abus des contestations des certificats de nationalité française délivrés par les tribunaux

Mme la présidente. La parole est à Mme Claudine Lepage, auteur de la question n° 673, adressée à Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Mme Claudine Lepage. Monsieur le secrétaire d’État, j’interviens non pas pour sauver le soldat Ryan, mais pour m’élever contre le traitement infligé au brigadier Ounoussou Guissé, né français de père français, à qui est contesté aujourd’hui le droit à la nationalité française.

En effet, Ounoussou Guissé, né français de père français le 13 octobre 1982 au Sénégal, se voit, à plusieurs reprises alors qu’il est mineur, attribuer un certificat de nationalité française : à sept ans le 20 février 1990, à dix-sept ans le 15 novembre 1999, chaque fois par le tribunal d’instance de Rouen. À l’époque, la nationalité française d’Ounoussou Guissé ne souffre pas de discussion : il est né français d’un père français qui a vécu des années en France, sur le territoire métropolitain, où il est arrivé avant l’indépendance du Sénégal proclamée en juin 1960.

Pourtant, le parquet de Rouen, suivant en cela les instructions de la Chancellerie, va contester en 2007 la nationalité française d’Ounoussou Guissé au motif que son père avait certes son domicile civil en France à la date de l’indépendance du Sénégal, mais pas le domicile de nationalité, c’est-à-dire « la résidence effective présentant un caractère stable et permanent et coïncidant avec le centre des attaches familiales et des occupations professionnelles ».

Le concept de « domicile de nationalité » est d’ailleurs intéressant pour les 2 500 000 Français de l’étranger qui peuvent dorénavant légitimement se poser la question de la concordance de leurs attaches familiales et de leurs occupations professionnelles.

Mais revenons à Ounoussou Guissé. Arrivé en France en 1998 à l’âge de seize ans, engagé en 2002 dans l’armée française, il a participé aux campagnes du Tchad et d’Afghanistan en 2007 et 2008. Son comportement ne lui vaut que des louanges et il est nommé brigadier-chef. Mais rien n’y fait, la Chancellerie s’acharne à vouloir lui retirer la nationalité française. Tout au plus pourrait-elle lui être concédée comme une aumône par le biais de la naturalisation, au détriment du droit qui est le sien : un droit de naissance, un droit du sang, le droit de sa filiation et le droit de son père. L’offense à sa dignité est d’autant plus cuisante que lorsqu’il risquait sa vie pour la France, personne ne lui contestait son appartenance à la nation.

Monsieur le secrétaire d'État, quelle est cette justice qui se déjuge elle-même pour contester, des années après l’avoir reconnue par deux fois, le droit d’un homme à la nationalité française ? Quelle est cette justice qui remet en question la dignité et l’honneur de cet homme et qui pourrait même le radier de l’armée en lui retirant la nationalité française ? Sur combien de cas anonymes, des humbles et des « sans-grade » dont nous n’avons pas connaissance, la Chancellerie va-t-elle encore s’acharner ? (Mme Monique Cerisier-ben Guiga applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Madame le sénateur, en tant qu’ancien représentant spécial de la France pour l’Afghanistan et le Pakistan, je tiens à vous dire, en préambule, que je suis particulièrement sensible à l’aspect humain que recouvre votre question et, naturellement, au sort de nos soldats.

Cela étant dit, au nom de Mme le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, je vais vous donner lecture des éléments de droit de cette affaire, qui revêt maintenant un caractère juridique.

Je tiens tout d’abord à vous rappeler, madame le sénateur, que le certificat de nationalité française n’est pas en soi un jugement ; il est simplement un mode de preuve de la nationalité française.

Il ne fait foi de la nationalité française que jusqu’à preuve du contraire.

Il est exact que M. Ounoussou Guissé s’est estimé Français depuis de nombreuses années, et il a fait la preuve de son attachement à la nation française en s’engageant dans son armée pour la servir.

M. Ounoussou Guissé peut obtenir la nationalité française simplement en déclarant auprès du tribunal d’instance sa possession d’état de Français détenue depuis plus de dix ans, l’enregistrement de cette déclaration se faisant rapidement.

C’est d’ailleurs l’option qui a été choisie par l’un de ses frères, M. Mamadou Guissé, qui a souscrit en 1998 une déclaration de nationalité française au titre de l’article 21-13 du code civil, car il était détenteur de bonne foi de documents qui le considéraient comme Français depuis plus de dix ans, cas que vous avez-vous-même rappelé tout à l'heure.

Mais, dans l’affaire qui nous occupe, la situation se complique car M. Ounoussou Guissé se prévaut d’une nationalité par filiation. Or le certificat de nationalité française de son père a été remis en cause par la découverte d’une situation qu’il avait cachée.

Un certificat de nationalité peut toujours être contesté s’il apparaît, après sa délivrance, que les documents qui ont été remis lors de son obtention se révèlent être des faux ou qu’un événement a fait perdre sa nationalité française à son détenteur.

En l’espèce, pour obtenir des certificats de nationalité, le père de M. Ounoussou Guissé avait affirmé que son domicile était fixé en France après l’indépendance du Sénégal, alors que toutes ses attaches familiales étaient en réalité restées au Sénégal ; il était polygame, et plusieurs enfants sont nés au Sénégal de ses différentes unions. Sa demande de réintégration dans la nationalité française, refusée en raison de sa situation familiale incompatible avec les valeurs de la République, laisse d’ailleurs penser qu’il a lui-même reconnu qu’il avait perdu la nationalité française au moment de l’indépendance.

La question de savoir si, dans ces conditions, M. Ounoussou Guissé peut être Français comme né d’un père français est l’une de celles qui sont posées à la cour d’appel. L’affaire étant en délibéré, il ne m’appartient pas d’en dire plus.

Mme la présidente. La parole est à Mme Claudine Lepage.

Mme Claudine Lepage. Je tiens à vous remercier, monsieur le secrétaire d’État, des précisions que vous venez de m’apporter. À un moment ou à un autre, je pense que la situation s’arrangera pour M. Ounoussou Guissé, qui pourra sans doute obtenir la nationalité française par naturalisation.

Toutefois, je m’inquiète de la multiplication des cas – Mme Monique Cerisier-ben Guiga peut en témoigner ! – de personnes placées dans des situations extrêmement délicates parce que leur est contestée, cinquante ans après, la nationalité française qui leur avait été accordée lors de l’indépendance de leur pays d’origine.

Mme la présidente. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures cinq, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

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Organisation des débats (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales
Motion tendant à demander un référendum

Entreprise publique La Poste et activités postales

Suite de la discussion d'un projet de loi en procédure accélérée

(Texte de la commission)

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales (procédure accélérée) (projet n° 599 rectifié (2008 2009), texte de la commission n° 51, rapport n° 50).

Dépôt d’une motion référendaire

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales
Discussion générale

M. le président. J’informe le Sénat qu’en application de l’article 11 de la Constitution et de l’article 67 du règlement MM. les présidents Jean-Pierre Bel, Nicole Borvo Cohen-Seat, Yvon Collin et plusieurs de nos collègues présentent une motion tendant à proposer au président de la République de soumettre au référendum le projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales.

En application de l’alinéa 1 de l’article 67 du règlement, cette motion doit être signée par au moins trente sénateurs,…

Mme Nicole Bricq. Ils sont là !

M. le président. … dont la présence est constatée par appel nominal.

Il va donc être procédé à l’appel nominal des signataires.

Huissier, veuillez procéder à l’appel nominal.

(L’appel nominal a lieu.)

M. le président. Acte est donné du dépôt de cette motion.

Ont déposé cette motion : Mmes Jacqueline Alquier, Michèle André, MM. Serge Andreoni, Bernard Angels, David Assouline, Jean-Pierre Bel, Claude Bérit-Débat, Jacques Berthou, Mmes Marie-Christine Blandin, Maryvonne Blondin, M. Yannick Bodin, Mme Nicole Bonnefoy, MM. Yannick Botrel, Martial Bourquin, Mme Bernadette Bourzai, M. Michel Boutant, Mmes Nicole Bricq, Françoise Cartron, MM. Bernard Cazeau, Pierre-Yves Collombat, Yves Daudigny, Marc Daunis, Jean-Pierre Demerliat, Jean Desessard, Claude Domeizel, Mme Josette Durrieu, MM. Jean-Luc Fichet, Jean-Claude Frécon, Bernard Frimat, Charles Gautier, Mme Samia Ghali, MM. Jean-Pierre Godefroy, Didier Guillaume, Claude Haut, Edmond Hervé, Mmes Odette Herviaux, Annie Jarraud-Vergnolle, Bariza Khiari, MM. Yves Krattinger, Serge Lagauche, Jacky Le Menn, Mmes Raymonde Le Texier, Claudine Lepage, MM. Jean-Jacques Lozach, François Marc, Marc Massion, Gérard Miquel, Jean-Jacques Mirassou, Mme Renée Nicoux, MM. Jean-Marc Pastor, Georges Patient, François Patriat, Mme Gisèle Printz, MM. Marcel Rainaud, Daniel Raoul, François Rebsamen, Michel Sergent, Simon Sutour, Mme Catherine Tasca, MM. Michel Teston, René Teulade, Richard Yung, Yvon Collin, Robert Tropeano, Michel Charasse, Jean-Michel Baylet, Jacques Mézard, François Fortassin, Mme Anne-Marie Escoffier, MM. Jean Milhau, Jean-Pierre Chevènement, Mmes Nicole Borvo Cohen-Seat, Éliane Assassi, Marie-France Beaufils, M. Michel Billout, Mme Isabelle Pasquet, M. Jean-Claude Danglot, Mmes Annie David, Michelle Demessine, Évelyne Didier, MM. Guy Fischer, Robert Hue, Gérard Le Cam, Mmes Odette Terrade, Josiane Mathon-Poinat, Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Jack Ralite, Ivan Renar, Mme Mireille Schurch, MM. Bernard Vera, Jean-François Voguet et François Autain.

(Mmes et MM. les sénateurs du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG se lèvent et brandissent une feuille de papier jaune sur laquelle est inscrit en lettres capitales le mot « référendum ». – Exclamations sur les travées de lUMP.)

Après cette annonce spontanée par reprographie pour la photographie (Sourires), je vous indique que cette motion sera envoyée à la commission de l’économie.

La discussion de cette motion pourra avoir lieu demain, mercredi 4 novembre, de neuf heures trente à douze heures trente. (Mmes et MM. les sénateurs du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG scandent : « Nous voulons un référendum ! » – Nouvelles exclamations sur les travées de lUMP.)

Par analogie avec les propositions de loi, la discussion de la motion débutera par l’intervention de l’un des auteurs de la motion, vingt minutes maximum.

Qui d’entre vous la présentera ?

M. Jean-Pierre Bel. Moi, monsieur le président.

M. le président. La commission pourra ensuite exprimer son avis sur le texte de la motion, de même que le Gouvernement.

En accord avec les groupes, le temps des groupes sera réparti à la proportionnelle. Afin que nous ayons un débat ordonné et non reprographié, les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance avant aujourd’hui, dix-huit heures.

M. le président. Le Gouvernement pourra, le cas échéant, répondre aux orateurs.

Le Sénat se prononcera par un seul vote sur le texte de la motion et par un scrutin public ordinaire.

Pour l’heure, nous allons poursuivre la discussion du projet de loi sur La Poste.

Discussion générale (suite)

Motion tendant à demander un référendum
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales
Organisation des débats

M. le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jacques Blanc. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – MM. Bruno Retailleau et Daniel Dubois applaudissent également.)

M. Jacques Blanc. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans ce débat passionné, ouvert par des consultations par la voie d’urnes dans les rues et qui se prolonge à l’instant par le dépôt d’une motion référendaire, le travail exceptionnel mené par la commission de l’économie – je salue tout particulièrement son président, M. Emorine, et le rapporteur, M. Hérisson –, avec l’accord du Gouvernement, nous permet, me semble-t-il, de prendre un peu de hauteur,…

M. Alain Gournac. Cela va nous faire du bien !

M. David Assouline. Attention à ne pas s’envoler !

M. Jacques Blanc. … suivant ainsi l’appel de La Poste, dont l’emblème, ne l’oublions pas, est un oiseau bleu,…

M. Yannick Bodin. Il bat de l’aile !

M. Jacques Blanc. … que l’on retrouve sur les vélos, les casquettes ou les Renault jaunes des postiers. Cet oiseau bleu fait partie de l’histoire commune des Français, de leur vie quotidienne, et même, j’ose le dire, de leur identité nationale.

M. Jacques Blanc. Il est le fleuron du bloc non négociable des services publics de proximité permettant d’assurer le lien entre nous tous. (Mme Catherine Tasca s’exclame.)

Mme Raymonde Le Texier. « Non négociable » est le mot !

M. Jacques Blanc. Le médecin de Lozère que je suis, qui a accompagné des postiers dans la neige (Applaudissements sur les travées de lUMP. – Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG),…

M. Adrien Gouteyron. Ils ne savent pas ce que c’est !

M. Jacques Blanc. … sait ce que cet oiseau bleu représente dans le tissu social de notre pays.

M. Adrien Gouteyron. Très bien !

M. Jacques Blanc. Cet oiseau a servi de messager,…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous allez nous faire pleurer !

M. Jacques Blanc. … en portant dans son bec les missives, lettres ou cartes postales, annonçant de bonnes ou de mauvaises nouvelles. (Mmes Christiane Hummel et Sylvie Goy-Chavent applaudissent.) Pendant la guerre, il a réchauffé le cœur de nos combattants et de leurs familles, mais il a aussi annoncé des drames au sein de ces familles. Dans les hameaux isolés, l’arrivée du facteur représente un moment important.

Concernant les postières et les postiers, personne n’a le monopole du cœur ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n’est pas une question de cœur !

M. Jacques Blanc. Oui, notre cœur bat avec le leur !

M. François Patriat. Ce n’est pas ce qu’ils disent !

M. Jacques Blanc. Nous n’avons pas le droit de les tromper ou de les utiliser à des fins politiciennes ! (Applaudissements sur les mêmes travées. – Ouh ! sur les travées du groupe socialiste.)

M. Marc Daunis. Comme les gaziers !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous n’êtes pas crédible ! Les postiers vous le diront !

M. Jacques Blanc. De quoi s’agit-il aujourd’hui ? Le projet de loi vise non pas à plomber l’oiseau bleu, mais, au contraire, à lui permettre d’aller de l’avant, en traçant un cap.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous n’êtes pas crédible !

M. Jacques Blanc. Ce texte tend à l’alléger, pour qu’il vole plus haut, plus loin et plus vite, au service de l’ensemble de la population. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Sarcasmes sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Comme nous tous, mesdames, messieurs de l’opposition, vous êtes responsables de certains faits.

M. Jean-Pierre Bel. On connaît ça, on l’a déjà entendu !

M. Jacques Blanc. L’ouverture à la concurrence au 1er janvier 2011 a été voulue par tous les gouvernements de droite comme de gauche, en France, en Europe et dans le monde entier. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de lUMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Qui peut prétendre que l’activité postale ne doit pas s’ouvrir à l’Europe et au monde ? (Mme Éliane Assassi s’exclame.) Ce sont des faits. Ou bien on cultive le passé, en trompant les postières et les postiers, les femmes et les hommes de notre pays, ou bien on prend le taureau par les cornes et on essaie de trouver des solutions – c’est ce que vous avez fait, monsieur le ministre ! (M. Christian Demuynck applaudit.)

Chacun le sait, face à l’ouverture à la concurrence, qui est incontournable, à l’évolution du haut débit et de l’internet et à la baisse de l’activité postale – que personne ne peut contester –, on peut se croiser les bras et ne rien faire…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous n’êtes pas crédible !

M. Jacques Blanc. … ou, au contraire, oser dire qu’il faut donner à La Poste les armes nécessaires pour se défendre. (Mme Christiane Hummel ainsi que MM. Christian Demuynck et Jackie Pierre applaudissent.)

Le changement de statut, qui permettra d’augmenter le capital de l’entreprise des 2,7 milliards d’euros nécessaires, se fera dans le respect d’une double ambition : permettre à La Poste de rester ce qu’elle est, à savoir une très grande entreprise qui compte dans le monde…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elle doit compter en France !

M. Jacques Blanc. … et dont nous pouvons être fiers, même si quelques problèmes se posent de temps en temps, et satisfaire aux exigences d’une entreprise de service public. (M. David Assouline s’exclame.) Grâce au travail de la commission et à la volonté du Gouvernement,…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous n’êtes pas crédible !

M. Jacques Blanc. … nous allons inscrire dans la loi – c’est une garantie supplémentaire – que le capital de La Poste restera public. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Jean-Pierre Godefroy. C’est un mensonge éhonté !

M. Jacques Blanc. Grâce à la volonté et à l’action de la commission, nous allons pouvoir faire en sorte que La Poste maintienne les objectifs d’un service au public.

M. Daniel Raoul. On a déjà donné !

M. Jacques Blanc. Ce service au public sera défini dans la loi. Par conséquent, nous modernisons l’entreprise tout en conservant ses racines, à savoir une forte présence territoriale, gage d’universalité. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Guy Fischer. On a vu cela avec GDF !

M. Jean-Pierre Bel. Parlez-en à Guaino !

M. Yannick Bodin. C’est faux !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Personne ne vous croit !

M. Jacques Blanc. Personne ne nous croit ? Regardez ce qui se passe dans le monde entier !

M. David Assouline. Bla, bla, bla !

M. Jacques Blanc. Mes chers collègues, nous voulons, je l’affirme ici clairement, sauver ce service public (Applaudissements sur les travées de lUMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG)

M. Daniel Raoul. Menteur !

M. Jacques Blanc. … tout en garantissant son caractère universel, son capital public et une exigence de présence territoriale. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Personne ne vous croit !

M. Jacques Blanc. Oui, l’existence des 17 000 points de contact sera désormais inscrite dans la loi ! (Exclamations sur les mêmes travées.)

M. le président. Il vous reste trois minutes, mon cher collègue.

M. Jacques Blanc. Comme je suis souvent interrompu, il faut arrêter la pendule, monsieur le président. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

La capacité de nouer des partenariats doit être conservée. Les agences municipales postales constituent une bonne réponse. Encore faudra-t-il sans doute examiner de plus près le statut de leurs agents.

Par parallélisme, il faudra, comme je l’ai proposé samedi dernier, à La Canourgue, quand j’ai reçu des représentants des postiers, que les bureaux de poste dont l’activité est quelque peu limite…

M. David Assouline. C’est vous, qui êtes limite !

M. Jacques Blanc. … puissent nouer des partenariats avec ERDF ou France Télécom, notamment, pour assurer des activités commerciales. (Mme Christiane Hummel applaudit. – Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On vendra des pommes et des cacahouètes !

M. Yannick Bodin. Ils ne vous ont pas cru ! D’ailleurs, personne ne vous croit !

M. Jacques Blanc. J’ai dit aux postiers de la Lozère que je porterai ce message au Sénat. J’en suis sûr, au-delà des vociférations et du jeu politique, chacun est bien conscient que l’inaction condamnera l’avenir même de La Poste. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.)

M. David Assouline. C’est le cirque !

M. Jacques Blanc. Mes chers collègues, vous avez obtenu des crédits importants pour le fonds de compensation du service universel postal, ce qui sécurise les 17 000 points de contact. Par ailleurs, la règle des vingt minutes et des cinq kilomètres sera maintenue.

M. Jean-Jacques Mirassou. Pour l’oiseau ? (Sourires.)

M. Jacques Blanc. Toutefois, j’ose le dire, des exceptions devront être prévues dans certains endroits, les solutions retenues devant alors faire l’objet d’accords adoptés à l’unanimité des élus.

Sur le terrain, que nous soyons de droite ou gauche, nous défendons tous La Poste ! (Mme Christiane Hummel applaudit. – Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Voilà la vérité ! Je le répète : vous n’avez pas le monopole du cœur ! (Vives protestations sur les mêmes travées.)

M. Yannick Bodin. Comédie !

M. Jacques Blanc. Chers collègues de l’opposition, prenez de la hauteur, à l’image de l’oiseau bleu (Ah ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG), et sortez d’une attitude qui n’est pas très digne. (Vives protestations sur les mêmes travées.) Car les fausses consultations peuvent mettre en cause les vraies ! Vous allez discréditer le référendum. Il est tout de même facile d’interroger les gens alors que vous savez que personne ne veut la privatisation de La Poste ! (Mêmes mouvements.) Qui défend ici la privatisation de La Poste ? Aussi, en tant que représentants des territoires ruraux, montrons ce que nous voulons ! (Applaudissements sur les travées de lUMP. – Dans un brouhaha, l’ensemble des sénateurs du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG brandissent de nouveau la feuille de papier jaune sur laquelle est inscrit le mot « référendum » et scandent ce mot.)

M. Ivan Renar. Il nous provoque !

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Jacques Blanc. Il me faudrait encore quelques minutes pour achever mon intervention, monsieur le président.

M. le président. Non, je vous accorde trente secondes.

M. Jacques Blanc. Nous voulons un service universel, une unicité tarifaire sur le territoire, une distribution six jours sur sept, une livraison de la presse sur tout le territoire, une présence territoriale assurée par 17 000 points de poste et une accessibilité bancaire. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Il s’agit d’un dossier passionné et difficile. C’est pourquoi nous sommes fiers, grâce au travail mené par la commission en accord avec le Gouvernement, de sauver ici, au Sénat, le service public de La Poste. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, où Mmes et MM. les sénateurs brandissent une nouvelle fois la feuille de papier jaune sur laquelle est inscrit le mot « référendum ».)

M. le président. Mes chers collègues, rangeons les « cartons jaunes ». (Sourires.)

La parole est à Mme Évelyne Didier. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je concentrerai mon intervention sur le « défi du maintien de la présence postale », selon les termes mêmes de l’étude d’impact sur ce projet de loi.

Le Gouvernement se trouve en effet dans une situation paradoxale : comment faire croire que la présence postale va se trouver renforcée alors même que la transformation de La Poste en société anonyme va la contraindre à une plus grande rentabilité économique, indépendamment de son utilité sociale ?

Rappelons qu’un bureau de poste n’est pas forcément rentable, il est avant tout utile. À l’aune de la seule rentabilité, ce sont donc des milliers de bureaux qui seraient voués à la disparition. À ce titre, la présence postale dans les territoires ruraux a déjà reculé depuis plusieurs années, les obligations de La Poste en termes d’aménagement du territoire s’étant trouvées allégées par les lois successives et les contrats de service public qui préparent l’ouverture à la concurrence.

Un rapport de la Commission européenne au Conseil soulignait déjà en 2006 que « l’accès aux services postaux dans les régions isolées risquait de pâtir » de la mise en œuvre des directives de libéralisation.

Il ne s’agit donc pas d’une inquiétude nouvelle pour les élus et les citoyens, qui vous interpellent régulièrement sur cette question. J’ai moi-même, dans mon département, la Meurthe-et-Moselle, été sollicitée par de nombreuses communes et autres collectifs de défense qui ne supportent plus la lente agonie de leurs services postaux.

Bien avant que la réforme ne soit annoncée, tout était déjà mis en œuvre pour tuer à petit feu les agences locales dites « non rentables » et inciter les usagers à se rendre dans des centres plus importants. Ainsi, à Onville et à Leyr, la réduction de l’amplitude horaire d’ouverture des bureaux se poursuit, posant le problème de l’accessibilité des usagers, renvoyés vers d’autres bureaux de poste. À Leyr, la prise d’activité des facteurs a été transférée au centre voisin, situé à vingt kilomètres du périmètre de leurs tournées ! À Onville, l’unique agent du guichet n’est remplacé que de façon aléatoire lors de ses absences. Les usagers sont avertis le jour même, par un écriteau sur la porte, de la fermeture ou, le cas échéant, des horaires du jour ! À cela, La Poste répond que les clients peuvent, désormais, traiter la plupart de leurs opérations sur internet ! C’est oublier que, souvent, ces personnes sont aussi confrontées à l’isolement en termes de réseaux de télécommunication. Je pense particulièrement aux personnes âgées.

Comment ne pas s’émouvoir, alors, des conclusions de la commission Ailleret, qui souhaite que les surcoûts liés aux missions de service public, notamment en termes d’aménagement du territoire, diminuent, pour arriver à l’équilibre.

Si l’État maintient sa participation au capital, parallèlement, il se désengage du financement des missions de service public, au titre desquelles il doit un milliard d’euros à La Poste. La priorité est donc le remboursement des charges indues.

En outre, le changement de statut fait peser un risque sur ces missions, qu’il s’agisse de l’accessibilité bancaire, de la distribution de la presse, du service universel postal et de l’aménagement du territoire. Vous nous direz que celles-ci sont confortées par la loi, monsieur le ministre. Mais comment faire sans financement ?

L’article 2 bis affirme vouloir graver dans la loi la présence de plus de 17 000 points de contact. Mais de quoi parlons-nous ? Depuis que le processus de libéralisation est entamé, le nombre de bureaux de plein exercice a chuté, passant de 14 147 en 1999 à 11 422 au terme de l’année 2008. Parallèlement, le nombre d’agences postales communales et de relais poste n’a fait qu’augmenter. Pourtant, on ne fait pas les mêmes choses dans un simple relais poste ou dans un bureau de plein exercice. (Marques d’approbation sur les travées des groupes socialistes et CRC.) Quant aux agences postales, elles sont le résultat d’un chantage à la présence postale. Les collectivités qui font ce choix pour leurs concitoyens supportent une charge indue et mal compensée,…