Séance du 17 juin 1999
M. le président.
« Art. 10
bis. - I. - Le 11° de l'article 138 du même code est ainsi
rédigé :
« 11° Fournir un cautionnement dont le montant et les délais de mise en place
en une ou plusieurs fois sont fixés par le juge d'instruction, en proportion
notamment des ressources et des charges de la personne mise en examen ainsi que
de son patrimoine.
« La personne mise en examen pourra s'acquitter du cautionnement dans les
conditions fixées par l'article L. 277 du livre des procédures fiscales ; ».
« II. - Au début de l'article 142-2 du même code, les mots : "première partie"
sont remplacés par le mot : "totalité". »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 30, M. Jolibois, au nom de la commission des lois, propose
de supprimer cet article.
Par amendement n° 120, M. Charasse propose, dans le deuxième alinéa du I de ce
même article, de remplacer les mots : « par le juge d'instruction » par les
mots : « par le président du tribunal de grande instance saisi à cette fin par
le juge d'instruction ».
Par amendement n° 121 rectifié, M. Charasse propose d'insérer, après le I de
l'article 10
bis, un paragraphe ainsi rédigé :
« ... . Le deuxième alinéa de l'article 141-2 du même code est complété par
deux phrases ainsi rédigées :
« Toutefois, les dispositions de l'alinéa ci-dessus ne s'appliquent pas à une
personne qui n'exécute pas les obligations qui lui ont été imposées au titre du
11° de l'article 138 lorsque celle-ci fait la démonstration que ses ressources
et son patrimoine ne lui permettent pas de disposer des fonds nécessaires. La
personne concernée peut se faire assister par tout expert de son choix y
compris les fonctionnaires des administrations fiscales et financières. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 30.
M. Charles Jolibois,
rapporteur. L'Assemblée nationale a introduit dans le projet de loi un
article qui modifie les dispositions relatives au cautionnement qui peut être
exigé lorsqu'une personne est mise sous contrôle judiciaire.
Actuellement, le cautionnement ne peut consister que dans le versement d'une
somme d'argent. L'article 10
bis tend à ce qu'une personne puisse
utiliser pour le cautionnement des garanties telles qu'une hypothèque.
Cependant, la rédaction proposée peut poser des difficultés.
Par ailleurs, l'article adopté par l'Assemblée nationale prévoit également que
la personne pourrait récupérer la totalité du cautionnement lorsqu'elle se
soumettrait à l'exécution du jugement. Or, une partie de celui-ci est en
principe destinée au paiement de la réparation des dommages causés par
l'infraction. Il ne paraît pas souhaitable de modifier cette situation.
Compte tenu des nombreuses incertitudes qui entourent cette question, la
commission considère qu'il est préférable, à ce stade, de supprimer cet
article. A cet égard, j'ai cru comprendre, cela m'a paru très pertinent, que si
l'on remplaçait le cautionnement en argent par une hypothèque, se poserait le
problème de l'évaluation par les Domaines du bien immobilier ; de surcroît,
cela met du temps.
M. Jean-Jacques Hyest.
Cela met en effet du temps !
M. Charles Jolibois,
rapporteur. La visibilité n'étant pas totale, nous proposons donc de
supprimer cet article.
M. le président.
La parole est à M. Charasse pour défendre les amendements n°s 120 et 121
rectifié.
M. Michel Charasse.
Ces deux amendements concernent le cautionnement.
Compte tenu des incidents nombreux qui surviennent en ce qui concerne la
fixation du montant du cautionnement et les capacités contributives des
personnes soumises à cautionnement, il me paraît utile que, dans ce cas, ce
soit une deuxième personne qui fixe le montant de la caution, à savoir le
président du tribunal de grande instance. C'est la proposition que je fais par
mon amendement n° 120.
J'en viens à l'amendement n° 121 rectifié. Me souvenant en particulier,
monsieur le président, d'une affaire que nous avions eue à examiner autrefois
au bureau du Sénat et concernant un collègue qui passait de la détention
préventive au contrôle judiciaire avec un cautionnement impossible, j'ai pensé
que l'on pourrait donner la possibilité à l'intéressé de faire la démonstration
que ses ressources et son patrimoine ne lui permettent pas de disposer des
fonds nécessaires, avec l'assistance éventuelle d'experts, y compris les
fonctionnaires des administrations fiscales. Tel est l'objet de ces
amendements.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 120 et 121 rectifié
?
M. Charles Jolibois,
rapporteur. Ces amendements sont évidemment contraires à la position de
la commission qui a préconisé la suppression de l'article 10
bis.
En écoutant M. Charasse, je me posais une question. Si le cautionnement est
décidé par le juge d'instruction, celui-ci peut constamment voir l'avocat de la
partie. On ne voit pas pour quelle raison l'avocat ne pourrait pas intervenir
auprès du juge d'instruction et faire la démonstration à laquelle vous pensez.
Le dialogue pourrait s'instaurer.
Dans la pratique, ces amendements ne constituent pas véritablement un ajout
très important.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 30, 120 et 121
rectifié ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux. Je suis favorable à l'amendement n° 30, qui vise à
supprimer l'article 10
bis. Je dois observer, pourtant, que la question
du cautionnement et des sûretés dans le cadre d'un contrôle judiciaire est
importante. J'espère qu'elle pourra être revue lors de la navette.
En revanche, j'émets un avis défavorable sur les amendements n°s 120 et 121
rectifié.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 30.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
A l'évidence, si l'amendement n° 30 est adopté, les deux amendements suivants
n'auront plus d'objet. Je veux donc, avant même qu'ils ne soient soumis au
couperet, apporter une précision à leur sujet.
Je souhaite simplement que, lors de la navette ou de la commission mixte
paritaire, cette question fasse l'objet d'une attention particulière. En effet,
nous nous sommes trouvés, je le redis, au bureau du Sénat, en présence d'un
juge d'instruction qui devrait remettre en liberté un prévenu qui avait
effectué la durée maximale de la détention préventive et à qui il a infligé un
cautionnement d'un montant tel que celui-ci ne pouvait pas y faire face, et ce
afin de pouvoir dire : « Les prescriptions du contrôle judiciaire ne sont pas
respectées, je vous remets "au ballon" ». Par conséquent, je souhaiterais que,
à l'occasion de la navette, on puisse regarder les choses de près.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 10
bis est supprimé et les amendements n°s
120 et 121 rectifié n'ont plus d'objet.
Articles additionnels après l'article 10 bis