Séance du 11 mai 1999







M. le président. « Art. 1er - L'article 41-1 du code de procédure pénale devient l'article 41-4 et il est inséré, après l'article 41, trois articles 41-1 à 41-3 ainsi rédigés :
« Art. 41-1. - S'il lui apparaît qu'une telle mesure est susceptible d'assurer la réparation du dommage causé à la victime, de mettre fin au trouble résultant de l'infraction ou de contribuer au reclassement de l'auteur des faits, le procureur de la République peut, préalablement à sa décision sur l'action publique, directement ou par délégation :
« 1° Procéder au rappel auprès de l'auteur des faits des obligations résultant de la loi ;
« 2° Orienter l'auteur des faits vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle ;
« 3° Demander à l'auteur des faits de régulariser sa situation au regard de la loi ou des règlements ;
« 4° Demander à l'auteur des faits de réparer le dommage résultant de ceux-ci ;
« 5° Faire procéder, avec l'accord des parties, à une mission de médiation entre l'auteur des faits et la victime.
« La procédure prévue au présent article suspend la prescription de l'action publique.
« Art. 41-2. - Le procureur de la République, tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement, peut proposer, directement ou par l'intermédiaire d'une personne habilitée, une composition pénale à une personne majeure qui reconnaît avoir commis un ou plusieurs délits prévus par les articles 222-11, 222-13 (1° à 10°), 222-16, 222-17, 222-18 (premier alinéa), 227-3 à 227-7, 227-9 à 227-11, 311-3, 313-5, 314-5, 314-6, 322-1, 322-2, 322-12 à 322-14, 433-5 à 433-7 et 521-1 du code pénal, par les articles 28 et 32 (2°) du décret-loi du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions et par l'article L. 628 du code de la santé publique, qui consiste en une ou plusieurs des mesures suivantes :
« 1° Verser une amende de composition au Trésor public. Le montant de cette amende de composition, qui ne peut excéder ni 10 000 F ni la moitié du maximum de l'amende encourue, est fixé en fonction de la gravité des faits ainsi que des ressources et des charges de la personne. Son versement peut être échelonné, selon un échéancier fixé par le Procureur de la République, à l'intérieur d'une période qui ne peut être supérieure à un an ;
« 2° Se dessaisir au profit de l'Etat de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou qui en est le produit ;
« 3° Remettre au greffe du tribunal de grande instance son permis de conduire ou son permis de chasser, pour une période maximale de quatre mois ;
« 4° Effectuer au profit de la collectivité un travail non rémunéré pour une durée maximale de soixante heures, dans un délai qui ne peut être supérieur à six mois.
« Lorsque la victime est identifiée, et sauf si l'auteur des faits justifie de la réparation du préjudice commis, le procureur de la République doit également proposer à ce dernier de réparer les dommages causés par l'infraction dans un délai qui ne peut être supérieur à six mois. Il informe la victime de cette proposition.
« La proposition de composition pénale émanant du procureur de la République peut être portée à la connaissance de l'auteur des faits par l'intermédiaire d'un officier de police judiciaire. Elle fait alors l'objet d'une décision écrite et signée de ce magistrat, qui précise la nature et le quantum des mesures proposées et qui est jointe à la procédure. A peine de nullité, cette proposition ne peut intervenir pendant la durée de la garde à vue de l'auteur des faits.
« La composition pénale peut être proposée dans une maison de justice et du droit.
« La personne à qui est proposée une composition pénale est informée qu'elle peut se faire assister par un avocat avant de donner son accord à la proposition du procureur de la République. Ledit accord est recueilli par procès-verbal. Une copie de ce procès-verbal lui est transmise.
« Lorsque l'auteur des faits donne son accord aux mesures proposées, le procureur de la République saisit par requête le président du tribunal aux fins de validation de la composition. Le procureur de la République informe de cette saisine l'auteur des faits et, le cas échéant, la victime. Le président du tribunal peut procéder à l'audition de l'auteur des faits et de la victime, assistés, le cas échéant, de leur avocat. Les auditions sont de droit si les intéressés le demandent. Si ce magistrat rend une ordonnance validant la composition, les mesures décidées sont mises à exécution. Dans le cas contraire, la proposition devient caduque. La décision du président du tribunal, qui est notifiée à l'auteur des faits et, le cas échéant, à la victime, n'est pas susceptible de recours.
« Si la personne n'accepte pas la composition ou si, après avoir donné son accord, elle n'exécute pas intégralement les mesures décidées ou, si la demande de validation prévue par l'alinéa précédent est rejetée, le procureur de la République apprécie la suite à donner à la procédure. En cas de poursuites et de condamnation, il est tenu compte, le cas échéant, du travail déjà accompli et des sommes déjà versées par la personne.
« La prescription de l'action publique est suspendue entre la date à laquelle le procureur de la République propose une composition pénale et la date d'expiration des délais impartis pour exécuter la composition pénale.
« L'exécution de la composition pénale éteint l'action publique. Elle ne fait cependant pas échec au droit de la partie civile de délivrer citation directe devant le tribunal correctionnel dans les conditions prévues au présent code. Le tribunal ne statue alors que sur les seuls intérêts civils, au vu du dossier de la procédure qui est versé au débat.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
« Art. 41-3. - La procédure de composition pénale est également applicable en cas de violences ou de dégradations contraventionnelles.
« Le montant maximum de l'amende de composition ne peut alors excéder 5 000 francs ni la moitié du maximum de l'amende encourue, la durée de la remise du permis de conduire ou du permis de chasser ne peut dépasser deux mois et la durée du travail non rémunéré ne peut être supérieure à trente heures, dans un délai maximum de trois mois.
« La requête en validation est portée devant le juge d'instance. »
Par amendement n° 4, M. Fauchon, au nom de la commission, propose, dans le premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 41-2 du code de procédure pénale, après les mots : « armes et munitions », d'insérer les mots : « , par l'article L. 1er du code la route ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Cet amendement, auquel j'ai fait allusion dans mon exposé liminaire, tend à étendre les possibilités de composition pénale à la conduite en état d'ivresse. Cela peut constituer une amélioration considérable dans la mesure où, actuellement, dans certaines juridictions correctionnelles, la moitié des audiences est occupée par les infractions pour conduites en état d'ivresse.
Je ne crois pas, par ailleurs, que cela puisse engendrer une quelconque banalisation.
Lorsque je mets en parallèle la comparution des personnes ayant conduit en état d'ivresse, devant le juge qui distribue les peines en appliquant son barème, et le passage des mêmes personnes devant un procureur qui les reçoit dans son bureau et a un court dialogue avec elles, j'ai tendance à penser que la seconde formule permet une meilleure prise de conscience de sa propre responsabilité que la première formule, qu'en tout cas on ne peut pas dire a priori que l'une des solutions soit meilleure ou moins bonne que l'autre.
Je me permets donc de vous dire, madame le garde des sceaux, que vous devriez renoncer à cette idée selon laquelle la solennité de l'audience est de nature à faire plus réfléchir que le passage dans le bureau du procureur. Je rappelle, encore une fois, qu'il est en votre pouvoir d'orienter le choix des procureurs par une circulaire. Naturellement, dans les cas caractérisés, pour un taux d'alcool très important, ils ne recourront pas à la composition pénale.
Le système ne me semble pas présenter d'inconvénient. En tout cas, je le répète, il comporterait un gros avantage si l'on considère l'effet de décongestion des audiences pénales qu'il pourrait engendrer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je ne vais pas reprendre les arguments que j'ai développés tout à l'heure. C'est vrai, je ne souhaite ni banaliser ce type d'infraction, qui me paraît particulièrement grave, ni affaiblir la répression. Toutefois, comme vous m'avez fait remarquer, monsieur le rapporteur, que je m'en étais remise à la sagesse de l'Assemblée nationale, je m'en remets aujourd'hui à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. Guy Fischer. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
Mme Dinah Derycke. Le groupe socialiste également.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 5, M. Fauchon, au nom de la commission, propose, dans la deuxième phrase du deuxième alinéa (1°) du texte présenté par l'article 41-2 du code de procédure pénale, de remplacer la somme : « 10 000 francs » par la somme : « 25 000 francs ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Je crois que nous sommes d'accord sur ce point comme Mme le garde des sceaux a bien voulu l'indiquer tout à l'heure. Elever à 25 000 francs le montant de l'amende permettra au procureur de tenir compte des situations respectives des uns et des autres.
Je répondrai par ailleurs à M. Bret qu'il ne s'agit pas du tout d'acheter l'impunité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je m'en remets, là encore, à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?... Je mets aux voix l'amendement n° 5, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2