RÉGLEMENTATION COMPTABLE
ET PUBLICITÉ FONCIÈRE

Adoption d'un projet de loi
en deuxième lecture

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi (n° 189, 1996-1997), modifié par l'Assemblée nationale, portant réforme de la réglementation comptable et adaptation du régime de la publicité foncière. [Rapport n° 230 (1996-1997) et avis n° 257 (1996-1997).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean Arthuis, ministre de l'économie et des finances. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le Sénat aborde aujourd'hui la deuxième lecture d'un projet de loi très attendu par les investisseurs, par les entreprises et par les professionnels de la comptabilité. Nous avons longuement débattu de ses enjeux, qui sont parfaitement rappelés dans les excellents rapports de M. Hyest, au nom de la commission des lois, et de M. Marini, au nom de la commission des finances.
Permettez-moi de remercier MM. les rapporteurs pour la très grande qualité du travail accompli et pour l'enrichissement certain qu'ils ont apporté à la rédaction de ce texte, à sa pertinence juridique et à sa lisibilité.
Les échanges qui se sont déroulés dans cet hémicycle et à l'Assemblée nationale ont permis, comme il est normal dans le débat démocratique, l'expression de toutes les opinions et de toutes les sensibilités. Ils ont surtout servi à affûter notre argumentation et à cerner très précisément nos objectifs. En cela, les débats parlementaires constituent, avec le texte des rapports, une précieuse clé de lecture.
A l'issue de ces lectures, vos commissions vous proposent aujourd'hui d'adopter conformes seize articles sur dix-neuf. En fait, l'essentiel de la discussion que nous devons encore avoir porte sur l'article 6, qui permet de dispenser certaines sociétés de la présentation des comptes consolidés telle qu'elle résulte des articles 357-3 à 357-8 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales. Je vais donc concentrer mon propos sur cet article et sur les modifications que vos rapporteurs entendent y apporter.
Quel but visons-nous au travers de ce dispositif dérogatoire ? Il s'agit bien de prendre en compte les besoins des entreprises françaises, qui sont confrontées de manière constante à la mondialisation de l'économie en ce qu'elles mobilisent des ressources financières hors du territoire national.
Dans ce contexte, il apparaît nécessaire et urgent de disposer, au plan interne, d'une capacité à valider les règles comptables internationales. Cette faculté permettra d'autoriser certaines entreprises françaises qui lèvent des fonds sur les marchés de capitaux étrangers à utiliser un langage comptable mondialement reconnu.
L'unicité de la présentation des comptes permet, en effet, aux entreprises de collecter des ressources à un moindre coût, donc d'accroître leur compétitivité. Au surplus, elle donne aux investisseurs étrangers désireux de prendre des participations dans ces sociétés des informations pertinentes et comparables.
Les débats ont montré le consensus qui existait sur cet objectif. Ils ont porté sur les frontières et la définition juridique du champ d'application de cette dérogation à la présentation des comptes.
En première lecture, le Sénat a préféré la notion de négociation sur un marché financier étranger à celle d'appel à l'épargne pour identifier les sociétés françaises susceptibles de bénéficier de la dérogation. En outre, il a permis au comité de la réglementation comptable, le CRC, de déterminer les conditions d'application des normes qu'il proposera à l'homologation ministérielle, de manière à éviter tout risque de vagabondage comptable. Le Gouvernement avait accepté cette rédaction judicieuse.
Lors de la première lecture, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements qui restreignent le champ d'application de la dérogation, contre l'avis et l'analyse du Gouvernement.
Le premier excluait les marchés de gré à gré en précisant que les marchés financiers étrangers visés au premier alinéa de l'article étaient organisés et réglementés.
Je m'étais opposé à cette formulation. Vos rapporteurs me paraissent partager cette appréciation. M. Hyest note à juste titre, dans son rapport, que « le fait pour une société française de placer des billets de trésorerie sur des marchés financiers étrangers traduit la dimension internationale du financement de l'activité de celle-ci et justifie qu'elle puisse présenter aux investisseurs étrangers des comptes consolidés établis selon des normes internationales ». On ne peut être plus clair.
Le Gouvernement approuve donc totalement l'amendement du Sénat qui rétablit la référence à la négociation sur un marché financier étranger.
Le second amendement de l'Assemblée nationale visait à inscrire, de manière plus explicite, la préférence française pour la norme de l' International accounting standards committee, l'IASC. Pour ce faire, l'Assemblée nationale avait substitué aux termes « règles internationalement reconnues » les termes « règles internationales », c'est-à-dire seulement l'IASC.
L'Assemblée nationale avait, par ailleurs, organisé une période transitoire allant jusqu'au 1er janvier 1999, date théorique d'acceptation du corpus IASC par l'Organisation internationale des commissions de valeurs mobilières, afin de permettre aux entreprises utilisant ce référentiel US GAAP de continuer à le faire.
La position du Gouvernement est sans ambiguïté ; je l'avais du reste exprimée clairement, me semble-t-il, à l'Assemblée nationale. Je souhaite la réaffirmer ici une nouvelle fois.
Sur les normes retenues, tout à l'heure, j'ai implicitement posé la question en termes d'intelligence économique et de compétitivité des entreprises.
Dans un monde totalement ouvert, je crois qu'un corpus de règles internationales doit exister et s'imposer à terme. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement français, comme la Commission de Bruxelles, regarde d'un oeil favorable l'évolution des travaux de l'IASC et encourage leur bonne fin.
Nous devons être conscients du fait que le dispositif actuel est encore incomplet et que nous devrons attendre plusieurs années avant qu'il ait été achevé.
S'agissant d'un organisme privé, il importe que les professionnels français, les comptables comme les entreprises, s'investissent fortement dans les travaux de normalisation. Il est bien entendu que l'interlocuteur privilégié de l'IASC doit être le Conseil national de la comptabilité, en particulier au sein du comité d'interprétation. J'observe que le processus est largement engagé dans cette voie, et je m'en félicite.
Il n'en demeure pas moins que, en l'absence d'un référentiel international complet et accepté par les principales places financières mondiales, l'utilisation de normes du FASB ou de l'US GAAP doit encore permettre de satisfaire les besoins de certaines entreprises françaises. J'observe de plus que, pour certains secteurs, seules des normes FASB existent. Je pense notamment au secteur pétrolier ou à celui des réseaux câblés. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement avait visé dans son texte initial les normes internationalement reconnues.
La commission des lois et la commission des finances nous proposent une nouvelle rédaction du texte adopté par l'Assemblée nationale, rédaction qui distingue deux cas.
Le premier cas est celui d'un corps de règles IASC qui serait complété par certaines règles US GAAP, homologuées par le CRC. Cette hypothèse couvre notamment le secteur pétrolier, où seules existent les normes US GAAP.
Le second cas est celui où des règles IASC n'existeraient pas encore ou n'auraient pas encore été homologuées. Dès lors, le CRC pourrait autoriser l'utilisation des normes internationalement reconnues qu'il aurait homologuées préalablement. Cette hypothèse vise la période transitoire sans pour autant fixer de date butoir ; on ne s'enferme pas dans un calendrier.
Le Gouvernement approuve cette formulation. C'est ainsi que nous permettrons à nos entreprises d'occuper la place qu'elles méritent dans l'économie mondiale. C'est l'intérêt de la France, et je ne doute pas que nous le mesurerons en termes d'emplois dans les années à venir. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes appelés à examiner en deuxième lecture ce projet de loi qui comporte deux titres, l'un portant réforme de la réglementation comptable, l'autre portant adaptation du régime de publicité foncière.
Je traiterai très rapidement du titre II, puisque l'Assemblée nationale a adopté le dispositif qui avait été voté par le Sénat en y introduisant seulement une disposition interprétative relative à la législation applicable en Alsace-Moselle en matière de privilège du syndic des copropriétaires.
Nous sommes toujours très sensibles à la réglementation particulière de ces départements. Bien entendu, la commission des lois vous proposera, mes chers collègues, de donner un avis favorable sur ce texte purement interprétatif, sous réserve de préciser qu'il doit s'appliquer immédiatement, contrairement aux autres dispositions concernant la modernisation comptable ou l'informatisation des bureaux des hypothèques, qui demandent un certain délai de mise en oeuvre.
M. le ministre a parfaitement explicité tout ce qui relève de la réglementation comptable.
S'agissant de la nouvelle composition du CRC, il n'y a pas de divergence entre l'Assemblée nationale et le Sénat. Le texte qui sort des travaux de l'Assemblée nationale ne pose pas de problèmes, si ce n'est, bien entendu, qu'il prévoit que siègent à ce comité un membre du Conseil d'Etat et un conseiller à la Cour de cassation.
Nous préférons dire que la Cour de cassation est également représentée par l'un de ses membres, qui ne sera pas forcément un conseiller.
Bien entendu, le problème majeur, qui portait sur l'un des objets principaux du texte, demeure. Il concerne les comptes consolidés des sociétés qui font appel à l'épargne sur un marché financier étranger.
La formule qui avait été trouvée par le Sénat était parfaitement cohérente. Vous avez relevé, monsieur le ministre, l'importance économique que ces dispositions revêtent pour les entreprises françaises et pour leur rayonnement à l'étranger.
Dans cette perspective, continuer d'obliger ces sociétés à consolider leurs comptes selon les règles françaises, d'une part, et les normes FASB aujourd'hui, IASC demain, d'autre part, n'est pas satisfaisant et risque de nuire à la crédibilité même des comptes consolidés.
C'est pourquoi vous avez proposé, et nous l'avons retenu, que ces sociétés aient la possibilité de consolider leurs comptes selon des normes internationalement reconnues.
Dans notre esprit, cela recouvrait, bien entendu, à la fois les normes internationales quand elles existeront - les normes de l'IASC - et, ainsi que vous l'avez dit, soit à titre supplétif soit à titre complémentaire, les normes FASB.
Un débat intéressant a eu lieu à l'Assemblée nationale sur le sujet, mais, à mon avis, en dehors du véritable objet du texte.
Il faut en effet rappeler que toutes ces normes seront contrôlées par le comité de la réglementation comptable, puisque seules seront utilisables les normes qu'il aura validées. J'indique au passage que l'obligation de traduction en français, rappelée par l'Assemblée nationale, nous semblait aller de soi sans qu'il fût besoin de l'inscrire dans la loi. Si tel n'était pas le cas, nous aurions alors à mentionner cette obligation dans bien des lois !
J'en reviens au fond.
L'Assemblée nationale, comme le Gouvernement, comme nous tous d'ailleurs, souhaite que des normes comptables internationales puissent s'appliquer dans les meilleurs délais. Nous savons que les organismes chargés de les établir sont très actifs en la matière. Le Gouvernement affirme que l'élaboration de ces normes devrait être achevée avant 1999. Cela me paraît un peu irréaliste. De surcroît - comme vous l'avez dit tout à l'heure, monsieur le ministre -, dans certains secteurs, il n'y aura pas de règles internationales. Il faudra donc bien accepter alors des règles internationalement reconnues.
C'est pourquoi nous proposerons au Sénat de retenir tout à la fois les règles internationales et les règles internationalement reconnues, ces dernières pouvant intervenir soit en complément des règles de l'IASC, soit, le cas échéant, à titre exclusif, faute de règles internationales.
Sans être en opposition avec l'Assemblée nationale, nous pensons que le dispositif doit être assez souple pour permettre aux sociétés qui interviennent sur les marchés financiers étrangers d'être suffisamment efficaces.
Quant à l'obligation de cotation sur un marché organisé ou réglementé, qui a été introduite par l'Assemblée nationale, elle ne me paraît pas pertinente. Là aussi, il faut retenir une formule plus large qui vise la négociation sur un marché financier étranger sans renvoyer à des notions à la fois restrictives et non définies. Il ne faut pas risquer d'empêcher les sociétés qui en ont besoin de présenter des comptes consolidés selon des normes pertinentes au regard de leurs sources de financement.
Aussi la commission des lois vous proposera-t-elle à l'article 6, mes chers collègues, d'adopter un amendement important, allant dans le sens, souhaité par tous, d'un large usage des règles comptables internationales ou, à défaut, internationalement reconnues, afin de faciliter l'accès des sociétés françaises aux marchés financiers étrangers dans de bonnes conditions. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Philippe Marini. rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce texte est important pour nos entreprises, important pour les professions de la comptabilité. A vrai dire, ces professions ne l'ont attendu que trop longtemps.
Il résulte d'une initiative prise par M. le ministre de l'économie et des finances voilà environ un an, mais le calendrier parlementaire a été tel que la navette ne s'est pas déroulée à un rythme suffisamment rapide.
C'est la raison pour laquelle, avant d'aborder le fond, je formulerai une remarque sur l'inadéquation de nos procédures parlementaires à certaines matières.
Il n'y a pas si longtemps, M. le président de la commission des lois, M. Jacques Larché, s'est exprimé sur l'opportunité de prévoir une législation en commission. Je crois qu'il a infiniment raison...
M. Jean Arthuis, ministre de l'économie et des finances. C'est très juste !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. ... s'agissant de pans entiers de notre législation économique, financière, fiscale et comptable, pour ne parler que des secteurs de compétences de la commission des finances.
Procéder ainsi ne serait pas, à l'évidence, dessaisir le Parlement, bien au contraire ! Ce serait accélérer l'examen des textes et, paradoxalement, permettre que s'impliquent dans cet examen plus de collègues concernés que ce n'est le cas dans le cadre de nos règles traditionnelles d'examen des textes.
Je crois bon, monsieur le ministre, mes chers collègues, qu'a l'occasion d'un commentaire sur ce texte, qui en arrive à sa version définitive, de me livrer à cette incursion dans le domaine de la pratique des institutions.
Enfin, je voudrais souligner, toujours sur le plan de la méthode, que la commission des finances et la commission des lois ont travaillé main dans la main, de manière tout à fait convergente et confiante. Ce travail d'équipe est, à l'évidence, une nécessité pour tous les sujets qui concernent le droit économique et financier ainsi que le droit de l'entreprise.
M. Jean Arthuis, ministre de l'économie et des finances. Bien sûr !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Si j'évoque ainsi la législation future qui interviendra dans les mois prochains, c'est parce que je veux faire allusion à la place des comptes consolidés dans la législation sur les sociétés commerciales. En effet, nous faisons aujourd'hui un premier pas qui permettra à terme l'approbation des comptes consolidés par les assemblées générales des sociétés mères des groupes.
Si nous n'adoptions pas aujourd'hui le présent texte, nous nous trouverions dans une position beaucoup plus fragile pour faire progresser les comptes consolidés en termes de force patrimoniale et de force juridique.
C'est bien par une démarche commune aux juristes et aux financiers que doit être défini le futur cadre juridique, le cadre compétitif des sociétés commerciales françaises. Le droit des sociétés doit en effet être modernisé, rénové à partir de notre loi, plus que trentenaire, sur les sociétés commerciales, la loi du 24 juillet 1966.
Ce partenariat devra se poursuivre sur tous sujets concernant la comptabilité, le rôle des commissaires aux comptes, les obligations auxquelles ils sont soumis, la définition des compétence en matière de rapports spéciaux aux assemblées générales, les critères de compétences liés à de ces rapports spéciaux, mais aussi, plus généralement, sur tout ce qui a trait au droit des valeurs mobilières et des relations entre le droit boursier et le droit des sociétés commerciales.
Revenons-en maintenant à l'objet plus précis du texte qui nous est soumis et, plus particulièrement, au point qui fait encore l'objet d'une divergence entre l'Assemblée nationale et le Sénat.
J'ai constaté avec plaisir, monsieur le ministre, que les analyses de nos commissions sont également les vôtres et que le fonctionnement du bicamérisme a permis d'améliorer très substantiellement ce texte, de le rendre concrètement utilisable par les entreprises pour lesquelles il est conçu.
Je rappellerai moi aussi d'un mot que le débat suscité par l'article 6 porte tout à la fois sur le champ d'application d'une dérogation et sur la portée de cette même dérogation.
En ce qui concerne le champ d'application, nous avons estimé que l'Assemblée nationale n'était pas tout à fait réaliste en voulant limiter ladite dérogation aux émissions faites à l'étranger sur les seuls marchés réglementés ou organisés.
Il n'existe pas, en effet, de définition juridique des marchés organisés, a fortiori pas de définition internationale.
Quant à la notion de marché réglementé, tout ce que nous pouvons en dire, c'est qu'elle s'applique à un marché reconnu comme tel par les pouvoirs publics, conformément à une directive européenne. S'agissant d'émissions ou de recours à des procédés financiers hors de l'Europe, la notion de marché réglementé ne peut donc avoir de contenu précis.
Dans ces conditions, tout en comprenant l'objectif de la modification introduite par l'Assemblée nationale - c'est-à-dire interdire à des sociétés dont les titres, par exemple de simples billets de trésorerie, comme le rappelait M. le rapporteur, seraient occasionnellement négociés sur une place étrangère de bénéficier de ce seul fait de la dérogation pour l'établissement de leurs comptes consolidés -, nous estimons qu'il n'est pas atteint par la rédaction de l'article 6 qui nous est soumise ; c'est pourquoi, avec la commission des lois, nous proposons une rédaction légèrement différente.
Il convient de s'en tenir à la notion de marché financier étranger, qui recouvre aussi bien les marchés de pur gré à gré que les marchés organisés et, bien sûr, les marchés réglementés, qu'ils soient européens ou non.
S'agissant maintenant de la portée de la dérogation, force nous est de prendre en compte une certaine réalité, que d'aucuns jugent d'ailleurs déplaisante : nous vivons dans un monde où l'on est conduit à se procurer de l'argent là où il existe des capitaux disponibles et où, par conséquent, les capitaux circulent. Or, dans ce monde, nos normes comptables ne sont pas les seules à s'appliquer, loin s'en faut.
Il nous faut néanmoins apporter à nos entreprises la sécurité juridique nécessaire.
C'est pourquoi nous proposons, là encore avec la commission des lois, de permettre l'utilisation de règles comptables internationalement reconnues, adoptées, après avoir été traduites en français, par le Comité de la réglementation comptable, mais de ne permettre cette utilisation qu'en complément de règles internationales ou à la place de ces règles tant qu'aucun corps de règles internationales n'est adopté.
La première hypothèse vise certains secteurs pour lesquels, vraisemblablement, des règles internationales ne seront pas adoptées, l'industrie pétrolière, par exemple. La seconde hypothèse vise le cas envisagé par l'Assemblée nationale dans le paragraphe II de l'article 6. A l'heure actuelle, les normes internationales élaborées par l'IASC, que vous avez évoquées, monsieur le ministre, ne forment pas un corps complet de règles. Ce corps de règles ne verra le jour probablement qu'à compter de 1999. Dans l'intervalle, il y a donc lieu d'ouvrir une période transitoire et d'autoriser, parce qu'il n'existe pas d'autre solution, les sociétés françaises qui le souhaitent à utiliser les règles américaines, sous réserve que le CRC les ait validées.
Monsieur le ministre, en adoptant ce texte et en permettant aux groupes qui en ont besoin de recourir aux marchés financiers internationaux sans s'astreindre à tenir des doubles comptes consolidés, selon les normes françaises pour satisfaire les autorités françaises, comme ils le font aujourd'hui de manière tout à fait artificielle, et selon les normes internationales ou internationalement reconnues pour faire face aux besoins d'information du public et des investisseurs étrangers qui sont sollicités, étant entendu que cette redondance comptable a en outre un coût, nous contribuerons à l'essor des entreprises françaises.
Loin d'être défensive, notre démarche est, en l'occurrence, conforme à cet esprit de conquête qui anime le Président de la République lorsqu'il se rend un peu partout dans le monde pour défendre les entreprises françaises, l'exportation française et l'internationalisation des grands acteurs de notre économie. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle qu'aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.

Article 1er