M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Tous les alinéas que vous voulez supprimer ont pour objet de tirer les conséquences de décisions qui ont déjà été prises.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 257.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 258, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. L’alinéa 4 concerne le maintien en fonction des représentants du personnel jusqu’au terme de leur mandat.

La Poste emploie encore une majorité de fonctionnaires, des salariés de droit public et des contractuels de droit privé, « lorsque les exigences particulières de l’organisation des services ou la spécificité de certaines fonctions l’exigent ».

Le fonctionnement de La Poste présente des spécificités. Ainsi, les dispositions du code du travail relatives aux comités d’entreprise ne leur sont pas applicables. La transformation de l’entreprise en société anonyme obligera La Poste à se conformer à de nouvelles règles, notamment s’agissant du conseil d’orientation et de gestion des activités sociales, le COGAS, qui regroupe des représentants de l’État, des syndicats et d’associations nationales. Cette situation ambiguë risque de paralyser les organes de représentation du personnel.

Les représentants du personnel sont présents dans diverses institutions sociales, où ils jouent un rôle déterminant : conseil d’administration, comités techniques paritaires et commissions consultatives paritaires. La véritable question est non pas de savoir si les représentants du personnel resteront en fonction, mais de s’assurer du fonctionnement des organismes dans lesquels ils sont élus, pour qu’ils continuent à y jouer leur rôle. Des représentants élus dans des organismes qui ne fonctionnent pas n’auraient pas de raison d’être.

Dans la mesure où nous sommes totalement opposés à cette transformation, nous souhaitons clarifier cet article. Le changement de statut que vous proposez a des conséquences importantes sur la vie démocratique de nos entreprises ; vous participez à leur désorganisation.

Nous pensons quant à nous que la voix des salariés est déterminante.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Nous sommes opposés à la suppression de l’alinéa 4 de l’article 11. Il s’agit de protéger les représentants du personnel et de les assurer qu’ils conserveront leur mandat.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 258.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 259 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 311 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l’amendement n° 259.

M. Gérard Le Cam. L’alinéa 5 de l’article 11 dispose : « La transformation de La Poste en société anonyme n’affecte pas le mandat de ses commissaires aux comptes en cours à la date de la transformation ».

Je ne vous apprendrai rien en vous disant que les deux commissaires aux comptes aujourd’hui en activité ont été nommés conformément aux dispositions de la loi 2003-709 du 1er août 2003, lesquelles s’appliquent aux établissements publics à caractère industriel ou commercial depuis l’exercice 2006.

Pour La Poste, les commissaires aux comptes sont désignés par le ministre de l’économie et par le ministre chargé des postes et des télécommunications. Les commissaires aux comptes ont été désignés par l’arrêté du 20 juin 2003 et leur mandat a expiré à l’arrêté des comptes de l’exercice 2008. Cette information figure sur le site officiel de La Poste à la page « gouvernance ». Aucune information n’y figure, monsieur le ministre, sur un nouvel arrêté qui prolongerait le mandat des commissaires aux comptes pour les exercices suivants, comme cela avait été le cas en 2003. Je suis persuadé que vous allez nous rassurer !

Ces commissaires aux comptes ont été nommés dans le cadre d’une mission légale. Ils relèvent de la loi et des règlements, même s’il est nécessaire de formaliser le lien contractuel entre les parties par la suite.

La doctrine affirme que dès lors que « les relations entre le commissaire aux comptes et la société sont fixées par la loi, leurs relations prennent un aspect institutionnel ». Il en va différemment dans le cas d’une société anonyme. Il s’agit de relations dans le seul cadre contractuel et après accord des parties sur les conditions d’exécution de la mission et sur les obligations qui en découlent.

Il n’est donc pas possible de mettre sur le même plan une prestation contractuelle et une prestation légale. Même si les contenus sont de même nature, les conditions d’exécution d’une mission légale de commissaire aux comptes relèvent de la loi. Tel est bien le cas pour les commissaires désignés pour La Poste.

Nous pensons donc qu’il faut se poser la question de la compatibilité de la fonction des commissaires aux comptes désignés par arrêté ministériel avec le nouveau de statut : la société anonyme que vous souhaitez inscrire dans ce texte ne peut désigner ces commissaires aux comptes que par contrat.

Par conséquent, il nous semble difficile que ceux-ci puissent remplir cette nouvelle mission, qui ne s’inscrit pas dans le même cadre juridique.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous invitons, mes chers collègues, à supprimer l’alinéa 5 de l’article 11.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 311.

M. Jean Desessard. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 5 de l’article 11.

Je l’ai dit et je le répète : pour l’ensemble des Français, La Poste n’est pas une société anonyme. C’est une institution qui va chercher ses racines dans l’histoire de notre pays, c’est un groupe qui a un sens pour chacun de nos concitoyens.

Les relais de poste ont été créés par Louis XI en 1477 et les premiers bureaux de poste apparaissent à la fin du XVIe siècle. Au XVIIIe siècle, la distance moyenne entre deux relais postaux est de seize kilomètres. Une lettre expédiée de Paris met deux jours et huit heures pour atteindre Lyon, un peu plus de quatre jours pour Marseille.

La Poste ne peut être une société anonyme. Son évolution est liée à l’histoire de la Révolution. Après 1789, les directeurs des bureaux de poste qui existaient à cette époque sont élus au suffrage universel. La Révolution marque aussi la condamnation de la violation du secret de la correspondance, question que nous avons abordée à plusieurs reprises.

La desserte de nos campagnes s’organise à partir de 1830. L’utilisation du timbre, à l’effigie de Cérès, déesse des moissons, se répand à partir de 1849. Désormais, le prix de la lettre varie en fonction du poids de celle-ci et non plus de la distance. C’est donc la mise en place de la péréquation tarifaire, notion qu’un objectif de rentabilité financière remet aujourd’hui en cause.

La Poste, dans le quotidien des Français, ce sont aussi les cartes postales. La première carte postale est envoyée en 1870.

Le service public est également défendu par les résistants à l’issue de la Seconde Guerre mondiale. Pour le Conseil national de la Résistance, les intérêts particuliers doivent être subordonnés à l’intérêt général. C’est ce qu’a rappelé Raymond Aubrac lundi soir devant le Sénat, en déclarant que ce projet de loi était une injustice.

Plus proche de nous, chacun identifie l’Oiseau bleu, qui date de 1962 ; notre collègue M. Blanc en a parlé. En 2002, c’est aussi La Poste qui assure la transition du franc à l’euro.

Vous le voyez, depuis plus de quatre siècles, l’histoire de La Poste est intimement liée à l’histoire nationale. La Poste a accompagné le quotidien des Français en assurant l’égalité de tous sur le territoire.

Prétendre que l’on peut anéantir cette histoire pour faire de La Poste une société anonyme, sans personnalité, et ainsi dévoyer le service public, est, je le répète, une grave erreur.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Les amendements nos 259 et 311 visent à supprimer l’alinéa 5 de l’article 11, qui prévoit que le changement de statut de La Poste n’affecte pas le mandat de ses commissaires aux comptes.

La commission y est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements.

M. le président. La parole est à M. Adrien Giraud, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 259 et 311.

M. Adrien Giraud. Je tiens tout simplement à rappeler à mon cher collègue Jean Desessard que lorsque Mayotte est devenue française en 1841, le courrier y était acheminé par bateau tous les six mois. Depuis, la société a évolué, monsieur Desessard, et cette évolution, vous la refusez ! (Très bien ! sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Mon explication de vote vaudra à la fois pour les amendements identiques nos 259 et 311 et pour l’article 11.

On peut comprendre les positions défendues sur l’article 11. Notre collègue Jean Desessard a rappelé avec beaucoup de passion et de conviction l’histoire de La Poste. Cela étant, les technologies dans le domaine des communications ayant beaucoup évolué, une réforme est nécessaire. Supprimer ces dispositions, ce serait aller à contre-courant, comme l’ont fort justement indiqué M. le rapporteur et M. le ministre.

Notre collègue a évoqué l’aspect humain de cette question. Nous sommes tous, dans cet hémicycle, respectueux des personnels de La Poste et désireux de les défendre ; il y a un consensus sur cette question.

La Poste, nous en sommes convaincus, doit avancer et investir, que ce soit pour améliorer les bureaux, les conditions de travail, la qualité du service, le déplacement ou pour faire évoluer les centres de tri ; de nouveaux centres de tri sont construits très régulièrement.

Notre groupe votera cet article, qui est indispensable. (M. le rapporteur applaudit.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 259 et 311.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 11.

(L'article 11 est adopté.)

Article 11
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales
Article 12 bis (Nouveau)

Article 12

La même loi est ainsi modifiée :

1° L’article 1er est abrogé ;

1° bis (nouveau) À chaque occurrence dans le premier alinéa de l’article 12, à l’article 27, au deuxième alinéa de l’article 30, à chaque occurrence dans l’article 33 et au premier alinéa de l’article 34, les mots : « l’exploitant public » sont remplacés par les mots : « La Poste » ;

1° ter (nouveau) À chaque occurrence dans le 3° du I de l’article 21, les mots : « cet exploitant » sont remplacés par les mots : « cette société » ;

1° quater (nouveau) Au premier alinéa de l’article 33-1, les mots : « l’exploitant public » sont remplacés par les mots : « la société » ;

2° (Supprimé)

3° La seconde phrase de l’article 4 est supprimée ;

4° L’article 8 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est supprimé ;

b) Au second alinéa, le mot : « également » est supprimé et les mots : « l’exploitant public » sont remplacés par les mots : « La Poste » ;

4° bis (nouveau) Au second alinéa du 3° de l’article 21, la date : « 31 décembre 1996 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2010 » ;

5° Les articles 7, 14, 15, 19, 24, 25, 26, 28, 36, 39 et 40 sont abrogés ;

6° À l’article 27, les mots : «, dans le cadre des dispositions réglementaires précisant ses droits et obligations et dans des conditions conformes aux principes édictés à l’article 25 » sont supprimés ;

6° bis (nouveau) Le I de l'article 29-1 est ainsi modifié :

a) Au quatrième alinéa, la référence : « aux titres II et III du livre IV du code du travail » est remplacée par la référence : « aux titres Ier à IV du livre III de la deuxième partie du code du travail » ;

b) À la seconde phrase du cinquième alinéa, les mots : « Les titres III et IV ainsi que les chapitres III et IV du titre VI du livre II du code du travail sont applicables » sont remplacés par les mots : « La quatrième partie du code du travail est applicable » ;

6° ter (nouveau) À l’article 31-3, les mots : « Les titres III et IV du livre II du code du travail s’appliquent » sont remplacés par les mots : « La quatrième partie du code du travail s’applique » ;

7° L’article 33 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « et notamment des activités associatives communes » sont supprimés ;

b) Au troisième alinéa, les mots : « ne concernant pas des activités sociales » sont supprimés ;

c) Les quatrième, septième, neuvième et dixième alinéas sont supprimés ;

8° À la première phrase du second alinéa de l’article 34, les mots : « contrat de plan de l’exploitant public » sont remplacés par les mots : « contrat mentionné à l’article 9 » ;

9° (nouveau) Dans tous les textes législatifs autres que la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 précitée, les mots : « l’exploitant public La Poste » sont remplacés par les mots : « La Poste ».

M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, sur l'article.

Mme Mireille Schurch. L’article 12 prévoit la suppression des références aux notions d’exploitant public, puisque vous transformez La Poste en société anonyme.

On pourrait donc facilement penser qu’il s’agit uniquement d’un article de conséquence. Pourtant, vous profitez de cet article pour supprimer la participation de La Poste à l’effort national d’enseignement supérieur dans les domaines de la communication et de l’électronique. Or, selon nous, cet effort fait partie intégrante des missions de service public que La Poste se doit d’assumer.

À ce titre, nous sommes stupéfaits que vous souhaitiez introduire une telle disposition, alors même que vous êtes les garants les plus zélés du respect du droit communautaire. Je m’explique : cette mesure apparaît comme contraire aux ambitions définies par la stratégie de Lisbonne, qui désigne l’axe majeur des politiques économiques et de développement de l’Union européenne entre 2000 et 2010.

En effet, selon les conclusions de la présidence du Conseil européen de Lisbonne des 23 et 24 mars 2000, la priorité des politiques communautaires est de faire de l’Union européenne « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde d’ici à 2010 ».

Permettez-moi de vous lire un extrait des déclarations de la Commission européenne : « Cela suppose la viabilité budgétaire, une meilleure réglementation et des systèmes fiscaux et sociaux adéquats. Nous devons améliorer l’éducation et la formation pour permettre à davantage de personnes de réaliser pleinement leur potentiel, dans leur propre intérêt et dans celui de l’ensemble de la société. Nous devons aussi investir dans la recherche pour conserver notre avantage comparatif par rapport aux régions avec lesquelles nous sommes en concurrence. »

Nous voyons donc bien que la stratégie de Lisbonne incite les États membres à réaliser un effort important dans les domaines de l’enseignement supérieur et de la recherche.

À l’heure où les outils de communication amorcent une révolution profonde de ce secteur, nous pensons que tous les acteurs concernés doivent participer à l’effort national en faveur de l’enseignement supérieur.

En outre, une telle disposition est également importante d’un point de vue symbolique. Elle démontre que la politique de ce gouvernement s’inscrit dans le court terme et ne se place pas dans une perspective d’avenir. Il s’agit simplement de permettre à La Poste de se dégager de toute mission de service public et de l’éloigner de toute conception de l’intérêt général.

Nous ne pouvons pas l’accepter. Au contraire, nous pensons que la présence de services publics investis d’une mission d’intérêt général favorise l’économie de la connaissance et qu’elle permet à tous d’avoir accès à des services fondamentaux, dont le droit à la communication fait partie.

Par ailleurs, cet article supprime la fixation du cadre général des activités de La Poste par décret en Conseil d’État. En effet, un établissement public est limité au sein de ses activités par son statut. À l’inverse, une société anonyme n’a aucune obligation.

Rien n’empêchera demain La Poste de vendre des téléphones ou des confiseries, d’être promoteur immobilier ou d’exercer toute autre activité que les actionnaires auront jugée rentable, quand bien même l’établissement ne remplirait plus ses obligations de service public. Voilà qui conduit, de fait, à pervertir la raison sociale de cette entreprise.

Lors de l’examen de ce projet de loi en commission, l’adoption d’un amendement déposé par notre collègue Hervé Maurey a permis de maintenir l’obligation pour le Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur la mission d’aménagement du territoire de La Poste avant le 31 décembre 2010. Nous saluons cette initiative.

Cependant, comme nous vous le démontrons depuis maintenant plusieurs jours, la présence postale risque de souffrir. Conjugué à l’ouverture totale à la concurrence, le changement de statut de La Poste augure mal de l’avenir de la mission d’aménagement du territoire, qui reste fondamentalement non rentable.

Ainsi, charger une société anonyme de missions de service public est un bricolage juridico-politique qui ne résistera pas au temps, comme nous l’avons montré à de multiples reprises au cours de ces derniers jours. La situation actuelle de France Télécom en est également une illustration.

La Poste est un service public. L’entreprise peut en toute légalité demeurer un EPIC et continuer de remplir des missions de service public, même de plus en plus nombreuses. Cette trajectoire, notamment au sein d’un pôle public des télécommunications, nous paraît plus en phase avec les enjeux du XXIe siècle.

Le libéralisme a échoué lamentablement, comme nous le prouve chaque jour de manière dramatique la crise que nous traversons. Il est temps de changer vos logiciels, au lieu de revenir sans cesse sur des schémas qui ne fonctionnent pas. Voyez donc la situation de France Télécom aujourd’hui !

La modernité consiste non pas à vendre notre patrimoine aux intérêts privés, mais à faire vivre de manière dynamique une cohésion sociale et territoriale dans notre pays, grâce à ces fabuleux outils que sont les services publics !

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 72 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 312 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

L'amendement n° 515 rectifié est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste et apparentés.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Vera, pour présenter l'amendement n° 72.

M. Bernard Vera. En déposant cet amendement, nous avons écrit dans son objet qu’il était pour nous la conséquence de l’ensemble des amendements déposés sur le projet de loi. En effet, l’article 12 règle une bonne part des réécritures législatives nécessaires à la prise en compte du texte dont nous débattons.

C'est la raison pour laquelle, par cohérence avec ce que nous défendons depuis le début de nos débats, nous demandons la suppression de l’article 12, qui annule l’expression : « l’exploitant public » et la remplace par : « la société » ou « La Poste ».

Mais cet article contient également d’autres modifications que nous ne pouvons pas accepter.

Je mentionnerai tout particulièrement la suppression de la seconde phrase de l’article 4 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de La Poste et à France Télécom. En effet, par cet alinéa, le projet de loi supprime la participation de La Poste à l’effort national d’enseignement supérieur dans le domaine de la communication électronique.

Ainsi, ce texte dégage la nouvelle société privée de la mission de service public concourant à la recherche dans un domaine pourtant essentiel à l’avenir de notre pays.

Nous ne saurions accepter une telle amputation des fonds nécessaires au développement de ce secteur de l’enseignement supérieur.

En outre, ce désengagement apparaît en totale contradiction avec les orientations affichées par le Gouvernement, qui prétend vouloir ouvrir le financement de l’enseignement supérieur aux entreprises privées, par l’intermédiaire de fondations rattachées aux universités.

Avec un tel changement de structure de La Poste, vous aviez la possibilité d’inscrire ce financement dans les missions même de cette nouvelle société. Or vous n’avez pas saisi l’occasion.

La preuve est ainsi faite que vos seuls objectifs sont bien, d’une part, de réduire les dépenses publiques d’enseignement supérieur et, d’autre part, de restreindre les missions de service public assumées par cette nouvelle société privée.

Finalement, votre vision est bien celle d’un service universel, compris comme un minimum socialement acceptable.

En revanche, votre intention est bien de laisser une marge considérable à la marchandisation d’un maximum de services postaux et de réduire les coûts de gestion de La Poste, afin d’augmenter la rentabilité de cette entreprise en vue de sa privatisation future.

Pour nous, c’est une justification supplémentaire à notre demande de suppression de l’article 12.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 312.

M. Jean Desessard. Cet amendement vise à supprimer l’article 12, qui procède à des adaptations juridiques liées au changement de statut.

Au-delà des dispositions obsolètes concernant la création de la société anonyme, cet article supprime des activités que je trouve intéressantes pour La Poste.

Par exemple, aux termes de l’alinéa 4 de cet article, La Poste ne participera plus à l’effort national d’enseignement supérieur dans les domaines de la communication et de l’électronique. Or je considère que La Poste est directement concernée par l’effort de développement de l’électronique, en particulier des échanges électroniques. Il me semble donc essentiel que La Poste puisse continuer de jouer son rôle en la matière, car son expérience est irremplaçable.

Je souhaite également attirer votre attention sur l’alinéa 6, qui modifie l’article 39 de la loi de 1990. Si ce texte est adopté, La Poste ne sera plus soumise au contrôle de la Cour des comptes, ni au contrôle économique et financier de l’État. Si je comprends bien, l’État va recapitaliser la société anonyme La Poste sans avoir voix au chapitre en matière économique et financière. Si l’argument de la transposition juridique apparaît valable, sa mise en œuvre concrète laisse perplexe.

Vous le voyez, sous couvert de coordination juridique, l’article 12 fragilise encore davantage La Poste et le rôle de l’État en tant que garant d’un service postal de qualité. C’est pourquoi je m’oppose à cet article.

M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour présenter l'amendement n° 515 rectifié.

M. Michel Teston. Cet article est une conséquence du changement de statut de La Poste. Il consiste à apporter des modifications à la loi de 1990. Nombre d’entre elles ont déjà été énumérées par les collègues qui se sont exprimés avant moi.

Je retiendrai principalement la suppression des mots : « l’exploitant public », de la référence au « contrat de plan » ou encore, d’une manière plus générale, de diverses dispositions de cette loi, qui seraient désormais rendues caduques du fait de l’application du droit commun des sociétés anonymes.

Je vous rappelle que nous sommes opposés au changement de statut de La Poste et aux conséquences qui en découlent. C'est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.

En effet, nous nous inscrivons toujours dans notre logique. L’article 12 est un article de coordination, rendu nécessaire par l’adoption des articles précédents. C’est simple à comprendre !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre. Ces trois amendements de suppression sont étonnants.

M. Michel Teston. Pas du tout !

M. Christian Estrosi, ministre. Si ! Je rappelle que l’article 12 regroupe des dispositions de coordination, comme le fait de remplacer les mots : « l’exploitant public » par les mots : « la société anonyme ».

Vous ne pouvez tout de même pas nous empêcher de procéder à une coordination avec les mesures que votre Haute Assemblée a largement adoptées !

En outre, l’article 12 supprime des mesures qui étaient devenues totalement obsolètes, comme le fait que La Poste devait participer à l’effort d’enseignement supérieur en matière de communication et d’électronique. En réalité, c’était une mission de France Télécom. Vous n’allez pas vous battre pour préserver une mission relevant du domaine de compétences non pas de La Poste, mais de France Télécom ! Il faut mettre un peu d’ordre.

M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.

M. Michel Teston. J’ai bien entendu l’argumentation de M. le rapporteur et de M. le ministre.

Nous n’avons pas dit que l’article 12 n’était pas cohérent avec l’article 1er. Nous avons simplement rappelé notre opposition à cet article 1er. Et comme nous sommes opposés à cet article, nous sommes naturellement opposés aux dispositions qui en découlent.

M. Daniel Raoul. Évidemment !

M. Michel Teston. Nous n’avons rien dit d’autre ! Cessez donc d’affirmer que nous n’avons rien compris : nous avons parfaitement compris quelles étaient vos intentions ! Je n’y reviendrai pas aujourd'hui ; nous en reparlerons lors des explications de vote sur l’ensemble du projet de loi, c'est-à-dire mardi, mercredi ou jeudi… (Exclamations ironiques.)

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.

Mme Évelyne Didier. Nous avons effectivement noté la cohérence des uns et des autres. Mais si la commission et la Gouvernement ont leur cohérence, qu’on ne nous reproche pas d’avoir la nôtre !