Séance du 29 novembre 1999







M. le président. Par amendement n° I-159, MM. Joly, de Montesquiou, Othily et Bimbenet proposent d'insérer, après l'article 2 ter, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le deuxième alinéa du 2° de l'article 199 septies du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Primes afférentes à des contrats d'assurance visant à constituer un complément de retraite par capitalisation sous forme de capital ou de rente viagère. »
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-159 rectifié.
La parole est à M. le rapporteur général, pour le défendre.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je reprends cet amendement qui est tout à fait opportun car il vise à élargir la réduction d'impôt prévue à l'article 199 septies du code général des impôts en matière de primes afférentes à des contrats d'assurance destinés à constituer un complément de retraite par capitalisation sous forme de capital ou de rente viagère.
Il répond aux préoccupations que nous avons exprimées ici voilà quelques semaines en matière de fonds d'épargne retraite.
Je crois que nous avons là un dispositif raisonnable, même si ses modalités pratiques mériteraient sans doute d'être affinées.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° I-159 rectifié ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. La réduction d'impôt pour assurance vie a été supprimée par les lois de finances pour 1996 et 1997 pour le cas de figure évoqué. Je suppose qu'à l'époque vous étiez, monsieur le rapporteur général, d'accord avec la suppression de cette disposition que vous proposez de rétablir aujourd'hui !
Chacun sait que la souscription des contrats d'assurance vie d'une durée au moins égale à huit ans bénéficie déjà d'un régime d'imposition très favorable, qui se décompose en trois volets : premièrement, l'exonération de l'impôt sur le revenu des produits capitalisés ; deuxièmement, en cas de sortie sous forme de capital, l'exonération des sommes récupérées ; enfin, troisièmement, en cas de sortie sous forme de rente viagère, seule une fraction de la rente représentative des intérêts, qui est déterminée en fonction de l'âge du crédit-rentier au moment de l'entrée en jouissance de la rente, est soumise à l'impôt.
Ces trois dispositions nous semblent suffisantes.
Je demande le rejet de l'amendement n° I-159 modifié parce qu'il n'est pas nécessaire de prévoir un avantage fiscal supplémentaire au moment de la souscription du contrat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-159 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 2 ter.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° I-107 est présenté par MM. Ostermann, Braun, Cazalet, Chaumont, Oudin et Trégouët.
L'amendement n° I-122 est déposé par MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud, de Rocca Serra, Torre, Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants.
L'amendement n° I-147 est présenté par M. Hamel.
Tous trois tendent à insérer, après l'article 2 ter, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 200 ter du code général des impôts, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories, les dépenses engagées par les contribuables en vue d'améliorer leur formation professionnelle au sens du livre IX du code du travail ouvrent droit à une réduction d'impôt égale à 20 % du montant des sommes versées, retenues dans la limite de 5 000 francs par foyer fiscal. »
« II. - La perte de recettes résultant du I pour le budget de l'Etat est compensée à due concurrence par une taxe additionnelle sur les droits visés aux articles 575 et 575 A du CGI. »
La parole est à M. Ostermann, pour défendre l'amendement n° I-107.
M. Joseph Ostermann. Le présent amendement vise à prévoir une réduction d'impôt pour encourager la formation professionnelle prise en charge par les particuliers.
Des négociations significatives ont eu lieu dans le cadre de la mise en place des 35 heures, en vue notamment de favoriser des projets de formation personnels des salariés, en dehors du temps de travail.
Ces projets de formation ne seront pas systématiquement financés par l'entreprise, en particulier lorsqu'ils répondront à des besoins personnels.
C'est la raison pour laquelle il est proposé de mettre en place une réduction d'impôt qui permettra d'encourager l'effort de formation personnel.
Un sondage réalisé par l'IFOP au mois de septembre dernier vient de confirmer cette aspiration des salariés. Il fait ainsi apparaître que près de quatre salariés sur dix se montrent disposés à participer financièrement à des formations suivies en dehors du temps de travail.
En outre, parmi les mesures d'incitation proposées, 63 % placent la réduction d'impôt en première position, loin devant la création d'un livret d'épargne formation (21 %) ou la création d'un prêt à taux réduit (10 %).
Il convient enfin de souligner que cette réduction d'impôt compléterait le crédit d'impôt formation existant pour les entreprises.
M. le président. La parole est à M. du Luart, pour défendre l'amendement n° I-122.
M. Roland du Luart. Mon amendement va exactement dans le même sens que celui de M. Ostermann. Il est donc inutile que je l'explicite davantage.
M. le président. La parole est à M. Hamel, pour présenter l'amendement n° I-147.
M. Emmanuel Hamel. Cet amendement vise le même objet que les deux amendements précédents.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je me refuse à croire que vous ne serez pas favorable à ces amendements. En effet, les fonctions importantes que vous avez assumées tant dans le secteur du textile que dans celui de l'industrie hôtelière vous ont permis de comprendre que, parallèlement à l'effort accompli par les entreprises pour la formation professionnelle, dont il faut se réjouir et espérer qu'il viendra à s'intensifier, l'évolution du monde fait naître un besoin personnel de formation en dehors de celle qui est proposée par l'entreprise.
Mme Aubry a cité à l'Assemblée nationale ce sondage de l'IFOP évoqué par l'un de nos collègues qui montre que 40 % des salariés souhaitent pouvoir, parallèlement à la formation professionnelle proposée par l'entreprise, entreprendre par eux-mêmes un complément de cette formation professionnelle.
Imaginez que vous travaillez dans une entreprise qui risque d'être absorbée par un groupe étranger. Vous parlez mal l'anglais, ce que vous ne voulez pas avouer à votre employeur. Dans l'hypothèse de l'absorption de votre entreprise par un groupe étranger, vous éprouvez, pour conserver votre emploi, le besoin de suivre une formation dans une langue étrangère, anglaise, allemande ou autre.
Glissez-vous dans la peau d'un homme de quarante ans. Lorsque vous êtes sorti d'une grande école vingt ans auparavant, on ne vivait pas encore à l'ère de l'informatique ; il n'en était pas question. N'osant pas avouer votre insuffisance dans le domaine des nouvelles technologies, vous souhaiteriez recourir à titre personnel à un organisme de formation professionnelle qui vous permettrait de pallier les insuffisances que vous n'avez pas à avouer à l'entreprise.
Il est donc indispensable de compléter la formation professionnelle assurée par l'entreprise par une possibilité de formation professionnelle personnelle, permettant au salarié d'avoir individuellement recours à des organismes qui lui dispenseront une formation.
Il est naturel d'encourager, par une légère incitation fiscale, ce désir qu'éprouvent déjà plus de 40 % des salariés, comme le montrent de récents sondages. En effet, compte tenu des ressources du Trésor et de l'importance des moyens des finances publiques, que représente une incitation à ce mouvement par ce simple avantage fiscal d'une réduction d'impôt de 20 % du total des dépenses de formation assumées par le salarié, dans la limite de 5 000 francs ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis certain que nos amendements correspondent à votre attente.
M. Roland du Luart. Beau plaidoyer !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-107, I-122 et I-147 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission adhère tout à fait au raisonnement exposé en dernier lieu par M. Hamel. Toutefois, faute de disposer d'éléments de chiffrage, elle s'interroge sur les hypothèses qu'ont pu établir les services de l'Etat à ce sujet.
Elle souhaite donc entendre le Gouvernement avant de se prononcer sur ces trois amendements.
M. le président. Quel est, dans ces conditions, l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Comment ne pas être sensible à l'admirable plaidoyer de M. Hamel ! De nombreux salariés vivent concrètement dans leur itinéraire professionnel les exemples qu'il a évoqués. Nous allons naturellement dans le sens qu'il préconise.
La formation, si l'on vous suit, monsieur Hamel, est une priorité nationale. La question se pose donc de savoir comment reprendre, en lui donnant les prolongements qu'elle mérite, la remarquable loi de 1971 inspirée par M. Delors, alors conseiller du Premier ministre de l'époque, M. Chaban-Delmas. Ce texte a rendu d'immenses services à l'économie de notre pays et à notre société.
C'est pourquoi M. le Premier ministre a chargé Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle, de mener une réflexion d'ensemble sur le système de formation professionnelle continue afin de l'adapter aux réalités d'aujourd'hui, compte tenu notamment de l'aménagement et de la réduction du temps de travail, ainsi qu'aux conditions de la compétitivité de l'économie française, car c'est bien, en fin de compte - et peut-être même d'abord - de cela qu'il s'agit.
Après avoir pleinement approuvé les propos de M. Hamel et des auteurs de ces trois amendements, je diverge cependant, monsieur le rapporteur général, sur les solutions que les uns et les autres souhaitent apporter à cet ardent problème, parce que, comme chacun de nous ici, je sais qu'en optant pour le régime des frais réels les salariés peuvent naturellement inclure les frais de formation dans leurs charges.
Pourquoi ajouter une strate de complexité au droit positif fiscal existant, une strate qui serait superfétatoire puisque l'ensemble des frais occasionnés par la formation peuvent être inclus dans les frais réels à la charge du contribuable dans les déclarations fiscales ?
Je demande donc aux auteurs de ces trois amendements de les retirer, car ils sont déjà satisfaits. Quoi qu'il en soit, il était bon que le Sénat manifeste - le Gouvernement y est très réceptif - l'impératif absolu de la formation professionnelle devant l'opinion publique à travers le Journal officiel de nos débats.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez répondu à ma question en n'en parlant point : je vous demandais ce qu'une telle mesure coûterait et, si je vous comprends bien, vous considérez qu'elle ne coûtera rien du tout puisqu'un dispositif est déjà prévu, même s'il faut fournir des justifications.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela ne coûtera donc pas plus cher avec le système envisagé par nos amis, MM. Ostermann, du Luart et Hamel, mais ce sera plus simple. Ce sera un signal, ce sera moins de paperasserie, ce sera mieux pour le contribuable.
Il me semble donc qu'il faut adopter ces amendements...
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le rapporteur général ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je vous en prie !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat, avec l'autorisation de M. le rapporteur général.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Pardonnez-moi, monsieur le rapporteur général : j'aurais dû en effet vous dire que je ne disposais pas des éléments chiffrés dans les dossiers qui sont en ma possession à cette heure au Sénat ; mais je m'engage à vous fournir les éléments de coût, en termes de dépenses fiscales éventuelles, si les amendements étaient adoptés. Je le ferai dès que possible, c'est-à-dire dans les deux jours qui viennent.
M. Emmanuel Hamel. N'oubliez pas les rentrées fiscales induites, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Après avoir entendu les explications du Gouvernement, je confirme l'avis favorable de la commission des finances.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s I-107, I-122 et I-147.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Monsieur le président, j'ai été très heureux d'entendre tout ce qui a été dit par les auteurs de ces amendements, qui ont pris une excellente initiative.
Je constate toutefois que l'on a surtout insisté sur l'aspect économique de la mesure proposée - et je le comprends fort bien - alors qu'il me paraît utile d'insister sur ses aspects humains et sociaux. Si des salariés veulent compléter leur formation, s'adapter en s'impliquant personnellement et en organisant eux-mêmes leur formation, il me paraît nécessaire de les aider.
Cela me rappelle un peu - excusez-moi cette image d'Epinal, monsieur le secrétaire d'Etat, vous qui avez des attaches dans cette région -...
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. A Saint-Dié, pas à Epinal !
M. Jean Chérioux. ... les cours du soir qui étaient organisés sous la IIIe République : combien de ceux qui ont alors réussi dans la vie étaient de simples élèves de l'école publique qui ont complété leur formation eux-mêmes, en prenant sur leur temps de loisir ?
En l'occurrence, nous pouvons faire le parallèle et, indiscutablement, je crois que nous devons voter ces amendements, ne serait-ce que pour marquer notre souci de leur donner un caractère tout à fait exemplaire.
M. Emmanuel Hamel. Vous plaidez comme Philippe Séguin, mon cher collègue !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s I-107, I-122 et I-147, acceptés par la commission et repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 2 ter.

Article 3