Séance du 24 mars 1999







M. le président. « Art. 9. - I. - L'intitulé du chapitre V du titre Ier de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 précitée est ainsi rédigé : "Des schémas de services collectifs".
« II. - L'article 10 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 10 . - Les schémas de services collectifs sont établis par l'Etat qui s'assure de leur cohérence. Elaborés dans une perspective à vingt ans, ils prennent en compte les projets d'aménagement de l'espace communautaire européen. Leur élaboration donne lieu à une concertation associant les collectivités territoriales, les organismes socioprofessionnels, les associations agréées et les autres organismes qui concourent à l'aménagement régional.
« Après consultation des régions, du Conseil national d'aménagement et de développement du territoire et des conférences régionales de l'aménagement et du développement du territoire, ils sont adoptés par décret avant le 31 décembre 1999. Ils sont ensuite révisés dans les mêmes formes au plus tard un an avant l'échéance des contrats de plan Etat-régions.
« Le schéma de services collectifs de l'information et de la communication est adopté après avis rendu public de la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications.
« Le schéma de services collectifs sanitaires est adopté après avis rendu public de la section sanitaire du Comité national de l'organisation sanitaire et sociale. »
Sur l'article, la parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, M. François-Poncet a abordé nombre de points que je voulais développer devant vous.
Je rappellerai toutefois que, opposer schéma d'infra-structures et schéma de services me paraît correspondre à une vision un peu théorique des choses : comme si l'on pouvait rendre des services sans les infrastructures adéquates pour satisfaire les besoins !
Au-delà, il est évident que se pose un problème de meilleure coordination de nos investissements et, à l'intérieur de chaque secteur, de meilleure coordination entre les différents investissements qu'il s'agisse des secteurs ferroviaire, routier, éducatif ou autres.
Services, équipements, investissements forment un tout. Vouloir les séparer pour l'unique raison de freiner les investissements nouveaux me paraît constituer une insulte à l'esprit.
Je voudrais revenir au principe de la démocratie, puisque le président de la commission spéciale en a parlé avec beaucoup de pertinence.
Le Parlement serait-il vraiment incapable de se prononcer sur ces grands schémas d'infrastructures, qu'il convient, malgré tout, d'élaborer ?
Ce qui m'étonne, madame le ministre, c'est que nous évoquons dans cette enceinte, aujourd'hui, 24 mars 1999, ces schémas de services alors que j'ai sous les yeux une circulaire interministérielle, que vous avez cosignée avec votre collègue, le ministre de l'équipement, des transports et du logement, et qui est adressée aux préfets, circulaire qui concerne justement l'élaboration des schémas de services collectifs de transport. Et cette circulaire date du mois d'août 1998 !
Vous y disiez aux représentants de l'Etat dans nos départements et dans nos régions que le Gouvernement venait d'adopter le projet de loi sur l'aménagement durable du territoire, qui prévoit l'élaboration de schémas sectoriels collectifs approuvés par décret - j'insiste, par décret et non pas par le Parlement. Qui plus est, vous énonciez toutes les modalités de préparation de ces schémas avant même que le Parlement en ait accepté le principe et en ait débattu le contenu.
Il est tout de même assez particulier que, six mois avant le débat qui se déroule aujourd'hui, des instructions aient été données aux préfets, comme si l'opinion du Parlement ne comptait pas !
Au demeurant, vous disiez des choses tout à fait exactes dans certaines parties de votre circulaire. Vous disiez ainsi qu'il fallait s'interroger, d'abord, sur les attentes des usagers. Mais il y a un certain paradoxe dans le fait de dire qu'il faut s'interroger sur les attentes des usagers alors que, parallèlement, on prétend que les usagers n'ont plus besoin d'infrastructures nouvelles !
Un comité stratégique interministériel doit assurer l'élaboration des schémas de services collectifs de transport.
Quand j'ai demandé à la commission spéciale si elle disposait de ce document, il m'a été répondu qu'elle ne l'avait pas. Il est tout de même étonnant que, dans le rapport, il soit indiqué que nous en sommes à la deuxième phase de l'élaboration de ces schémas alors que je serais, moi, curieux de connaître quel est réellement le contenu d'un schéma de services !
En effet, qu'est-ce qu'un schéma de services ? On en parle depuis des heures ; pour ma part, je n'en ai jamais vu. Si quelqu'un en a vu un, qu'il lève la main et qu'il vienne m'expliquer ce que c'est !
Bien entendu, on nous accorde quelques mesures d'ordre général. On nous dit : « On vous permettra de coordonner et de répondre aux besoins. » Mais, depuis trente, voire cinquante ans, avons-nous créé une seule infrastructure sans avoir en tête le besoin auquel elle allait répondre pour la collectivité, sans réfléchir à la satisfaction et à la desserte des populations et des territoires, sans réfléchir à la rentabilité des investissements ? Vous donnez l'impression de découvrir le monde en fixant des finalités !
D'ailleurs, quand on regarde, dans l'instruction que j'ai sous les yeux, quelles sont les priorités de l'Etat, on comprend tout.
A la page 19, ces priorités sont au nombre de deux. Je cite :
« En conséquence, la sélection des propositions pour la mise en oeuvre des différents objectifs tiendra compte des deux priorités suivantes :
« Première priorité : les grands équipements des agglomérations et régions urbaines et, prioritairement, les investissements, les transports collectifs. »
« Seconde priorité : les actions permettant le développement du trafic ferroviaire fret. »
Voilà ! tout est dit ! Je me demande, mes chers collègues, à quoi sert le débat de ce soir ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 41, MM. Larcher, Belot et Revet, au nom de la commission spéciale, proposent de rédiger comme suit l'article 9 :
« I. - L'intitulé du chapitre V du titre Ier de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 précitée est ainsi rédigé : "Des schémas directeurs d'équipements et de services".
« II. - L'article 10 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 10. - Les schémas directeurs d'équipements et de services et le schéma directeur des territoires ruraux et des espaces naturels sont élaborés par le Gouvernement dans une perspective à vingt ans à la suite d'une concertation associant tous les acteurs participant à l'aménagement du territoire et après consultation des régions, du Conseil national d'aménagement du territoire et des conférences régionales de l'aménagement et du développement du territoire. Ils sont cohérents avec les politiques mises en place par l'Union européenne.
« Ils sont adoptés par la loi sous la forme d'un rapport annexé avant le 31 décembre 1999 et sont ensuite mis en oeuvre par décret. Ils sont révisés dans les mêmes formes au plus tard un an avant l'échéance des contrats de plan Etat-régions. »
Cet amendement est assorti de deux sous-amendements.
Le premier, n° 248 rectifié, présenté par Mme Bardou, MM. Jean Boyer, Cléach, Ambroise Dupont, Emin, Emorine, Grillot, Mme Heinis, MM. Nachbar, Pépin, Poirieux et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, tend, dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de l'amendement n° 41 pour l'article 10 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995, après les mots : « des régions, » à insérer les mots : « des départements, ».
Le second, n° 249 rectifié, déposé par M. Raffarin, Mme Bardou, MM. Jean Boyer, Cléach, Ambroise Dupont, Emin, Emorine, Grillot, Mme Heinis, MM. Nachbar, Pépin, Pintat, Poirieux et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, vise, dans la première phrase du second alinéa du texte proposé par le II de l'amendement n° 41 pour l'article 10 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995, à remplacer les mots : « par la loi » par les mots : « par une loi portant schéma national de synthèse ».
Par amendement n° 278, M. Le Cam, Mme Beaudeau, M. Lefebvre et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de remplacer les deux premiers alinéas du texte présenté par le II de l'article 9 pour l'article 10 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995, par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Les schémas de services collectifs sont établis par l'Etat qui en assure la cohérence. Ils sont élaborés dans une perspective à vingt ans à la suite d'une concertation associant les collectivités territoriales, les organismes socioprofessionnels, les associations agréées et les autres organismes qui concourent à l'aménagement régional.
« Les schémas sont soumis au Parlement dans un projet de loi déposé avant le 31 décembre 1999.
« Les projets de décret sont soumis pour avis aux régions, au Conseil national d'aménagement et de développement du territoire, au Conseil économique et social et aux conférences régionales de l'aménagement et de développement du territoire qui peuvent se prononcer dans un délai d'un mois à compter de leur transmission.
« Ils sont ensuite révisés dans les mêmes formes au plus tard un an avant l'échéance des contrats de plans Etat-régions. »
Par amendement n° 149, M. Vasselle propose, dans la seconde phrase du deuxième alinéa du II de ce même article, après les mots : « associant les collectivités territoriales », d'insérer les mots : « et leurs groupements ».
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 117 rectifié est présenté par MM. Arnaud, Jarlier, Herment, Deneux, Souplet,Moinard, Hoeffel, Louis Mercier et Hérisson.
L'amendement n° 171 rectifié est déposé par MM. Cornu, Fournier, Lassourd et Taugourdeau.
Tous deux tendent, au début du deuxième alinéa du texte proposé par le paragraphe II de l'article 9 pour l'article 10 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995, après les mots : « Après consultation des régions, », à insérer les mots : « des départements, ».
Par amendement n° 150, M. Vasselle propose de supprimer le dernier alinéa de l'article 9.
Par amendement n° 201, MM. François, Blanc et Joyandet proposent de compléter in fine l'article 9 par un alinéa rédigé comme suit :
« Le schéma de services collectifs des espaces naturels et ruraux est adopté après avis rendu public du Conseil d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire et du Conseil supérieur de la forêt et des produits forestiers. »
La parole est à M. Larcher, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 41.
M. Gérard Larcher, rapporteur. S'agissant du nombre d'« oeufs pondus » entre février 1995 et avril 1997 (Sourires), je peux indiquer que ce sont huit douzaines puisqu'il y a eu quatre-vingt-seize décrets et circulaires pris en application de la loi du 4 février 1995. C'est donc un travail non négligeable qui a été accompli à partir de cette loi. Dès lors, on ne peut pas dire qu'elle n'a pas été appliquée ou qu'elle était inapplicable.
Pour ce qui est de l'amendement n° 41, nous prévoyons que les schémas directeurs d'équipements et de services et le schéma directeur des territoires ruraux et des espaces naturels font l'objet d'une adoption par le Parlement au travers d'un rapport annexé, susceptible d'être amendé. C'est bien le moins ! L'adoption du rapport annexé constitue un préalable à la mise en oeuvre par décret.
Cet amendement permet donc de réintroduire le contrôle du Parlement, point essentiel pour notre commission, sans qu'il soit nécessaire de conserver le schéma national.
En vérité, madame le ministre, la commission spéciale du Sénat se montre particulièrement gentille en comparaison de la commission de la production et des échanges de l'Assemblée nationale, dont le rapporteur, M. Duron, avait présenté un amendement n° 266 aux termes duquel « les schémas de service collectifs » devaient être « soumis au Parlement dans un projet de loi ».
Après avoir été adopté à l'unanimité par la commission de la production et des échanges de l'Assemblée nationale, cet amendement a eu en séance publique, pour les raisons que l'on sait, un sort tout différent.
Il me semble, par conséquent, que la proposition de la commission spéciale est tout à fait mesurée. Nous estimons néanmoins qu'il est impensable que le Parlement soit dessaisi de la faculté de donner son avis sur l'ensemble de ces schémas directeurs.
Voilà pourquoi cet amendement est, à nos yeux, essentiel.
M. le président. La parole est à Mme Bardou, pour présenter le sous-amendement n° 24 rectifié.
Mme Janine Bardou. L'article 2 de la loi d'orientation de 1995 disposait que le schéma national d'aménagement et de développement du territoire était, préalablement à son adoption, soumis pour avis aux régions et aux départements.
Le projet de loi prévoit que les schémas de services collectifs sont adoptés après consultation des régions, du Conseil national d'aménagement et de développement du territoire ainsi que des conférences régionales d'aménagement et de développement du territoire.
L'amendement proposé par la commission spéciale conserve cette procédure pour l'adoption des schémas directeurs d'équipements et de services, qui remplacent les schémas de services collectifs.
Il convient que les départements soient, eux aussi, consultés. En effet, ils participent également à la politique d'aménagement du territoire grâce aux initiatives qu'ils prennent en faveur de l'aménagement rural et du maintien des services publics dans les zones dites sensibles, en matière de protection de l'environnement, dans la mise en oeuvre des transports interurbains, ou bien encore par les politiques qu'ils ont développées afin de promouvoir l'offre culturelle et touristique auprès des citoyens.
En fonction des compétences qu'ils exercent et des responsabilités que leur ont confiées les lois de décentralisations, les départements seront largement mis à contribution pour la mise en oeuvre de ces nouveaux outils. Il convient donc qu'ils soient consultés pour que les politiques à définir présentent une plus grande cohérence.
M. le président. La parole est à M. Raffarin, pour défendre le sous-amendement n° 249 rectifié.
M. Jean-Pierre Raffarin. Sur ce sujet, départements et régions font cause commune !
M. Charles Revet. Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin. Ce sous-amendement réaffirme en fait l'intérêt du document unique.
Il ne s'agit pas de rétablir ce schéma national, encore qu'on n'ait pas de reproche à lui faire ; il s'agit simplement de disposer d'un document dans lequel l'ensemble des réflexions puissent se trouver rassemblées. Ainsi, nous serons en mesure de « croiser » l'ensemble des informations, s'agissant aussi bien des infrastructures traditionnelles que des infrastructures de nouvelles technologies, et d'apprécier les effets cumulatifs des différents schémas de services.
Bref, il s'agit de nous permettre d'avoir une vision globale, grâce à une synthèse de tous les documents qui sont par ailleurs établis.
M. le président. La parole est à M. Le Cam, pour défendre l'amendement n° 278.
M. Gérard Le Cam. Notre amendement rejoint la préoccupation légitime de la majorité de la commission spéciale qui est de permettre au Parlement de participer à l'établissement des futurs schémas de services collectifs.
Le texte initial n'envisageait l'adoption des schémas définis pour vingt ans que par la voie réglementaire, c'est-à-dire en dehors de tout contrôle parlementaire.
Une telle perspective était inacceptable et je me félicite que le Gouvernement ait finalement accepté de revoir sa copie.
Cependant, dans le texte adopté par l'Assemblée nationale l'examen par le Parlement d'un projet de loi n'est envisagé que vers 2004, c'est-à-dire deux ans avant l'échéance des prochains contrats de plan.
Pourquoi, madame la ministre, ne pas prévoir de soumettre au Parlement un projet de loi sur les objectifs des schémas de services dès 1999, sachant que les contrats de plan pour 2000-2006 ne sont pas encore conclus et que les schémas sont actuellement en cours d'arbitrage ?
Il est difficilement imaginable que le Parlement, à l'occasion de l'examen du projet de loi d'aménagement et de développement durable du territoire, accepte de s'exclure, même provisoirement, de la participation au débat autour des schémas de services.
C'est pourquoi nous souhaitons que les positions des uns et des autres se rapprochent pour trouver une solution équilibrée, permettant aux parlementaires de dire leur mot sans que soit pour autant reporté aux « calendes grecques » la mise en oeuvre des schémas de services collectifs.
Nous proposons, dans un souci de transparence, de clarifier les différentes étapes de l'élaboration des huit schémas de services collectifs.
Première phase : l'Etat organise la concertation la plus large des acteurs de l'aménagement du territoire, c'est-à-dire les élus locaux, les représentants de la vie sociale, économique et associative, les représentants des établissements publics, etc.
Deuxième phase : un projet de loi est soumis au Parlement sur la base des propositions du Gouvernement à l'issue de la phase de consultation ; la prochaine génération de contrats de plan Etat-régions devant débuter en l'an 2000, nous proposons que ce texte de loi soit déposé et discuté avant la fin de l'année 1999.
Troisième phase, enfin : les décrets d'application sont soumis, avant publication définitive, à l'avis des organes compétents en matière d'aménagement du territoire, à savoir le CNADT, le CES et les CRADT.
Les schémas devant définir et structurer notre politique en matière d'aménagement du territoire pour vingt ans, il est essentiel que l'ensemble des institutions consultatives et décisionnelles soient sollicitées pour réfléchir sur les grands axes stratégiques qui détermineront notre paysage territorial en 2020.
Notre amendement a le mérite de la clarté et il est, me semble-t-il, plus complet que celui de la commission spéciale.
M. le président. L'amendement n° 149 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Souplet, pour défendre l'amendement n° 117 rectifié.
M. Michel Souplet. Dans la mesure où cet amendement est satisfait par le sous-amendement qu'a excellemment défendu Mme Janine Bardou, je ne peux que le retirer.
M. le président. L'amendement n° 117 rectifié est retiré.
La parole est à M. Lassourd, pour défendre l'amendement n° 171 rectifié.
M. Patrick Lassourd. Je retire également cet amendement au profit du sous-amendement n° 248 rectifié, qui répond parfaitement à notre préoccupation.
M. le président. L'amendement n° 171 rectifié est retiré.
L'amendement n° 150 est-il soutenu ?...
L'amendement n° 201 est-il soutenu ?...
Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 248 rectifié et 249 rectifié, ainsi que sur l'amendement n° 278 ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Sur le sous-amendement n° 248 rectifié, nous émettons un avis de sagesse favorable.
Nous sommes favorables au sous-amendement n° 249 rectifié à condition qu'il soit de nouveau rectifié, par la suppression du mot « national », qui ne figurait pas dans la version initiale de l'amendement. Ainsi, il ne serait plus question que de « schéma de synthèse ».
M. le président. Monsieur Raffarin, acceptez-vous de suivre la suggestion de M. le rapporteur ?
M. Jean-Pierre Raffarin. Oui, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc du sous-amendement n° 249 rectifié bis, tendant, dans la première phrase du second alinéa du texte présenté par le paragraphe II de l'amendement n° 41 pour l'article 10 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995, à remplacer les mots : « par la loi » par les mots : « par une loi portant schéma de synthèse ».
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 278, qui est en partie satisfait par l'amendement n° 41.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements et sous-amendements en discussion ?
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. S'agissant d'abord du schéma national, monsieur François-Poncet, ce n'est pas un hasard si la DATAR - car c'est bien d'elle qu'il s'agit - a éprouvé autant de difficultés à l'élaborer à partir du matériel extraordinairement riche, et sans doute trop abondant, qui a été collecté au cours du débat national et des données qui avaient été mises en forme par les commissions de travail.
Convenez avec moi que le texte était ambitieux. Un premier projet de schéma national devait être présenté au Parlement dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi. Par ailleurs, les orientations du schéma national - j'ai eu l'occasion tout à l'heure de dire quelle était l'interprétation du ministre de l'intérieur de l'époque - pouvaient être précisées par des schémas sectoriels établis par décret.
Il n'a jamais - je dis bien : jamais - été question de faire discuter et voter par le Parlement des schémas sectoriels. D'ailleurs, vous-même aujourd'hui êtes assez prudent puisque vous proposez l'adoption d'un rapport annexé avant le 31 décembre 1999 et la mise en oeuvre par décret du contenu des schémas.
En effet, il n'est jamais arrivé, dans le passé, que l'on demande aux parlementaires de procéder à la localisation sur des cartes des centrales nucléaires, des universités, des laboratoires de recherche, des théâtres, des voies ferrées ou des routes !
Le Gouvernement conduit la politique de la nation ; le Parlement vote les lois et contrôle le Gouvernement. Il relève donc, me semble-t-il, de la responsabilité du Gouvernement d'élaborer les schémas dans le respect des grandes orientations et des grands choix stratégiques qui sont faits par le Parlement, auquel il revient d'en vérifier le respect et l'application.
Selon moi, les deux dispositifs qui ont été retenus par l'Assemblée nationale permettent de répondre au mieux à vos préoccupations.
Le premier dispositif, c'est le vote par le Parlement, au plus tard deux ans avant l'échéance des contrats de plan, d'« un projet de loi relatif aux orientations stratégiques de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire national et définissant les principes de territorialisation des politiques publiques qui y concourent », ce projet de loi permettant « un réexamen des choix stratégiques et des conditions de leur mise en oeuvre dans les schémas de services collectifs ».
Cette disposition, qui a été proposée par M. Félix Leyzour, l'un de vos anciens collègues, visait à faire en sorte que la politique d'aménagement du territoire, dessinée dans une perspective de vingt ans, soit régulièrement rééavaluée et réorientée dans des délais permettant de décliner ensuite les projets découlant de cette réorientation dans le cadre des contrats de plan.
Le deuxième dispositif est la mise en place de deux délégations parlementaires permettant d'associer régulièrement le Parlement à la définition de la politique en matière d'aménagement du territoire et lui donnant les moyens de contrôler effectivement l'action menée par le Gouvernement dans ce domaine.
J'en viens aux amendements et sous-amendements.
En ce qui concerne l'amendement n° 41 présenté par la commission, j'ai eu l'occasion de m'exprimer tout à l'heure : le Gouvernement n'est pas favorable au concept de schéma directeur d'équipements et de services ; il ne souhaite pas non plus qu'il soit affirmé que ces schémas sont élaborés par le Gouvernement, alors que la rédaction actuelle prévoit plus largement l'Etat.
La commission spéciale a souhaité inscrire, à l'article 2, le fait que le Parlement est associé à l'élaboration des schémas, ce qui ne correspond pas, me semble-t-il, à la définition des rôles respectifs du Gouvernement et du Parlement. On est bien ici dans le respect total des prérogatives du Parlement, à savoir la définition de grands choix stratégiques.
Le Gouvernement ne partage pas votre sentiment selon lequel le dispositif des schémas de services conduirait à l'éviction de fait du Parlement. Il est convaincu que le système prévu permet, notamment par l'approche intermodale en matière de schéma de transport, d'assurer une plus grande cohérence, en ce qui concerne les routes, le secteur ferroviaire, les voies fluviales, les ports et les aéroports, ce que les schémas sectoriels ne permettaient pas.
Je pourrais détailler encore longuement les modalités de concertation qui président à l'élaboration de ces schémas. Mais je vous rassure : si le Gouvernement a choisi d'anticiper quelque peu vos décisions pour commencer sa propre réflexion, bien évidemment aucun projet de schéma de services collectifs n'a été, pour l'heure, élaboré. Il s'agit tout au plus d'une réflexion interne des services de l'Etat, d'une part, et de la consultation des acteurs locaux, d'autre part. D'ailleurs, nous n'éprouvons pas de difficulté en la matière dans la mesure où les acteurs régionaux du développement sont conduits à réfléchir au schéma régional, ce qui permet aux régions d'entrer dans une phase de confrontation des points de vue et des projets avec l'Etat dans la perspective de la conclusion des contrats de plan.
S'agissant du sous-amendement n° 248 rectifié, présenté par Mme Bardou, nous avons souhaité nous en tenir strictement aux compétences des différentes collectivités arrêtées par les lois de décentralisation et aux structures mises en place par la loi du 4 février 1995, structures dont il m'arrive de penser qu'elles sont nombreuses et que leur mission n'est pas simple à définir.
Ceux d'entre vous qui ont participé aux réunions du Conseil national d'aménagement et de développement du territoire ou qui ont assisté aux réunions des conférences régionales d'aménagement et de développement du territoire comprennent l'intérêt de ces structures, au sein desquelles des élus, des acteurs du développement local, aux expériences extrêmement variées, peuvent confronter leurs points de vue et enrichir la discussion.
Dans le même temps, on constate que la tâche de ce conseil et de ces conférences n'est pas encore complètement consolidée et que l'on est en train de débroussailler un champ assez inconnu.
Faire travailler ensemble - vous avez pu le constater, monsieur Raffarin - des élus qui ont des appréciations extrêmement hétérogènes des problèmes pour recueillir leur avis et leurs suggestions sur des questions aussi complexes que celles de l'aménagement du territoire n'est pas simple.
Si nous avons retenu la consultation des régions - cela fait partie de leurs compétences - du CNADT et des conférences régionales - c'est un acquis de la loi Pasqua - il n'en va pas de même pour les départements, qui n'ont pas de compétences en ce qui concerne l'ensemble du territoire régional, bien qu'ils soient associés à l'élaboration des schémas dans le cadre de la conférence régionale d'aménagement et de développement du territoire, où siègent des représentants des départements. Bien entendu, le Conseil national d'aménagement du territoire comprend également des représentants des départements, mais ceux-ci sont porteurs des préoccupations non pas de leur territoire, mais des départements en général.
Par conséquent, j'émets un avis dévaforable sur le sous-amendement n° 248 rectifié.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 249, le Gouvernement a d'ores et déjà précisé en quoi le dispositif des schémas de services collectifs ne nécessitait pas d'être complété par un projet de loi. En revanche, j'ai annoncé à l'Assemblée nationale que nous entendions faire en sorte que la lisibilité de la cohérence des schémas de services collectifs soit assurée par un chapeau, ce qui permettrait de rappeler les grandes priorités, les grands choix.
Ce texte a été appelé, de façon provisoire, « France 2020 ». Pour l'instant, il s'agit d'une hypothèse d'école. Cela correspond peut-être à ce que vous attendiez, monsieur le sénateur, à savoir que le texte non pas fasse la « somme » des schémas de services, mais qu'il réalise la « synthèse » des grandes orientations et des grandes priorités.
Le Gouvernement est donc défavorable à ce schéma national de synthèse, dont je ne perçois pas très bien l'utilité. S'agit-il d'un résumé, d'un document général sur des principes ? Ne risque-t-il pas d'être plus vague que le texte dont nous débattons aujourd'hui ?
De deux choses l'une : ou bien le Parlement vote les schémas de services collectifs ou il ne les vote pas ! S'il les vote, nous aurons, me semble-t-il, de grandes difficultés à travailler.
Permettez-moi une nouvelle fois, sans aucune provocation, de citer très sereinement M. François-Poncet, dont l'expérience est décidément précieuse : « L'aménagement du territoire, disait-il en 1994, est le sujet qui suscite à la fois le plus d'envolés lyriques et le plus de sourde hostilité. C'est un secteur de la politique nationale qui rassemble le consensus de façade le plus large et qui provoque, dès qu'on en vient aux actes, les oppositions les plus tenaces. Tout le monde est pour en principe et chacun est contre en particulier. »
Pensez-vous que nous pourrons, ici, nous mettre d'accord autrement que par l'addition des desiderata de chacun sur des schémas de services collectifs ? Je n'ai pas votre longue expérience, monsieur le président, mais j'en doute fort.
M. Jean François-Poncet, président de la commission. Vous progressez très vite ! (Sourires.)
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. N'est-ce pas ! (Nouveaux sourires.)
Je réaffirme donc qu'il s'agit d'un débat d'orientation. Je suis toujours disponible pour un débat devant le Parlement. Je serai également disponible pour « plancher » devant les délégations qui permettront d'assurer un contrôle effectif du respect des grandes orientations que vous adoptez aujourd'hui.
Je ne vois donc pas bien quel pourrait être l'intérêt d'alourdir encore davantage le dispositif proposé.
En ce qui concerne l'amendement n° 278, pour tous les motifs que j'ai exposés tout à l'heure, j'émets un avis défavorable, d'autant que les préoccupations de M. Le Cam me paraissent excellemment prises en considération par le paragraphe III de l'article 2 et par la mise en place des délégations parlementaires.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Larcher, rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Pour ma part, je n'ai pas été ému par le plaidoyer de Mme le ministre tendant à écarter le Parlement de ce débat sur l'aménagement du territoire.
J'ai cru, un moment, que Mme le ministre s'était convertie et qu'elle portait sur la Constitution de la Ve République un regard qui allait au-delà des conceptions que l'on peut en avoir.
Dans les mesures que nous proposons, le dialogue entre les pouvoirs existe : ainsi, le Gouvernement élabore les projets de loi, le Parlement les adopte ; puis le Gouvernement les met en oeuvre par décrets. Précisément, l'article 2 de la loi du 4 février 1995 avait consacré un grand progrès en donnant au Parlement les moyens de discuter et d'adopter le projet élaboré par le Gouvernement, qui serait ensuite mis en oeuvre par décrets.
Voilà quelques semaines, nos collègues de l'Assemblée nationale, par le biais d'un amendement adopté à l'unanimité, ont souhaité que cet acquis de la loi Pasqua-Hoeffel soit préservé au travers des schémas de services collectifs.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Il n'a pas été voté !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Les députés ne l'ont pas voté dans le cadre d'une procédure transactionnelle !
En réintroduisant cet acquis, le Sénat fera oeuvre utile, car le Parlement me semble être le lieu où ce débat sur l'aménagement et le développement du territoire doit prendre une place particulière.
N'oublions pas que, chez nos voisins allemands, le Bundesrat a, sur ces sujets, un pouvoir égal à celui du Bundestag et que, en termes d'aménagement et de développement du territoire, ceux qui représentent le territoire ont une responsabilité particulière.
Nous pouvons au moins revendiquer le rapport annexé : ce n'est pas, me semble-t-il, une prise de pouvoir qui dépasse, dirai-je, la « vision » que l'on peut avoir sur les rapports entre les pouvoirs dans la Ve République ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 248 rectifié, repoussé par le Gouvernement, et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 249 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 41, modifié.

(L'amendement est adopté.)
M. Jacques Bellanger. Monsieur le président, j'avais demandé la parole pour explication de vote.
M. le président. En conséquence, l'article 9 est ainsi rédigé et l'amendement n° 278 n'a plus d'objet.
Monsieur Bellanger, je suis désolé, mais le vote était déjà commencé. J'ai bien demandé, avant chaque mise aux voix, si quelqu'un voulait s'exprimer.
Je peux simplement vous donner acte que le groupe socialiste a voté contre.
Vous parlerez sur l'article 3...

Article 3