier ceux de Boulogne-sur-Mer, premier port de pêche français ont, à juste titre, manifesté à plusieurs reprises contre les importations massives de poissons hors CEE, qui désorganisent les cours locaux, violent les règles sanitaires et de loyauté du marché unique.
Pour preuve, un rapport officiel du FIOM fait l'aveu de « pratiques de dédouanement dans les pays du Nord de l'Union européenne de cabillaud d'origine extra-communautaire - pays de l'Est notamment ». C'est ainsi que, comme par magie, le poisson russe devient originaire de la CEE, à des prix défiant toute concurrence française !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Josselin de Rohan, rapporteur. En dépit de la sympathie que lui inspirent les préoccupations de M. Darniche, la commission est défavorable à cet amendement, et ce pour deux raisons.
Tout d'abord, l'article 1er a un caracatère indicatif ; il n'est donc pas opportun de l'amender.
Ensuite - et c'est, me semble-t-il, la raison principale - le principe de la préférence communautaire est inscrit dans le traité de Rome : c'est l'un des principes fondateurs. Par conséquent, il s'applique de plano , et il n'est pas utile de le rappeler dans un texte de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Comme la commission, le Gouvernement est défavorable à cet amendement, mais il ne mésestime pas pour autant les remarques que vient de formuler M. Darniche.
Je tiens à vous rassurer, monsieur le sénateur : nous sommes très vigilants, et nous le serons de plus en plus, quant au respect des règles communautaires et des règles d'origine, de manière à éviter toute distorsion de concurrence et toute concurrence déloyale. Nous souhaitons, en effet, aller dans le sens d'une plus grande loyauté du marché communautaire.
M. le président. Monsieur Darniche, l'amendement est-il maintenu ?
M. Philippe Darniche. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 35 est retiré.
Par amendement n° 36, M. Darniche propose de compléter l'article 1er par deux alinéas ainsi rédigés :
« Dans un délai de deux ans, à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présentera au Parlement un rapport d'évaluation de la politique nationale et communautaire des pêches maritimes, des cultures marines et des activités halio-alimentaires.
« Afin de contribuer à l'élaboration du rapport prévu à l'alinéa précédent, une commission comprenant huit membres, dont quatre nommés par le Gouvernement, deux sénateurs désignés par le Sénat et deux députés désignés par l'Assemblée nationale, est instituée. Ses modalités de fonctionnement sont fixées par décret. »
La parole est à M. Darniche.
M. Philippe Darniche. La loi d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines, une fois amendée et votée, devra être évaluée. En effet, face à l'effondrement persistant des pêcheries françaises, face à une politique commune des pêches qui connaît actuellement ses limites, il est indispensable de réaliser un audit de la Commission de Bruxelles en matière de pêche.
Ce rapport exhaustif est demandé afin que la représentation nationale se fasse, d'ici à deux ans, une idée de l'efficience de l'Europe bleue et de l'ouverture de nos frontières.
La situation évoluant, il est plus prudent d'établir un rapport d'étape tous les deux ans.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Josselin de Rohan, rapporteur. La commission est au regret de ne pas partager sinon les préoccupations, du moins les conclusions de M. Darniche.
Comme nous l'avons déjà indiqué, l'article 1er a un caractère indicatif ; aussi n'est-il pas opportun de l'amender.
En outre, à la lecture du projet de loi, on s'aperçoit que beaucoup de rapports sont déjà demandés au Gouvernement. Certains paraissent indispensables, d'autres semblent un peu excessifs. Si nous multiplions les demandes de rapport, ceux-ci risquent de ne pas nous être fournis en temps et en heure ; quelquefois, ils ne seront pas fournis du tout. Ce n'est pas une raison pour ne pas les demander, me direz-vous ! Il ne faut tout de même pas exagérer.
Enfin, monsieur Darniche, il convient, me semble-t-il, de ne pas multiplier les synodes. Le projet de loi prévoit déjà un conseil extrêmement vaste, où pourront s'exprimer tous les représentants de la filière ; il pourra y avoir des échanges de vues intéressants et des rapports seront établis.
Multiplier les structures ou les sous-structures ne me paraît pas de nature à nous éclairer davantage.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement. En effet, comme l'a souligné M. le rapporteur, à demander trop de rapports, on risque de ne pas en obtenir du tout. Les rapports doivent déjà être produits, bien entendu, et, ensuite, ils doivent être débattus. Compte tenu de l'ordre du jour chargé du Parlement, et du Sénat en particulier, je crains que nous ne compliquions encore notre exercice.
Pour ma part, je préfère concentrer mon activité sur un petit nombre de rapports et m'engager à les présenter - car j'entends qu'un engagement, lorsqu'il est pris devant vous, soit tenu, et le soit en temps et en heure - plutôt que d'avoir à fournir de nombreux rapports et de m'abriter derrière cette abondance pour ne pas tenir mes engagements.
Cela étant dit, monsieur le sénateur, vous avez raison : il faut que nous suivions de telles affaires de façon constante. Je crois que cela doit faire partie des travaux du futur conseil supérieur d'orientation. C'est dans ce cadre-là que nous pourrons répondre à vos questions.
M. le président. Monsieur Darniche, l'amendement n° 36 est-il maintenu ?
M. Philippe Darniche. Monsieur le président, cet amendement, comme le précédent, se voulait constructif. Toutefois, compte tenu du fait que je soutiens globalement le présent projet de loi, et après les souhaits exprimés par M. le ministre, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 36 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article additionnel après l'article 1er