M. le président. Le sous-amendement n° 428, présenté par MM. P. Dominati, Bécot et Houel, est ainsi libellé :

Dans le second alinéa de l'amendement n° 49, après les mots :

de documentaires

insérer les mots :

, résultant le cas échéant d'un travail d'investigation,

La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Je suggère de préciser, dans l’amendement de la commission, que les documentaires en question peuvent résulter d’un travail d’investigation.

Nous avons un peu de mal à comprendre la problématique puisque, d’un côté, on nous affirme que tout est réglé et, de l’autre, il est tout de même nécessaire d’apporter des précisions.

Je contribue d’une manière positive au travail législatif en proposant ce sous-amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux sous-amendements ?

M. Michel Thiollière, rapporteur. Mme la ministre, par son sous-amendement, va dans le sens souhaité par la commission et apporte une précision utile qui règle la question de façon plus fine.

Cela étant dit, il faut rester vigilant. C’est un secteur qui évolue, dans lequel nous devons nous assurer que le « documentaire de création » est bien de la création et n’usurpe donc pas son nom.

Mme Christine Albanel, ministre. Absolument !

M. Michel Thiollière, rapporteur. Il convient de comparer les déclarations d’une chaîne à la réalité du documentaire, et seul le CSA est à même d’en juger, de manière claire, en fonction de la loi que nous votons.

Si le texte laisse une marge d’interprétation trop large – et c’est pourquoi nous ne pouvons accepter le sous-amendement de notre collègue Philippe Dominati –, le CSA n’aura pas de ligne directrice suffisamment claire et des œuvres qui n’ont pas vocation à entrer dans le champ des documentaires de création pourront s’y engouffrer. Nous avons donc ressenti le besoin de délimiter une frontière souple, mais qui permette de distinguer l’œuvre de création.

Voilà les raisons pour lesquelles nous souscrivons au sous-amendement de Mme la ministre et nous ne pouvons qu’émettre un avis défavorable sur le sous-amendement n° 428.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Albanel, ministre. J’adhère tout à fait aux propos que vient de tenir Michel Thiollière. Il importe de conserver le système actuel permettant au CSA et au Centre national de la cinématographie, le CNC, d’évaluer au cas pas cas, en fonction des projets et des spécificités, ce qui relève, ou non, des documentaires de création. Avec ce mécanisme, certains reportages diffusés au sein de magazines peuvent être considérés comme des documentaires de création.

Il convient donc de rester dans la logique de ce qui existe et de ce qui a été voté, et qui s’inscrivait d'ailleurs dans la continuité des décrets pris à l’époque par Mme Tasca en vue de soutenir la production indépendante, ce qui a été fait avec succès.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 463.

Mme Catherine Tasca. La question de la définition de l’œuvre est tout à fait centrale, en particulier pour toute une série de dispositifs financiers de soutien à la création. Nous devons donc être très vigilants sur toute évolution de la définition de l’œuvre.

Comme l’a rappelé Mme la ministre, nous sommes parvenus à un consensus sur la définition de l’œuvre patrimoniale, sur lequel nous nous fondons depuis maintenant bien longtemps.

L’introduction des documentaires de création dans cette définition de l’œuvre soulève une question extrêmement délicate et controversée. Elle semble abordée de façon positive dans des accords signés entre les professionnels, et on peut donc aller dans ce sens.

L’extension de la notion d’œuvre aux documentaires de création inclus dans certaines émissions qui ne relèvent pas en elles-mêmes de la création ne doit pas être présentée uniquement comme une concession faite à M6 ou comme le dépassement des critères posés par TF1, car c’est bien de cela qu’il s’agit.

Cette ouverture peut donner aux nouvelles chaînes – et peut-être demain à de futures chaînes – la possibilité de s’engager davantage dans le domaine des œuvres de création. Nous le savons, elles ne disposent pas de moyens financiers suffisants pour investir dans l’animation et dans la fiction, dont le coût est très élevé. Les documentaires de création pourraient donc devenir – et cela intéresse les auteurs, les réalisateurs et l’ensemble de la filière artistique – un important espace d’écriture et de production d’œuvres, y compris pour des chaînes qui aujourd’hui ne prennent pas rang dans le domaine de la création.

Voilà la raison pour laquelle, en restant d’une extrême vigilance sur les critères qui seront appliqués à cette ouverture, nous soutiendrons l’amendement de la commission précisé par le sous-amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.

M. Yves Pozzo di Borgo. Si j’ai bien compris, le sous-amendement du Gouvernement vise à supprimer le mot « documentaires » dans l’amendement de la commission. Il s’agirait donc d’écrire dans la loi : « y compris de ceux qui sont insérés au sein d’une émission autre qu’un journal télévisé ou une émission de divertissement ».

Si je n’avais pas écouté vos arguments très pertinents, madame la ministre, je n’aurais rien compris ! Comment la loi pourrait-elle être comprise par 64 millions de Français si, comme c’est parfois le cas, nous ne la comprenons pas nous-mêmes ? Je vous le dis franchement, il faudrait que la loi soit plus claire et moins complexe. Utilisons des mots simples. Le mot  « documentaire » dit bien ce qu’il veut dire.

De même, je ne vois pas en quoi le sous-amendement n° 428 serait contradictoire. On peut tout à fait préciser que le documentaire résulte, le cas échéant, d’un travail d’investigation. La formulation est claire.

Cela étant dit, nous voterons bien sûr en faveur de cette disposition.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Albanel, ministre. Monsieur Pozzo di Borgo, tout cela paraît compliqué, je vous l’accorde, mais les choses sont plus claires si l’on relit l’ensemble de l’alinéa concerné de l’article 27 de la loi du 30 septembre 1986, modifié par l’amendement sous-amendé : « En matière audiovisuelle, cette contribution doit comporter une part significative dans la production d’œuvres de fiction, d’animation, de documentaires de création, y compris de ceux qui sont insérés au sein d’une émission autre qu’un journal télévisé ou une émission de divertissement, de vidéo-musiques et de captation ou de recréation de spectacles vivants ».

Mme Catherine Tasca. L’important est qu’il s’agisse des documentaires de création, et seulement d’eux.

M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote.

M. Jack Ralite. Malgré les apparences, la question qui est évoquée ici est importante : il s’agit de la notion d’œuvre et, consécutivement, du droit d’auteur.

Lors de l’examen du projet de loi sur la télévision du futur défendu par votre prédécesseur, madame la ministre, nous avions débattu pendant plusieurs heures avant de nous mettre d’accord sur une approche sérieuse. L’Assemblée nationale avait fait de même. Aussi, le Parlement, unanime, s’était prononcé sur une définition du droit d’auteur, à laquelle, comme d’autres, d’ailleurs, je n’avais pas peu contribué.

Cependant, le décret dont ces dispositions devaient faire l’objet n’ayant pas été publié, la question se trouve de nouveau posée aujourd'hui.

Certains d’entre vous ont peut-être acheté à Noël les DVD de l’émission Cinq colonnes à la une. En les visionnant, on a bien le sentiment de regarder une œuvre. Les journalistes qui réalisaient cette émission – Pierre Dumayet, Pierre Desgraupes – étaient des auteurs, ainsi que les réalisateurs des reportages comme Jacques Krier ou Paul Seban.

Le documentaire de création qui est intégré dans une émission ne relevant pas elle-même de la création est facilement identifiable. Madame la ministre, monsieur le rapporteur, il faut entendre l’exigence qui a été exprimée par Mme Tasca.

J’ai reçu récemment les professionnels du secteur et j’ai été sensible à leurs arguments, mais il me semblait qu’il était difficile de revenir au détour d’un texte dont ce n’était pas l’objet sur une question qui avait occupé longuement le Parlement.

Je me doutais bien, pourtant, que la définition de l’œuvre serait amenée à évoluer. Rappelons-nous que les œuvres cinématographiques n’ont été reconnues comme telles qu’au moment du cinéma parlant ! Tous les grands films muets qui font notre bonheur lorsqu’ils passent dans les rares ciné-clubs restants ou que la télévision consent à diffuser étaient considérés en leur temps comme des spectacles de foire ! Vous voyez que les notions peuvent évoluer.

Je me souviens que Valéry, dans sa correspondance avec Benjamin, qui réfléchissait beaucoup sur ces questions, écrivait que l’on disposerait peut-être un jour d’un outillage de création qui modifierait le sens même du mot « création ». Cette notion est donc constamment en évolution, et c’est par des combats – des combats fondamentaux – que, petit à petit, telle ou telle dimension, jusque-là regardée de loin, se met à être regardée de près.

Comme je trouvais qu’il était curieux d’utiliser pour faire évoluer certaines questions une loi traitant d’un tout autre sujet, j’avais décidé de ne pas prendre part au vote.

Cependant, je viens d’entendre les arguments présentés et je vois bien qu’à partir de l’intervention de Mme la ministre le ciblage est d’une réelle précision si on y ajoute la vigilance, et surtout si on ajoute les accords interprofessionnels qui ont été évoqués D’ailleurs, eux aussi posent la question de l’utilisation de la loi. Parmi ces accords, il y a l’accord avec M6, qui n’a pas été facile à obtenir. S’il y a des choses qui me choquent dans cet accord, j’ai appris qu’il y avait une espèce de flou artistique dans les pourcentages de M6. Ce flou a été convenu pour aborder la question, comme cela a été souligné.

Alors, si c’est une tendance, si elle est bien sériée et si on y ajoute notre vigilance – l’accord a été signé par la société des auteurs et compositeurs dramatiques, la SACD, qui est sans doute la plus vigilante –, je pense qu’on peut effectivement, en tout cas pour ce qui me concerne, passer du « Je ne prends pas part au vote » au « Je prends part au vote », mais strictement sur l’approche qu’a donnée la ministre. Je dis bien « strictement ».

Monsieur Yves Pozzo di Borgo, je voudrais vous faire remarquer qu’au début, l’offensive est partie sur Popstars, pendant l’été. J’avais d’ailleurs rédigé un article, qui a été publié à la une du journal Le Monde, sur le thème « ça, jamais ! » Je disais « ça, jamais ! » à l’époque, mais cela vaut aussi pour aujourd'hui.

Donc, c’est une question de langue stricte. Je dirais presque de grammaire, de fidélité à l’expression de notre langue.

Dans ces conditions, au nom de mon groupe, j’émets un vote favorable sur le correctif qui vient d’être apporté par Mme la ministre.

M. le président. Mes chers collègues, avant de procéder au vote, je souhaite, dans un souci de clarté, vous apporter quelques précisions. Je ne voudrais pas que certains de nos collègues apprennent par surprise que leurs amendements sont tombés.

Le sous-amendement n° 428 n’est pas contradictoire avec le sous-amendement qui a été déposé par le Gouvernement.

En revanche, si nous adoptons l’amendement n° 49 modifié par le sous-amendement du Gouvernement, les amendements nos 182 rectifié et 211, présentés respectivement par M. Pozzo di Borgo et par Mme Dumas, tomberont.

Je souhaite donc que les auteurs de ces deux amendements en soient prévenus, si, comme c’est probable, le sous-amendement du Gouvernement et l’amendement n° 49 font l’objet d’une approbation assez massive. Et s’ils souhaitent s’exprimer, je leur donnerai la parole.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Thiollière, rapporteur. Je souhaite apporter quelques éléments de clarification, puisque notre collègue Pozzo di Borgo a rappelé la nécessité d’élaborer des lois compréhensibles par un maximum de nos concitoyens.

En l’occurrence, de quoi s’agit-il ? Nous voulons permettre aux chaînes de télévision d’inclure des documentaires au sein de leur quota d’œuvres audiovisuelles. Telles sont les données du problème.

Comme le rappelait Mme la ministre, en amont, un certain nombre de ces œuvres sont aidées en amont par le CNC, qui se détermine selon ses propres critères.

En revanche, en aval, une fois que le décompte est effectué, certaines œuvres peuvent être inclues dans le quota, tandis que d’autres non. Notre souci actuel est de faire en sorte que certains documentaires puissent être comptabilisés par le CSA au titre des œuvres audiovisuelles. Cela vaudrait même pour des documentaires insérés dans une œuvre ou une émission plus larges. De même qu’on peut trouver une pépite dans un fleuve, on peut trouver un poème qui serait, en soi, une œuvre dans un roman.

Il s’agit donc de ne pas exclure a priori une œuvre sous le seul prétexte qu’elle serait insérée dans une autre. C’est dans cette direction-là que nous souhaitons aller.

Cela dit, puisqu’on définit plus précisément une œuvre audiovisuelle, nous voulons pouvoir rejeter, le cas échéant, ce qui n’en est pas. C’est ainsi que nous voulons distinguer les œuvres susceptibles d’être comptabilisées dans le quota prévu par le CSA et les autres.

M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas.

Mme Catherine Dumas. M. le rapporteur vient à l’instant de résumer, de manière fort claire, la pensée commune. Nous partageons le même souci : il faut éviter d’exclure certains documentaires du quota d’œuvres audiovisuelles.

En revanche, enlever le terme « documentaire » ne permet pas, me semble-t-il, d’atteindre l’objectif visé, puisque le texte devient moins précis.

C’est pourquoi l’amendement n° 211 vise, à l’instar de ce qui a été proposé par mon collègue Philippe Dominati, à insérer les mots : « le cas échéant résultant d’un travail d’investigation ». D’ailleurs, pour répondre à M. Jack Ralite, j’avais même ajouté les mots : « ou favorisant la compréhension du monde à l’exclusion toutefois de ceux insérés dans les journaux télévisés et les émissions de divertissement ».

Je propose donc que les documentaires résultant d’un travail d’investigation soient inclus dans le périmètre des œuvres dites patrimoniales. À mon avis, nous avons plus de chances d’obtenir des assurances sur ce point en le précisant clairement dans la loi.

M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.

M. Yves Pozzo di Borgo. Je remercie Mme la ministre et M. le rapporteur des clarifications qu’ils viennent de nous apporter, et je voterai le sous-amendement n° 463 et l’amendement n° 49, ce qui aura pour effet de faire tomber mon propre sous-amendement.

En revanche, tout comme ma collègue Catherine Dumas, j’aimerais que le dispositif proposé par M. Philippe Dominati figure dans la loi. Après tout, plus une règle est simple, plus on a intérêt à l’énoncer.

M. Charles Revet. Bien sûr !

M. Yves Pozzo di Borgo. M. Dominati souhaite que l’on mentionne les œuvres résultant d’un « travail d’investigation ». Je suggère que nous lui donnions satisfaction. En quoi une telle précision serait-elle gênante ?

Mes chers collègues, aujourd'hui, nombre de nos concitoyens ne lisent plus les lois. Si nous voulons qu’ils les lisent de nouveau, adoptons des textes législatifs simples. En l’occurrence, je souhaite simplement que nous fassions référence aux documentaires d’investigation.

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. En ce domaine, comme en bien d’autres, le travail de la commission, complété par les précisions du Gouvernement, permet, me semble-t-il, une réelle modernisation, tout en gardant en tête le souci de protéger la création. Il s’agit donc d’un bon équilibre.

Monsieur Pozzo di Borgo, sur un sujet aussi complexe que la protection de la création en matière culturelle, il est quelque peu démagogique de critiquer la difficulté pour les citoyens de comprendre la loi.

M. David Assouline. Si ! Comme l’a souligné M. Ralite, si les deux assemblées ont dû débattre pendant des heures de la définition de l’œuvre de création, c’est bien parce que le sujet est complexe et évolutif.

Nous nous sommes mis d’accord sur une définition générale, qui, en plus, n’est pas trop restrictive. À présent, pour éviter toute ambiguïté, la commission propose qu’une œuvre de création puisse être insérée dans une émission plus large, où il n’y aurait pas seulement de tels programmes.

À partir du moment où elles pourront comptabiliser les œuvres de création intégrées dans des émissions ne relevant pas de la création, certaines chaînes, comme M6, qui fait des efforts en la matière, auront tendance à proposer davantage de programmes de cette nature, ce qui aura pour effet de tirer vers le haut les émissions concernées. Cette formule sera profitable non seulement aux auteurs et aux créateurs, qui disposeront de plus de plages horaires et de cadres d’expression, aujourd’hui très limités, mais également aux émissions elles-mêmes, donc à la qualité de l’audiovisuel public en général.

Mais si nous commençons à remettre en cause ces avancées en adoptant des formules imprécises pour caractériser l’œuvre de création, ce sont les créateurs qui vont morfler. Ils ne sont pas dans un rapport de force favorable face aux chaînes de télévision, dont le principal objectif est toujours de « vendre ».

Certains programmes plaisent au public sans forcément être des œuvres de création. Il ne faudrait pas que l’on dissolve progressivement la notion, faute de quoi nous aurions une sorte de fourre-tout qui s’abriterait derrière la création, notamment via le concept d’« investigation ».

En outre, avant de chercher à le cataloguer parmi les œuvres de création, il faudrait d’abord que l’on définisse entre nous ce qu’est un travail d’investigation.

M. Yves Pozzo di Borgo. Laissez cela aux philosophes !

M. David Assouline. Ce n’est pas de la philosophie, mon cher collègue, c’est très concret !

Le problème vient également du traitement de l’information. Nous le savons, nombre d’émissions dites « d’investigation » sont en réalité approximatives, parfois à mi-chemin entre le documentaire et la fiction, et relativement subjectives.

Sur un sujet aussi fondamental, je souhaite que nous n’adoptions pas des dispositions susceptibles de mettre la création en danger. Dans le même temps, je ne voudrais pas que, par un réflexe élitiste, nous refusions de faire bouger les lignes. Je crois que la solution de la commission permet de faire bouger les lignes. Il y a un effort de modernisation et il est encadré. Je dis « banco » !

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.

M. Philippe Dominati. Je souhaite en fait obtenir des précisions sur l’ordonnancement des débats.

Pour ma part, j’étais assez séduit par l’explication de M. Ralite. Un certain nombre d’émissions ont été mentionnées, ce qui a permis d’approfondir les notions d’œuvre de création, et de travail de documentaire ou d’investigation.

Or la nature de ces émissions peut évoluer à l’avenir. Contrairement à ce que vous dites, cher collègue Assouline, s’il y a un doute, voire un malaise, c’est parce que nos travaux, malgré le temps que nous y avons consacré, n’ont pas permis de parvenir à une définition satisfaisante de la notion.

M. Ralite a évoqué le magazine Cinq colonnes à la une. Nous le savons, dans ce type d’émissions, il y a toujours quelques numéros emblématiques du travail d’investigation sur un sujet plus poussé ou plus intéressant pour la société que d’autres. Dans de telles conditions, on peut évidemment parler d’œuvres.

Certains ont manifesté leur volonté d’éviter toute ambiguïté sur des émissions existantes. Nous essayons d’apporter des précisions, ce qui est notre rôle de législateur.

Constater que la notion est trop floue n’est pas faire preuve de démagogie. Or, puisque nous voulons éviter toute ambiguïté, précisons sa définition dans la loi. Au moins, ce sera clair.

C’est l’objet de mon sous-amendement. Intégrons le travail d’investigation dans notre définition. Je ne vois pas en quoi cela poserait problème. Tout comme je ne vois pas en quoi le fait de reconnaître que des ambiguïtés demeurent après des heures de débat serait fâcheux.

Pour ma part, je souhaiterais obtenir des précisions claires en ce qui concerne le travail d’investigation. Nous avons abordé les sous-amendements et des questions ont été adressées au Gouvernement. J’aimerais avoir une réponse claire avant de voter.

M. le président. Monsieur Dominati, s’agissant de l’ordonnancement du débat, je mettrai d’abord aux voix le sous-amendement du Gouvernement, puis votre sous-amendement et, enfin, l’amendement de la commission.

La parole est à M. Robert del Picchia, pour explication de vote.

M. Robert del Picchia. Je suis un peu gêné par cette discussion. J’ai l’impression que nous nous laissons entraîner sur des débats qui sortent largement du domaine de la loi.

Nombre de dispositions sont insérées dans le projet de loi et nous sommes amenés à nous prononcer sur des questions très techniques qui, à mon avis, ne relèvent pas de la loi.

Dans la mesure où il va y avoir des évolutions technologiques fortes en la matière dans les années à venir, je pense que la loi doit poser des principes clairs sans entrer dans les détails. Laissons cela aux décrets d’application ou aux négociations qui devront être menées notamment avec le CSA.

J’ai l’impression que nous allons un peu trop loin. Si nous examinons les pratiques en vigueur chez nos voisins, qui ne font pas toujours plus mal que nous, nous remarquons que les lois sur l’audiovisuel sont beaucoup plus simples et plus faciles à faire entrer en application.

M. Jack Ralite. Ce sont les pays du droit moral !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. Je partage la préoccupation de M. del Picchia.

Je rappelle que, en 2007, le débat parlementaire n’avait pas été suffisamment précis, ce qui fait que le décret annoncé n’a jamais été pris.

Votre commission, qui avait cette préoccupation à l’esprit, a essayé, là encore, d’arriver à un équilibre par cet amendement. Je souhaite qu’elle soit suivie, car il faut sortir de la situation née des débats précédents, sans aller toutefois trop loin dans la précision, puisque ce n’est pas le rôle de la loi.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 463.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 428.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 49, modifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 182 rectifié et 211 n'ont plus d'objet.

L'amendement n° 50, présenté par Mme Morin-Desailly et M. Thiollière, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit la seconde phrase du sixième alinéa (1° ter) de cet article :

Dans des conditions fixées par les conventions et les cahiers des charges, elle peut également porter globalement sur le service de télévision et les autres services de télévision ou de médias audiovisuels à la demande du même éditeur de services ou de ceux édités par ses filiales ou les filiales de la société qui le contrôle au sens du 2° de l'article 41–3 de la loi du 30 septembre 1986 susvisée ; »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Thiollière, rapporteur. Les accords interprofessionnels récemment conclus entre les principaux groupes audiovisuels et les syndicats de producteurs afin de fixer la contribution des chaînes à la production audiovisuelle prévoient une possibilité de mutualisation des investissements des services appartenant à un même groupe. Un amendement du Gouvernement, adopté par l'Assemblée nationale, a introduit cette possibilité à l'article 27 de la loi de 1986.

Votre commission vous propose d'améliorer ce nouveau dispositif en y incluant, comme le prévoient lesdits accords, non seulement les services de télévision, mais également les nouveaux services de médias audiovisuels à la demande, les SMAD, que nous avons évoqués hier.

C’est d’ailleurs l’occasion pour nous, membres de la commission, de nous réjouir de ces accords interprofessionnels.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Albanel, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 50.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 203, présenté par Mme Procaccia et MM. Cambon, Pointereau et J. Gautier, est ainsi libellé :

Avant le 2° de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Dans la première phrase du 4°, après les mots : « droits de diffusion, », sont insérés les mots : « leur identification et leur valorisation, » ;

La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l’amendement n° 204.

M. le président. J’appelle donc en discussion l'amendement n° 204, présenté par Mme Procaccia et MM. Cambon, Pointereau et J. Gautier, et qui est ainsi libellé :

Avant le 2° de cet article, insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Après le 5°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Le délai raisonnable de carence permettant la remise sur le marché des programmes à l'issue de la dernière diffusion contractuelle. »

Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Mme Catherine Procaccia. En théorie, les deuxième et troisième marchés des programmes audiovisuels français existent, mais dans la pratique, ils sont bloqués par les chaînes premium, soit parce qu’elles ne peuvent pas les exploiter, soit parce qu’elles ne le veulent pas. S’agissant de ce dernier cas, je précise, par exemple, que 50 % des fictions ne sont jamais rediffusées.

Les chaînes de complément, en particulier la TNT, qui ne disposent pas actuellement des moyens économiques de produire, sont obligées de recourir de façon massive aux programmes initiés par les diffuseurs hertziens, mais ne peuvent malheureusement pas approvisionner leur grille en production française, puisque les droits ne circulent pas.

Il est vital que les conditions de circulation de ces programmes soient fluidifiées.

À l’heure actuelle, la circulation des droits est freinée par certaines clauses contractuelles qui entraînent l’assèchement et l’appauvrissement tant du marché que de la production française de ce secteur.

Il s’agit donc là d’un enjeu stratégique pour toute la filière audiovisuelle, qui requiert une mesure urgente.

Avec ces amendements, il s’agit de mettre fin à la pratique des chaînes consistant à rallonger les délais de détention des droits d’exploitation et de permettre une augmentation du nombre de diffusions acquises sans contrepartie.

N’étant pas moi-même spécialiste de l’audiovisuel, j’ai vérifié le contenu de ces amendements auprès de notre ancien collègue Louis de Broissia, qui m’a confirmé qu’ils répondaient bien à des préoccupations réelles.

L’amendement n° 203 vise à fixer par décret en Conseil d’État les obligations des opérateurs en matière d’identification et de valorisation des programmes.

Quant à l’amendement n° 204, qui complète le précédent, il a pour objet de fixer par décret en Conseil d’État un délai de carence raisonnable.