M. le président. « Art. 21. _ Les fonds d'épargne retraite sont soumis à des règles spécifiques d'évaluation de leurs actifs, de provisionnement afférent à ces derniers et de participation aux excédents, fixées par décret en Conseil d'État. Ces règles tiennent compte de la nature et de la durée de détention de leurs actifs ainsi que de leurs besoins de solvabilité. »
Sur l'article, la parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. L'article 21 de cette proposition de loi pose le principe selon lequel les fonds de pension obéissent à des règles spécifiques en ce qui concerne les investissements qu'ils réalisent.
Nous nous posons une série de questions à ce sujet, nous attendons de M. le ministre ou du rapporteur quelques précisions sur la nature des règles propres à la comptabilisation des actifs des fonds de pension.
Quelles orientations vont être fixées par le décret quant aux règles de consolidation ou de cantonnement des actifs ?
Quels principes vont régir les obligations des fonds de pension en matière de solvabilité des comptes, quel ratio prudentiel - par nature, d'aillleurs, celui-ci s'imputera sur les frais de gestion du fonds, donc sur les versements effectués par les adhérents - sera appliqué en matière de provisionnement des engagements ?
On ne peut oublier en effet que, en l'état, le texte de la proposition de loi réserve la collecte des fonds de pension majoritairement aux valeurs obligataires émises par les entreprises privées - jusqu'à 65 % -, aux actions et parts sociales des sociétés à vocation non financière - pour 35 % - et à la souscription éventuelle de parts de fonds communs de placements à risque.
Sur le fond, le montage mis en place exclut donc du champ de l'utilisation des fonds de pension les placements dits de « père de famille », portant l'effort sur les valeurs aux évolutions les plus aléatoires, et donc les plus risquées.
Cette contrainte propre de fonctionnement des fonds de pension nous amène à nous interroger, en particulier, sur le ratio de liquidité et sur le ratio de solvabilité qui vont être définis pour les fonds de pension.
A priori, ils ne peuvent qu'être plus élevés que les ratios imposés, par exemple, aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières voués à la souscription de titres obligataires.
Doivent-ils, ensuite, être proches des règles prudentielles appliquées aux banques, aux compagnies d'assurance, aux mutuelles ?
Telles sont les questions, graves parce qu'elles touchent à la sécurité des fonds, que je voulais poser à M. le rapporteur et, surtout, à M. le ministre, qui pourra nous indiquer les orientations qu'il compte suivre lors de la rédaction des textes réglementaires qui seront pris en vue de l'application de la future loi.
M. le président. Par amendement n° 94, MM. Massion, Autain, Mélenchon, Masseret, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Lise, Miquel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de supprimer cet article.
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion. Les dispositions du présent article ne nous paraissent pas conformes aux principes d'une gestion prudente ni aux directives communautaires relatives à l'assurance. C'est pourquoi nous proposons de supprimer cet article.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini rapporteur Il est tout à fait normal et légitime de renvoyer à un décret en Conseil d'Etat le soin de déterminer les règles auxquelles sont soumis les fonds d'épargne retraite en matière « d'évaluation de leurs actifs, de provisionnement afférent à ces derniers et de participation aux excédents », étant précisé que « ces règles devront tenir compte de la nature et de la durée de détention de leurs actifs ainsi que de leurs besoins de solvabilité ».
Il est clair - M. le ministre pourra nous le confirmer - que lesdites règles seront fixées par référence au code des assurances, qui, depuis fort longtemps, en matière d'assurance-vie, traite des même sujets.
Il ne faut donc pas, mes chers collègues, émettre de doutes sur la qualité prudentielle et la nature de la réglementation applicable.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission est évidemment défavorable à la suppression de l'article 21.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Il est également défavorable.
Je confirme que les ratios prudentiels qui seront applicables aux fonds seront ceux du code des assurances. A plusieurs reprises, d'ailleurs, le texte de la proposition de loi renvoie explicitement aux articles correspondants de ce code.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 94.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Dans ce débat austère et complexe, au risque de déroger un instant au sérieux de nos travaux, je me permettrai d'apporter une petite note d'humour, monsieur le président.
Indiscutablement, il faut une gestion prudente, mais imposer des règles trop strictes à un moment donné, c'est risquer de se lier à un autre moment.
Voici ce qu'un grand financier avait coutume de dire à propos de ce que l'on appelle communément les valeurs refuges : « Méfiez-vous des valeurs refuges, car c'est sur les refuges qu'il y a des becs de gaz ! » (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 94, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 21.

(L'article 21 est adopté.)

Article 22