Séance du 16 juin 1998







M. le président. Par amendement n° 93, M. Seillier, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 71, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le second alinéa de l'article 375-7 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le juge peut indiquer que le lieu de placement de l'enfant doit être recherché afin de faciliter, autant que possible, l'exercice du droit de visite par le ou les parents. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Les décisions de placement d'enfants, qui sont parfois prises lorsque les familles, entraînées dans la spirale de l'exclusion, traversent de très graves difficultés sont souvent extrêmement mal vécues par les parents qui sont légitimement attachés au fait de garder un contact avec leurs enfants. La présence de ces derniers est ressentie comme un élément stimulant pour rechercher une réinsertion rapide.
Il paraît utile de préciser, et c'est l'objet de cet amendement, que le juge des enfants, lorsqu'il prend sa décision, peut mentionner qu'il convient de faciliter autant que possible l'exercice du droit de visite.
Avertis par l'instance judiciaire, les services de l'aide sociale à l'enfance pourront veiller, dans toute la mesure possible, c'est-à-dire sur le plan de la réalité physique, à ce que le lieu de placement de l'enfant ne l'éloigne pas trop de ses parents.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Le maintien des liens familiaux, sauf dans le cas où cela se révélerait préjudiciable à l'intérêt de l'enfant, est en effet excessivement important, et d'ailleurs activement recherché par l'ensemble des professionnels de la protection de l'enfance. Je peux même dire que c'est une pratique quasi généralisée chez les juges, mais il est bon d'en affirmer le principe dans la loi. Aussi le Gouvernement émet-il un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 93, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 71.
Par amendement n° 447, MM. Darniche, Durand-Chastel, Habert, Maman proposent d'insérer, après l'article 71, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 3 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En vue d'assurer le respect du droit à une vie familiale des membres des familles accueillies dans les établissements ou services mentionnés aux 1° et 8° ci-dessus, ces établissements ou services doivent rechercher une solution évitant la séparation de ces personnes ou, si une telle solution ne peut être trouvée, établir, de concert avec des personnes accueillies, un projet propre à assurer leur réunion dans les plus brefs délais. »
La parole est à M. Durand-Chastel.
M. Hubert Durand-Chastel. Cet amendement a pour objet d'organiser un accueil groupé des familles dans les établissements sociaux. La mère, le père et les enfants se verront proposer un projet d'accueil groupé visant à prévenir les séparations et l'éclatement qui pouvaient, jusqu'à présent, résulter de simples raisons administratives ou, parfois, de l'absence d'équipements adaptés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Les auteurs de l'amendement souhaitent modifier l'article 3 de la loi du 30 juin 1975, qui vient lui-même d'être modifié par le Sénat à la suite de l'adoption de l'article 71 du présent projet de loi. Il y aurait donc une contradiction à adopter maintenant l'amendement n° 447.
Cela étant dit, sur le fond, cet amendement vise à rétablir la rédaction de l'article 6 de l'ancien projet de loi relatif au renforcement de la cohésion sociale, s'agissant du respect de la vie familiale pour les personnes accueillies en centre d'hébergement et de réadaptation sociale, les CHRS.
A cet égard, la nouvelle rédaction proposée sur cette question par l'article 71 apparaît meilleure. On y indique qu'il faut chercher, pour les familles concernées, « un projet propre à permettre leur réunion dans les plus brefs délais » et, ce qui est nouveau, qu'il faut « assurer le suivi de ce projet jusqu'à ce qu'il aboutisse ». Une telle formulation semble garantir un suivi pour que l'objectif soit atteint dans les meilleurs délais.
L'amendement que M. Barrot avait proposé pour rétablir le texte de son projet de loi a été retiré à l'Assemblée nationale. C'est pourquoi, tout en comprenant bien l'esprit qui a animé les auteurs de l'amendement n° 447, je considère que la législation, qui a d'ailleurs été adoptée par l'actuel article 71, va plus loin et nous paraît plus efficace. Il serait donc intéressant et opportun de retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Même avis, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 447 est-il maintenu ?
M. Jacques Habert. Je n'ai pas compris pourquoi M. le rapporteur considère qu'« il serait intéressant de retirer l'amendement ». En effet, nous rétablissons une rédaction qui existait précédemment, mais qui, vous en êtes convenu, monsieur le rapporteur, est meilleure.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. M. le rapporteur a dit exactement ce que le Gouvernement pense, à savoir que la nouvelle rédaction est meilleure que l'ancienne. C'est la raison pour laquelle j'ai dit : « même avis ». J'aurais dû préciser : « avec les mêmes arguments ».
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. M. Barrot lui-même avait proposé cet amendement à l'Assemblée nationale, mais il l'a retiré devant l'évolution de la législation que nous sommes en train d'établir.
M. Hubert Durand-Chastel. Dans ces conditions, nous retirons cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 447 est retiré.
Par amendement n° 448, MM. Darniche, Durand-Chastel, Habert, Maman proposent d'insérer, après l'article 71, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les caisses d'allocations familiales et les caisses de mutualité sociale agricole peuvent, au titre de leur action sociale, apporter leur soutien aux actions de nature à favoriser la vie familiale, notamment aux actions de conseil et de médiation en matière familiale. »
La parole est à M. Durand-Chastel.
M. Hubert Durand-Chastel. Cet amendement vise à organiser, dans les cas de fugue d'enfant, de conflit familial et de risque de rupture, des actions de médiation familiale pour prévenir la séparation ou le divorce, ou pour s'entendre sur des lieux de visites enfants-parents.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement reprend le contenu de l'article 8 de l'ancien projet de loi relatif au renforcement de la cohésion sociale. Après réflexion, cet amendement n'avait pas été proposé par la commission afin de ne pas porter atteinte à l'autonomie de gestion de la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF, par les partenaires sociaux, conformément au souhait exprimé par les responsables de cette branche, que nous avons reçus et qui souhaitent affecter, en toute liberté, les fonds d'action sociale en fonction des besoins constatés.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je souhaite le retrait de cet amendement, tout en en partageant les propositions et, je dirai même, en allant au-delà.
L'Etat a signé un accord avec la CNAF, qui prévoit effectivement que, pour les années 1997 à 2000, les caisses d'allocations familiales développeront leurs interventions dans le domaine de la médiation familiale. Il s'agit donc aujourd'hui de l'un des éléments des dépenses du fonds d'action sociale de la CNAF, que nous allons d'ailleurs abonder cette année.
Toutefois, je souhaite préciser que, au-delà des CAF, d'autres institutions, comme les centres communaux d'action sociale, les CCAS, interviennent pour mettre en place des lieux de médiation familiale, des lieux de rencontres parents-enfants. Le Gouvernement lui-même a annoncé vendredi dernier, lors de la conférence sur la famille, que, dans les deux années à venir, il affecterait 200 millions de francs à l'accroissement du nombre de lieux de rencontres parents-enfants.
Aussi, je crains que cet amendement, qui donne à penser que seules les caisses d'allocations familiales et les caisses de mutualité agricole mettent en place ce type de lieu, ne soit restrictif par rapport à une pratique que nous souhaitons tous voir développer - sur ce point je vous rejoins.
Je vous demande donc, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 448, est-il maintenu ?
M. Jacques Habert. Nous prenons note, madame la ministre, des précisions que vous venez de donner. J'observe, en particulier, non seulement que vous approuvez nos propositions, mais que vous souhaitez aller au-delà. Vous avez bien voulu énumérer vos intentions à cet égard, et même les chiffrer. Nous vous en remercions. Dans ces conditions, nous retirons l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 448 est retiré.

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