Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre. La dette de l’État envers la sécurité sociale est un sujet capital ; je vous remercie donc de poser cette question, madame le sénateur.

Nous essayons de traiter le problème avec le plus de sérieux possible. L’année dernière, nous avons remboursé à la sécurité sociale la dette qu’avait l’État envers elle au 31 décembre 2006 sur le régime général.

Nous avons, à ce titre, transféré 5,1 milliards d’euros qui provenaient d’un reliquat de recettes tirées de privatisations. Plutôt que de les utiliser, nous avons préféré rembourser la sécurité sociale à due concurrence.

Nous n’avons toutefois pas encore remboursé les dettes antérieures n’appartenant pas au régime général. Sont notamment concernées la dette du régime de la SNCF, celle du régime social des indépendants, le RSI, ainsi que celles d’un certain nombre de régimes ayant appartenu à une époque au RSI.

Il restait à rembourser 1,3 milliard d’euros sur ces régimes, une fois éteinte la dette existant envers le régime général au 31 décembre 2006.

À la fin de l’année 2007, nous avons commencé à reconstituer cette dette à hauteur de 1,7 milliard d’euros pour le régime général. Il restait toujours par ailleurs la somme de 1,3 milliard, qui n’avait quant à elle pas augmenté. Au total, fin 2007, la dette de l’État envers la sécurité sociale s’élevait donc à environ 3 milliards d’euros.

Je ne sais pas ce qu’il en sera pour l’année 2008 : celle-ci n’étant pas terminée, il est trop tôt pour avancer un chiffre. La dette aura sans doute augmenté, même si je doute que les chiffres soient aussi importants que ceux que j’ai entendus ici ou là.

Nous ferons donc le bilan à la fin de l’année. Mais j’ai d’ores et déjà pris l’engagement – je le redis à M. Alain Vasselle – de consacrer 1 milliard à la réduction de cette dette, et particulièrement à la dette ancienne, par souci de cohérence et pour parvenir enfin à l’éteindre. Évidemment, il en restera une partie, mais elle sera beaucoup moins importante qu’à notre arrivée aux responsabilités.

Ce que je voudrais par ailleurs essayer de faire, c’est enrayer le phénomène. En effet, s’il est bien de rembourser ses dettes, il est encore mieux de ne pas s’endetter !

Malheureusement, ce n’est pas si facile, et ce pour deux raisons. La première tient à ce que l’on fait souvent appel à des dispositifs sociaux qui sont remboursés en cours d’année dans une logique de guichet. La seconde – inutile de le cacher, la pratique existe depuis longtemps – tient à la sous-budgétisation.

D’ailleurs, en dehors de la sous-budgétisation, les ministères, sur certains dispositifs qui les intéressent plus particulièrement, ont tendance à « surconsommer » : non seulement ils épuisent la totalité des crédits affectés à cette fin, mais ils ont également recours à des mécanismes conduisant à accroître la dette de l’État envers la sécurité sociale. C’est un phénomène classique auquel il faut mettre fin. Sur instruction du Premier ministre, nos services ont bloqué ce type de procédure.

Par ailleurs, nous avons intégré dans le budget pour 2009 des volumes de crédits destinés à être transférés du budget de l’État vers la sécurité sociale et qui sont à la hauteur des prévisions de dépenses des différents régimes. Cela n’avait jamais été le cas auparavant !

Grâce à ces mesures, nous devrions pouvoir limiter, voire annuler, la sous-budgétisation. Tels sont, madame le sénateur, les éléments que je pouvais vous fournir en l’état actuel de mes connaissances.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Mme Marie-France Beaufils. Madame la présidente, madame, monsieur le ministre, mes chers collègues, plus que jamais, avec la crise économique que nous vivons, les collectivités territoriales ont un rôle essentiel à jouer pour répondre aux besoins de la population.

L’action des élus locaux et des collectivités permet en effet de répondre aux attentes de nos concitoyens dans des domaines aussi divers que l’éducation populaire, le développement culturel, les besoins en logement, l’action sociale ou encore l’accueil de la petite enfance.

Leur intervention sera encore plus attendue par les personnes victimes de l’augmentation du chômage. Comme vous le savez, les collectivités territoriales sont un maillon essentiel pour aider ceux qui en ont besoin à passer les caps difficiles, évitant ainsi que ne se déchire le tissu social.

Depuis plus de vingt ans, les collectivités territoriales font face à ces missions et ces besoins avec des ressources financières toujours plus incertaines.

Année après année, les dotations budgétaires alimentées par prélèvements sur recettes sont rognées, réduites, ajustées, encadrées, placées sous enveloppe. Et, dans tous les cas de figure, c’est l’effort de l’État en direction des collectivités qui est réduit proportionnellement – j’y insiste – aux nouvelles responsabilités qui, soit sont transférées aux collectivités, soit leur échoient suite à l’abandon de certaines tâches effectuées auparavant par les services de l’État.

L’intégration du Fonds de compensation pour la TVA, mais aussi des amendes de police dans les dotations, sans oublier la réduction de compensation pour un certain nombre d’impôts font que l’évolution prévue de 1,1 milliard d’euros dans les deux années qui viennent est loin de couvrir les conséquences de l’inflation.

Quant à la fiscalité directe locale, elle présente aujourd’hui un évident caractère d’illisibilité. Elle est en effet soumise à d’importants dispositifs correctifs qui nuisent à la plus élémentaire justice fiscale comme à l’efficacité même des prélèvements.

Plutôt que de réformer véritablement la fiscalité locale, on a toujours préféré, ces dernières années, procéder à des exonérations et à des dégrèvements fiscaux plus ou moins importants et compensés de manière toujours plus imparfaite par le budget général. La taxe professionnelle, qui vient d’être évoquée, en est malheureusement un exemple frappant, et les récentes déclarations du Président de la République tendent à montrer que nous continuons à nous fourvoyer dans cette voie.

Ma question sera donc simple : ne conviendrait-il pas, dans le cadre du débat sur le devenir de nos finances publiques, d’ouvrir le chantier d’une réforme complète de la fiscalité directe locale, en donnant aux collectivités territoriales, dans le respect du principe constitutionnel de libre administration, les moyens de disposer de ressources stables et durables ?

Ne faudrait-il pas, dans le même temps, produire un effort particulier dans le domaine de la politique d’investissement public des collectivités territoriales ? Cet effort pourrait se traduire par un financement direct plus conséquent des initiatives en matière d’équipement des collectivités, particulièrement en ce qui concerne les transports collectifs, sujet très présent dans la réflexion issue du Grenelle de l’environnement.

On pourrait aussi envisager d’améliorer sensiblement les conditions de crédit qui leur sont aujourd’hui proposées. Bien évidemment, cela nécessiterait le maintien du remboursement de la TVA. Or, monsieur le ministre, j’ai bien écouté ce que vous avez dit, et j’y ai trouvé bien des contradictions avec les prévisions qui nous avaient été fournies dans le cadre du comité des finances locales. Mais je suis prête à accepter que vous ayez changé d’avis ; en tout cas, je l’espère !

À notre sens, tout doit être fait pour permettre aux collectivités territoriales de jouer pleinement leur rôle d’acteur du développement économique et social du pays.

Aujourd’hui, elles doivent effectuer leurs choix de gestion sous la pression de ressources déjà insuffisantes pour l’essentiel, alors qu’elles devraient pouvoir se consacrer à la recherche de réponses à fournir aux besoins collectifs toujours plus nombreux qu’expriment nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre. Pour juger d’une relation entre deux partenaires, il faut considérer la relation dans son ensemble. En ce qui concerne les relations qu’entretient l’État avec les collectivités territoriales, il convient, de la même façon, d’étudier tous les paramètres. Si l’on commence à les observer par morceaux, on n’aboutira à rien.

Mme Marie-France Beaufils. Tout à fait d’accord !

M. Éric Woerth, ministre. Ainsi, quand on additionne toutes les relations financières qui existent entre l’État et les collectivités, on obtient un total de l’ordre de 90 milliards d’euros en comptant les impôts affectés, les dégrèvements et l’ensemble des dotations.

Il s’agit donc de chiffres absolument considérables. Certes, cela résulte d’une longue – très longue – histoire et d’un empilement de décisions prises au fil du temps, avant la décentralisation comme depuis qu’elle a été engagée. Voilà donc le tableau qu’il faut considérer dans son ensemble.

Le FCTVA n’échappe pas à ce constat ; il est lui aussi le fruit d’une histoire. Certes, il s’agit d’un remboursement, mais celui-ci découle du fait que l’État a décidé de ne pas percevoir de recettes sur la fiscalité provenant d’investissements réalisés au niveau local.

C’est pourquoi la décision d’élargir aujourd’hui sa « norme », son « enveloppe » ou encore son « périmètre » – peu importe le mot par lequel on désigne la chose – me semble relever également d’une relation plus saine.

À ce propos, il y a beaucoup de malentendus. Si l’on fait abstraction des débats purement politiques qui peuvent nous opposer et si l’on s’en tient à la réalité des choses le plus objectivement possible, il ne semble pas complètement injuste – je dis même que ce serait beaucoup plus juste – d’intégrer cet ensemble d’éléments au FCTVA et d’étudier après comment donner, dans la durée, de la visibilité aux collectivités, tout en faisant en sorte de ménager le budget de l’État !

La vraie clé du problème, à mon avis, est à chercher dans l’autonomie. L’État étant le premier contribuable des collectivités, il faut instaurer une véritable autonomie. On voit bien que tout ce qui touchera à une réforme des collectivités et à leur mode de financement doit passer par un surcroît d’autonomie. En effet, les collectivités sont responsables devant leurs électeurs et, au fond, pour qu’elles assument pleinement cette responsabilité, il faut que leur autonomie soit réelle, notamment en matière fiscale.

Une fois que l’on aura redessiné l’architecture des collectivités locales – en ayant pris soin de se poser la bonne question, qui est de savoir, en fonction des décisions à prendre et compte tenu de l’exigence de proximité, à quel niveau il vaut mieux situer la responsabilité –, la question qui suivra immédiatement sera celle de déterminer comment assurer l’autonomie des collectivités du point de vue de leurs ressources ?

Force est de constater que nous sommes loin de cela aujourd’hui et que le débat est posé en de mauvais termes. D’un côté, il y aurait l’État qui fait jouer son autorité et, de l’autre, des collectivités qui quémanderaient des ressources ! Cette manière de concevoir les relations n’est pas la bonne ; il faut la faire évoluer.

Je ne mets d’ailleurs dans cette réflexion aucun contenu politique, ni de droite ni de gauche : que l’on soit dans la majorité ou dans l’opposition, on peut concevoir que, les choses évoluant tellement, il faut disposer d’un socle de décisions solide.

Il convient aussi d’éviter l’effet d’empilement, car le contribuable ne s’y retrouve plus. De fait, l’empilement dans la décision entraîne aussi l’empilement dans les ressources, c’est-à-dire dans la fiscalité qui est à la base de cette ressource.

Pour finir, je rappelle que nous aurons au cours de l’année 2009 une réflexion très approfondie. Le Président de la République nous l’a demandé et les travaux de la commission Balladur sont en bonne voie. Nous disposerons ainsi d’une réflexion fouillée et chacun aura à dire son mot, mais il faudra passer très vite de la réflexion sur l’architecture à la réflexion sur la ressource, avec comme mot-clé l’autonomie.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Madame la ministre, monsieur le ministre, ce matin vous avez dessiné une trajectoire pour nos finances publiques au cours des trois années à venir.

Vous l’avez fait avec compétence, détermination et technicité. Un des maîtres mots de cette perspective est celui de « maîtrise » des finances publiques. Cela vous vaut bien sûr des critiques de la part de nombreux membres de notre assemblée, mais vous devez savoir qu’au sein même de la majorité nous sommes un certain nombre à estimer que ce projet n’est pas suffisant et que vous n’allez pas assez loin.

Je voudrais rappeler que notre pays est l’un de ceux où les prélèvements obligatoires sont parmi les plus importants. Le Président de la république a considéré que ces prélèvements étaient excessifs et nuisaient à l’attractivité de notre pays. Notre projet consistait donc à les faire baisser de 4 % sur l’ensemble de la mandature.

Or la réalité de la situation économique nous amène à envisager une stabilisation de la baisse engagée, au nom de la sincérité que vous avez évoquée ce matin. Les difficultés actuelles brouillent les prévisions budgétaires réalisées avant que la crise financière n’éclate.

Monsieur le ministre, je souhaite avoir des précisions sur la maîtrise des dépenses publiques et, notamment, sur la révision générale des politiques publiques lancée en juillet 2007. En effet, au cours des trois réunions du conseil de modernisation des politiques publiques, 337 mesures ont été annoncées et un calendrier a été défini. Les décisions prises ont porté sur les deux tiers de la dépense publique, ce qui représente 173 milliards d’euros. Au terme du processus, nous devrions pouvoir enregistrer, au bout de trois ans, une économie d’environ 7 milliards d’euros seulement, soit un gain de productivité de l’ordre de 4 %.

Je fais partie de ceux qui considèrent que le périmètre d’intervention de l’État est trop vaste. À ce titre, l’une des priorités de la révision générale des politiques publiques aurait dû être d’envisager l’abandon de certaines missions exercées par l’État.

Monsieur le ministre, en tant que rapporteur général du conseil de modernisation des politiques publiques, pouvez-nous nous préciser l’état d’avancement de ces 337 mesures ?

Sur les 7 milliards d’euros d’économies annoncées, 3 milliards d’euros sont obtenus sur la masse salariale, 2 milliards d’euros sur l’investissement et les interventions, et 2,2 milliards d’euros sur le fonctionnement. Au regard du montant total des dépenses de fonctionnement – 35 milliards d’euros –, le gain de productivité s’avère donc insuffisant et le champ des investigations mises en œuvre mériterait d’être élargi.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre. Monsieur Dominati, d’ici à la fin du mois de novembre, je ferai, en conseil des ministres, le bilan de cette première phase de la RGPP – il y en aura donc une deuxième ! – et de la mise en œuvre de ces fameuses 337 mesures, qui, si elles sont de nature très différente, touchent l’ensemble des politiques publiques.

Ce bilan sera sans concession. Nous avons réactivé le comité de suivi de la RGPP, coprésidé, comme vous le savez, par le secrétaire général de la Présidence de la République et par le directeur de cabinet du Premier ministre. J’en assume moi-même le secrétariat général.

Nous avons déjà auditionné les deux tiers des ministres. Il ne nous en reste donc qu’un tiers à entendre pour parfaire le rapport que je suis en train de réaliser.

Globalement, deux tiers des mesures sont correctement exécutées et un tiers demandent à être réactivées ou réexpliquées. Dès lors que les décisions prises constituent un vrai changement, il est normal qu’elles ne laissent pas indifférent. Le contraire m’inquiéterait d’ailleurs, car cela signifierait qu’elles n’ont aucune substance !

Dans certains ministères et administrations, on renâcle beaucoup et on proteste. Parfois, ce sont les ministres eux-mêmes qui se braquent. Mais, convenons-en, c’est bien dans la nature des choses. Il nous faut donc insister plus particulièrement sur l’aspect qualitatif des décisions annoncées.

La RGPP, c’est en quelque sorte du sucre lent : elle appelle une réforme de structure et non de simples mesures d’affichage, par lesquelles les quelques dizaines de millions d’euros que l’on peut gagner très vite sont finalement reperdus deux ans après !

Par conséquent, il convient de ne pas limiter la RGPP aux 7 milliards d’euros d’économies annoncés. Nous avons donné des chiffres parce qu’il fallait en donner. Mais, au fond, ce n’est pas la bonne manière de présenter notre action. Nous aurions pu avancer des montants beaucoup plus élevés.

L’important, en réalité, c’est de savoir combien nous allons gagner en un an, en cinq ans, en dix ans. Nous sommes engagés dans un profond mouvement de restructuration, avec un objectif de long terme : disposer d’une administration recentrée sur des missions plus stratégiques et employant moins de fonctionnaires.

La RGPP permet de montrer comment nous allons pouvoir réaliser un tel objectif, en assurant, par un meilleur ajustement de la dépense, ce service public de qualité auquel nous tenons tous. Au fond, nous avons lancé un débat extraordinairement vertueux en termes de finances publiques et, partant, en termes de qualité du service public. Ce sont tous ces éléments que nous devons prendre en compte.

À l’issue de cette première phase et après le bilan sans concession que nous sommes en train de finaliser, nous allons, à partir du mois de janvier prochain, relancer le processus. Il convient, en effet, à partir de la très grande quantité des travaux qui ont été menés jusqu’à présent, d’aller plus loin pour exploiter ce qui n’a pas pu l’être.

Monsieur Dominati, vous l’avez dit vous-même, certains sujets n’ont pas fait l’objet d’investigations suffisamment profondes. En réalité, nous avons principalement axé notre action sur la réduction du nombre de fonctionnaires grâce au non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux. Vous vous en doutez, cela ne s’obtient pas d’un simple claquement de doigts ! Cela marchera peut-être pendant un an ou deux ans, mais sûrement pas sur la durée. Il nous fallait donc envisager un réajustement profond de l’organisation administrative en fonction de l’objectif fixé, mais sans toucher à la qualité du service public.

La deuxième phase de la RGPP sera également l’occasion d’engager une autre réflexion. Nous devons en effet définir quel État et quel service public nous voulons, ce qui implique évidemment de prévoir une organisation adéquate.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Madame la présidente, madame, monsieur le ministre, mes chers collègues, la volonté affichée par le candidat Sarkozy de rendre l’argent aux Français véhiculait une idée démagogique de spoliation, alors qu’il y a une forte demande en termes de service public et de protection sociale.

N’en déplaise aux ultralibéraux adeptes du slogan « Trop d’impôt tue l’impôt », il n’y a aucune corrélation entre le niveau de prélèvement et la performance économique. La vraie question est d’ordre qualitatif.

Le choix responsable, c’est la recherche de l’efficacité, et ce sur trois plans : économique, social et environnemental.

L’efficacité économique, d’abord : il faut rompre avec le système en vigueur, qui taxe les entreprises sur la base des salaires. On plombe les PME, donc l’emploi, au profit des groupes industriels capitalistiques.

Passons progressivement à une cotisation sur la valeur ajoutée, n’en déplaise au MEDEF, qui défend exclusivement les intérêts des grands groupes.

Assurons, ensuite, l’efficacité en matière sociale : notre pays se distingue par un niveau record de cotisations, auxquelles échappe la spéculation, dont nous connaissons tous l’envolée indécente et coupable.

La CSG a constitué une rupture, mais il faut aller plus loin, vers des prélèvements redistributeurs, comme l’IRPP. Or le Gouvernement fait l’inverse et offre des cadeaux fiscaux aux plus riches.

L’efficacité environnementale, enfin : aujourd’hui, plus personne ne nie l’urgence écologique et le poids du développement non durable sur les finances publiques.

Alors, cessons de nous enferrer dans l’erreur et, notamment, de laisser dans le marasme le plan national Santé-Environnement ! Alors que la part des recettes de la fiscalité écologique baisse chez nous depuis dix ans, changeons les comportements par des taxes plus intelligentes, portant sur l’énergie, le carbone, les pollutions. Cessons de casser le Grenelle de l’environnement par des polémiques destructrices !

La déplorable fuite de la « taxe pique-nique », détail anecdotique extrait d’une longue liste, est pitoyable. Le bonus-malus coûte cher : eh bien, faisons varier le curseur pour atteindre l’équilibre !

Madame, monsieur le ministre, abandonnons cette timidité archaïque sur les mesures dites écologiques. Les générations futures nous en seront reconnaissantes. Ma question est donc la suivante : à quand la refonte juste, responsable, « verdie » de nos prélèvements, à la hauteur du show médiatique du Président de la République devant Al Gore, José Manuel Barroso et Wangari Maathai ?

Mme Nicole Bricq. Bonne question !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Madame le sénateur, vous avez parlé d’efficacité. Or c’est très clairement l’un des maîtres-mots qui guident notre action, et ce dans les domaines que vous avez évoqués.

Efficacité en matière économique, d’abord, par le biais de la fiscalité : je pense ainsi à la suppression, sur trois ans, de l’imposition forfaitaire annuelle, à l’exonération, à effet immédiat, de la taxe professionnelle pour encourager l’investissement, au crédit impôt recherche, ainsi qu’au plan de soutien aux pôles de compétitivité. Comme vous, nous entendons agir au nom de l’efficacité.

Efficacité en matière sociale, ensuite : je pense plus particulièrement au revenu de solidarité active, dont la mise en œuvre est rendue possible par une fiscalité consentie et longuement débattue, y compris au sein même de cet hémicycle. Le RSA est très clairement mis au service de ceux que nous voulons rapprocher du monde du travail : nous voulons les encourager à reprendre un emploi et à sortir du dispositif du RMI, lequel, parce qu’il n’est pas incitatif, les a éloignés du marché du travail.

Efficacité environnementale, enfin : vous avez une liste complète des mesures mises en œuvre dans le document relatif aux prélèvements obligatoires, qui est soumis à votre examen dans le cadre du projet de loi de finances pour 2009. Je pense notamment à l’écoprêt à taux zéro, l’éco-PTZ, ce prêt particulier destiné à financer des travaux en vue de l’amélioration de l’habitat. Je pense également au « verdissement » d’un certain nombre d’outils, à l’image du crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt pour l’acquisition d’une résidence principale. Il s’agit certes d’une série de petites mesures, mais, mises bout à bout, elles ont une grande efficacité. Je pense enfin au bonus-malus automobile, qui a largement soutenu l’activité automobile, mais qui a aussi encouragé l’achat de véhicules plus propres et moins polluants.

Madame Blandin, l’un de nos combats communs, c’est celui que nous menons pour une croissance un peu plus vertueuse, durable et respectueuse de l’environnement.

À cet égard, je voudrais vous rappeler le rôle clé joué par le Président de la République et par mon collègue Jean-Louis Borloo, chargé de l’environnement. Ce dernier s’efforce de parvenir, avant la fin de l’année, à la conclusion d’un accord au niveau européen sur le paquet Énergie-Climat qui soit satisfaisant et conforme aux objectifs du Grenelle.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Gautier.

M. Jacques Gautier. Madame la présidente, madame, monsieur le ministre, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2009, il est prévu de majorer sensiblement la taxe générale sur les activités polluantes relative à l’enfouissement et de créer, en plus, une TGAP afférente aux déchets ménagers incinérés, afin d’inciter, nous dit-on, à la suite du Grenelle de l’environnement, au développement d’autres modes de traitement et d’élimination des déchets ménagers. Cette disposition aura un impact dès 2009 et des répercussions dans la durée. Elle est donc d’actualité, surtout après l’intervention de notre collègue Marie-Christine Blandin.

Or cette taxation représenterait un double malus pour les bons élèves du traitement des déchets ménagers, qu’il s’agisse de communes ou d’établissements publics de coopération intercommunale.

En effet, le contribuable, ou l’usager, n’est pas le principal pollueur. Il conviendrait plutôt d’aller chercher la responsabilité du producteur d’emballages non recyclables.

Il y a une réelle contradiction entre les récentes exigences de mise aux normes en matière de rejet atmosphérique, en date du 28 décembre 2005, et la création, trois ans après, d’une taxe sur ces équipements que nous venons de rénover à grands frais.

Il y aura toujours des déchets ultimes non valorisables, y compris après un processus de tri ou de méthanisation nécessitant un traitement définitif sous forme d’incinération ou par enfouissement réglementaire.

Enfin, un tel niveau de taxation pénaliserait les syndicats intercommunaux qui, par une pratique de diversification de traitement, par le respect de performances énergétiques, permettent la réalisation des objectifs nationaux et alimentent les réseaux de chauffage urbain, réduisant d’autant les émissions de gaz à effet de serre.

L’application de cette TGAP pour un syndicat comme le SYCTOM, le syndicat intercommunal de traitement des ordures ménagères de l’agglomération parisienne, qui regroupe Paris et 85 communes, soit 5,5 millions d’habitants, entraînerait une augmentation de la redevance de 2,2 % dès 2009 et qui pourrait s’élever à 7,1 % en 2015.

Permettez-moi de vous le dire, cela est insupportable, encore plus en période de crise.

Il serait intéressant, au minimum, de moduler l’application de cette TGAP en fonction des critères objectifs suivants : la diversité des moyens de traitement, avec des objectifs dans le temps ; la contribution à la valorisation énergétique ; le pourcentage de déchets traités par des procédés biologiques ; ou l’utilisation de transports alternatifs à la route.

Madame, monsieur le ministre, je vous remercie de bien vouloir me rassurer dans ce domaine.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le sénateur, vous soulevez un ensemble de questions très importantes sur les effets que la majoration de la TGAP relative à l’enfouissement et de la TGAP afférente aux déchets ménagers pourraient avoir sur les collectivités territoriales.

Ces questions ont fait l’objet d’un dialogue approfondi dans le cadre du Grenelle de l’environnement, lequel a permis de rassembler l’ensemble des acteurs concernés. Certaines des conclusions auxquelles ceux-ci sont parvenus seront d’ailleurs débattues ici même à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances pour 2009.

Je vous propose de reprendre contact avec vous pour retravailler sur tous ces sujets, en liaison, notamment, avec mon collègue Jean-Louis Borloo. Nous devons en effet tirer toutes les conclusions des propositions issues du Grenelle à la lumière des besoins des collectivités territoriales et des efforts qui ont déjà été réalisés dans le cadre d’un certain nombre de procédures d’enfouissement.

Nous devons évidemment en être conscients, les ressources qui résulteront de la TGAP seront affectées à l’ADEME, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, qui sera chargée de prendre des mesures respectueuses de notre environnement.

L’objectif est de parvenir à un équilibre entre le respect des besoins affichés et celui des impératifs que vous avez légitimement évoqués. Je vous propose de poursuivre ce dialogue le plus tôt possible, avant même le débat au Sénat sur le projet de loi de finances pour 2009.