M. Roland Ries. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, quel avenir pour la régulation mondiale du commerce et, partant, quel avenir pour l'OMC ? L'enjeu fondamental des débats d'aujourd'hui et des positions de négociations élaborées à Bruxelles réside dans ces questions. C'est sur cet enjeu que je souhaiterais, chers collègues, vous soumettre quelques réflexions, dans le laps de temps très faible, anormalement faible au regard de l'enjeu, qui m'est imparti.

Incontestablement, certains postulats sont admis et certaines préoccupations sont partagées par l'ensemble des membres de notre Haute assemblée.

Nous sommes tous d'accord pour rappeler l'utilité d'une régulation du commerce au niveau mondial. Elaborer des règles communes pour offrir à chaque pays les moyens d'échanger et de se développer, en évitant le bilatéralisme, est une nécessité reconnue par tous.

Nous partageons aussi le même pessimisme sur la situation actuelle d'inertie, d'enlisement de l'OMC et les perspectives bien minces de déblocage des négociations à Hong-Kong.

Sur le fond, et en particulier sur le dossier agricole, nous partageons aussi une vision assez semblable : celle de la défense d'une agriculture multifonctionnelle, jouant un rôle en matière de préservation des paysages, de protection de l'environnement, de sécurité alimentaire. Nous partageons aussi les mêmes soucis, notamment en ce qui concerne la définition d'une liste des produits dits sensibles, ou, d'une manière plus générale, pour l'instauration d'un principe de précaution au niveau mondial.

Mais dresser ces constats et affirmer ces préoccupations ne suffit pas : cela implique d'en tirer un certain nombre de conséquences concrètes.

L'enlisement des négociations porte en lui un risque majeur, celui de décrédibiliser ce système multilatéral auquel nous sommes attachés, car les pays membres finiront par rechercher ailleurs des solutions pour s'intégrer à l'économie internationale, et l'on constate déjà aujourd'hui la multiplication des négociations d'accords bilatéraux ou régionaux.

Si nous sommes tous d'accord pour défendre le principe d'une organisation mondiale du commerce, il faut tout faire pour sauver la conférence ministérielle de Hong-Kong.

Or, aujourd'hui, quel est le constat ?

Nous avons, d'un côté, le commissaire européen Peter Mandelson, dont la stratégie est en quelque sorte de se servir de la PAC comme d'une monnaie d'échange, en cédant sur l'agriculture pour avancer sur l'industrie et les services, en utilisant le dossier agricole comme variable d'ajustement. Ce n'est, à l'évidence, pas la bonne méthode : l'agriculture est bien sûr un dossier à part entière, à traiter en parallèle avec tous les autres.

Cependant, d'un autre côté, nous avons un gouvernement français dont la démarche consiste fondamentalement à critiquer sévèrement la Commission européenne, à mettre en accusation le commissaire Mandelson, sans stratégie précise, sinon celle de faire de l'affichage, à l'adresse de l'opinion publique, pour démontrer, bien maladroitement à mon avis, que la France est présente s'agissant des dossiers européens.

Cette attitude réactive et quelque peu théâtrale est-elle à la hauteur de l'enjeu ? Je ne le crois pas. C'est à la mi-novembre que la Commission européenne présentera la position qu'elle compte défendre à Hong-Kong : nous devons rester vigilants, mais éviter la diabolisation.

Entre ces deux méthodes, je crois possible de trouver une autre voie.

Pour aborder de façon positive la conférence de Hong-Kong, et surtout les négociations qui devraient suivre, je pense qu'il convient, aux échelons français et européen, de se positionner selon quelques constats et orientations simples.

Il faut tout d'abord souligner, madame la ministre déléguée, que, au sein de l'OMC, le rapport de force entre les 148 pays a beaucoup évolué en quelques années : au groupe de Cairns et au G 10 sont venus s'adjoindre le groupe des 20 et le groupe des 90, chacun de ces groupes ayant des intérêts spécifiques à défendre et des stratégies particulières à promouvoir.

Les lignes ont donc bougé. Désormais, le rapport de force ne s'exerce plus seulement entre l'Union européenne et les Etats-Unis. D'autres interlocuteurs sont apparus, qui vont peser dans les négociations et qui devraient permettre de sortir du face-à-face stérile entre les Etats-Unis et l'Union européenne. L'Europe, dans cette perspective, peut avoir un rôle clé à jouer, pour peu qu'elle arrive à surmonter ses propres divisions.

C'est ce qui me fait penser que l'OMC est à un tournant de son histoire et que nous ne devons pas, de notre côté, continuer notre route en ligne droite, en fondant nos stratégies et nos positions de négociations sur des schémas désormais caducs. Ces nouveaux interlocuteurs que j'évoquais à l'instant, nous devons en faire des partenaires. Ce sera la première étape d'une relance des négociations et d'une évolution souhaitable du fonctionnement même de l'OMC.

Le Premier ministre a encore rappelé, la semaine dernière, que la France participait au cycle de Doha notamment pour aider les pays en voie de développement. Mais, concrètement, le décalage est énorme entre les attentes de ces pays et les propositions que les pays industrialisés vont formuler à Hong-Kong. Une véritable crise de confiance était apparue à Cancún, elle risque de s'accentuer encore d'ici au mois de décembre.

Or, à chaque rendez-vous, le mouvement dit altermondialiste se nourrit de ces échecs et a tendance à faire de l'OMC le bouc émissaire pour toutes les difficultés, alors qu'elle n'en est que le révélateur. De mon point de vue, c'est l'absence de gouvernance à l'échelon mondial qui pose problème, et non l'embryon de régulation instauré par l'OMC, malgré tous les déséquilibres et les insuffisances que l'on constate depuis sa naissance.

Il s'agit donc, pour l'Europe, de nouer un dialogue politique sérieux avec les nouveaux groupes constitués ; nous devons et nous pouvons être « proactifs », formuler des propositions.

En effet, les pistes à explorer sont nombreuses. La promotion d'un traitement différencié pour les pays les plus pauvres est bien sûr la réponse principale et immédiate, celle qui vient tout de suite à l'esprit, mais d'autres pistes existent. J'aimerais, à titre d'illustration, en évoquer deux qui me semblent particulièrement dignes d'intérêt.

La première concerne les biens publics environnementaux. On sait que le thème du développement durable, même s'il figure dans le préambule de l'accord instituant l'OMC, reste encore très marginal pour la grande majorité des Etats membres de l'organisation, qui ont bien d'autres préoccupations, plus urgentes à leurs yeux.

En tout état de cause, si les pays développés ne renforcent pas leur aide technique et financière aux pays les plus pauvres, ces derniers ne pourront intégrer la dimension environnementale dans leurs choix. Or si l'on veut éviter les atteintes irréparables à l'environnement à l'échelle planétaire et favoriser les procédés de production respectueux de l'environnement partout dans le monde, la coopération sur ces questions à l'intérieur de l'OMC est indispensable. Elle est d'ailleurs aussi un moyen de pression à l'égard des pays émergents, qui concurrencent férocement nos productions par le biais d'un dumping social et environnemental.

De ce point de vue, l'élaboration à Hong-Kong d'une liste des biens environnementaux fondamentaux serait déjà une avancée.

La seconde piste concerne la reconnaissance à l'échelon mondial d'un registre des indications géographiques, thème qui a déjà été abordé par les précédents orateurs. Nous sommes d'accord pour affirmer que l'aide aux pays en développement passe par la valorisation de leurs ressources locales et traditionnelles : il s'agit bien souvent de régions périphériques où subsistent de petits producteurs dans un équilibre économique très fragile. La mise en place d'un registre international des indications géographiques permettrait de mieux protéger les productions locales, qui font vivre de petits producteurs et constituent, en même temps, une digue contre la déferlante de la production de masse.

A cet égard, comment, mes chers collègues, ne pas être inquiets de voir des multinationales faire breveter et vendre du riz « basmati » ou du thé « Ceylan » ? Aujourd'hui, un quart seulement de la production mondiale du thé appelé Darjeeling provient effectivement de l'Inde. C'est pourquoi des pays comme l'Inde, le Pakistan, la Thaïlande, la Jamaïque, qui d'ailleurs font partie des nouveaux groupes que j'ai cités, notamment du G 20, réclament une meilleure protection des indications géographiques.

Toutefois, comme vous le savez, les indications géographiques sont aussi d'une importance capitale pour nous Européens.

Savez-vous par exemple, mes chers collègues, que la commercialisation du fameux jambon de Parme est actuellement interdite sous ce nom au Canada, parce que cette appellation a été déposée unilatéralement pour un jambon dit « de Parme » canadien ! De telles situations sont aberrantes, mais leur incidence économique peut être considérable. Cela ne peut plus durer, il faut absolument que les indications géographiques soient protégées à l'échelle internationale : nous pourrons ainsi renforcer notre compétitivité agricole par la qualité plus que par la quantité.

Nous avons là un bel exemple d'intérêts convergents entre les pays en développement et l'Union européenne. Ce thème s'élargit même à d'autres problématiques d'importance, auxquelles nous sommes très attachés : celles, par exemple, du droit des consommateurs et de la sécurité alimentaire.

Ces dossiers ont déjà été mis sur la table, ils sont bloqués, et pour longtemps, diront certains. Mais qui peut en être sûr ?

En fait, des évolutions sont aujourd'hui à mon avis possibles, sur des questions considérées par beaucoup comme sans issue à cause d'intérêts nationaux trop éloignés les uns des autres. L'exemple le plus marquant, à cet égard, est l'approbation, par la Conférence générale de l'UNESCO, de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles. Il s'agit là d'une contribution essentielle au combat visant à ce que la culture ne soit pas considérée comme une marchandise comme les autres. Cela démontre que des avancées sont possibles et permet d'être optimiste s'agissant d'autres dossiers.

Sachons, dès lors, adapter notre vision et notre attitude aux nouvelles configurations qui se dessinent au sein de l'OMC. Sachons élargir nos thèmes de négociations et prendre en compte les idées nouvelles. L'avenir de la régulation mondiale du commerce et, partant, de l'OMC tient à cette perspective selon laquelle l'essor d'un commerce plus équitable à l'échelle mondiale pourrait être le moyen le plus efficace de lutter contre le sous-développement et les énormes inégalités qu'il engendre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Paul Girod.

M. Paul Girod. Madame la présidente, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, la conférence de Hong-Kong, qu'elle réussisse ou qu'elle échoue, sera probablement un moment déterminant pour la vie du monde, au moins pour les vingt ans à venir, et ce pour des raisons simples.

Tout d'abord, tous les grands pays industrialisés ont intérêt à ce que les règles commerciales soient convenablement établies.

Ensuite, les pays en voie d'émerger et qui atteignent au même degré de richesse et d'influence au sein des échanges internationaux que ceux que je viens d'évoquer ont besoin de règles stabilisées afin de pouvoir continuer à s'intégrer dans le développement général du monde.

Enfin, et c'est probablement encore plus important, les pays dits en développement, c'est-à-dire ceux qui se trouvent tout à fait au bas de l'échelle économique, ont besoin, plus que d'autres, de pouvoir entrer dans le système. Cela est vrai à tous points de vue : sur le plan culturel, car ils ont aussi des spécificités à préserver, mais aussi au regard, ce qui est plus essentiel encore, de l'espoir minimal à donner à leur population. Notre débat actuel rejoint d'ailleurs celui qui s'est tenu auparavant sur l'immigration.

En effet, il est évident que la pression migratoire sur les pays riches se trouvera d'autant plus allégée, et c'est ce qu'a parfaitement compris le Président de la République, que la pression économique supportée par les pays en développement aura été soulagée.

En conséquence, tous les pays ont intérêt, y compris ceux d'entre eux qui, pour l'heure, n'en ont pas encore conscience, à ce que l'organisation générale du commerce mondial puisse progresser dans le sens que nous souhaitons.

Malheureusement, nous sentons bien que la question alimentaire est en voie d'émerger comme étant le problème majeur, la clé de tous les autres. Sur ce point, plusieurs réflexions peuvent, à mon sens, être faites.

Tout d'abord, il faut souligner que la sécurité alimentaire ne va pas de soi, et que s'en remettre aux flux tendus des échanges internationaux pour la sécurité alimentaire de continents entiers relève de la plus incroyable imprudence. Ceux d'entre nous qui ont un certain âge se rappelleront les années 1945-1955. A cette époque, l'Europe continentale a pu lever les restrictions alimentaires plus rapidement que le Royaume-Uni, qui avait pourtant derrière lui tout le Commonwealth mais qui, ne disposant pas d'une agriculture nationale suffisamment puissante, est resté au moins quatre années de plus que le continent en situation de dépendance alimentaire.

La sécurité alimentaire fait partie, à mon avis, d'un certain nombre de notions que les grands négociateurs internationaux ont quelquefois tendance à oublier, se disant que, après tout, il va de soi que ce qui est vrai pour les échanges de marchandises manufacturées l'est également s'agissant de ce qui constitue la base même de l'existence humaine sur le globe. Je crois néanmoins qu'il faut garder certaines notions élémentaires à l'esprit pour ne pas aborder le volet agricole - ce sera celui, nous le sentons, qui posera le plus problème - exclusivement par le biais de raisonnements intellectuels.

Cela étant, il y a plusieurs façons d'évoquer ce volet agricole. Pour ma part, je voudrais le faire en décrivant devant le Sénat ce que je crois savoir être l'angle d'approche de nos amis et adversaires américains dans cette affaire. Tout à l'heure, M. Bizet en a dit un mot, mais je voudrais insister un peu sur ce point.

Nous sommes devant une situation que vous connaissez certainement, madame la ministre déléguée, et que M. Mandelson devrait connaître, ou du moins un peu mieux intégrer dans ses raisonnements qu'il ne le fait actuellement.

Dans l'état actuel des choses, les Etats-Unis n'abordent pas du tout le volet agricole avec une volonté de contribuer à l'instauration d'un équilibre mondial au sein duquel même les pays les plus pauvres se trouveraient en situation de participer aux échanges internationaux dans des conditions améliorées. Ils adoptent au contraire une attitude résolument offensive, il faut le savoir.

Tout d'abord, à leurs yeux, le problème est d'élargir l'ouverture des marchés aux produits agricoles américains.

Ensuite, les références de discussion qu'ils mettent en avant sont inspirées par la loi agricole américaine, dite Farm bill.

En aucun cas, pour eux, la discussion du futur Farm bill ne doit dépendre des négociations de l'OMC. Le Congrès américain se réserve toute latitude d'adapter comme il l'entendra la politique agricole américaine aux résultats de Hong-Kong, et non l'inverse.

Pour se donner la marge de manoeuvre dont ils ont besoin, ils ont utilisé une méthode qu'ils reprochent aux pays en développement consistant à faire les calculs sur leurs concessions éventuelles non pas en fonction des aides réellement dépensées à l'intérieur de leur système de protection agricole mais par rapport aux plafonds auxquels ils auraient pu recourir s'ils avaient été jusqu'au bout du raisonnement. Comme le Farm bill actuel a été mis en oeuvre dans les années 2001-2002, à une époque où les versements ont atteint des niveaux inenvisageables auparavant, le point de référence auquel s'attachent les Américains ne correspond pas du tout à la situation présente, mais à ce qui s'est passé voilà trois ou quatre ans, dans des conditions économiques et de récolte tout à fait inattendues par rapport aux échanges courants internationaux. Telle est la première constatation.

Si vous considérez ensuite - je tire ces éléments de déclarations de M. Mike Johanns, secrétaire à l'agriculture américain, et de M. Saxby Chambliss, président de la commission agricole au Sénat américain - le joyeux mélange opéré entre la boîte orange, la boîte bleue et la boîte verte, vous vous apercevez que ce que nous proposent les Américains ne leur coûtera probablement pas grand-chose. Le résultat est extraordinaire ! Président du groupe d'amitié France-Etats-Unis du Sénat, je suis un ami des Américains et je rends hommage à leur capacité de négociateurs, à leur rouerie en la matière. Ils défendent leurs intérêts, c'est bien normal, mais ils le font avec des méthodes qui, de mon point de vue, sont parfois un peu excessives.

Nous sommes avertis que, pour autant, le Congrès ne se sentira pas lié pour la future loi agricole et, cerise sur le gâteau, si nous allons jusqu'au bout de certains raisonnements que j'entends ici ou là dans les négociations, l'Union européenne risque de devoir payer trois fois.

Nous savons qu'il n'est pas question, pour les Etats-Unis, de toucher à l'aide alimentaire, laquelle constitue un soutien détourné à l'économie agricole qui n'entre pas dans les calculs des fameuses boîtes. Nous savons également que les Américains ne veulent en aucun cas entendre parler des indicateurs géographiques comme facteurs limitant éventuellement leur capacité d'action sur le marché international - je m'associe, sur ce point, aux propos de M. Ries.

Cependant, la position américaine nous est présentée comme comportant une proposition d'abaissement - que, pour ma part, je crois très largement vide de sens - en contrepartie de laquelle l'Europe doit prendre immédiatement des engagements fermes, par exemple en réformant sa PAC. C'est dit moins brutalement, mais pas très différemment, par M. Blair. Or la politique agricole commune a déjà fait les pas que l'agriculture américaine a faits en sens inverse avec le Farm bill actuel, ce dernier ayant procédé au recouplage des aides alors que nous avons procédé à leur découplage voilà déjà quelques années.

Je suis désolé de voir qu'une négociation aussi importante sur le plan même de l'existence de l'humanité, de conflits de pauvreté, de révoltes, de pressions migratoires que nous voyons se dessiner pour le siècle qui commence, est suspendue à un malentendu - savamment préparé, allais-je dire - sur le volet agricole, alors que tout cela me semble dépasser de très loin le problème de l'éventuelle réforme de la PAC et de ses incidences pour la France.

Si le raisonnement est mené à son terme, c'est tout le système qui s'écroulera, car, en définitive, les pays les plus pauvres - ceux vers lesquels va à juste titre l'attention du Président de la République - se trouveront confrontés à une agriculture européenne qui ne pourra plus leur réserver un traitement particulier et à une agriculture mondiale dans laquelle ils seront directement exposés à la concurrence des pays grands producteurs. Dans cette affaire, d'ailleurs, le groupe de Cairns joue à mon avis sur les deux tableaux. Les pays les plus pauvres seront confrontés aux produits américains pour lesquels les farmers ont pratiquement expliqué au Congrès qu'il était impératif de leur ouvrir des débouchés et d'augmenter la part des exportations américaines.

On peut certes nourrir des espoirs dans d'autres domaines, mais une fois tous ces éléments rassemblés, on s'aperçoit que c'est sur la compréhension de la réalité du dossier agricole que tout va se jouer dans quelques jours, et pas seulement pour nos intérêts mais pour ceux du monde entier.

Madame la ministre, tout en vous assurant du soutien du groupe UMP dans les difficultés que vous devez rencontrer en ce moment, et nous imaginons qu'elles ne sont pas simples, nous souhaitons que M. Mandelson prenne conscience que, derrière cette affaire agricole, qui est sérieuse, les enjeux sont bien plus importants encore. Je souhaite que vous arriviez à l'en convaincre. Même si je ne crois pas à la réussite de la négociation de Hong-Kong, il faut tout faire pour ne pas aboutir à un échec sanglant, car le monde s'en remettrait très difficilement ; nous paierions de plus de vingt ans de désordres un échec majeur. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Mme la présidente. La parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l'enjeu de la prochaine conférence ministérielle est décisif. Il s'agit de relancer les négociations du vaste programme de Doha, lequel prévoit la prééminence du droit du commerce sur les droits humains, sociaux, culturels et environnementaux.

En effet, à l'occasion de la quatrième conférence ministérielle de l'OMC, un accord sur l'ouverture d'un cycle de négociations commerciales internationales a été conclu, grâce aux pressions économiques exercées par les pays industrialisés sur les pays en développement.

Si ce programme de négociations évoque à de multiples reprises l'importance de la promotion du développement, il répond en fait surtout aux attentes des pays riches et il contribue à donner davantage de pouvoirs à l'organisation tout en restreignant le droit pour chaque pays de promouvoir son propre modèle de développement. Les effets calamiteux de cette mondialisation des échanges, pour la majorité des pays, sont ressentis dans tous les secteurs d'activité.

Les conséquences négatives de la libéralisation agricole pour les pays en développement et les exploitations les plus vulnérables sont indéniables, madame la ministre.

La concurrence globale toujours plus forte entre marchés agricoles conduit à l'exclusion massive des plus petits exploitants et à une concentration des richesses. Libéraliser à tout crin l'agriculture aboutit à faire reposer la sécurité alimentaire sur la production des pays les plus compétitifs, lesquels imposent, par leurs pratiques, des prix de revient inférieurs aux coûts de production. De telles pratiques ne peuvent conduire qu'à l'écrasement de l'agriculture des pays les plus pauvres, remettant ainsi en cause la souveraineté alimentaire de ces derniers.

Aujourd'hui, force est de constater que les résultats obtenus par les pays en développement en matière de sécurité alimentaire sont des plus alarmants.

L'organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, la FAO, estime que le déficit commercial agricole des pays en développement atteindra 31 milliards de dollars d'ici à 2030, contre 18 milliards de dollars en 2015. Celui des pays les moins avancés, dont les importations à la fin des années quatre-vingt-dix étaient, en valeur, deux fois supérieures à leurs exportations, sera multiplié par quatre d'ici là.

Face à cette situation, madame la ministre, les signataires des accords OMC doivent respecter leurs engagements concernant l'aide alimentaire aux pays les plus vulnérables. En outre, ils doivent reconnaître le droit à l'autosuffisance alimentaire et garantir des prix minima pour les agricultures paysannes.

Concernant l'accès au marché des produits d'exportation, cette question est primordiale pour les pays en développement, car elle conditionne la mise en valeur de leur potentiel agricole. Si l'accord sur l'agriculture a entraîné des réductions tarifaires à l'entrée des marchés des pays développés, elles se sont révélées, dans la réalité, beaucoup moins généreuses que ce qui était promis aux pays en développement.

D'une part, les réductions des droits pour les produits de base et les produits transformés ont été relativement faibles. D'autre part, la progressivité des droits, qui fait augmenter les tarifs douaniers en fonction du niveau de transformation des produits, continue d'entraver l'accès au marché des pays développés et cantonne les pays en développement à l'exportation de produits primaires alors que les échanges annuels de produits agricoles transformés représentent plus de 60 % de l'ensemble des échanges mondiaux de produits agricoles.

A cela s'ajoute la complexité de la structure tarifaire qui finit de décourager le développement d'une activité de transformation dans les pays d'où proviennent les matières premières. En effet, la structure tarifaire appliquée aux produits agricoles par certains pays développés prévoit de multiples aménagements, comme les droits spécifiques, ainsi que des disparités et un manque de transparence dans la gestion des droits appliqués aux contingents tarifaires.

S'agissant des aides internes, les pays en développement, en raison des programmes d'ajustement structurel, soutiennent très peu leur agriculture. En outre, le fait d'avoir notifié des soutiens nuls à l'OMC les empêche, en raison des périodes de référence utilisées par les règles multilatérales, de mettre en oeuvre aujourd'hui des soutiens aux prix et les mécanismes de régulation des cours.

Or, pour ces pays, ce sont les soutiens les moins coûteux, car ils pèsent moins sur le budget limité de l'Etat que les aides directes au revenu. La seule possibilité actuellement pour un pays en développement est d'utiliser les aides classées en boîte verte, c'est-à-dire entièrement découplées de la production. Etant directement financées par le budget de l'Etat, le faible niveau de ce dernier, conjugué au poids de la dette, les rend en fait inaccessibles à la plupart des pays en développement.

Les pays développés, quant à eux, ont négocié un accord protégeant leurs politiques agricoles. En 2002, le soutien total à l'agriculture dans les pays riches était estimé, dans l'ensemble de la zone OCDE, à 318 milliards de dollars.

Enfin, l'accord agricole impose de diminuer le montant des subventions à l'exportation, mais celles-ci restent importantes et les règles ne couvrent pas les formes de soutien aux exportations, tels les crédits commerciaux, l'aide alimentaire utilisée à des fins commerciales et les entreprises commerciales d'Etat.

Ainsi, le libre-échange mène à l'injustice, car il fait gagner les pays les plus richement dotés et remet en cause le droit à la sécurité alimentaire des plus faibles, en déstabilisant les agricultures locales et en augmentant le coût de la facture alimentaire.

Il convient de mesurer la diversité des situations agricoles des membres de l'OMC. Une réponse politique, économique et technique adaptée doit être apportée par la communauté internationale. Or celle-ci n'a engagé et ne propose encore que des aménagements au système en vigueur, qui n'apportent aucune solution sérieuse pour remédier à la pauvreté et au sous-développement.

L'impératif d'autosuffisance et de sécurité alimentaire exige une exception au libre-échange. Il faut instituer une exception alimentaire, qui garantirait le droit de vivre de tous les hommes. La France, avec ses partenaires européens, doit défendre cette ambition pour le cycle de Doha, qui doit effectivement devenir le cycle du développement.

Un autre exemple des conséquences engendrées par la libéralisation des échéances est « l'affaire du coton ». Le coton d'Afrique de l'Ouest est mis à mal par les aides versées par les Etats-Unis à leurs producteurs. Le coût de production de la livre de coton aux Etats-Unis est de 0,7 dollar, mais les subventions versées permettent de réduire ce dernier à 0,4 dollar, contre 0,5 dollar en Afrique.

Cette concurrence déloyale a des effets dévastateurs sur les pays qui sont dépendants des recettes d'exportation tirées du coton. Cette affaire du coton, portée à l'OMC par quatre pays africains producteurs faisant l'objet d'une concurrence déloyale de la part d'un pays développé, aurait dû marquer un début de prise de conscience de la nécessité de créer les conditions d'un marché agricole régulé qui protège les productions vivrières des pays pauvres. Il faudrait adopter le principe de l'élimination de toutes les subventions à la production et à l'exportation de coton.

Concernant la négociation sur l'Accès au marché des produits non agricoles, le NAMA, la formule proposée est celle de la réduction des tarifs douaniers. La solution que veulent imposer les pays industrialisés s'appliquerait à tous les produits. Les tarifs douaniers seraient soumis à une réduction proportionnelle à leur montant. Plus ils sont élevés et plus la réduction serait importante. Les pays en développement qui ont maintenu des tarifs plus élevés que les pays industrialisés seraient désavantagés, alors même qu'ils en tirent des ressources importantes.

Par ailleurs, la libéralisation des services au profit des seules entreprises multinationales des pays riches se poursuit. L'Accord général sur le commerce des services, l'AGCS, ne prévoit aucune restriction à cette libéralisation s'agissant des services publics, comme la santé ou l'éducation, mais aussi des services mis en place par les collectivités.

L'AGCS symbolise parfaitement cette vision de la société qui place les marchés avant les hommes. Il faudrait exiger une renégociation de l'AGCS incluant la définition des services publics et leur exclusion de tout accord commercial. En tout état de cause, l'Union européenne doit exiger l'exclusion explicite de la santé, de l'éducation, de l'environnement et de la culture de la nomenclature des services soumis à l'AGCS.

Il appartient à l'Europe de veiller à faire respecter et à protéger la notion de service public, ainsi que la diversité culturelle.

Sur ce dernier point, le danger est réel. La libéralisation à tout-va des biens et services culturels entraînerait une uniformisation culturelle portant une atteinte inéluctable à la diversité culturelle, notamment dans les pays les moins développés.

A cet égard, il faut se réjouir que l'UNESCO ait adopté, le 20 octobre dernier, à une écrasante majorité, une convention sur la diversité culturelle : sur 154 pays représentés lors du scrutin, 148 ont voté en faveur du texte, deux s'y sont opposés - les Etats-Unis et Israël - et quatre se sont abstenus.

La convention de l'Unesco marque une réelle avancée en ayant une autre approche de la culture que la seule approche commerciale, comme le prouvent la proclamation de la spécificité des biens culturels et la reconnaissance de la souveraineté culturelle des Etats.

Cependant, la convention n'a pas de contenu normatif. Elle ne crée donc pas d'obligations, elle n'est pas contraignante. Son article 20, notamment, précise que rien dans la convention ne modifie les droits et obligations des parties au titre d'autres traités, tel l'OMC.

Si la diversité culturelle a maintenant un point d'appui important, elle n'est pas gagnée pour autant. Une rapide ratification de la convention, une volonté, une vigilance politique rigoureuse sont donc nécessaires, notamment en Europe : bien qu'elle ait signé la convention, cette dernière prépare une modification de la directive « Télévision sans frontières » allant dans le sens inverse de cette convention.

Afin de respecter le vote des citoyens du 29 mai dernier, la France au sein de l'Union européenne, qui négocie en son nom, doit s'opposer à ces projets destructeurs.

Plus fondamentalement, une discussion doit se développer pour déterminer le statut et le contenu des politiques de l'OMC. L'Organisation mondiale du commerce doit profondément changer, tout simplement en faisant le choix de la politique, et non celui de la soumission au marché.

Après les échecs de Seattle et de Cancún, après les objections argumentées et réitérées depuis des années par les pays en développement aux propositions européennes, il est indispensable que l'Union européenne cesse de dicter aux pays du Sud ce qu'elle estime bon pour leur développement et qui, en fait, ne sert que les intérêts des capitalistes européens.

Il est nécessaire que l'Union européenne accepte enfin que ces pays décident eux-mêmes des critères sur lesquels doit se fonder leur développement.

Plus généralement, il est grand temps que l'OMC mette ses actes en faveur du développement en concordance avec ses discours. La réforme de l'OMC se pose donc avec acuité. Ainsi, les parlementaires du groupe communiste républicain et citoyen considèrent qu'il est impérieux d'organiser la coopération, en élevant le niveau des droits plutôt que la concurrence. Pourquoi ne pas réfléchir à une taxe sur le dumping social, par exemple, dont le produit servirait à financer le développement, basée sur un indice mondial de protection sociale ?

Quoi qu'il en soit, madame la ministre, la première chose à obtenir de l'OMC est qu'elle respecte les objectifs du millénaire : permettre à tous les Etats de tirer également profit du commerce mondial pour favoriser la croissance et le plein-emploi, objectifs signés en 1999 par 185 pays et oubliés aussitôt, madame la ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marcel Deneux.

M. Marcel Deneux. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le débat de cet après-midi s'inscrit à la bonne date dans le calendrier des négociations de ce que nous appelons le « cycle de Doha ». Il est intéressant, en effet, à six semaines de la réunion importante qui se tiendra à Hong-Kong, de faire le point, de voir où sont les enjeux et d'essayer de comprendre ce qui peut arriver.

Vous êtes, madame la ministre, parmi les personnalités françaises les plus aptes à nous apporter un éclairage objectif, car vous êtes au coeur de la négociation, vous avez une bonne connaissance des problèmes économiques internationaux et de la culture anglo-saxonne, ce qui vous permet de mieux apprécier les arguments de nos partenaires à l'OMC.

Il faut comprendre qu'au coeur de ces négociations se joue, finalement, notre vision du monde : d'abord, celles-ci devraient concerner le développement, donc se concentrer sur les intérêts des pays les plus pauvres ; ensuite, elles devraient permettre à l'Europe d'obtenir de nouveaux marchés pour nos produits, nos services, donc favoriser nos emplois ; enfin, elles devraient valoriser les efforts considérables accomplis par l'Union européenne en matière de politique agricole commune.

La Commission européenne a donc aujourd'hui pour mandat de ne pas accepter de concessions qui iraient au-delà. On ne doit pas sacrifier la PAC ! Il faut se rappeler, en effet, qu'au cours de ces négociations seule l'Union européenne a déjà effectué des concessions importantes. Elle a ainsi réformé fondamentalement sa politique agricole en 2003. Elle a aussi accepté, en 2004, le principe des restitutions à l'exportation.

Il faut avoir à l'esprit que les négociations actuelles ont pour objectif de favoriser le développement des pays les plus pauvres. Or l'Europe est le premier importateur mondial, elle importe plus des pays en développement que l'ensemble des autres pays industrialisés et elle représente à elle seule plus de 85 % de la destination des exportations des pays d'Afrique.

Loin de créditer l'Europe de ses efforts, loin de lui reconnaître sa contribution essentielle au commerce et au développement, les Etats-Unis et le Brésil demandent désormais une ouverture plus grande du marché agricole européen. Et, dans ce contexte, les négociateurs européens se disent prêts à de nouvelles concessions.

La Commission européenne doit refuser toute nouvelle demande qui ne profiterait en rien aux pays les plus pauvres et qui remettrait en cause ce que l'agriculture peut apporter à la société : la sécurité alimentaire tant en qualité qu'en quantité, l'équilibre économique et social des territoires ruraux, la création d'emplois, la préservation des cultures, des patrimoines et de paysages auxquels les citoyens européens sont profondément attachés.

A la suite du Conseil des ministres des affaires étrangères du 18 octobre dernier, où la France a fait preuve d'une grande fermeté, il est urgent que la Commission se ressaisisse et que le commissaire au commerce et la commissaire à l'agriculture et au développement rural comprennent et s'en tiennent au mandat de négociation que leur ont donné les vingt-cinq Etats membres.

Dans cette affaire, la France défend non pas des intérêts particuliers, mais l'intérêt général, et des principes.

Lorsqu'elle défend la PAC, la France défend une vision européenne. L'actualité ne cesse de nous démontrer qu'être indépendant sur le plan agricole et autosuffisant en matière alimentaire, ainsi qu'avoir la sécurité sanitaire la plus complète du monde, à l'heure actuelle, cela n'a pas de prix.

Aujourd'hui, le mandat des commissaires est donc clair : toute la réforme de la PAC, mais rien que la réforme de la PAC !

Plus tard, sans doute, il nous faudra « revisiter » la notion de préférence communautaire. Ce n'est pas dans le mandat de 2001. Mais je pense que sur un sujet aussi sensible que l'alimentation des hommes la question mérite d'être posée.

Dans la chronologie des différentes étapes de la négociation, un accord sur l'agriculture à Hong-Kong est annoncé comme la condition nécessaire pour avancer sur les autres points et aboutir à la fin de l'année 2006.

Notre fermeté, celle des négociateurs, ne doit pas se relâcher pour autant. L'agriculture ne peut en aucun cas être une variable d'ajustement.

Avons-nous les assurances nécessaires pour ne pas douter de la sincérité des Etats-Unis lorsqu'ils nous font des offres de démobilisation de leurs subventions agricoles ?

Nous connaissons notre difficulté permanente pour classer dans les différentes catégories d'aides, les trois boîtes, les pratiques américaines en vigueur entre l'aide alimentaire aux plus pauvres, les subventions à l'assurance récolte proche d'une assurance revenu, différentes suivant les Etats, le contexte général d'application du Farm Bill ; nous avons toujours des raisons d'être sceptiques sur cette proposition du 10 octobre, qui reste vague.

Je pense qu'il ne faut pas baisser la garde. Il importe de rester vigilant, par exemple sur la liste des produits dits « sensibles ».

La pression du G20 des pays en développement doit être prise en compte, bien sûr, mais il faut trouver le bon dosage de l'effort de libéralisation : entre les 54 % demandés par les uns et les 75 % avancés par les autres.

Nous connaissons bien les quatre volets des négociations agricoles : les soutiens internes, la concurrence à l'exportation, l'accès au marché, les indications géographiques.

Sur les autres sujets, il faut que les pays émergents, principalement le Brésil, la Chine et l'Inde, comprennent que, s'agissant de l'accès au marché des produits non agricoles, les progrès de la négociation sont aujourd'hui insuffisants.

C'est vrai aussi en ce qui concerne l'environnement. Pour ce qui est des services, il en est de même. Cela intéresse particulièrement les pays développés : 60 % à 70 % de nos économies. C'est un secteur « sensible », car il inclut le « modèle 4 » relatif à la mobilité des travailleurs.

Il faut souhaiter que les gains économiques que nos entreprises doivent normalement retirer de la négociation finale équilibreront les concessions que l'Union européenne est prête à faire, dans le cadre du mandat, bien sûr. Mais, pour qu'il en soit ainsi, il faudra un rééquilibrage substantiel de la négociation

Nous serons un certain nombre de parlementaires à Hong-Kong ; nous jugerons avec vous, madame la ministre. Mais, au point où nous en sommes, il vous appartiendra d'apprécier d'ici au prochain Conseil de l'OMC et lors de celui-ci quelle est la limite d'acceptation des pressions sur l'agriculture, en ayant présent à l'esprit que nous ne pouvons pas prendre le risque de faire « capoter » la négociation uniquement sur les problèmes agricoles. A condition que nos partenaires comprennent que nous avons déjà beaucoup donné ! Mais, en définitive, ce sont les intérêts majeurs de la France qui doivent être sauvegardés. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.