M. le président. Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-36, M. Masseret, Mme Bergé- Lavigne, MM. Charasse, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 231 bis N du code général des impôts, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art... - Les rémunérations des aides à domicile employées par les associations agréées au titre de l'article L. 129-1 du code du travail sont exonérées de la taxe sur les salaires dans les mêmes conditions que celles prévues par le dernier alinéa de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale. »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant des dispositions précédentes sont compensées à due concurrence par une réduction du plafond mentionné au deuxième alinéa de l'article 199 sexdecies du code général des impôts. »
Par amendement n° I-137, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 231 bis L du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 231 bis L. - Les salaires versés par les organismes et oeuvres mentionnés aux a et b du 1° du paragraphe 7 de l'article 261 ainsi que par les organismes permanents à caractère social des collectivités locales et des entreprises ou aux personnes recrutées à l'occasion et pour la durée de manifestations de bienfaisance ou de soutien exonérées de taxe sur la valeur ajoutée en vertu du c du 1° du paragraphe 7 du même article sont exonérés de taxe sur les salaires. »
« II. - Dans le premier alinéa de l'article 980 bis du code général des impôts, les mots : "n'est pas" sont remplacés par le mot : "est". »
Les trois amendements suivants sont présentés par M. Masseret, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° I-37 tend à insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 1679 A du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : "Cette somme est portée à 50 000 francs pour la taxe due à partir du 1er janvier 1997 par les associations ayant un caractère social, éducatif, familial, sportif, culturel". »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant des dispositions précédentes sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits prévus à l'article 885 U du code général des impôts. »
L'amendement n° I-38 vise à insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 1679 A du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : "Cette somme est portée à 50 000 francs pour la taxe due à partir du 1er septembre 1996 pour les associations intermédiaires et les fondations pour l'emploi."
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant des dispositions précédentes sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits prévus à l'article 885 U du code général des impôts. »
L'amendement n° I-39 a pour l'objet d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 1679 A du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : "Cette somme est portée à 50 000 francs pour la taxe due à partir du 1er janvier 1997 par les associations d'aide à domicile, les associations qui procèdent à la fourniture gratuite de repas à des personnes en difficulté, ou qui contribuent à favoriser leur logement."
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant des dispositions précédentes sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits prévus à l'article 885 U du code général des impôts. »
La parole est à M. Richard, pour défendre l'amendement n° I-36.
M. Alain Richard. A l'occasion de cette discussion, nous sommes les uns et les autres confrontés à la nécessité de chercher des solutions nouvelles et constructives en matière de soutien à l'emploi.
Nous avons eu un bref débat, en fin de matinée, avec M. le ministre et M. le rapporteur général sur l'efficacité en termes d'emploi des mesures fiscales favorisant les emplois à domicile chez les particuliers.
Nous voudrions appeler l'attention du Sénat sur l'effet d'entraînement que pourrait avoir une mesure assez peu coûteuse, puisque nous chiffrons la perte de recette à 200 millions de francs, consistant à exonérer complètement de la taxe sur les salaires les associations agréées au titre des aides à domicile.
Je rappelle qu'il existe déjà, pour le secteur associatif, un seuil d'application de la taxe sur les salaires : jusqu'à l'équivalent de six emplois rémunérés au SMIC, l'association est exonérée de la taxe sur les salaires. Ainsi, aujourd'hui, pour les petites associations qui n'emploient que quelques salariés, la taxe sur les salaires n'est pas exigible. En revanche, les associations plus importantes s'approchent assez rapidement du taux maximal de cette taxe.
Les associations d'aide à domicile jouent, nous le savons, un rôle très important de soutien social et humain des personnes âgées, surtout de celles qui sont dépendantes ou quasi-dépendantes. Or les coûts de fonctionnement de ces associations constituent une véritable limite au développement des emplois qu'elles sont susceptibles de créer.
Nous proposons l'exonération totale de la taxe sur les salaires pour les associations d'aide à domicile, même si elles emploient beaucoup de salariés. Nous pensons que cela peut être beaucoup plus efficace au regard du développement d'authentiques emplois de proximité que la formule assez coûteuse concernant les particuliers qui emploient un ou plusieurs salariés à domicile.
C'est pourquoi nous proposons un gage consistant dans un plafonnement de l'aide fiscale pour les salariés à domicile.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° I-137.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Dans une instruction en date du 12 juin 1996, adressée aux membres du Gouvernement, M. Juppé reconnaissait que « le mouvement associatif a vocation à jouer un rôle essentiel dans de nombreux secteurs de la vie sociale, notamment pour l'emploi et la lutte contre l'exclusion ».
Le secteur associatif a effectivement un rôle fondamental à jouer. Mais on ne doit pas s'arrêter à ce simple constat.
L'analyse du projet de budget pour la jeunesse et les sports révèle l'écart qui existe entre les propos de M. le Premier ministre et la réalité des choix budgétaires mis en oeuvre. Ainsi, les crédits d'intervention publique pour la jeunesse et la vie associative diminuent de 52 millions de francs.
Notre amendement correspond à une autre logique.
L'exonération de la taxe sur les salaires pour les organismes permanents à caractère social des collectivités locales et des entreprises ou pour les associations permettrait de redonner à ces secteurs les moyens de recruter massivement ; on sait que la crise et l'exclusion appellent un développement de ces organismes.
Les activités en question doivent être exercées, bien entendu, par un personnel qualifié et justement rémunéré. Or, les dispositifs actuels en matière d'aide à l'emploi incitent à recruter une personne sous statut de contrat emploi-solidarité plutôt que du personnel qualifié.
De nombreuses associations, de nombreux organismes à caractère social font ainsi appel à du personnel précaire, faute de disposer des moyens nécessaires à l'emploi de personnel stable.
Notre amendement vise donc à un rééquilibrage des aides à l'emploi, en permettant le développement du domaine social.
L'enfance, la santé, le sport, la jeunesse, l'éducation populaire, les secteurs associatifs doivent pouvoir trouver les moyens d'un véritable fonctionnement, à un moment où, il faut bien le reconnaître, monsieur le ministre, les aides de l'Etat ne cessent de fondre comme neige au soleil.
M. le président. La parole est à M. Richard, pour défendre les amendements n°s I-37, I-38 et I-39.
M. Alain Richard. Toujours afin d'essayer de créer un effet levier pour l'emploi et, en particulier, pour le développement d'emplois accessibles à des personnes peu qualifiées - car ce sont elles qui sont le plus en difficulté aujourd'hui - nous proposons d'autres mesures d'allégement de la taxe sur les salaires en faveur des associations.
Il nous apparaît que, pour ceux qui sont restés demandeurs d'emploi pendant plusieurs mois, voire plus d'une année, ou pour ceux qui présentent des déficits de qualification, les associations, avec tout leur environnement de bénévolat et l'expérience qu'elles ont acquise dans le soutien aux salariés qui reprennent un circuit d'emploi normal, constituent un vecteur de création d'emplois sans doute plus fiable et plus efficace que les particuliers.
En fait, si l'on a besoin d'un salarié pour assister un membre de sa famille ou pour accomplir des tâches d'utilité familiale, on n'embauchera pas spontanément un chômeur en fin de droits. On cherchera une personne déjà bien intégrée, justifiant d'une expérience et faisant partie d'un réseau de relations. Pour ceux qui sont le plus touchés par le chômage, le milieu associatif représente, en quelque sorte, un sas vers un emploi durable.
Par les amendements n°s I-37, I-38 et I-39, nous proposons trois mesures tendant à atteindre cet objectif.
L'amendement n° I-37 vise à porter à 50 000 francs l'abattement sur la taxe sur les salaires pour les associations ayant un caractère social, éducatif, familial, sportif ou culturel. En effet, un certain nombre d'entre elles créent des emplois et lancent de nouveaux projets, en dépit des difficultés financières auxquelles elles se heurtent parfois.
L'amendement n° I-38 vise également à porter à 50 000 francs ce même abattement pour les associations intermédiaires et les fondations pour l'emploi. Nous sommes bien là au coeur du débat.
Enfin, l'amendement n° I-39 tend à porter à 50 000 francs cet abattement pour les associations d'aide à domicile - il s'agit donc là d'un texte de repli par rapport à l'amendement n° I-36 - et pour les associations caritatives, c'est-à-dire celles qui, en leur temps, ont bénéficié de l'amendement dit « Coluche ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-36, I-137 et I-37, I-38 et I-39 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je m'exprimerai sous le contrôle de M. le président de la commission des finances.
En présentant l'amendement n° I-36, M. Richard a exprimé son souci de présenter des propositions nouvelles et constructives. Il a raison, en ce sens que la taxe sur les salaires est réellement une mauvaise taxe.
Vous avez qualifié ce matin une proposition d'inopportune et de stupide. Or la taxe sur les salaires est, selon moi, franchement inopportune, et elle est sans doute, compte tenu des difficultés que nous connaissons en matière d'emploi, devenue stupide. Néanmoins, l'enjeu est de 46 milliards de francs. Il faut donc mener en la matière - ce n'est pas à M. Richard que je l'apprendrai - une étude très approfondie, mais ce n'est pas une raison pour y renoncer.
Aussi la commission des finances souhaiterait-elle engager, monsieur le ministre, en liaison étroite avec vos services, une étude sur la taxe sur les salaires. Elle vient de rédiger un rapport sur l'activité bancaire, rapport qui a été remarqué, même s'il n'a pas toujours été accueilli très favorablement. A cette occasion, nous avons remarqué que ce secteur était pénalisé par la taxe sur les salaires.
La taxe sur les salaires perçue dans le secteur hospitalier et celui des cliniques - mais j'en ai peut-être mal évalué l'importance - est un second exemple.
M. Jean Chérioux. Elle est considérable !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Elle représente, selon moi, près de 15,33 milliards de francs, soit le tiers des 46 milliards de francs que j'évoquais. Est-il bien utile, mes chers collègues, de continuer à prélever une taxe sur les salaires d'un tel montant dans la mesure où la sécurité sociale rembourse ensuite cette somme ? Monsieur le ministre, il est urgent d'examiner cette taxe, qui n'est plus adaptée à notre époque.
Nos collègues du groupe socialiste ont proposé des mesures applicables à certaines catégories de redevables. La commission des finances n'a pas voulu choisir parmi ces différentes propositions. En conséquence, elle émet un avis défavorable sur ces amendements, tout en reconnaissant l'importance et l'intérêt des questions qui sont posées.
Pour être franc, monsieur le ministre, je souhaite que vous nous laissiez quelque espoir quant à la volonté du Gouvernement de procéder à un examen attentif de cette question, afin de sortir de la situation actuelle dans laquelle une taxe pénalise ce que nous avons de plus précieux, à savoir l'emploi.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces cinq amendements ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Je partage quelque peu l'embarras de M. le rapporteur général car j'ai également employé à plusieurs reprises, dans ce débat, à propos d'autres sujets tels que la réforme de l'impôt sur le revenu, les termes d'« archaïsme » ou de « disposition dépassée. »
La taxe sur les salaires constitue une survivance d'un ancien régime fiscal et frappe, comme l'a rappelé M. Richard, les activités qui ne sont pas assujetties à la TVA.
Malheureusement, comme l'a souligné M. le rapporteur général, l'enjeu budgétaire est tel - il représente 46 milliards de francs - que cette question mérite un examen au fond. Nous ne pourrons en effet engager une réforme que si nous en connaissons la finalité, d'autant qu'il existe des problèmes complexes de concurrence entre diverses activités économiques et que cette taxe frappe soit des activités à but lucratif, comme celles qui intéressent le secteur de la banque ou celui des assurances et qui ne sont pas assujetties à la TVA, soit des activités à but non lucratif, et je pense notamment ici au secteur associatif.
J'approuve donc tout à fait la proposition de M. le rapporteur général tendant à essayer de définir ensemble plus précisément l'avenir de ce système, mais le Gouvernement ne peut prendre d'engagement dans un sens ou dans un autre sur ce sujet.
Quant aux amendements proposés et qui concernent, pour l'essentiel, les associations à but non lucratif, notamment l'amendement n° I-36 visant les associations d'aide à domicile, je rappelle - mais M. Richard l'avait fait en présentant son amendement - que nous avons amélioré le régime fiscal au regard de la taxe sur les salaires en faisant passer de 20 000 francs à 28 000 francs l'abattement pour les rémunérations versées depuis le 1er janvier 1996. En outre, cet abattement est désormais indexé sur la hausse des prix.
Cette mesure permet, je le confirme à M. Richard, d'exonérer complètement de la taxe les salaires versés à six salariés, équivalents plein temps, rémunérés au SMIC. Cette disposition, qui a été votée cette année, représente, en année pleine, un coût budgétaire de 240 millions de francs.
Je suis conscient du fait que cette mesure ne peut être considérée que comme une étape. Je ne puis malheureusement pas aller plus loin pour le moment, et je me vois donc obligé de donner un avis défavorable sur l'amendement n° I-36, dont le coût serait de l'ordre de 300 millions de francs - je donne cette évaluation, comme les suivantes, sous toutes réserves et il s'agit plutôt d'ordres de grandeur - ainsi que sur l'amendement n° I-137, qui, lui, serait beaucoup plus coûteux, puisqu'il vise à exonérer l'ensemble des associations à but non lucratif, ce qui représenterait 5 milliards de francs, et, enfin, sur les amendements n°s I-37, I-38 et I-39, qui auraient également un coût de plusieurs centaines de millions de francs.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-36.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je ne voterai pas ces amendements, mais, tout comme M. le rapporteur général et M. le ministre, j'estime qu'ils soulèvent un véritable problème. La taxe sur les salaires touche, en effet, comme on l'a très justement dit, de nombreuses oeuvres ainsi que la quasi-totalité de l'appareil hospitalier.
Permettez-moi surtout d'insister sur le fait qu'il existe actuellement trois tranches d'imposition qui n'ont pas été révisées depuis des années. Elles ont été définies voilà dix ou quinze ans, si ce n'est plus. Par conséquent, cet impôt pèse beaucoup plus qu'avant, et j'insiste beaucoup pour que les propositions de M. le rapporteur général soient le plus rapidement possible suivies d'effet.
M. Philippe Marini. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-36, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-137, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-37, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-38, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-39, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 8