Séance du 28 mars 2000







M. le président. La parole est à M. Pelletier, auteur de la question n° 729, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
M. Jacques Pelletier. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, mais je reconnais que ce n'est pas le meilleur mardi pour la poser ! (Sourires.)
Voilà quelques semaines, le rapport Dauriac sur la situation des étudiants nous a vivement interpellés. D'après ce document, de nombreux étudiants seraient dans une position financière difficile et environ 100 000 d'entre eux vivraient au-dessous du seuil de pauvreté.
Cette situation compromet l'égalité des chances, qui est un des fondements de notre République. Afin de la restaurer, le rapport prévoit d'attribuer une allocation d'études de 20 000 francs par an à tous les étudiants qui ne résident pas chez leurs parents, à compter du niveau bac + 3.
Premier acte de la démocratisation de l'enseignement supérieur, le Président de la République avait, dès 1995, prôné « un statut étudiant plus juste et plus généreux que le système actuel des aides, des bourses et des prêts ». En 1997, le Premier ministre, M. Lionel Jospin, allait dans le même sens.
Parallèlement aux difficultés pécuniaires des étudiants de l'enseignement supérieur, l'école, le collège et le lycée souffrent souvent de difficultés liées aux déficits d'encadrement, de soutien ou d'accompagnement.
Cette situation est en rapport avec l'évolution complexe de notre société. La précarité de nombreuses familles ou l'absence d'avenir professionnel pour les jeunes issus des milieux défavorisés en sont des éléments constitutifs. Recenser l'ensemble des problèmes qui touchent nos établissements serait une tâche bien trop éloignée de la thématique de ma question, pourtant ils me paraissent fortement liés à celle-ci. L'avenir de nos enfants dépendra de notre capacité à répondre à ces questions...
Il convient, aujourd'hui, de favoriser l'instauration d'un plus juste équilibre en engageant une réflexion transcendant les appartenances partisanes.
Ne pourrions-nous prévoir l'embauche systématique des étudiants de troisième cycle qui le souhaiteraient pour l'encadrement de nos écoles ? Cette mesure présenterait des avantages, tant pour l'éducation nationale que pour les étudiants.
Pour l'éducation nationale, ce recours permettrait de disposer d'une manne ponctuelle d'emplois de qualité et de compenser les déficits d'encadrement scolaire dans les zones sensibles.
Pour les étudiants, l'emploi en collège ou en lycée à mi-temps ou à tiers-temps, c'est-à-dire dix ou quinze heures par semaine, ne serait en aucun cas préjudiciable à la poursuite de leurs recherches et leur accorderait un revenu « décent ».
Outre la valeur que peut incarner le travail, les étudiants disposeraient d'une première expérience : pédagogie, gestion des conflits, médiation, écoute, encadrement...
Cette solution rétablirait, enfin, l'équité entre les boursiers et ceux qui sont contraints de travailler, souvent dans des conditions inadaptées pour leurs études.
Ainsi, pour les écoles, cette mesure comblerait un certain déficit d'encadrement dénoncé dans de nombreux rapports, favoriserait la médiation entre le jeune et le personnel éducatif et montrerait aux plus jeunes certains modèles de réussite.
Une réflexion sur ce sujet peut-elle être envisagée par les services du ministère de l'éducation nationale ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants. Monsieur le sénateur, vous avez indiqué que nombre d'étudiants sont en situation difficile. C'est malheureusement vrai, et la nation doit avoir le souci constant de prendre en compte ce phénomène, ne serait-ce que pour respecter l'égalité des chances, dont vous avez fait état.
La réponse réside probablement dans la définition d'un nouveau statut de l'étudiant, car des solutions doivent manifestement être trouvées. Vous en envisagez une, fondée sur une réflexion de bon sens, qui appelle au dépassement des clivages et des difficultés traditionnelles.
Votre proposition mérite cependant d'être examinée avec beaucoup d'attention. En effet, la réglementation actuelle qui régit l'emploi des agents non titulaires de l'Etat ne permet pas le recrutement de personnels pour des emplois permanents au-delà d'une certaine limite de temps fixée par les textes et ne répond donc pas à votre souci.
Bref, comme vous le pressentez à travers ces quelques éléments de réponse, monsieur le sénateur, la mise en oeuvre de votre proposition, en dépit de tout l'intérêt qu'elle peut présenter, nécessiterait une très longue réflexion. En effet, au-delà de l'opportunité que représente le recrutement d'étudiants pour assurer l'encadrement dans les écoles, il faudrait envisager une modification des textes en vigueur, en concertation avec d'autres départements ministériels.
Enfin, vous avez indiqué que ce n'était sans doute pas aujourd'hui le meilleur mardi pour poser votre question. Je vous propose donc de la reposer ultérieurement au nouveau responsable de l'éducation nationale, mais, pour l'heure, tels étaient les quelques éléments d'information que je souhaitais vous apporter, tout en mettant bien l'accent sur les difficultés qu'entraînerait la mise en oeuvre de votre proposition.
M. Jacques Pelletier. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Pelletier.
M. Jacques Pelletier. Je remercie M. le secrétaire d'Etat de l'amabilité avec laquelle il répond toujours aux questions que nous lui posons.
Cependant, je reste un peu sur ma faim : je comprends parfaitement que la mesure que je préconise ne puisse être mise en oeuvre par un simple décret et nécessite une longue étude, mais je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous puissiez faire part à votre nouveau collègue chargé de l'éducation nationale, M. Jack Lang, de mes souhaits, qui sont, je crois, ceux de la Haute Assemblée.
Le recrutement d'étudiants de troisième cycle présenterait, à mon avis, divers avantages. En effet, l'une des difficultés de tous les ministres de l'éducation nationale est de trouver des remplaçants auxiliaires, ce qui conduit à engager des maîtres auxiliaires. Au bout d'un certain temps, ces derniers demandent ensuite à être titularisés, ce qui est tout à fait logique : nous connaissons cette situation depuis vingt ans ! En recrutant des étudiants de troisième cycle, le danger de la titularisation disparaîtrait, car les intéressés ont d'autres perspectives.
Cette démarche semble intelligente et intéressante pour le ministère de l'éducation nationale, et je vous demande, monsieur le secrétaire d'Etat, d'en faire état auprès du nouveau ministre de l'éducation nationale. Quoi qu'il en soit, il est certain que, dans quelques mois, je me permettrai de l'interroger à nouveau sur ce sujet.

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