Séance du 19 janvier 2000







M. le président. « Art. 2. _ L'article 44 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 44 . _ I. _ Il est créé une société, dénommée France Télévision, chargée de coordonner les politiques de programmes et les actions de développement, de mettre en oeuvre les conditions de constitution d'un pôle industriel permettant d'intégrer les nouvelles techniques de diffusion et de production et de gérer les affaires communes des sociétés suivantes, dont elle détient la totalité du capital :
« 1° La société nationale de programme, dénommée France 2, chargée de concevoir et de programmer des émissions de télévision destinées à être diffusées sur l'ensemble du territoire métropolitain. Cette société propose une programmation généraliste et diversifiée à l'intention du public le plus large et assure une information nationale et internationale ;
« 2° La société nationale de programme, dénommée France 3, chargée de concevoir et de programmer des émissions de télévision à caractère national, régional et local, destinées à être diffusées sur tout ou partie du territoire métropolitain. Cette société propose une programmation généraliste et diversifiée et assure en particulier une information de proximité et rend compte des événements régionaux ;
« 3° La société, dénommée La Cinquième-ARTE, dont les missions sont définies à l'article 45.
« En outre, la société France Télévision peut, dans le respect des attributions des sociétés mentionnées aux 1° , 2° et 3° ci-dessus, créer des filiales pour exercer des activités conformes à son objet social.
« II. _ La société nationale de programme dénommée Réseau France Outre-mer est chargée de concevoir et de programmer des émissions de télévision et de radiodiffusion sonore destinées à être diffusées dans les départements, territoires et collectivités territoriales d'outre-mer ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie. Elle assure la promotion des langues et cultures régionales. Elle assure également la promotion de la langue française. Les émissions des autres sociétés nationales de programme et de la société La Cinquième-ARTE, pour l'exercice de la mission prévue au a de l'article 45, sont mises à sa disposition à titre gratuit. Les programmes qu'elle produit sont mis gratuitement à la disposition de la société France Télévision ainsi que de la société Radio France qui assureront la promotion et le rayonnement des cultures de la France d'outre-mer en métropole.
« Elle peut assurer un service international d'images. Elle conclut des accords pluriannuels de coopération avec les sociétés Radio France et France Télévision, notamment en matière de développement, de production, de programmes et d'information.
« III. _ La société nationale de programme dénommée Radio France est chargée de concevoir et de programmer des émissions de radiodiffusion sonore à caractère national et local, destinées à être diffusées sur tout ou partie du territoire métropolitain. Elle favorise l'expression régionale sur ses antennes décentralisées qui devront être réparties équitablement dans toutes les zones du territoire. Elle valorise le patrimoine et la création artistique, notamment grâce aux formations musicales dont elle assure la gestion et le développement.
« IV. _ La société nationale de programme dénommée Radio France Internationale est chargée de contribuer à la diffusion de la culture française par la conception et la programmation d'émissions de radiodiffusion sonore en français ou en langue étrangère destinées aux auditoires étrangers ainsi qu'aux Français résidant à l'étranger. Cette société assure une mission d'information relative à l'actualité française et internationale.
« V. _ Dans les conditions fixées par voie réglementaire, notamment par leurs cahiers des missions et des charges, les sociétés nationales de programme et la société La Cinquième-ARTE peuvent produire pour elles-mêmes et à titre accessoire des oeuvres et documents audiovisuels et participent à des accords de coproduction.
« Elles ne peuvent investir en parts de coproducteur dans le financement d'une oeuvre cinématographique que par l'intermédiaire d'une filiale, propre à chacune d'elles et ayant cet objet social exclusif. »
Par amendement n° 203, Mme Pourtaud, MM. Dreyfus-Schmidt, Collomb, Lagauche, Weber et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le premier alinéa du I du texte présenté par cet article pour l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, de remplacer les mots : « , de mettre en oeuvre les conditions de constitution d'un pôle industriel permettant d'intégrer » par les mots : « et de prendre en compte ».
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Cet amendement vise à préciser la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale. Cette dernière, en première lecture, a en effet confié à France Télévision une mission de contribution à la constitution d'un pôle industriel de développement des nouvelles technologies, de diffusion et de production.
Nous comprenons bien l'esprit qui sous-tend de telles dispositions, et nous ne pouvons qu'approuver le souhait des députés de voir France Télévision jouer un rôle pionnier en matière de développement des nouvelles technologies, notamment en faveur du développement du numérique.
Néanmoins, la rédaction proposée par l'Assemblée nationale laisse penser que la société France Télévision serait investie d'une mission de développement industriel, rôle qui n'est apparemment pas celui que le législateur a voulu lui confier.
Il nous paraît donc préférable de modifier cette rédaction en demandant à France Télévision de prendre en compte les nouvelles techniques de diffusion et de production, et en excluant l'idée que cette société soit elle-même investie d'une mission industrielle en la matière, mission qui, si elle devait être confiée à une société publique, devrait l'être sans doute plutôt à l'INA ou à la SFP, mais en aucun cas à France Télévision.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. L'une des formules qui m'ont paru les plus heureuses dans la présentation récente par Mme la ministre des enjeux de l'audiovisuel public consiste à concevoir celui-ci comme un grand groupe industriel, et par là même à fonder la nécessité du groupement économique et financier et de ce qu'on appelle la « holding ». Il y a donc là un élément majeur dans l'interprétation du service public, qui s'inscrit non seulement dans les enjeux culturels des nouvelles technologies, mais plus globalement dans les programmes de développement de la société avancée.
La commission est donc attachée à ce que la création de France Télévision puisse favoriser la constitution d'un pôle industriel, et elle est par conséquent défavorable à l'amendement n° 203, défendu par Mme Pourtaud.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 203.
En effet, la rédaction actuelle du texte peut engendrer une confusion s'agissant d'une mission, qui deviendrait exclusive pour France Télévision, de développement et d'application des nouvelles technologies. Je pense en effet que, face à l'INA et face, surtout, à la SFP, que nous avons voulu maintenir dans une dimension lui permettant d'exercer dans un climat concurrentiel, il ne peut y avoir d'ambiguïté qui soit instaurée. Cela ne supprime en rien - je tiens à rassurer M. le rapporteur à cet égard - l'objectif de constituer un groupe industriel formant une force de frappe sur l'ensemble de ces missions. Mais les termes : « constitution d'un pôle industriel permettant d'intégrer » laissent planer une ambiguïté. Or, alors que nous définissons les missions de façon précise, je ne voudrais pas que subsiste un risque de fragilisation dans l'interprétation de ce texte.
Voilà pourquoi l'amendement n° 203 me semble bon. Il va d'ailleurs dans le sens que vous avez évoqué, monsieur le rapporteur, d'une clarification du texte adopté par l'Assemblée nationale. Peut-être, la commission, au vu de tous ces arguments, pourrait-elle changer d'avis ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est cela, le débat !
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Ma volonté de vous faire plaisir ne suffira pas !
M. le président. Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 203, repoussé par la commission et accepté par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 254, MM. Vergès, Ralite, Renar, Mme Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - A la fin de la première phrase du deuxième alinéa (1°) du I du texte présenté par l'article 2 pour l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986, de remplacer les mots : « sur l'ensemble du territoire métropolitain » par les mots : « sur l'ensemble du territoire de la République ».
II. - En conséquence, dans l'ensemble des articles du projet de loi, de remplacer les mots : « sur l'ensemble du territoire métropolitain » par les mots : « sur l'ensemble du territoire de la République ».
La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. L'amendement n° 254, déposé sur l'initiative de notre collègue Paul Vergès, sénateur de La Réunion, vise à mettre en oeuvre l'égalité d'offre et d'accès à l'image publique sur l'ensemble du territoire de la République.
En effet, à l'heure actuelle, les programmes des chaînes publiques France 2, France 3 et La Cinquième-Arte ne sont pas intégralement retransmis dans les régions d'outre-mer. Il n'est proposé aux populations de l'outre-mer qu'une sélection d'émissions de ces chaînes à travers RFO.
Plusieurs raisons militent en faveur de la retransmission intégrale des programmes des chaînes publiques.
La première raison, sur laquelle on ne peut transiger, est le principe d'égalité d'accès aux chaînes publiques quel que soit l'endroit où l'on se trouve sur le territoire de la République. Il n'est pas admissible que les populations d'outre-mer qui s'acquittent de la redevance n'aient pas accès aux mêmes programmes que ceux qui sont proposés aux métroplitains.
La deuxième raison porte sur la mutation que doit opérer RFO. Il y a unanimité à reconnaître que RFO doit devenir une véritable télévision régionale qui, au même titre que France 3, serait tournée vers son environnement immédiat. Libérer RFO du rôle actuel de simple diffuseur ou retransmetteur des programmes des chaînes publiques nationales est la condition pour la réalisation de cet objectif.
Enfin, la retransmission intégrale des chaînes publiques outre-mer ouvre des perspectives réelles de diffusion des programmes des chaînes publiques françaises dans les pays appartenant à l'environnement régional des départements et territoires d'outre-mer. Cette mesure participerait donc aussi au rayonnement de la culture française et de la francophonie.
Pour ces raisons, mes chers collègues, nous vous demandons de bien vouloir adopter cet amendement qui correspond à une forte aspiration des populations d'outre-mer. Après la réalisation de l'égalité politique et de l'égalité sociale, il est temps d'ouvrir, pour l'outre-mer, l'ère de l'égalité technologique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Les analyses de notre collègue M. Ivan Renar ne manquent pas de pertinence.
Je suis, un peu comme lui, partisan d'une continuité de l'offre sur l'ensemble du territoire national, et il faudra probablement que cette belle idée émerge un jour plus complètement.
Est-elle opportune aujourd'hui ? Je ne le pense pas. Suivre aujourd'hui M. Renar dans sa proposition ne faciliterait pas la stabilisation de RFO. C'est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 254.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. L'adoption de cet amendement supposerait une définition des missions de RFO tout à fait différente de celle qui est proposée dans le projet de loi. Cela impliquerait en effet que l'ensemble des programmes des chaînes publiques, en tout cas de France 2, soient diffusés sur tout le territoire de la République. Cela reviendrait à remettre en question le rôle de continuité territoriale que RFO exerce aujourd'hui. Dans ce contexte, nous ne pourrions que nous interroger sur le rôle, le sens, le devenir et le financement de RFO. Je ne suis donc pas favorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 254.
M. Michel Pelchat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. L'amendement n° 254 est intéressant et pose un vrai problème : celui de la position et de la situation de RFO et de nos départements et territoires d'outre-mer, et donc de la continuité territoriale ; il pose aussi le vrai problème, que j'ai eu l'occasion d'exposer hier dans la discussion générale, de l'intégration de RFO dans la holding France Télévision, ce qui règlerait tout. Les programmes pourraient dès lors être élaborés, diffusés et échangés à l'intérieur de la holding.
Les départements et territoires d'outre-mer font partie du territoire national. Ils ont donc droit aux mêmes moyens financiers. Il n'y a aucune raison pour qu'il y ait un budget spécial, un personnel particulier et des programmes spécifiques pour l'outre-mer, alors que la télévision nationale s'étend et va bénéficier, globalement parlant, de bien plus de moyens. Il existe donc, actuellement, une véritable injustice à cet égard.
Je reconnais la grande pauvreté de la télévision dans les départements et territoires d'outre-mer par rapport à ce qu'elle est sur le territoire métropolitain. Aussi, je souhaiterais que l'on parvienne à l'équité des moyens financiers, humains ou de programmes, et qu'une télévision unique existe sur l'ensemble de notre territoire national.
Mais une telle réforme passe, à mon avis, non par l'adoption de l'amendement n° 254, aussi intéressant soit-il, mais par l'intégration de RFO dans la holding France Télévision. De mon point de vue, il y a là une idée, une évidence qui s'imposent à tous.
M. Ivan Renar. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Avec mon collègue M. Paul Vergès, je persiste et signe. Nous avons d'ailleurs déposé, à l'article 2, trois autres amendements qui visent à tirer les conséquences de cet amendement n° 254, le but étant évidemment d'arriver à ce que RFO fasse partie de la holding.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 254, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements, qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 174, le Gouvernement propose :
I. - De rédiger comme suit l'avant-dernier alinéa du I du texte présenté par l'article 2 pour l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 :
« 3° La société dénommée La Cinquième, dont les missions sont définies à l'article 45. »
II. - En conséquence, dans l'avant-dernière phrase du premier alinéa du II du même texte, de remplacer les mots : « la société La Cinquième-Arte, pour l'exercice de la mission prévue au a de l'article 45 » par les mots : « la société La Cinquième ».
III. - En conséquence, dans l'ensemble des articles du projet de loi, de remplacer les mots : « La Cinquième-Arte » par les mots : « La Cinquième ».
Par amendement n° 120, M. Pelchat propose :
I. - Dans l'avant-dernier alinéa du I du texte présenté par l'article 2 pour l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, de remplacer les mots : « La Cinquième-Arte par les mots : « La Cinquième ».
II. - En conséquence, dans le premier alinéa du V du même texte, de remplacer les mots : « la société La Cinquième-Arte » par les mots : « les sociétés La Cinquième et Arte ».
Par amendement n° 146, MM. Ralite, Renar, Mme Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
A. - Dans l'avant-dernier alinéa du I du texte présenté par l'article 2 pour l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986, de remplacer les mots : « La Cinquième-Arte » par les mots : « La Cinquième ».
B. - En conséquence, dans l'ensemble des articles du projet de loi, de remplacer les mots : « La Cinquième-Arte » par les mots : « La Cinquième ».
La parole est à Mme le ministre, pour défendre l'amendement n° 174.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Cet amendement a pour objet de mettre fin à la fusion entre la Sept-Arte et La Cinquième, tout en maintenant cette dernière société dans la holding France-Télévision.
La Sept-Arte continuera à être financée par la redevance et bénéficiera d'un contrat d'objectif. La composition de son capital continuera à associer l'Etat et des sociétés audiovisuelles publiques. Son mode d'organisation et la composition de ses organes sociaux sont fixés par ses statuts.
M. le président. La parole est à M. Pelchat, pour défendre l'amendement n° 120.
M. Michel Pelchat. Compte tenu des engagements pris par le Gouvernement, cet amendement, dont l'objet était de faire sortir la Sept-Arte de la holding, n'a plus de raison d'être. Je vais donc le retirer, parce que je ne veux pas enfoncer une porte ouverte.
Cela étant, je souhaiterais, madame la ministre, que vous précisiez vos engagements, car l'indépendance de la Sept-Arte doit être garantie. Certes, cette chaîne est financée par la redevance dans le cadre d'un contrat d'objectifs, mais qu'en sera-t-il de la pérennité de la parité de ce financement avec nos partenaires allemands, ces derniers bénéficiant de fonds publics nettement supérieurs à ceux dont vous bénéficiez et que vous pouvez répartir ? N'y a-t-il pas là un danger pour les années à venir ?
Cette parité est une garantie pour ceux qui voudraient éventuellement se joindre à nous pour développer, au-delà de la relation franco-allemande, une chaîne qui a pour l'instant un caractère européen, même si les Européens que nous sommes espèrent qu'elle sera étendue à d'autres pays.
Je crois donc qu'il faut absolument que vous réaffirmiez haut et fort que, de quelque façon que ce soit, le Gouvernement s'engage et garantit l'égalité de financement pour les années à venir.
M. le président. L'amendement n° 120 est retiré.
La parole est à M. Renar, pour défendre l'amendement n° 146.
M. Ivan Renar. La question de la fusion de La Cinquième et d'Arte a défrayé la chronique ces derniers jours.
Le processus de fusion engagé sous le gouvernement précédent posait, on le sait, un certain nombre de problèmes.
Dans le cadre de la holding telle qu'elle nous est proposée dans le projet de loi, cette question devenait plus complexe encore et les accords franco-allemands qui prévalaient au moment de la création d'Arte pouvaient être remis en cause par un tel processus, comme l'assurait notre partenaire.
Poser le principe de la fusion des deux chaînes pouvait être viable à la condition que ces chaînes présentent, du point de vue de leur contenu éditorial, un certain nombre de similitudes. Or il n'en est rien, au point que les personnels des deux chaînes, La Cinquième et la Sept-Arte, s'inquiétaient légitimement d'un tel rapprochement.
Dans le cadre d'un groupement d'intérêt économique, mis en oeuvre conformément aux intérêts du développement du service public, peut-être une telle fusion aurait-elle pu se concevoir.
A tout le moins, la présence de la Sept-Arte au sein d'un tel groupement était justifiée.
Dans le cadre législatif qui a prévalu ici, le principe de cette fusion ne nous paraît conforme ni aux intérêts de La Cinquième ni à ceux de la Sept-Arte.
Aussi, l'amendement que nous vous proposons d'adopter fait de La Cinquième une chaîne autonome, dotée de missions particulières en matière de diffusion des savoirs et de la connaissance, qui peut prendre toute sa place au sein de la holding telle qu'elle nous est proposée dans cet article.
Par ailleurs, nous devrons prendre garde au risque de « sanctuarisation » qui peut se présenter dans les missions de la Sept-Arte.
A côté de la chaîne franco-allemande Arte, France Télévision doit prendre toute sa place - et mieux qu'elle ne le fait aujourd'hui - dans la diffusion de la culture. En aucun cas, l'existence d'Arte ne doit exonérer l'audiovisuel public de ses missions culturelles.
Nous attendons, à cet égard, beaucoup du développement de notre audiovisuel public, et notamment des missions de France Télévision dans le cadre des contrats d'objectifs et de moyens. Mais nous aurons l'occasion d'y revenir.
Tel est le sens de cet amendement, qui rejoint celui du Gouvernement. Nous voterons donc ce dernier, et le nôtre deviendra ipso facto sans objet.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 174 et 146 ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette affaire, qui nous a beaucoup mobilisés depuis quarante-huit heures, de l'exclusion de la Sept-Arte de France Télévision se présente dans les conditions le moins favorables possible, puisque la décision a été prise sans que la gamme des motivations qui la justifient ait été connue par la représentation parlementaire.
C'est vous dire que, à cet égard, nous attendrons tout éclaircissement sur une décision qui, au-delà de la péripétie diplomatique, nous met aujourd'hui au pied d'un mur dont il va falloir savoir de quoi il est constitué, sachant qu'il concerne aussi l'avenir et peut-être la redéfinition tant de la Sept-Arte que de La Cinquième.
Nous nous trouvons devant une initiative gouvernementale tout à fait contraignante et, dans ces conditions, refusant d'emboucher les trompettes d'un succès qui n'a pas été partagé et dont nous ne voyons pas très bien aujourd'hui sur quelle stratégie il pourra aboutir, j'ai prié la commission de s'en remettre à la sagesse du Sénat en la matière.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 146 ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je tiens tout d'abord à indiquer à M. Pelchat que la discussion sur la hauteur des financements entre la Sept-Arte et Arte-Deutschland existe depuis longtemps. Nous avons toujours financé à parité le fonctionnement du GEIE, je tiens à le rappeler. Pour le reste, un différentiel a eu tendance à se creuser, mais, pour ce qui concerne le rétablissement d'une meilleure parité, la construction du siège à Strasbourg permet de mobiliser les financements qui étaient consacrés à Arte du côté allemand comme du côté français, puisque cette opération va être engagée. Aujourd'hui, les choses sont donc claires de ce point de vue.
Je me réjouis que l'amendement n° 146 de M. Renar rejoigne celui du Gouvernement, et je tiens à rassurer à ce propos M. le rapporteur, car je ne voudrais pas qu'il ait le sentiment que nous avons souhaité jouer l'absence de transparence en la matière.
Au-delà de la ligne éditoriale, qui est déjà garantie dans le texte, la conception des programmes allant dans le sens d'une meilleure définition du rôle de la Sept-Arte, au-delà du contrat d'objectifs et de moyens et de la garantie de la pluriannualité du financement, il demeurait deux points d'achoppement.
Le premier a trait au lien qui peut exister entre le président du groupe et le responsable de l'entreprise double fusionnant, d'un côté, La Cinquième, avec ses obligations qui sont celles de toutes les entreprises publiques audiovisuelles nationales, et de l'autre, la Sept-Arte, société à statut totalement dérogatoire. S'il ne peut pas y avoir d'entente entre les hommes pour la désignation par le président du groupe du responsable de la Sept-Arte et de La Cinquième, c'est bien parce que l'on se situe dans une entité dont une partie relève des obligations de toutes les chaînes nationales tandis que l'autre n'est pas liée par ces obligations. La cohérence du groupe ne peut que s'en ressentir !
Cela nous a amenés à constater que la fusion en elle-même soulevait des questions de légitimité et de confiance entre le président du groupe et le responsable de la Sept-Arte et de La Cinquième, nuisant ainsi aux synergies et aux économies de moyens recherchées, même si la ligne éditoriale de chacune des entités est bien identifiée.
La Cinquième doit respecter ses obligations, qui sont définies par la loi, mais cela a des répercussions quotidiens sur la Sept-Arte, et donc sur l'ensemble du GEIE.
Au fur et à mesure que nous sommes entrés dans le détail de ces considérations, je me suis rendu compte que l'on risquait d'empoisonner la vie interne et l'équilibre du groupe, le statut dérogatoire risquant d'avoir des répercussions sur La Cinquième, ce qui aurait été défavorable autant pour la Sept-Arte que pour La Cinquième.
L'une et l'autre de ces chaînes, je voudrais le redire solennellement devant le Sénat, doivent être confortées. Nous l'avons souligné hier dans la discussion générale et nous y sommes très attachés, que ce soit par rapport à la vocation culturelle et au devenir d'Arte sur le plan européen et international ou que ce soit pour La Cinquième, qui, je le souhaite personnellement, doit continuer de croître et d'être respectée à l'intérieur d'un groupe qui non seulement ne l'absorbe pas mais soutienne son développement.
C'est dans cette optique, dans la clarté plutôt que dans la confusion, dans la sérénité plutôt que dans le conflit, que nous avons agi.
Telles sont les considérations qui ont, finalement, motivé ma proposition à M. le Premier ministre. Je crois qu'elle est respectueuse de l'identité de chacune des chaînes, mais aussi de leur devenir.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Très bien !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 174.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Madame la ministre, je vous ai écoutée avec beaucoup d'attention sur un sujet qui constitue pour moi l'un des points d'interrogation majeurs du projet de loi que vous nous présentez, contrairement à d'autres éléments - par exemple la limitation des ressources publicitaires du secteur public - sur lesquels je me sens en parfait accord.
Je vous avoue ne pas être encore totalement satisfait à l'heure actuelle. En effet, si je partage votre objectif qui consiste à arriver, à terme, à la mise en place d'un pôle de service public audiovisuel à la fois fort et où chaque composante trouve sa place, je m'interroge sur les moyens utilisés.
Passionnément attaché au service public, je ne diverge nullement sur la stratégie, dans ce secteur comme dans beaucoup d'autres. Mais, au point où nous en sommes, je perçois une incertitude juridique : que va devenir l'articulation entre La Cinquième et Arte ? Comme tout laisse penser que nous allons vers une séparation, vers la perte de tout ce qui avait été acquis dans ce domaine, il va donc nous falloir laborieusement entreprendre une autre démarche dont, de surcroît, l'aboutissement ne me paraît pas garanti.
Par ailleurs, j'adhère totalement à la décision du Gouvernement de ne pas intégrer Arte au pôle de France Télévision. Au demeurant, je n'ai jamais cru cette intégration possible. Mais le résultat, c'est, évidemment, de rendre plus solitaire la position d'Arte, ce qui ne vas pas dans le sens de la stratégie d'ensemble que j'évoquais il y a quelques instants.
Troisième élément, à mes yeux déterminant : au fond, je n'ai pas confiance.
Je n'ai pas confiance, madame la ministre, non pas dans la détermination du Gouvernement, non pas, à la limite, dans sa sagesse, mais dans la capacité de France Télévision de respecter la réussite exceptionnelle de La Cinquième, à laquelle, comme beaucoup d'autres sur ces travées, je suis très attaché, qui me paraît être le grand événement télévisuel de ces dix dernières années en France et, pour partie, en Europe.
Je n'ai pas l'assurance que, de par sa structure ancienne, de par son histoire, France Télévision sera capable d'intégrer La Cinquième tout en respectant sa spécificité, sa singularité, sa force. De plus, encore une fois, je ne me satisfais pas de voir Arte ainsi isolée.
C'est en raison de ce manque de garanties, de cette absence d'engagement de la part de ceux qui, demain, devront, si l'on va jusqu'au bout et si ce texte est voté, assumer cette mission, qu'à ce stade du débat, en cette première lecture du projet, je ne voterai pas l'amendement du Gouvernement, même si, au fond de moi-même, je ne demanderais qu'à le faire.
M. Pierre Laffitte. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Madame la ministre, j'ai été très sensible, notamment, à l'intérêt que vous portez à La Cinquième. Les arguments que vous avez avancés, nous ne pouvons, bien sûr, que les partager. Un certain nombre d'entre nous, dont M. Delfau et moi-même, étions d'ailleurs convaincus depuis longtemps de leur valeur.
Je tiens toutefois à revenir sur le problème de La Cinquième.
Nous avons tous très peur que cette petite chaîne, qui a de petits moyens mais de grandes ambitions et de grandes réalisations à son actif, ne soit profondément perturbée. La cohabitation, Jérôme Clément l'avait mise en place dans des conditions très difficiles. Pour être administrateur de La Cinquième, je sais qu'au départ ce n'était pas évident. L'ensemble du personnel de La Cinquième avait l'impression, à juste titre, sous la direction de Jean-Marie Cavada, d'avoir fait un très bon travail, d'être en pointe, notamment sur le plan technique - il suffit de visiter ce qui a été réalisé, et qui est exceptionnel pour s'en convaincre - notamment après avoir mis en place un système, la banque de programmes et de services, qui préfigure cette convergence dont nous avons parlé longuement hier. La Cinquième était donc techniquement en avance, au dire même de chaînes très en pointe comme TV Ontario.
Nous avons très peur parce qu'il y a des différences de culture, étant entendu que la différence de culture entre La Cinquième et la chaîne Arte a permis, à mon sens, alors que ce n'était pas évident a priori, d'améliorer et Arte et La Cinquième.
Nous avons eu trop peu de temps pour réfléchir, en liaison avec les intéressés, d'ailleurs, à ce qui serait le plus opportun. On aurait pu imaginer d'autres formules.
On aurait pu imaginer que La Cinquième sorte du conglomérat qui est train de se former et où sa place est probablement moins évidente que celle de RFO, comme l'ont très bien dit tout à l'heure M. Ivan Renar et d'autres.
Au cours de la navette, d'autres suggestions pourraient être faites. Il en est une, en tout cas, à laquelle je souhaiterais que le Gouvernement, nos collègues députés, voire nos collègues sénateurs, réfléchissent : celle qu'avait faite le Sénat dès 1993, c'est-à-dire l'adossement à une fondation - je ne parle pas de dépendance - qui, de même que les grandes fondations anglo-saxonnes ou germaniques, permettrait de fédérer les fonctions interministérielles qui sont celles de la chaîne de l'emploi, du savoir, de la culture et de la formation professionnelle continue, sans oublier les régions, qui sont toutes concernées par la formation continue, et, le cas échéant de grandes entreprises concernées par la formation continue, et qui ont des moyens de financement non négligeables, largement supérieurs à ce que l'ensemble audiovisuel français touche de l'Etat. Rappelons que le domaine de La Cinquième met en jeu chaque année des centaines de milliards de francs, sur lesquels un petit pourcentage pourrait être consacré avec efficacité à l'utilisation massive de la télévision.
Madame le ministre, le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, qui dispose de budgets considérables, utilise constamment les moyens que met à sa disposition La Cinquième. Il n'y a donc aucune raison de ne pas trouver une formule souple - voilà pourquoi je parle de fondation - qui permettrait probablement d'améliorer la structure de financement. Et si nous n'avons pas déposé d'amendement en ce sens, c'est parce que nous n'en avons pas eu le temps, la décision étant toute récente.
Ce que nous savons, c'est que le fait de dissocier La Cinquième et Arte, alors que les secrétaires généraux sont communs, qu'un certain nombre de services sont communs, que la fusion a été préparée depuis un certain temps, va fragiliser ce qui me paraît être le plus beau fleuron de l'audiovisuel public français.
Voilà pourquoi, madame la ministre, je voudrais que vous me donniez l'assurance que les choses ne sont pas figées et que, compte tenu du caractère récent de la décision, nous aurons le temps d'y revenir dans les navettes.
M. Louis de Broissia. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia. Madame le ministre, je me réjouis beaucoup de voir qu'à l'occasion de la discussion de cet amendement nous ne nous contentons pas de voter rapidement un texte.
C'est un sujet important, dont la presse a beaucoup parlé, qui a fait l'objet d'une préoccupation légitime de votre cabinet.
Je pars du même postulat que notre collègue Gérard Delfau. J'ai strictement les mêmes interrogations et les mêmes inquiétudes que lui.
Vous avez illustré à la perfection - j'ai beaucoup d'admiration pour vous - l'adage latin : « Errare humanum est, perseverare diabolicum. » A titre personnel, je vous en donne acte.
Nous avons été nombreux, dans cet hémicycle ou dans un autre, à aider, à consolider la chaîne Arte. Je connais beaucoup de journalistes qui y travaillent depuis des années. C'est une chaîne intelligente, fruit d'un concept intelligent, le concept franco-allemand, concept que vous connaissez bien, madame le ministre, puisque vous êtes originaire de Strasbourg.
Arte est un engagement assez original dans la culture européenne. A une époque, j'avais imaginé, avec d'autres, qu'Arte pouvait être la préfiguration d'une chaîne européenne. Elle est restée une chaîne franco-allemande et, à l'occasion de ce conflit, mal géré - il faut le dire - on enfonce un peu plus Arte dans le dilemme franco-allemand, ce que je regrette. (Mme le ministre proteste.)
Mais si ! On parle du président allemand et du président français. C'est une première erreur qu'il faudra tout de même que nous corrigions.
S'agissant d'Arte, j'attendrai donc que vous fassiez au Parlement - car, après tout, c'est nous qui décidons, c'est ainsi ! - des ouvertures sur la poursuite de ses activités.
Par ailleurs, comme mes collègues, je m'inquiète de la fragilisation très forte de La Cinquième. Des journalistes de cette chaîne, extrêmement préoccupés - c'était lundi - par l'indifférence dont La Cinquième faisait l'objet à la veille du débat au Sénat, ont demandé - on vient de discuter des missions de service public - que la loi réaffirme clairement ses missions ainsi que le cadre dans lequel elle sera en mesure de continuer à les exercer. Disant cela, je ne fais que paraphraser un article paru dans Le Monde hier soir.
Madame le ministre, je voterai l'amendement du Gouvernement parce qu'il règle provisoirement une affaire pas très bien gérée - veuillez m'excuser de le dire, mais nous sommes là pour ça - mais je ne vous rends pas quitte pour autant de la question, que je pose, de l'avenir d'Arte, société franco-allemande ou européenne, d'une part, et des missions de La Cinquième, d'autre part.
Je fais partie de ceux qui ont toujours soutenu l'une comme l'autre ; je fais partie de ceux qui ont toujours soutenu le rapprochement entre les deux. Nous fragilisons incontestablement l'une et l'autre. Alors, que nous votions l'amendement, soit ! il faut sortir de cette ornière, mais il vous faudra, d'ici à la deuxième lecture, faire des propositions qui rassurent le Sénat.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Michel Pelchat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Je serai bref, car je partage, pour l'essentiel, le point de vue de notre collègue M. de Broissia. Comme lui, je voterai l'amendement.
Moi, je ne me fais pas de souci en ce qui concerne l'avenir d'Arte : je pense qu'elle est entre de bonnes mains, qu'elle poursuivra son chemin, qu'elle continuera de s'épanouir, comme elle continuera de nous réjouir et de nous enrichir culturellement.
En revanche, comme mes collègues, je m'inquiète de la façon dont sera traitée La Cinquième une fois qu'elle aura été déconnectée d'Arte. Des synergies se mettaient en place, se développaient, s'organisaient. Nous avions trouvé un nouvel équilibre, satisfaisant pour les deux chaînes.
Mais si Arte, je le répète, ne sera pas fragilisée, qu'en sera-t-il de La Cinquième ? Sera-t-elle adossée à une fondation, comme le préconisait M. Laffitte ? Sera-t-elle intégrée ? De quelle autonomie disposera-t-elle ? Quel contrôle le Parlement aura-t-il sur les moyens et sur l'évolution de cette chaîne importante ?
Je tiens à rappeler aux journalistes que La Cinquième est née dans cette assemblée, et qu'il est donc assez paradoxal de lire dans la presse qu'elle semble ne pas trop intéresser le Sénat. Voilà de quoi révolter M. Laffitte ou M. Trégouët ! Ce sont eux qui l'ont voulue. C'est notre assemblée unanime qui a décidé sa création, forçant la main du Gouvernement de l'époque pour faire aboutir son projet.
Bien au contraire, le Sénat est donc très intéressé. Il s'inquiète, il s'interroge, comme en témoignent les interventions sur toutes les travées de cette assemblée.
Comme d'autres, je refuse de me prononcer pour ou contre telle ou telle solution qui pourrait nous être proposée tout à l'heure. Comme M. de Broissia, je vous demande, madame le ministre, de réfléchir encore, après quoi vous pourrez, lors de la deuxième lecture, venir nous dire comment vous envisagez la poursuite de l'activité et le développement du rayonnement de La Cinquième. Nous pourrons alors nous prononcer, car nous aurons, nous aussi, eu le temps de réfléchir.
M. Laffitte a dit qu'il n'avait pas déposé d'amendement. En fait, il nous était impossible de le faire puisque la décision nous a été annoncée hier soir, alors que le délai limite pour le dépôt des amendements expirait à dix-huit heures.
Il ne serait pas sérieux de la part de la Haute Assemblée de prendre quelque position que ce soit aujourd'hui, compte tenu du peu d'informations dont elle dispose, du peu d'informations que vous êtes en mesure de lui communiquer puisque vous-même ne savez pas très bien dans le détail ce que va devenir La Cinquième.
C'est donc lors de l'examen du projet en deuxième lecture que la Haute Assemblée devra se prononcer sur ce sujet, et il vous faudra alors, madame le ministre, nous présenter un projet solide capable de recueillir notre assentiment.
M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.
M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles. Madame la ministre, les interventions qui viennent d'avoir lieu montrent tout l'intérêt que notre assemblée porte à Arte et à La Cinquième - personne n'en doutait, et certainement pas vous. Elles traduisent aussi l'état d'esprit dans lequel nous entendons débattre de ce texte, de façon toujours constructive, même si nous sommes parfois critiques.
Dans cette affaire, notre intention n'est pas d'embarrasser le Gouvernement. Et pourtant, madame la ministre, nous aurions quelques raisons de protester ; si certains de nos collègues étaient à notre place, ils protesteraient avec beaucoup plus de vigueur... (Protestations sur les travées socialistes.)
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Marcel Charmant. Oh !
M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles. En effet, la façon dont nous avons été informés sur un point aussi important, fondamental même, nous a posé un problème pour analyser cette nouvelle situation.
Votre argumentation, madame la ministre, est bonne. Comment ne pas reconnaître, en effet, qu'entre La Cinquième et Arte il y a des différences de droit qui, dans le fonctionnement quasi quotidien des deux chaînes si on les regroupait, pourraient provoquer des distorsions et des décalages, et créer avec nos partenaires allemands des difficultés d'ordre diplomatique ?
Je ne doute pas non plus, madame la ministre, que le Gouvernement, sur ce dossier, se soit battu et ait espéré convaincre notre partenaire allemand. Mais sans doute avez-vous espéré le convaincre au-delà de ce qui était raisonnable, puisque vous avez attendu le dernier moment pour présenter au Sénat la présente proposition.
Je ne reviendrai pas sur certaines des critiques qui ont été exprimées par les orateurs qui sont intervenus.
Mais je crains tout de même, comme nombre de mes collègues, que La Cinquième ne soit fragilisée, si elle reste au sein de la holding dans les conditions où on la place. En effet, il s'agit d'une chaîne d'un type très particulier, dont la vocation et le financement sont spécifiques.
Madame la ministre, je vais certes voter votre amendement mais, en quelque sorte, à titre conservatoire. En effet, je ne voudrais pas que le Gouvernement puisse considérer, si le vote du Sénat est positif, que le problème est réglé. Non ! Nous souhaitons poursuivre la réflexion, l'approfondir afin d'apporter à ce problème une solution plus satisfaisante en deuxième lecture.
Madame la ministre, nous le savons tous, La Cinquième est l'enfant de cette assemblée et je veux à mon tour rendre hommage aux collègues dont les noms ont été cités tout à l'heure, MM. Pierre Laffitte et René Trégouët.
M. Pierre Laffitte. Et aux membres de la commission des affaires culturelles !
M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles. Nous savons que La Cinquième et Arte ont fait longtemps l'objet de critiques parfois sévères ou ont du moins suscité des doutes ici et ailleurs. Ce n'est plus le cas. Nous ne voudrions pas qu'à la suite du vote que nous allons émettre ressurgissent des difficultés qui avaient été largement surmontées.
Voilà, madame la ministre, ce que je voulais dire pour exprimer le sens de mon vote personnel et, je crois pouvoir le dire aussi, le sens de la position que beaucoup de collègues de la commission des affaires culturelles prendront sur cette affaire. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 174, pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 146 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 257, MM. Vergès, Ralite et Renar, Mme Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après l'avant-dernier alinéa du I du texte présenté par l'article 2 pour l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ... ° La société dénommée Réseau France Outre-Mer chargée de concevoir et de programmer les émissions de radiodiffusion et de télévision, à caractère régional et local, destinées à être diffusées dans les départements, territoires et collectivités territoriales ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie. »
La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. J'ai déjà exposé les raisons fondamentales qui motivent cet amendement en présentant l'amendement n° 254. Il vise à intégrer RFO au holding France Télévision. Nous pensons, avec notre collègue Paul Vergès, que c'est la meilleure façon, non seulement de consolider la mission de service public de RFO, mais aussi de garantir à cette société les moyens financiers nécessaires pour remplir, avec des productions de qualité, les missions nouvelles qu'elle devra assurer, à savoir une plus grande production locale et le développement d'une coopération audiovisuelle régionale.
Comme pour La Cinquième, je crois que ce débat ne peut pas être clos aujourd'hui ; il doit être poursuivi !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Cet amendement tend à l'intégration de RFO au holding France Télévision. Nous pensons que RFO a vocation de droit à rejoindre France Télévision lorsque les équilibres indispensables à la participation de RFO à la dynamique du groupement seront établis. D'ici là, la commission donne un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. A ce stade de la discussion, le Gouvernement est défavorable à l'intégration pure et simple de RFO dans le holding France Télévision.
Des débats assez longs qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale, il est ressorti, tout d'abord, que les positions étaient fluctuantes, interprétées différemment suivant les départements ou territoires d'outre-mer.
Nous avons donc proposé à l'Assemblée nationale la formule, qui a été finalement adoptée en première lecture, d'une convention entre RFO et France Télévision. Cette convention garantit actuellement un équilibre satisfaisant entre les nécessités de coopération avec France Télévision et le respect des spécificités de l'outre-mer, sans compromettre la possibilité ultérieure d'une intégration, lorsqu'aura été renforcé le lien entre le groupe France Télévision et RFO.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 257.
M. Michel Pelchat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Pelchat.
M. Michel Pelchat. Je ne comprends pas ; il faudrait que l'on m'explique ! Peut-être suis-je un peu déficient pour comprendre les choses les plus subtiles, ou peut-être cette décision comporte-t-elle une subtilité extraordinaire.... En presque vingt-quatre heures, on décide d'intégrer La Cinquième à France Télévision, sans même savoir exactement sous quelle forme, sous quelle indépendance éditoriale ou comment elle va pouvoir vivre dans un environnement totalement hétéroclite qui n'est pas du tout conforme à ses missions. En revanche, intégrer RFO dans le même holding France Télévision, pour assurer l'égalité de tous les Français face à leur télévision, poserait problème. Il faudrait réfléchir ; il faudrait attendre un peu... Vraiment, je ne comprends pas !
Je pourrais reprendre toutes les bonnes raisons, d'ordre culturel, financier, entre autres, que j'ai déjà développées, d'intégrer RFO au holding France Télévision. Tous les Français doivent être traités à égalité, qu'ils soient d'outre-mer ou de métropole. L'argument fondé sur le fait qu'il ne serait pas encore temps me paraît sommaire et difficilement acceptable.
Je voterai donc l'amendement présenté par M. Renar - cela ne m'arrive pas souvent, mon cher collègue - car je crois très sincèrement que nous rendrions ainsi un grand service à tous nos concitoyens des départements et territoire d'outre-mer en leur offrant, depuis le temps qu'ils l'attendent, une télévision réellement nationale et en les traitant à égalité avec l'ensemble de nos concitoyens de métropole.
M. Alain Joyandet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Joyandet.
M. Alain Joyandet. Madame le ministre, vous êtes devant une assemblée très calme, qui souhaite contribuer positivement à l'élaboration de ce texte. Mais, s'agissant du périmètre du futur holding de l'audiovisuel public, c'est un véritable jeu de chaises musicales ! Au lieu d'apprendre vos décisions par la voix de M. Jospin par le biais des médias hier, vous auriez pu, par courtoisie, réserver pour une fois, au Sénat, l'exclusivité de vos informations, puisqu'il a tant contribué à l'évolution de l'audiovisuel. Nous y aurions été très sensibles.
Sur le fond, nous apprenons qu'Arte restera une chaîne commune avec les Allemands - ce qui, sur le plan juridique, peut se comprendre - que La Cinquième sera intégrée dans le holding, sans autres précisions, mais que RFO, pour des raisons qui ne nous sont pas données, ne peut pas l'être.
Quant à d'autres problèmes très importants, notamment celui des droits d'auteurs, celui du rôle joué par l'INA, un peu à l'extérieur des chaînes publiques de télévision, ils ne sont absolument pas abordés...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Si !
M. Alain Joyandet. Par la bande, mais l'INA restera l'INA !
Sur ce sujet qui paraît vraiment, madame le ministre, un sujet capital, s'agissant de la composition du holding, de ses relations, au-delà de la télévision publique avec tous les organismes publics qui, de près ou de loin, contribuent à la fabrication des programmes et à leur diffusion, qui sont les garants de la promotion de la culture francophone et de la culture française, les problèmes ne semblent pas avoir été appréhendés globalement. L'improvisation est, semble-t-il, la règle !
Je rejoins totalement ce qu'a très bien dit tout à l'heure le président de la commission des affaires culturelles. Les votes positifs que nous exprimons doivent être pris comme des votes « pour voir » en attendant la deuxième lecture, où il nous faudra approfondir très sérieusement ces sujets.
Très franchement, nous faisons preuve d'une très grande compréhension, d'une très grande envie de construire pour garder autant notre calme, notamment lors de l'examen de ce pan de votre projet qui nous paraît vraiment très léger !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous vous recentrez pour garder votre calme !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux vois l'amendement n° 257, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 147, MM. Ralite, Renar, Mme Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, avant le dernier alinéa du I du texte présenté par l'article 2 pour l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La société nationale dénommée Société française de production et de création audiovisuelle produit des oeuvres et des documents audiovisuels qu'elle commercialise, dans la cohérence économique et financière du service public. »
La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Les errement de la politique audiovisuelle depuis 1986 ont conduit au démantèlement progressif de l'instrument public de production qu'est la Société française de production, la SFP.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Absolument !
M. Ivan Renar. Avec cette société, les chaînes publiques bénéficiaient d'un instrument adapté à une exigence de production conciliant la qualité des créations, l'originalité des produits et la place particulière que se doit ou que se devrait d'occuper notre audiovisuel public.
Loin de souhaiter le retour de l'ORTF, encore qu'il nous faille rester attentif et ne pas sombrer dans cette « mythologie » commune d'un ORTF accablé de tous les maux de l'audiovisuel public, comment donner à la holding des capacités industrielles publiques sans prévoir en son sein un outil de production « collant » aux missions du service public ?
Qui n'a en mémoire les créations de la Société française de production à une époque où la télévision innovait, à une époque où la création prenait toute sa place dans le secteur public, à une époque encore où la télévision était considérée comme un instrument de diffusion de la culture, émancipé des règles du marché et du formatage des esprits que les chaînes imposent, de manière, il faut le dire, extrêmement habile ?
Nous devons produire de la fiction, faute de quoi, l'ensemble des réseaux de diffusion existants et à venir se nourriront de la bête jusqu'à l'épuisement ou, hypothèse plus réaliste, nous devrons importer davantage encore - et nous ne voulons pas y songer - des émissions reflétant assez mal la realité de nos cultures, ici et maintenant.
Notre amendement vise donc à introduire au sein de la holding la Société française de production afin de doter nos chaînes publiques d'un outil de production, c'est, pensons-nous, assez conforme au développement du service public que vous souhaitez, madame la ministre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il ne nous paraît pas logique de mentionner la SFP dans l'article 44 de la loi de 1986, qui ne vise que les sociétés de programmes.
En outre, nous nous interrogeons sur le libellé de cet amendement. Nous ne voyons pas à quoi correspond la formule : « des oeuvres et des documents qu'elle commercialise, dans la cohérence du service public ».
Pour ces deux raisons, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement. Un retour en arrière est exclu, puisque, depuis maintenant quelques années, la SFP est confrontée au monde de la concurrence.
Pour la sauver, il a fallu investir de l'argent public certes, mais à la condition que cette entreprise, qui reste une entreprise publique, soit dans une situation différente de celle des chaînes de télévision.
Des efforts ont été faits, nous avons salué notamment l'inauguration de nouveaux studios qui permettront à la société de disposer d'un outil favorable à son développement, mais la situation reste difficile.
L'intégration de la SFP dans le groupe n'est pas pensable. Elle serait comprise comme une sorte de renationalisation.
Vous regrettez le prix payé par la SFP, et je partage entièrement votre point de vue sur ce sujet. En Grande-Bretagne, par exemple, la BBC a conservé son outil de production alors qu'en France, on a fait un autre choix. Des décisions publiques ont entraîné la concurrence entre les entreprises publiques.
Permettez-moi, en cet instant, devant cette assemblée qui est très attachée à cette entreprise qui a marqué l'histoire de l'audiovisuel français, qui a une tradition et une culture, de dire ma reconnaissance au président et aux personnels de la SFP, qui a traversé une période de turbulences. Certains pensaient qu'elle sombrerait. Elle n'a pas sombré et je garde espoir.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 147, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 4, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de remplacer les deuxième et troisième phrases du premier alinéa du II du texte présenté par l'article 2 pour l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précité, par les dispositions suivantes : « , où elle assure la mission définie à l'article 1er. Elle favorise également la connaissance et le rayonnement des cultures de la France d'outre-mer sur l'ensemble du territoire national. »
Par amendement n° 204, Mme Pourtaud, MM. Dreyfus-Schmidt, Collomb, Lagauche, Weber et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger ainsi les deuxième et troisième phrases du premier alinéa du II du texte présenté par l'aticle 2 pour l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 : « Elle assure la promotion de la langue française. Elle assure également la promotion des langues et cultures régionales. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 4.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur, Cet amendement vise à inscrire dans la loi une définition des missions de RFO qui fasse mieux apparaître sa spécificité par rapport aux autres organismes de l'audiovisuel public.
RFO assume outre-mer les missions confiées à France Télévision en métropole et doit favoriser, sur l'ensemble du territoire, la connaissance et le rayonnement des cultures spécifiques de l'outre-mer.
RFO a pour mission d'assurer la continuité territoriale, qui doit s'exercer dans les deux sens.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour défendre l'amendement n° 204.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Notre amendement porte sur les deuxième et troisième phrases du premier alinéa du paragraphe II du texte présenté par l'article 2 qui sont ainsi rédigées : « Elle assure la promotion des langues et cultures régionales. Elle assure également la promotion de la langue française ».
Nous supposons qu'il s'agit d'une erreur de la part des députés et qu'il convient d'inverser les deux phrases qui se liraient ainsi : « Elle assure la promotion de la langue française. Elle assure également la promotion des langues et cultures régionales ».
Nous avons par ailleurs examiné l'amendement de la commission pour voir si nous pouvions y apporter une modification du même ordre. Ce serait une bonne chose, me semble-t-il, dans la mesure où il n'est plus question de langue à l'article 1er.
Mais nous avons relevé, monsieur le rapporteur, que l'amendement n° 4 est ainsi libellé : « où elle assure la mission définie à l'article 1er ». Or le mot « mission » n'est pas judicieux.
L'article 1er dispose en effet que les chaînes assurent des missions de service public. Vous avez par ailleurs précisé que ces chaînes sont chargées de contribuer à la qualité de la commission audiovisuelle entre autres. Il s'agit donc, non pas d'une mission, me semble-t-il, mais d'un rôle, et vous seriez bienvenu d'écrire : « où elle assure le rôle défini à l'article 1er ».
Cette nouvelle rédaction permettrait de lever une ambiguïté qui subsiste dans le texte transmis par l'Assemblée nationale et que nous voulions corriger par un amendement qui est devenu sans objet tout à l'heure.
Notre amendement consiste, je le répète, à inverser l'ordre des facteurs dans le texte de l'Assemblée nationale. A cette occasion, je vous signale que la formulation, « la mission définie à l'article 1er » c'est tout de même un peu court pour des chaînes qui sont chargées de missions de service public.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 204 ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. L'amendement n° 204 tend à apporter une correction qui est justifiée, mais incompatible avec l'amendement de la commission.
En ce qui concerne votre remarque relative à l'amendement n° 4, mon cher collègue, si je ne conteste pas votre droit d'interprétation, je pense que notre amendement peut garder la forme que nous lui avons donnée, parce qu'il est ainsi compréhensible par tout ceux qui veulent bien entrer dans l'esprit de ce texte.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 4 et 204 ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je ne peux pas accepter l'amendement n° 4 de la commission des affaires culturelles pour deux raisons : d'abord, parce que RFO n'est pas la seule société à garantir l'application outre-mer des principes posés par l'article 1er de la loi de 1986, ensuite, parce que sa mission ne doit pas s'étendre à l'ensemble du territoire national.
Cet amendement fait supporter à RFO une charge beaucoup plus lourde que celle qui est prévue aujourd'hui et je ne peux que répéter ce que j'ai dit à M. Renar tout à l'heure : s'il est important que les chaînes publiques favorisent une meilleure compréhension mutuelle entre les citoyens de métropole et les citoyens d'outre-mer, cela passe par une amélioration très nette des relations entre France Télévision et RFO grâce à la signature de conventions entre ces deux sociétés.
Pour ce qui est de l'amendement n° 204, il prévoit une meilleure rédaction du texte, et j'y suis favorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
Mme Danièle Pourtaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Si l'on peut approuver les objectifs visés par M. le rapporteur, c'est-à-dire favoriser la connaissance des cultures d'outre-mer sur le territoire national, il me semble que l'on ne peut absolument pas être d'accord avec les moyens qu'il propose, à savoir confier cette mission à RFO.
Je pense que cette mission relève des chaînes publiques et l'on voit bien ici les inconvénients de la rédaction adoptée pour l'article 1er. En effet, il aurait fallu confier cette mission explicitement aux chaînes publiques. Cela n'a pas été le cas, et on la confie donc, à l'article 2, à RFO.
L'amendement, tel qu'il est rédigé, n'est qu'une pétition de principe, car je n'ai absolument pas entendu M. le rapporteur préciser comment RFO s'y prendra pour faire connaître les cultures de l'outre-mer sur le territoire national.
M. Alain Joyandet. La seule solution, c'est de l'inclure dans la holding.
Mme Danièle Pourtaud. RFO ne dispose en effet d'aucun moyen d'action sur le territoire national.
Je ne comprends donc pas le sens de cet amendement, auquel nous sommes bien évidemment opposés.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. C'est dans le cadre des conventions signées avec le groupement France Télévision que RFO pourra favoriser la connaissance des cultures de l'outre-mer, ce qui ne signifie pas que c'est elle qui mettra en oeuvre les moyens ad hoc sur tous les points du territoire. Il s'agit donc d'une incitation à signer des conventions, et c'est dans cet esprit qu'il faut comprendre cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 204 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 5, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose, à la fin de la dernière phrase du premier alinéa du II du texte présenté par l'article 2 pour l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, de supprimer les mots : « qui assureront la promotion et le rayonnement des cultures de la France d'outre-mer en métropole ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Cet amendement a le même objet que le précédent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Pour les mêmes raisons que précédemment, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 256, MM. Vergès, Ralite, Renar, Mme Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit la seconde phrase du second alinéa du II du texte présenté par l'article 2 pour l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986 : « L'intégration de Réseau France outre-mer à France Télévision est assortie de conventions pluriannuelles définissant les objectifs et garantissant les moyens dévolus à Réseau France outre-mer. »
Par amendement n° 6, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de compléter le second alinéa du II du texte présenté par l'article 2 pour l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée par une phrase ainsi rédigée : « Ces accords précisent les modalités selon lesquelles les sociétés Radio France et France Télévision favorisent la connaissance et le rayonnement des cultures de la France d'outre-mer en métropole. »
La parole est à M. Renar, pour défendre l'amendement n° 256.
M. Ivan Renar. Inlassablement, je reviens comme la mer sur les galets ! (Sourires) J'essaie par tous les moyens d'intégrer RFO à la holding dénommée France Télévision.
Je soutiens ainsi le sentiment qu'ont exprimé les personnels lors de leur dernière assemblée générale.
Nous aurions gagné bien du temps si nous avions adopté le premier amendement de M. Vergès !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 6 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 256.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. L'amendement n° 6 a le même objet que l'amendement n° 4.
Par ailleurs, l'amendement n° 256 tend à intégrer RFO dans la holding France Télévision. Ce n'est pas le parti qu'a pris la commission, qui ne peut donc qu'être défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 256 et 6 ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 256 pour les raisons que j'ai précédemment exposées.
En revanche, je suis favorable à l'amendement n° 6, qui apporte une précision utile dans la rédaction actuelle du projet de loi.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 256, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 148 rectifié, MM. Ralite, Renar, Mme Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter le texte présenté par l'article 2 pour l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986 par un alinéa ainsi rédigé :
« Les sociétés mentionnées au présent article et à l'article 45 assurent le respect des conventions collectives existantes et l'autonomie des rédactions dont elles ont la charge par la création de sociétés de rédactions. »
La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la déréglementation de l'audiovisuel, notamment de l'audiovisuel public, s'est faite, pour une large part, au détriment des conditions de travail des personnels de l'audiovisuel.
Un trop grand nombre de créateurs de l'audiovisuel, mais également de techniciens, en bref tous ceux qui participent à l'accomplissement des missions du service public de l'audiovisuel, exercent leur métier dans des conditions d'extrême précarité.
L'intermittence du spectacle est un mode de gestion ordinaire, y compris dans le service public.
Ces éléments ne participent pas à la mise en oeuvre du pluralisme de la création. Ils ne permettent pas davantage aux acteurs de l'audiovisuel de conduire leur mission dans la sérénité.
Seuls le respect des conventions collectives et un intérêt partagé à promouvoir l'audiovisuel peuvent donner à celui-ci un cadre plus propice à la création.
Pour ce qui concerne l'information, il va sans dire que la précarité des comités de rédaction n'est pas un facteur propre à assurer le respect des règles déontologiques de l'information.
Notre amendement vise donc le respect des conventions collectives de l'audiovisuel, et donc des personnels, mais aussi le pluralisme de l'information.
Des comités de rédaction jouissant d'une réelle autonomie pourraient permettre aux sociétés publiques entrant dans la composition de la holding de jouir, individuellement, d'une réelle liberté éditoriale.
Tel est le sens de cet amendement que nous vous proposons d'adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Outre le fait qu'on doit pouvoir assurer l'indépendance des rédactions autrement que par la création de sociétés de rédaction, nous nous inquiétons d'une obligation de « respect des conventions collectives existantes » qui pourrait être interprétée de façon à empêcher l'amélioration de la situation des personnels. La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je suis également défavorable à cet amendement, car la création de sociétés de rédaction ou le choix d'autres formes fait vraiment partie de la négociation sociale au sein des entreprises. Il n'est donc pas souhaitable de retirer, en quelque sorte, le pouvoir d'initiative des personnels à l'intérieur des entreprises.
De plus, une bonne négociation doit intégrer la prise en compte du choix. L'éventuelle création de sociétés de rédacteurs, plutôt que d'être imposée par la loi, peut être décidée par les conseils d'administration, avec l'appui de la tutelle bien sûr. C'est la procédure qui a été utilisée pour la mise en place des médiateurs et je pense que c'est une bonne formule à mettre en oeuvre au sein même des entreprises.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 148 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 149, MM. Ralite, Renar, Mme Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter le texte présenté par l'article 2 pour l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986 par un alinéa ainsi rédigé :
« Les sociétés mentionnées au présent article et à l'article 45 présentent une offre de programme dans les domaines de l'information, de la culture, de la connaissance, du divertissement. Elles assurent la promotion de la langue française, mettent en valeur le patrimoine culturel et linguistique dans sa diversité. Elles concourent à la diffusion et à la production, à des heures de grande écoute, de la création intellectuelle et artistique et des connaissances. Elles s'attachent, de manière significative, à favoriser le développement et à diffuser des oeuvres originales, audiovisuelles et cinématographiques, d'expression française et européenne. »
La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Notre amendement propose un tronc commun de missions à l'ensemble des sociétés de l'audiovisuel. La création culturelle doit-elle ou non figurer au rang des missions des sociétés publiques de l'audiovisuel ? C'est une vaste question que Jack Ralite a eu l'occasion de développer tout au long de son intervention lors de la discussion générale hier.
A partir du moment où l'on répond positivement à cette question et où le législateur la pose comme un préalable dans les missions du service public, il convient de tout mettre en oeuvre pour permettre à ce dernier de décliner au plus près ce principe.
Qui peut dire aujourd'hui que France Télévision, à travers France 2 et France 3, contribue, comme il serait souhaitable, à favoriser le développement et à diffuser des oeuvres originales, même si, heureusement, des diamants scintillent quelquefois dans l'obscurité ?
Qui peut dire encore, à travers les missions de ces mêmes sociétés, qu'elles concourent à la promotion de notre langue et à la mise en valeur de notre patrimoine culturel ?
Ces missions doivent-elles être du seul ressort d'Arte ?
Il y aurait, d'un côté, une chaîne dont la mission serait, pour l'essentiel, culturelle et, de l'autre, des chaînes du service public chargées de faire concurrence, sur le même terrain, aux opérateurs privés.
N'oublions pas que nos compatriotes consacrent en moyenne trois heures trente par jour à regarder la télévision. Souvenons-nous que la télévision est la première pratique culturelle de nos concitoyens. Dès lors, n'y a-t-il pas une responsabilité publique en matière d'audiovisuel ?
A partir de là, n'y a-t-il par urgence à développer une industrie des programmes à même de réaliser de tels objectifs ?
Notre amendement est donc un rappel des missions des télévisions publiques, et nous nous en remettons à la sagesse de la Haute Assemblée pour son adoption.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, qui est redondant avec la définition des missions du service public figurant à l'article 1er.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Sagesse.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 149, repoussé par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 255, MM. Vergès, Ralite, Renar, Mme Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
A. - De compléter le texte proposé par l'article 2 pour l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986 par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Les programmes de la société nationale de programme, France 2, et de La Cinquième-Arte, sont diffusés intégralement en continu dans les départements, territoires et collectivités territoriales d'outre-mer ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie. Les stations de réseau France outre-mer sont néanmoins autorisées, pendant une période transitoire fixée par le décret, à retransmettre les émissions des autres sociétés nationales de programme et de la société La Cinquième-Arte qui sont mises à leur disposition à titre gratuit. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter in fine l'article 2 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... Les pertes de recettes sont compensées à due concurrence par une cotisation additionnelle à la taxe perçue en application des articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
C. - En conséquence de faire précéder l'article 2 de la mention : « I. - ».
La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Cet amendement rejoint la préoccupation exprimée depuis le début de la discussion de cet article : il s'agit pour nous, en solidarité totale avec notre collègue Paul Vergès, de mettre en oeuvre le principe d'égalité d'accès à l'image pour l'ensemble des citoyens de la République, d'autant que les progrès techniques rendent désormais possible l'application de ce principe, ce qui n'était pas le cas voilà encore une vingtaine d'années.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Est-ce faute de temps et d'approfondissement ? En tout cas, la commission n'a pas bien saisi le sens de cet amendement. Elle demande donc à ses auteurs de bien vouloir le retirer.
Il serait en effet préférable d'en déposer un autre à l'occasion de la deuxième lecture. En attendant, au stade de cette première lecture, la commission serait défavorable à cet amendement s'il était maintenu.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Défavorable.
M. le président. Monsieur Renar, l'amendement est-il maintenu ?
M. Ivan Renar. Monsieur le président, je vais le retirer et suivre le conseil de notre collègue Hugot.
Effectivement, pour parler franchement, la rédaction mérite d'être clarifiée. Mais j'espère que l'ouverture dont vient de faire preuve M. Hugot débouchera, pour la nouvelle rédaction à laquelle il sera confronté, sur un avis favorable !
M. Marcel Charmant. Il ne saurait s'engager jusque-là !
M. Ivan Renar. On peut vivre d'espérance ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 255 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3