Compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Serge Vinçon

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures.)

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PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le procès-verbal de la séance du jeudi 15 avril 2004 a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté.

2

DÉCÈS D'UNE ANCIENNE SÉNATRice

M. le président. J'ai le regret de vous rappeler le décès de notre ancienne collègue Nelly Rodi, qui fut sénatrice des Yvelines de 1986 à 1995.

3

Questions orales

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

recours par les offices de tourisme aux contrats à durée déterminée d'usage pour l'emploi des guides

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet, auteur de la question n° 442, adressée à M. le ministre délégué au tourisme.

M. Louis Souvet. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué au tourisme.

« Nous ne sommes qu'au début du chemin », disait récemment M. Léon Bertrand, que je tiens à féliciter ici pour son action tout autant que pour sa modestie et son réalisme. Cette citation est en effet extraite de l'éditorial ministériel présentant les résultats du Comité interministériel consacré au tourisme. M. le ministre délégué précisait à cette occasion que cela fait vingt ans que le tourisme, pourtant première contribution à l'excédent de la balance commerciale française, n'avait pas fait l'objet d'une concertation interministérielle globale.

Les offices de tourisme sont des acteurs majeurs dans ce secteur. Ils doivent, pour dynamiser et étoffer leur action de promotion, avoir recours à des guides. Compte tenu des spécificités du secteur touristique, il est d'usage constant - les chiffres des statistiques sont là pour le prouver - que les offices de tourisme emploient les salariés en question sous contrat à durée déterminée. Lorsqu'un contrat à durée indéterminée est en cause, il s'agit soit d'un contrat à durée indéterminée « intermittent » - forme qui est difficilement applicable par les petites structures d'employeurs dont les offices de tourisme -, soit de salariés ayant d'autres tâches dans l'office et n'exerçant qu'occasionnellement une activité de guide.

Si la France veut conforter, comme c'est l'ambition légitime de M. le ministre délégué, sa place de première destination mondiale, elle pourra le faire grâce à la qualité de son accueil, qui passe par les offices de tourisme et, évidemment, par les guides. Par crainte de ne plus être en conformité avec les règlements, qui sont complexes en matière d'embauche, certains offices envisagent de supprimer des emplois de guide. Seraient ainsi remis en cause - et ce n'est sûrement pas le souhait de M. le ministre délégué - les efforts en faveur du développement du tourisme culturel en France, mais également les journées du patrimoine, pour lesquelles les guides des offices de tourisme sont évidemment mis à contribution.

Or, malgré des demandes réitérées de la Fédération nationale des offices de tourisme et syndicats d'initiative, l'activité de guides salariés de telles structures n'est pas présente dans la liste des secteurs habilités définis au 3° de l'article L. 122-1-1 du code du travail : cet article précise sans ambiguïté que la liste des secteurs d'activité dans lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée, en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de l'emploi, est définie soit par voie de convention ou accord collectif étendu, soit par décret.

Je demande donc à M. le ministre délégué si, compte tenu de ses prérogatives ministérielles, il va se joindre aux professionnels de ce secteur pour convaincre ses collègues du Gouvernement du bien-fondé de cette demande. Dans la ville dont je suis le maire, il est en effet de pratique constante qu'un guide effectuant trois visites dans la même journée signe trois contrats à durée déterminée de deux heures.

Au demeurant, je vous renouvelle mon soutien pour les actions entreprises par le ministère, à savoir faciliter, accompagner, adapter. Ma démarche s'inscrit totalement dans cette dernière logique.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat, dont je salue la première intervention au Sénat dans ses nouvelles fonctions.

Permettez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat, de vous adresser, en notre nom à tous, nos souhaits de cordiale bienvenue et de parfaite réussite.

M. François Goulard, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur le président, je suis infiniment sensible à vos aimables propos, qui me vont droit au coeur.

Monsieur le sénateur, mon collègue Léon Bertrand appréciera certainement les propos que vous avez tenus à l'instant à son endroit.

En son nom, je rappellerai, comme vous l'avez fait excellemment, l'importance qu'ont les guides au sein des offices de tourisme. Ils forment une composante essentielle de la prestation de qualité de l'activité touristique et permettent de mieux découvrir les sites naturels ou culturels de nos territoires.

Monsieur le sénateur, le Gouvernement partage totalement votre sentiment sur la nécessité de stabiliser ces emplois, qui sont une priorité de notre économie touristique. A cette fin, il apparaît indispensable que le contrat à durée déterminée renouvelable pour raisons d'usage soit étendu à cette activité par voie réglementaire.

A ce jour, en matière de travail et d'emploi, le Gouvernement s'est engagé dans deux voies importantes.

Il s'agit, d'une part, de faciliter le dialogue social en entamant la négociation de branche dans les offices de tourisme, ce qui permettrait de trouver un accord pouvant, dès lors, être étendu.

Il s'agit, d'autre part, de simplifier le droit du travail. Comme vous le savez, François Fillon, alors ministre des affaires sociales, a confié à M. de Virville le soin de lui remettre un rapport sur la simplification du droit du travail, dans lequel la question du droit d'usage est abordée. Ce rapport donnera lieu, le moment venu, à des prolongements.

C'est en ces termes que Léon Bertrand a immédiatement saisi de cette question Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail, et de la cohésion sociale, afin qu'un travail en commun entre leurs services permette de trouver une réponse pratique, opérationnelle et rapide à cette question. Il vous proposera ainsi le plus vite possible une solution susceptible de préserver, mais aussi de développer l'emploi des guides, dont il faut rappeler le caractère absolument indispensable à notre économie touristique.

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet.

M. Louis Souvet. Monsieur le secrétaire d'Etat, si une négociation s'engage, il ne sera pas difficile, à mon avis, de trouver un accord de branche puisque, comme je vous l'ai dit, la Fédération nationale des offices de tourisme et syndicats d'initiative le demande.

Nous attendons, bien sûr, les conclusions du rapport de M. de Virville, qui iront, je l'espère, dans ce sens. J'espère aussi que le ministre du travail voudra bien trancher. Toutefois, sauf erreur de ma part, je crois savoir que la décision peut être prise par décret. (M. le secrétaire d'Etat opine.)

Par conséquent, si la situation ne s'arrange pas, un décret ministériel devrait pouvoir véritablement accélérer le règlement de ce dossier. Nous en avons besoin, car les offices de tourisme, qui jouent évidemment un rôle très important dans l'activité touristique en France, se découragent quelque peu. De même, les guides, confrontés au problème de renouvellement de contrats, sont un peu comme « l'oiseau sur la branche ».

Il serait donc bon de « passer un coup d'éponge » sur toutes ces difficultés.

avenir du site industriel d'imphy alloys sa

M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé, auteur de la question n° 457, adressée à M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. René-Pierre Signé. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'annonce de la suppression de 94 emplois sur le site industriel d'Imphy Alloys SA, qui feront d'ailleurs pendant aux 73 emplois également supprimés à Firminy.

Dans un contexte de crise mondiale des aciers inox, les groupes industriels mondiaux réalisent des économies de grande échelle et se repositionnent sur des marchés plus étroits, mais le plus souvent au détriment de l'emploi et des territoires.

Dans un département déjà durement touché par la crise économique comme la Nièvre, les suppressions d'emplois annoncées sont à l'évidence difficilement vécues puisqu'elles feront suite à des licenciements au sein de Techphy et d'Ugitech. Il n'y a en effet qu'une poignée de lieux industriels comme celui d'Imphy qui soient capables de travailler aussi finement sur des alliages et inox complexes.

L'activité du site global, qui emploie 1 400 salariés, induit par ailleurs trois fois plus d'emplois dans la région. Tous les acteurs locaux sont donc extrêmement inquiets. Or les réponses précises de l'Etat aux questions déjà posées par plusieurs parlementaires de la Nièvre se font attendre.

Je souhaite donc insister, monsieur le ministre, pour savoir s'il vous est possible, en liaison avec les responsables locaux, d'assurer un suivi attentif de l'évolution de ce dossier. Plus généralement, comment comptez-vous prendre en compte l'avenir de ce bassin d'emplois ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Monsieur le sénateur, comme vous le savez, le groupe Arcelor a annoncé, à la fin 2003 et au début de l'année 2004, qu'il envisageait de réduire les effectifs des établissements d'Ugitech et d'Imphy Alloys à Imphy.

Les activités industrielles des filiales concernées - élaboration des alliages, laminage de précision des aciers inoxydables et tréfilage - ont de très longue date contribué au développement de l'économie du bassin d'lmphy. Toutefois, les débouchés de ces activités, notamment dans les secteurs de l'électronique, de l'énergie, de l'automobile et de la mécanique connaissent, hélas ! depuis quelques années une évolution défavorable, en termes tant de demande que de concurrence.

Le Gouvernement est particulièrement attentif à cette évolution et c'est pourquoi il se bat pour la compétitivité de ses grands groupes nationaux. En effet, dans le domaine de l'énergie, sans EDF-GDF, mais aussi sans Alstom ou Aventis-Sanofi, la France ne disposerait pas des chances qu'elle a aujourd'hui.

Cependant, pour répondre à ces contraintes économiques, Arcelor doit aussi impérativement mettre en oeuvre les actions nécessaires en vue d'améliorer les performances des deux filiales, Imphy Alloys et Ugitech, sur les marchés de spécialité qui sont les leurs.

C'est à ce prix, en améliorant sa productivité et en développant les meilleures technologies, que notre pays conservera son avance, condition nécessaire pour maintenir ses emplois industriels.

Arcelor, comme nombre de ses concurrents en Europe, est engagé depuis le début des années quatre-vingt dix dans un cycle permanent d'adaptation de son outil de production, afin de maintenir son niveau de compétitivité et ses positions de leader mondial sur le marché, en particulier sur celui des aciers spéciaux, activité traditionnelle du site d'Imphy depuis l'origine.

Sur le site d'Imphy Alloys, la société intervient sur des marchés de spécialité - les alliages à base de nickel - où la concurrence est mondiale. Aujourd'hui, elle est en outre confrontée à l'envolée des cours des matières premières, le nickel notamment, ce qui porte atteinte à sa compétitivité.

Le groupe a annoncé, au début de mars 2004, qu'il comptait poursuivre les actions conduites depuis plusieurs années afin de maintenir et d'améliorer l'efficacité industrielle du site d'Imphy. Il a donc garanti la pérennité de cette implantation. Un plan d'adaptation devrait en conséquence être mis en oeuvre.

Dans le cadre des procédures fixées par la loi, une information et une consultation du personnel viennent d'être lancées. Conformément aux dispositions prévues dans le livre IV du code du travail, les conditions économiques du plan seront examinées avec le personnel. Les négociations suivent donc leur cours.

Arcelor a démontré ses capacités à maîtriser les conséquences sociales des restructurations qui ont depuis longtemps touché le groupe. Dans le cas d'Imphy, comme par le passé, le groupe est prêt à mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour assurer au mieux le reclassement et la reconversion des personnels concernés. Fidèle à une pratique constante au sein du groupe, il s'efforcera notamment de rechercher une solution adaptée à chaque cas particulier.

En ce qui concerne la réindustrialisation du bassin d'emplois, l'expérience acquise par la société lui permettra, le moment venu, de proposer, en concertation avec les autorités locales, les solutions les plus appropriées afin d'engager la nécessaire revitalisation du tissu économique local.

Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, de son côté, en liaison avec les autres administrations concernées, sera particulièrement vigilant en ce qui concerne le respect par la société des obligations que lui impose la législation en vigueur, d'une part, et le développement de ce site pour son caractère industriel, d'autre part.

M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé.

M. René-Pierre Signé. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, bien qu'elle ne m'ait pas vraiment rassuré quant à la pérennité du site d'Imphy.

Je ne reprendrai pas vos propos. Je crois que vous êtes convaincu de la performance de l'outil, de la qualification et du savoir-faire indéniable de la main-d'oeuvre. Il est dommage que des sites comme celui d'Imphy puissent être amputés, ou qu'ils puissent disparaître.

Si vous avez promis la pérennisation du site - et j'en prends acte -, vous avez aussi parlé de plans sociaux, de reconversion, de réindustrialisation. Cela laisse supposer qu'il y aura bien des licenciements et que le site sera largement amputé de ses emplois et de ses productions.

Je regrette cette situation, monsieur le ministre, même si je comprends les arguments développés par la direction : envolée du coût des matières premières, concurrence des entreprises implantées dans des zones dans lesquelles le coût de la main d'oeuvre est moindre. Mais ce sont précisément ces délocalisations qui nous font souffrir...

Le site d'Imphy présente une spécificité que l'on ne retrouvera pas ailleurs et la qualité de la production sera perdue en cas de délocalisation.

Dans tout plan social, les reconversions sont mal acceptées par des salariés qui, pendant des années, ont mis beaucoup de coeur à affiner leur savoir-faire. Or ceux d'Imphy fabriquent des aciers inox reconnus parmi les meilleurs produits en France.

Monsieur le ministre, le Gouvernement devrait prendre acte de cette situation et se battre avec une vigueur et une détermination accrues pour sauver le site d'Imphy qui, si je me réfère à vos propos, est gravement menacé.

frais liés au recouvrement de la fiscalité locale

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle, auteur de la question n° 472, transmise à M. le secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire.

M. Jean-Claude Carle. Monsieur le ministre, ma question porte sur les frais prélevés par l'Etat au titre du recouvrement de la fiscalité locale.

L'Etat assure l'établissement et le recouvrement des impôts directs locaux pour le compte des collectivités locales. En contrepartie, il perçoit une somme égale à 8 % des cotisations.

Ce prélèvement, qui représente une partie substantielle des frais de fonctionnement, est parfois supérieur à la part perçue par certaines collectivités territoriales - la région ou les intercommunalités - sur l'impôt foncier ou sur la taxe d'habitation.

Ainsi, en 2003, pour un foyer fiscal acquittant 1 000 euros au titre de la taxe foncière, la région Rhône-Alpes perçoit 52 euros, tandis que l'Etat récupère 75 euros pour frais de gestion de la fiscalité locale directe.

Sur les 52 euros qui reviennent à la région, 92%, soit environ 47 euros, sont investis dans les politiques régionales - lycées, formation professionnelle, développement économique, transports... - et 5 euros seulement vont au remboursement de la dette ou à la gestion interne de la collectivité. Du moins était-ce le cas avant le mois de mars, lorsque nous conduisions l'action régionale, mais les choses risquent malheureusement de changer.

En revanche, les 75 euros perçus par l'Etat sont essentiellement consacrés à la gestion de la fiscalité locale directe, notamment au recouvrement de l'impôt pour le compte des collectivités, bien qu'une part soit réservée au financement de dégrèvements ou à la compensation de certaines exonérations.

Les collectivités territoriales et locales ont un rôle de redistribution non négligeable dans les domaines du développement économique, de l'éducation, de la formation, de l'action sociale et culturelle ou de l'aménagement du territoire.

N'est-ce pas un véritable contresens économique et politique qu'une assemblée locale, véritable vecteur d'investissement à l'échelle du territoire, perçoive une part de la fiscalité inférieure à celle qui est prélevée par l'Etat pour assurer le fonctionnement de ses services ?

Monsieur le ministre, lors de votre prise de fonctions, M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, a clairement annoncé son intention d'inculquer à ce ministère la même culture du résultat que celle que vous aviez prônée à ses côtés lorsque vous étiez au ministère de l'intérieur.

La culture du résultat, c'est la culture de l'efficacité et de la rentabilité. Elle s'applique au monde de l'entreprise. Tout opérateur économique qui ne respecte pas cette règle est appelé à disparaître.

Toutefois, elle peut également s'appliquer à l'Etat. Cette exigence doit se traduire par une réduction drastique des coûts de fonctionnement au profit de l'application de politiques territoriales. Elles seules sont génératrices de richesses au côté, bien sûr, des opérateurs économiques privés.

On ne peut indéfiniment admettre que, sur la feuille d'imposition des Français, une part aussi importante de la contribution fiscale soit consacrée à la gestion même de son recouvrement.

Notre société a connu, au cours des dix dernières années, un formidable développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Cette évolution offre aujourd'hui des outils qui permettent d'économiser des moyens, aussi bien matériels que financiers.

La cyberfiscalité commence à se développer dans notre pays. Mais il faut aller plus avant pour entrer dans un véritable cercle vertueux de la fiscalité.

Confiant dans votre volonté de réforme, volonté que vous avez déjà démontrée dans l'exercice de vos précédentes fonctions, je vous demande, monsieur le ministre, de bien vouloir nous indiquer les mesures que vous envisagez de prendre pour réduire ces coûts de prélèvement et de fonctionnement, afin de réserver une part plus importante de l'impôt à l'investissement, à la réduction des déficits ou à la baisse de la pression fiscale.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Monsieur le sénateur, comme vous l'avez rappelé, l'Etat perçoit des frais de gestion sur le montant des cotisations d'impôts établies et recouvrées au profit des collectivités territoriales.

Ces frais sont non seulement la contrepartie des dépenses que l'Etat supporte pour établir et recouvrer l'ensemble des impôts directs locaux, mais ils servent également à financer partiellement les dégrèvements et les admissions en non-valeur dont ces impôts peuvent faire l'objet.

A ce titre, le coût de la participation de l'Etat pour les seuls dégrèvements et admissions en non-valeur a plus que doublé entre 1992 et 2002, passant de 4,8 milliards à plus de 10,3 milliards d'euros.

Dans le même temps, le montant total des frais de gestion perçus par l'Etat est passé, hélas ! de 2,7 milliards à 4,2 milliards d'euros.

Comme vous pouvez le constater, la participation croissante de l'Etat dans le financement de la fiscalité directe locale au cours de ces dernières années est de nature à expliquer le maintien de frais de gestion à un niveau élevé. L'Etat, je le rappelle, contribue chaque année au financement des collectivités locales à hauteur de 59 milliards d'euros, somme à comparer aux 4 milliards d'euros de prélèvements sur le fruit de la fiscalité locale.

Par ailleurs, l'établissement des rôles et avis ne représente, vous le savez, qu'une partie des travaux de l'administration pour l'émission des impôts directs locaux.

Les services fiscaux sont en effet chargés non seulement du calcul des impôts locaux et de la confection des rôles, mais aussi de la recherche et de l'évaluation de la matière imposable. Ils assurent, en outre, l'information des collectivités territoriales en leur notifiant les bases d'imposition nécessaires au vote de leurs taux d'imposition et une copie des rôles. Enfin, le budget de l'Etat finance les dépenses d'imprimés et de matériels qu'engendre la fiscalité directe locale. La globalité de ces travaux représente donc une charge importante.

Cela étant, la Cour des comptes porte en ce moment son attention sur la question des frais prélevés par l'Etat au titre de la gestion de la fiscalité locale. Nous examinerons avec attention les conclusions de son enquête.

Par ailleurs, et vous l'avez souligné à juste titre, le coût de la gestion de l'impôt est notablement plus élevé en France qu'en Europe. Il est également supérieur à celui d'autres services publics.

Cette situation s'explique par diverses raisons. Je n'en évoquerai que quelques-unes : plusieurs administrations interviennent dans la gestion de l'impôt ; les réseaux locaux ont un maillage très fin, qui est hérité de l'Histoire ; notre législation fiscale est, ô combien ! compliquée ; le raffinement et la modestie de certains impôts les rendent mécaniquement peu «rentables », si cette expression peut être ici utilisée.

Une étude est en cours depuis deux ans pour traiter les principales causes du surcoût. L'accent a ainsi été mis en priorité sur le recouvrement de l'impôt. L'idée qui préside à cette action consiste tout d'abord à remettre en cause la séparation entre la gestion de l'assiette et le recouvrement, à concentrer la perception de l'impôt sur une structure plus définie, à réduire le maillage territorial en fermant, ou plutôt en regroupant les petites structures.

Cette action doit être poursuivie : réduire le coût de gestion de l'impôt est en effet une nécessité absolue. S'agissant de l'impôt sur le revenu, les déclarations par Internet ont connu cette année un grand succès, ce qui est prometteur pour l'avenir.

Monsieur le sénateur, je veux vous assurer de la détermination du Gouvernement à faire la chasse aux dépenses indues et à améliorer la productivité du recouvrement de l'impôt.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle.

M. Jean-Claude Carle. Je vous remercie, monsieur le ministre, des précisions que vous m'avez apportées sur la gestion de la fiscalité locale.

Vous avez distingué la part qui est réservée au dégrèvement et aux admissions en non-valeur et celle qui est consacrée à la gestion locale. Le coût de cette dernière reste très élevé, vous l'avez rappelé. Il a doublé en dix ans et il est supérieur à celui de la plupart des pays européens.

Monsieur le ministre, je me réjouis de votre volonté de réduire ce coût. Il s'agit, vous l'avez indiqué, d'une nécessité absolue. Il est important, dans un climat économique et budgétaire difficile, de concentrer nos efforts sur l'investissement plutôt que sur le fonctionnement. C'est en effet la meilleure façon de préparer l'avenir.

Je vous remercie de mettre en place des mesures qui vont dans ce sens.

avenir des petites entreprises artisanales et commerciales en milieu rural

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, auteur de la question n° 476, adressée à M. le ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.

M. Jean Boyer. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation sur l'avenir de notre tissu artisanal et commercial, en particulier au coeur de nos territoires ruraux.

Nous le savons tous, l'Etat ne saurait être le seul acteur du développement local. Néanmoins, il conserve un rôle fondamental et fédérateur afin de garantir en tous points du territoire national une parité de traitement, de chances, et donc de réussite

Nos différentes politiques d'aménagement du territoire doivent prendre en compte non seulement les handicaps naturels, mais aussi le nécessaire maintien des activités privées, dont la grande majorité remplit avec beaucoup de détermination et de volonté des missions qui, normalement, incomberaient aux services publics.

Ainsi, tous les efforts entrepris par l'Etat dans le but de rompre la fracture rurale ne sont pas simplement une nécessité, mais elles sont un droit, je dirais même une parité.

La décentralisation ne doit pas être uniforme, elle doit pouvoir s'adapter au terrain de la pratique locale. Conscient que chaque territoire, mais également la vie, sont liés au travail, je considère que l'un de nos objectifs essentiels est de tout faire pour servir le développement local. Vous le savez, monsieur le ministre, chers collègues, le maintien du travail, c'est aussi le maintien de la vie.

Ainsi, l'agriculture ne peut rester seule dans nos zones rurales, en particulier dans nos zones de montagne et de moyenne montagne. Nous avons besoin de commerces, d'artisans pour donner à l'aménagement de notre territoire tout son sens. Si nous n'y prêtons garde, nos agriculteurs n'auront plus de voisins pour les accompagner dans leur développement, ou simplement dans leur vie quotidienne.

C'est la raison pour laquelle il devient indispensable d'apporter une réponse concrète à tous ceux qui n'ont pas peur d'engager leur avenir professionnel et de prendre le risque d'investir sur ces territoires ruraux.

Choisir de vivre au pays n'est pas toujours un signe de rentabilité, c'est bien plus : c'est l'attachement à l'identité d'une région, mais aussi à la défense d'une certaine conception des services publics.

Comment le Gouvernement entend-il répondre à l'appel de nos campagnes, de ses petites entreprises artisanales ou commerciales pour accompagner notre monde rural dans son nécessaire renouveau ?

Par exemple, la mise en place d'une dotation d'installation en faveur de nos jeunes concitoyens, artisans ou commerçants, ne pourrait-elle pas être envisagée si ceux-ci décidaient de s'installer en zone de revitalisation rurale ? Dans le même sens ne pourrait-on pas instaurer une diminution sensible des charges patronales qui, au cours des premières années notamment, viennent grever littéralement le budget de ces jeunes entreprises ?

La décentralisation doit aussi être le moyen de donner des signes d'encouragement pour l'activité économique et le développement de nos territoires qui, vous le savez, se dépeuplent malheureusement de façon régulière.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Monsieur le sénateur, vous évoquez la mise en place de dotations à l'installation des jeunes en milieu rural pour les activités de commerce et d'artisanat et vous soulignez la nécessité d'un allégement des charges sur les entreprises en milieu rural.

Le fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce, le FISAC, est l'instrument privilégié de l'action de l'Etat dans ce domaine, en liaison avec les collectivités locales et les chambres consulaires, pour la sauvegarde et le développement des services commerciaux et artisanaux de proximité.

Ses ressources ont été fixées par la loi de finances pour 2004 à 71 millions d'euros. En application de la réforme de 2003, une majoration des taux d'intervention a renforcé l'impact du FISAC en milieu rural pour les communes de moins de 2000 habitants. Le FISAC subventionne en particulier les dépenses d'investissement relatives à l'installation, à la modernisation et à la sécurisation des entreprises et des locaux d'activité, y compris les vitrines.

Pour les opérations conduites par les collectivités publiques, sont également éligibles l'achat de locaux d'activité, hors fonds commerciaux, et l'aménagement des abords immédiats du commerce concerné, notamment pour en faciliter l'accès. Les taux d'intervention varient, suivant les cas, de 20 % à 40 %.

En 2003, 479 opérations en milieu rural ont pu ainsi être financées, pour un montant total de plus de 18 millions d'euros.

En ce qui concerne la baisse des charges patronales, il convient de rappeler que les allégements sur les bas salaires prévus par la loi du 18 septembre 2002 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi, ne laissent subsister, au niveau du SMIC, qu'environ 5 % de charges patronales non conventionnelles.

Enfin, la loi pour l'initiative économique, entrée en vigueur en 2003, établit un différé de paiement des charges sociales dues au titre de la première année de création d'une entreprise, et les paiements sont ainsi étalés sur les cinq années suivantes.

Il existe donc un dispositif très important en faveur des petites entreprises en milieu rural, qui sera amélioré par l'action du Gouvernement avec la couverture numérique de l'ensemble du territoire national. Ce sera un instrument d'égalité et de péréquation pour mettre les territoires ruraux à égalité avec les villes.

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.

M. Jean Boyer. Je constate, monsieur le ministre, que vous avez une bonne connaissance du message des territoires ruraux, mais je veux simplement vous dire, sans allonger exagérément mon propos, qu'ils ont besoin d'être compris et encouragés !

conséquences du séisme du 22 février 2003

M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner, auteur de la question n° 468, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Daniel Reiner. Madame la secrétaire d'Etat, ma question est relative aux suites du séisme qui a touché l'est de la France, en particulier le sud de mon département, la Meurthe-et-Moselle, le 22 février 2003. Ce séisme a endommagé un assez grand nombre de bâtiments dans la mesure où, je le rappelle, il a atteint une magnitude de 5,4 sur l'échelle de Richter.

A la suite de ce tremblement de terre, plus de deux cents communes ont sollicité la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Seules vingt-trois d'entre elles ont reçu un avis favorable de la commission interministérielle de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle par des décisions du 28 mai, pour neufs communes, du 16 juillet, pour deux communes, et du 18 septembre 2003, pour douze communes.

De nombreux maires de communes qui ont subi des dégâts se sont étonnés de recevoir un avis défavorable de la commission interministérielle alors que la situation objective de leur commune aurait justifié, en toute logique, un avis contraire. Or, naturellement, cet avis pénalise leurs administrés, qui attendent le classement de la commune en état de catastrophe naturelle pour se faire rembourser par leur compagnie d'assurance, à due concurrence des dégâts subis.

A la lecture de la note préliminaire relative à ce séisme, établie par le Bureau central sismologique français de Strasbourg, il apparaît que l'enquête menée conforte largement cette impression d'incohérence et d'opacité qui préside à la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. La manière dont est établi ce rapport est pourtant primordiale, car les avis de la commission se fondent essentiellement sur ses conclusions.

La cartographie des communes retenues et non retenues est particulièrement inexplicable pour les habitants. Bien souvent, les parties urbanisées des communes sont limitrophes et les bâtiments ont subi les mêmes dégâts. Comment, alors, expliquer aux citoyens qu'à 100 mètres de distance ils seront ou ne seront pas remboursés des dommages qu'ils ont subis ?

Une telle situation ne peut que laisser, au sein des populations concernées, un sentiment de traitement inéquitable pour des situations pourtant comparables et d'une procédure incohérente. Cela conduit les citoyens à mettre en cause la responsabilité de leurs propres élus locaux.

Il apparaît que l'étude réalisée par le Bureau central sismologique français de Strasbourg n'a pas été réalisée de manière suffisamment exhaustive. En outre, les formulaires d'enquête macrosismique remplis dans l'urgence, à la demande de la préfecture, par les maires alors qu'il était encore impossible d'avoir une connaissance totale de l'ensemble des dégâts ont été très certainement déterminants pour fonder l'avis de la commission interministérielle. En effet, très peu de visites d'experts sur le terrain ont été réalisées : à ma connaissance, trois seulement.

Au surplus, les maires de mon département ont été informés de l'avis défavorable de la commission interministérielle par une simple lettre du préfet et n'ont jamais été destinataires de l'arrêté interministériel constatant officiellement l'état de catastrophe naturelle. Or ce document indiquant la liste des communes retenues est seul susceptible de recours devant les juridictions administratives.

Bref, l'information est pour le moins peu transparente, voire déficiente, et la décision finale inéquitable.

Dans un courrier commun avec M. François Guillaume, député de Meurthe-et-Moselle, en date du 3 décembre dernier, j'avais alerté le ministre de l'intérieur sur ce sujet et relayé les demandes des maires, qui souhaitaient au moins rencontrer les experts du Bureau central sismologique français de Strasbourg pour obtenir des explications fiables. Je m'étonne, d'ailleurs, de n'avoir obtenu aucune réponse à cette lettre.

J'ai, par la suite, informé de ces difficultés le président de la commission des affaires économiques de notre assemblée, qui, vu l'importance du sujet, a lui-même saisi les présidents des commissions des lois et des finances.

Ma question est simple, madame le secrétaire d'Etat : s'agissant d'une compétence de l'Etat, j'aimerais obtenir du Gouvernement des éclaircissements sur ce dossier en particulier et, plus généralement, sur ce que le Gouvernement envisage pour améliorer et renforcer la transparence de la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. En effet, dans la plupart des cas, ce sont les élus locaux qui apparaissent responsables de ces situations aux yeux de leurs administrés, alors que leurs possibilités de recours sont inexistantes.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes. Monsieur le sénateur, vous avez appelé l'attention du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les conséquences du séisme qui a touché le sud du département de Meurthe-et-Moselle, le 22 février 2003. Celui-ci m'a chargé de vous apporter les précisions suivantes.

Le rapport du Bureau central sismologique français, le BCSF, sur lequel s'est appuyée la commission interministérielle pour statuer sur les demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle a été établi conformément aux règles communément admises en la matière. Les formulaires concernant l'enquête macrosismique ont été adressés à près de 8 500 communes, réparties dans vingt départements. Les services postaux les plus proches de l'épicentre disposaient également de formulaires et l'adresse du site Internet du BCSF a été très largement diffusée par les radios, la presse et les télévisions. Chacun a donc pu faire part de ses observations sur le séisme du 22 février 2003.

Pour des raisons de fiabilité de l'information recueillie, il était important que les observations soient collectées dans les jours qui ont suivi le séisme. Le BCSF a ainsi pu produire un rapport dans des délais raisonnables, permettant alors à la commission interministérielle de statuer sur ce phénomène dès le mois de mai 2003. La rapidité dans le traitement du dossier a permis d'apporter une réponse diligente aux personnes sinistrées et, le cas échéant, d'ouvrir les droits à indemnisation.

J'attire votre attention sur le fait que, sur ces dossiers relatifs au séisme, des recours gracieux sont possibles sur la base d'une étude bâtimentaire établissant le lien direct entre les dommages observés et le séisme. A l'issue de cette expertise, qui pourra être soumise à son examen, le BCSF pourra apprécier s'il convient de modifier l'intensité macrosismique précédemment observée sur l'échelle macrosismique européenne, dite EMS 98.

Plusieurs communes ont recouru à cette possibilité, ce qui, dans un certain nombre de cas, a conduit le BCSF à revoir son évaluation de l'intensité macrosismique et la commission à émettre un avis favorable.

En ce qui concerne les remarques relatives à la transparence de la procédure, il convient de noter que la commission se prononce au vu d'études et de rapports techniques produits par des organismes habilités et compétents. Les critères qui fondent l'avis de la commission sont communiqués à tout élu ou particulier qui en fait la demande.

M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner.

M. Daniel Reiner. Voilà une réponse qui laisse particulièrement insatisfait le représentant des quarante maires des communes qui ne comprennent toujours pas cette décision !

En premier lieu, la rapidité est certes souhaitable, madame la secrétaire d'Etat, mais elle a aussi des conséquences négatives.

D'une part, les maires remplissent un formulaire - sans d'ailleurs savoir que ce formulaire va servir à l'information du laboratoire en question - et il est évidemment très difficile de dire si la terre a beaucoup bougé, un peu ou moyennement. Bref, ils agissent dans l'urgence.

D'autre part, la rapidité fait que si des décisions sont intervenues dès le 28 mai, d'autres ont été rendues le 16 juillet, puis le 18 septembre, ce qui prouve que la première étude était tout à fait insuffisante. Sur ce point, je continue donc de penser que la procédure n'est pas satisfaisante.

En second lieu, je pense qu'il faudra améliorer les textes : les maires n'étant en réalité informés que par le préfet, ils ne sont pas saisis de l'arrêté interministériel de manière officielle. Par conséquent, ils n'ont aucune possibilité de recours.

Selon vous, il suffit de faire une expertise. Mais qui va la payer ? La collectivité locale ? Les particuliers ? Et, naturellement, les assurances ne se précipitent pas pour envoyer leurs propres experts et prouver que les dommages constatés résultent du séisme, parce que cela les mettrait en cause directement !

Je pense très objectivement que, dans ce cas particulier - et même d'une manière générale -, nous devons faire beaucoup mieux pour traiter équitablement les populations.

Par ailleurs, je le répète ici, les maires sont très gênés, car ils sont mis en cause par leurs propres concitoyens, qui leur disent qu'ils ne travaillent pas bien, contrairement à leurs voisins qui ont réussi à obtenir l'état de reconnaissance naturelle. Nous sommes aussi là pour défendre nos collègues élus locaux !

projet d'installation du tgi de paris sur les sites de l'hôtel dieu et de saint-vincent de paul

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, auteur de la question n° 469, transmise à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, par courrier du 24 février, le préfet de région a fait connaître au maire de Paris l'intention de l'Etat d'implanter le tribunal de grande instance de Paris sur le site de l'hôpital Saint-Vincent de Paul et sur une partie importante de l'Hôtel Dieu, dans le centre de Paris. Il demande donc que soit prévu dans le futur plan local d'urbanisme de Paris un zonage adapté pour ces emprises.

Si la question d'une extension du palais de justice de Paris se pose depuis très longtemps et si l'on peut comprendre l'intérêt des professions judiciaires pour un site qui se trouve dans le IVe arrondissement, le choix que l'Etat voudrait faire est indécent, car il revient à sacrifier des sites hospitaliers aujourd'hui indispensables.

De plus, l'avenir des structures hospitalières et leur localisation doivent faire l'objet d'une concertation dans la transparence avec l'ensemble des parties concernées - élus, professionnels de santé, population - et aucune décision ne saurait être prise avant négociation et concertation à tous les niveaux.

L'Etat est-il bien au courant des réalités ? Le site de Saint-Vincent de Paul n'est pas libre : un projet concerté a été approuvé par le conseil d'administration de l'AP-HP pour la prise en charge des enfants handicapés. La situation parisienne en ce domaine est catastrophique, et les besoins sont importants. Un travail de concertation a été engagé sur ce sujet et la ville de Paris, la DASS et l'AP-HP ont conjointement diligenté une mission pour préciser le contenu du projet. Il est impensable que l'accord trouvé au terme d'un long processus de négociation et voté par le conseil d'administration de l'AP-HP soit remis en cause par un arrangement entre ministres !

Quant à l'Hôtel Dieu, il est au coeur de toutes les communications d'Ile-de-France, où transite une population considérable chaque jour. C'est dans cet hôpital que sont souvent accueilli les accidentés parisiens. Par ailleurs, il a montré combien il était précieux lors d'événements aussi tragiques que l'attentat du métro Saint Michel.

Il représente 100 000 passages dans le service d'urgences, dont 40 000 urgences médico-judiciaires chaque année, et 3 500 jeunes âgés de quinze à vingt-cinq ans en difficulté sociale et familiale sont adressés par la protection judiciaire de la jeunesse et la médecine scolaire à l'Espace Santé Jeunes.

Faire disparaître cet hôpital serait une honte. Il faudrait, au contraire, développer au coeur de Paris un grand projet médical combinant des structures de santé publique, de soins de proximité et de prévention, projet sur lequel les médecins et les personnels de l'hôpital travaillent depuis longtemps.

Ces deux projets de fermeture se heurtent à une opposition des populations, qui se sont mobilisées.

Par ailleurs, la majorité du conseil de Paris s'est prononcée contre la demande de l'Etat. D'autres localisations sont possibles, vous le savez.

Je vous demande, par conséquent, de retirer sans délai ce projet néfaste pour la santé de tous. Son maintien ne pourrait qu'entraîner des effets désastreux du point de vue tant sanitaire et social que de la crédibilité des engagements pris par les pouvoirs publics.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes. Madame la sénatrice, le nouveau projet de palais de justice de Paris, pour la mise en oeuvre duquel un établissement public ad hoc a été créé sous l'impulsion du Président de la République, est un enjeu très important pour la justice et pour Paris.

Le ministère de la justice doit aujourd'hui répondre à une situation de dysfonctionnement critique, car le palais de justice actuel ne permet plus d'accueillir tous les services des juridictions parisiennes. Cette situation a conduit à la nécessité de reloger ces services dans des locaux souvent éloignés du palais de l'lle de la Cité.

L'éclatement du tribunal de grande instance sur plusieurs sites est néanmoins préjudiciable à l'accès au service public de la justice. En effet, seule une minorité d'initiés est aujourd'hui capable de se retrouver dans la multiplicité des sites judiciaires parisiens. Cela n'est pas acceptable. Pour garantir un égal accès de tous à la justice, il est important de disposer d'un lieu bien identifié. Comme tous les Français, les justiciables parisiens doivent disposer de locaux à la hauteur des besoins de la justice et de la place qu'elle occupe dans la société française. La capitale a besoin de ce grand projet structurant.

Le Gouvernement est déterminé à faire aboutir ce dossier dans des délais rapides. Compte tenu de l'ampleur des besoins - environ 100 000 mètres carrés -, de la rareté et du coût du foncier à Paris, la méthode la plus efficace pour faire aboutir ce dossier est d'étudier et de comparer toutes les possibilités techniques, sans a priori, en toute transparence et en concertation avec tous les acteurs, en particulier la ville de Paris.

Dès la création de l'établissement public, j'ai moi-même annoncé que cette méthode serait suivie. Sur une douzaine de sites identifiés ces dernières années, un examen technique et des compléments d'études sont en cours. Des contacts réguliers ont lieu entre l'établissement public et la ville de Paris.

C'est dans ce cadre que sont examinés les sites hospitaliers de Saint-Vincent de Paul et de l'Hôtel Dieu, mais il ne s'agit que d'hypothèses parmi d'autres. Aucune décision ne peut être prise aujourd'hui sur le ou les lieux d'implantation ; elle ne pourra l'être qu'à l'issue des premières études techniques et de la réactualisation des besoins du palais de justice. Surtout, cette décision ne pourra être prise qu'au terme de la concertation engagée avec tous les acteurs, au premier rang desquels figure l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo.

Mme Nicole Borvo. Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse.

Aucune décision n'a été prise, dites-vous. J'en prends acte. Je suppose que vous prendrez en considération, dans la concertation, le vote de la majorité du conseil de Paris ! En matière de décisions, les élus parisiens jouent en effet un rôle tout à fait important, et je suis certaine que vous partagez ce point de vue. Va-t-on demander aux Parisiens - moitié justiciables, moitié usagers des établissements de santé - de se déterminer ? Ce serait regrettable.

Je partage évidemment votre souci s'agissant du tribunal de grande instance, mais je considère qu'une solution est possible ailleurs qu'au centre de Paris. Une possibilité existe, vous le savez, notamment dans la ZAC rive gauche.

Aujourd'hui, alors que les hôpitaux de l'AP-HP se trouvent dans une situation difficile après des années de péréquation budgétaire interrégionale et intrarégionale, ils doivent réduire, sous l'injonction de l'ancien ministre de la santé, leurs dépenses de santé de 60  millions d'euros par an pendant quatre années. Il est également demandé à l'institution de vendre une partie de son patrimoine pour 170 millions d'euros, afin d'éponger une partie du déficit.

Il serait absolument indécent de supprimer des sites hospitaliers pour faire droit à la légitime demande des professionnels judiciaires et de la population et il faudrait que le ministre de la santé se réconcilie avec lui-même : la nuit, il se rend aux urgences de l'hôpital Saint-Antoine et s'émeut des difficultés de l'accueil des urgences ; le jour, il prend des décisions en matière de localisation hospitalière.

situation des étudiants en sciences et techniques des activités physiques et sportives (staps)

M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, auteur de la question n° 467, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Mme Hélène Luc. Madame la secrétaire d'Etat, sans vouloir être désobligeante à votre égard, permettez-moi de regretter vivement l'absence de M. Fillon. La question que je pose aujourd'hui est en effet très importante.

C'est un véritable malaise qui frappe la communauté éducative de la filière de sciences et techniques des activités physiques et sportives, ou STAPS. L'inquiétude est grande devant un avenir incertain. Elle se traduit par cette forte mobilisation que nous connaissons depuis quelques mois et j'ai personnellement assisté, lors du dernier conseil d'administration de l'IUFM, à une invasion des élèves, qui sont très mécontents des propositions qui leur sont faites pour l'année prochaine.

Je citerai quelques chiffres. Pour l'Ile-de-France, à Marne-la-Vallée, seules 30 places en formation, au lieu de 90, seront offertes aux étudiants. A l'IUFM de Créteil, les effectifs sont en baisse, passant de 306 étudiants en 2002-2003 à 282 étudiants en 2003-2004. Cela équivaut - disons-le clairement - à une sélection.

L'annonce de la baisse du nombre des postes mis au concours externe de recrutement du CAPES - ils devraient passer de 1330 en 2003 à 780 en 2004, soit une baisse de 41% pour près de 10 000 étudiants inscrits -, a fait office de précurseur d'une grogne aux racines bien plus profondes.

Près de 55 000 étudiants en STAPS, tous niveaux confondus, sont confrontés à des perspectives de débouchés trop faibles. Ils s'inquiètent de la baisse des recrutements et des dispositions du futur décret d'application de la loi du 1er août 2003, pris par le ministre de la jeunesse et des sports d'alors, visant à réglementer l'accès aux métiers d'encadrement sportif, autre débouché offert à la filière STAPS.

Sur ce point, M. le ministre de l'éducation nationale a rencontré des étudiants et des professeurs et il semble - il semble, dis-je - que des garanties leur aient été apportées pour que, avec leurs diplômes universitaires, ils puissent avoir accès aux emplois liés au sport. Mais cela n'enlève en rien à la vigilance qu'il faut garder sur ce sujet.

La situation de l'éducation physique et sportive aujourd'hui est la suivante.

Tout d'abord, selon une note de la direction prospective et développement du ministère de l'éduction nationale, il s'agit de la deuxième discipline proportionnellement au nombre des élèves par classe au collège, et, dans les lycées, il s'agit de celle qui possède les effectifs les plus chargés, soit 29,9 %.

Ensuite, la justification de la régression du nombre des élèves dans le second degré, régression qui ne représenterait cependant que 0,2 % d'élèves en moins par section, ne prend pas en compte l'augmentation du nombre d'élèves en primaire, qui seront les futurs collégiens.

Enfin, un appel constant aux vacataires et contractuels, le recours aux heures supplémentaires, le non-remplacement des professeurs malades et la dégradation des conditions de travail sont mis en cause. Or nous savons tous combien l'éducation physique et sportive doit s'accompagner de garanties, notamment en matière de sécurité. Pour cela, il faut des moyens humains et financiers.

La filière de l'éducation physique et sportive doit être considérée comme une discipline culturelle à part entière, elle est essentielle à la formation des enfants. Le développement de l'être humain est un tout, indivisible de l'esprit et du corps.

Qui plus est, dans l'exercice de leurs fonctions, les professeurs d'éducation physique sont confrontés journellement à l'apprentissage en situation de mixité - on en parle beaucoup en ce moment - et ils doivent assurer la réussite de leur enseignement. Il faut susciter l'engagement des jeunes, notamment des filles, dans le sport civil et les inciter à y exercer des responsabilités. C'est ce qui est proposé dans un rapport qui vient d'être remis au ministre de la jeunesse et des sports.

Les cours d'EPS ont une assise pédagogique forte et permettent bien souvent d'aider des élèves en grande difficulté scolaire ou sociale. Pourtant, il faut noter que les enseignements d'EPS en sections d'enseignement général et professionnel adapté, ou SEGPA, sont souvent les premiers touchés.

C'est pourquoi je souhaite que toutes les mesures soient prises afin que le nombre de postes offerts au CAPES 2004 soit au moins égal à celui de 2003. J'espère vivement que les importants gels de crédits annoncés par le ministre des finances n'affecteront pas le ministère de l'éducation nationale, qui n'a vraiment pas besoin de cela. Je vous demande également, madame la secrétaire d'Etat, de me dire, et par là même de dire aux représentants de la filière STAPS qui sont présents dans les tribunes du public, quelles sont les mesures que vous comptez prendre pour revaloriser cette discipline.

Il est essentiel d'agir rapidement si l'on ne veut pas faire de l'EPS une discipline annexe : il faut garantir un rattrapage de l'encadrement pédagogique et scientifique du cursus STAPS, la création de postes correspondants et l'amélioration des contenus de formation.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes. Je souhaiterais tout d'abord, madame la sénatrice, vous adresser les excuses de François Fillon, qui aurait souhaité vous répondre personnellement sur ce sujet qu'il suit avec une attention toute particulière. Mais, retenu par des rencontres avec les partenaires sociaux de l'éducation nationale,...

Mme Hélène Luc. Je le sais !

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat. ... il m'a demandé de vous transmettre les éléments suivants.

Dans ce dossier, il convient de garder à l'esprit l'évolution des effectifs scolaires due aux mutations démographiques. Les faibles taux de natalité des années quatre-vingt dix font qu'aujourd'hui les effectifs d'élèves sont en baisse. Ainsi, la diminution du nombre de postes offerts au CAPEPS reflète cette réalité.

Est-ce à dire que l'avenir des étudiants en STAPS est conditionné par le nombre des postes offerts par l'éducation nationale ? Bien évidemment non : les 50 000 jeunes inscrits dans cette filière n'ont pas tous vocation à devenir professeur d'éducation physique et sportive !

En fait, à quoi prépare le cursus STAPS ?

Il prépare, certes, au professorat, mais aussi à d'autres débouchés tels que l'entraînement au sein d'associations sportives locales, l'encadrement de jeunes, voire le management de clubs sportifs... et cette liste n'est pas exhaustive : nous pourrions y ajouter l'enseignement et l'encadrement de la pratique sportive pour les personnes âgées ou encore l'accompagnement de personnes handicapées, pour qui le sport est à la fois une pratique thérapeutique et une source de bien-être dans un quotidien souvent difficile.

C'est vous dire, madame la sénatrice, à quel point les débouchés sont nombreux.

Je voudrais ici saluer le dynamisme et la créativité de celles et ceux qui encadrent les étudiants en STAPS et qui cherchent à anticiper les besoins futurs en réfléchissant aux nouveaux métiers du sport.

Au-delà des perspectives professionnelles offertes aux étudiants en STAPS, le ministre de l'éducation nationale et le ministre des sports suivent avec attention l'application de la loi du 1er août 2003. Ils ont conscience des inquiétudes que provoque la publication prochaine des décrets d'application.

C'est pourquoi une large concertation s'est engagée la semaine dernière, tant sur ces décrets que sur l'ensemble des problématiques liées aux filières sportives. Nous ne pouvons en préjuger l'issue, puisqu'elle se poursuit encore aujourd'hui. Néanmoins, soyez assurée, madame la sénatrice, de l'esprit responsable et constructif de chacun.

M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc.

Mme Hélène Luc. Madame la secrétaire d'Etat, votre réponse ne peut me satisfaire entièrement. Cela étant, je prends acte du fait que des discussions sont engagées et j'espère vivement qu'elles apporteront une réponse aux questions que se posent les professeurs d'éducation physique et sportive. Pour bien connaître ces derniers, je sais quelle est leur motivation, et vous êtes d'ailleurs également bien placée pour savoir quelles difficultés ils rencontrent, puisque cela relève en partie de vos fonctions ministérielles.

Ils pensent - et je partage leur souci - qu'il vaut mieux former des professeurs d'éducation physique pour que les jeunes acquièrent le goût du sport et aient envie de continuer ensuite quand ils seront adultes plutôt que de construire des écoles particulières ou des prisons pour les jeunes, voire toutes sorte d'institutions destinées à lutter contre la drogue, etc.

M. le Premier ministre a dit : « Il ne faut pas enlever de crédits dans les ministères qui servent l'avenir des jeunes. » Or celui dont nous parlons est vraiment l'un des plus décisifs pour l'avenir des jeunes !

L'engagement du Gouvernement doit donc être ferme et rapide. Le ministère de l'éducation nationale, qui ne saurait en aucun cas subir de gels de crédits, doit prendre en compte les revendications et répondre aux inquiétudes des étudiants, des enseignants et des élèves.

Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, l'argument selon lequel il y aurait trop de professeurs est un argument fallacieux dans la mesure où il élude tous les autres paramètres liés à la filière du sport. En réalité, nous manquons de professeurs ; il suffit, pour s'en convaincre, de considérer le nombre de contractuels recrutés à temps partiel.

Au demeurant, le malaise ressenti face à l'annonce de la réduction des postes ouverts au recrutement n'est pas la seule dimension du problème. Il convient non seulement, je le répète, de prendre toutes les mesures nécessaires pour que le nombre de postes offerts au CAPES en 2004 soit au moins égal à celui de 2003, mais il faut également entamer une réflexion afin d'améliorer les conditions de travail des étudiants et des enseignants et d'offrir aux élèves un enseignement sportif à la mesure des ambitions que la France assigne à ses enfants.

C'est pourquoi, madame la secrétaire d'Etat, avec les professeurs et les étudiants d'éducation physique et sportive, je resterai très vigilante quant aux discussions en cours.

conséquences de la grève des hydrogéologues agréés

M. le président. La parole est à M. Bernard Piras, auteur de la question n° 466, adressée à M. le ministre de la santé et de la protection sociale.

M. Bernard Piras. Madame la secrétaire d'Etat, je voudrais, par votre intermédiaire, attirer l'attention de M. le ministre de la santé et la protection sociale sur les conséquences de la grève des hydrogéologues agréés.

En effet, depuis le 14 mai 2003, les hydrogéologues agréés sont en grève afin d'obtenir un statut juridique et financier clair pour les missions d'expertise réalisées en application de la réglementation sanitaire.

Cette situation de blocage a de graves répercussions, notamment pour les élus des communes qui recherchent des points d'eau visant à sécuriser l'approvisionnement de leurs administrés, la sécheresse de l'été 2003 ayant mis en relief les conséquences dramatiques du manque d'eau.

Je souhaiterais donc savoir quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour résoudre ce conflit qui porte préjudice à nos administrés.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, vous appelez mon attention sur les revendications des hydrogéologues agréés en matière d'hygiène publique, ainsi que sur les difficultés qu'engendre le mouvement de contestation entamé par certains d'entre eux depuis le mois de mai dernier.

Je tiens à souligner que ce mouvement de protestation est suivi inégalement selon les régions et qu'il a perdu aujourd'hui l'un de ses motifs importants du fait de la revalorisation de la rémunération des hydrogéologues agréés, résultant de discussions avec leurs représentants et instaurée par un arrêté interministériel publié au Journal officiel du 19 mars dernier.

Certains points restent cependant à préciser et, compte tenu de l'importance que le Gouvernement attache aux missions assumées par les hydrogéologues agréés pour la protection des captages d'eau destinée à la consommation humaine, il a été demandé aux services d'examiner comment faire bénéficier les hydrogéologues agréés du dispositif applicable aux collaborateurs occasionnels du service public, je pense en particulier aux dispositions du 21° de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale.

En outre, le Gouvernement abordera prochainement les modalités de rémunération des coordonnateurs départementaux, autre revendication des membres de la profession.

L'ensemble de ces actions conduites par mes services devrait être de nature à mettre fin le plus rapidement possible à ce conflit.

Dès à présent, je tiens à préciser que cette situation n'empêche pas les collectivités ayant connu des difficultés d'approvisionnement l'été dernier de rechercher de nouveaux points d'eau. En effet, l'hydrogéologue agréé intervient en aval, dans la procédure d'autorisation d'un captage d'eau, et les travaux préalables indispensables pour vérifier, notamment, la disponibilité d'eau en quantité et en qualité à partir d'un nouveau point de captage sont menés sans son intervention.

M. le président. La parole est à M. Bernard Piras.

M. Bernard Piras. Madame la secrétaire d'Etat, je suis partiellement satisfait par votre réponse, car la situation de blocage persiste et je vous demande de faire preuve, avec vos collègues du Gouvernement, de célérité.

En effet, si en 2004 il devait y avoir une canicule similaire à celle de 2003, la situation serait catastrophique pour nos administrés !

manque de moyens dans le domaine de la santé publique dans le nord-pas-de-calais

M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle, auteur de la question n° 470, adressée à M. le ministre de la santé et de la protection sociale.

M. Yves Coquelle. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la région Nord - Pas-de-Calais, sinistrée par une situation économique et sociale dramatique, avec des taux de chômage qui dépassent souvent la barre des 35%, n'est pas mieux lotie, loin s'en faut, en matière de santé.

Nous sommes dans le peloton de queue des régions pour l'espérance de vie. On vit chez nous six à sept années de moins que dans le reste de la France !

Nous manquons de lits d'hôpitaux, de médecins généralistes, de spécialistes, d'infirmiers, d'aides soignants et, selon les estimations de l'Observatoire régional de la santé, en 2020, la région comptera 20 % de médecins généralistes de moins qu'aujourd'hui, 30% de spécialistes, voire 40% dans certaines disciplines telles que la psychiatrie, et ce malgré une forte capacité de formation des médecins.

En effet, la faculté de médecine de Lille est la quatrième de France en nombre d'étudiants après Paris, Lyon, Aix-Marseille, ce qui en fait un pôle solide et reconnu. Elle dispose pourtant de beaucoup moins d'enseignants en seconde année de médecine : c'est ainsi, par exemple, que, pour encadrer 100 étudiants, la faculté de Lille dispose de 67,4 enseignants en médecine contre 188 professeurs pour la faculté de Toulouse.

Il en résulte que les étudiants de la région réussissent moins bien le concours national de l'internat, dont les places sont prises par des étudiants d'autres régions qui, une fois diplômés, repartent s'installer dans leur région d'origine.

Depuis plus de dix ans, d'éminents professeurs de médecine mettent en avant le déficit croissant de professionnels de santé dans notre région.

C'est le cas du professeur Jean-Louis Salomez, président de l'Observatoire régional de santé, qui déclare : « La moindre médicalisation dans la région est connue depuis le début du xxe siècle, mais cette situation n'a été analysée comme un déficit que depuis une dizaine d'années et depuis peu par les institutions, tant était fort le discours sur l'excès de médecins en France.

Il poursuit : « Il a fallu la conjonction de plusieurs phénomènes pour que ce déficit soit enfin reconnu : les délais de rendez-vous insupportables dans certaines spécialités, les problèmes de fonctionnement des établissements de soins publics et privés ainsi que les difficultés dans le monde libéral pour trouver des remplaçants ou des successeurs. »

Il ajoute : « A priori les déficits actuels devraient se pérenniser, et même s'amplifier dans les vingt ans, malgré le relèvement du numerus clausus.

« Ce déficit devrait toucher les spécialités telles que la psychiatrie, l'anesthésie, l'ORL, l'ophtalmologie, et s'installer dans des disciplines comme l'obstétrique ou la chirurgie générale.

« L'hôpital public devrait également connaître de tels déficits.

« Cette situation est aggravée dans la région par les étudiants qui, une fois leur diplôme en poche, retournent exercer dans leur région d'origine.

« Cette fuite est de l'ordre de 30% et n'est pas compensée, notre région n'attirant que très peu de médecins d'autres régions. »

Madame la secrétaire d'Etat, cette situation est alarmante. En effet, pour seulement combler ce déficit, il faudrait créer d'ici à 2020, c'est-à-dire demain, 25 000 emplois dans le domaine de la santé pour la seule région Nord - Pas-de- Calais.

Je vous demande donc solennellement de me dire ce que compte faire le Gouvernement pour remédier à cette dramatique situation dans les plus bref délais.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, le Gouvernement est particulièrement sensible aux difficultés rencontrées par certaines régions, et notamment par la région Nord - Pas-de-Calais, face au manque de professionnels de santé.

Dans ce contexte, depuis la rentrée 2002, le Gouvernement a accru très sensiblement les numerus clausus. En particulier, le nombre des étudiants en médecine a augmenté de 18%, avec 850 places supplémentaires ; celui des étudiants en pharmacie de 16%, avec 350 places supplémentaires ; celui des étudiants en odontologie de 16%, avec 129 places supplémentaires ; celui des étudiants sages-femmes de 8%, avec 75 places supplémentaires ; celui des étudiants infirmiers de 14%, avec 3 564 places supplémentaires ; celui des étudiants masseurs-kinésithérapeutes de 19%, avec 269 places supplémentaires ; celui des étudiants en orthophonie de 24%, avec 124 places supplémentaires ; celui des étudiants en psychomotricité de 13%, avec 43 places supplémentaires.

A l'échelon national, le Gouvernement a veillé à répartir ces effectifs en tenant compte des besoins régionaux et des capacités de formation. Dans ce contexte, la région Nord - Pas-de-Calais a bénéficié d'augmentations d'effectifs particulièrement significatives.

Par ailleurs, s'agissant des enseignants en médecine, le centre hospitalo-universitaire de Lille a bénéficié depuis une dizaine d'années d'une augmentation régulière de ses effectifs, qui est supérieure à la moyenne nationale grâce à un plan pluriannuel de redéploiement national des emplois de professeur des universités, qu'il s'agisse des praticiens hospitaliers ou des maîtres de conférences des universités praticiens hospitaliers. Ainsi, depuis la rentrée d'octobre 2003, le nombre de professeurs des universités praticiens hospitaliers est passé à 157, et le nombre de maîtres de conférences des universités praticiens hospitaliers à 71. Parallèlement, le nombre de postes d'assistants hospitalo-universitaires et de chefs de clinique a été augmenté, pour atteindre respectivement 32 et 133.

Pleinement conscient des besoins croissants dans les années à venir, le Gouvernement a la ferme intention de continuer cet effort sans précédent pour les régions en difficulté, en particulier, monsieur le sénateur, pour le Nord - Pas-de-Calais.

M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle.

M. Yves Coquelle. Je suis en partie satisfait, madame la secrétaire d'Etat, de votre réponse. J'ai noté que le Gouvernement était sensible aux difficultés de la région Nord-Pas-de-Calais et qu'il a décidé d'augmenter les numerus clausus.

Toutefois, je crains que ces mesures ne soient pas immédiatement visibles, puisque les jeunes qui commencent cette année leurs études de médecine ne les termineront que dans une dizaine d'années. D'ici à cette date, la région traversera encore de nombreuses difficultés.

L'Etat devrait sans aucun doute prendre des mesures incitatives pour faire en sorte que les nouveaux diplômés viennent s'installer dans le Nord - Pas-de-Calais, où, somme toute, la situation n'est pas aussi catastrophique que l'on veut bien le dire, même si nous connaissons des difficultés.

En conclusion, je souhaite rappeler que notre région souffre parce que les entreprises partent, parce qu'elle compte un nombre incalculable de chômeurs, parce que les perspectives sont réduites. Si les problèmes de santé de ses habitants sont liés, sans aucun doute, à une consommation élevée d'alcool et de drogue, ces difficultés ne pourront être résolues que le jour où des moyens supplémentaires seront accordés au Nord - Pas-de-Calais qui, je ne le répéterai jamais assez, a tant donné à la France au lendemain de la guerre et mérite aujourd'hui de bénéficier d'un traitement un peu plus favorable.