Article 14 ter
Dossier législatif : projet de loi relatif aux parcs nationaux  et aux parcs naturels marins
Article 15

Article 14 quinquies

I. - La présente loi est applicable à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

II. - Dans le I de l'article L. 640-1 du code de l'environnement, après les références : « L. 332-16 à L. 332-27, », sont insérées les références : « L. 334-1 à L. 334-8, ».

Article 14 quinquies
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 15

I. - Les dispositions de la présente loi s'appliquent aux parcs nationaux existants à la date de sa publication dans les conditions suivantes :

1° Les espaces ayant été classés par décret en parc national constituent le coeur du parc national. Les territoires classés en zone périphérique constituent les territoires ayant vocation à adhérer à la charte du parc national ;

2° Le décret en Conseil d'État approuvant la charte du parc, dressant la liste des communes qui ont exprimé leur adhésion à cette charte et fixant le périmètre des espaces terrestres et, le cas échéant, maritimes du parc intervient dans un délai de cinq ans à compter de la publication de la présente loi. Jusqu'à la publication de ce décret, le programme d'aménagement du parc national ou, le cas échéant, le programme d'aménagement révisé et approuvé par les ministres chargés de la protection de la nature et du budget, est applicable au coeur, sous réserve de sa conformité aux dispositions de la présente loi. Jusqu'à la publication de ce décret et de la définition des périmètres des espaces urbanisés du coeur du parc national, les dispositions visées au 1° du I de l'article L. 331-4 du code de l'environnement sont applicables à l'ensemble du coeur du parc national ;

2° bis Les dispositions du III de l'article L. 331-3 du code de l'environnement relatives à la mise en compatibilité des documents visés avec la charte d'un parc national s'appliquent à ceux dont l'élaboration ou la mise en révision est décidée postérieurement à la publication de la présente loi ;

3° Les dispositions des deuxième à cinquième alinéas de l'article L. 331-8 du code de l'environnement sont applicables au premier renouvellement du conseil d'administration de l'établissement public du parc national qui suit la publication du décret prévu à l'article L. 331-2 du même code révisé et au plus tard le 1er janvier 2009 ;

4° Les communes comprises dans le périmètre d'un parc national ou de sa zone périphérique et classées en parc naturel régional à la date de publication de la présente loi se déterminent pour l'un des deux parcs lors du renouvellement de la charte du parc naturel régional ;

4° bis Les dispositions de l'article L. 331-4-2 du code de l'environnement ne font pas obstacle à la mise en oeuvre de la réglementation particulière de la chasse dans le coeur du parc national des Cévennes définie par le décret de création du parc national ;

5° Dans un délai de trois ans à compter de la publication du décret en Conseil d'État prévu à l'article L. 331-7 du code de l'environnement, et au plus tard le 1er janvier 2010, le conseil d'administration de l'établissement public du parc national de Port-Cros délibère sur la liste à constituer des territoires de communes ayant vocation à adhérer à la charte et sur les espaces maritimes du parc national à classer. L'approbation de la charte intervient, en ce cas, dans un délai de trois ans à compter de la publication du décret de classement modificatif.

II. - La création d'un parc national dont le projet a déjà fait l'objet d'un arrêté de prise en considération par le Premier ministre à la date de publication de la présente loi n'est pas subordonnée à l'approbation de la charte du parc, qui intervient, en ce cas, dans un délai de cinq ans à compter de la création du parc. Jusqu'à cette approbation, le conseil d'administration de l'établissement public du parc fixe les modalités d'application de la réglementation du parc et aucune modification ne peut être apportée à l'état ou l'aspect du coeur, sauf autorisation spéciale de l'établissement public du parc.

M. le président. Sur les articles 1er à 15, je ne suis saisi d'aucun amendement.

Y a-t-il une demande de parole sur l'un de ces articles ?...

Le vote est réservé.

Vote sur l'ensemble

Article 15
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.

M. Thierry Repentin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je me félicite de constater que ce texte nous ait permis d'embrasser la totalité des territoires de notre pays puisque nous avons allègrement survolé les sommets de nos massifs qui accueillent cinq des sept parcs nationaux, allant même jusqu'aux territoires lointains, mais tout aussi utiles à la préservation de la biodiversité, que sont les départements et régions d'outre-mer.

Je n'oublie pas les espaces maritimes, sur lesquels se sont exprimés avec compétence mes collègues Louis Le Pensec et Yolande Boyer, ni les calanques que vous avez décrites, monsieur le président, avec une chaleur méditerranéenne, prouvant par là même que vous connaissez bien, comme d'autres collègues, les territoires dont vous avez la responsabilité. Je citerai également notre collègue François Fortassin, qui a apporté sa pierre à l'édifice en évoquant, nous nous en souvenons tous, la reproduction du coq de bruyère (Sourires), démontrant ainsi qu'un équilibre doit être respecté pour assurer la pérennité de la biodiversité.

Toutefois, je regrette la suppression de la disposition prévoyant la présence d'un député et d'un sénateur au sein du conseil d'administration de chaque établissement public d'un parc national. Certains y ont vu là une difficulté politique, alors que cette mesure ne présentait, à mes yeux, que des avantages pour le ministre chargé de ces territoires. Ainsi, lors des discussions budgétaires, ces deux ambassadeurs qui lui font peut-être actuellement défaut auraient permis - tel était mon souhait - de faire en sorte que les futurs budgets alloués aux parcs nationaux soient à la hauteur de nos espérances et des enjeux que représentent ces espaces remarquables. Sur ce point, je rejoins le constat qu'a dressé tout à l'heure notre collègue Paul Raoult.

Je note avec intérêt le maintien in fine de la disposition introduite par le Sénat et tendant à reconnaître les compétences locales acquises par les habitants de ces territoires, dont certains aspirent légitimement à rejoindre les effectifs des agents des parcs nationaux.

À cet égard, je tiens à remercier tous ceux qui, au terme d'une très longue discussion, ont compris le fondement de cette mesure. Mes remerciements s'adressent notamment à M. le rapporteur et à Mme la ministre, qui n'est pas restée fermée à cette suggestion.

Je vous recommande, madame la ministre, de suivre la bonne application de ce texte et de respecter l'engagement que vous avez pris quant au survol des parcs nationaux par les aéronefs non motorisés pour faire en sorte que perdurent, dans leur environnement, des activités touristiques. Enfin, je vous remercie tous de l'ambiance dans laquelle les débats se sont déroulés.

M. Charles Revet. Très bien !

M. Thierry Repentin. Ces débats n'ont pas fait que survoler les sujets abordés ; ils ont permis de prendre de la hauteur ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à Mme Adeline Gousseau.

Mme Adeline Gousseau. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme lors de la première lecture, le groupe de l'UMP apportera son entier soutien au projet de loi relatif aux parcs nationaux, aux parcs naturels marins et aux parcs naturels régionaux.

Les conclusions de la commission mixte paritaire que nous examinons ont permis de prendre en compte tant les initiatives de nos collègues députés que nos propositions sénatoriales.

À ce titre, permettez-moi de saluer le travail remarquable des rapporteurs, M. Jean-Pierre Giran pour l'Assemblée nationale et M. Jean Boyer pour le Sénat.

M. Charles Revet. En effet !

Mme Adeline Gousseau. Nous allons ainsi adopter un texte important pour la préservation de notre environnement, car ses dispositions permettent d'assurer une meilleure protection de la biodiversité.

Tout d'abord, ce texte actualise la loi de 1960 relative à la création des parcs nationaux. C'était nécessaire, nous en avons largement débattu, et nous avons choisi de mieux intégrer les collectivités territoriales dans la gestion des parcs, une question essentielle pour le Sénat.

Mais ce texte va bien au-delà de l'amélioration du fonctionnement des parcs nationaux. Il permet la création de nouveaux parcs, à la Guyane et à la Réunion notamment, la constitution de parcs naturels marins, la coordination des actions menées par les parcs et dans les aires marines protégées et, enfin, l'adaptation de la législation relative aux parcs régionaux.

En conclusion, nous sommes convaincus du fait que ce texte nous donnera les moyens de mener une politique de long terme efficace, et bien coordonnée entre les différents acteurs, en faveur de la préservation de la diversité des écosystèmes et pour un développement durable. C'est pourquoi le groupe de l'UMP le votera. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Conformément à l'article 42, alinéa 12 du règlement, je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte proposé par la commission mixte paritaire.

(Le projet de loi est adopté.)

M. Charles Revet. Aucune voix contre ! Mes compliments, madame la ministre !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nelly Olin, ministre. Je vous remercie tous, mesdames, messieurs les sénateurs, de votre contribution à ces débats et des avancées significatives que vous avez apportées à ce texte. J'ai bien entendu les messages qui m'ont été adressés.

Je suis vraiment heureuse d'avoir pu travailler dans une ambiance sereine. Grâce à la hauteur de vues de ces débats, je peux affirmer que la vie politique dans ces moments importants nous grandit. (Applaudissements.)

M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures trente-cinq, est reprise à seize heures cinq, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)

PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
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communication relative à une commission mixte paritaire

M. le président. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programme pour la recherche est parvenue à l'adoption d'un texte commun, ce dont nous nous félicitons.

6

 
Dossier législatif : projet de loi relatif à la fonction publique territoriale
Discussion générale (suite)

Fonction publique territoriale

Discussion d'un projet de loi

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la fonction publique territoriale
Demande de priorité

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à la fonction publique territoriale (nos 155, 243).

Monsieur le ministre, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, avant de donner la parole au Gouvernement, je tenais à souligner l'importance de cette réforme, attendue tant par les agents que par les employeurs territoriaux.

La modernisation qui nous est proposée aujourd'hui se situe dans le cadre de l' « acte II » de la décentralisation.

L'approfondissement et l'élargissement des compétences territoriales ont confié aux agents des collectivités, sous l'autorité des élus, l'exercice de missions ou de tâches de plus en plus nombreuses et difficiles.

Les sénateurs connaissent bien ce sujet, qui concerne près de deux millions d'agents. Je sais que nos débats, placés sous l'égide de la commission des lois, seront empreints, majorité comme opposition, d'expérience et de pragmatisme, car les sénateurs sont au plus près du terrain.

J'observe enfin que l'ordre du jour du mois de mars a été - et sera - presque entièrement consacré à des projets de loi dont le Sénat est saisi en premier lieu.

Après le projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire et avant le projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés, le Gouvernement a choisi de donner au Sénat la primeur de l'examen de ce projet, en cohérence avec la priorité que la Constitution, sur l'initiative de notre Haute Assemblée, nous reconnaît pour les textes relatifs à « l'organisation des collectivités territoriales », qui doivent être déposés en premier lieu sur le bureau du Sénat.

J'ai personnellement souhaité que nous soyons saisis en premier de ce texte que nous allons débattre dans quelques instants. Je sais gré au Gouvernement d'avoir répondu favorablement à cette demande présentée par l'ensemble des sénatrices et des sénateurs. (Applaudissements.)

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, voilà plus de trois ans que les élus, les représentants des personnels et les ministres successifs réfléchissaient à un projet global qui concernerait non seulement le quotidien, mais aussi l'avenir des 1 700 000 agents de la fonction publique territoriale et des quelque 55 000 employeurs, dont bon nombre d'entre vous font partie.

À l'évidence, ce texte arrive dans un contexte très favorable. Le salon de l'emploi public 2006, que j'ai inauguré la semaine dernière avec Christian Jacob, nous a permis de vérifier à quel point les Français étaient attachés à leur fonction publique. Un sondage effectué pour Le Monde et La Gazette des communes indique que 82 % des Français sont prêts à encourager leurs enfants à devenir fonctionnaire. (M. Paul Raoult s'esclaffe.) Certes, la sécurité de l'emploi constitue probablement une motivation forte,...

M. Paul Raoult. La peur du CPE !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...mais je suis convaincu qu'elle n'est pas la seule. En effet, quand on interroge cette fois-ci les jeunes, apparaissent des motivations telles que le souhait d'être en contact avec le public, les possibilités d'évolution de carrière ou l'attrait de travailler au service de l'intérêt général et du service public.

De surcroît, le service public plébiscité par les jeunes Français est le service public de proximité. Selon une autre enquête d'opinion réalisée en juin 2004, 31 % des jeunes interrogés préféreraient la fonction publique territoriale, contre 27 % la fonction publique d'État et 23 % la fonction publique hospitalière.

Il est donc cohérent que la fonction publique territoriale soit la première à bénéficier d'avancées majeures. La présence de Christian Jacob, que je salue, le démontre et l'atteste.

La structuration de la fonction publique territoriale en métiers, déclinés en filières, et, au sein de ces filières, en cadres d'emplois, suscite un intérêt soutenu de la part de l'État employeur et constitue peut-être - Christian Jacob nous le dira tout à l'heure - une source d'inspiration.

Le contexte est donc favorable, mais les deux principaux défis qui se présentent aux collectivités territoriales se sont à l'évidence précisés depuis la préparation de ce projet de loi.

Le premier défi, vous le connaissez, est d'ordre démographique : d'ici à 2012, 38 % des fonctionnaires territoriaux - et, parmi ceux-ci, la moitié des cadres A - partiront à la retraite. Si nous n'y prenons pas garde, si nous n'anticipons pas ce mouvement, nos collectivités seront décapitées alors qu'elles ont déjà un taux d'encadrement bien inférieur à celui de l'État : 9 % pour la fonction publique territoriale, contre 18 % pour la fonction publique d'État.

Le second défi est celui de la performance et de l'efficacité accrue du service public de proximité face aux nouvelles étapes franchies par le processus de décentralisation.

La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales continue à produire ses effets. Il n'est pas opportun aujourd'hui de relancer un débat qui a déjà eu lieu, mais vous savez que, au total, 93 000 personnels techniciens, ouvriers et de services, les TOS, et près de 130 000 postes d'agents de l'État sont en cours de transfert vers les collectivités. Chacun, quelle que soit sa conviction, s'accorde à reconnaître que cela modifiera en partie certaines règles de gestion des ressources humaines au sein de ces collectivités.

Mais avant de vous présenter les lignes de force de ce texte, je souhaite vous dire d'emblée, de manière à dissiper toute ambiguïté, que les ambitions du Gouvernement pour la fonction publique territoriale ne se limitent pas à ce seul projet de loi, comme je m'y étais clairement engagé devant les instances représentatives. Celui-ci s'accompagnera en effet d'un chantier réglementaire autonome très important pour les employeurs territoriaux comme pour les agents, chantier que je souhaite voir avancer très rapidement, en lien avec le protocole statutaire signé par trois fédérations de syndicats de fonctionnaires, en janvier dernier, dans le cadre des négociations salariales menées par mon collègue Christian Jacob, ministre de la fonction publique.

Ce chantier réglementaire est non seulement indépendant de celui des décrets d'application de la loi, mais il lui est même complémentaire.

Il porte, d'une part, sur l'importante question des seuils de création des emplois de grades. Les seuils de création des emplois fonctionnels relèvent de la loi - le projet de loi les aborde, j'y reviendrai. Mais il convient d'adapter aussi les seuils de création des emplois de grades, parallèlement aux dispositions législatives relatives à l'abaissement des seuils de création des emplois fonctionnels.

Est-il normal, comme le rappelait récemment le rapporteur Mme Jacqueline Gourault, qu'un excellent technicien supérieur qui obtient sa promotion dans le cadre d'emplois des ingénieurs territoriaux soit obligé de quitter sa commune d'emploi - qui l'aura aidé à réussir ses épreuves de concours - parce que celle-ci relève d'une strate démographique qui ne peut recruter d'ingénieur ? Quand il y a nécessité d'employer un ingénieur, pourquoi le refuser à une collectivité ? Nous apporterons ainsi des réponses positives à ces incohérences. En outre, afin de renforcer la professionnalisation de la fonction publique territoriale, les conditions d'occupation de ces emplois fonctionnels seront revues.

Ce chantier porte, d'autre part, sur la question des quotas d'avancement de grades. Il faut réfléchir à la question de la généralisation de la méthode du ratio promus/promouvables qui est actuellement en expérimentation.

Cette question, dont l'intérêt est bien évidemment commun aux trois fonctions publiques, est au nombre de celles qui figurent dans le protocole d'accord portant sur le volet statutaire signé au mois de janvier. Elle devra néanmoins tenir compte des spécificités de la fonction publique territoriale. Je sais que Christian Jacob a adopté la même position.

Je souhaite également que l'on progresse sur la question des quotas de promotion interne, permettant l'accès des fonctionnaires territoriaux aux cadres d'emplois supérieurs. Ces taux sont aujourd'hui trop faibles et insatisfaisants en termes d'évolution de carrière et de promotion sociale.

Ainsi, sur 100 agents, moins de 4 % ont été recrutés par cette voie. La proportion est un peu plus élevée en catégorie A - de l'ordre de 6 % - et en catégorie B - près de 5 %. Elle est en revanche plus faible en catégorie C, puisqu'elle est à peine supérieure à 3 %.

Est-il normal, madame Michèle André, que, dans une commune comme la ville d'Issoire - elle compte 13 000 à 14 000 habitants et est représentative -, un agent administratif recruté au plus bas de l'échelle indiciaire doive en pratique attendre trente-deux à trente-trois ans pour atteindre le grade ultime d'adjoint administratif principal de première classe et, de surcroît, évoluer dans un vivier de trente-deux agents administratifs homologues, vivier d'ailleurs inexistant dans une collectivité de cette strate ?

Dans un contexte de restructuration des cadres d'emplois de catégorie C et de forts assouplissements, voire de suppression d'un certain nombre de quotas d'avancement, on pourrait permettre à cet agent, bien entendu jugé compétent par son employeur, d'atteindre ce grade ultime en vingt-trois ou vingt-quatre ans - un gain de près de dix ans n'est tout de même pas négligeable - tout en le faisant évoluer dans un vivier qui serait limité à sept agents. Certaines promotions seraient ainsi, à juste titre, simplifiées et accélérées.

Enfin, la formation initiale des fonctionnaires territoriaux doit être réexaminée dans son ensemble, dans l'objectif, partagé par tous, de la réduction de la durée de la formation initiale au profit de la formation tout au long de la vie, sans pour autant négliger la nécessité d'une formation initiale minimale pour une catégorie de fonctionnaires territoriaux qui, aujourd'hui, n'en bénéficient que très partiellement : les agents de catégorie C, qui représentent 70 % de la fonction publique territoriale.

Il va donc de soi, j'insiste sur ce point, que le Sénat sera prioritairement associé à toutes ces évolutions. J'ai d'ores et déjà remis à la commission des lois une présentation de ces propositions réglementaires.

Je voudrais maintenant revenir à ce projet de loi, qui s'articulera avec toutes ces dispositions réglementaires pour apporter à la fonction publique territoriale des avancées majeures dans le cadre d'un dispositif global ambitieux.

Ce projet de loi a connu une trop longue gestation, tout le monde en conviendra, qui a duré trois années pleines.

Les groupes de travail, les études et les rapports qui se sont succédé ces derniers mois convergent sur la nécessité d'une réforme clairement affichée de la fonction publique territoriale. Je citerai, sans être exhaustif : les rapports des groupes de travail constitués au sein de la Haute Assemblée - et d'abord celui de M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois -, le rapport de M. Courtial sur les institutions de la fonction publique territoriale, ainsi que le rapport de M. Dreyfus, administrateur territorial.

Monsieur le président du Sénat, je sais le rôle que vous avez joué pour initier ce projet. La réflexion a été alimentée par les rapports du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale Prévoir la mutation de la fonction publique territoriale vingt ans après sa création et Les diplômes de la vie -, mais aussi du groupe de travail « Fonction publique territoriale » de l'Association des maires de France - Mme Gourault ne me contredira pas - : Moderniser la fonction publique territoriale pour valoriser nos territoires.

Au lieu d'être empilés dans un coin et de rester lettre morte, ces rapports ont été utilisés. Nous y avons en effet puisé un certain nombre d'idées et de propositions grâce à un effort d'analyse, de compréhension et de compilation.

Permettez-moi tout de même de distinguer, dans cette constellation « l'étoile polaire » : le rapport du Sénat rédigé à la demande de son président sous l'autorité de M. Hyest Refonder le statut de la fonction publique territoriale pour réussir la décentralisation. Ce rapport est remarquable et très utile. Il s'agit non pas de compliments d'usage, mais bien d'une réalité : sur les trente-quatre propositions du groupe de travail, les deux tiers seront reprises dans la loi ou les décrets l'accompagnant.

Des mesures aussi essentielles que la reconnaissance du droit à la formation tout au long de la vie, le développement de la validation des acquis de l'expérience ou le renforcement de la mobilité entre les fonctions publiques d'une part, et avec le secteur privé d'autre part, sont clairement préconisées. Dont acte, monsieur Hyest...

Je le rappelle à l'ensemble des membres de la Haute Assemblée, ce projet de loi que j'ai présenté avec Christian Jacob a fait l'objet, le 16 novembre dernier, d'un avis favorable très largement consensuel du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Cet avis favorable a été donné à près de 70 % des voix, aucune voix ne s'y opposant du côté du collège des employeurs, et trois organisations syndicales sur six lui apportant leur soutien.

Pour être tout à fait précis, cela signifie que, pour le collège des élus, les représentants au Conseil supérieur provenant de l'UMP, de l'UDF, du parti socialiste et du parti communiste s'y sont associés ou, en tout cas, ne s'y sont pas opposés. Et je citerai, par honnêteté, la position du président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, Bernard Derosier, également député, qui a lui-même approuvé ce projet.

M. Jacques Mahéas. Pas ce projet !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Le projet que j'ai présenté au Conseil supérieur de la fonction publique (Ah ! sur les travées du groupe socialiste), vous avez raison de le souligner, monsieur Mahéas, car cela mérite quelques précisions.

M. Jacques Mahéas. Ce n'est pas le texte dont nous sommes saisis maintenant !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Ce résultat a été le fruit d'une vaste concertation avec les associations d'élus - l'Association des maires de France, l'AMF, l'Association des départements de France, l'ADF, et l'Association des régions de France, l'ARF - qui ont toutes apporté leur soutien au projet et ont manifesté leur assentiment.

Ce texte a ensuite été soumis à l'avis du Conseil d'État.

M. Paul Raoult. Et voilà !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. J'ai entendu un certain nombre de réactions à l'issue de cet examen, portant sur la version finalement retenue par le Gouvernement et adoptée, sur notre rapport, cher Christian Jacob, par le conseil des ministres du 11 janvier 2006.

Je voudrais faire quelques remarques sur ce point.

À mon sens, le Conseil d'État a pleinement rempli son rôle lors de cet examen. Le travail d'instruction et l'examen par la section compétente et l'assemblée générale ont été de très grande qualité. Sur le plan formel, le texte qu'il a proposé au Gouvernement d'adopter était fortement amélioré - c'est normal - par rapport au texte soumis à son examen. L'essentiel des modifications qu'il a apportées est d'ordre purement juridique...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Tout à fait !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...et concerne le partage entre la loi et le règlement, le Conseil veillant à purger le texte issu de la consultation du CSFPT de ses dispositions de nature réglementaire.

Je le dis aujourd'hui, comme je l'ai dit au Conseil supérieur, ces dispositions réglementaires seront reprises par le Gouvernement dans les décrets d'application. Certaines dispositions sont, à cet égard, annoncées par l'exposé des motifs du projet de loi, comme le livret de formation. La ligne de fond, mesdames, messieurs les sénateurs, n'a donc pas varié ; c'est seulement le vecteur juridique qui a changé.

Le Conseil d'État - c'est aussi son rôle - a par ailleurs veillé à la cohérence d'ensemble du dispositif, notamment institutionnel, à l'équilibre et à la lisibilité de la répartition des compétences dans le nouveau paysage que porte ce projet de loi, s'agissant de la gestion et de la formation des personnels territoriaux. Il a souhaité, dans ce cadre, ajuster les compétences de chacune de ces institutions, celles qui existent - le Centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT - ou celles qui devront être créées éventuellement - le Centre national de coordination des centres de gestion -, précisément pour les mettre en cohérence.

Le Gouvernement a pris en compte ces éléments d'ordre institutionnel, qui améliorent le dispositif présenté au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Cela étant dit, le Gouvernement ne renonce à rien de ce qui lui paraît fondamental.

D'une part, le principe de parité, qui est au coeur de la fonction publique territoriale, est confirmé. Il n'est pas question de dépouiller le CSFPT de son rôle, et le texte déposé sur le bureau du Sénat, dont je reconnais bien volontiers qu'il peut être, sur ce plan, complété ou précisé, madame le rapporteur, ne porte en rien atteinte à ce principe fondamental.

Je souhaite, d'autre part, que les conférences régionales annuelles relatives à l'emploi public territorial soient ouvertes aux délégations régionales du CNFPT et aux organisations syndicales - ces dernières s'intéressant aux questions de la formation -, et que soit ainsi réaffirmé, sur ce sujet, le principe de parité.

Je suis par ailleurs favorable à ce que le rôle du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale soit renforcé sur un point essentiel, à savoir son rôle de représentation des employeurs territoriaux vis-à-vis des pouvoirs publics, notamment dans le domaine de la négociation salariale.

Les employeurs territoriaux - vous le savez, car très nombreux sont parmi vous ceux qui vivent cette situation au quotidien - sont aujourd'hui, institutionnellement, exclus de ce débat. Lorsqu'on emploie 1,7 million de salariés, cela ne me semble pas normal. Je ne verrais donc que des avantages, monsieur le président Hyest, madame le rapporteur, à ce qu'un collègue employeur, interlocuteur des pouvoirs publics, soit identifié au sein du Conseil supérieur.

Enfin, il est indispensable de donner aux exécutifs territoriaux - surtout aux maires des petites communes qui ont aujourd'hui un besoin de renforcement des compétences de leur encadrement supérieur - les moyens d'exercer les responsabilités qui sont les leurs. C'est tout l'objet de l'abaissement du seuil de la création des emplois fonctionnels.

Il ne s'agit nullement de politiser l'encadrement supérieur, contrairement à ce que j'ai entendu dire, ou plutôt chuchoter... (Sourires.) Les fonctionnaires déchargés de fonction sont extrêmement peu nombreux, et il n'y a aucune raison que cet abaissement du seuil de création modifie cette situation.

De 1988 à 2002, seulement 67 agents ont été pris en charge par le CNFPT à la suite d'une décharge de fonction. Il s'agit donc d'un faux débat. En revanche, instaurer ce rapport de confiance entre le maire et son principal collaborateur, lui permettre de s'appuyer sur des cadres formés et compétents, est une vraie nécessité. C'est l'objet de l'abaissement des seuils de création des emplois fonctionnels.

C'est vous dire que le Gouvernement a pleinement assumé ses responsabilités lorsqu'il a rétabli les dispositions qui avaient été supprimées lors de la phase consultative, mais qui lui paraissent essentielles.

Ainsi replacé dans ce contexte d'échanges nourris et approfondis entre tous les acteurs territoriaux depuis de longs mois, ce projet de loi relatif à la fonction publique territoriale répond à trois grandes ambitions.

Il faut, d'abord, donner plus de liberté aux élus locaux dans la gestion des ressources humaines. Il est temps de faciliter la tâche des 55 000 employeurs territoriaux et de leur donner de nouveaux moyens.

Il faut, ensuite, et c'est impératif, rendre la fonction publique territoriale plus attractive, plus efficace et plus adaptée à ce que l'on attend d'elle aujourd'hui.

Il faut, enfin, clarifier le paysage institutionnel de la fonction publique territoriale pour le rendre plus lisible, plus rationnel, et donc plus efficace.

Donner plus de liberté et de sécurité aux élus locaux, cela signifie donner plus de responsabilités aux collectivités en leur qualité d'employeurs, et leur permettre, et nous serons sans doute tous d'accord sur ce point, de recruter, au-delà des seuils actuels, des collaborateurs sur des emplois fonctionnels.

L'emploi fonctionnel, c'est la garantie, pour le maire, le président de conseil général ou de conseil régional, de pouvoir recruter un collaborateur sur lequel il puisse s'appuyer en toute confiance, sans préjudice des garanties dont bénéficient déjà les agents intéressés en cas de perte d'emploi. J'ai souhaité personnellement que cette possibilité de recrutement soit élargie.

C'est ainsi que le projet de loi permet aux communes de 2 000 habitants au moins, contre 3 500 aujourd'hui, de créer un emploi fonctionnel de directeur général des services. Cela signifie que 2 000 petites communes sont concernées par cet abaissement du seuil. De la même façon, les communes de plus de 10 000 habitants pourraient créer des emplois fonctionnels de directeur des services techniques, alors que le seuil est aujourd'hui de 20 000 habitants.

Les établissements publics intercommunaux à fiscalité propre bénéficieront également d'une plus grande souplesse dans la création des emplois fonctionnels. Le seuil de création de l'emploi de directeur général des services sera abaissé de 20 000 à 10 000 habitants, et celui de l'emploi fonctionnel technique, de 80 000 à 10 000 habitants. Le débat n'est pas clos, je le sais, et je suis très ouvert à une discussion avec vous sur le niveau approprié des seuils.

Je le dis solennellement : l'emploi fonctionnel, ce n'est pas la politisation et il n'a absolument rien à voir avec les prémisses du spoil system. L'emploi fonctionnel, c'est le rapport de confiance, indispensable, entre l'exécutif territorial et les cadres de direction de l'administration centrale.

Aujourd'hui, - et là encore, je suis sûr de ne pas être contredit - les maires des petites communes sont condamnés à recruter des attachés débutants, dont ils assurent en réalité la formation, pour les voir, ensuite, quitter la commune pour un poste de débouché.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Eh oui !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Cette situation n'est pas satisfaisante ; il faut donc la corriger, et c'est ce que prévoit le projet de loi.

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Ensuite, donner plus de sécurité aux élus locaux dans la gestion des ressources humaines, c'est renforcer les mécanismes de régulation.

Il faut d'abord régler la question irritante des mutations d'agents qui viennent d'être titularisés. Je suis de ceux qui estiment illogique de voir une collectivité qui a financé la formation initiale d'un fonctionnaire territorial faire ensuite les frais d'une mutation intervenant aussitôt après la titularisation.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Oui !

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. C'est d'ailleurs une réflexion qui m'a été soufflée par un membre de la Haute Assemblée, dont je tairai cependant le nom pour l'instant puisqu'il n'est pas actuellement dans l'hémicycle.

Cette collectivité a ainsi « investi » pour un agent, et elle n'a aucun « retour sur investissement ». Elle a en quelque sorte formé pour le compte d'un autre employeur.

Pour lutter contre ce phénomène, sans que l'on puisse l'interdire complètement, sauf à porter atteinte à des garanties statutaires majeures, le projet de loi prévoit une clause de remboursement par la collectivité qui « débauche » ainsi un fonctionnaire formé sur le budget du premier employeur, dès lors que la mutation intervient dans les trois ans suivant la titularisation. Cette indemnité correspond au coût direct de la rémunération versée à l'agent pendant sa période de formation initiale, ainsi que le coût des formations complémentaires éventuellement réalisées. J'ai confiance en ce mécanisme de régulation pour mettre un terme à quelques abus, très pénalisants pour les petites collectivités, qui, je le rappelle, constituent le coeur de cible de ce projet de loi.

Enfin, réguler la gestion des ressources humaines, c'est permettre aux régions et aux départements qui le souhaiteraient de s'affilier aux centres de gestion pour la gestion des agents de l'État transférés aux collectivités locales à la suite de la loi du 13 août 2004.

Ce sont principalement les 93 000 personnels TOS qui sont concernés, eux qui forment le gros bataillon des agents mis à disposition.

Je veux ensuite insister sur la nécessité de rendre la fonction publique territoriale plus attractive.

Comme je l'ai dit, me semble-t-il, à l'occasion d'une réponse à une question d'actualité, les collectivités locales offrent une palette exceptionnelle d'activités, avec leurs 253 métiers, dans les filières techniques, sociales, administratives ou culturelles. Des métiers passionnants, comme ceux qui sont liés à la petite enfance, au secteur du patrimoine, à l'encadrement, aux contrôles des travaux, manquent de « bras ». Il importe de trouver ces personnels d'ici à 2012, date à laquelle 38 % des effectifs seront partis à la retraite.

Je souhaite aussi renforcer l'attractivité et l'exemplarité de la fonction publique territoriale. J'ai dit tout à l'heure que je voulais qu'elle devienne pionnière, et nous n'y parviendrons qu'avec le soutien de votre assemblée.

La rendre plus attractive, cela suppose, en premier lieu, de prendre en compte l'expérience déjà acquise par les agents territoriaux, comme par les candidats à l'entrée dans la fonction publique territoriale. Mon collègue Christian Jacob vous en parlera plus précisément tout à l'heure.

Quel est le but ?

Il s'agit, d'abord, de faire de l'expérience professionnelle un équivalent de la formation statutaire obligatoire ou de dispenser certains candidats au recrutement par concours interne ou troisième concours, d'épreuves correspondant à cette expérience. C'est tout l'objet de la reconnaissance de l'expérience professionnelle.

Il s'agit, ensuite, de faciliter l'entrée dans la fonction publique territoriale de personnes venant du secteur privé, avec un mécanisme de reconnaissance de l'ancienneté. Tel est notamment l'objet des troisièmes concours.

Il s'agit, enfin, d'adapter le régime des concours pour qu'ils soient moins académiques - nous avons tous des expériences à cet égard -, qu'ils deviennent plus performants en termes de recherche des compétences et de la motivation des candidats. C'est l'ambition des concours sur titre, qui existent déjà dans la fonction publique territoriale, mais dont je souhaite un renforcement très significatif.

Cette prise en compte de l'expérience déjà acquise doit se faire en premier lieu lors de l'entrée dans la fonction publique territoriale. Sur ce plan, les évolutions relèvent tant de la loi que du domaine réglementaire.

Je souhaite, sur le plan réglementaire, que les troisièmes concours se développent. Aujourd'hui, une vingtaine de cadres d'emplois, sur près de soixante, sont déjà accessibles par un troisième concours qui s'adresse principalement à des candidats issus du secteur privé. Je souhaite donc une généralisation de cette troisième voie d'accès à la fonction publique territoriale, sans que les statuts particuliers constituent un frein, soit du fait de la nature des épreuves de ces concours, soit du fait des conditions de reclassement des lauréats des concours. Il faut regarder de près comment on peut prendre en compte l'ancienneté, c'est-à-dire l'expérience acquise par des candidats venant du secteur privé, lors de leur intégration dans la fonction publique territoriale.

Dans cet esprit, je rappelle que, pour les agents de catégorie C, des dispositions ont été publiées et permettent une reprise d'ancienneté compte tenu des services accomplis antérieurement dans le secteur privé, pour ceux qui sont entrés dans la fonction publique territoriale soit par la voie du troisième concours, soit par la voie du concours externe. Des dispositions analogues seront prises prochainement à l'égard des agents des catégories A et B.

Je souhaite aussi qu'un véritable changement intervienne dans la culture administrative, et j'oeuvrerai pour que la fonction publique territoriale en soit le laboratoire. Les concours de la fonction publique sont aujourd'hui principalement des concours sur épreuves. J'entends faire en sorte que, dans la fonction publique territoriale, les concours sur épreuve soient progressivement remplacés par des concours sur titre avec épreuves. Ce n'est pas la même chose : le concours sur épreuve est trop souvent académique ou universitaire, trop théorique.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Oui !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Le concours sur titre avec une ou deux épreuves, c'est au minimum un entretien qui permet de mesurer la motivation...

M. Jean-Pierre Raffarin. C'est très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...et de cerner la personnalité du candidat, avec la vérification de l'existence du titre et les garanties de neutralité du concours.

Il n'est pas normal de devoir refaire passer à un candidat pourvu d'un diplôme d'État, comme une puéricultrice, des épreuves académiques qu'il a déjà passées avec succès pour son diplôme.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Absolument !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Quant à ce titre, il peut résulter du diplôme, mais aussi - et c'est là un point très important - de la validation des acquis de l'expérience, la VAE, à l'issue d'une analyse du parcours professionnel des candidats et de la labellisation de ce parcours par la reconnaissance d'une équivalence de diplôme. C'est cela aussi la reconnaissance de l'expérience professionnelle.

Je vous le dis très clairement et sincèrement : il n'y a pas, en la matière, de position doctrinale ni de ma part ni de celle des autres membres du Gouvernement. Notre approche est pragmatique. Le concours sur titre permet le choix de candidats précisément adaptés au poste, et motivés. C'est là l'essentiel.

Sans en être la justification première, la substitution progressive des concours sur titre aux concours sur épreuves présente également un intérêt économique et financier : les premiers ont pour conséquence d'alléger le coût des concours. Et si ce n'est pas le but, c'est une conséquence qui peut avoir son importance, dans l'équilibre financier des transferts de compétences entre le CNFPT et les centres de gestion, point sur lequel je reviendrai tout à l'heure.

Rendre la fonction publique plus attractive suppose, en deuxième lieu, de valoriser les efforts de formation individuelle faits par les agents territoriaux, et surtout de reconnaître ces efforts par des promotions internes.

L'objectif est clairement que les formations qualifiantes soient prises en compte lors de l'examen par les commissions administratives paritaires des dossiers individuels des agents « promouvables ». Il ne s'agit pas de faire des formations qui sont suivies un critère d'inscription sur les tableaux d'avancement en tant que tel - ce serait naturellement trop réducteur et porteur de dérives. Mais les efforts de formation doivent figurer dans le « faisceau d'indices » de l'évaluation de la valeur professionnelle, qui, elle, est prise en compte pour les promotions.

Le projet de loi structure ces parcours de formation et leur donne corps.

Le droit individuel à la formation, le DIF, est l'une des dispositions centrales du projet de loi, car, j'ose le dire, elle permet une des plus importantes avancées sociales de ces dernières décennies.

Le Gouvernement attache une importance particulière au rééquilibrage entre, d'une part, les formations initiales qu'il n'est pas question de négliger, mais qu'il importe de repenser dans le sens d'une plus grande efficacité et d'une meilleure adaptation aux besoins des employeurs et, d'autre part, la formation tout au long de la vie, dont le premier jalon a été posé pour le secteur privé par la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social.

Il convient que la fonction publique s'engage fermement dans cette voie, et la fonction publique territoriale sera, à l'occasion de ce projet de loi, la première à voir inscrit dans son statut ce droit individuel à la formation. M. le ministre de la fonction publique m'a accompagné dans cet effort.

De quoi s'agit-il concrètement ? Il s'agit de donner à chaque agent de la fonction publique territoriale un droit à formation, droit qui ne restera pas théorique, puisqu'il est quantifié dans la limite de vingt heures par an, cumulable sur six ans et plafonné à cent vingt heures.

Soyons clairs : ce n'est pas une formation de « confort » ou d'intérêt personnel qui est visée. Il ne s'agit pas pour les agents publics de se « faire plaisir » en se formant. C'est pourquoi le DIF est centré sur les formations de perfectionnement et sur les actions de préparation aux concours et aux examens professionnels.

Ainsi, un technicien territorial en charge des installations électriques des bâtiments municipaux pourra suivre, dans le cadre du DIF, une formation de spécialisation aux nouvelles normes de sécurité, de plus en plus précises, et je n'ose dire tatillonnes...

Rendre la fonction publique territoriale plus attractive, c'est, en troisième lieu, permettre son accès par des passerelles entre les fonctions publiques.

Le projet de loi prévoit que les magistrats et les militaires pourront désormais se présenter aux concours internes de la fonction publique territoriale. Ils avaient été oubliés, à l'inverse de ce qui existe dans la fonction publique de l'État et dans la fonction publique hospitalière.

Dans le même esprit, le projet de loi prévoit la possibilité de détachements dans la fonction publique territoriale de fonctionnaires venant de la fonction publique hospitalière.

C'est dans le sens de l' « unicité » des fonctions publiques que s'inscrit ce projet de loi.

Je souhaite aussi - j'insiste sur ce point qui, pour de multiples raisons, me tient à coeur et que j'ai souligné lors de mon audition par la commission des lois  - que l'on améliore les passerelles de la fonction publique territoriale vers la fonction publique de l'État. Celles-ci existent déjà, mais partiellement. Nul besoin de dispositions législatives à cet égard, mais il est nécessaire de se pencher sur ce dossier, qui concerne au premier chef l'adaptation des statuts particuliers des corps de l'État.

C'est un travail réglementaire important que le ministre de la fonction publique a entamé avec l'ouverture, et je l'en remercie, du corps des administrateurs civils aux administrateurs territoriaux et qui concernera l'ensemble des corps de l'Etat.

Enfin, la fonction publique territoriale doit aussi poursuivre son effort de professionnalisation. C'est en étant très professionnelle qu'elle saura attirer.

C'est pourquoi il est nécessaire, dans le cadre général du rééquilibrage que j'ai déjà évoqué entre la formation initiale et la formation permanente, de prévoir une formation initiale, uniquement là où elle est indispensable.

En prévoyant, dans son l'article 1er, qui modifie la loi du 12 juillet 1984 sur la formation des agents de la fonction publique territoriale, que la formation professionnelle consiste notamment en des actions de formation initiale d'intégration à l'emploi « dispensées aux agents de toutes catégories », le projet de loi fait de la formation initiale des agents de catégorie C, formation aujourd'hui partielle, une obligation statutaire. Cette disposition témoigne, une nouvelle fois, du caractère très social du texte qui vous est soumis.

Les décrets relatifs aux différents cadres d'emploi concernés en préciseront la portée. J'indique néanmoins, à ce stade, qu'il ne s'agit pas d'instaurer une formation longue. J'ai demandé que ce soit des formations courtes et centrées sur l'environnement de travail, parce qu'elles doivent être peu coûteuses et bien adaptées aux besoins des agents, sans être pénalisantes pour les employeurs territoriaux. Ces formations seront réservées aux agents de catégorie C, et complétées, le cas échéant, pour les emplois les plus spécifiques, par des formations spécialisées à caractère technique, afin de ne pas fermer la porte.

Apprécions les enjeux de cette mesure phare. En 2001, le nombre de jours de formation par an et par agent de catégorie C était de 1,9. L'objectif est de parvenir, à terme, à environ trois jours par an pour ces agents, qui, je le répète, constituent plus des trois quarts des fonctionnaires territoriaux. Ainsi, ils seront non pas les laissés-pour-compte, mais les grands bénéficiaires de la réforme.

Enfin, ce texte clarifie le paysage institutionnel de la fonction publique territoriale - cela me paraît indispensable ! - pour rendre plus efficaces les organes de formation et de gestion des personnels.

Des institutions existent, on les connaît : le Centre national de la fonction publique territoriale, ou CNFPT, théoriquement chargé de la formation, mais dont le rôle s'étend aussi, aujourd'hui, à la gestion ; les centres de gestion départementaux ou interdépartementaux, qui ont une fonction de gestion, mais amputée de ce qui est assuré par le CNFPT ; enfin, bien sûr, le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, le CSFPT. Il faut y ajouter les collectivités non affiliées.

Je le dis très clairement : je suis très ouvert au débat, car - je suis sûr que c'est l'un point sur lesquels nous nous rejoindrons - les institutions ne sont pas un but en elles-mêmes.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Elles ne sont utiles que par le rôle qu'elles peuvent remplir. Mais elles doivent s'articuler de manière cohérente. Or, chacun le reconnaît fort honnêtement, des améliorations doivent être apportées sur ce plan. Un rééquilibrage et des clarifications sont nécessaires, comme le soulignent d'ailleurs la plupart des rapports cités tout à l'heure. Le projet de loi s'y emploie.

Le CSFPT, tout d'abord, est la clef de voûte du dispositif institutionnel. Le Gouvernement avait accepté d'en rappeler les compétences éminentes en matière de représentation des exécutifs territoriaux et des agents territoriaux, soulignant par là même son caractère de lieu de dialogue social. L'avis du Conseil d'État nous a incité à supprimer quelques dispositions ; cependant, si la Haute Assemblée - et je m'adresse bien à l'ensemble de ses membres - estime que ce ne serait pas contrevenir à la délimitation du domaine législatif et du domaine réglementaire que d'inscrire dans la loi des dispositions relatives au rôle et aux compétences du Conseil supérieur, c'est bien volontiers que nous le ferons. C'est là un élément important que je tenais à signaler à l'attention de M. Mahéas, qui ne semble pourtant guère m'écouter ! (Si ! si ! sur les travées du groupe socialiste.)

M. Pierre-Yves Collombat. Il a deux oreilles ! (Sourires.)

M. Claude Domeizel. Il arrive à écouter et à bavarder en même temps ! (Nouveaux sourires.)

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Comme c'était une bonne nouvelle, je souhaitais qu'il l'entende !

M. Claude Domeizel. Nous sommes tout ouïe !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Merci ! Il est en tout cas une disposition dont la portée est très forte : celle qui instaure le collège des élus comme interlocuteur du Gouvernement pour les négociations salariales qui sont régulièrement menées avec les syndicats de fonctionnaires. Ceux-ci étant 1,7 million, il est assez logique que les « patrons » des collectivités locales aient leur mot à dire quand il s'agit de discuter les augmentations du point d'indice concernant l'ensemble de la fonction publique territoriale !

M. Gérard César. C'est normal !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Quant au CNFPT, dont la vocation est la formation, il assume aussi, de fait, des missions de gestion. Cela conduit à une confusion certaine, je le dis comme je le pense, non seulement dans la lisibilité des attributions, mais aussi dans le fonctionnement, car, autant le principe du paritarisme, que respecte pour partie le CNFPT, est pleinement justifié en matière de formation professionnelle, autant il n'a pas de raison d'être lorsqu'il s'agit de recrutements et d'organisation des concours.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Très juste !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Le projet de loi comporte des dispositions relatives à la formation tout au long de la vie, au DIF, au livret de formation, à la reconnaissance de l'expérience professionnelle, la REP, et à la validation des acquis de l'expérience, la VAE : pour qu'elles trouvent leur plein effet, il convient qu'une institution les fasse vivre. Cette institution, c'est le CNFPT, avec ses délégations régionales et ses écoles d'application. Il s'agit non seulement de le recentrer sur ses missions de formation, mais aussi de développer celles-ci. Je lui fais d'ailleurs totalement confiance à cet égard.

Ainsi, il lui reviendra d'abord de mettre en oeuvre concrètement les procédures de reconnaissance de l'expérience professionnelle.

C'est à lui également que doivent incomber l'analyse et l'accompagnement des demandes de validation des acquis de l'expérience. Il n'en a pas le monopole, certes, mais cela entre dans sa vocation naturelle.

C'est à lui enfin qu'il revient de faire en sorte que le droit individuel à la formation soit une réalité concrète, puisque les formations de perfectionnement en vue de développer la qualification des agents et les actions de préparation aux concours, qui constituent le coeur du DIF, pourront être et, dans la pratique, sont principalement organisées par le CNFPT.

Pour qu'il puisse se consacrer à ces tâches nouvelles, qui sont de première importance, le CNFPT doit être déchargé des tâches de gestion de proximité,...

M. Alain Vasselle. Très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...qui entrent à l'inverse dans la sphère de compétence des centres de gestion : c'est le cas, par exemple, de la prise en charge des personnels de catégorie A momentanément privés d'emplois et du reclassement des fonctionnaires de cette même catégorie devenus inaptes à leur emploi.

Dans notre esprit, ce rééquilibrage doit se faire à coût constant, conformément à la demande expresse, précise et constamment réaffirmée avec une grande force par le président du Sénat, M. Poncelet. C'est donc une règle que s'est fixée le Gouvernement. (Murmures sur les travées du groupe socialiste.)

M. Claude Domeizel. Ce sera difficile !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Je voudrais insister sur un point : je ne pense pas que le projet de loi soit générateur de dépenses nettes nouvelles. Certes, de nouvelles formations sont mises en place, notamment la formation initiale pour les agents de la catégorie C, mais des économies vont par ailleurs être possibles, d'abord du fait de la pyramide des âges, qui entraînera le départ des agents les plus anciens, donc aux indices les plus élevés, ensuite parce que les formations initiales seront raccourcies, enfin grâce à la suppression de nombreuses épreuves aux concours.

J'ajoute que le CNFPT tirera nécessairement profit de la priorité que donne le projet de loi à la formation permanente : il me paraît clair que, sans en avoir le monopole, bien entendu, il en sera l'opérateur presque naturel, en tout cas privilégié, et qu'il en retirera les ressources correspondantes.

De la même façon, le CNFPT interviendra dans le processus de la validation des acquis de l'expérience, intervention qui sera bien sûr facturée.

Enfin, n'oublions pas que l'assiette du « 1 % formation » sera considérablement élargie par l'arrivée progressive des fonctionnaires de l'État qui intégreront la fonction publique territoriale dans le cadre du droit d'option, comme je l'ai déjà évoqué ; cela concerne 130 000 personnes.

Je suis donc porté à faire spontanément confiance au CNFPT et aux centres de gestion pour trouver ensemble, par le contrat, comme le prévoit le projet de loi, la voie d'un consensus.

Pour que rien ne soit laissé au hasard, j'indique que j'ai présenté aux organisations syndicales et aux associations d'élus un protocole d'accord, que l'on pourrait qualifier de « clause de revoyure », afin que l'ensemble des parties concernées se retrouvent autour d'une table, chiffres en main, une fois les dispositions de la loi entrées en vigueur et les bilans réalisés, authentifiés et vérifiés. Si cela conduit à proposer la modification des taux de cotisations, nous étudierons cette éventualité et le législateur, le cas échéant, en serait saisi. Mais, je le dis très clairement, ce n'est pas aujourd'hui mon hypothèse de travail.

Dans la perspective de cette clarification du paysage institutionnel, un certain nombre d'interlocuteurs m'avaient laissé entendre qu'il fallait absolument créer une structure nationale, sous forme d'un établissement public, qui soit en quelque sorte « tête de réseau » des centres de gestion : c'est le centre national de coordination des centres de gestion, prévu à l'actuel article 10 du projet de loi.

Cette structure aurait eu pour double objet de favoriser la nécessaire coopération entre les centres de gestion dans l'exercice de leurs nouvelles attributions et, par ailleurs, d'assumer des missions de gestion à l'attention des fonctionnaires de catégorie A.

M. Claude Domeizel. Il « aurait eu »...

M. Jacques Mahéas. Voilà que le ministre parle au conditionnel !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Dans le cadre de ces dernières missions, elle aurait organisé pour toutes les collectivités, affiliées ou non, les examens professionnels de cette catégorie d'agents et aurait été chargée de la publicité des créations et vacances d'emplois de catégorie A ainsi que de la gestion de la bourse nationale des emplois, sans oublier la prise en charge des déchargés de fonctions ou le reclassement de ceux qui sont devenus inaptes à l'exercice de leur fonction.

Il s'agissait donc de vraies compétences portées par une structure nouvelle, non coûteuse, qui, m'avait-on assuré, devait faire l'unanimité autour d'elle. Or le vote de la commission des lois a très clairement montré, si j'ai bien compris le message qu'elle nous a adressé, qu'il n'en était rien et que, s'il était certes nécessaire de faire exercer ces missions par le réseau des centres de gestion, un établissement public national, même doté de ressources limitées et fixées par le législateur, ne suscitait que méfiance et incompréhension.

Je vous indique donc que je suis ouvert à toute formule qui privilégierait le transfert des missions de gestion des ressources humaines actuellement exercées par le CNFPT au réseau des centres de gestion ou à un centre de gestion,...

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...sans retenir la création d'une structure nationale nouvelle, tant il est vrai que certains précédents en la matière doivent inciter à une grande prudence.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. C'est vrai !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Oh oui !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Car, dans ce rééquilibrage du paysage institutionnel, il ne faut pas oublier l'essentiel, qui consiste, au-delà de l'extension de leurs compétences de gestion, dans le renforcement du rôle des centres de gestion.

Je souhaite que ceux-ci se voient reconnaître une véritable mission de « centres d'information en matière de gestion des ressources humaines ». C'est pourquoi je souhaite également qu'ils soient « calés » sur l'échelon qui, en l'occurrence, me paraît être le plus pertinent : le niveau régional. Telle est la portée de l'identification des centres de gestion coordinateurs et des compétences qui leur sont reconnues à cet égard.

Dans mon esprit, les centres de gestion sont appelés à prendre le relais du CNFPT dans les tâches d'organisation de tous les concours, à l'exception des seuls concours de recrutement aux cadres d'emplois ouvrant sur une scolarité, qui doivent rester réservés au CNFPT : il s'agit des concours d'administrateurs territoriaux, de conservateurs du patrimoine, de conservateurs des bibliothèques et de lieutenants de sapeurs-pompiers professionnels.

Sous cette réserve, ce sont les centres de gestion qui organiseront pour les collectivités et les établissements publics qui leur sont obligatoirement affiliés l'ensemble des concours et examens des catégories A, B et C.

Par ailleurs, toujours dans un souci de cohérence, les centres de gestion passeront entre eux des conventions, au moins au niveau régional, pour l'organisation des concours de catégorie A. Ils seront les organisateurs exclusifs des concours concernant les catégories A et B relevant des filières administrative, technique, culturelle, sportive et des polices municipales.

La fonction publique territoriale y gagnera en lisibilité, tout particulièrement s'agissant des calendriers des concours.

Les centres de gestion voient ainsi leurs missions développées non pas seulement dans le cadre d'un jeu de « vases communicants » avec le CNFPT, mais surtout dans un souci, encore une fois, de clarté et de cohérence. Les centres de gestion sont clairement identifiés comme les structures d'appui et de ressources de toutes les collectivités, de leurs agents et des candidats à un emploi public territorial. Ils ont pour vocation, je l'affirme, de devenir des pivots en matière d'emploi public territorial.

Les centres de gestion doivent aussi voir leur rôle de gestionnaires de proximité accentué. C'est ainsi qu'ils mutualiseront les opérations liées aux autorisations spéciales d'absence pour les collectivités employant moins de 50 agents.

Au-delà de ces compétences particulières, leur rôle sera renforcé en matière de gestion prévisionnelle des effectifs, d'emplois et des compétences. J'ai souhaité que cette dernière mission apparaisse nettement dans la loi. Elle prendra la forme de conférences annuelles régionales, suggérées par le Conseil d'État et acceptées par le Gouvernement, de préférence aux structures administratives lourdes et complexes qui figuraient initialement, sous l'appellation de « comités régionaux pour l'emploi public territorial », dans la version que j'avais présentée au CSFPT. Acceptant cette substitution, le Gouvernement n'a en rien abandonné l'objectif : les conférences régionales devront développer une approche fine de l'évolution de l'emploi public territorial.

Enfin, je n'oublie pas les organisations syndicales, qui font vivre le dialogue social dans les collectivités ou dans les centres de gestion qui gèrent pour le compte des collectivités. Des mesures significatives concernant les moyens mis à la disposition des organisations syndicales ou la reconnaissance d'un déroulement de carrière non pénalisant pour tout représentant syndical, sans compter la généralisation - à certaines conditions, je tiens à le rappeler - des autorisations spéciales d'absence, sont prévues dans ce projet de loi ; nous pourrons y revenir.

Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les grandes orientations et les lignes de force du projet de loi. La présentation que j'en ai faite n'est naturellement pas exhaustive, car je me suis attaché à des aspects très précis et très techniques. Je n'ai pas évoqué, par exemple, les avancées que contient le texte en matière d'hygiène et de sécurité, de médecine préventive, de recrutement des personnes handicapées.

Je pense néanmoins qu'avec ce projet de loi, et au bénéfice des améliorations que le Sénat voudra bien y apporter, la fonction publique territoriale franchira une étape très importante de son histoire qui permettra à chacun, employeurs ou fonctionnaires, de bénéficier d'avancées considérables au service des usagers.

Je forme donc le souhait ardent que le dialogue qui s'est instauré et le consensus qui s'est manifesté au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale se renouvellent à l'occasion de notre débat, et je vous assure - j'espère que Christian Jacob et moi-même saurons vous le démontrer - qu'il s'agit non pas d'une formule, mais bien d'une réalité. Pour notre part, nous sommes ouverts à l'exploration de toutes les pistes, de toutes les suggestions, de toutes les propositions que vous serez susceptibles de présenter, dès lors qu'elles s'inscrivent dans les objectifs généraux de cette réforme sociale. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christian Jacob, ministre de la fonction publique. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi relatif à la fonction publique territoriale marque une nouvelle étape de la dynamique dans laquelle le Gouvernement souhaite inscrire notre fonction publique.

Je ne reviendrai pas sur la présentation détaillée que vient de vous en faire mon collègue Brice Hortefeux, et j'insisterai sur deux points seulement.

Ce texte est en pleine cohérence avec l'accord que j'ai signé le 25 janvier dernier avec trois syndicats représentatifs de la fonction publique : la CFDT, l'UNSA et la CFTC,...

M. Christian Jacob, ministre. ...accord qu'il vient compléter. Je rappelle au passage que c'est le premier qui est conclu depuis huit ans : c'est dire l'importance que constitue la concrétisation de certaines des principales avancées qu'il contient.

Le projet de loi marque donc une première étape. Je serai prochainement conduit à vous présenter un projet de loi transversal qui concernera les trois versants de la fonction publique et qui aura notamment pour objet de lever un certain nombre de rigidités auxquelles on est confronté en matière de gestion des ressources humaines, Brice Hortefeux l'évoquait à l'instant, et qui sont dénoncées régulièrement par les employeurs, notamment par les élus locaux.

L'accord du 25 janvier dernier sur la promotion professionnelle et l'amélioration des carrières est fondé sur deux principes qui me semblent valables pour l'ensemble de la fonction publique : d'une part, redonner de l'ampleur aux perspectives de carrière des agents, de haut en bas de la grille des rémunérations, en supprimant les obstacles injustifiés à la promotion professionnelle et à la mobilité ; d'autre part, favoriser la formation et la prise en compte de l'expérience dans la gestion des ressources humaines de la fonction publique.

En matière de promotion professionnelle et de mobilité, l'accord du 25 janvier prévoit, pour les trois fonctions publiques, une restructuration complète de la catégorie C afin de diminuer les obstacles à la promotion et de restaurer l'amplitude des carrières. Cela se traduira par la revalorisation du sommet de la catégorie C et la création d'un échelon supplémentaire dans les trois premiers grades. L'accord prévoit en outre un quasi-doublement des possibilités de promotion de la catégorie C vers la catégorie B et de la catégorie B vers la catégorie A, ainsi que la création d'emplois fonctionnels pour améliorer les parcours de la catégorie A.

Pour la fonction publique territoriale plus spécifiquement, deux mesures vont dans le même sens. Le projet de loi qui vous est soumis prévoit la révision des seuils pour la création d'emplois fonctionnels, ainsi que la révision des seuils d'emplois de grade, qui fera l'objet de plusieurs textes d'ordre réglementaire. À cela va s'ajouter la suppression des quotas d'avancement de grades et leur remplacement par des ratios promus-promouvables fixés par chaque collectivité, ce qui devrait permettre de fluidifier davantage encore les carrières dans la fonction publique territoriale et de donner aux employeurs locaux plus de marge de manoeuvre pour distinguer les agents les plus méritants.

Afin de faciliter la mobilité, je souhaite d'abord mettre l'accent sur les fusions de corps au sein de la fonction publique de l'État, pour harmoniser les cadres statutaires et faciliter les passerelles entre les fonctions publiques. Une centaine de corps devraient être fusionnés dès 2006.

Il faut veiller tout particulièrement à la mobilité entre les fonctions publiques. En effet il est trop souvent plus aisé d'aller de la fonction publique de l'État vers la fonction publique territoriale que de faire le parcours inverse. Il est indispensable de parvenir à une stricte égalité des possibilités ouvertes aux fonctionnaires d'État et aux fonctionnaires territoriaux, et d'offrir aux agents des parcours professionnels plus attractifs et aux employeurs locaux la possibilité de trouver les profils les plus adaptés.

La mise en place de la reconnaissance des acquis de l'expérience dans la fonction publique, souhaitée par le Président de la République, est l'une des autres avancées importantes de l'accord du 25 janvier.

Je précise d'entrée que la prise en compte de l'expérience ne signifie en rien l'abandon du concours, qui demeure sans réserve le mode de sélection pertinent, un outil sûr et objectif pour la validation des connaissances. Nos concitoyens sont d'ailleurs très attachés au concours, car il garantit l'application du principe d'égalité d'accès aux emplois publics, principe qui constitue l'un des éléments fondateurs de notre pacte social.

Cela ne veut toutefois pas dire que la manière dont les concours sont organisés doive être intangible à jamais. Les épreuves sont parfois trop théoriques, déconnectées de la vie professionnelle : cela ne facilite ni la promotion professionnelle ni le déroulement des carrières. Il faut donc faire évoluer les choses.

L'accord du 25 janvier prévoit l'élargissement progressif de la part de la promotion interne et des examens professionnels dans les statuts de l'ensemble des corps de fonctionnaires ; l'institution de dispositifs de reconnaissance des acquis de l'expérience professionnelle se substituant à certaines épreuves dans les concours ou les examens professionnels ; des dérogations aux conditions de diplôme pour l'inscription aux concours, en fonction de l'expérience des personnels ; la valorisation de l'expérience professionnelle dans les parcours professionnels, notamment pour les promotions ; la prise en compte de l'expérience professionnelle pour faciliter les « secondes carrières » ; enfin, l'institution d'un congé de validation des acquis de l'expérience.

Le projet de loi que nous vous soumettons, Brice Hortefeux et moi-même, applique ces orientations à la fonction publique territoriale.

En matière de formation, l'effort consacré aux agents publics est réel. Il mobilise des moyens considérables pour des résultats dans l'ensemble satisfaisants, notamment en ce qui concerne le taux d'accès des agents publics à la formation continue, qui est supérieur à celui du secteur privé.

Cependant, on constate un cloisonnement trop marqué entre formation initiale et formation continue, une trop faible implication de l'encadrement dans la définition des besoins des services et des agents, et une absence d'évaluation des effets des actions de formation. Par conséquent, l'articulation entre formation et carrière est encore insuffisante.

Or, aujourd'hui, la question de la formation tout au long de la vie est devenue incontournable pour les fonctions publiques. Elle l'est d'autant plus que l'on se situe dans une fonction publique de carrière et que la puissance publique est garante de l'adaptation constante du service public aux besoins des citoyens.

Il faut donc revoir l'organisation des formations et garantir aux agents de la fonction publique le droit individuel à la formation, droit dont bénéficient déjà les salariés du secteur privé.

Le projet de loi qui vous est soumis pose un premier jalon en ce sens en instituant ce droit nouveau au profit des personnels de la fonction publique territoriale.

Afin que vous ayez une vue d'ensemble des textes relatifs à la fonction publique, je souhaiterais vous annoncer brièvement les principaux axes du projet de loi portant dispositions relatives à la fonction publique que je vous présenterai dans quelques semaines.

Tout d'abord, ce texte étendra à l'ensemble de la fonction publique les dispositions qui vous sont soumises aujourd'hui en matière de formation et de reconnaissance de l'expérience.

Ensuite, il adaptera les règles relatives à la mise à disposition des fonctionnaires pour faciliter la mobilité, que ce soit entre les trois fonctions publiques ou au sein de la fonction publique de l'État.

Ce projet de loi modernisera les règles de déontologie des fonctionnaires, pour les mettre en conformité avec celles qui ont été adoptées dans les principaux pays occidentaux et renforcer la sécurité juridique des agents. L'objectif est d'encourager les échanges entre le secteur public et le secteur privé afin de permettre aux fonctionnaires d'effectuer des parcours professionnels plus riches et aux employeurs de tirer profit de nouvelles compétences.

Le projet de loi simplifiera le régime des cumuls d'activité, qui est aujourd'hui, dans certains cas, un frein à la création d'entreprise et au bon fonctionnement des pôles de compétitivité.

Enfin, le projet de loi assouplira le régime du temps non complet pour faciliter le maintien des services publics en milieu rural.

J'y insiste, ce nouveau projet de loi permettra de lever un certain nombre de rigidités pour répondre aux préoccupations des agents comme à celles des employeurs.

En effet, il n'y a aucune raison d'imposer aujourd'hui un modèle unique de carrière dans la fonction publique, celui selon lequel on entre dans la fonction publique à vingt ans pour n'en ressortir qu'à la retraite. Pour cela, il faut éviter de pénaliser ceux qui font des choix de carrière diversifiés.

Au total, si nous menons à bien ce programme, nous aurons fait accomplir des progrès importants à la fonction publique en 2006. Le Président de la République et le Premier ministre y portent un grand intérêt, car la modernisation de l'État ne se fera pas sans les fonctionnaires, et sans une fonction publique adaptée à notre société.

J'ajoute que, dans un contexte de départs massifs à la retraite qui sera la caractéristique des années à venir, la fonction publique doit aussi s'ouvrir davantage qu'elle ne l'a fait dans le passé. Il lui faut en particulier s'ouvrir aux jeunes, et ce quel que soit leur niveau d'études. Je vous rappelle que, dès la mise en place du plan d'urgence pour l'emploi par Dominique de Villepin, nous avons créé le PACTE - parcours d'accès aux carrières de la fonction publique territoriale, hospitalière et d'État - pour permettre aux jeunes sans qualification d'intégrer la fonction publique en qualité de titulaires au terme d'un parcours alternant formation et stage, et pour ainsi faire fonctionner à nouveau l'ascenseur social.

Enfin, l'accord du 25 janvier 2006, signé par la CFDT, l'UNSA et la CFTC, a consacré l'adhésion des partenaires sociaux à une politique de promotion professionnelle et d'amélioration des carrières.

Au cours de cette année 2006, avec Brice Hortefeux, mais aussi avec Xavier Bertrand pour la fonction publique hospitalière, nous poursuivrons les concertations de façon à faire aboutir les différents chantiers ouverts pour moderniser notre fonction publique.

Tels sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les différents éléments que je voulais porter à votre connaissance, en étant persuadé que nous ferons du bon travail ensemble et que nous enrichirons ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Sans aucun doute, monsieur le ministre !

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le ministre délégué, ce projet de loi était en effet attendu depuis longtemps par tous les acteurs de la fonction publique territoriale : il est donc le bienvenu.

La fonction publique territoriale a été organisée par la loi du 26 janvier 1984 ; elle a été renforcée par les lois Galland de 1987 et Hoeffel de 1987, les lois de 1996 et de 2001, et, plus récemment, par la loi de juillet 2005 portant création d'un contrat à durée indéterminée dans la fonction publique.

Mais les avancées dues à ces différentes lois n'étaient pas suffisantes, et de nombreuses études et des travaux préparatoires ont été menés, par M. Jean Courtial, maître des requêtes au Conseil d'État, par M. Bernard Dreyfus, professeur de droit, qui s'était vu confier par M. Jean-Paul Delevoye, alors ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire, une mission consacrée à « la mise en oeuvre du dispositif législatif sur la fonction publique territoriale ».

Il convient également de rappeler que M. Rémy Schwartz, maître des requêtes au Conseil d'État, avait également remis un rapport à M. Émile Zuccarelli, alors ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation.

Je ne peux pas ne pas évoquer, bien sûr, le groupe de travail institué sur l'initiative du président du Sénat, M. Christian Poncelet,...

M. le président. Merci, ma chère collègue !

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. ...présidé par le président de la commission des lois, M. Jean-Jacques Hyest, dont le rapporteur était M. Alain Vasselle, et qui a abouti à la rédaction d'un rapport intitulé Refonder le statut de la fonction publique territoriale pour réussir la décentralisation.

M. Claude Domeizel. Et l'opposition ?

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. Mon cher collègue, je vous renvoie à mon rapport écrit, où figurent bien d'autres noms cités.

Je n'oublie pas le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, qui travaille constamment sur ces questions et qui a rendu plusieurs rapports, notamment Diplômes de la vie, ou encore Enjeux et défis de la formation professionnelle dans la fonction publique territoriale.

Au-delà de tous ces rapports, nous qui sommes les acteurs des collectivités territoriales, et donc aussi de la fonction publique territoriale - savons qu'un certain nombre d'éléments rendaient nécessaire l'élaboration d'une nouvelle loi. On a évoqué tout à l'heure le papy-boom, c'est-à-dire le départ à la retraite d'ici à 2012 de 38 % des 1 700 000 fonctionnaires.

Mais il y a trois autres points que je voudrais aborder maintenant.

Le premier concerne la capacité d'adaptation de nos fonctionnaires territoriaux aux nouveaux métiers, aux nouvelles fonctions qu'ils ont à assumer dans nos collectivités territoriales. En cela, votre projet de loi répond tout à fait à l'objectif de la reconnaissance de l'expérience professionnelle, de la validation des acquis de l'expérience, qui permettront effectivement à un certain nombre de personnes d'entrer dans la fonction publique territoriale et d'apporter ainsi leur expérience dans de nouveaux métiers.

Le deuxième point a trait au développement de l'intercommunalité. Celle-ci bouleverse le paysage politique territorial et rend absolument nécessaire l'évolution de la fonction publique territoriale.

Enfin, le troisième point concerne l'Acte II de la décentralisation, qui conduit à des transferts de personnels de l'État vers les collectivités territoriales, en particulier vers les départements en ce qui concerne les personnels de l'équipement, et vers les régions et les départements pour ce qui est des TOS, les personnels techniciens, ouvriers et de service, de l'éducation nationale.

Pour toutes ces raisons, et au-delà des départs en retraite, ce projet de loi était nécessaire, et il est le bienvenu.

Vous avez rappelé combien les Français tenaient à la fonction publique et combien ils rêvaient de voir leurs enfants devenir des fonctionnaires.

Le sondage que vous avez évoqué tout à l'heure montre aussi leur attachement à leurs collectivités territoriales, notamment à leur commune. Je ne veux pas vexer les présidents de conseil général ou de conseil régional qui sont présents dans cet hémicycle, mais force est de constater que, sur les 1,7 million d'agents que compte la fonction publique territoriale, 1,2 million travaillent dans les communes. L'attachement des Français aux personnels de la fonction publique territoriale ne semble donc pas éloigné de l'attachement qu'ils montrent à leur mairie.

Monsieur le ministre délégué, vous avez détaillé le contenu du projet de loi et votre propos sur ses aspects réglementaires a sans doute permis de dissiper quelques inquiétudes.

Je centrerai mon propos sur les décisions de la commission des lois.

Premièrement, la commission a déposé un amendement qui consacre le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale en tant qu'instance représentative de la fonction publique territoriale.

Cette disposition figurait dans le projet initial du Gouvernement mais, pour des raisons de clarification législative, comme vous l'avez vous-même expliqué, le Conseil d'État avait estimé qu'elle n'était pas utile. Après avoir entendu de nombreuses personnalités, la commission des lois a considéré que cette disposition était au contraire opportune. C'est pourquoi elle l'a reprise dans son amendement n° 5, visant à insérer un additionnel avant l'article 7.

Deuxièmement, la commission a proposé la création d'un collège des employeurs publics territoriaux au sein même du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale.

La commission a en effet considéré qu'il était utile que le Gouvernement dispose d'un interlocuteur unique, capable de présenter la position des élus des collectivités territoriales, notamment dans le cadre des négociations engagées avec les organisations syndicales, négociations qui ont des répercussions budgétaires importantes pour les collectivités territoriales.

Là encore, la commission a veillé à ne pas créer un niveau supplémentaire. Le collège des employeurs, qui existe déjà au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, est simplement consacré collège des employeurs publics territoriaux.

Ces deux dispositions, qui sont liées, revêtent une grande importance.

Troisièmement, la commission des lois n'a pas été convaincue par la volonté du Gouvernement de créer, à l'échelon national, un nouvel organe institutionnel de la fonction publique territoriale.

En effet, à une époque où l'on ne cesse de se plaindre du nombre déjà trop élevé des structures existantes, il n'était pas question pour nous d'en créer une nouvelle, et c'est d'ailleurs une préoccupation répandue chez les élus locaux.

La commission des lois a veillé à ce que les coûts de mise en oeuvre de cette future loi n'alourdissent pas les charges des collectivités locales. C'est la raison pour laquelle elle n'a pas souhaité la création d'un centre national de coordination des centres de gestion, d'autant moins que les missions qui devaient lui être affectées ne nous semblent pas suffisamment importantes.

C'est une décision forte qui a fait l'objet d'une quasi-unanimité.

La commission des lois, en décidant de supprimer la création du centre national de coordination des centres de gestion, s'est elle-même condamnée à réorganiser l'architecture initiale du projet de loi.

Ainsi, conformément d'ailleurs aux souhaits du Gouvernement, elle a restitué à l'échelon régional l'exercice des compétences attribuées au centre national de coordination en ce qui concerne la catégorie A, notamment l'organisation des examens professionnels de catégorie A, la publicité des créations et vacances des emplois de catégorie A, la prise en charge des fonctionnaires de catégorie A momentanément privés d'emploi et le reclassement des fonctionnaires de catégorie A devenus inaptes à l'exercice de leurs fonctions.

Toutefois, le dispositif de la commission présentait le défaut de ne pas tenir compte d'une revendication assez largement répandue chez une catégorie que l'on a l'habitude de d'appeler A +, catégorie qui n'existe pas officiellement, mais qui regroupe les administrateurs et les conservateurs des bibliothèques.

Il était donc nécessaire d'opter pour une gestion nationale de ces personnels. C'est la raison pour laquelle la commission des lois a accepté, ce matin, après en avoir demandé et obtenu la rectification, un amendement déposé par M. Portelli. Aux termes de cet amendement, la gestion des fonctionnaires de catégorie A + serait coordonnée à l'échelon national, et confiée à un centre de gestion qui serait désigné par décret.

M. Jacques Mahéas. Ce n'est pas une bonne formule !

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. Cette solution permet d'éviter la création d'un nouvel organisme et donc des dépenses supplémentaires. En effet, cette mission, naguère dévolue au Centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT, serait confiée à un centre de gestion et la convention financière prévoirait le transfert des financements correspondants du CNFPT vers le centre de gestion désigné.

Cette nouvelle architecture tend à concilier, d'une part, le souci explicitement formulé, et à juste titre, par la commission des lois de ne pas augmenter les dépenses des collectivités et de pas créer de nouvelles structures et, d'autre part, la nécessité d'unifier à l'échelon national certaines missions concernant spécifiquement les fonctionnaires de catégorie A +, dont la gestion à l'échelon local ne semble pas pertinente aux yeux de nombreux élus et de représentants des personnels.

La commission considère par ailleurs que la gestion de l'observatoire de l'emploi, des métiers et des compétences de la fonction publique territoriale doit demeurer de la compétence du CNFPT.

En effet, la connaissance de l'emploi public territorial est essentielle pour permettre au CNFPT d'anticiper les formations devant être proposées aux agents et aux collectivités.

De même, il est préférable que cet observatoire soit géré par un organisme paritaire. Le CNFPT conserverait en outre le répertoire national des emplois de direction. C'est l'objet de l'article 8.

La commission des lois propose également l'instauration d'une conférence nationale de l'emploi public territorial qui réunirait tous les centres de gestion. Cette conférence permettrait aux centres de gestion d'échanger au moins une fois par an sur leurs expériences, notamment dans l'exercice de leurs nouvelles compétences et dans le cadre de leur coordination régionale.

Les organisations syndicales et les délégations régionales ou interdépartementales du CNFPT devraient participer à la conférence régionale pour l'emploi public territorial, pour toute question relative à la formation des personnels territoriaux. C'est l'objet de l'article 17.

En ce qui concerne la formation, la commission des lois a prévu que les fonctionnaires territoriaux puissent, au même titre que les fonctionnaires de l'État, bénéficier d'une préparation aux concours et examens professionnels de l'ensemble de la fonction publique, et pas seulement à ceux de la fonction publique territoriale.

S'agissant de la gestion des ressources humaines, la commission des lois n'a pas estimé utile de conserver l'article qui prévoyait la création d'un emploi fonctionnel de directeur général des services techniques dans les départements et les régions. La commission a en effet constaté, après les différentes auditions auxquelles elle a procédé, qu'aucun des représentants de ces collectivités ne souhaitait la création de cet emploi. Je veux bien admettre qu'elle est souhaitée par certaines personnes, mais, pour ma part, je n'en ai pas rencontrées.

La commission des lois vous propose également d'introduire la possibilité de la présence, dans les commissions administratives paritaires, d'un agent habilité pour assister le président et, dans les commissions d'appels d'offres, la participation d'un agent habilité en raison de sa compétence.

Cette disposition, réclamée par de nombreux parlementaires, avait été adoptée dans le projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques. Toutefois, la navette étant un peu longue, la commission a estimé en conscience que cette mesure, utile, trouverait une concrétisation plus rapide si elle était insérée dans le présent projet de loi.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Où elle est d'ailleurs mieux placée !

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. M. Christian Gaudin, qui avait présenté une proposition de loi pour valider cette disposition, a donc tout lieu d'être satisfait.

Messieurs les ministres, mes chers collègues, la modernisation de la fonction publique territoriale présente une importance particulière pour nous, en notre double qualité d'élus nationaux et d'élus locaux. Elle constitue le gage d'une modernisation de l'État et de ses institutions.

Les travaux de la commission des lois ont permis une consultation efficace de tous les acteurs et partenaires de la fonction publique territoriale : les syndicats d'agents publics, les associations d'élus, le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, la Fédération des centres de gestion, le Conseil national de la fonction publique territoriale, des professeurs de droit, mais aussi de collègues qui m'ont fait parvenir des contributions écrites. Tout cela montre combien ce projet de loi intéresse les partenaires de la fonction publique territoriale.

Messieurs les ministres, je tiens à remercier les personnels de votre cabinet et ceux de la Direction générale des collectivités locales qui ont travaillé dans la transparence et de manière régulière avec la commission des lois du Sénat.

Enfin, je me réjouis que l'urgence n'ait pas été déclarée sur ce texte.

M. Charles Gautier. Ce n'est pas toutes les semaines !

M. Jacques Mahéas. Ce n'est pas comme pour le CPE !

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. Cela permettra à la navette d'enrichir et d'améliorer vos propositions. J'ai la conviction que le débat parlementaire ne fera que renforcer votre projet de loi,...

M. le président. Sans aucun doute !

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. ...dont la commission des lois considère au demeurant qu'il est un bon texte. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 75 minutes ;

Groupe socialiste, 49 minutes ;

Groupe Union centriste-UDF, 20 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 16 minutes ;

Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 12 minutes.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Hugues Portelli.

M. Hugues Portelli. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, depuis la loi fondatrice du 26 janvier 1984, la fonction publique territoriale n'a cessé d'être l'objet des soins attentifs du législateur.

Cette succession ininterrompue de textes d'importance variable s'expliquait à l'origine par des considérations d'ordre idéologique.

La loi initiale de 1984 reprenait la conception traditionnelle de la fonction publique, organisée selon les principes de la méritocratie, de la formation initiale et de la carrière. Mais, dès 1987, l'alternance politique aidant, la loi du 13 juillet remettait en question l'exclusivité du principe de la carrière en renforçant le rôle des collectivités territoriales au nom du principe de libre administration et en remettant en cause le monopole du statut.

La loi du 27 décembre 1994 a apaisé le conflit en réalisant une synthèse qui s'appuie sur le système de la carrière. Le débat s'est alors déplacé sur d'autres terrains.

La rivalité entre élus locaux et État, entre fonctionnaires territoriaux et fonctionnaires d'État, est aggravée par les intérêts divergents des différentes associations d'élus et de fonctionnaires : les grandes villes ne partagent pas les attentes des élus ruraux, les élus et fonctionnaires des grandes agglomérations intercommunales et interdépartementales sont souvent solidaires face aux élus et fonctionnaires des petites collectivités. Les uns prônent une organisation centralisée des carrières pour résister à la concurrence des grandes collectivités, les autres divergent sur l'échelon pertinent - région ou département ? - de gestion de ces carrières.

Aujourd'hui, de nouveaux problèmes cruciaux réclament des réponses rapides et modernes, dans le respect des principes généraux de la fonction publique.

Le premier de ces problèmes, en importance, est celui des effectifs. Tout le monde l'a rappelé, d'ici à 2012, 35 % des 1,7 million de fonctionnaires territoriaux, et la moitié des cadres supérieurs, atteindront l'âge de la retraite. Ces départs massifs ne doivent pas être simplement envisagés sous l'angle du remplacement systématique poste pour poste, mais doivent plutôt être considérés comme l'occasion d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, en intégrant les effets des transferts de compétences entre l'État et les collectivités, de la mise en oeuvre de l'expérimentation - ce serait souhaitable - et de l'apparition de nouveaux besoins.

Le haut niveau actuel de chômage, ne soyons pas naïfs, renforce d'ailleurs l'attrait de la fonction publique, et notamment de la fonction publique territoriale. Le rêve d'être fonctionnaire traduit souvent le désir d'un emploi d'abord stable et protégé. Tous les emplois publics n'ont d'ailleurs pas le même attrait : les établissements publics de coopération intercommunale attirent davantage que les communes, les emplois administratifs et juridiques davantage que les emplois techniques ou financiers.

De même, la féminisation de la fonction publique territoriale - qui dépasse aujourd'hui les 60 % et se traduit par le développement du travail à temps partiel -, l'ouverture aux citoyens de l'Union européenne, la nécessité de faire contribuer la fonction publique territoriale à la politique de l'emploi - notamment en direction des jeunes générations -, ainsi que la demande croissante de mobilité de la part de nouveaux fonctionnaires, tout cela change la nature de la profession ainsi que ses comportements. Le statut comme les employeurs doivent s'adapter en permanence à ces évolutions.

Par ailleurs, le droit à la formation des agents, qui est aussi un devoir, a changé. L'exigence de formation initiale préalable était liée à la vision classique de la fonction publique de carrière. Elle avait deux conséquences : la première était la prise en charge de cette formation par l'administration ; la seconde, c'était une réaction critique des élus employeurs, pour qui formation est synonyme d'indisponibilité et de risque de départ du fonctionnaire « débauché » par l'élu voisin. Le monopole de l'administration en la matière n'est plus justifié aujourd'hui, à l'heure de la professionnalisation des études supérieures, notamment dans les universités. La loi de 1994 a d'ailleurs amorcé le changement, en distinguant formation initiale et formation d'adaptation à l'emploi.

Enfin, la distinction entre formation et gestion des carrières a entraîné la création d'institutions nationales et locales rivales, entre lesquelles la frontière change en permanence. L'opposition classique entre centres de formation et centres de gestion s'est traduite ces dernières années par des changements législatifs continus, au profit tantôt des uns, tantôt des autres : il est temps d'y mettre fin. Il aurait d'ailleurs été plus judicieux de se préoccuper davantage de la qualité des services fournis par ces institutions, notamment en matière de formation, que de gérer les rivalités entre elles et entre leurs dirigeants.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Très bien !

M. Hugues Portelli. Le projet de loi soumis à l'examen du Sénat constitue donc une avancée indiscutable dans les différentes directions que je viens de rappeler. Il est le fruit d'un travail remarquable du Gouvernement et de ses ministres et intègre les réflexions et propositions de nombreux groupes de travail, dont celui qui avait été conduit, en 2003, sur l'initiative de M. le président du Sénat, par l'actuel président de la commission des lois et M. Alain Vasselle.

M. le président. Merci de le rappeler, mon cher collègue.

M. Hugues Portelli. À l'époque, je n'étais qu'un simple professeur d'université...

Ce texte est surtout le résultat d'une concertation approfondie. Il a permis de dégager un large consensus...

M. Jacques Mahéas. Ce n'est pas vrai !

M. Hugues Portelli. ... autour d'un document dont on peut saluer l'équilibre général. D'ailleurs, le vote favorable du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale ainsi que le soutien des grandes associations d'élus et de la moitié des syndicats - les autres reconnaissant de réelles avancées - témoignent de cette réussite.

Abordons rapidement le contenu de ce texte.

Le projet de loi prend en compte deux nécessités : en premier lieu, la décentralisation a confié de nouvelles responsabilités aux collectivités locales qu'il faut donc aider en assouplissant les conditions de gestion des ressources humaines ; en second lieu, il faut rendre la fonction publique territoriale plus attractive, y compris en période de plein emploi.

Le projet de loi comprend tout d'abord une série de dispositions concernant les fonctionnaires territoriaux : il intègre la reconnaissance et la validation des acquis de l'expérience professionnelle, il affirme le droit à la formation et l'articule entre la formation obligatoire, qui concerne l'intégration dans la fonction publique et l'affectation à un nouvel emploi, la formation facultative, qui correspond à la préparation aux concours et au perfectionnement, et le droit individuel à la formation professionnelle, en reprenant les dispositions que la loi du 4 mai 2004 avait prévues pour le secteur privé. Il permet également de réaliser un bilan professionnel et il renforce les droits des personnes handicapées.

Ensuite, le projet de loi simplifie et rationalise les institutions de la fonction publique territoriale. Il recentre le CNFPT sur sa mission essentielle de formation. Il conforte les missions des centres de gestion et permet même de les étendre. Il facilite enfin la coordination régionale et interrégionale des centres de gestion.

Par ailleurs, le projet de loi facilite la gestion des ressources humaines. Il a abaissé utilement les seuils de création des emplois fonctionnels pour les collectivités. Il permet - c'est une disposition très attendue - l'indemnisation par la collectivité d'accueil de la collectivité d'origine, lorsque l'agent obtient une mutation dans les trois ans qui suivent sa titularisation. Il facilite également l'exercice du droit syndical.

Enfin, le projet renforce les dispositions existantes en matière d'hygiène, de sécurité et de médecine préventive.

Même si ce projet de loi n'aborde pas tous les problèmes que pose l'avenir de la fonction publique territoriale, celle-ci bénéficiera désormais d'un cadre moderne. Il correspond à l'évolution des comportements et de la demande sociale, comme aux souhaits des gestionnaires locaux.

Une seule disposition de ce texte a fait l'objet de réserves de la part de la commission des lois. Il s'agit de la création d'un centre national de coordination des centres de gestion. Après réflexion, cet organisme semble disproportionné, eu égard aux missions qui lui sont confiées et au nombre d'agents concernés. Le groupe UMP estime donc plus judicieux de confier cette mission à un centre de gestion important qui pourrait l'intégrer à celles qu'il exerce par ailleurs.

Pour le reste, le débat permettra d'enrichir le projet de loi sur une série de questions qui ne remettent en cause ni son économie générale ni ses équilibres, et sans tomber dans des préoccupations d'ordre clientéliste ou corporatiste.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Très bien !

M. Hugues Portelli. C'est donc sans réserve que nous soutiendrons le Gouvernement et que nous retiendrons les propositions de la commission des lois, dont je salue l'excellent travail. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, si je ne redoutais ce lieu commun, je dirais que ce texte relatif à la fonction publique territoriale a pour principal mérite d'exister.

Il était effectivement très attendu, en raison du souhait exprimé par l'ensemble des partenaires d'une sorte de toilettage du statut de la fonction publique territoriale et compte tenu du contexte démographique. En effet, un très grand nombre de fonctionnaires, notamment des cadres, vont partir à la retraite dans les cinq ou dix ans à venir, et il est important de les remplacer.

Ce projet de loi répond également à la préoccupation de rendre la fonction publique territoriale plus attractive. Au-delà, il faudrait peut-être aussi renforcer son prestige, car elle est, à mes yeux, aussi noble et aussi digne que les autres fonctions publiques.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Absolument !

M. François Fortassin. Encore faudrait-il le dire !

Ce texte comporte, bien entendu, quelques points positifs.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Beaucoup !

M. François Fortassin. Je relève d'abord une amélioration pour les petites collectivités, qui peuvent être pillées de leurs meilleurs éléments : elles y verront la possibilité de ne plus connaître une situation de frustration totale.

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. François Fortassin. D'autres éléments nous paraissent également intéressants : l'avis favorable du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, ainsi que la prise en compte des acquis de l'expérience ;  il faudra toutefois être très vigilant, car, si ce dispositif n'était pas fermement encadré, il pourrait remettre en cause le statut.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Tout à fait !

M. François Fortassin. Enfin, quelques points plus discutables demeurent, et je rends hommage à la commission des lois de les avoir signalés,...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. On est là pour ça !

M. François Fortassin. ... en particulier, le principe de la création de l'emploi fonctionnel de directeur des services techniques dans les conseils généraux ou les conseils régionaux.

J'observe, premièrement, que cette disposition n'a été ni négociée ni demandée.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais si !

M. François Fortassin. Deuxièmement, la création de ces emplois fonctionnels pourrait porter atteinte à l'unicité du management dans ces collectivités. Une vigilance extrême s'impose également sur ce point.

Enfin, la création d'un centre national de coordination des centres de gestion est elle aussi contestée. Excusez l'expression, messieurs les ministres, mais j'ai eu le sentiment de découvrir une énorme usine à gaz, dont on ignore quel serait le coût et qui, au fond, ne réglerait pas les problèmes. Certes, la coordination est nécessaire, mais ce n'est pas un tel organisme qui nous permettra de régler le problème.

Par ailleurs, nous déposerons quelques amendements, en particulier sur l'article 14, pour permettre aux assistants parlementaires d'intégrer la fonction publique territoriale grâce au concours externe.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mon cher collègue, je pense que vous avez voulu parler du « concours interne ».

S'agissant du concours externe, il n'y a pas besoin de texte nouveau, la possibilité existe, et le Sénat a d'ailleurs fait un effort, en liaison avec le CNFPT, pour aider les assistants parlementaires à préparer ce concours.

M. Jacques Mahéas. C'est un lapsus ! Tout le monde avait compris !

M. François Fortassin. Il s'agit du concours interne, bien évidemment. Veuillez excuser ce lapsus, mes chers collègues.

Offrir une telle opportunité est à la fois pertinent et légitime, au regard du travail accompli avec les collectivités territoriales par ces collaborateurs.

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. Gérard Le Cam. Bonne mesure !

M. François Fortassin. Si notre assemblée veut réellement représenter les collectivités territoriales, il est normal que nos collaborateurs bénéficient, pour ainsi dire, sinon d'un traitement de faveur, du moins d'une véritable égalité des chances. Nous déposerons donc un amendement en ce sens et ceux qui voudront s'y associer le feront !

M. Gérard Delfau. Ce sera la majorité du Sénat !

M. François Fortassin. J'aborderai également une question, qui ne fera pas l'objet d'un amendement, mais que je souhaiterais voir prise en compte par le Gouvernement.

Je considère en effet qu'il faut inciter les cadres qui exercent des responsabilités importantes dans les collectivités territoriales à ne pas rester au même poste pendant vingt-cinq ou trente ans.

Il faut donc inciter à une certaine mobilité professionnelle.

L'absence de mobilité est, certes, confortable pour une collectivité locale désireuse de garder un cadre de grande qualité ou pour un fonctionnaire satisfait de son poste. Mais une telle situation peut, à terme, se révéler pénalisante et il n'est pas souhaitable de l'encourager.

J'ai également évoqué le besoin de reconnaissance et de dignité de la fonction publique territoriale. Il s'agit, au-delà de l'adoption de ce projet de loi, d'une véritable nécessité.

Permettez-moi enfin une observation, messieurs les ministres. Ces temps-ci, il est très rare de voir le Gouvernement se montrer généreux. Mais, dans ce projet de loi, il dépense parfois avec une réelle générosité ... les deniers des collectivités locales ! (Rires et applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jacques Mahéas. C'est vrai !

(M. Philippe Richert remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.)