difficultés de mise en oeuvre du passeport électronique

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, auteur de la question n° 1060, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

M. Thierry Foucaud. Ma question porte sur les passeports électroniques.

Je ne reviendrai pas sur les erreurs passées, le Conseil d'État ayant rappelé le droit, c'est-à-dire la compétence de l'Imprimerie nationale.

La mise en oeuvre du passeport électronique, qui a été institué depuis le 12 avril dernier dans le département de la Seine-Maritime, pose de nombreuses difficultés, tant pour les usagers que pour les communes, voire également pour les services préfectoraux.

S'agissant des communes, permettez-moi de faire, monsieur le ministre, une remarque préalable. Le temps passé à résoudre ces difficultés représente un coût important, sans aucune compensation de l'État. Ces difficultés sont de plusieurs ordres.

En premier lieu, il est désormais obligatoire de fournir notamment la copie intégrale de l'acte de naissance ou l'original de la preuve de nationalité française. Or l'obtention de ces documents est parfois impossible pour les personnes nées à l'étranger. Que peuvent-elles alors faire dans une telle situation ?

En second lieu, les exigences techniques concernant les photographies d'identité sont lourdes, et les instructions à leur sujet sont contradictoires. Il est donc difficile de s'y retrouver.

Les agents des communes font au mieux le travail d'explication auprès des usagers, qui sont mécontents, ainsi qu'auprès des photographes, mais les collectivités ne sont pas particulièrement aidées. Ainsi, le ministère de l'intérieur a envoyé une affiche pour expliquer, à l'appui d'exemples, comment devaient être ces photographies.

Tous les exemples présentés sont sur fond blanc, alors qu'une directive en date du 24 mars 2006 proscrit précisément le fond blanc. Il faut un « fond clair, neutre, uni et en couleur ». Vous exigez par ailleurs, monsieur le ministre, un cadrage très précis, entre trente-deux et trente-six millimètres entre le menton et le sommet du crâne, lequel, nous a-t-on précisé, ne doit pas être confondu avec la base de la racine des cheveux ! On pourrait en rire, mais les retards en matière de délivrance des passeports sont légion.

Par ailleurs, la position de l'axe des yeux fait également l'objet de mensurations strictes. Bien évidemment, les photomatons ne répondent pas à ces exigences techniques. Quant aux photographes qui délivrent des photographies d'identité, ils n'ont pas reçu de directives pour respecter ces cadrages pointilleux. Certains ont été informés par les mairies et se débrouillent tant bien que mal avec ces millimètres, non sans éprouver quelque colère...

Les usagers sont souvent contraints de refaire des photographies. Une personne de ma commune a dû fournir six planches ! Cela représente bien sûr un coût supplémentaire et retarde aussi le délai pour l'obtention du passeport.

Monsieur le ministre, les conséquences peuvent être importantes pour les usagers, puisque certains d'entre eux ont même dû annuler un voyage qui avait été prévu longtemps à l'avance, alors que leurs demandes avaient été déposées dans des délais conformes.

Aujourd'hui, ils sont nombreux à être dans l'attente et à courir le risque de ne pas obtenir leur passeport à temps pour partir. La solution consistant à leur délivrer transitoirement un passeport Delphine sans coût supplémentaire serait bienvenue.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, vous exprimez vos préoccupations, qui sont d'ailleurs partagées, sur la mise en oeuvre de la réglementation applicable au passeport électronique.

Vous avez tout d'abord évoqué l'impossibilité pour certaines personnes, nées à l'étranger, de produire l'original de l'acte de l'état civil requis pour la délivrance de ce nouveau modèle de passeport ou l'original du titre leur permettant de revendiquer légitimement la nationalité française.

Dans le cadre de ce type de démarche administrative, cette difficulté n'est pas nouvelle, ce qui me conduit à insister sur l'impératif de sécurisation de la procédure de délivrance du passeport électronique.

Il est indispensable d'endiguer le phénomène de la fraude documentaire. Pour ce faire, il est absolument nécessaire de procéder à une analyse de l'original des pièces justificatives et surtout de celles qui permettront de faire un examen approfondi de la possession de la nationalité française par l'usager.

Vous en conviendrez avec moi, j'en suis certain, monsieur le sénateur, l'autorité administrative ne peut se dispenser d'une telle vérification, sauf à vouloir négliger sciemment la sécurité juridique due à nos concitoyens quant aux titres régaliens qui leur sont délivrés.

Toutefois, pour ce qui concerne les personnes nées à l'étranger et qui ne peuvent apporter la preuve directe de leur nationalité française, il a été décidé d'assouplir la règle prévoyant l'exigence systématique d'un certificat de nationalité française, en appliquant le concept de la possession d'état de Français.

S'agissant de la qualité des photographies d'identité, dont vous avez donné les détails avec précision et humour, monsieur le sénateur, je souhaite rappeler que leurs caractéristiques spécifiques, qui sont à l'évidence contraignantes pour l'usager, ont pour origine l'application du règlement européen du 13 décembre 2004 et de la norme ISO qui s'y rattache. Elles ont pour finalité de mettre en oeuvre la technique de la reconnaissance faciale via le recours au composant électronique du passeport.

Afin d'expliciter ces exigences photographiques au public ainsi qu'aux photographes, quel que soit leur statut, les services du ministère de l'intérieur ont choisi la voie d'une concertation régulière avec un consortium représentatif du secteur industriel de la photographie automatique et des artisans photographes.

À ce jour, leurs travaux ont cherché avant tout à privilégier un positionnement adéquat du sujet sur la photo, ce qui a donné lieu à la conception de la planche photographique que vous avez évoquée.

Les premiers enseignements tirés de ce dispositif permettent d'ores et déjà de faire évoluer et d'adapter les outils de communication retenus. De nouvelles réunions sont prévues pour préciser les règles applicables, notamment la couleur de fond autorisée pour les photographies. Les préfectures et les usagers recevront toutes précisions à cet égard.

Enfin, vous souhaitez que soit envisagée la possibilité de délivrer aux usagers, à titre gratuit, un passeport « ancien modèle » dans l'éventualité où leur demande de passeport électronique n'aurait pas pu aboutir à temps pour leur permettre d'effectuer un déplacement à l'étranger. Vous avez d'ailleurs fait allusion à un certain nombre de personnes qui auraient connu cette situation.

Or ce cas n'est aujourd'hui aucunement prévu par les dispositions du code général des impôts définissant la fiscalité applicable au passeport électronique.

En outre, dès lors qu'un site de délivrance se voit équipé de la nouvelle application informatique assurant la gestion du passeport électronique, la possibilité de délivrer des passeports « ancien modèle » n'est plus réservée qu'aux cas d'urgence, soit principalement pour des impératifs humanitaires ou médicaux. Je précise d'ailleurs que ce passeport n'a alors qu'une durée de validité d'un an.

Il ne saurait être envisagé, par une extension de cette possibilité, de contourner l'imprévoyance de certains usagers ou de diminuer la qualité de l'instruction des demandes, dès lors que les préfectures et sous-préfectures ont accompli la démarche de prévenir les usagers de la longueur des délais d'instruction.

Telles sont les précisions que je souhaitais vous apporter, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Monsieur le ministre, j'ai noté que vous partagiez les préoccupations que je viens d'évoquer, et je comprends votre exigence de sécurisation pour ce qui concerne les actes de l'état civil. Le fait de vouloir assouplir la règle dans certains cas constitue un élément positif.

Toutefois, vous avez parlé de nouvelles réunions concernant la mise en place de ces nouveaux passeports. Quand sont-elles prévues ? Car il faut aller vite !

Par ailleurs, je précise, monsieur le ministre, que les cas que j'ai évoqués concernaient des usagers qui ont demandé à temps leur passeport, mais n'ont pu partir pour l'étranger faute de l'avoir obtenu, les communes et les services préfectoraux ayant fait correctement leur travail.

Je le répète, les charges sont lourdes pour les collectivités. En témoigne la décision du Conseil d'État relative aux conditions de délivrance et de renouvellement des passeports. La commune de Versailles a estimé le coût de la prise en charge de l'instruction des demandes de cartes d'identité à 20 800 euros par an.

Je souhaite que les dispositions nécessaires soient prises afin que les Françaises et les Français souhaitant partir pour l'étranger puissent avoir leur passeport en temps.

exécution du budget alloué à l'enseignement technique agricole

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, auteur de la question n° 1058, transmise à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Mme Françoise Férat. Monsieur le ministre, vous ne serez sans doute pas surpris que ma question porte sur l'exécution du budget alloué à l'enseignement technique agricole et sur l'impact réel des 30 millions d'euros de crédits transférés, sur l'initiative des parlementaires, vers le programme « Enseignement technique agricole » dans la loi de finances pour 2006.

L'incertitude règne sur l'affectation des 15 millions d'euros supplémentaires destinés à abonder les crédits de bourses et les dotations des autres « familles » de l'enseignement agricole, ainsi que sur les sommes complémentaires votées par les députés en faveur des maisons familiales rurales.

L'édition du journal La Croix du 4 mai dernier ayant, par ailleurs, annoncé un gel de 4,5 % des crédits de fonctionnement de cette filière, je ne vous cache pas que les responsables des filières privées et publiques m'ont fait part de leurs plus vives inquiétudes. Ils regrettent, à l'instar d'un grand nombre de mes collègues sénateurs, que le vote par le Parlement de crédits soit si peu respecté.

Cette situation ne permettant pas à votre ministère de remédier aux difficultés que j'ai identifiées dans mon rapport budgétaire, je vous serais donc particulièrement reconnaissante de bien vouloir me préciser les conditions d'exécution, à ce jour, du budget de l'enseignement technique agricole.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche. Madame le sénateur, au cours de la discussion de la loi de finances, les crédits de l'enseignement technique agricole ont fait l'objet de discussions importantes, dont vous avez été l'une des actrices. À juste titre, vous m'interrogez sur les suites données aux amendements qui ont été votés.

Tout d'abord, je vous remercie de l'intérêt que vous portez, comme tous les élus, à juste raison, à l'enseignement agricole. C'est un enseignement de qualité, synonyme de réussite scolaire - un taux d'échec bas -, qui permet une réelle insertion professionnelle. Les jeunes qui sortent de l'enseignement agricole, à quelque niveau que ce soit, ont appris des choses très concrètes, sur le terrain, en stage, et ont moins de difficultés à trouver un premier emploi que les autres jeunes issus de l'enseignement classique.

En outre, cet enseignement est en prise avec les territoires ruraux et acteur de leur développement. J'en fais actuellement le constat avec Christian Estrosi dans les projets de pôles d'excellence rurale, qui concernent souvent des établissements d'enseignement agricole.

S'agissant des amendements auxquels vous avez fait allusion, j'ai veillé à ce que les priorités que vous aviez définies soient mises en oeuvre. Ainsi, 15,5 millions d'euros ont été affectés aux maisons familiales rurales, un réseau qui est très présent sur le terrain, comme nous l'avons constaté récemment à l'occasion de leur congrès national.

Les 15 autres millions d'euros sont utilisés, conformément à ce qu'avait souhaité le Parlement, à savoir les bourses, dont l'attribution aux familles se fait sur des critères sociaux, les engagements envers l'enseignement privé à temps plein et, enfin, l'accompagnement éducatif dans l'enseignement public et la formation continue des enseignants.

Vous faites état de ce fameux gel de 4,5 % des crédits de fonctionnement. Ayant été ministre chargé du budget, c'est une mesure que je connais bien. Appliquée dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances, elle concerne pratiquement l'ensemble des postes du budget de l'État. Cette mise en réserve traditionnelle, effectuée par le ministre chargé du budget, permet de constituer une provision face à d'éventuels aléas de gestion.

La méthode qui consiste à effectuer les gels de crédits en début d'année est une méthode claire. Auparavant - j'ai moi-même eu l'occasion de recourir à cette méthode - on diminuait sans préavis, en cours d'année, les dotations budgétaires, ce qui entraînait des perturbations très sérieuses pour les services de l'État et ses partenaires.

Cela étant, vous avez raison de souligner que cette mise en réserve, d'un montant de 19 millions d'euros pour le programme « Enseignement technique agricole », diminue notre capacité budgétaire. Aussi, il est très important, dans le cadre de la priorité donnée par le Gouvernement à l'enseignement, que cette mesure de régulation soit levée afin de nous aider à préparer la prochaine rentrée scolaire. C'est ce que j'ai demandé très officiellement au Premier ministre et au ministre délégué au budget.

Madame le sénateur, soyez assurée que l'enseignement agricole bénéficiera de l'ensemble des moyens votés par le Parlement - y compris les moyens supplémentaires -, et soyez aussi assurée de ma volonté et de celle de tous ceux qui me succèderont de conforter ces moyens dans les prochaines années.

Je vous remercie de votre soutien et de celui de vos collègues, qui nous a été très utile au moment de la discussion de la loi de finances. Cet enseignement de réussite mérite le soutien que vous lui apportez.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Monsieur le ministre, vos propos sont de nature à nous rassurer. Vous avez rappelé l'excellence de l'enseignement agricole, qui va bien au-delà de l'enseignement en tant que tel. J'insiste sur la question du gel de crédits. Vous levez certes une partie de mes inquiétudes. Mais, s'agissant des bourses destinées aux familles les plus modestes, attendre pour leur versement ne fait qu'accentuer certaines difficultés.

La commission des affaires culturelles m'a confié un travail qui donnera lieu à un rapport parlementaire que nous évoquerons sans doute l'automne prochain. Au cours de mes auditions et de mes déplacements sur le terrain, tous les acteurs de l'enseignement agricole m'ont témoigné la grande confiance qu'ils ont en vous, monsieur le ministre. Nous ne pouvons pas les décevoir et tenir les engagements me paraît être de bon aloi.

défense de la vocation européenne de strasbourg

M. le président. La parole est à M. Roland Ries, auteur de la question n° 1071, adressée à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.

M. Roland Ries. Madame la ministre, vous le savez, Strasbourg partage avec Genève et New York le privilège d'être l'hôte d'institutions internationales sans être capitale d'État. Ville symbole de la réconciliation franco-allemande, Strasbourg incarne, grâce à la présence du Parlement européen, de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, du médiateur européen ou encore de la Cour européenne des droits de l'homme, une vision décentralisée et démocratique de la construction européenne.

Le président François Mitterrand avait obtenu l'inscription dans les traités du rôle de Strasbourg comme capitale parlementaire. Pourtant, malgré les textes internationaux, la vocation européenne de Strasbourg doit constamment être défendue face aux attaques en règle dont elle est régulièrement l'objet.

Mais cette défense, pour indispensable qu'elle soit, ne saurait constituer à elle seule une politique en la matière. J'ai personnellement rédigé, en 2001, un rapport à ce sujet, que j'ai remis au Premier ministre de l'époque. J'y proposais un certain nombre d'actions à mener pour conforter Strasbourg. Malheureusement, bien peu a été fait depuis lors dans ce domaine, et cet attentisme gouvernemental est d'autant plus regrettable lorsque nous subissons, comme actuellement, une grave bourrasque, dont personne ne peut encore prévoir tous les dégâts collatéraux.

Les adversaires de Strasbourg au Parlement ont évidemment sauté sur l'occasion qui leur était offerte dans le cadre de négociations immobilières entre la ville de Strasbourg et le Parlement européen pour revenir puissamment à la charge. Leur objectif est bien d'instrumentaliser une négociation délicate, dans laquelle la municipalité a sans doute été maladroite, pour accélérer la dérive du Parlement européen vers Bruxelles.

Je considère qu'il appartient à présent au Gouvernement français, au-delà des déclarations de principe, de s'impliquer à la hauteur des enjeux politiques, symboliques et économiques représentés par ce dossier et d'en faire une priorité. Seule une mobilisation véritablement nationale pourra, à mon avis, contrer l'assaut orchestré par les partisans de Bruxelles, dont Strasbourg est aujourd'hui victime dans son rôle de capitale parlementaire de l'Union européenne.

Madame la ministre, la seule reconduction du contrat triennal, même abondé artificiellement par l'État, ne peut à elle seule tenir lieu de politique en faveur de Strasbourg, surtout lorsque cet outil devient de plus en plus un contrat « fourre-tout », une sorte d'appendice au contrat de plan, qui a perdu de vue l'objectif initial, qui était de permettre à une ville de taille moyenne au niveau européen de faire face à ses enjeux internationaux.

Bien sûr, Strasbourg a besoin d'un soutien matériel et financier. C'est une bonne chose de maintenir cet effort. Mais Strasbourg a aussi besoin d'une initiative politique forte. Dans cette perspective, pourquoi, par exemple, ne pas réunir l'ensemble des responsables des partis républicains de notre pays pour bien marquer l'unanimité - j'espère qu'elle existe - de nos formations politiques sur cette question, qui est certes d'intérêt local, mais aussi, et surtout, d'intérêt national ?

Merci de m'indiquer, madame la ministre, ce que le Gouvernement entend entreprendre pour défendre la vocation européenne de Strasbourg.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie. Monsieur le sénateur, Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, vous prie de l'excuser de ne pouvoir vous répondre elle-même, étant actuellement en déplacement.

Elle tient, par mon intermédiaire, à vous assurer que la présence du siège du Parlement européen à Strasbourg constitue bien un enjeu majeur pour la France. Les tenues des sessions plénières à Strasbourg et des commissions parlementaires à Bruxelles ainsi que l'implantation des services administratifs à Luxembourg ont été confirmées par le conseil européen d'Édimbourg de 1992, avant d'être consacrées dans un protocole annexé au traité d'Amsterdam.

La France n'entend pas voir cette situation remise en cause.

Au-delà de cette position de principe, les autorités françaises ne restent pas inactives : le soutien à la vocation européenne de Strasbourg est multiforme et se manifeste tant par des efforts financiers importants que par des actions politiques et symboliques. Ainsi, c'est pour continuer à améliorer la qualité de la desserte du Parlement européen que le comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires du 6 mars dernier a agréé les orientations du prochain contrat triennal 2006-2008. L'État participera à hauteur de 100 millions d'euros sur la période à des actions visant principalement à améliorer l'accessibilité de l'agglomération et à consolider le rayonnement européen de la ville.

Ce soutien avait été de quelque 40 millions et 48 millions d'euros lors des précédents contrats, ce qui souligne une progression significative de l'appui financier de l'État.

Dans le cadre de ce contrat, la priorité a été mise - et continuera de l'être - sur la qualité de la desserte de la ville. Des engagements importants ont été pris afin de valoriser la liaison ferroviaire à destination de Strasbourg - dont l'amélioration fait l'objet aujourd'hui de nombreux projets - au départ de Paris - grâce au TGV-Est, qui sera mis en service en 2007 -, de Luxembourg et de Bruxelles - pour lesquels le lancement des travaux en France aura lieu avant 2010 -, et de Francfort - dont l'aéroport est utilisé par de nombreux députés européens -, ou encore par la mise en service du nouveau pont TGV de Kehl, qui est prévue en 2010.

La volonté politique de la France de consolider la vocation européenne de Strasbourg est clairement établie, et c'est dans cet esprit que le Gouvernement s'apprête à signer d'ici à l'été le huitième contrat triennal.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, nos efforts pour préserver le siège strasbourgeois sont permanents, et il n'est pas question de faiblir dans notre détermination.

M. le président. La parole est à M. Roland Ries.

M. Roland Ries. Je vous remercie, madame la ministre de vos explications. J'ai bien noté l'effort de l'État dans le cadre du contrat triennal.

Je souhaiterais revenir sur un point qui me paraît tout à fait essentiel.

Comme vous l'avez dit à juste titre, on ne peut guère croire à un transfert pur et simple, dans un avenir prévisible, du Parlement européen de Strasbourg à Bruxelles, car les traités sont clairs sur ce point et leur modification suppose l'unanimité ; je n'ai aucune raison de douter que le Gouvernement français s'opposerait à une telle modification.

En revanche, ce que l'on peut craindre, c'est un glissement progressif, insidieux, vers Bruxelles.

De cinq jours à l'origine, la durée des sessions à Strasbourg a été réduite à quatre jours voilà quelques années : les sessions commencent le mardi matin et se terminent théoriquement le jeudi soir. En réalité, très souvent, les députés quittent Strasbourg dès le mercredi soir.

Ne se dirige-t-on pas, en définitive, vers une session mensuelle symbolique d'une seule journée ? Trois charters arriveront de Bruxelles le matin avec les parlementaires et quelques fonctionnaires, et, après trois discours et deux votes, les mêmes avions ramèneront dès le soir tout ce beau monde dans la capitale belge. Formellement, Strasbourg restera le siège du Parlement européen, mais politiquement, le contenu des sessions sera réduit à la portion la plus modeste. Il y a là un vrai danger.

C'est la raison pour laquelle je suggère que soit prise une initiative diplomatique forte, à travers laquelle serait clairement réaffirmée la nécessité de maintenir le Parlement européen à Strasbourg et de lui conférer un rôle politique essentiel, de manière que Strasbourg soit vraiment la capitale parlementaire de l'Europe.

recours abusifs contre des décisions concernant l'urbanisme

M. le président. La parole est à Mme Josette Durrieu, auteur de la question n° 1002, adressée à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

Mme Josette Durrieu. Ma question s'adressait à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer. Ne le voyant pas ici, je suppose que Mme la ministre déléguée à la coopération va me répondre.

Ma question porte sur les recours abusifs contre des décisions concernant l'urbanisme. Le groupe de travail qui avait été mis en place sous la présidence de M. Philippe Pelletier a rendu son rapport en janvier 2005. Ce rapport, intitulé « Propositions pour une meilleure sécurité juridique des autorisations d'urbanisme », constate l'existence d'un certain nombre de recours présentant un caractère manifestement abusif. Le groupe de travail s'est longuement interrogé sur les moyens qui pourraient être mis en oeuvre pour sanctionner les auteurs des recours susceptibles de recevoir une telle qualification.

Madame la ministre, j'aimerais donc, dans un premier temps, connaître les moyens qui ont réellement été mis en oeuvre à cet effet.

J'aimerais également savoir si a été établi un recensement des cas dans lesquels l'application du droit en vigueur a permis aux tribunaux d'ordonner la réparation des préjudices causés par ces recours abusifs. Si ce recensement a été effectué et s'il a révélé le caractère insuffisamment dissuasif et réparateur du dispositif actuel, j'aimerais que vous me disiez, madame la ministre, quelles initiatives pourraient être prises sur ce problème essentiel.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie. Madame la sénatrice, Dominique Perben, qui est actuellement à l'Assemblée nationale, vous prie de l'excuser de ne pas pouvoir vous répondre lui-même.

Vous attirez son attention sur l'augmentation du nombre des recours concernant les décisions prises en matière d'urbanisme, qui a suscité à plusieurs reprises de vives inquiétudes des professionnels et des élus.

Des réflexions ont donc été engagées sur les mesures susceptibles de prévenir les contentieux en matière d'urbanisme. En particulier, le groupe de travail présidé par M. Philippe Pelletier a formulé, dans son rapport de janvier 2005, trente-quatre propositions tendant à améliorer le traitement des recours juridictionnels.

Comme vous le savez, ces propositions s'organisaient en trois groupes : d'abord, des suggestions visant à améliorer les pratiques des services, par exemple des prescriptions sur la qualité des documents d'urbanisme ou sur la formation juridique des instructeurs ; ensuite, des propositions ayant trait à l'organisation de la justice administrative, et qui dépassent le simple cadre de l'urbanisme, propositions qui sont actuellement étudiées par M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer en coordination avec la Chancellerie ; enfin, des mesures législatives touchant au seul droit de l'urbanisme.

Ainsi, des améliorations peuvent être apportées aux dispositifs existants afin d'assurer une plus grande sécurité juridique et de limiter les recours présentant un caractère abusif, sans pour autant remettre en cause le droit fondamental pour nos concitoyens que constitue l'accès à la justice.

Par exemple, la prolongation de la validité des autorisations d'urbanisme pendant la durée de l'instance privera d'effet les recours dilatoires jusqu'à la péremption des autorisations, empêchant ainsi l'exécution d'actes pourtant légaux. Un décret sera prochainement pris en ce sens.

La dizaine de propositions législatives relatives au code de l'urbanisme a été reprise dans le cadre soit du projet de loi portant engagement national pour le logement, actuellement en débat, soit de l'ordonnance de réforme du permis de construire, que le Sénat a ratifiée.

Comme vous le voyez, le Gouvernement met en oeuvre les propositions du rapport Pelletier dans la perspective de la réduction du risque juridique.

En revanche, il n'est pas possible de procéder à un recensement des cas où des recours abusifs ont été sanctionnés, s'agissant de litiges opposant des particuliers entre eux ou des particuliers à des collectivités locales, d'autant que le juge a une conception stricte de l'abus de droit.

Par ailleurs, alors que la discussion sur la légalité des autorisations est examinée devant le juge administratif, celle qui concerne l'indemnisation des recours abusifs a lieu devant le juge judiciaire. Cette double compétence rend difficile une action indemnitaire de la partie s'estimant lésée. Ce problème dépassant le seul cas de l'urbanisme, il nécessite une réflexion d'ensemble.

Dans l'immédiat, le plus efficace semble être de mener à bien la réforme en cours des autorisations d'urbanisme, qui renforcera leur sécurité juridique. En effet, la clarification et la simplification du droit sont le meilleur moyen de réduire les occasions de contentieux.

Tels sont, madame la sénatrice, les éléments de réponse que M. le ministre des transports m'a demandé de vous communiquer.

M. le président. La parole est à Mme Josette Durrieu.

Mme Josette Durrieu. Je vous remercie, madame la ministre, des réponses que vous venez de m'apporter.

Le rapport du groupe de travail ayant été rendu en janvier 2005, je comprends parfaitement que les propositions formulées fassent encore l'objet de réflexions et d'études.

Cela étant, comme vous venez de l'indiquer, les dommages causés sur le terrain par les recours abusifs supposent que l'on trouve assez rapidement les réponses législatives à ce problème. Il n'est pas question de renoncer au respect du droit ; il s'agit simplement de limiter les recours abusifs, j'insiste sur cette épithète, et de trouver le juste équilibre en la matière.

Vous avez évoqué, au-delà des procédures administratives, la possibilité pour la partie lésée d'obtenir une indemnisation devant le tribunal de grande instance à la suite d'un recours abusif. Cela prouve bien que les amendes ne sont guère dissuasives et que, à un moment donné, il est nécessaire d'estimer le dommage qui est subi du fait de l'exercice abusif d'un droit.

Par conséquent, madame la ministre, nous avons besoin le plus rapidement possible d'une plus grande lisibilité et de réponses législatives adéquates.