SEANCE DU 12 JUIN 2001


M. le président. « Art. 18. - I. - Les procédures particulières permettant d'assurer une affectation au sein du budget général sont la procédure de fonds de concours et la procédure de rétablissement de crédits.
« II. - Les fonds de concours sont constitués, d'une part, par des fonds à caractère non fiscal versés par des personnes morales ou physiques pour concourir avec ceux de l'Etat à des dépenses d'intérêt public et, d'autre part, par les produits de legs et donations attribués à l'Etat. Ils sont directement portés en recettes au budget général. Un crédit supplémentaire de même montant est ouvert par arrêté du ministre chargé des finances au ministre intéressé. L'emploi des fonds doit être conforme à l'intention de la partie versante ou du donateur. A cette fin, un décret en Conseil d'Etat définit les règles d'utilisation des crédits ouverts par voie de fonds de concours.
« Des décrets en Conseil d'Etat pris sur le rapport du ministre chargé des finances peuvent assimiler à des fonds de concours les recettes tirées de la rémunération de prestations régulièrement fournies par un service de l'Etat. Les crédits ouverts dans le cadre de la procédure de fonds de concours sont affectés audit service. L'affectation de la recette au-delà du 31 décembre de l'année de son établissement doit être autorisée chaque année par une loi de finances.
« III. - Peuvent donner lieu à rétablissement de crédits dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé des finances :
« 1° Les recettes provenant de la restitution au Trésor de sommes payées indûment ou à titre provisoire sur crédits budgétaires ;
« 2° Les recettes provenant de cessions entre services de l'Etat ayant donné lieu à paiement sur crédits budgétaires. »
Par amendement n° 51, M. Lambert, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le I de cet article :
I. - Les procédures particulières permettant d'assurer une affectation au sein du budget général, d'un budget annexe ou d'un compte spécial sont la procédure de fonds de concours, la procédure d'attribution de produits et la procédure de rétablissement de crédits. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. Nous avons déjà discuté longuement d'un tel sujet. Mais il est vrai que les orateurs n'étaient pas les mêmes.
L'amendement n° 51 est rédactionnel.
J'apporterai toutefois une précision pour être sûr que le Sénat comprenne bien l'objectif qui le sous-tend.Cet amendement tend à définir les procédures qui permettent d'affecter des recettes au sein du budget général, des budgets annexes et des comptes spéciaux. En effet, le texte de l'Assemblée nationale semble oublier que les affectations de recettes peuvent bénéficier à ces deux catégories d'entités budgétaires.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 51, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 52, M. Lambert, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le premier alinéa du II de l'article 18.
« Les fonds de concours sont constitués, d'une part, par des fonds à caractère non fiscal versés par des personnes morales ou physiques pour concourir à des dépenses d'intérêt public et, d'autre part, par les produits de legs et donations attribués à l'Etat. Les recettes des fonds de concours sont prévues et évaluées par la loi de finances qui ouvre les crédits correspondants. Les dépenses afférentes à ces crédits ne peuvent être engagées par le ministre intéressé qu'une fois opéré le rattachement, au cours de l'exercice, de la recette du fonds de concours. Ce rattachement est réalisé par arrêté du ministre chargé des finances, dès le versement effectif des fonds. L'emploi des fonds doit être conforme à l'intention de la partie versante. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 191 rectifié ter , présenté par M. Charasse et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant à remplacer les trois dernières phrases du texte proposé par l'amendement n° 52 pour le premier alinéa du II de l'article 18 par les cinq phrases suivantes : « Ils sont directement inscrits en recettes au budget général. Un crédit de même montant est ouvert par arrêté conjoint du ministre chargé des finances et du ministre intéressé. L'emploi des fonds doit être conforme à l'intention de la partie versante. Un décret en Conseil d'Etat fixe les règles d'utilisation des crédits ouverts en contrepartie des fonds de concours. Les opérations effectuées pendant l'exercice en recettes et en dépenses au titre des fonds de concours sont notifiées au fur et à mesure de leur intervention aux commissions des finances des deux assemblées et sont prises en compte en tant que de besoin dans les lois de finances rectificatives. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 52.
M. Alain Lambert, rapporteur. Dans le texte initial de sa proposition, l'Assemblée nationale avait souhaité que les fonds de concours soient prévus et autorisés par la loi de finances de l'année. Les informations recueillies au cours de ses travaux l'ont convaincue que cette voie était en pratique difficilement envisageable, les recettes rattachées par voie de fonds de concours présentant, selon elle, davantage que les recettes fiscales ou non fiscales évaluées en loi de finances, un caractère aléatoire peu compatible avec leur prise en compte au titre de l'équilibre budgétaire de l'année concernée.
L'Assemblée nationale a donc choisi de proposer de conserver l'actuelle procédure de rattachement des fonds de concours par nature prévus par l'article 19 de l'ordonnance du 2 janvier 1959, tout en prévoyant que leur montant soit non pas prévu mais estimé pour l'année en cours.
En l'état de sa réflexion, la commission des finances ne partage pas cette conviction. Aussi souhaite-t-elle que les fonds de concours soient évalués en recettes et en crédits dès le projet de loi de finances de l'année. La Cour des comptes estime d'ailleurs que l'essentiel des fonds de concours est prévisible. Je tiens à la disposition de Mme la secrétaire d'Etat, qui, bien sûr, l'a également dans sa gibecière, la réponse de la Cour des comptes sur le projet de loi de règlement de 1993 : elle y précise que la recette d'un fonds de concours est prévisible.
Toutefois, afin de tenir compte du caractère aléatoire de ces recettes, caractère présenté à tort comme ayant plus de conséquences que les aléas entourant les autres recettes de l'Etat, je vous propose de conditionner la consommation des crédits ainsi ouverts au rattachement effectif de la recette correspondante en exécution.
Je crains, madame la secrétaire d'Etat, que vous ne soyez pas favorable à cette proposition. Je tiens néanmoins à vous dire que nous tenons compte, dans notre rédaction, du caractère aléatoire de la recette en conditionnant la consommation des crédits au rattachement effectif de ladite recette.
M. le président. La parole est à M. Charasse, pour défendre le sous-amendement n° 191 rectifié ter .
M. Michel Charasse. Ce que vient de dire M. le rapporteur pour défendre l'amendement n° 52, c'est ce que nous espérons tous depuis de très nombreuses années. Cette affaire de la gestion des fonds de concours a très souvent fait l'objet, depuis vingt ou trente ans, de critiques au sein du Parlement, et parfois d'observations de la Cour des comptes. Jamais le Gouvernement n'y a donné suite, pour une raison très simple : ce que nous souhaitons - et l'amendement de la commission le résume parfaitement - est irréaliste et inapplicable !
Je voudrais qu'on me dise, mes chers collègues, comment on peut savoir, en septembre, au moment où est bouclé le projet de loi de finances si le fonds de concours promis à l'Etat pour la ville d'Alençon pour améliorer une route nationale qui la dessert sera versé dans le courant de l'exercice suivant, ou s'il sera versé, dès lors que le rythme de versement dépend de l'avancée des études des bureaux d'études des Ponts-et-Chaussées, éventuellement des services auxquels cette étude a été sous-traitée. C'est impossible !
Certes, on peut se faire plaisir - et l'Assemblée nationale nous y incite souvent fortement - en disant : « sont prévus et évalués ». Cher président Lambert, si c'est ce que vous voulez, dites-le : le Gouvernement prévoira et évaluera en septembre ce qu'il peut, c'est-à-dire pas grand-chose, voire trois fois rien.
Je pense que l'on n'a pas intérêt à encombrer ce débat, ni surtout la loi organique, par un certain nombre de formalités dont nous savons qu'elles ne sont pas réalistes et qu'elles ne sont pas applicables.
Jusqu'à ces dernières semaines, j'étais vice-président de mon conseil général chargé des finances. Dans le cadre du contrat de plan, nous versons, hélas ! un certain nombre de fonds de concours pour les routes. J'ai toujours été incapable d'inscrire chaque année les crédits nécessaires dans mon budget, parce que, lorsque j'interrogeais la DDE pour savoir quand je devais verser lesdites sommes, elle me répondait : « Pour le moment, je ne sais pas. » A partir du moment où le bénéficiaire des fonds répond à la partie versante qu'il ne sait pas quand il faut lui verser les fonds, comment voulez-vous que le même bénéficiaire de ces fonds vienne expliquer autre chose que : « Je ne peux pas dire quand, mais madame le secrétaire d'Etat, vous n'avez qu'à inscrire telle somme, à telle date, dans votre projet de budget » ?
Tout cela ne me paraît pas réaliste !
En revanche, il est un souci que je peux comprendre. Ces fonds de concours représentent en fin d'année, dans la loi de règlement, des sommes considérables, et tout cela se passe sans que le Parlement en soit informé, sauf au final, quand c'est fait.
C'est pourquoi, dans mon sous-amendement, je propose qu'au fur et à mesure des opérations d'encaissement et de rattachement, sur lesquelles M. Lambert a raison d'insister - d'ailleurs, je ne vois pas comment on peut faire une dépense sur fonds de concours tant qu'elle n'a pas été rattachée, car cela signifierait que l'on exécuterait une dépense sans avoir les crédits - je propose, dis-je, qu'au fur et à mesure des opérations les commissions des finances des deux assemblées soient informées. Est-ce possible ? Est-ce réaliste ? Je n'en sais rien ! Les formalités sont peut-être compliquées. Mais, entre rien du tout aujourd'hui en cours de gestion et un peu d'informations en cours d'année, on doit pouvoir trouver un moyen terme !
C'est la raison pour laquelle je présente ce sous-amendement n° 191 rectifié ter .
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. La plaidoirie de Michel Charasse m'a convaincu que notre idée était bonne.
Il a pris, à tort, l'exemple de la ville d'Alençon, qui n'est pas significatif du point de vue des investissements au regard du budget de l'Etat.
M. Michel Charasse. C'était pour vous faire plaisir !
M. Alain Lambert, rapporteur. J'ai apprécié, monsieur Charasse, que vous souligniez les mérites de la ville d'Alençon ! Mais la ville de Marseille eût été plus représentative dans un cas comme celui-ci : le conseil municipal de Marseille, par exemple, ou le conseil communautaire, inscrit à son budget un fonds de concours pour une réalisation... un immense investissement... une infrastructure considérale, que l'Etat aura à financer. Ce qui est merveilleux, c'est que la proposition de Michel Charasse vise à dire que cela ne doit pas figurer dans le budget de l'Etat ! Mais à force de ne pas retrouver les participations de l'Etat dans le budget, les partenaires finissent par ne plus savoir où ils en sont, et c'est ainsi que les projets sont réalisés avec tant de retard !
Comme toujours, M. Charasse a eu la loyauté d'indiquer que les sommes en jeu étaient considérables. Ce n'est rien moins que plusieurs dizaines de milliards de francs, mes chers collègues !
M. Michel Charasse. Eh oui !
M. Yves Fréville. Tout à fait !
M. Alain Lambert, rapporteur. Je ne dis pas qu'il faut les inscrire pour qu'ils soient consommés ; je dis simplement qu'ils sont prévisibles et que l'on peut les indiquer. Il est bon que le Parlement connaisse le montant des fonds de concours.
Michel Charasse a, de manière extraordinairement distinguée, sans froisser l'amour-propre éventuel de l'auteur de l'amendement, déposé un sous-amendement dont l'objet vise, finalement, à vider cet amendement de tout son sens sans le dire.
M. Michel Charasse. Il est inapplicable !
M. Alain Lambert, rapporteur. Il comprendra donc que je ne puisse y donner un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 52 et sur le sous-amendement n° 191 rectifié ter ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Comme M. Lambert l'a deviné, je ne suis pas favorable à cet amendement n° 52, qui comporte deux éléments : il prévoit, d'une part, que les fonds de concours sont prévus et évalués en loi de finances initiale et, d'autre part, que les crédits correspondants sont ouverts dès la loi de finances initiale.
S'agissant du premier élément, les fonds de concours sont, certes, prévisibles, mais avec quelle marge d'erreur ! Si je prends l'exemple de l'année 1999, l'écart a été supérieur à 8 % entre la prévision et l'exécution sur un montant total de 42 milliards de francs. Le Parlement bénéficie d'ores et déjà d'une information importante sur les rattachements qui sont opérés les années précédentes au titre des prévisions dans le cadre de l'annexe jaune qui est consacrée aux fonds de concours.
Le second élément de l'amendement consiste à inscrire désormais deux catégories de crédits en loi de finances : les crédits habituels et des crédits que je qualifierai de « virtuels » puisqu'ils ne pourraient être utilisés, en quelque sorte, qu'en cas d'encaissement de la recette, obligeant ainsi à un suivi spécifique, dans deux systèmes différents, de chacune de ces catégories. Nous nous heurtons là à un problème de gestion d'un tel dispositif. En pratique, cela signifierait que les documents budgétaires, comme les systèmes de mise en oeuvre de l'exécution, devraient distinguer, au sein de programmes dont je rappelle qu'ils sont fongibles, deux catégories de crédits, d'en assurer le suivi parallèle et de n'en accepter la fongibilité qu'à due proportion des encaissements de recettes, ce qui, d'une certaine manière, est une atteinte au principe même de fongibilité. Le sort des crédits des fonds de concours qui n'auraient pas été couverts par des recettes n'est d'ailleurs pas déterminé.
La lourdeur de cette procédure me paraît tout à fait excessive au regard de l'objectif visé.
J'ajoute que les dépenses afférentes à ces crédits ne peuvent être engagées qu'une fois opéré le rattachement du fonds de concours. Cela veut dire qu'il faudrait ne lancer les opérations d'investissement cofinancées qu'après le versement de la contribution du tiers, ce qui reviendrait en quelque sorte à renoncer à une pratique constante et, de mon point de vue, justifiée, selon laquelle, actuellement, l'opération est lancée dès que le tiers s'engage à y contribuer, cette contribution n'étant versée, comme le rappelait Michel Charasse, qu'en fonction de l'avancement de l'opération au plus près de ce que l'on peut prévoir - c'est pourquoi, parfois, on ne prévoit pas bien.
C'est aussi ce qui fait que les parties versantes, qu'il s'agisse des régions, des départements, pour les opérations routières, ou des communes, pour les monuments historiques, n'ont pas à faire d'avance à l'Etat. Donc, revenir sur ce principe conduirait aussi à revenir sur le fait que, aujourd'hui, les collectivités locales ne font jamais d'avance à l'Etat.
Par conséquent, je ne puis qu'être très défavorable à l'amendement n° 52.
Pour ce qui est du sous-amendement n° 191 rectifié ter , je suis favorable à sa première partie. En revanche, sa seconde partie, qui tend à instituer un mécanisme de notification des opérations de recettes et de dépenses en cours de gestion, introduit une procédure qui me paraît très lourde.
Pour votre information, nous avons procédé, l'an dernier, à 2 070 rattachements de recettes, représentant l'équivalent d'une centaine de pages au Journal officiel. Est-ce véritablement cela que l'on souhaite faire ? Je n'en suis pas sûre.
Pour autant, faut-il ne rien faire ? Certainement non, et c'est pourquoi je suggère que, pour améliorer l'information du Parlement, les recettes de fonds de concours fassent désormais l'objet d'une évaluation par programme qui serait jointe à la loi de finances de l'année.
Et si M. Charasse voulait bien substituer une telle disposition à la dernière phrase de son sous-amendement, je pourrais accepter ce dernier tout en maintenant l'avis défavorable sur l'amendement n° 52.
M. le président. Acceptez-vous la suggestion de Mme le secrétaire d'Etat, monsieur Charasse ?
M. Michel Charasse. Je crains de n'avoir pas compris ce que Mme le secrétaire d'Etat propose très précisément.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je propose de remplacer la dernière phrase du sous-amendement n° 191 rectifié ter par la phrase suivante : « A titre d'information, les recettes des fonds de concours font l'objet d'une évaluation par programme jointe au projet de loi de finances de l'année. »
M. le président. Acceptez-vous cette modification, monsieur Charasse ?
M. Michel Charasse. Je suis prêt à l'accepter, mais il me paraîtrait alors plus logique, puisque le Gouvernement accepte mon sous-amendement ainsi rectifié, qui affecte l'amendement n° 52, qu'il soit également favorable à ce dernier !
Quoi qu'il en soit, j'accepte la modification suggérée par le Gouvernement.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 191 rectifié quater , présenté par M. Charasse et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant à remplacer les trois dernières phrases du texte proposé par l'amendement n° 52 pour le premier alinéa du II de l'article 18 par les cinq phrases suivantes :
« Ils sont directement inscrits en recettes au budget général. Un crédit de même montant est ouvert par arrêté conjoint du ministre chargé des finances et du ministre intéressé. L'emploi des fonds doit être conforme à l'intention de la partie versante. Un décret en Conseil d'Etat fixe les règles d'utilisation des crédits ouverts en contrepartie des fonds de concours. A titre d'information, les recettes des fonds de concours font l'objet d'une évaluation par programme jointe au projet de loi de finances de l'année. »
M. Alain Lambert, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. Il y a là 70 milliards de francs sur lesquels, me semble-t-il, le Parlement doit pouvoir être éclairé !
Je dois dire que la détermination avec laquelle le Gouvernement s'oppose à cette proposition me rend attentif.
Mme le secrétaire d'Etat nous dit qu'on peut se tromper, et elle choisit 1999, année qui n'était pas favorable à la sincérité des comptes. On s'était trompé de 40 milliards de francs sur les recettes ; on peut donc, finalement, accepter cet aléa de 3,2 milliards de francs sur des fonds de concours !
Mme le secrétaire d'Etat, s'exprimant tout à l'heure sur le sous-amendement de M. Charasse a fini par faire une ouverture. Mais, plutôt que d'improviser une rédaction, je préfère que l'on mette à profit la navette pour améliorer le texte de la commission, qui me paraît être sur la bonne piste. Sans doute son texte est-il perfectible, mais il faut qu'elle marque solennellement sa volonté d'y voir clair.
Au début de la discussion, c'était quasiment impossible ; maintenant on voit bien, en y travaillant de manière un peu plus approfondie, que cela devient possible au niveau des programmes.
Voilà ce qui me conduit à maintenir à la fois notre amendement et notre avis défavorable sur le sous-amendement de M. Charasse, même rectifié.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Il faut que les choses soient claires : je maintiens mon opposition à l'amendement, en dépit de mon accord sur le sous-amendement, dans la mesure où, comme je l'indiquais en m'exprimant sur l'amendement, il y a deux sujets.
Il y a, d'une part, la question de l'évaluation des fonds de concours et de leur présentation dans la loi de finances initiale ; il y a, d'autre part, la question de l'inscription en crédits dans la loi de finances initiale des crédits qui sont la contrepartie des fonds de concours attendus mais dont on n'est pas tout à fait sûr qu'ils viendront en exécution, en recettes dans le budget de l'Etat.
C'est pour cette seconde raison que je maintiens mon opposition à l'amendement de la commission. Mais j'entends bien l'invitation de M. le président de la commission à en rediscuter un peu plus tard.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 191 rectifié quater.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Je ne sais pas encore si je maintiendrai ou non mon sous-amendement ; je le dirai en conclusion.
De toute façon, il s'agit de sous-amender un amendement que, même ainsi modifié, le ministre n'accepte pas. C'est donc, comme l'a dit M. le président Lambert, un texte qui va faire l'objet d'un dialogue pendant la navette. Je ne vois pas comment on peut faire autrement.
Alors, ce que je souhaiterais, à l'occasion de ce dialogue et de cette réflexion qui vont s'engager ici et à l'Assemblée nationale, c'est que l'on essaie d'être vraiment réaliste, de coller un peu plus à la réalité.
J'entends bien, cher président Lambert, qu'il s'agit là de 70 milliards de francs. Mais, en l'occurrence, on ne discute pas sur le montant ; on discute sur ce qui est prévisible au mois de septembre pour l'année suivante et que l'on est incapable d'inscrire, sauf à inscrire n'importe quoi.
Or vous ne pouvez pas demander, dans les premiers articles du texte, que la sincérité soit la régle de la présentation des comptes de l'Etat et accepter que, pour 70 milliards de francs - ce n'est tout de même pas rien ! - il n'y ait, nous le savons parfaitement les uns et les autres, aucune sincérité parce que la prévision sera trop aléatoire, évaluative, au doigt mouillé !
J'ajoute qu'il faudra aussi, pendant la navette, régler un autre problème, celui du classement des dépenses.
Comment classera-t-on ces dépenses ? Seront-elles des dépenses de l'Etat ou non ? Lorsque la loi de règlement retrace ces dépenses de l'Etat, on ne s'occupe plus de savoir quel était leur montant, leur pourcentage, etc. En revanche, la notion de dépenses de l'Etat apparaît - ce n'est pas M. le rapporteur général qui nous dira le contraire ! - au stade du projet de loi de finances : on regarde la progression des dépenses de l'Etat.
Or de quoi s'agit-il ? De fonds de concours, c'est-à-dire de versements qui sont faits à l'Etat pour faire quelque chose qui relève de sa compétence, mais que l'Etat n'a pas forcément l'intention de faire s'il ne reçoit pas d'aide extérieure. Il serait tout de même un peu « raide » de lui imputer tous ces versements en dépenses !
On voit comment cela se passe dans les contrats de plan, où l'on incite l'Etat à dépenser pour les routes nationales, pour les lycées, pour les universités,... que sais-je encore ? En réalité, on le pousse à la dépense en lui disant qu'on va lui donner un coup de main, qu'on va lui verser, par exemple, 50 millions de francs et qu'il fera le reste.
Je souhaite donc, monsieur le rapporteur, qu'il y ait une réflexion sur ce point pour qu'on sache exactement, quel que soit le texte qui sera adopté, comment ces dépenses seront classées.
En 2006, lorsqu'on appliquerait - si nous finissons par la voter ! - la loi organique pour la première fois, les dépenses de l'Etat augmenteraient, avec cet amendement de 70 milliards de francs de l'époque d'un seul coup. Vous imaginez ce qui se passerait si l'on ne donnait pas quelques explications préalables ou si l'on ne faisait pas des distinctions un peu subtiles !
Alors même qu'en matière de recettes on prend, par le biais des prélèvements sur recettes, que vous avez encouragé à inscrire dans le texte, la précaution de distinguer ce que l'Etat perçoit pour son propre compte et ce qu'il perçoit pour le compte de tiers, on ne ferait pas cette même distinction pour les dépenses, au risque de tromper l'opinion publique, les observateurs, les marchés, les gens de mauvaise foi, les critiques, etc. ! Et l'on sait très bien que, puissant ou misérable, dans l'opposition ou dans la majorité, il y a des gens de mauvaise foi des deux côtés !
Cela étant dit, je retire provisoirement le sous-amendement n° 191 rectifié quater.
M. le président. Le sous-amendement n° 191 rectifié quater est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 52.
M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Je voterai l'amendement de la commission.
Le budget est à la fois un acte de prévision et un acte d'autorisation.
Je reconnais l'existence d'un problème sur le plan de l'autorisation ; il y a là une difficulté pour l'inscription en loi de finances initiale des fonds de concours qui devra être levée lors de la navette.
Mais le budget est aussi un acte de prévision, mes chers collègues, et nous ne pouvons pas faire en sorte que, sur des montants aussi importants que les investissements, financés sur fonds de concours, les retraites des fonctionnaires des PTT, les fonds européens, le budget soit muet.
Par conséquent, il me paraît tout à fait indispensable que, dès le vote de l'article d'équilibre, nous voyions affichés en recettes et en dépenses les 70 milliards de francs dont il est question.
Je dois dire, madame le secrétaire d'Etat, que vous sous-estimez votre administration. Vous avez peut-être pris un mauvais exemple en vous fondant sur l'année 1999, car, maintenant, on voit apparaître dans le « jaune » les prévisions de fonds de concours, et, ma foi, je serais heureux que beaucoup d'autres chapitres budgétaires bénéficient d'une qualité de la prévision identique !
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Je voterai, moi aussi, cet excellent amendement.
Il est important que la prévision englobe bien l'ensemble des ressources que l'on peut cerner avec une certitude suffisante lors de l'élaboration du document budgétaire.
L'exemple du partenariat avec les collectivités territoriales est un bon exemple, tout comme celui des universités. En effet, il s'agit bien de dépenses qui sont menées sous la maîtrise d'ouvrage de l'Etat avec l'argent de l'Etat, mais aussi avec l'argent des autres. C'est donc bien le tout qui forme la dépense de l'Etat, quelle que soit l'origine du financement.
M. Michel Charasse. Ah non !
M. Philippe Marini. Dès lors que c'est sous la maîtrise d'ouvrage de l'Etat et dès lors que l'Université appartient à l'Etat, les investissements qui y sont faits représentent une dépense de l'Etat qui doit être prévue en tant que telle, avec la mention de la dépense et la mention des origines de ressources. Sinon, nous sommes dans la confusion la plus complète.
Il convient donc de voter cet amendement, en attendant sans doute d'affiner sa rédaction, car il est un aspect peut être un peu trop contraignant, celui qui concerne le mode de rattachement de la ressource. Faut-il attendre la constatation de la recette pour engager la dépense ? Je ne suis pas certain que cette modalité très rigide soit toujours opportune parce qu'elle conduit, dans les faits, à retarder la réalisation d'investissements qui sont des investissements globaux.
Cela étant, sous réserve des modifications qui pourront être apportées, dans un souci d'empirisme, au cours de la navette, il s'agit là d'un progrès très important dans le sens de la transparence, de la clarté et d'une bonne lisibilité des documents budgétaires.
M. Yves Fréville. Très bien !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. L'observation faite, voilà quelques instants, par Michel Charasse sur les conséquences de l'amendement n° 52 en termes d'évaluation des dépenses de l'Etat à proprement parler est tout à fait pertinente.
Pour employer une terminologie budgétaire, nous assisterions, d'une part, à un gonflement de la masse des dépenses...
M. Michel Charasse. Anormal !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. ... qui ne serait pas représentatif de la réalité des choses. D'autre part, et cet argument mérite une considération toute particulière, dans l'hypothèse où l'Etat se verrait contraint de maîtriser sa dépense, conformément aux objectifs qu'il se fixe et qu'il continuera de se fixer compte tenu du fait que nous sommes, par ailleurs, engagés par des prévisions pluriannuelles, cela pourrait conduire à fragiliser des opérations financées par fonds de concours, si de telles opérations entraient, si je puis dire, dans le compteur de la dépense de l'Etat.
Comme je crois qu'il n'est dans l'esprit de personne ici de remettre en cause le principe de ces opérations cofinancées - ou alors c'est un autre débat - je ne voudrais pas que, par les dispositions qui figureront dans une loi organique, nous fragilisions ces opérations à caractère financier, pour les raisons qui ont été fort bien expliquées par Michel Charasse.
M. Alain Lambert, rapporteur. Ces sommes figurent en loi de règlement !
M. Michel Charasse. Et si, en 2006, c'est vous qui êtes au pouvoir ?
M. Philippe Marini. On assumera !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 52, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Les deux amendements suivants sont présentés par M. Lambert, au nom de la commission.
L'amendement n° 53 vise à supprimer le second alinéa du II de l'article 18.
L'amendement n° 54 tend à insérer, après le II de l'article 18, un paragraphe ainsi rédigé :
« II bis. - Les attributions de produits sont constituées par des recettes tirées de la rémunération de prestations régulièrement fournies par un service de l'Etat. Les règles relatives aux fonds de concours leur sont applicables. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces deux amendements.
M. Alain Lambert, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 53, plutôt que de perpétuer la catégorie des fonds de concours par assimilation, il semble plus clair à la commission d'instaurer une nouvelle procédure d'affectation répondant au même objet, celle des attributions de produits. D'où la suppression proposée.
L'amendement n° 54 vise à définir l'objet et les conditions de la procédure nouvelle d'attribution de produits.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 53 et 54 ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Favorable sur ces deux amendements.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 53, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 54, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 18, modifié.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre !

(L'article 18 est adopté.)

Article additionnel après l'article 18