M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. J’ai écouté avec beaucoup d’attention l’exposé du président de la commission spéciale. Mais, techniquement, si une même puce électronique présente sur la carte doit assurer deux fonctions et si un système de double code est nécessaire, je peux vous assurer que des problèmes ne manqueront pas de se poser !

Combien de personnes âgées demandent déjà aux caissières de taper leur code ? Alors, avec un double code sur une micro-puce de ce type, je vous laisse imaginer les difficultés et les erreurs manifestes qui se produiront à l’occasion de la manipulation de cette carte unique !

Il serait tout de même plus simple de conserver une carte de fidélité permettant de cumuler des points, sans plus.

S’il est possible de conserver la double fonction « crédit » et « paiement comptant » de la carte bancaire, il faut, en revanche, dissocier complètement la carte de fidélité des cartes de crédit et de paiement.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 28 et 68.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Monsieur Revet, l’amendement n° 12 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Charles Revet. Non, monsieur le président, je le retire.

M. le président. L’amendement n° 12 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 25 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 5.

(L’article 5 est adopté.)

Article 5
Dossier législatif : projet de loi portant réforme du crédit à la consommation
Article 6

Articles additionnels après l'article 5

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 10 rectifié bis est présenté par M. Revet, Mme Henneron, MM. Pointereau, Bécot, Vasselle, Lardeux, Bailly et Portelli, Mme Keller et M. Juilhard.

L’amendement n° 61 est présenté par Mmes Terrade et Pasquet, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche.

L’amendement n° 92 est présenté par Mme Dini, M. Biwer et les membres du groupe Union centriste.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 311-16 du code de la consommation, les mots : « pendant trois années consécutives » sont remplacés par les mots : « lors de la première année » et les mots : « à l'échéance de la troisième année » sont remplacés par les mots : « à l'échéance de la première année ».

La parole est à M. Charles Revet, pour présenter l’amendement n° 10 rectifié bis.

M. Charles Revet. Comme le souligne le rapport Athling, il existe un grand décalage entre le nombre de crédits revolving ouverts et le nombre de ces crédits qui sont actifs. Cet important écart souligne que de nombreux consommateurs se retrouvent titulaires malgré eux d’un crédit revolving. Alors que ce type de crédit est dénoncé comme une source dangereuse d’endettement, il importe d’encadrer sa distribution et son utilisation en autorisant les titulaires à y renoncer dès qu’ils en expriment le souhait.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l’amendement n° 61.

Mme Odette Terrade. Nous connaissions déjà les comptes bancaires dormants, les livrets d’épargne jamais ouverts et les contrats d’assurance vie en déshérence. Nous découvrons désormais les crédits renouvelables non mobilisés et non sollicités !

Notre pays compterait plus de 15 millions de comptes plus ou moins actifs, à partir desquels les particuliers seraient en situation de recourir à un crédit renouvelable. Mais un grand nombre de personnes ne cherchent aucunement à disposer de cette faculté, ne serait-ce que parce qu’elles n’en ont pas besoin dans l’immédiat.

Le cheminement qui conduit à cette situation est d’ailleurs relativement simple.

Prenons un exemple. Vous vous rendez dans une très grande enseigne, reconnue et réputée, de diffusion de matériel électronique grand public, qui exerce également une activité de vente de matériel informatique, de consommables, de biens culturels et de prestations de services de même nature.

Vous décidez de vous rendre propriétaire du dernier modèle le plus performant possible d’ordinateur, pourvu du système d’exploitation le plus récent, même si, à l’usage, vous vous rendrez compte qu’il est loin d’être sans défaut d’application.

Le prix de cet appareil indispensable à votre vie quotidienne et, notamment, à la scolarité de vos enfants au collège ou au lycée, vous conduit à demander un paiement à tempérament. Un crédit vous est donc immédiatement proposé, versé par l’organisme de crédit qui travaille, de manière exclusive, pour l’enseigne précitée, et évidemment assorti d’un taux d’intérêt élevé.

Bien entendu, compte tenu de la brièveté de l’opération de crédit, vous ne vous rendez qu’à peine compte du montant des prélèvements occasionnés par la réalisation des intérêts.

Mais, au-delà de tout cela, ce qui va vous arriver est fort simple : vous allez figurer dans le fichier clientèle de l’organisme de crédit.

Dès lors, vous trouverez régulièrement dans votre boîte à lettres un courrier vantant les mérites de la « réserve d’argent immédiatement disponible », dont on se demande presque pourquoi vous ne l’avez pas encore sollicitée, notamment à l’approche des vacances !

Par ailleurs, si vous avez eu l’idée saugrenue d’indiquer votre numéro de téléphone portable sur l’offre de prêt, celui-ci sera régulièrement pollué par des messages de relance, avant que la voix déterminée d’un agent commercial ou d’un téléperformeur ne vous incite de nouveau à souscrire un prêt non affecté !

Enfin, votre boîte à lettres électronique, accessible si vous avez indiqué votre adresse e-mail sur le document contractuel prévu par les textes, verra apparaître des offres de l’opérateur de crédit que vous aurez sollicité initialement ou d’autres offres, c’est-à-dire, allez savoir pourquoi, des offres de regroupement de vos crédits formulées par des officines spécialisées dans le rachat de crédit. Vous vous demanderez alors, l’espace d’un instant, comment vos coordonnées ont pu se retrouver sur les listes de telles « entreprises », qui se font fort de devenir votre exclusif, et souvent fort gourmand, créancier unique. À moins qu’à défaut de percevoir sur votre dos quelque intérêt, l’organisme de crédit que vous avez initialement sollicité n’ait « revendu » vos coordonnées à celui qui s’est spécialisé sur le rachat...

Nous voulons faire reculer ces pratiques avec cet amendement, qui tend à imposer la déchéance de la relation de crédit renouvelable si elle n’est pas sollicitée au terme d’un an à compter de la souscription du premier crédit.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini, pour présenter l'amendement n° 92.

Mme Muguette Dini. Je vous renvoie aux excellentes explications de M. Revet.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?

M. Philippe Dominati, rapporteur. Aux termes de la loi Chatel, la non-utilisation d’un crédit renouvelable pendant une période de trois ans entraîne de plein droit la résiliation du contrat de crédit renouvelable.

Ce dispositif, qui a fait ses preuves, provoquant, entre 2005 et 2007, la résiliation de 2,5 millions de contrats, a été renforcé sur ma proposition : la commission spéciale a considéré que l’établissement de crédit ne pouvait pas prendre prétexte de l’éventuelle cotisation de fidélité pour maintenir ouverts ces crédits renouvelables.

Mme Bricq et ses collègues du groupe socialiste avaient déposé un amendement identique, qui a été retiré au vu du dispositif adopté par la commission.

Peut-être aurait-on pu envisager un délai intermédiaire de deux ans. Quoi qu’il en soit, un an, c’est beaucoup trop court. Cette durée va à l’encontre de toutes les pratiques commerciales en usage dans le secteur du crédit renouvelable.

Je pense plus particulièrement aux établissements de vente par correspondance du nord de la France, qui ne sont pas des organismes de crédit. Quand le crédit renouvelable porte sur de petits montants, la première réaction est de l’utiliser. Puis, il est mis en sommeil. Enfin, il est réactivé au cours de la deuxième année. Mais, effectivement, au-delà de la deuxième année, si la faculté de crédit renouvelable n’a plus lieu d’être, elle est généralement abandonnée.

Le délai de trois ans me semble judicieux. J’émets donc, au nom de la commission, un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Je rejoins M. le rapporteur.

Je rappelle que la loi Chatel, qui vise en quelque sorte à couper les branches mortes du crédit, a été adoptée en 2005, voilà trois ans et demi. Elle a déjà permis d’obtenir la clôture de 2,5 millions de comptes. Laissons un peu de temps à ce texte pour apprécier, au fil de son application, comment il parvient à faire disparaître le crédit vraiment mort.

Vous avez raison, monsieur le rapporteur, un an, c’est beaucoup trop court !

Imaginez que quelqu’un prenne, au moment des soldes, une carte qui n’est pas tout de suite utilisable. Cette personne peut très bien se servir de sa carte exclusivement au moment des soldes et ne pas venir au magasin pendant toute une année ! Je pense à certains magasins que l’on fréquente plus particulièrement pendant les périodes des soldes : pour ceux-là, l’utilisation de la carte peut effectivement être très avantageuse. Le choix d’une année ne me paraît pas approprié.

En outre, fermer au bout d’un an les comptes non activés coûterait très cher à certains des organismes prêteurs puisque cela entraînerait la clôture d’un quart des comptes dont bon nombre n’auraient pas été activés depuis un an mais auraient été utilisés l’année précédente. Le fait de ne pas se servir de cette carte pendant une année ne signifie donc pas son abandon définitif. D’ailleurs, les organismes en question vous relancent régulièrement pour vous rappeler que vous détenez cette carte et qu’elle peut être utilisée.

Ramener l’éradication des branches mortes sur la base d’une année, c’est véritablement trop court. En outre, je crois qu’il faut laisser à la loi Chatel le temps de nettoyer le système plutôt que de le déstabiliser encore en lui portant un coup qui lui serait extrêmement préjudiciable.

Je demande le retrait des amendements identiques nos 10 rectifié bis, 61 et 92. À défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. Monsieur Revet, l'amendement n° 10 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Charles Revet. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 10 rectifié bis est retiré.

Madame Terrade, l'amendement n° 61 est-il maintenu ?

Mme Odette Terrade. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 61 est retiré.

Madame Dini, qu’en est-il de l'amendement n° 92 ?

Mme Muguette Dini. Je le retire également, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 92 est retiré.

L'amendement n° 62, présenté par Mmes Terrade, Pasquet, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 311-9 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'opération de crédit visée au présent article ne peut être proposée ni conclue dans les locaux des magasins de grande surface visés au 2° de l'article L. 341-2 du code monétaire et financier. Ces magasins ne peuvent proposer comme crédit à la consommation que du crédit affecté et du crédit personnel. »

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Il convient de rectifier l’amendement pour viser dorénavant l’article L. 311-16 du code de la consommation.

Avec cet amendement, il s’agit, pour nous, de manifester notre refus de principe de la généralisation du crédit renouvelable comme mode de financement des achats les moins significatifs des ménages.

Ainsi, de manière quasi systématique, dans certaines enseignes, la priorité est donnée au recours au crédit renouvelable, aux dépens de toute autre formule.

On en vient pratiquement à se demander si le plus important est non pas de vendre des produits ou des services, mais de « placer », coûte que coûte, des emprunts, c’est-à-dire d’abord et avant tout des frais financiers.

Nous sommes, en la matière, confrontés à une évolution dangereuse.

Les enseignes de la distribution jouissent souvent d’une position dominante au regard de leurs fournisseurs, ce qui leur permet notamment de tirer pleinement parti du paiement différé des marchandises qu’elles exposent à la vente dans leurs rayonnages.

En cheville avec ces enseignes, les établissements de crédit cherchent, dans les faits, à dégager la marge la plus importante en termes de produit net bancaire. Pour ce faire, ils proposent donc de manière prioritaire la formule de crédit la plus onéreuse, c’est-à-dire le crédit renouvelable, et non le crédit affecté.

Nous avons exprimé notre préoccupation : une bonne part du résultat net bancaire de nos grands établissements provient de la « remontée » vers la tête de groupe des excédents réalisés par les filiales spécialisées dans le crédit à la consommation, eu égard aux taux d’intérêt particulièrement élevés dont sont assorties les opérations en question.

Pour autant, comme le fait de distribuer un crédit n’est pas une opération anodine, nous devons restreindre la sollicitation du crédit renouvelable aux seuls établissements spécialisés et interdire que la souscription de tels prêts puisse être effectuée dans le milieu tempéré d’un lieu de vente situé en surface commerciale banalisée. Et, concrètement, dans le plus parfait non-respect de la concurrence dans l’offre de crédit qui existe dans notre pays.

Comme nous ne doutons pas l’espace d’un instant que vous êtes, chers collègues, attachés à une concurrence libre et non faussée, nous ne pouvons que vous inviter à voter en faveur de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur. Madame Terrade, peut-être s’agit-il d’un amendement d’appel. En tout cas, il est excessif.

Voilà quelques mois, ce type d’amendement permettait d’attirer l’attention de nos concitoyens et de cristalliser l’opinion publique. Mais on peut se demander pourquoi vous avez choisi le chiffre de 1 000 mètres carrés. Pourquoi viser les locaux des magasins de grande surface ? Comment les différencier dans un centre ville ? Ce sont autant de notions que la commission trouve dépassées à ce stade de la discussion du projet de loi s’agissant de la protection du consommateur.

Je vous rappelle les dispositions que nous avons adoptées : la formation des personnels qui distribuent le crédit, la dévolution d’un espace garantissant, dans la mesure du possible, la confidentialité en fonction de la nature du lieu où cela se trouve, la consultation du FICP, l’établissement de la fiche de dialogue, l’offre de crédit amortissable alternative, l’amortissement obligatoire du crédit renouvelable et la fonction de paiement comptant.

La notion d’espace retenue par votre amendement, beaucoup plus symbolique, n’est plus techniquement de nature à répondre à l’objectif du projet de loi.

Aussi, la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 62.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 63, présenté par Mmes Terrade et Pasquet, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 313-11 du code de la consommation est ainsi rédigé :

« Art. L. 313-11. - Les vendeurs non salariés d'un organisme bancaire ou de crédit ne peuvent en aucun cas être rémunérés en fonction des crédits qu'ils font contracter à l'acheteur d'un bien mobilier ou immobilier.

« Les vendeurs salariés d'un organisme bancaire ou de crédit ne peuvent en aucun cas être rémunérés en fonction du taux et du type de crédits qu'ils font contracter à l'acheteur d'un bien mobilier ou immobilier. »

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Le processus de formation du taux d’intérêt des crédits à la consommation trouve sans doute une partie de son origine dans le fait que la rémunération des salariés dont la mission est de vendre ce type de prestation de service est assez étroitement liée au volume des opérations souscrites par la clientèle.

Une telle situation est, de notre point de vue, préjudiciable à la qualité du crédit, comme à la nécessité de la prévention du malendettement ou du surendettement des ménages.

Incités à placer toujours plus de crédits, les salariés pratiquant l’intermédiation peuvent, rapidement, se trouver dans la situation de ne pas accorder toute l’attention requise à l’examen de la situation de l’emprunteur, avec toutes les conséquences que cela peut engendrer par la suite.

Responsabiliser les salariés se livrant à cette activité professionnelle ne passe aucunement par l’établissement de leur rémunération en fonction du volume des affaires traitées. D’autant que l’apparition de tout contentieux peut aisément permettre à l’organisme de crédit, ici le prêteur, mais aussi l’employeur, de se retourner contre eux en cas d’incident de paiement ou de quelque procédure que ce soit.

Nous estimons qu’une véritable moralisation des pratiques s’impose et que les salariés chargés de l’intermédiation et, donc, de la négociation des prêts doivent être rémunérés en fonction de leurs qualités propres, et non sur un niveau de performance d’autant plus aléatoire qu’il n’est pas rapporté aux difficultés émergeant de ces performances.

La passation de contrats de crédit est un acte responsable, de quelque côté de la relation commerciale que l’on se situe. Il est par conséquent naturel que nous fassions appel à la responsabilisation des intermédiaires, sans dédouaner les organismes prêteurs eux-mêmes, en demandant, avec cet amendement, que les conditions de rémunération soient fixées de manière plus générale et moins individualisée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.

Il convient de souligner qu’il est dans l’intérêt des organismes de crédit de faire en sorte que celui-ci réponde aux besoins du consommateur emprunteur. C’est d’ailleurs dans cette perspective que les établissements spécialisés assurent un suivi de la qualité des dossiers transmis par leurs partenaires commerciaux, sur le formalisme et sur le niveau de risque. Si le taux de réclamation des clients est élevé, l’image commerciale de l’établissement est ternie.

C’est la raison pour laquelle ces établissements disposent généralement de structures de contrôle, qui sont alors alertées.

Tout en comprenant l’objet de cet amendement, je souhaite rappeler, une fois encore, que le texte a prévu un certain nombre de garde-fous contre la distribution abusive de crédit renouvelable : le devoir d’explication, l’offre alternative, la formation des personnels à la distribution de crédit.

En outre, cet amendement peut se révéler inefficace et contre-productif.

Tout d’abord, rien n’interdira à un établissement spécialisé de motiver le personnel d’une manière autre que la rémunération, en offrant, par exemple, des voyages à ses meilleurs éléments. Ce procédé détourné a déjà été utilisé ailleurs.

Ensuite, et surtout, nous ne connaissons pas l’incidence d’une telle mesure, au champ d’application très large, sur l’offre de crédit à la consommation. Celle-ci peut s’en trouver considérablement restreinte, car elle concernerait toute distribution de crédit, quel que soit le crédit, quel que soit le lieu.

Enfin, comme Mme Bricq l’a souligné en commission, ces amendements font peser la charge exclusivement sur les vendeurs dont les rémunérations sont déjà souvent faibles.

Pour toutes ces raisons, j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable sur l’amendement n° 63.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 63.

(L'amendement n'est pas adopté.)

CHAPITRE IV

CONTENU ET EXÉCUTION DU CONTRAT DE CRÉDIT

Articles additionnels après l'article 5
Dossier législatif : projet de loi portant réforme du crédit à la consommation
Article 7

Article 6

I. - La section 6 du chapitre Ier du titre Ier du livre III du même code est intitulée : « Informations mentionnées dans le contrat » et comprend les articles L. 311-18 à L. 311-20.

II. - A. - L'article L. 311-18 du même code est ainsi rétabli :

« Art. L. 311-18. - Le contrat de crédit est établi sur un document distinct de tout support ou document publicitaire, ainsi que de la fiche mentionnée à l'article L. 311-6.  Un encadré, inséré au début du contrat, informe l'emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit.

« Un décret en Conseil d'État fixe la liste des informations figurant dans le contrat et dans l'encadré mentionné au premier alinéa. » ;

B. - À l'article L. 311-19 du même code, rétabli, les mots : « l'offre préalable » sont remplacés, trois fois, par les mots : « l'offre de contrat crédit » et le mot « obligatoire » est remplacé par les mots : « exigée par le prêteur » ;

C. - L'article L. 311-20 du même code est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « une ou plusieurs offres préalables, visées aux articles L. 311-8 à L. 311-13 et L. 311-15 à L. 311-17 » sont remplacés par les mots : « un ou plusieurs contrats de crédit » ;

2° Au second alinéa, les mots : « offres préalables d'ouverture de crédit permanent définies » et la référence : « L. 311-9 » sont respectivement remplacés par les mots : « contrats de crédit renouvelable mentionnés » et la référence : « L. 311-16 ».

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 74 rectifié, présenté par Mmes Terrade et Pasquet, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le B du II de cet article :

B. - L'article L. 311-19 du même code est ainsi rétabli :

« Art. L. 311-19. - Lorsque l'offre de contrat crédit est assortie d'une proposition d'assurance, une notice doit être remise à l'emprunteur, qui comporte les extraits des conditions générales de l'assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l'assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus. Si l'assurance est exigée par le prêteur pour obtenir le financement, l'offre de contrat crédit et la fiche d'information contractuelle rappellent que l'emprunteur peut souscrire une assurance équivalente auprès de l'assureur de son choix. Si l'assurance est facultative, l'offre de contrat crédit et la fiche d'information contractuelle rappellent les modalités suivant lesquelles l'emprunteur peut ne pas y adhérer. »

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Au-delà de son caractère formel, destiné notamment à rendre un peu plus lisibles les dispositions du texte, passablement compliquées par la réorganisation du code de la consommation, cet amendement est, pour nous, l’occasion de vous interpeller sur le problème de l’assurance crédit.

Il est, en effet, fréquent que soit associée à un contrat de prêt la souscription d’une assurance, parfois obligatoire, parfois facultative, destinée à couvrir tel ou tel incident qui pourrait avoir lieu dans le cadre de l’exécution du contrat, et, singulièrement, dans celui du remboursement du prêt.

En matière d’assurance, la directive consacre la faculté, pour l’emprunteur, de souscrire l’assurance de son choix, de faire jouer la concurrence pouvant exister en ce domaine, une concurrence dont il convient tout de même de rappeler le caractère en bien des cas assez formel.

Notons d’ailleurs d’entrée que cette concurrence ne pourra jouer que si l’emprunteur apporte la preuve qu’il peut souscrire une assurance effectivement moins coûteuse et plus « sécurisante » que celle qui lui est proposée en lien avec le contrat de prêt.

En quelque sorte, la charge de la preuve incombe à l’emprunteur pour délier le prêteur de l’ardente obligation de l’assurer.

Une telle démarche est un encouragement, qu’on le veuille ou non, à la vente liée de contrats d’assurance et de contrats de prêts, une vente liée qui renchérit d’autant le coût du crédit, et le renchérit d’autant plus qu’elle ne présente pas un caractère indispensable dans tous les cas de figure.

Imaginons d’ailleurs comment demain les emprunteurs pourront faire jouer la concurrence en matière d’assurance crédit lorsqu’ils souscriront toujours plus de prêts dans le cadre de l’activité de centres commerciaux ouverts le dimanche !

Ne nous voilons pas la face : peu d’emprunteurs feront le tour des organismes d’assurance crédit avant de souscrire un prêt à la consommation et beaucoup seront donc contraints de souscrire aussi l’assurance proposée.

Notre amendement a au moins un avantage, celui de faire en sorte que l’assurance soit présentée de la même manière que le contrat de prêt et que joue par conséquent, pour cette partie accessoire du contrat, le même délai de rétractation que celui qui porte sur le prêt principal.

M. le président. L'amendement n° 8 rectifié bis, présenté par Mmes Procaccia, B. Dupont, Henneron, Rozier, Dumas, Bout, Sittler, Desmarescaux, Mélot, Hummel et Lamure, MM. Cambon, Revet et Gournac, Mme Troendle et M. Cornu, est ainsi libellé :

Compléter le B du II de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Dans la deuxième phrase du même article, après les mots : « pour obtenir le financement, » sont insérés les mots : « la fiche d'information mentionnée à l'article L. 311-6 et » et le mot : « rappelle » est remplacé par le mot : « rappellent ».

La parole est à Mme Françoise Henneron.

Mme Françoise Henneron. Cet amendement vise à améliorer la sincérité de l'information dont bénéficie le consommateur lorsque le préteur exige la souscription d'un contrat d'assurance pour l'obtention d'un crédit.

Chaque consommateur doit être réellement et clairement informé avant toute souscription à un contrat d'assurance.

Peu de candidats au crédit savent qu'ils ont la faculté de refuser la proposition qui leur est faite par l'établissement de crédit et qu'ils peuvent choisir de souscrire l'assurance exigée auprès d'une autre compagnie d'assurance.

Cette situation est susceptible de restreindre le libre jeu de la concurrence et, de ce fait, de renchérir pour le consommateur le coût de son crédit. Il est donc important que cette information soit fournie au consommateur dans la fiche d'information précontractuelle, et non pas seulement dans l'offre de contrat de crédit.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur. Le projet de loi vise à renforcer la concurrence en matière de crédits, mais aussi en matière d’assurance des crédits.

Ainsi, concernant les crédits immobiliers, son article 17 met fin au système qui permet aujourd'hui aux banques d’imposer une compagnie d’assurance à l’occasion du contrat de prêt immobilier.

Ces deux amendements répondent à cette même préoccupation, leur objet étant de permettre aux consommateurs de mieux faire jouer la concurrence.

Actuellement, en matière de crédits à la consommation, les emprunteurs ont le choix de leur assurance crédit, mais cette faculté de choix n’est rappelée que lors de la remise de l’offre préalable de contrat.

Les deux amendements visent à introduire un mécanisme d’alerte encore plus en amont, c'est-à-dire lors de l’établissement de la fiche de dialogue. À ce stade du processus, l’emprunteur n’est pas encore lié et la fiche de dialogue a précisément pour but de lui permettre de comparer les offres. C’est donc le bon moment pour la transmission de l’information.

On peut cependant regretter que l’amendement n° 74 rectifié prévoie de surcroît que les modalités de non-adhésion à une assurance facultative soient rappelées dans la fiche d’information précontractuelle.

Cette précision n’est pas très utile, car il importe uniquement pour le consommateur de savoir si une assurance est obligatoire ou facultative. Si l’assurance est facultative, l’option doit être exercée au moment de la signature du contrat. Nul besoin donc d’ajouter, dans l’information précontractuelle, cette précision qui découle implicitement du caractère facultatif de l’assurance.

Tout en portant sur le fond une même appréciation sur les deux amendements, la commission estime donc que l’amendement n° 8 rectifié bis est préférable à l’amendement n° 74 rectifié.