SEANCE DU 6 FEVRIER 2001


M. le président. La parole est à M. Neuwirth, auteur de la question n° 1000, adressée à Mme le secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.
M. Gérard Cornu. Surtout, ne parlez pas d'Avignon ! (Sourires.)
M. Lucien Neuwirth. Madame la ministre, je tiens à vous dire que, comme mon collègue Charles Descours, j'apprécie que vous veniez personnellement entendre ma question orale et y répondre.
Si j'ai voulu intervenir ce matin, c'est pour témoigner d'une réalité devenue insupportable dans mon département de la Loire : le sous-équipement de la cancérologie en appareils de radiothérapie participant aux traitements « curatifs ».
Souvenons-nous que, en cancérologie, un principe se vérifie tous les jours : plus la maladie est détectée tôt, plus on augmente les chances de guérison.
Quelle est la situation ? Le manque de moyens dans les hôpitaux publics rend impossible la nécessaire remise à niveau du plateau technique de radiothérapie. Le dernier investissement date de 1995 au centre hospitalier régional universitaire, le CHRU, du site de Bellevue. Dans ce CHRU, les deux appareils accélérateurs linéaires, ont - écoutez bien ! - dix-huit ans d'âge et tombent très souvent en panne. A cela s'ajoute la saturation des autres appareils en service à la clinique mutualiste.
A Saint-Etienne, trois appareils de radiothérapie sur quatre attendent encore leur remplacement.
Deux nouveau accélérateurs linéaires avaient été promis pour fin 2000, pour remplacer les appareils de radiothérapie déficients et actuellement totalement saturés. Ils ne sont malheureusement pas au rendez-vous.
Le projet d'institut de cancérologie de la Loire, ou ICL, qui doit regrouper les moyens de lutte anticancer du CHRU de Saint-Etienne et ceux de la Mutualité de la Loire - oncologie médicale et radiothérapie - prévoyait de pouvoir disposer de quatre appareils de radiothérapie. Mais le dossier est bloqué, et il ne semble pas que cet institut puisse voir le jour avant 2004, voire 2005. Ce regroupement est pour l'instant l'association de deux misères.
Laissez-moi prendre l'exemple du traitement du cancer de la prostate dans le département de la Loire : le CHRU de Saint-Etienne n'est pas en mesure de traiter les patients suivant les derniers protocoles de radiothérapie et se voit contraint d'envoyer ses malades sur Lyon et même sur Grenoble. Une telle situation est désespérante dans un département de plus de 728 000 habitants et illustre les disparités flagrantes existant entre les patients de départements différents à l'intérieur d'une même région.
La perte, le 31 décembre 2000, des deux seules habilitations de chambre de curiethérapie du département de la Loire, permettant l'implantation de sources radioactives dans le site même de la tumeur, constitue le dernier coup de grâce. C'est la perte de moyens pour traiter les cancers de 200 des 2000 nouveaux patients traités tous les ans par les unités de radiothérapie du département.
La direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Loire propose d'attendre la construction du nouvel institut de cancérologie pour « récupérer cette activité dans le département ». Ce projet d'institut, qui a trop traîné, semble bien à l'origine du blocage de tout investissement dans les différents plateaux techniques.
Je prendrai un dernier exemple : la nomenclature des actes de radiothérapie date de 1972, du temps de la bombe au cobalt, et le nouveau catalogue des actes médicaux comme la nouvelle nomenclature sont en préparation depuis cinq ans.
A la souffrance et à la difficulté de vivre cette maladie ne doit pas s'ajouter l'impuissance des professionnels, oncologues, radiothérapeutes, devant des équipements obsolètes ou complètement absents.
Madame la ministre, la situation dans le département de la Loire est tellement alarmante que je voudrais savoir non pas si, mais quand vous comptez pouvoir y remédier.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le sénateur, la région Rhône-Alpes a fait de la cancérologie l'une de ses priorités d'action dans le cadre du schéma régional d'organisation sanitaire 1999-2004.
Le département de la Loire compte actuellement trois structures réalisant de la radiothérapie, qui comptent un total de cinq appareils : le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, avec deux accélérateurs, la clinique mutualiste de la Digonnière, avec deux accélérateurs, et le centre hospitalier général de Roanne, avec un accélérateur. Ce sont des appareils dont les dates d'installation remontent pour la plus ancienne à 1985 et pour la plus récente à 1994.
Ces appareils ne disposent pas de scanners dédiés à la radiothérapie, mais ils disposent toutefois d'un accès aux plateaux d'imagerie de scanner, et le service de radiothérapie du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne dispose d'un simulateur scanner pour la réalisation des traitements avec des logiciels performants pour la réalisation de ces simulations.
Le département de la Loire possède également trois autorisations d'imagerie par résonance magnétique, ou IRM : deux à Saint-Etienne et une à Roanne. Une quatrième demande a fait l'objet d'un avis favorable du Conseil national d'organisation sanitaire et sociale en janvier 2001, et mon ministère sera donc rapidement amené à prendre une décision autorisant l'installation d'une IRM supplémentaire.
En ce qui qui concerne l'organisation des soins en cancérologie dans le département de la Loire, elle est marquée par le projet de l'institut de cancérologie de la Loire, nouvel établissement de santé regroupant les activités de cancérologie de la clinique mutualiste de la Digonnière et du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne. Ce projet essentiel pour une meilleure organisation des soins dans le département a été mis au point par les deux établissements concernés au début de l'année 2000 et a fait l'objet d'un accord de l'agence régionale de l'hospitalisation le 8 mars dernier.
Ce dossier a donné lieu à une demande d'aide à l'investissement dans le cadre de la procédure du fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux, le FIMHO, qui doit recevoir un avis favorable pour une attribution de moyens de l'ordre de 20 millions de francs. L'agence régionale de l'hospitalisation s'est également engagée en vue d'équilibrer financièrement ce projet, pour un montant de 4,2 millions de francs.
La mise en place de l'ICL va donc conduire à une amélioration certaine des soins en cancérologie dans le département de la Loire. Il permettra notamment de fédérer les activités de radiothérapie et d'oncologie médicale des deux établissements, de remplacer deux accélérateurs de particules et de conditionner un troisième appareil pour répondre à la nécessité de moderniser ces équipements, de réaliser, grâce au renouvellement récent de l'appareil de scintigraphie du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, des examens de médecine nucléaire, et de mettre en conformité les deux chambres de curiethérapie actuellement installées sur le site de la clinique mutualiste.
Je crois, par conséquent, que nous pourrons ainsi atteindre les objectifs d'amélioration de la prise en charge des patients atteints de pathologies cancéreuses fixés dans le cadre du plan national contre le cancer 2000-2005, auquel j'attache, comme vous le savez, une très grande importance.
M. Lucien Neuwirth. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth. Madame la ministre, vous avez indiqué à plusieurs reprises, dans la réponse que vous venez de m'apporter, que le département de la Loire « va recevoir » ou qu'il « doit recevoir ». J'observe cependant qu'il ne reçoit pas !
L'institut de cancérologie de la Loire a été créé par un décret de l'agence régionale de l'hospitalisation en date du 26 octobre 1997. Son dossier est toujours en cours d'examen par le FIMHO, avec une participation de l'Etat qui ne devrait d'ailleurs atteindre que 10 %. Cet institut, dans l'hypothèse d'une ouverture à la fin de 2003, cache, en réalité, la misère de la cancérologie dans le département de la Loire, puisque - écoutez bien, car c'est un chiffre qui ne vous a pas été donné, madame la ministre ! - il aura bloqué tout investissement dans les différents plateaux techniques de 1995 jusqu'à la fin de 2003, c'est-à-dire pendant huit années.
Sa création et son fonctionnement sont d'ores et déjà hypothéqués, car la réunion de l'ensemble des sous-dotations des participants au syndicat ne constituera pas une juste dotation de moyens pour un établissement prenant en charge 2 000 nouveaux patients chaque année et traitant 8 000 anciens patients. Autrement dit, la situation est réellement bloquée dans la Loire, qui, toujours, « doit recevoir » et « va recevoir ».
S'agissant des IRM, les autorisations ont été données, certes. Mais voilà combien d'années ? Et quand allons-nous recevoir ces équipements ?

SITUATION DES MASSEURS-KINÉSITHÉRAPEUTES