Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Cartron.

Mme Françoise Cartron. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais revenir sur un sujet évoqué à plusieurs reprises depuis ce matin, la suppression des RASED, mais en lui donnant une dimension plus large. Je veux, en effet, vous interroger, monsieur le ministre, sur la politique que vous entendez mener pour lutter contre l’échec scolaire.

Si j’y reviens, c’est parce qu’il apparaît que cette mesure suscite tant chez les parents d’élèves que chez les enseignants, beaucoup d’interrogations et une profonde incompréhension.

Ceux qui s’interrogent sur la suppression de ces postes affectés aux RASED sont d’autant plus nombreux que, jusque-là, cette formule avait donné toute satisfaction. Les témoignages des uns et des autres montrent le rôle extrêmement important joué par les RASED dans les écoles où ils ont été implantés : ils y ont apporté aux élèves en difficulté une aide très efficace.

Or aucune évaluation préalable n’a été faite pour justifier la suppression de ces RASED. C’eût été pourtant un minimum ! Et, à la suite de cette évaluation, sans doute eût-il été utile d’engager une concertation avec toutes les personnes concernées.

Certes, vous l’avez dit et redit, monsieur le ministre, le rôle des RASED et le travail qu’ils réalisaient va être compensé par les heures de soutien personnalisées qui ont été mises en place.

Toutefois, et vous l’avez implicitement reconnu, il ne s’agit pas de la même chose. Au demeurant, lorsque les heures de soutien nous ont été présentées, elles devaient répondre à des besoins ponctuels ou à des interrogations sur tel ou tel point du programme. Elles étaient censées permettre aux enfants, grâce à quelques heures supplémentaires, d’approfondir leurs connaissances ou de se remettre en situation d’acquisition par rapport à telle ou telle notion.

Dans la réalité, que se passe-t-il ? En Gironde, département dont je suis une élue, en particulier dans la commune dont je suis maire, ces heures de soutien sont mises en place entre midi et quatorze heures. Vous en convenez vous-même, ce n’est pas une bonne chose. C’est bien mon avis !

Comment ces heures de soutien dispensées lors de la pause déjeuner, à un moment où les enfants ont besoin de se ressourcer et de se détendre pourraient-elles produire un effet bénéfique sur le plan pédagogique ? S’il se confirmait qu’à l’avenir ces heures de soutien vont remplacer les heures d’intervention RASED, vous iriez à l’encontre de l’objectif poursuivi : la lutte contre l’échec scolaire.

Monsieur le ministre, quelle cohérence dans la politique de la lutte contre l’échec scolaire entendez-vous promouvoir, alors que vous vous apprêtez à remplacer un système efficace, le RASED, par un système d’heures de soutien dont les modalités d’application sont trop floues et ouvrent la porte à beaucoup de difficultés ?

Pouvez-vous nous confirmer que cette suppression de maîtres E et G ne se poursuivra pas en 2010 et en 2011, aboutissant ainsi, à terme, à la suppression totale des 8 000  emplois RASED restants ? (Marques d’impatience sur les travées du groupe UMP.)

Enfin, que proposerez-vous à ces milliers d’enseignants supplémentaires que vous allez utiliser pour combler les déficits d’encadrement ? Que proposerez-vous à ceux qui ont tant donné à des milliers d’élèves pour tirer parti de leur savoir-faire ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Darcos, ministre. Madame Cartron, j’ai déjà répondu trois fois à cette question ! Ter repetita placent. Je veux bien recommencer !

Je persiste à dire que toute la politique conduite à l’école primaire avec énergie et rapidité vise à lutter contre l’échec scolaire.

C’est bien dans cette perspective que nous avons défini de nouveaux programmes, que nous proposons deux heures de soutien, que nous avons lancé, à la rentrée de la Toussaint, l’accompagnement éducatif dans les écoles des zones d’éducation prioritaire, que nous procédons à des évaluations ; en l’occurrence il ne s’agit pas de dresser un constat froid, destiné à alimenter des statistiques, mais d’identifier les difficultés et d’y répondre, et c’est pourquoi l’évaluation de CM2, en particulier, se fait en cours d’année. C’est également dans cette perspective que nous améliorons le management de nos inspections.

Toutes ces mesures tirent les conséquences d’un constat qu’il ne faut surtout pas oublier : 15 % à 20 % des élèves qui entrent en sixième sont en très grande difficulté. Or, on trouve parmi eux les enfants des couches sociales les plus exposées. C’est cela qui est au fondement de notre politique ! Savez-vous qu’un fils d’ouvrier court sept fois plus le risque de ne pas savoir lire à dix ans qu’un fils de cadre ? C’est bien beau de répéter que l’école républicaine était parfaite jusqu’à ce que j’arrive Rue de Grenelle, mais enfin, tout de même, il y a des moments où il faut savoir raison garder ! Est-ce cela la République ?

Nous avons essayé de concentrer l’ensemble de notre action sur cet objectif. Alors qu’il y a aujourd'hui 380 000 professeurs du premier degré et près de 12 000  membres des RASED, prétendre que le redéploiement de 3 000 d’entre eux vers les endroits où les besoins sont le plus criants va faire exploser la difficulté scolaire et signe notre renoncement à toute lutte contre l’échec scolaire, c’est une vue de l’esprit !

Je comprends que cela suscite des réactions. Je conçois que cela agace ceux qui sont concernés. J’en ai vu d’autres ! Mais je persiste à penser que c’est une vue de l’esprit !

Et je répète que le traitement de l’échec scolaire doit être l’affaire, non pas simplement de personnels spécialisés, quelles que soient leurs compétences, mais de l’ensemble du personnel ! C’est ma doctrine de fond, elle n’a pas changé, bien qu’elle soit difficile à « vendre » ! Mais je la soutiens de bonne foi. N’allez pas croire que j’en sois à 3 000 postes près !

Mme Christiane Demontès. Trop, c’est trop !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Le taux d’encadrement des élèves va chuter !

M. Xavier Darcos, ministre. Mais vous disiez la même chose l’année dernière ! Et moi, je suis prêt à parier qu’en 2009 la situation sera identique parce que les non-renouvellements d’emplois ne concernent pas les RASED : 3 000 d’’entre eux sont simplement sédentarisés. Notre gestion n’affecte pas le face-à-face entre les professeurs et les élèves.

Déjà, l’année dernière, vous m’annonciez qu’à la rentrée prochaine ce serait la fin de tout et qu’on ne pourrait plus tenir les classes !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Toutes vos mesures mises bout à bout, cela fait beaucoup !

M. Xavier Darcos, ministre. Enfin, je vous donne acte, madame Cartron, les heures de soutien ne doivent pas avoir lieu au moment de la pause méridienne, car il faut les prendre au sérieux. Petit à petit, les choses se mettent en place. Après une année d’adaptation, tout fonctionnera bien partout !

Je m’en suis remis aux équipes enseignantes du premier degré. Confiant en leurs méthodes et en leur dévouement, je ne m’autorise pas à leur dire ce qu’elles doivent faire à telle ou telle heure ! Je n’ai pas voulu fixer des règles parce qu’une équipe pédagogique est capable de prendre en charge sa gestion.

Cette mesure est appliquée très différemment selon les lieux. En Normandie, par exemple, où je suis allé récemment, les deux heures de soutien sont réparties entre le lundi et le jeudi, en fin de journée. Et cela se passe très bien.

Je l’ai toujours dit, je fais confiance aux professeurs. L’essentiel, c’est que nous soyons tous d’accord sur le fait que la première mission des enseignants du premier degré, c’est de lutter contre l’échec scolaire.

Mme la présidente. Madame Cartron, je ne vous redonne pas la parole parce que vous avez largement dépassé votre temps de parole en posant votre question.

Je rappelle à l’ensemble des intervenants qu’ils doivent s’en tenir à deux minutes trente.

La parole est à Mme Muguette Dini.

Mme Muguette Dini. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question concerne l’accueil des enfants de moins de trois ans.

Les deux-trois ans forment une tranche d’âge charnière, caractérisée notamment par une grande diversité sur le plan de la maturité psychique et physique. Ils sont à la fois déjà grands pour fréquenter la crèche, mais encore petits pour l’école, centrée sur les processus d’apprentissage.

La scolarisation des enfants dès deux ans, mode d’accueil gratuit, rend de grands services aux parents. Mais cette tranche d’âge nécessite un autre mode de prise en charge, qui permette à l’enfant de se développer à son rythme.

N’y aurait-il pas à inventer des « jardins-passerelles » ou, selon les termes de Mme Nadine Morano, des « jardins d’éveil » qui permettraient aux petits d’aller à l’école le matin jusqu’à onze heures et d’être ensuite pris en charge jusqu’au retour des parents par du personnel formé spécifiquement à cet accueil ?

J’avais suggéré la création de ces structures en mars 2005, lors de la discussion sur le projet de loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école ; mais on a toujours tort d’avoir raison trop tôt !

M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. C’est bien vrai !

Mme Muguette Dini. Une telle structure pourrait fonctionner sur l’ensemble de l’année civile et offrirait une amplitude horaire similaire aux crèches collectives.

La volonté des trois partenaires, à savoir l’éducation nationale, la caisse nationale d’allocations familiales et les collectivités territoriales, est un passage obligé pour créer ce projet de niveau intermédiaire entre la crèche et l’école.

Nombre de communes sont intéressées par cette expérience, mais comment pourront-elles assumer la charge salariale que représentera ce mode d’accueil innovant ?

Peut-on espérer, monsieur le ministre, que les crédits affectés aux personnels de l’éducation nationale en charge des enfants de deux ans soient, d’une manière ou d’une autre, versés aux collectivités qui mettraient en place ce nouveau mode d’accueil ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Il n’en est pas question !

Mme Muguette Dini. À défaut de cette aide, je crains que peu de communes ne soient prêtes à financer la charge supplémentaire, malgré tout l’intérêt que représenterait, pour les enfants d’abord, pour les familles ensuite, ce mode de garde innovant.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Darcos, ministre. Madame Dini, j’ai en grande partie déjà répondu à vos questions sur la préscolarisation des enfants et je m’en tiens à ce que j’ai dit : pour l’instant, il faut accepter qu’il y ait une diversité de traitement et que les enfants soient accueillis plus ou moins tôt, voire pas du tout, avant trois ans.

Les pistes ouvertes, d’une part, par Nadine Morano, d’autre part, par Monique Papon et Pierre Martin dans leur rapport, doivent être examinées. Lorsque l’on y verra clair et que l’on sera d’accord sur ce qu’il faut faire à l’échelle du pays, l’éducation nationale prendra ses responsabilités. Mais je vois mal comment nous pourrions décider aujourd'hui de verser à toutes les communes une subvention pour accueillir autant d’élèves de dix-huit mois à trois ans : si vous attendez de moi un engagement de cet ordre, vous risquez d’être déçue !

Le pays tout entier se pose la question du traitement de la petite enfance, question qu’il ne s’était d’ailleurs jamais vraiment posée au fond, contrairement, je l’ai déjà dit, à nombre d’autres pays. En attendant qu’il y réponde, l’éducation nationale assurera dans les conditions actuelles l’accueil en maternelle lors de la prochaine rentrée.

Mme la présidente. La parole est à M. Robert Laufoaulu.

M. Robert Laufoaulu. Monsieur le ministre, à Wallis-et-Futuna, l’enseignement primaire est délégué entièrement à la mission catholique.

À cette fin, la direction de l’enseignement catholique reçoit une subvention du ministère de l’éducation nationale. Or le rapport élaboré par le vice-rectorat de Wallis-et-Futuna sur l’état de l’enseignement primaire fait ressortir que la subvention accordée actuellement suffit à peine à satisfaire 50 % des besoins, même si les effectifs ont baissé. On peut imaginer la qualité de l’enseignement dispensé avec des moyens aussi insuffisants !

Monsieur le ministre, que pensez-vous de cette situation pour 2009 et pour les années suivantes.

Par ailleurs, je voudrais attirer votre attention sur la dette du territoire de Wallis-et-Futuna envers les établissements d’enseignement privé de Nouvelle-Calédonie et plus particulièrement envers la direction de l’enseignement catholique.

Cette dette, actuellement d’un montant d’environ 1 million d’euros, résulte du non-paiement, depuis maintenant trois ans, d’une subvention à verser au titre du fonctionnement des internats.

Ces internats privés accueillent en grand nombre nos élèves, obligés d’aller poursuivre leurs études en Nouvelle-Calédonie parce que les filières de formation manquent à Wallis-et-Futuna. L’enseignement public de Nouvelle-Calédonie ne pouvant les recevoir, la solution du privé reste la seule à la disposition des familles.

S’il est normal qu’aussi bien la collectivité que les familles de Wallis-et-Futuna assument les frais de cantine et d’hébergement de ces jeunes, nous demandons, monsieur le ministre, l’aide de l’État pour la prise en charge des frais dont je viens de parler, aide qui se justifierait par le manque d’offre de formation sur le territoire.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Darcos, ministre. Monsieur Laufoaulu, nous connaissons la situation et les difficultés particulières de Wallis-et-Futuna.

Le Gouvernement a délégué une mission de service public à l’enseignement catholique, qui perçoit un forfait pour les élèves qu’il scolarise, système ancien et qui fonctionne parfaitement bien.

Nous avons récemment abondé ce forfait pour améliorer la rémunération des services de la direction de l’enseignement catholique. Il m’a été dit que des ajustements étaient nécessaires et je prévois donc d’étudier le versement d’une subvention exceptionnelle avant la fin de l’année. Cette subvention sera déléguée par le vice-recteur, de sorte qu’il n’y aura pas de solution de continuité dans le versement du forfait que nous devons à la direction de l’enseignement catholique.

Plus complexe est la question des élèves qui poursuivent leur cursus au lycée dans le privé en Nouvelle-Calédonie.

Il existe à cet égard un différend qui porte sur la prise en charge des dépenses de fonctionnement des restaurants scolaires et des internats, couvertes par les trois provinces de Nouvelle-Calédonie et le territoire de Wallis-et-Futuna au prorata du nombre des élèves originaires de chacune de ces collectivités.

La question de la prise en charge de ces dépenses devrait, elle aussi, trouver une issue favorable. Une convention spécifique va en effet être signée entre les deux territoires, car il s’agit d’écoles hors contrat, qui ne peuvent de ce fait bénéficier du forfait d’externat financé par l’État.

Soyez donc rassuré, monsieur le sénateur, quant à l’attention que nous portons à ces questions et à notre volonté de faire en sorte que l’accueil effectif des jeunes de Wallisiens en Nouvelle-Calédonie se fasse dans les meilleures conditions possibles : mon ministère n’aura pas la moindre réticence à apporter son soutien et à faire le nécessaire en ce qui concerne le versement du forfait.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Domeizel.

M. Claude Domeizel. Monsieur le ministre, vous paraissez agacé par le fait que les questions soient toujours les mêmes…

M. Xavier Darcos, ministre. Non !

M. Claude Domeizel. …et vous vous bornez chaque fois à dire que vous avez déjà répondu. Mais, monsieur le ministre, si les questions sont toujours les mêmes, c’est que les inquiétudes sont largement partagées, et cela sur toutes les travées !

Le fait que je passe en douzième position va en tout cas me permettre d’axer mes questions davantage en fonction de vos réponses que du budget lui-même.

S’agissant d’abord de la suppression des RASED, si j’ai bien compris, 3 000 maîtres spécialisés, puis 8 000 les deux années suivantes, vont être affectés dans des classes, devant des élèves. Pourront-ils vraiment exercer le métier qu’ils exerçaient dans les RASED ? J’espère, monsieur le ministre, que c’est un problème dont vous avez conscience !

S’agissant ensuite de la semaine des quatre jours, à titre personnel, je considère depuis toujours que le samedi matin est un moment privilégié dans les écoles primaires, moment pendant lequel on peut appliquer une pédagogie un peu différente : comme on le disait avant du samedi après-midi, mais l’image s’applique au samedi matin, c’est un peu le « dimanche de l’école ».

Dans le cadre de cette semaine de quatre jours, vous instaurez l’aide personnalisée aux élèves en difficulté, ce qui soulève, reconnaissez-le, monsieur le ministre, divers problèmes, et d’abord pour les enfants eux-mêmes.

Intervenant hors du temps scolaire, que ce soit le matin, entre midi et deux heures ou le soir, l’aide est donc dispensée à des moments où ces enfants – et ceux-là plus encore que les autres – ont besoin de « se défouler ».

Quant aux parents et aux services des collectivités locales, qui peinent déjà à coordonner les diverses obligations et activités – transport, restauration, activités périscolaires, aide au devoir, etc. –, ils auront encore plus de mal à s’organiser avec des horaires constamment variables au fil du temps.

Par ailleurs, monsieur le ministre, je vous avais interrogé en mai dernier au sujet de la situation des ATSEM, les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles. J’attends toujours, et de nombreux maires avec moi, une réponse qui prenne en compte les obligations statutaires des communes à l’égard de ces fonctionnaires.

Mme la présidente. Vous avez dépassé votre temps de parole, monsieur Domeizel.

M. Claude Domeizel. Je vais essayer de résumer la suite de mon intervention, madame la présidente !

Monsieur le ministre, certains de ces maires que je viens d’évoquer sont poursuivis devant les tribunaux parce qu’il refuse le service minimum d’accueil, et je veux revenir sur ce point.

Ajoutées aux menaces, les déclarations du Premier ministre, du Président de la République, de différents ministres et les vôtres, hier encore, ne font qu’accroître la confusion et renforcer l’exaspération des maires.

Il y aurait aujourd'hui 500 contentieux : c’est un peu trop ! Monsieur le ministre, lorsqu’on s’est trompé, il faut savoir le reconnaître. Depuis le début, nous sommes nombreux à vous dire que le service minimum ne fonctionnera pas, comme nous l’avions fait pour le CPE. Dans ce dernier cas, d’ailleurs, le Gouvernement et le Président de la République étaient revenus en arrière. Faites pareil pour le service minimum !

Alors, monsieur le ministre, oui ou non, le travail des RASED sera-t-il organisé dans les conditions que nous souhaitons ?

M. Jean-Claude Carle. Cela fait dix fois qu’on en parle !

M. Claude Domeizel. Oui ou non, la semaine de quatre jours sera-t-elle obligatoire ?

Oui ou non, comptez-vous persister à mettre en place des mesures désastreuses, génératrices d’inégalités, qui suscitent une large réprobation et, surtout, qui laisseront sur le bas-côté les élèves en vraie difficulté ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Darcos, ministre. Monsieur Domeizel, je ne suis nullement agacé, mais je suis obligé de vous dire qu’il y a peu de chances pour qu’en quelques minutes ou dans une même journée je fasse, à la même question, deux réponses différentes.

En conséquence, vous me permettrez de vous renvoyer à ce que j’ai dit, déjà plusieurs fois, à propos des RASED, ce qui évitera à la Haute Assemblée de m’entendre répéter ce que, visiblement, elle a parfaitement compris.

En ce qui concerne la semaine de quatre jours, j’ai également déjà dit que les conseils d’école avaient majoritairement opté pour ce choix, qui présente des avantages et des inconvénients.

Les élèves auront donc six heures de cours par jour et vingt-quatre heures de cours par semaine. Il en est ainsi depuis 1887 : il me paraît donc difficile de dire que c’est épouvantable !

La complexité réside dans l’organisation du soutien, mais j’ai répondu tout à l’heure qu’il appartenait aux équipes pédagogiques de la définir.

Quant aux ATSEM, ce sont des fonctionnaires municipaux et je ne peux guère répondre à une question portant sur la manière dont ces agents territoriaux sont gérés, d’autant que la manière d’organiser les services est très variable selon les communes et selon les usages.

Enfin, selon vous, nous nous serions trompés avec le SMA. Pour ma part, je suis un démocrate et j’estime que le législateur ne se trompe pas : il vote la loi et, lorsque la loi est votée, elle est appliquée, ce qui est le cas, je le répète, dans 10 000 communes sur 12 000.

J’ajoute que l’Association des maires de France a mené une enquête auprès des maires qui appliquent le SMA, lesquels ont majoritairement répondu que le système ne présentait pas de difficultés et qu’ils en étaient satisfaits.

Vous n’approuvez pas le SMA, monsieur Domeizel : c’est votre droit. Vous dites qu’il y a des difficultés : il y en a, mais nous travaillons à les résoudre. Nous nous sommes vus longuement hier avec des responsables de l’Association des maires de France et nous nous revoyons la semaine prochaine.

Mais, puisque vous aimez la clarté, monsieur Domeizel, soyons clairs : contre les communes qui décideront que la loi ne doit pas être appliquée, j’engagerai des poursuites, car aucune raison ne justifie que des élus décident de ne pas appliquer la loi.

M. André Dulait. Vous avez raison !

Mme la présidente. Je vous donne la parole pour la réplique, monsieur Domeizel, mais en vous appelant à la brièveté, car vous avez tout à l'heure largement dépassé votre temps de parole.

M. Henri de Raincourt. C’était interminable ! Et inintéressant !

M. Claude Domeizel. Il s’agit tout de même de sujets importants, madame la présidente.

Monsieur le ministre, premièrement, vous ne répondez toujours pas aux questions et, deuxièmement, si je vous ai bien compris, tout va bien !

Je me permets de vous rappeler quelle était l’ambiance au congrès des maires, où le Premier ministre lui-même a été hué…

M. Henri de Raincourt. Le Président de la République a été très applaudi !

M. Claude Domeizel. C’est bien la preuve que l’ensemble des maires vivent très mal ce qui se passe dans les écoles de leur commune.

M. Jean-Claude Carle. Ce n’est plus vrai !

Mme la présidente. La parole est à M. André Ferrand.

M. André Ferrand. Monsieur le ministre, les trois points que j’aborderai sont ne sont pas du même ordre que ceux qui ont été soulevés, ne serait-ce que parce que je tiens à exprimer en cet instant le point de vue d’un sénateur des Français établis hors de France qui va à la rencontre de nos communautés résidant à l’étranger.

Cela me permet d’abord de constater que nos positions, en particulier sur le plan économique, se dégradent sérieusement dans le contexte de la mondialisation.

Après avoir observé le comportement des autres habitants de la planète, il me semble que nous avons un sérieux problème de culture !

Pour faire de nos compatriotes des citoyens du XXIe siècle armés pour la mondialisation, on devrait d’abord leur apprendre très tôt l’ouverture sur le monde et l’internationalisation, afin qu’ils prennent conscience qu’il existe autre chose au-delà des frontières de l’Hexagone.

Ensuite, il faudrait leur donner d’acquérir le goût d’entreprendre, leur faire acquérir un esprit d’entrepreneur.

Enfin, il est essentiel qu’ils apprennent les langues et, en particulier, qu’ils aient une aisance normale dans un anglais pratique, courant.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. André Ferrand. Monsieur le ministre, vous avez déjà fait très sérieusement bouger les lignes. J’approuve et je soutiens totalement votre action.

Cependant, il y a urgence, car nos positions s’érodent gravement : nous n’avons pas une compréhension suffisante du monde actuel. Il convient donc de presser le mouvement, et j’aimerais connaître votre avis sur ce premier point.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. André Ferrand. Mon deuxième point a trait à l’enseignement français à l’étranger, qui connaît un succès extraordinaire et qui constitue un instrument d’influence exceptionnel. Nous avons accueilli dans nos écoles, à la rentrée dernière, 7 000 élèves supplémentaires, dont plus de 4 000 Français.

Mais l’argent public est de plus en plus rare et, malheureusement, il n’est pas possible à l’État de soutenir comme il le faudrait le nécessaire développement de notre enseignement à l’étranger.

Grâce au ciel, il existe de plus de plus d’initiatives locales. Elles consistent à créer des établissements scolaires français homologués par l’éducation nationale. Mais les parents qui prennent l’initiative de la création de ces écoles ont besoin d’enseignants. Or ils ont du mal à trouver des enseignants titulaires de l’éducation nationale qui soient « exportables ».

Ma question est donc la suivante : n’est-il pas possible de constituer un corps de titulaires de l’éducation nationale susceptibles d’être détachés administrativement ou mis à la disposition de ces établissements ? Tout le monde y gagnerait : les enseignants désirant partir à l’étranger et, bien sûr, les établissements.

Enfin, monsieur le ministre, je reviens de Madagascar.

M. Xavier Darcos, ministre. Vous avez de la chance !

M. André Ferrand. Oui, une chance exceptionnelle !

Je m’adresse en l’occurrence aussi au président de la commission des affaires culturelles, M. Jacques Legendre, grand héraut de la francophonie.

À l’automne 2010, le sommet de la francophonie aura lieu à Madagascar. L’annonce de cet événement a déclenché un véritable coup de tonnerre : le Président Ravalomanana, qui venait d’introduire l’anglais comme langue officielle à Madagascar et dont l’épouse, dit-on, ne parle pas encore tout à fait bien notre langue, fait un virage à 180 degrés en faveur du français ! Il compte absolument sur nous, j’en témoigne.

Nous avons deux ans devant nous pour mettre les bouchées doubles ! C’est une chance historique pour combler le retard accumulé pendant la période de malgachisation.

Monsieur le ministre, votre département est-il prêt à jouer tout son rôle ? En effet, il faudra se montrer très actif, et ce en particulier grâce au rectorat voisin de la Réunion. Il y a à cet égard une forte attente de la part des Malgaches. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. Jean-Claude Carle et Mme Nathalie Goulet. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Darcos, ministre. En ce qui concerne la question de la mobilité et de l’adaptation de nos jeunes au monde réel, je suis d’accord avec vous : les voyages et la comparaison avec d’autres modèles sont nécessaires. Il s’agit d’ailleurs de l’un des points de départ des réformes que nous engageons. Il est clair que nous ne pouvons nous penser comme si nous étions uniques et que nous avons besoin de nous comparer aux autres.

La présidence française de l’Union européenne a permis aux vingt-sept ministres de l’éducation de se mettre d’accord – et cela explique que je n’aie pas pu assister l’autre jour à la réunion l’Association des maires de France – sur ce que l’on appelle le communiqué de Bordeaux, qui sera bientôt adopté par le Conseil des ministres européens. Ce communiqué repose sur trois grands principes : mobilité pour tous – tous ceux qui le veulent, qu’il s’agisse d’élèves, d’apprentis ou d’enseignants –, validation commune des acquis de l’expérience et des diplômes par le dispositif ECVET – European Credit for Vocational Education and Training –, et garantie d’assurance qualité, permettant, dans tous les pays de l’Europe, qu’une formation soit reconnue comme qualifiante et validée, selon une sorte de co-validation.

Nous progressons beaucoup, malgré le principe de subsidiarité qui est un peu compliqué.

Concernant l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, nous entretenons des relations soutenues avec le ministère des affaires étrangères à ce sujet. La question du détachement est extrêmement complexe. D’ailleurs, une réunion s’est tenue la semaine dernière sous la présidence de Nicolas Sarkozy, avec le ministre des affaires étrangères et moi-même, pour réfléchir à l’évolution de ces questions et aux difficultés qui se posent, en particulier au droit d’écolage, dont les familles sont désormais dispensées.

Je ne peux pas répondre ici de manière définitive à la question de la mise à disposition de manière définitive ou en détachement de personnels de l’éducation nationale auprès de l’AEFE. Si vous le permettez, monsieur Ferrand, nous en parlerons d’une manière beaucoup plus ample lorsque l’occasion se présentera. Il s’agit en effet d’un sujet d’une technicité folle ! Mais vous le savez très bien, ayant d’ailleurs vous-même rédigé un rapport qui y était consacré.

Ayant été ministre de la coopération et de la francophonie, je suis moi aussi persuadé que notre réseau des lycées français à l’étranger est un outil extrêmement fécond. Le ministère de l’éducation nationale est très attentif à cette question et nous sommes ouverts à la discussion.

Enfin, le projet du Président Ravalomanana concernant la « re-francophonisation » de Madagascar, est en effet très important. Je suis prêt à y apporter tout mon soutien. Cependant, je ne peux, pour l’instant, que vous payer de bonnes paroles, car je ne sais pas exactement à quoi cela nous engage ; cela relève d’ailleurs plutôt de mon collègue M. Joyandet.

Il est fondamental de replacer la francophonie dans l’océan Indien. Non seulement Madagascar est le principal territoire dans cette partie de l’océan Indien mais il existe, au nord, une structure, la Commission de l’océan Indien, rassemblant les Comores, Mayotte, la Réunion, l’île Maurice et les Seychelles, où une politique francophone très développée. Madagascar doit pouvoir s’adosser à cette structure, pour le bénéfice de tous.

Je vous écoute donc avec beaucoup de faveur, mais sans pouvoir vous en dire plus sur des décisions susceptibles d’avoir des conséquences budgétaires précises.