PRÉSIDENCE DE M. Roger Romani

vice-président

M. le président. La parole est à M. Elie Brun.

M. Elie Brun. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, il me paraît symbolique que ma première intervention dans cet hémicycle porte sur les ressources des collectivités locales. Je tiens à en remercier le groupe UMP.

Je voudrais rappeler que j’ai eu la chance et le mérite de diriger, pendant vingt-cinq ans, un cabinet d’expertise comptable et d’avocats fiscalistes. Pendant toutes ces années, la loi de finances était mon livre de chevet des premiers jours du mois de janvier. J’essayais de l’appréhender, l’apprécier, la comprendre et l’interpréter le mieux possible.

La vie publique m’a rattrapé. Maire de Fréjus depuis 1997, le sujet des ressources des collectivités locales me tient particulièrement à cœur. Il nécessite qu’on s’y attelle de près au niveau national, et je me réjouis que ce soit le cas.

Le projet de loi de finances pour 2009 s’inscrit dans un contexte budgétaire aléatoire. Cette situation n’est pas sans incidence sur les cadrages économiques qui ont prévalu à son élaboration. Mais, au-delà, le vrai débat porte sur une meilleure maîtrise des dépenses publiques à laquelle les collectivités locales doivent participer.

Je crois devoir rappeler que, pour la première fois, le projet de loi de finances a été précédé d’une loi de programmation qui fixe les objectifs et les conditions de réalisation de la programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

Il est bien évidemment tentant, comme cela était naturel par le passé, d’attendre le maximum de l’État pour satisfaire les demandes légitimes de nos concitoyens qui souhaitent vivre dans des villes, des départements ou des régions agréables et avoir accès à des services publics de qualité.

Il peut être tout aussi facile d’engager des financements publics pour répondre à des problématiques locales en faisant abstraction de l’environnement national et international, ainsi que des équilibres de l’économie publique.

Je crois qu’aujourd’hui la prise de conscience est réelle quant à la nécessaire maîtrise des dépenses publiques. Chacun, à son niveau, doit s’engager avec détermination dans l’effort collectif de réduction des déficits.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !

M. Elie Brun. En dépit d’un contexte budgétaire tendu, les collectivités locales doivent faire face à leurs engagements, qu’ils soient liés à la réalisation d’équipements ou au remboursement des financements des investissements passés.

À cet égard, nous ne pouvons que nous réjouir de la décision du Gouvernement de maintenir l’indexation de l’enveloppe des concours de l’État à 2 %, malgré une baisse de la prévision de l’inflation pour 2009, ramenée à 1,5 %. Il peut être utile de rappeler qu’une différence de 0,5 point correspond à un peu plus de 200 millions d’euros.

Le Gouvernement appelle à une politique marquée de maîtrise des dépenses de fonctionnement des collectivités locales. Je partage pleinement ce souhait de fournir un effort tout particulier sur ces dépenses, afin de reconstituer les marges de financement de notre investissement tout en limitant le recours à l’emprunt. Une inflexion dans la dynamique des dépenses publiques locales est nécessaire pour aboutir à une amélioration de la capacité d’autofinancement des collectivités publiques, élément indispensable à la réduction des déficits publics.

L’intégration du FCTVA dans l’enveloppe normée participe à cette démarche. Cette ressource, qui constitue un remboursement, et non une dotation, reste garantie, comme M. le ministre du budget l’a rappelé. À terme, une réforme du FCTVA pourrait être envisagée pour adapter le dispositif aux besoins des politiques locales d’investissement. Je rappellerai à ce sujet que les communes doivent assurer le portage financier de la TVA durant deux ans, du fait du décalage de remboursement opéré au titre du fonds de compensation.

Eu égard à ce qu’il est raisonnable d’attendre de l’État et ce que le présent projet de loi de finances prévoit en matière de mesures relatives aux ressources des collectivités locales, nous ne pouvons, en tant que gestionnaires responsables, que nous réjouir du dispositif proposé.

Sans aucun esprit polémique, il n’est pas complètement exact de prétendre que l’État se désengage des collectivités locales puisque ce secteur a été le mieux préservé au cours des dernières années. Sa contribution financière ne se limite pas aux dotations. Elle s’étend aussi aux allégements d’impôts, notamment la taxe d’habitation en faveur des contribuables les plus modestes, et aux exonérations en matière de taxe professionnelle.

L’avenir des financements des collectivités locales devra reposer largement plus sur la fiscalité locale que sur les concours financiers de l’État.

Dans ce contexte, nous attendons beaucoup de la réflexion en cours sur la réforme des structures des collectivités territoriales, la répartition de leurs compétences et de leur financement. Après avoir été initiée par le Président de la République, elle est conduite par la commission dite Balladur et par les groupes de travail mis en place à l’Assemblée nationale et au Sénat.

Seule une véritable refonte de la fiscalité locale, adossée à une plus grande autonomie et à une redéfinition des compétences des collectivités territoriales, permettra d’apporter une réponse à la problématique du financement de l’action publique locale.

Il est aussi vital que les collectivités locales soient étroitement associées aux projets de réforme. Je pense notamment à la réforme de la dotation de solidarité urbaine dont les futurs critères d’attribution doivent absolument faire l’objet d’un dialogue. À cet égard, je salue Mme la ministre pour avoir reporté d’une année l’application des mesures nouvelles et avoir maintenu, en 2009, les critères actuels d’éligibilité à la dotation de solidarité urbaine. Le Gouvernement est parvenu à cette solution équilibrée en prenant en compte les inquiétudes de certains maires dont je fais partie.

Concernant l’exonération de la taxe professionnelle pour les investissements réalisés entre le 23 octobre 2008 et le 31 décembre 2009, qui a été annoncée par le Président de la République et qui s’avère indispensable pour soutenir l’investissement des entreprises, les collectivités locales ont besoin d’être rassurées sur la compensation intégrale des pertes qu’elles subiront.

En conclusion, il apparaît indispensable d’avoir un discours de vérité, chiffré, à l’égard des ressources allouées à l’ensemble des collectivités locales et d’engager la réforme tant attendue sur le financement de ces dernières.

Les collectivités locales ont besoin de clarté quant aux perspectives financières des prochaines années pour envisager l’avenir de la façon la plus sereine et la plus responsable possible. Elles pourront ainsi être acteur de la politique de réduction des dépenses publiques.

Grâce à une parfaite appréciation de leurs investissements futurs et une meilleure maîtrise des charges de fonctionnement, elles contribueront à un développement local en cohérence avec les aménagements majeurs de l’État qui sont indispensables à notre pays. Seule une réforme au sens large du terme, qui comprendra toutes les fiscalités, nous permettra d’atteindre ensemble ce but. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Gillot.

M. Jacques Gillot. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, chacun dans cet hémicycle sait combien les principes de libre administration et d’autonomie financière des collectivités locales sont indissociables.

Or, avec l’introduction cette année d’un périmètre normé comprenant l’ensemble des concours de l’État aux collectivités, un pas de plus est franchi vers l’atténuation de ces principes et donc du sens même de la démocratie locale.

En effet, sous les effets conjugués du recul de la DGF, indexée sur une inflation virtuelle de 2 % alors que l’inflation réelle avoisinerait 3 %, et du plafonnement du FCTVA, désormais intégré à l’enveloppe normée, les marges de manœuvre des collectivités d’outre-mer seront encore plus réduites.

Cette diminution de ressources intervient de surcroît dans un contexte fiscal structurellement contraint puisque le produit des quatre taxes directes locales ne représente que 27 % des produits de fonctionnement en Guadeloupe, contre 57 % dans l’Hexagone.

S’y ajoutent les principaux contrecoups des atteintes portées à la défiscalisation sur l’activité économique, notamment à travers des reports d’investissements qui accentueront nécessairement la diminution du produit fiscal.

À cela vient s’additionner l’exonération de la taxe professionnelle annoncée par le Président de la République jusqu’au 1er janvier 2010 pour les nouveaux investissements.

Au surplus, la réduction des dotations ne pourra même pas être compensée par l’emprunt, la crise financière ayant renchéri le coût du crédit.

Dans un contexte aussi alarmant, pourriez-vous, madame la ministre, nous rassurer sur la capacité du Gouvernement à dégager l’horizon budgétaire des collectivités locales en n’introduisant pas de «variable d’ajustement » dans le calcul de la DGF, en maintenant le FCTVA en tant que recette distincte et en garantissant l’indexation globale des dotations sur l’inflation réelle ?

Au-delà, les conséquences de ce projet de loi de finances affecteront tout particulièrement la collectivité départementale.

S’agissant tout d’abord des dépenses sociales, je n’ai eu de cesse, depuis 2004, d’alerter le Gouvernement sur la nécessité de réviser les paramètres de compensation du RMI, 60 millions d’euros restant à la charge du budget du conseil général de la Guadeloupe.

À cet égard, je dois vous dire la forte inquiétude que je partage avec les exécutifs départementaux ultramarins : nous craignons que l’entrée en vigueur du RSA ne vienne creuser ce différentiel.

Dans ce contexte plutôt préoccupant, pourriez-vous nous apporter, madame la ministre, des garanties relatives à la pérennité de cette « petite soupape » que constitue le fonds de mobilisation départementale pour l’insertion ? Nous éviterions ainsi l’affaiblissement budgétaire de nos départements.

Madame la ministre, chers collègues, je conclurai en évoquant un autre point d’inquiétude soulevé par ce projet de loi de finances. Celui-ci impose au budget du conseil général de la Guadeloupe de supporter outre mesure les conséquences de la création des collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.

En effet, pour abonder la dotation globale de compensation prévue par la loi, l’État envisage de ponctionner la DGF et la DGD du département de façon disproportionnée et abusive : pour certaines dépenses, au-delà du niveau jusqu’à présent compensé par l’État ; pour d’autres, en « récupérant » les fonds propres du département affectés à des dépenses qu’il conduisait de manière volontariste sur ces territoires.

Pour cette raison, madame la ministre, je vous demande d’appliquer strictement la loi en limitant les contributions de la Guadeloupe aux budgets de Saint-Martin et Saint-Barthélemy aux seules recettes fiscales qui leur reviennent et à la fraction des compensations versées par l’État au département qui correspond aux compétences transférées à ces collectivités.

En définitive, madame la ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de finances rompt manifestement avec le contrat de croissance et de stabilité qui prévalait jusqu’alors.

Si nous comprenons la nécessité d’un effort de redressement des comptes de l’État, nous souhaiterions toutefois que ce dernier n’accroisse pas davantage les difficultés de nos collectivités. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Louis Nègre.

M. Louis Nègre. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, c’est avec une certaine émotion, mais aussi avec un réel plaisir, que j’interviens aujourd’hui, pour la première fois dans l’hémicycle (Applaudissements sur les travées de l’UMP),…

M. Philippe Marini, rapporteur général. Bravo !

M. le président. Nous vous complimentons et nous vous encourageons !

M. Louis Nègre. …devant vous, madame le ministre, sur un sujet qui me tient particulièrement à cœur, comme d’ailleurs à nous tous : les finances des collectivités locales, plus particulièrement leurs recettes.

Nous sommes confrontés à une crise extérieure et aux difficultés de fonctionnement de certaines institutions, qui n’assument plus correctement leur rôle de régulation. La maîtrise des dépenses publiques s’impose à nous tous, et il est de notre devoir et de notre responsabilité d’envisager cette question de la manière la plus objective possible.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

M. Louis Nègre. Le déséquilibre du budget de l’État est permanent depuis les années quatre-vingt. Si nous voulons atteindre l’équilibre en 2012 – objectif ambitieux que nous nous sommes fixé au regard de nos engagements européens, mais aussi afin de préparer l’avenir de nos enfants –, nous devons accepter un principe de réalité.

Il semble évident que l’État ne pourra redresser les finances publiques, qui sont également les nôtres, s’il n’agit pas aussi sur une part qui représente 21,5 % de son propre budget.

Je note que les concours de l’État progressent de 1,1 milliard d’euros, soit 200 millions d’euros de plus que l’an dernier. Au total, les collectivités percevront donc 56,3 milliards d’euros en 2009, contre 55,2 milliards en 2008.

Je note encore que, entre 2003 et 2009, les dépenses de l’État auront progressé comme l’inflation, soit une hausse moyenne annuelle de 1,7 % en valeur, alors que, dans le même temps, les concours aux collectivités locales, hors dégrèvements et fiscalité transférée, auront augmenté de 2,7 % en valeur.

Dans ces conditions, il paraît logique que l’effort que nous devons faire soit collectif et que l’évolution des concours de l’État aux collectivités suive le rythme de l’inflation.

Cependant, madame le ministre, mes chers collègues, dans ce domaine, nous sommes au milieu du gué. Si nous voulons préparer l’avenir, je pense – comme le Président Sarkozy et comme vous-même, madame le ministre – qu’il nous faut aussi simplifier le fonctionnement des collectivités territoriales. Clarifier les niveaux de compétence est une exigence tant les redondances et la confusion rendent le système complexe et coûteux. C’est aussi, et surtout, une véritable et légitime attente de nos concitoyens et de bon nombre d’élus locaux, dont je fais partie.

Je pense que ce mouvement de simplification institutionnelle doit s’accompagner d’une grande réforme de la fiscalité locale. Le monde bouge, la mondialisation nous concerne tous. Nous ne sommes pas isolés dans une bulle. Notre système fiscal doit s’adapter, gagner lui aussi en simplicité, en lisibilité,…

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

M. Louis Nègre. …et, surtout, permettre aux collectivités locales de faire face à leurs nouvelles responsabilités. C’est un enjeu majeur.

Nous attendons cette réforme depuis des décennies – et j’ai conscience de m’adresser à ceux qui y travaillent depuis longtemps –, et je me félicite qu’elle devienne une véritable préoccupation non seulement de notre assemblée, mais aussi du Gouvernement.

Nous devons engager une réflexion globale et sur le long terme. Pour cela, nous devons construire un partenariat de confiance fondé sur l’association de toutes les instances de décision. C’est d’ailleurs, me semble-t-il, l’objet de la Conférence nationale des exécutifs ainsi que de la mission de la Commission consultative d’évaluation des normes, qui sont deux outils efficaces pour aller dans ce sens.

Néanmoins, travailler ensemble suppose également que le Gouvernement entende les préoccupations des élus. Pour ma part, madame le ministre, en tant qu’élu local et sénateur-maire de Cagnes-sur-Mer, je souhaiterais vous interroger sur trois points.

J’évoquerai tout d’abord le problème des emprunts structurés.

Avec Mme le ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, Christine Lagarde, vous avez réuni récemment au ministère de l’intérieur les représentants des collectivités territoriales et des banques afin de dresser un bilan de la situation. Cet état des lieux a fait apparaître deux constats rassurants : d’une part, globalement, les collectivités territoriales ne sont pas considérablement endettées ; d’autre part, la très grande majorité de leurs emprunts sont à taux fixe et, à l’intérieur de la catégorie des emprunts dits « à risque », la part des emprunts structurés serait faible, de l’avis même des banques et de l’Association des maires de France.

Cela étant, madame le ministre, je souhaiterais savoir si l’on connaît plus précisément aujourd’hui l’ampleur de ces emprunts exotiques, voire toxiques. Pouvez-vous également m’indiquer quelles mesures vous envisagez pour l’avenir dans ce domaine ? Quelles dispositions comptez-vous prendre aujourd’hui afin de diminuer d’ores et déjà les conséquences de ces emprunts structurés sur les collectivités locales qui les auraient souscrits – sur la proposition orientée de leur banquier ?

J’aborderai ensuite la question de la dotation de développement urbain que le projet de loi de finances, entre autres mesures, vise à créer afin de renforcer l’effort de solidarité au bénéfice des collectivités les plus pauvres ; car « moderniser » doit aussi rimer avec « solidarité » !

L’État, conscient des difficultés, veut à juste titre donner des moyens financiers accrus aux communes les plus pauvres dont la population rencontre de grandes difficultés sociales et économiques, en particulier dans les « quartiers sensibles ». Cette nouvelle aide financière devrait être répartie par le préfet entre les communes prioritaires de son département et servir au financement de projets d’investissement sur la base d’un contrat d’objectifs conclu entre les communes bénéficiaires et l’État.

Comme l’ensemble de mes collègues, je ne peux que me féliciter de cette initiative du Gouvernement. Cependant, madame le ministre, j’aimerais que vous nous apportiez des précisions complémentaires sur le type d’opérations qui pourra être proposé par nos collègues au préfet. Par ailleurs, je m’interroge sur la façon dont l’État pourra contrôler l’utilisation de ces fonds.

Je souhaite enfin, madame le ministre, revenir sur la dotation de solidarité urbaine, la DSU, que vous avez prévu de réformer en instaurant une nouvelle répartition de ses crédits entre les communes de plus de 10 000 habitants afin d’en améliorer l’efficacité péréquatrice en faveur des « communes pauvres ayant des pauvres » et de garantir à celles-ci une relative prévisibilité des fonds dont elles disposeront.

Ce projet de réforme, qui a fait l’objet d’une concertation avec les élus, a évolué de manière positive. L’année 2009 constitue une transition qui permettra de réfléchir tranquillement à de nouveaux critères. J’aimerais savoir, madame le ministre, quelles pistes vous souhaitez explorer avec les parlementaires et les associations d’élus pour définir à terme un véritable consensus dans ce domaine.

Par ailleurs, je constate avec satisfaction que, malgré la baisse prévisionnelle du niveau de l’inflation en 2009, qui serait de 1,5 % au lieu de 2 %, le Gouvernement a proposé, de manière exceptionnelle, de maintenir à 2 % l’augmentation de l’enveloppe du concours de l’État pour 2009, comme cela avait été initialement prévu. Grâce à cette mesure, les collectivités territoriales préserveront leur capacité d’investissement et de solidarité. On ne peut que s’en réjouir, à un moment où ces dépenses sont d’autant plus indispensables que la situation économique est particulièrement difficile.

En conclusion, madame le ministre, mes chers collègues, je soulignerai à quel point la situation des finances publiques, notamment locales, est tendue, du fait de charges qui augmentent rapidement et de recettes peu dynamiques. Dans un contexte aussi délicat, il n’est pas anormal que les collectivités locales participent à un effort partagé de maîtrise des finances publiques. J’espère néanmoins, madame le ministre, une remise à plat complète de leur système fiscal actuel, afin qu’elles retrouvent des marges de manœuvre.

Compte tenu de la dure réalité des faits et de l’espoir que nous plaçons dans le Gouvernement quant à la réalisation d’une vraie réforme de la fiscalité locale, je voterai, madame le ministre, les crédits de la mission et approuverai votre budget. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le président, monsieur le président de la commission, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais d’abord remercier les rapporteurs, bien sûr, mais également l’ensemble des orateurs de la qualité du débat qui a eu lieu. Certes, je ne peux pas demander que nous soyons tous d’accord sur toutes les mesures, mais je pense que le ton qui a été adopté était juste, que les arguments avancés étaient de bons arguments : finalement, c’est aussi cela, le travail parlementaire, le travail de la Haute Assemblée.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Effectivement !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Nous le savons bien, les finances de l’État ne sont pas seulement des questions de pure comptabilité : elles engagent la vision que, tous, nous nous faisons de la France pour les décennies à venir, et ce dans un contexte que M. Fourcade a eu raison de rappeler, celui de la mondialisation, du développement, pour ne pas dire de l’explosion des concurrences entre les pays, entre les économies, entre les entreprises.

C’est ensemble que l’État et les collectivités locales doivent aujourd’hui préparer l’avenir du pays. Un État est un tout, et il est indispensable que tout le monde tire dans le même sens, surtout compte tenu, précisément, de ce contexte. Or c’est bien la responsabilité, la raison d’être, et je dirais l’honneur, des responsables de l’État aussi bien que des collectivités locales que de savoir prendre la hauteur nécessaire pour aborder ces grandes questions.

Face aux défis, qui sont de plus en plus complexes et, vous l’avez souligné, de plus en plus nombreux, qui sont majeurs, la maîtrise des finances publiques s’impose à tous ; cela a été relevé sur pratiquement toutes les travées, et, même quand cela n’a pas été dit, je crois que cela a été pensé… (Sourires.)

Cet effort partagé doit aussi être pour nous l’occasion de moderniser ensemble la vie publique locale. Car c’est souvent dans les périodes où l’on est obligé de faire un effort que l’on a aussi l’imagination et la volonté nécessaires pour moderniser.

Tel est, mesdames, messieurs les sénateurs, le débat que je vous propose aujourd’hui, à l’occasion de l’examen dans le projet de loi de finances pour 2009 des recettes des collectivités locales.

Oui, préparer l’avenir, c’est d’abord et certainement maîtriser l’évolution de nos finances publiques. Aujourd’hui, leur redressement est une exigence. M. Nègre, à fort juste titre, l’a rappelé : le déséquilibre entre les dépenses et les recettes est permanent depuis vingt-cinq ans, et chacun porte sa part de responsabilité. Je n’aurai pas la cruauté, monsieur Patriat, d’évoquer les dévaluations auxquelles vos amis ont été amenés à procéder, peut-être, justement, parce qu’ils ne maîtrisaient pas suffisamment les finances publiques !

Bref, quoi qu’il en soit, aujourd’hui, l’objectif du Gouvernement, parce que c’est une nécessité, parce que c’est une exigence pour notre pays, est de tendre vers l’équilibre des finances publiques. Certes, cet objectif est ambitieux, cet objectif, aussi, est difficile ; mais il est nécessaire. Il y va bien sûr de nos engagements européens, mais, au-delà, il y va de notre responsabilité à l’égard des générations futures : nous savons très bien que le déficit, ce sont aussi des intérêts à payer, des intérêts dont aujourd’hui la masse – ce n’est pas le président de la commission des finances qui me contredira – pèse sur nos finances, sur nos capacités d’investissement et même sur nos capacités de solidarité.

Quand nous faisons porter notre effort sur les finances publiques, il ne peut y avoir d’un côté l’État et de l’autre les collectivités territoriales,…

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Eh non !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. …et je remercie M. Marini de l’avoir souligné avec talent : il est évident qu’ensemble ils forment un tout et qu’aucun ne peut refuser de partager l’effort, voire de demander davantage encore aux autres.

Cela est d’autant plus vrai que, ainsi que le rappelait M. Nègre, l’effort financier consenti par l’État pour les collectivités territoriales représentera 75 milliards d’euros en 2009, soit 21,5 % du budget de l’État. Si nous ne parvenons pas à fournir quelque effort que ce soit quand plus de 20 % du budget sont en jeu, je ne vois pas comment nous parviendrions à un effort significatif sur l’ensemble du budget !

Monsieur Doligé, je ne considère pas du tout qu’il s’agisse là de largesses de l’État. Je ne l’ai jamais pensé. Je dis simplement que les collectivités ne peuvent être dissociées de la maîtrise des finances publiques. Et cela vaut pour toutes les collectivités, monsieur Gillot !

C’est la raison pour laquelle, messieurs Doligé et Dubois, le même effort sera appliqué aux dotations aux collectivités et aux dépenses de l’État l’an prochain. Il n’est pas question de largesses ; nous nous appliquons la même règle.

Et même nous l’appliquons davantage aux collectivités. Cela a été souligné par plusieurs d’entre vous, je n’y reviendrai pas, l’inflation prévisionnelle pour l’an prochain a été rabaissée à 1,5 % – certains, d’ailleurs, souhaitaient peut-être réduire la progression des dotations aux collectivités à 1,5 % –, mais j’ai finalement obtenu que le taux de 2 % soit maintenu. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP.) Cela représente malgré tout 1,1 milliard d’euros !

Dans ce contexte, je veux aussi souligner que l’État tient ses engagements, notamment ceux qui sont inscrits dans la Constitution et qui sont relatifs aux compensations de transferts dans le cadre de la décentralisation. L’État réévalue de près de 600 millions d’euros la compensation de la décentralisation afin de tenir compte, tout naturellement, des transferts qui ont été réalisés en 2008 et de ceux qui sont prévus pour 2009.

Ces ajustements financiers accompagnent ainsi chaque année la mise en œuvre effective de la décentralisation. D’ailleurs, deux amendements du Gouvernement, qui seront examinés tout à l’heure, augmentent encore cette compensation de 140 millions d’euros pour tenir compte des derniers chiffres de transferts de personnels, qui ont été plus nombreux que prévu.

Messieurs Baylet et Miquel, vous ne pouvez pas affirmer qu’il n’y a pas de compensation intégrale au jour du transfert. La Constitution précise en effet que l’État attribue aux collectivités ce qu’il consacrait lui-même à l’activité transférée. Cela est fait, sinon nous serions sanctionnés.

En revanche, on constate que les transferts ont engendré des progrès. Ce fut le cas en ce qui concerne les collèges dans les départements et les lycées dans les régions. Nous ne pouvons que nous en réjouir, le vaste effort des collectivités nous permet de disposer d’établissements remarquables. C’est également le cas, comme cela a été souligné tout à l’heure, pour le transfert de personnels. Certains avantages ont en effet été accordés aux personnels venant de l’État afin de rendre leur situation équivalente à celle des personnels des conseils généraux. Cette mesure n’a pas été prise par l’État, elle provient des collectivités.

La compensation se fait au jour du transfert et représente exactement ce que l’État consacrait à l’activité en question. Ensuite, libre à chacun, en vertu du principe de l’autonomie des collectivités territoriales,…