SEANCE DU 2 DECEMBRE 2002


M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant le commerce extérieur.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le solde commercial de la France a dégagé un excédent de 3,3 milliards d'euros en 2001. Sur les neuf premiers mois de l'année 2002, le solde est encore excédentaire de 8,8 milliards d'euros grâce à des exportations très dynamiques et à des importations qui, malheureusement, le sont beaucoup moins compte tenu du niveau assez faible de la croissance économique dans notre pays.
Je me garderai bien de faire des prévisions sur l'évolution de notre solde en raison des incertitudes qui pèsent sur la situation internationale et de son impact sur le prix du pétrole. En revanche, ce que l'on peut dire de manière certaine, c'est que la France a conservé son rang parmi les principaux pays exportateurs et que nos entreprises ont bien résisté au ralentissement de la croissance mondiale.
Le budget du commerce extérieur pour 2003 est particulièrement stable par rapport aux années précédentes. Il y a à cela plusieurs raisons. D'abord, les grandes entreprises sont de moins en moins consommatrices de financements bilatéraux. De nombreuses procédures, gérées par la Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur, la COFACE, ou par Natexis, ne sont d'ailleurs pas consommatrices de crédits, car il s'agit de fonds dont la dotation initiale n'est pas épuisée ou de procédures d'assurance et de garantie qui dégagent des excédents.
Ensuite, la direction des relations économiques extérieures, la DREE a conclu un contrat d'objectifs et de moyens avec la direction du budget qui prévoit l'absorption de la dérive des dépenses des missions économiques en échange d'une exonération des mesures de régulation budgétaire. Les moyens des services sont donc d'une grande stabilité.
Enfin, les subventions versées aux organismes de soutien au commerce extérieur stagnent.
Vous l'aurez compris, monsieur le ministre, chacun peut trouver dans ces facteurs d'explication des raisons de se féliciter comme de se plaindre.
Je commencerai par l'aspect positif, c'est-à-dire la capacité de la Direction des relations économiques extérieures à se moderniser et à maîtriser ses dépenses.
Les contrats d'objectifs et de moyens successifs ont permis de réaliser d'importantes économies et de stabiliser les dépenses de fonctionnement, tout en responsabilisant les chefs de mission sur leur gestion. Cette démarche se poursuit et préfigure désormais la mise en oeuvre des dispositions de la loi organique relative aux lois de finances : définition d'objectifs et d'indicateurs, mise en oeuvre progressive d'un suivi analytique des coûts, développement du contrôle de gestion. La modernisation de la DREE s'est d'ailleurs vu récompensée, en juillet 2002, par l'obtention de la norme de qualité ISO 9001 pour l'ensemble des services apportés aux entreprises.
J'en viens aux aspects que je considère moins satisfaisants, qui concernent le soutien à l'internationalisation des PME, et plus particulièrement les dotations des établissements publics en charge du commerce extérieur, principalement le Centre français du commerce extérieur, le CFCE, et UbiFrance.
Je ne veux pas dresser un tableau trop sombre de l'appui public apporté aux PME : de nombreuses initiatives ont été engagées à leur attention et la réforme de l'assurance-prospection mise en oeuvre à la fin de l'exercice 2000 pour la rendre plus accessible aux PME est une réussite. Il s'agit plutôt de tirer un signal d'alarme concernant ces deux organismes, qui connaissent tous les deux une situation budgétaire difficile : pour le CFCE, celle-ci résulte de la baisse de ses recettes commerciales issues de la vente de produits et de prestations aux entreprises ; pour UbiFrance, elle est la conséquence de la suppression du service national.
Ces deux organismes sont confrontés à une gestion très tendue, la baisse de leurs ressources propres n'étant pas compensée par une croissance de leur subvention.
Vous avez annoncé très récemment, monsieur le ministre, à la suite d'une mission d'évaluation, la fusion des deux organismes. Je souhaite que cette fusion permette aux entreprises d'accéder plus facilement aux différentes prestations et que les actions de promotion et de soutien au commerce extérieur soient mieux coordonnées. Un organisme unique présentera l'avantage d'assurer une plus grande visibilité, tant pour les entreprises qu'à l'égard de l'étranger.
UbiFrance assure deux missions essentielles pour le développement des entreprises à l'international : l'organisation de la présence des entreprises françaises dans les salons professionnels à l'étranger et la gestion des volontaires internationaux en entreprise.
S'agissant de l'aide à la participation des entreprises aux foires et aux salons professionnels, les efforts de la France sont largement inférieurs à ceux des autres pays de l'Union européenne. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : l'Espagne, la Grande-Bretagne et l'Allemagne consacrent aux salons internationaux entre sept et huit fois plus de subventions publiques que la France ; la Grande-Bretagne appuie six fois plus de salons que la France ; la subvention moyenne accordée par opération par l'Espagne, l'Allemagne et l'Italie est trois fois supérieure à celle de la France ; enfin, le nombre d'entreprises aidées est trois fois plus important en Grande-Bretagne. De tels écarts sont difficilement justifiables lorsqu'on connaît l'importance de ces salons pour une PME qui souhaite se développer à l'international.
S'il n'est pas possible de redéployer des crédits au profit de cette action, je suggère que nous abandonnions l'organisation des grandes manifestations françaises à l'étranger, qui sont particulièrement coûteuses et dont l'impact commercial est faible, pour nous concentrer sur les foires et les salons professionnels.
S'agissant des volontaires internationaux en entreprise, le dispositif ne rencontre pas, jusqu'ici, le succès qu'il mérite et je ne puis, monsieur le ministre, qu'appuyer votre volonté d'élargir le dispositif et de le rendre plus accessible, notamment aux PME.
Je voudrais, avant de conclure, évoquer quelques pistes de réformes pour l'avenir, afin de rendre le dispositif de soutien au commerce extérieur plus proche encore des entreprises.
Les 3 500 conseillers du commerce extérieur de la France sont insuffisamment utilisés. Ils ne disposent pas des moyens qui leur permettraient de se mettre pleinement au service de nos entreprises, alors qu'ils peuvent étendre le champ d'action des missions économiques, en particulier dans les régions éloignées des capitales, et qu'ils constituent une source précieuse d'informations.
Les régions s'impliquent de plus en plus pour attirer des investissements étrangers sur leur territoire, mais aussi pour soutenir les entreprises locales dans leurs démarches de prospection à l'étranger. Dans le cadre de la décentralisation, il pourrait être envisagé de leur confier la gestion des aides et la coordination des acteurs locaux, en rattachant les directions régionales du commerce extérieur aux régions. Dans cette hypothèse il faudrait bien entendu conserver un lien très fort entre cet échelon régional, l'administration centrale et les missions économiques à l'étranger, car il s'agit de rechercher la plus grande efficacité et non de démanteler notre dispositif. Je note d'ailleurs que l'Agence française pour les investissements internationaux agit en partenariat avec les régions et cela fonctionne bien.
Les modalités de soutien au commerce extérieur doivent évoluer pour répondre le plus efficacement possible aux demandes des entreprises, notamment de celles qui sont les moins bien armées pour se développer à l'international. La simplicité des procédures est un impératif pour viser la clientèle cible du dispositif de soutien public au commerce extérieur, c'est-à-dire, pour l'essentiel, les PME indépendantes.
Monsieur le ministre, vous n'avez pas dénoncé les actions de votre prédécesseur, et je ne souhaite pas, pour ma part, freiner votre dynamisme et votre ardeur. En matière de commerce extérieur, la recherche de la performance est un objectif partagé par tous, et votre projet de budget reflète cette continuité au service de nos entreprises. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC, sur certaines travées du RDSE et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Michel Bécot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen des crédits consacrés au commerce extérieur pour 2003 intervient dans un contexte ambivalent : d'une part, les échanges ont accusé un recul brutal l'an passé et, d'autre part, le solde commercial français a renoué avec l'excédent.
La brusque contraction du commerce mondial, revenu à son plus bas niveau depuis dix ans, tient au ralentissement quasi simultané des trois principales économies, ainsi qu'à l'éclatement de la bulle des technologies de l'information. Or c'est aussi au ralentissement de l'activité que nous devons la bonne nouvelle du retour de notre excédent commercial, qui s'est établi à 3,3 milliards d'euros. En effet, il en est résulté une forte contraction de nos importations. Nos exportations, elles aussi freinées par le fléchissement de la demande mondiale, se sont malgré tout maintenues grâce à la bonne compétitivité de nos produits, notamment automobiles.
Pour autant, l'heure n'est pas au triomphalisme, bien sûr : notre compétitivité-prix a cessé de s'améliorer en 2001 et les effets de son érosion se font maintenant sentir, avec un léger retard. Ainsi, depuis la fin 2001, nos parts de marché en volume se sont nettement réduites. Il est donc impératif de consolider notre compétitivité hors prix et de déployer à cette fin des efforts accrus en termes de recherche et de développement.
Cette fragilité de nos performances à l'export nous invite, monsieur le ministre, à affiner notre stratégie commerciale et à réfléchir à notre spécialisation sectorielle et géographique. La très grande concentration de notre avantage technologique sur l'aéronautique et le spatial ne représente-t-elle pas une fragilité pour notre pays, qui délaisse le numérique et les biotechnologies ? De même, faut-il se résigner à ce que notre tropisme européen traditionnel nous ait détourné des pays manifestement les plus porteurs ?
Cette indispensable réflexion stratégique sur notre politique commerciale doit aussi être l'occasion de concevoir une politique d'attractivité pour le « site » France : nous devons avoir pour objectif d'offrir aux investisseurs et aux talents, nationaux et étrangers, le meilleur rapport entre la qualité des infrastructures, de la main-d'oeuvre, des services publics, de l'environnement juridique et le prix fiscal et social.
Si nous voulons que les bonnes décisions de politique commerciale soient prises à Bruxelles, il nous revient d'entreprendre ce travail d'introspection. Cela nous permettrait, notamment, de concentrer nos efforts sur quelques points cruciaux à l'Organisation mondiale du commerce.
Jusqu'à présent, les négociations commerciales multilatérales lancées à Doha n'ont guère avancé sur le fond, peut-être freinées par l'attitude américaine ; je pense aux taxes sur l'acier et au farm bill. Mais il devient urgent de bien cibler nos priorités et d'être vigilants, car des échéances importantes se rapprochent en ce qui concerne trois sujets majeurs de négociation : l'accès aux médicaments - sujet sur lequel je salue votre implication, monsieur le ministre -, mais aussi, bientôt, l'agriculture et les services.
Parallèlement à ces batailles à l'extérieur, j'estime indispensable de lutter à l'intérieur de notre territoire pour soutenir l'internationalisation de nos entreprises. C'est à ce soutien public que vous entendez consacrer 460,30 millions d'euros en crédits de paiement. La diminution de cette enveloppe de 2,8 % poursuit une tendance décennale. Je sais qu'elle se justifie, notamment par une meilleure gestion des procédures et par la rationalisation du réseau de l'expansion économique et des organismes d'appui. Rappelons, à cet égard, le caractère exemplaire de la gestion budgétaire de la DREE et de sa démarche qualité couronnée, cet été, par la certification ISO 9001 de son réseau.
Toutefois, permettez-moi, monsieur le ministre, d'attirer votre attention sur les reports de crédits, qui rendent inutile l'abondement des diverses lignes et participent à la baisse de votre budget.
Je trouve surprenant que presque tous les mécanismes d'aide ou de soutien aux exportations dégagent des excédents. Et je ne parle pas seulement de la COFACE, sur laquelle l'Etat prélève encore 1,8 milliard d'euros en 2002. Je voudrais aussi comprendre pourquoi les demandes d'aides se raréfient.
En tout cas, ce constat vous autorise, me semble-t-il, à faire preuve d'une plus grande audace dans le soutien à l'export, afin d'optimiser l'enveloppe budgétaire et de mieux l'adapter aux besoins des entreprises.
Si 95 % de nos entreprises n'exportent pas, c'est essentiellement en raison du manque de lisibilité du dispositif public de soutien à l'export. C'est pourquoi j'estime prioritaire de le rendre plus accessible et plus efficace. L'exemple des nouvelles « missions économiques », offrant un guichet unique à l'étranger, doit inspirer notre organisation en France, puisque nos entreprises ne savent pas où s'adresser : réseau consulaire, organismes de promotion, services déconcentrés ou décentralisés. Notre dispositif devrait se concentrer sur des « guichets export », interlocuteurs uniques, près du terrain et visibles, points d'entrée des demandes des entreprises.
Le projet « service d'information sur les marchés extérieurs » va dans ce sens, mais c'est surtout le rapprochement opérationnel du CFCE et d'UbiFrance, que vous avez annoncé, qui permettra d'offrir à nos entreprises un service intégré d'information et de promotion sur les marchés étrangers. Le rapport que vous ont remis MM. Lévy et Testu trace, en outre, des pistes précieuses d'amélioration de ce service. Je sais que cela ne sera pas simple, mais soyez assuré de mon soutien.
Je voudrais aussi vous encourager à rendre plus lisibles les dispositifs d'appui financier à l'export, complexes et méconnus. La réforme réussie de l'assurance-prospection en est un exemple probant.
Enfin, puisque tout projet d'expansion à l'étranger implique à la fois des moyens financiers et des compétences, je soutiens, monsieur le ministre, votre projet de promouvoir le départ de jeunes volontaires à l'international. Pourquoi ne pas proposer à ces jeunes d'assurer, au sein de PME, en France, des missions liées aux exportations ?
Pour conclure, je tiens à saluer la pertinence des propositions que Mme Clara Gaymard avance dans le rapport qu'elle vient de nous remettre et qui sont autant de pistes pour développer nos entreprises à l'international.
Afin de vous exprimer sa confiance, la commission des affaires économiques et du Plan a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés au commerce extérieur (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du rassemblement pour la République, 7 minutes ;
Groupe socialiste, 6 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 5 minutes.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le ministre, analyser l'enveloppe budgétaire de notre commerce extérieur revient à rendre lisible le projet politique porté par notre pays.
Alors que, depuis le 11 septembre 2001, les relations internationales se durcissent au rythme toujours angoissant des événements terroristes, de la volonté hégémonique du gouvernement américain Bush d'embraser une partie du Moyen-Orient par le déclenchement de la guerre en Irak, plus que jamais la justice et le droit internationnal doivent être notre principe commun. L'examen des crédits affectés au commerce extérieur ne peut éluder cette dimension.
Certes, la France ne peut pas tout dans la résolution des problèmes de pauvreté Nord-Sud. Pourtant, elle doit avoir valeur d'exemple et porter au niveau de ses échanges commerciaux des principes politiques clairs de paix et de justice.
L'analyse de la relative modicité des crédits ouverts au titre du projet de budget du commerce extérieur dans le budget de l'Etat - moins de 245 millions d'euros, c'est-à-dire moins d'un millième de l'enveloppe globale des crédits budgétaires - ne présente d'intérêt qu'au travers des dépenses du titre III, dont l'encours connaît une contraction, qui est motivée pour certains par l'amélioration de la gestion courante du ministère.
Nous pouvons observer que l'effort global qui est consenti sur le chapitre du commerce extérieur est plus important. En effet, si l'on ajoute les engagements figurant dans le cadre du budget des charges communes et du budget des comptes spéciaux du Trésor, l'on parvient à des montants plus importants : un peu plus de 460 millions d'euros en crédits de paiement et près de 90 millions d'euros en autorisations de programme.
Pour autant, le concours de la COFACE au budget général s'avère, dans les faits, pratiquement aussi important que les crédits ouverts sur le budget du commerce extérieur.
La véritable question posée par ce budget purement incitatif, qui ne peut qu'accompagner les grandes tendances marquant nos échanges commerciaux internationaux, est bel et bien celle de la conjoncture actuelle du commerce extérieur français : notre pays continue de se classer au troisième rang pour l'exportation de services et au quatrième rang pour celle des marchandises.
Notre pays ne doit-il pas peser plus franchement sur l'économie mondiale pour militer pour plus de justice ? Je pense, vous le savez, à l'annulation de la dette des pays du Sud ou bien encore à l'accès de tous aux médicaments essentiels pour lutter contre les pandémies, le sida, par exemple.
S'agissant du solde global de ce commerce extérieur, on notera, tout d'abord, qu'il demeure aujourd'hui assez nettement excédentaire. Cette situation n'est cependant pas garantie dans un très proche avenir, puisque le ralentissement des échanges, lié au ralentissement plus général de l'activité économique, n'est pas sans conséquence sur la situation de notre commerce extérieur.
Poste à poste, on constate, en particulier, une régression de nos échanges agricoles, et ce alors même que ces échanges demeurent encore assez nettement excédentaires, pour plus de 7,5 milliards d'euros, essentiellement grâce à l'industrie agroalimentaire.
Les échanges industriels, pour leur part, ont également souffert d'une contraction de la demande singulièrement des pays de l'Union européenne et des Etats-Unis, même si la France conserve un excédent non négligeable de plus de 10 milliards d'euros. Cet excédent efface les conséquences du déficit énergétique, déficit inévitable compte tenu de la consommation de produits pétroliers.
Enfin, la balance commerciale sur les services demeure également très excédentaire et conforte utilement notre solde commercial positif global.
Pour autant, la situation qui dépend étroitement de la demande internationale en direction de la France, ne doit pas faire oublier deux aspects fondamentaux : peu d'entreprises participent réellement au processus d'exportation, tandis que l'essentiel de nos échanges demeure concentré sur les pays de l'Union européenne et les Etats-Unis.
Cette situation doit motiver des efforts particuliers de progression des flux commerciaux avec les pays d'Europe centrale et orientale - d'autant plus que certains sont appelés à faire bientôt partie de l'Union européenne - et avec les pays en voie de développement qui ont, avec la France, des liens historiques forts.
Un commerce international équitable qui n'est pas l'instrument de l'hégémonie d'une seule puissance ; un commerce international fondé sur le respect des droits fondamentaux de l'homme, telle est notre ambition.
La situation que je viens de décrire pose en fait clairement la question de la place de la France dans le cadre des relations économiques internationales. Nous devons concourir à créer les conditions d'un commerce international plus équilibré, plus respectueux tant des possibilités réelles de développement des pays associés au sein de l'OMC que de l'environnement, et soucieux de développement durable.
Nous avons de la valeur ajoutée à faire partager, pour que le commerce international contribue, à hauteur de ce que bien des peuples attendent de la France, au développement réel des pays du Sud.
Les missions assignées à la direction des relations économiques extérieures et le rôle que joue, avec les outils financiers dont elle dispose, la COFACE, suffisent-ils ?
Apprécié à l'aune de ces différentes ambitions, votre budget, monsieur le ministre, ne semble pas susceptible d'apporter de perspectives réelles, raison pour laquelle nous ne voterons pas les crédits du commerce extérieur. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en tant que président du groupe de travail chargé du suivi des négociations commerciales multilatérales ouvertes à Doha, permettez-moi de saisir l'occasion de l'examen des crédits destinés au commerce extérieur pour attirer votre attention sur la place qui revient aux parlements auprès de l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC.
En réponse au « déficit démocratique » de l'organisation, tant dénoncé depuis la conférence gouvernementale de Seattle, il est évident que doivent être étudiées les modalités d'une plus grande transparence de l'OMC.
Le choc de Seattle a conduit les citoyens à se tourner vers les organisations non gouvernementales, les ONG, ou vers les mouvements alternatifs pour faire entendre leurs voix. On vient encore de le constater récemment à Florence.
La valeur du travail effectué par les ONG, leur efficacité médiatique et le caractère naturel de leur association à ces questions montrent a contrario le relatif effacement des parlements dans ce débat, alors même qu'ils sont les représentants les plus légitimes de la société civile. Je considère, en effet, comme une priorité d'associer les parlements aux négociations en cours à l'OMC.
La formalisation d'une telle présence parlementaire autour de l'OMC m'apparaît non seulement légitime, mais nécessaire.
Cette association des parlementaires est indispensable, d'autant plus que les accords de Marrakech, par leur caractère global et général, constituent un véritable saut qualitatif. Auparavant, les accords commerciaux se négociaient au coup par coup selon les domaines.Bien au-delà de la simple négociation de tarifs douaniers, les accords de Marrakech portent sur tous les domaines de la vie de nos concitoyens, des normes sanitaires, aux questions environnementales et au droit du travail.
Enfin, avec l'organe de règlement des différends, l'ORD, l'OMC dispose d'un instrument efficace, mais qui intervient sans aucun contrôle et dont la jurisprudence peut influer directement sur les choix nationaux dans des domaines aussi divers que la sécurité alimentaire, l'éducation, la culture ou la politique des services publics.
Comme on le relève dans un rapport présenté à l'Union interparlementaire : « Au fur et à mesure que de nouvelles questions relevant de la politique intérieure entrent dans le champ de compétence de l'OMC, les retombées constitutionnelles de l'expansion de l'organisation se font sentir et l'équilibre des pouvoirs prévu par la Constitution évolue au détriment du législatif. »
De quelle légitimité peut se prévaloir le Parlement pour être associé aux travaux de l'OMC ? Elle est triple, à mes yeux.
Premièrement, en tant que médiateur, le Parlement intervient pour faire connaître le point de vue de nos concitoyens. Incarnant la volonté souveraine du peuple et représentant légitime de la société civile, le Parlement doit contribuer à l'expression de la volonté populaire, même à l'échelon international. A l'inverse, il lui revient d'expliquer au peuple la nécessité de la régulation qu'assure l'OMC.
Deuxièmement, en tant que législateur, il lui appartient d'être associé en amont au processus de négociation et d'être informé de son évolution, afin de pouvoir influer sur les directives et les orientations qui vont définir le droit commercial. La simple ratification des accords internationaux ne peut plus suffire, à un moment où les accords commerciaux sont au coeur de la gouvernance mondiale et qu'ils ont indiscutablement empiété sur des prérogatives revenant traditionnellement aux parlements.
Troisièmement, enfin, notre fonction de contrôle de l'exécutif doit nous amener à suivre les négociations et à vérifier leur adéquation avec les orientations définies en amont afin d'en informer nos assemblées.
Ce sont bien évidemment ces trois rôles que nous nous efforçons de remplir à travers les travaux de notre groupe de travail. Cependant, au-delà de ce travail national propre à chaque parlement, la question d'une représentation parlementaire de l'OMC prend aujourd'hui une dimension internationale.
Si l'idée de créer une assemblée parlementaire de l'OMC a été, à juste titre, abandonnée, de nombreux parlements de par le monde souhaitent être associés aux travaux de l'organisation par des réunions régulières. Depuis quelques mois, le dialogue entre les différents parlements s'est intensifié, notamment au Parlement européen et au sein de l'Union interparlementaire, l'UIP.
Cette dernière avait déjà rassemblé, en juin 2001, soixante-dix parlements lors d'une réunion intitulée « Pour un système commercial multilatéral libre, juste et équitable : la dimension parlementaire ». Cette réunion répondait au souci croissant des parlements nationaux de voir reconnue leur légitimité à être informés des négociations en cours à l'OMC, voire à contrôler l'exécutif dans sa mission négociatrice. Ce souci se fonde sur l'aptitude reconnue des parlements à faire office d'interface entre l'OMC et les opinions publiques, pour lesquelles vous savez combien la mondialisation est porteuse d'inquiétudes.
Afin d'aller plus loin, l'UIP prévoit une deuxième réunion interparlementaire en février prochain, à Genève. Il me paraît tout à fait important que notre assemblée y participe pleinement ; d'ailleurs, deux sénateurs sont invités à s'y rendre.
Avant de conclure, je voudrais évoquer le cas américain, car il me paraît illustratif du mouvement en cours. Si le Congrès a octroyé, cet été, au président Bush la faculté de négocier directement des accords internationaux, je relève qu'il a pris soin d'encadrer cette faculté. En effet, à la différence de l'ancienne procédure Fast Track, le Trade Promotion Act , dit TPA, prévoit certaines mesures restrictives. Les négociateurs américains n'ont ainsi pas le droit d'affaiblir les lois américaines antidumping, et le président est tenu de consulter le Congrès six mois avant de signer un accord qui pourrait les menacer.
S'il s'agit donc d'une reprise en main par le président, le Congrès a refusé de se dessaisir de toute sa compétence, et ce qui est lu comme un retour de l'exécutif pourrait bien aussi se lire comme une preuve de la volonté du Congrès de peser sur ces dossiers.
Le nouvel équilibre entre l'exécutif et le législatif aux Etats-Unis est-il emblématique d'un mouvement plus large de « parlementarisation » des négociations commerciales multilatérales ?
Je le souhaite, monsieur le ministre, et je compte sur vous pour créer les conditions d'une véritable collaboration entre l'exécutif et le législatif français, pour une mondialisation plus démocratique. Je crois que c'est un moyen essentiel pour que nos concitoyens n'aient plus le sentiment de subir la mondialisation et qu'ils se l'approprient afin d'en être tout simplement des acteurs. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Présentant votre premier budget, et ancien chef d'entreprise, monsieur le ministre, votre vision du commerce extérieur doit être à l'origine d'une politique rénovatrice.
Nous sommes dans une configuration constante depuis des dizaines d'années : le commerce extérieur est réparti dans une proportion de 80 % - 20 % entre les grandes entreprises et les PME. Ce chiffre nous est propre. Nous avons, en effet, hérité d'une économie colbertiste, dans laquelle l'usage du protocole fausse les données.
Nous devons donc impliquer davantage les PME à l'exportation pour équilibrer les structures de notre commerce extérieur et, plus fondamentalement, nous interroger sur l'efficacité réelle des missions économiques.
Je suis convaincu qu'il faut repenser totalement l'organisation même de notre commerce extérieur. Il serait sans doute édifiant de connaître la corrélation entre les crédits alloués aux missions économiques et nos exportations. Il faudrait aussi prendre en compte le fait que l'Internet s'est très souvent substitué aux missions économiques pour la collecte des informations. De plus, les grandes entreprises disposent fréquemment de leurs propres réseaux à l'étranger et, de ce fait, sollicitent beaucoup moins les missions économiques.
La coordination entre le ministère des affaires étrangères et la direction des affaires économiques extérieures, la DREE, qui est d'ordre stratégique, n'est pas toujours satisfaisante. Il faut même s'interroger sur ce qui constitue parfois un double emploi, d'autant plus regretter que les missions économiques et les ambassades ne soient pas toujours en phase, quand elles ne sont pas en concurrence, et réagir en conséquence.
L'ambassadeur a des contacts au plus haut niveau politique et, pour les contrats de grande envergure et donc à caractère national, il négocie avec les gouvernements étrangers. Il devrait donc avoir également la responsabilité des relations économiques.
Chaque année, 2 400 PME sont détectées comme ayant la capacité à exporter. Nous devons les initier aux marchés internationaux et donc mettre en oeuvre une véritable stratégie d'internationalisation des PME.
La régionalisation constitue une solution. Notons que, dans certains pays, il n'y a pas de ministère du commerce extérieur. En Allemagne, par exemple, ce sont les chambres de commerce et d'industrie des Länder q ui ont cette compétence.
Plutôt que de nous appuyer essentiellement sur nos missions économiques, il nous faut développer et renforcer le niveau régional, qui constitue l'un des axes majeurs de la politique du Premier ministre. Dans le cadre de la décentralisation ne serait-il pas judicieux de mettre l'accent sur les directions régionales du commerce extérieur, les DRCE, pour une approche plus adaptée et spécifique de l'internationalisation des PME ? Je suis convaincu que c'est à l'échelle régionale que doit se construire et se concrétiser le potentiel international des entreprises.
En effet, les PME sont plus à l'aise dans un cadre régional que dans un cadre national. Elles sont aidées à valoriser leur potentiel à l'international et dans leurs démarches techniques par les directions régionales du commerce extérieur, qui sont des interlocuteurs privilégiés. Le montage des dossiers, l'accompagnement dans la prise de contacts commerciaux à l'étranger, la détection des potentiels à l'export sont aussi assurés par les chambres régionales de commerce et d'industrie. Ne faudrait-il pas envisager une fusion de ces organismes pour une meilleure performance ?
Au sein de l'Union européenne, il existe vingt-quatre missions économiques. Dans le cadre du marché unique, l'opportunité de leur existence et leur utilité doivent être posées.
Nous devrions redéployer leurs effectifs dans les directions régionales du commerce extérieur. Ainsi, est-il nécessaire d'avoir une trentaine de personnes à la mission économique de Berlin, alors que la DRCE de Midi-Pyrénées en compte trois fois moins ? Quarante personnes à la mission économique de Londres sont-elles indispensables, alors que la DRCE Aquitaine n'en compte que sept ? Ces femmes et ces hommes, qui ont l'expérience de l'étranger et qui connaissent les démarches à effectuer et ces marchés, seraient beaucoup plus utiles et donc plus performants pour aider les PME à cibler et à concrétiser leurs exportations, en étant au plus près d'elles dans les régions.
Par ailleurs, faut-il comptabiliser dans le commerce extérieur nos ventes aux pays de l'Union ? Il serait plus pertinent de faire une distinction avec les pays tiers ; cela reflèterait une image plus exacte de notre commerce extérieur.
Il est aussi essentiel de faire un effort pour les foires et salons internationaux.
Le rôle primordial de la présence des entreprises dans ces manifestations est unanimement reconnu. Les mesures nécessaires doivent être décidées pour que les PME y soient bien représentées ; il faut prévoir des incitations fiscales en ce sens et accorder les crédits nécessaires à UbiFrance pour organiser ces manifestations. La représentation de nos entreprises dans les foires et salons est loin d'être équivalente à celle de nos voisins allemands et italiens, qui consacrent respectivement huit fois et quatre fois plus de moyens à ce budget. Mes chiffres diffèrent légèrement de ceux de M. le rapporteur spécial, mais il n'en reste pas moins que l'écart avec ces pays est considérable et que notre volonté d'agir est identique.
Au nombre des relais indispensables pour construire notre politique d'exportation, les étudiants comptent comme un vecteur essentiel, nous devons, en particulier, développer nos relations avec les pays à fort potentiel économique. Ainsi, une étroite collaboration entre les ministères chargés respectivement de l'éducation, des affaires étrangères et du commerce extérieur doit être mise en place pour faciliter l'accueil d'étudiants de pays économiquement prometteurs.
Il y a 200 000 étudiants étrangers en Allemagne, 350 000 en Grande-Bretagne, contre 160 000 seulement en France : il faut absolument définir une véritable politique de détection de talents. La formation d'étudiants étrangers en France grâce aux bourses allouées par notre gouvernement est le meilleur moyen de faire connaître notre technologie, notre savoir-faire, la qualité de nos produits et notre économie : ces étudiants seront les meilleurs ambassadeurs de la France dans leurs pays respectifs.
Cette politique est vitale, car la part des exportations sera croissante dans notre production et dans nos services. C'est à ce niveau que se joue une partie de l'avenir de nos emplois. Dans le même esprit, le système des volontaires internationaux en entreprise, désormais ouvert aux jeunes filles, a pris le relais des coopérants du service national. C'est un outil efficace qui permettra de former des cadres d'entreprise initiés à l'international.
Monsieur le ministre, la majorité des membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen soutiendra votre action et votera votre budget, qui s'inscrit dans la durée. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE ainsi que sur celles du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le rappel de quelques grandes données suffit pour faire mesurer l'intérêt que nous devrions porter à tout ce qui concerne notre commerce extérieur.
La France se classe ainsi au troisième rang mondial pour l'exportation de services, au quatrième rang pour les marchandises, au troisième rang pour le stock d'investissements directs à l'étranger et au septième rang en ce qui concerne le stock d'investissements étranger reçus.
Au total, cinq millions d'emplois, soit 22 % de la population active, sont liés directement ou indirectement à l'exportation. La somme des importations et des exportations françaises représente plus de 50 % du PIB, et nos ventes à l'étranger ont plus que doublé depuis quinze ans.
L'ouverture internationale de notre économie est donc aujourd'hui une réalité incontournable qui nous est bénéfique.
Cette ouverture est tributaire d'un environnement qui s'était dégradé en 2000 et 2001, et qui a connu une reprise modérée en 2002.
La France a plutôt bien résisté à cette dégradation de l'environnement international, comme le montrent les excédents commerciaux du second semestre 2001 et du premier semestre 2002.
Dans ce contexte, quelle lecture peut-on faire, monsieur le ministre, de votre projet de budget ?
Le budget du commerce extérieur pour 2003 est en baisse de 3,35 % par rapport à 2002.
Si l'on prend en considération les crédits inscrits au budget des charges communes et des comptes spéciaux du Trésor, l'effort financier en faveur du commerce extérieur s'établit à 460 millions d'euros, contre 473 millions d'euros en 2002. Dès lors, on peut dire qu'il s'agit d'un budget de reconduction, voire de transition.
Mais qu'aurait-on souhaité voir derrière les chiffres ?
La politique menée en faveur du commerce extérieur est à la fois source de satisfactions et d'interrogations, en même temps qu'elle révèle des insuffisances.
Au titre des satisfactions, je veux citer les progrès remarqués au sein du réseau d'expansion économique et l'efficacité de certains outils comme l'assurance-prospection.
Tous les observateurs s'accordent à reconnaître la qualité et l'efficacité de la démarche menée par la direction des relations économiques extérieures.
Sont remarquées la bonne utilisation du contrat d'objectifs et de moyens, la capacité d'adaptation de la structure, l'utilisation des technologies de l'information et de la communication.
Ce travail de qualité du service public de l'exportation vient d'être reconnu - nous le soulignons tous - par l'attribution du label ISO 9001.
Il faut également saluer la fusion entre les réseaux de la DREE et du Trésor à l'étranger, la création de la mission PME et du médiateur PME.
Il convient aussi de se féliciter du bilan de l'assurance-prospection, réformée de manière heureuse en 2001, à la demande de votre prédécesseur, monsieur le ministre. Les efforts de simplification et de réduction des délais, qui ont porté leurs fruits, gagneraient à être imités.
Un certain nombre de questions appellent de votre part, monsieur le ministre, des réactions, des précisions, des orientations.
Comment expliquer les sous-consommations de crédits qui justifient des reports, au titre V, sur le chapitre 57-90 ?
Comment envisagez-vous de rendre attractif le FASEP-garantie, garantie contre le risque économique des investissements des PME à l'étranger, considéré comme intéressant par les entreprises, mais peu sollicité en raison de son coût et de sa complexité ?
Des critiques sont régulièrement émises sur les pertes d'efficacité qui seraient dues à la multiplicité des intervenants à l'étranger, entraînant des difficultés de lisibilité. Des doutes sont aussi émis régulièrement sur l'engagement de nos services diplomatiques.
Sur ces critiques et sur ces doutes, j'aimerais connaître votre opinion, monsieur le ministre.
Le rapprochement CFCE-UbiFrance est souvent évoqué, et Marc Massion en a parlé à l'instant. Où en sommes-nous ?
Le remplacement du dispositif CSNE par celui du volontariat international en entreprise, le VIE, fait apparaître une vraie question. Comment réduire le décalage observé entre le nombre de candidatures de jeunes - garçons et filles désormais, et qui sont plus de 20 000 - et le nombre de postes offerts par les entreprises ?
Monsieur le ministre, vous avez affirmé votre volonté de relancer le VIE, mais comment allez-vous opérer cette relance ?
Le rapporteur pour avis, M. Michel Bécot, a fort justement appelé notre attention sur deux points essentiels : d'une part, la spécialisation de la France dans des secteurs héritiers de la deuxième révolution industrielle et, d'autre part, la spécialisation géographique de nos exportations et les faiblesses de notre position sur des marchés à fort potentiel.
Cette double observation prend encore plus de poids alors que nous sommes confrontés à une nécessaire adaptation face à un nouvel environnement marqué par trois facteurs : l'élargissement de l'Union européenne, le rôle de plus en plus important de l'Organisation mondiale du commerce, enfin la concurrence croissante rencontrée dans les secteurs où sont nos atouts et nos compétences, comme en témoigne l'exemple des vins du Nouveau Monde.
Quelle est votre stratégie face à ces éléments ? Quels sont les secteurs d'excellence ? Quelles doivent être nos priorités géographiques à l'avenir ?
J'ai cité à l'instant l'OMC. Les suites à donner à la conférence de Doha sont, bien entendu, au coeur de notre réflexion.
Le calendrier et le contenu de la négociation sont désormais bien délimités, certaines préoccupations, par exemple dans les domaines de l'agriculture et des services, trouvant une expression renforcée. De quelle manière le Gouvernement entend-il informer et associer la représentation nationale sur le suivi de la négociation ?
J'arrive enfin à ce qui relève, à mes yeux, des insuffisances de notre politique extérieure.
La première de ces insuffisances est dénoncée de manière récurrente par les parlementaires lors des débats budgétaires : la faible participation des PME au commerce extérieur. Nous souhaitons, monsieur le ministre, que vous fassiez évoluer cette situation et nous vous souhaitons une pleine réussite.
L'une des raisons de la présence insuffisante des PME est certainement la multiplicité des intervenants à l'échelon régional. A quand un guichet export, interlocuteur unique bien identifié, solution qui mérite toujours intérêt ?
Le soutien public pour la participation des entreprises aux salons professionnels est beaucoup trop faible. Tous les rapporteurs l'ont rappelé, chiffres à l'appui.
Enfin, les parlementaires représentant les régions où l'agroalimentaire tient une forte place ont tout intérêt à ce que la conscience des dangers qui menacent dangereusement nos performances à l'export dans ce domaine s'élargisse : pertes de parts de marché pour les vins et spiritueux, persistance du recul du secteur viande et animaux, chute de nos exportations sucrières, aggravation de la détérioration des déficits pour les produits de la mer, nette diminution de nos exportations de blé...
Monsieur le ministre, nous tirons l'alarme : il faut une large mobilisation pour redresser la tendance.
Au total, les interrogations et les insuffisances l'emportent pour l'heure sur les sujets de satisfaction. Le groupe socialiste ne peut donc apporter son soutien à votre projet de budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le Président, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux à mon tour présenter les éléments qui caractérisent ce projet de budget et répondre aux différents orateurs, en les remerciant d'abord de la qualité et de la précision de leurs interventions.
Quand on parle de commerce extérieur, il faut commencer par noter que, depuis vingt ans, la production mondiale a été multipliée par dix, mais que, pendant ce temps, les échanges commerciaux ont, eux, été multipliés par vingt alors que les flux d'investissements étrangers l'ont été par quatre-vingt-dix.
Nous vivons à l'heure de la mondialisation et le commerce mondial a donc progressé de manière spectaculaire à un taux de 5,8 % par an, alors que la croissance française augmentait sur la même période de 2,3 % par an.
Une bonne insertion de nos entreprises dans les pays et les secteurs à l'origine de flux internationaux à forte croissance est la garantie d'une France compétitive et créatrice d'emplois.
Je citerai quelques chiffres encore : 28 % de notre richesse annuelle provient de l'exportation et un Français sur cinq travaille pour alimenter les marchés étrangers.
En outre, l'univers de nos entreprises et des citoyens s'est élargi. Aujourd'hui le marché unique compte 375 millions de consommateurs, chiffre qui passera, avec l'élargissement, à 450 millions en 2004.
Alors que nos grands groupes se sont internationalisés pendant les années quatre-vingt-dix, nos PME prospectent encore insuffisamment à l'étranger. Grâce à leur spécialisation et à leur excellence, elles peuvent être à l'origine de gains de parts de marché et de créations d'emplois.
Plus que des subventions, nos entreprises réclament un cadre de travail adapté. Le Gouvernement s'y emploie en allégeant les charges et en simplifiant la réglementation, mais aussi en assurant une information pertinente aux entreprises qui exportent ; l'Etat, les régions, les organismes consulaires, les fédérations professionnelles facilitent leur tâche en les alertant et en les incitant à aller sur les marchés et les secteurs en croissance.
L'Etat a également pour mission de veiller à ce que les règles du jeu soient équitables et favorisent le développement durable ainsi que le commerce avec les pays en développement.
Tel est l'enjeu des négociations commerciales multilatérales lancées à Doha, négociations qui doivent nous permettre de garantir un meilleur accès aux marchés étrangers à nos entreprises et de miser sur une mondialisation maîtrisée.
C'est donc tout naturellement que les priorités de mon ministère s'organisent autour de cinq axes.
Premier de ces axes, il faut faire de la France une force de proposition dans la négociation du cycle de Doha et dans la perspective de la conférence ministérielle de l'OMC, qui se tiendra à Cancùn, en septembre 2003.
Vous avez été nombreux à parler de l'importance de l'OMC. Nous nous trouvons dans un nouveau cycle qui a pour particularité de lier commerce et développement. Ce cycle est ambitieux, comme le montre le champ des sujets couverts : développement durable, investissement, concurrence.
Nous devons travailler avec la Commission, car c'est de sa compétence, avec nos partenaires européens et tout particulièrement avec nos amis allemands pour proposer, dans les domaines de l'industrie, de l'agriculture et des services, des objectifs de négociation réalistes protégeant le caractère multifonctionnel de notre agriculture, tout en l'ouvrant davantage aux produits des pays en développement, préservant notre diversité culturelle tout en obtenant un meilleur accès de nos produits aux marchés étrangers.
Nous avons beaucoup à gagner du cycle de Doha en matière d'ouverture des marchés étrangers pour nos entreprises : nouveaux services, abaissement des barrières douanières, des « pics » tarifaires industriels notamment, mais aussi une plus grande transparence et un accès véritable aux marchés publics.
Ces sujets seront à l'ordre du jour de la négociation qui commence. Il faudra qu'elle se termine sur un « paquet » global et équilibré qui tienne compte de l'intérêt de nos entreprises, de nos agriculteurs et de nos consommateurs en même temps que des responsabilités mondiales en matière de gouvernance, d'environnement, de normes sociales et de développement.
Permettez-moi de rappeler quelques échéances.
En décembre 2002 se déroulera la négociation sur l'accès au médicament et sur le traitement spécial et différencié en faveur des pays en voie de développement.
A la fin du mois de mars, nous devons nous mettre d'accord sur les objectifs de la négociation agricole et, en fait, sur ses modalités.
Faute de parvenir à un accord, nos subventions agricoles pourraient être remises en cause par l'OMC à compter de 2005.
En mars 2003, l'Union européenne devra également remettre son offre en matière de services.
En mai 2003, les négociations porteront sur l'accès au marché des produits industriels et sur l'amélioration du traitement des contentieux au sein de l'OMC.
Puis, au mois de septembre, la réunion des ministres à Cancùn devrait permettre d'aboutir sur les thèmes que je viens de mentionner et de lancer la négociation sur les nouveaux sujets qui intéressent nos entreprises : la transparence des marchés, l'investissement, la concurrence, la propriété intellectuelle.
D'ici à la fin de l'année 2004, date prévue pour la fin du cycle, tout devrait être terminé.
Il était important de rappeler ces différentes étapes du calendrier, qui sont bien entendu théoriques et qui ne vaudront que si les différentes parties le veulent bien. Toutefois, une forte attente s'exprime, parmi les pays en voie de développement, notamment pour que nous accomplissions avec eux la démarche dans les délais impartis.
Le premier dossier concerne l'accès au médicament. C'est un sujet sur lequel les négociations vont bon train en ce moment et qui revêt un caractère d'urgence pour le Président de la République. Il s'agit notamment de faire face aux problèmes de crise sanitaire auxquels sont confontés les nombreux pays en développement qui sont victimes d'une pandémie et qui ne possèdent pas d'industries pharmaceutiques.
Nous recherchons actuellement un accord sur le cadre juridique qui permettra de fabriquer et de mettre à disposition ces médicaments, non seulement dans le cadre de l'OMC, mais également en concertation avec les industries pharmaceutiques, les organisations non gouvernementales et la Commission européenne, afin de proposer des mesures concrètes et réalistes.
Cette première priorité du ministère du commerce extérieur porte en fait sur un très large domaine dans lequel la France est une force de proposition importante, réaliste et pragmatique, en même temps que respectueuse de l'esprit qui a animé les négociations de Doha.
L'élargissement de l'Union européenne constitue la deuxième priorité.
Il s'agit de faire du marché unique élargi le marché domestique de nos PME. C'est un enjeu de taille, car, dans moins de deux ans, dix pays auront rejoint l'Union.
L'expérience de l'élargissement à la Grèce, à l'Espagne et au Portugal montre que l'enrichissement de ces pays s'est révélé une source de croissance pour nos entreprises. Ainsi, c'est désormais avec l'Espagne que la France dégage son premier excédent commercial.
Nous allons donc mobiliser nos entreprises en direction de ces dix pays et veiller à ce que les nouveaux membres respectent les engagements d'ouverture de leur marché et l'acquis communautaire. Il est évident que l'on ne peut pas entreprendre des investissements ou des actions dans ces pays si l'on n'est pas certain que ces derniers respectent bien leurs engagements sur leur marché. Nous aurons donc à faire le monitoring des engagements pris par ces pays.
Le troisième objectif est de placer les PME au coeur de notre dispositif public. Celles-ci réalisent un quart seulement de nos exportations. Or il y a un vivier d'environ 50 000 entreprises qui pourraient, si elles étaient mieux informées et davantage encouragées à le faire, devenir des entreprises exportatrices, notamment sur les marchés européens de proximité.
Nous y parviendrons en relançant le volontariat à l'international, particulièrement bien adapaté aux PME, en réformant le centre français du commerce extérieur et UbiFrance, en favorisant la participation des entreprises aux salons à l'étranger et en nous rapprochant des PME grâce à la décentralisation.
La décentralisation est la quatrième priorité de mon ministère, en même temps que du Gouvernement tout entier. Elle permettra de rapprocher le dispositif public des PME. Ce projet sera mené à bien, dès 2003, par les transferts de compétences nécessaires en faveur des régions, dont le dispositif - les chiffres que M. de Montesquiou a rappelés tout à l'heure le démontrent - est actuellement trop faible.
La cinquième priorité est d'assurer l'attractivité du site « France », composante déterminante de la compétitivité de notre économie qui doit être renforcée pour permettre une meilleure insertion de nos entreprises dans les échanges mondiaux.
Le marché européen étant maintenant unique, les barrières douanières s'abaissant, le contrôle des flux de marchandises et de services n'est plus à l'ordre du jour pour les entreprises et les consommateurs. Encore faut-il garder en France les outils de production, de recherche et les emplois. Le Gouvernement est déterminé à alléger les charges et à simplifier notre réglementation, pour rendre le site « France » plus attractif pour les investisseurs étrangers.
Le projet de budget que j'ai l'honneur de vous présenter prévoit des moyens quasiment identiques à ceux de 2002. Il dégage néanmoins des marges de manoeuvre en raison des gains de productivité que mes services sont en train de réaliser ou des réserves qui existent sur telle ou telle ligne.
Le budget de fonctionnement de 168 millions d'euros soutient une direction centrale, la direction des relations économiques extérieures, qui compte 290 personnes, des directions régionales du commerce extérieur de 156 agents et un réseau de 154 missions économiques composées de 1 923 spécialistes du commerce extérieur.
La force de ce réseau à l'étranger, qui est commun à l'ensemble du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie depuis cette année, repose sur la diversité de recrutement et d'origine puisqu'il s'appuie sur un important recrutement local.
Mon objectif est d'accroître la mobilité en redéployant les moyens vers les zones prioritaires dont j'ai parlé et en affectant le plus grand nombre d'agents aux prestations aux entreprises, ce que les gains de productivité obtenus grâce à la certification ISO 9001 et la fusion des différents services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie à l'étranger, qui crée des synergies et des économies et qui permet d'affecter plus de monde aux services des PME, rendent possibles.
Le deuxième grand poste de ce budget correspond aux subventions de l'Etat aux organismes de soutien du commerce : le centre français du commerce extérieur, UbiFrance et l'agence française pour les investissements internationaux. La dotation pour l'année 2003 est identique à celle de 2002, et atteint 45 millions d'euros au total. Dans ce domaine, les ambitions du Gouvernement sont à la hauteur de l'enjeu : faire des PME la cible première de ce dispositif. Dès mon arrivée au ministère, plutôt que de reprendre les projets inachevés de mes prédécesseurs, j'ai demandé un audit des principaux produits réalisés par ces organismes. Les rapports, que différents orateurs ont évoqués, m'ont été remis en octobre dernier. Je les ai étudiés et je poursuis encore mes consultations avec les fédérations professionnelles et les entreprises, avant d'engager les concertations nécessaires avec les personnels.
Mon objectif est clair : il s'agit, d'une part, de proposer la réunion du Centre français du commerce extérieur et d'UbiFrance, pour mieux diffuser auprès des PME l'information et les prestations produites par ces organismes et par les missions économiques à l'étranger, et, d'autre part, de redonner une véritable priorité nationale aux volontaires à l'international. A cet égard, vous avez été nombreux, mesdames, messieurs les sénateurs, à évoquer le décalage existant entre les demandes de poste à l'international par les jeunes et le nombre d'entreprises qui recrutent. Il est nécessaire de mener une grande campagne de communication et de présentation du dispositif, qui s'est assoupli, élargi et simplifié, et qui peut donc profiter à un grand nombre de jeunes.
Enfin, il s'agit de favoriser la participation des entreprises françaises aux salons à l'étranger. Cela passe par une nouvelle organisation du dispositif public et privé, grâce à la réforme d'UbiFrance, ainsi que par un renforcement des moyens publics de soutien aux salons, car, nombre d'entre vous l'ont rappelé, l'effort français dans ce secteur est, comparativement, insuffisant.
Je souhaite donc redéployer des moyens existants pour accroître les soutiens publics aux salons qui sont particulièrement adaptés aux attentes des petites et moyennes entreprises. Mon objectif est que la présence commerciale française sur les salons devienne comparable à celle de nos voisins allemands ou italiens.
L'Agence française pour les investissements internationaux bénéficie elle aussi d'une subvention. A l'heure de la mondialisation et au moment où les investissements internationaux jouent un rôle croissant dans la réussite économique des pays, sa mission apparaît indispensable au vu du recul de la France, en termes d'attractivité, dans les principaux classements internationaux privés et, surtout, du problème d'image dont nous souffrons.
Plutôt que de créer un réseau coûteux et distinct, l'Agence française pour les investissements internationaux s'appuie sur le réseau à l'étranger des missions économiques pour prospecter de nouveaux investissements qui participent à la modernisation de notre outil de production, à une concurrence saine et à la création d'emplois sur le territoire national.
Il nous faudra inverser la tendance, en matière de fiscalité et de charges sociales, pour redonner à notre pays l'attractivité qui doit être la sienne. Nous devrons le faire savoir sur les grandes places financières internationales : ce sera bien évidemment l'une de mes principales missions l'année prochaine.
Enfin, le troisième grand poste du projet de budget du commerce extérieur concerne les procédures financières de soutien aux entreprises. Ses crédits s'élèvent à 241 millions d'euros, l'objectif étant de mieux servir les PME.
Je rappelle que la COFACE, groupe privé, gère pour l'Etat un compte d'assurance-crédit qui dégage un excédent depuis plusieurs années. Aujourd'hui, l'encours porté par l'Etat est de 70 milliards d'euros, et 6,5 milliards d'euros de nouveaux engagements ont été pris en 2002, notamment pour aider les secteurs du transport aérien et du tourisme, qui ont été particulièrement frappés par la conjoncture internationale après les tragiques attentats du 11 septembre 2001. Les autres procédures, en particulier l'assurance prospection, tournée vers les PME, ont été assouplies.
Quant au FASEP-étude, qui permet d'aider les entreprises qui le souhaitent à remettre des offres financées par les organisations internationales, sa dotation est identique à ce qu'elle était l'année précédente. Je souhaite, comme je l'ai indiqué, mettre nos procédures au service des PME, qui ne bénéficient pas assez du dispositif. Je vais donc accroître notre effort pour les salons à l'étranger,...
M. Marc Massion, rapporteur spécial, et M. Michel Bécot, rapporteur pour avis. Très bien !
M. François Loos, ministre délégué. ... en utilisant une partie des moyens d'un fonds de garantie pour les investissements à l'étranger, le Fonds d'étude et d'aide au secteur privé, le FASEP-garantie, qui n'a traité que quarante-quatre dossiers depuis sa création, pour les redéployer sous forme de crédits de soutien aux PME désireuses de participer aux salons à l'étranger. Cet effort sera soutenu pendant trois ans : chaque année, 7 millions d'euros viendront s'ajouter aux 4 millions d'euros actuellement alloués.
Ce troisième poste du projet de budget comprend aussi la participation de l'Etat aux contrats de plan Etat-région dans le domaine du commerce extérieur, soit 5,6 millions d'euros en crédits de paiement. Ces plans ont permis, en étroite liaison avec les régions, de développer des politiques sectorielles adaptées à chaque région et ciblées sur certains pays.
Vous connaissez les ambitions du Gouvernement en matière de décentralisation. Nous souhaitons donner de véritables compétences aux régions s'agissant de commerce extérieur : leur proximité, leur connaissance du tissu économique local font des collectivités régionales un interlocuteur naturel des entreprises désireuses de s'internationaliser.
M. Aymeri de Montesquiou. Très bien !
M. François Loos, ministre délégué. Cette décentralisation pourra être menée à bien dès 2003, en concertation avec les élus et les personnels concernés.
Une mondialisation maîtrisée ouvrant de nouveaux marchés à nos entreprises, des responsabilités assumées à l'égard des pays du Sud, une priorité donnée à nos jeunes et à nos PME, véritables viviers d'exportations nouvelles, une ambition sur les marchés de proximité et en forte croissance, une organisation décentralisée plus proche du terrain : tous ces axes contribueront à donner confiance aux Français, qui sauront, j'en suis sûr, tirer le meilleur parti de cette ouverture sur le monde.
Je voudrais maintenant répondre à quelques questions que je n'ai pas évoquées dans mon propos liminaire.
M. Massion m'a interrogé sur les procédures gérées par la COFACE, qui n'utiliserait pas la totalité des crédits disponibles, et a notamment fait allusion au FASEP-garantie. Plutôt que d'essayer de rendre le FASEP-garantie plus efficace, j'ai surtout cherché à récupérer l'argent inutilisé qui servait de garantie à ce dernier, afin de financer la participation française à davantage de salons à l'étranger. Nous sommes alors certains de l'efficacité de l'argent utilisé, tandis que la valorisation de ce fonds, en termes de prêts, n'était pas aussi importante.
Vous avez en outre souligné, monsieur Massion, que les conseillers du commerce extérieur étaient des acteurs importants et qu'il fallait les inciter à aider et à sensibiliser davantage notre jeunesse. A cet égard, je souhaite qu'ils prospectent plus systématiquement les entreprises susceptibles de recruter des VIE à l'étranger. J'ai commencé, lors de tournées régionales, à leur demander de mener cette action, mais j'aimerais que, à l'occasion de la réforme du décret les concernant, nous prévoyions de leur confier systématiquement un certain nombre de missions.
Enfin, vous avez évoqué, monsieur Massion, la nécessaire décentralisation. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je souhaite que cette décentralisation puisse s'opérer, mais sous certaines conditions. Un transfert de compétences ou une action conjointe avec les régions sont de bonnes formules, encore faut-il que l'action menée par les régions offre toutes les garanties de durée dans le temps qui siéent à une bonne politique en matière de commerce extérieur : il ne s'agit pas de réaliser des opérations au coup par coup ; la durée, la compétence sont nécessaires. Sous ces réserves, la décentralisation sera évidemment bénéfique à tous.
M. Michel Bécot m'a interrogé à propos de l'OMC, en rappelant que l'accès aux médicaments et les négociations sur l'agriculture et sur les services devaient être des priorités pour notre pays.
Il est évident que, dans les négociations internationales, nous apparaissons aujourd'hui comme le porte-drapeau d'une certaine politique agricole. On nous reproche souvent de recourir aux subventions et aux tarifs douaniers, et l'on prétend parfois, parallèlement, que les pays en voie de développement tireraient automatiquement bénéfice d'une réduction de ces derniers.
La réalité est différente.
Tout d'abord, les Européens sont les premiers acheteurs de produits agricoles en provenance des pays en voie de développement. Nous leur en achetons pour 28 milliards d'euros par an, alors que les Etats-Unis ne leur en achètent que 8 milliards d'euros. Contrairement aux apparences et aux informations qui circulent quelquefois, nous sommes donc très ouverts.
D'ailleurs, nous avons complètement ouvert nos marchés à quarante-neuf des pays les plus pauvres, et nous serions en droit d'attendre des autres pays développés qu'ils adoptent la même attitude. En outre, les parts de marché que nous avons perdues dans le secteur agricole ces vingt dernières années, notamment dans le domaine de la viticulture, ont été récupérées non par des pays en voie de développement, mais par les pays du Nouveau Monde. Ce qui vaut pour le vin vaut pour tous les autres produits agricoles : en fait, c'est le groupe de Cairns qui a bénéficié des pertes de capacités que nous avons acceptées par le passé.
J'indiquerai à Mme Terrade que la France mène une politique très active en matière d'annulation de la dette et de conversion en investissements.
M. Bizet a parlé de l'OMC et de l'importance du rôle des parlements. Je pense que les Etats-Unis jouent parfaitement sur ce registre, en donnant quelquefois au Congrès la capacité de s'opposer à une décision de l'administration. Telle n'est sans doute pas votre conception de la participation du Parlement français aux négociations au sein de l'OMC, monsieur le sénateur, mais je suis à votre entière disposition pour échanger sur ce sujet.
M. Aymeri de Montesquiou, quant à lui, a évoqué un certain nombre de sujets. Je reviendrai sur le thème de la coordination entre les services du ministère des affaires étrangères et ceux du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie à l'étranger. Je souhaite lui dire que cette coordination est inscrite dans un décret de 1979, qui donne à l'ambassadeur autorité sur l'ensemble des services à l'étranger, et que, depuis 1995, il existe un comité interministériel des moyens de l'Etat à l'étranger, qui assure la cohérence de l'utilisation desdits moyens. Telle est la démarche actuelle en matière de coopération, mais il est possible d'aller plus loin en cas de nécessité.
Enfin, j'ai déjà répondu, monsieur Trémel, à propos du FASEP-garantie et des effectifs des VIE. Quant au chapitre 57-90 concernant l'immobilier, il comporte des crédits en report, ce qui nous permet d'annuler une ligne budgétaire cette année. Cela ne signifie pas que les moyens sont inexistants ; nous disposons des réserves de l'année dernière, qui n'ont pas été consommées et nous semblent suffisantes pour couvrir les besoins. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et C concernant l'économie, les finances et l'industrie.
Je rappelle au Sénat que les autres crédits concernant l'économie, les finances et l'industrie ont été examinés aujourd'hui même.

ÉTAT B