SEANCE DU 20 DECEMBRE 2000


M. le président. « Art. 1er. - L'article L. 234-4 du code rural est ainsi rédigé :
« Art. L. 234-4 . - Dès qu'il est établi que les denrées destinées à l'alimentation humaine issues d'un élevage présentent ou sont susceptibles de présenter un danger pour la santé publique, les vétérinaires inspecteurs habilités en vertu de l'article L. 231-2 ordonnent qu'elles soient détruites ou soumises avant leur mise à la consommation à un contrôle sanitaire ou à un traitement permettant d'éliminer ledit danger.
« Le ministre de l'agriculture fixe les critères permettant de déterminer les élevages dans lesquels ces mesures sont mises en oeuvre.
« Dans ces élevages, les agents mentionnés au premier alinéa peuvent également prescrire les mesures suivantes :
« - la séquestration, le recensement, le marquage de tout ou partie des animaux de l'exploitation ;
« - l'abattage des animaux, leur destruction et celle de leurs produits ;
« - tout traitement des produits ou programme d'assainissement de l'élevage permettant d'éliminer ledit danger, y compris la destruction des aliments ou la limitation des zones de pâturage ;
« - la mise sous surveillance de l'exploitation jusqu'à élimination dudit danger.
« Les élevages et établissements ayant été en relation avec l'exploitation dont il s'agit peuvent être soumis aux mêmes mesures.
« Préalablement à l'exécution de ces mesures, le détenteur ou le propriétaire des produits est mis en mesure de présenter ses observations. »
Par amendement n° 1, M. Emorine, au nom de la commission, propose de compléter le deuxième alinéa du texte présenté par cet article pour l'article L. 234-4 du code rural par les mots : «, ainsi que les conditions d'indemnisation des propriétaires ou des détenteurs des animaux, des denrées d'origine animale ou des produits, dans l'hypothèse où, après analyse, ceux-ci se sont avérés sains.».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 1er, qui modifie l'article 234-4 du code rural, vise à élargir la gamme des mesures que les vétérinaires inspecteurs sont habilités à prendre lorsqu'ils sont en présence de denrées animales destinées à la consommation humaine et comportant des risques pour la santé publique.
Aux termes de l'article 234-4 du code rural, les vétérinaires inspecteurs peuvent soumettre toute denrée animale suspecte à un traitement visant à éliminer les éventuels risques sanitaires, voire en ordonner la destruction. L'élevage d'où elle provient peut, en outre, se voir imposer des mesures particulières d'assainissement, dans les conditions prévues par le ministre de l'agriculture.
Les nouvelles mesures que les inspecteurs vétérinaires sont habilités à prendre concernent principalement les élevages d'où sont issues les denrées à risque : il s'agit de la séquestration, du recensement, du marquage, voire de l'abattage des animaux et de la destruction de leurs produits.
L'article 1er prévoit également que le programme d'assainissement de l'élevage peut comprendre la destruction des aliments pour animaux et la limitation des zones de pâturage. Enfin, les denrées animales susceptibles de présenter un risque pour la santé publique devront subir un contrôle sanitaire avant d'être autorisées à la consommation.
Par ailleurs, les élevages et les établissements ayant été en contact avec l'élevage d'où proviennent les denrées en cause pourront être soumis aux mêmes mesures.
En première lecture, le Sénat a adopté un amendement prévoyant que le ministre de l'agriculture détermine les conditions dans lesquelles sont indemnisées les personnes ayant subi un préjudice du fait de l'application de ces mesures sanitaires, alors que le produit en cause s'était, en définitive, révélé sain. En effet, la multiplication des alertes alimentaires conduit à la mise en oeuvre de plus en plus fréquente de ces mesures préventives. Or, quand, à la suite d'analyses, les produits concernés sont mis hors de cause, le préjudice subi reste à la charge des producteurs, en particulier des éleveurs. Le versement de compensation est parfois décidé, mais de manière aléatoire, et surtout tardive, comme ce fut le cas dans l'affaire des poulets susceptibles d'être contaminés à la dioxine.
Sur la demande du ministre de l'agriculture, qui a fait valoir que l'inscription dans la loi du principe de l'indemnisation pourrait constituer un frein à la mise en oeuvre de mesures sanitaires et indiqué, par ailleurs, qu'il attendait les conclusions de travaux menés sur ce sujet, l'Assemblée nationale a supprimé, en deuxième lecture, cette disposition.
Sans contester la légitimité des mesures de police sanitaire imposées à des élevages susceptibles de présenter un risque pour la santé publique, la commission des affaires économiques a estimé injuste de laisser à la charge des éleveurs le préjudice subi du fait de mesures telles que la mise sous séquestre d'un animal ou la destruction de produits, alors que l'animal ou le produit visés sont finalement reconnus sains.
Je vous propose par conséquent de rétablir le principe de compensation, adopté par le Sénat en première lecture, en prévoyant une indemnisation du préjudice subi du fait de mesures prises à l'égard d'animaux, de denrées animales ou de produits d'élevage qui, après analyse, sont finalement mis hors de cause.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le rapporteur, j'invoque l'article 40 de la Constitution car la proposition que vous formulez crée une charge supplémentaire pour le budget de l'Etat qui est indéniable et qui n'est pas financée. Cela étant, vos préoccuptations sont tout à fait légitimes et je suis parfaitement d'accord avec les fondements de votre démarche, et vous le savez.
Votre préoccupation est légitime, car le problème que vous posez est réel. Il faudra y répondre, et le plus vite sera le mieux. Je m'y engage, et je voudrais vraiment vous convaincre de ma bonne foi sur ce point.
Toutefois, les travaux du Conseil national de l'alimentation, notamment la réflexion menée par M. Babusiaux sur l'assurance revenus, n'étant pas terminés, je suis obligé d'invoquer l'article 40 de la Constitution pour franchir l'étape d'aujourd'hui.
M. le président. Monsieur Ostermann, l'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. Joseph Ostermann, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je considère que cette proposition est totalement légitime et je souhaite, monsieur le ministre, que vous trouviez rapidement une solution aux préoccupations qui viennent d'être exprimées par notre rapporteur.
Néanmoins, je dois reconnaître que l'article 40 de la Constitution s'applique.
M. le président. L'article 40 étant applicable, l'amendement n° 1 n'est pas recevable.
Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 10