Séance du 17 juin 1999
M. le président.
« Art. 10 B. - Le premier alinéa de l'article L. 611-1 du code de
l'organisation judiciaire est supprimé. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 24 est présenté par M. Jolibois, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 209 est déposé par M. Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe
socialiste et apparentés.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 24.
M. Charles Jolibois,
rapporteur. L'Assemblée nationale a décidé de supprimer l'article L.
611-1 du code de l'organisation judiciaire prévoyant la présence, dans chaque
tribunal de grande instance, d'au moins un juge d'instruction. S'il s'agit
peut-être d'une piste intéressante pour la rationalisation de la justice
pénale, une réflexion très approfondie doit néanmoins être engagée sur ce
sujet.
En l'état, cette disposition est inapplicable, et d'autres modifications sont
nécessaires. Ainsi, lorsqu'une affaire se déroulera dans le ressort d'un
tribunal ne comprenant pas de juge d'instruction, quel sera le procureur
compétent pour ouvrir l'information ?
A ce stade, la commission des lois vous propose donc, mes chers collègues, de
supprimer l'article 10
bis afin qu'il y ait et qu'il continue d'y avoir,
comme actuellement, un juge d'instruction dans chaque tribunal de grande
instance.
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour défendre l'amendement n° 209,
identique au précédent.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Ces deux amendements sont encore plus identiques que je le pensais ! En effet,
les amendements de la commission des lois n'étant pas motivés - c'est non pas
un reproche, mais une constatation - les sénateurs qui ne sont pas membres de
cette commission pouvaient s'interroger sur la motivation de l'amendement n° 24
!
L'amendement n° 209 est quant à lui motivé : il vise à faire disparaître
l'article 10
bis, qui a supprimé l'article L. 611-1 du code de
l'organisation judiciaire et donc l'obligation pour chaque tribunal de grande
instance de comprendre au moins un juge d'instruction.
Tout d'abord, on ne voit pas très bien le rapport avec la protection de la
présomption d'innocence.
Par ailleurs, tant que la carte judiciaire n'a pas été révisée, il n'y a
aucune raison qu'il n'y ait pas au moins un juge d'instruction par tribunal de
grande instance. C'est ce qu'on appelle la « justice de proximité ». Obliger
les victimes, que l'on veut protéger, à parcourir beaucoup plus de kilomètres
pour aller déposer devant le juge d'instruction me paraît contradictoire.
De surcroît, figure en annexe au rapport de la commission la liste des
tribunaux de grande instance comprenant moins de sept magistrats et devant être
renforcés pour pouvoir appliquer le dispositif du juge de la détention
provisoire.
La disparition, dans ces petits tribunaux, du juge d'instruction, vous
obligerait - c'est évident - à y nommer plus de magistrats encore que vous ne
l'avez prévu !
Ce sont toutes les raisons pour lesquelles, comme la commission des lois, nous
demandons la suppression de cet article 10 B.
M. le président.
Monsieur Dreyfus-Schmidt, je ne veux pas polémiquer, mais les justifications
de l'amendement n° 24 de la commission figurent dans le rapport de M.
Jolibois.
M. Hubert Haenel.
Mais oui !
M. le président.
Aucun amendement de la commission n'est particulièrement motivé.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je ne doute pas, monsieur le président, que vous ayez lu entièrement le
rapport de la commission. Je vous en félicite. J'avoue que je n'ai pas eu le
temps de tout lire.
M. Louis de Broissia.
Il est remarquable !
M. le président.
Mon cher collègue, vous reprochez à M. le rapporteur de n'avoir pas motivé son
amendement. Mais tous les amendements de la commission sont motivés dans le
rapport de cette dernière ! Et les choses se passent d'ailleurs ainsi pour tous
les amendements déposés par les différentes commissions.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Dont acte !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 24 et 209
?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux. Je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 24 et 209, pour lesquels le
Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 10 B est supprimé.
Article 10 C