M. le président. Il n’y a pas non plus de prise de parole sur l’article, madame, encore moins quand il s’agit d’un article additionnel.

Mme Isabelle Pasquet. Je reviens à l’amendement.

M. le président. à titre exceptionnel, je vous donne la parole sur l’amendement.

M. Laurent Béteille. Il est trop gentil le président !

Mme Isabelle Pasquet. Les sénatrices et les sénateurs du groupe CRC-SPG voteront contre ces amendements déposés par le groupe socialiste. Nous comprenons les raisons qui ont motivé leur dépôt, mais nous considérons que ces amendements, s’ils étaient adoptés, ne seraient pas de nature à répondre au problème récurrent rencontré par les CCAS.

En effet, comme nous l’avons dit à l’occasion tant de l’examen par le Sénat de la proposition de loi de notre collègue Domeizel que de la discussion de l’article 27 du projet de loi de finances pour 2010, il n’est pas normal que la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales doive supporter économiquement les conséquences financières d’une mesure d’exonération de cotisations sociales accordée aux CCAS pour leur permettre de faire face à leurs propres difficultés financières.

Nous entendons rappeler que le Gouvernement ne doit pas disposer comme il l’entend des cotisations sociales, fussent-elles patronales, car les sommes perçues à ce titre sont la propriété des salariés et non de l’État. D’une manière générale, nous souhaitons que l’État cesse de considérer les cotisations et les comptes sociaux comme un supplétif à son propre budget.

Cela est vrai pour les exonérations de cotisations accordées aux employeurs pour aider à sauvegarder l’emploi, mais également pour les CCAS, quand bien même ces exonérations auraient pour objet de leur permettre d’amoindrir les distorsions qui existent entre opérateurs publics et opérateurs privés.

Selon nous, la question fondamentale est celle de la soumission aux règles de la concurrence de ces services à la personne, autorisée en 2005, et qui correspond à une certaine logique libérale de dérégulation, laquelle s’accompagne d’ailleurs, dans le privé, de l’imposition aux salariés de conditions de travail très dures avec des temps partiels imposés et de trop faibles rémunérations.

Le groupe CRC-SPG considère que la solution est plus un nivellement par le haut que par le bas. Et sans doute, à la place de la pérennisation ou d’une extension des cotisations sociales, serait-il plus sage de revoir la politique d’exonérations de cotisations sociales accordées aux employeurs privés, en prévoyant notamment de les conditionner à une amélioration salariale notable.

Si nous adoptions ces amendements, outre le fait que nous voterions contre une mesure que nous avons soutenue il y a peu, nous accepterions la logique d’opposition entre les préoccupations des CCAS et les effets financiers sur les comptes de la CNRACL, et donc sur la stabilité et la pérennité des prestations qu’elle garantit à ses agents.

C’est pourquoi, bien que partageant la préoccupation de nos collègues socialistes, qui renvoient directement l’État à ses propres responsabilités, nous voterons contre ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-214.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Avant d’examiner les crédits de la mission « Ville et logement », je vais suspendre la séance quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à minuit, est reprise le samedi 5 décembre 2009, à zéro heure cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Ville et logement

Articles additionnels après l’article 59 septies
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Article 35 et état B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Ville et logement ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en 2009, la mission « Ville et logement » a connu un certain nombre de turbulences qui ont touché sa structure et son administration, mais aussi, plus substantiellement, son financement à moyen et à long terme. L’examen du projet de budget pour 2010 et surtout les réponses que le Gouvernement voudra bien apporter à nos interrogations nous convaincront, je l’espère, que cette période d’instabilité et d’incertitude touche à sa fin, ce qui contribuerait, à l’évidence, à rassurer l’ensemble des acteurs des politiques de la ville et du logement.

En effet, en 2009, l’architecture de la mission budgétaire a connu des modifications avec, d’une part, l’intégration du programme 177 « Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables », qui était précédemment rattaché à la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », et, d’autre part, la création du programme 147 « Politique de la ville ».

Le rattachement du programme 177 avait été souhaité par la commission des finances, dans le contexte de la mise en œuvre du DALO, ou droit au logement opposable, considérant que cela serait cohérent avec une approche des parcours résidentiels devant englober l’ensemble de la chaîne de l’hébergement et du logement.

Quant à la création du programme 147, quoi que l’on en pense par ailleurs, elle n’est que la conséquence tirée de la disparition des crédits budgétaires destinés à l’ANRU, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine.

Avec ces modifications, nous considérions que la mission trouvait là une plus grande cohérence, d’autant qu’elle conservait son statut de mission ministérielle. Mais, patatras ! le remaniement de juin dernier et ses changements induits dans les structures gouvernementales ont remis en cause le caractère ministériel de la mission, qui se trouve maintenant éclatée entre deux ministères de rattachement.

Je ne suis pas certain que cette situation soit véritablement source d’efficacité. Je ne pense pas non plus que, en termes de visibilité, elle soit de nature à contribuer à la nécessaire revalorisation de ces politiques publiques étroitement liées.

Raison de plus pour que la mission ne soit pas une nouvelle fois modifiée. C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, je souhaiterais obtenir confirmation du maintien du programme « Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables » au sein de la mission « Ville et logement », contrairement à ce que vient de proposer dernièrement le Comité interministériel d’audit des programmes.

Par ailleurs, je voudrais suggérer au Gouvernement de veiller à l’avenir à ce que l’écart ne soit pas trop grand en termes de délais entre les engagements pris et leur mise en œuvre. De ce point de vue, je crois pouvoir affirmer qu’il existe encore des marges de progression importantes. Par exemple, pour le volet « logement », on peut citer la laborieuse mise en place de la garantie universelle des risques locatifs, dont certains craignent qu’elle ne soit une nouvelle « usine à gaz », et pour laquelle il aura fallu plus de deux ans de négociation.

Il y a aussi le droit au logement opposable pour lequel nous avons progressé dans les textes via la régionalisation des procédures en Île-de-France. Cependant, dans les faits, force est de constater que la possibilité de doubler les commissions départementales afin d’accélérer le traitement des dossiers dans cette zone très tendue n’a pas encore été utilisée bien que le Parlement ait voté les crédits pour les faire fonctionner.

Monsieur le secrétaire d’État, l’argument de la distorsion possible de décision d’une commission à l’autre dans le même département est tout simplement absurde, puisque l’on a accepté le principe de la régionalisation de la demande en Île-de-France. Il faut par conséquent que vous fassiez appliquer les décisions du Parlement sans plus attendre, car les délais de traitement des dossiers sont toujours extrêmement longs. On ne peut donc que redouter le pire pour la seconde phase de généralisation du DALO à la fin de l’année 2011.

Concernant la politique de la ville, il me faut citer le non-aboutissement de la réflexion sur la révision de la géographie prioritaire, que la commission des finances du Sénat avait pourtant engagée en faisant adopter le principe d’une actualisation tous les cinq ans, à partir de 2009, du zonage prioritaire.

Certes, madame la secrétaire d’État, le Gouvernement a lancé une large concertation auprès des acteurs locaux et nationaux au cours du premier semestre de cette année. Il y a eu un Livre vert préparé par le secrétariat général du Comité interministériel des villes et le rapport commandé par le Premier ministre au sénateur Pierre André et au député Gérard Hamel. Mais, au bout du compte, en cette fin d’année 2009, il ne reste pour le moment qu’une controverse lancée sur la suppression ou non des zones urbaines sensibles et l’absence, jusqu’à plus ample informé, de réunion du Comité interministériel des villes, lequel était censé donner une nouvelle impulsion à la politique de la ville.

Enfin, si le report de la réforme de la DSU, la dotation de solidarité urbaine, a été heureusement compensé par les 70 millions d’euros supplémentaires concentrés cette année sur les 250 villes les plus pauvres, il apparaît également comme un signe d’atermoiement venant après d’autres.

Bref, ce sont autant de débats non tranchés et de polémiques, qui suscitent, outre les inquiétudes liées au financement de l’ANRU et de l’ANAH, l’Agence nationale de l’habitat, sur lesquelles je reviendrai plus avant, des interrogations sur les objectifs du Gouvernement et son engagement réel dans la conduite d’une politique ambitieuse de rééquilibrage au profit des zones urbaines les plus en difficulté.

Madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, votre charge est lourde. Vous avez la responsabilité de domaines dont la complexité est évidente, et nous savons bien que les résultats sont difficiles à obtenir. Il est donc particulièrement dommageable que les efforts budgétaires biens réels de ces huit dernières années ne soient pas mieux mis en valeur. J’en veux pour preuve la polémique soulevée par les propos de M. le maire de Paris, qui a parlé hier de « désengagement ignoble de l’État » en matière d’hébergements d’urgence, alors que les crédits qui y sont destinés ont très sensiblement augmenté ces dernières années.

Si l’on peut toujours soutenir que les choses ne vont pas assez vite, encore faut-il rappeler que l’État n’est pas seul responsable. Les collectivités locales doivent aussi assumer leurs responsabilités.

En tout état de cause, on ne peut certainement pas dire que l’État se désengage. Le PARSA, le plan d’action renforcé pour les sans-abri, est d’ailleurs en voie d’être respecté concernant les places dans les CHRS, les centres d’hébergement et de réinsertion sociale, et les maisons-relais, même si sur la construction de logements financés en PLAI, ou prêt locatif aidé d’intégration, le retard est patent.

Ce malheureux exemple montre bien que, sur des sujets aussi sensibles, il faut non seulement faire et bien faire – c’est le rôle premier des politiques –, mais aussi savoir faire et faire savoir.

Faut-il encore que les objectifs gouvernementaux soient clairs et assumés par tous. Faut-il également que les politiques et les structures qui les portent soient lisibles. C’est ce à quoi le Parlement vous invite.

Venons-en maintenant aux chiffres de ce projet de budget.

Les dotations budgétaires de la mission « Ville et logement » progressent cette année, à périmètre constant, de 3,5 % en autorisations d’engagement et de 4,5 % en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2009.

Bien que l’augmentation des crédits ne soit pas nécessairement synonyme d’efficacité des politiques, nous ne pouvons que nous féliciter de cette progression compte tenu des besoins. Néanmoins, cette appréciation positive doit être modérée par deux observations.

Tout d’abord, l’évolution des crédits est en grande partie imputable à la progression de la masse des aides personnalisées au logement, c’est-à-dire à une prestation en lien direct avec les conséquences de la crise économique.

Ensuite, il convient de rappeler que les moyens importants mis en œuvre par le plan de relance ont largement contribué au financement de ces politiques. À ce titre, en 2009, ont été inscrits 1,157 milliard d’euros en autorisations d’engagement ainsi que 760 millions d’euros en crédits de paiement. Pour 2010, ce sont encore 80 millions d’euros de crédits de paiement qui iront aux aides à la construction, 150 millions d’euros à la rénovation urbaine et 67 millions d’euros à l’ANAH.

Notons cependant que ces crédits ont parfois financé bien autre chose que des dépenses d’investissement. Je pense notamment aux frais de fonctionnement des 1 830 places d’hébergement d’urgence ouvertes en 2008, à l’intermédiation locative ou à l’aide alimentaire.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme. Il a raison !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Or le plan de relance a pour caractéristique première de n’être pas permanent. Il faudra donc, à l’avenir, trouver d’autres sources de financement.

Notons également que ce projet de budget permet d’envisager, sur le programme 135 « Développement et amélioration de l’offre de logement », le financement de 110 000 logements sociaux grâce à une inscription budgétaire, en autorisation d’engagement, supérieure de 130 millions d’euros par rapport au budget prévisionnel triennal 2009-2011. C’est une source de satisfaction.

Quant au programme 147 « Politique de la ville », si les crédits d’intervention principalement destinés à l’ACSÉ, l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, apparaissent effectivement en baisse, à périmètre constant et en tenant compte de l’exécution budgétaire pour 2008 et du prévisionnel pour 2009, c’est une quasi-stabilité que nous constatons.

Les CUCS, les contrats urbains de cohésion sociale, ont été prolongés d’une année dans l’attente de la refonte de la géographie prioritaire. Les collectivités locales et les associations voient donc leurs moyens reconduits pour l’année prochaine, mais elles sont dans l’incertitude quant au contenu de la prochaine génération de contrats et dans l’attente d’un calendrier précis quant à leur négociation. Il serait donc souhaitable, madame la secrétaire d’État, que vous puissiez nous éclairer sur ce point.

Enfin, bien que des efforts importants de rebasage budgétaire aient été amorcés en 2009, la mission « Ville et logement » reste cependant marquée par des sous-budgétisations, qui constituent bien évidemment une atteinte au principe de sincérité budgétaire.

Pour 2010, elles touchent principalement les programmes 177 « Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables »…

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. C’est vrai.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. … et 109 « Aide à l’accès au logement ».

Pour le premier de ces programmes, la simple comparaison du montant des crédits consommés en 2008 par rapport aux crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2010 fait apparaître, à structure constante, un écart de 131 millions d’euros représentant 12 % du montant total de ces crédits.

Ces prévisions en baisse pour l’hébergement d’urgence et l’aide alimentaire nous paraissent particulièrement peu réalistes, monsieur le secrétaire d’État, compte tenu des effets de la crise, de l’accroissement des frais de fonctionnement correspondant aux nouvelles places d’hébergement créées et, enfin, des engagements pris pour l’humanisation des centres d’hébergement d’urgence, dont les progrès sont notables.

À l’évidence, il ne s’agit pas là d’un désengagement de l’État, mais bien de sous-budgétisations qui apparaîtront d’autant plus visiblement en 2010 que les actions du programme ne seront pas abondées, comme en 2009, par les crédits du plan de relance.

Concernant les aides personnelles au logement, les effets de la crise mais aussi des simplifications administratives ont été pris en compte et la subvention d’équilibre versée par l’État au fonds national d’aide au logement, le FNAL, pour 2010, augmentera de 423 millions d’euros, qui ont été répercutés sur le plafond prévu dans le cadre de la programmation pluriannuelle 2009-2011.

Ces remises à niveau étaient absolument nécessaires, car les reports de charges étaient devenus systématiques ces dernières années et les prévisions d’exécution actualisées faisaient apparaître un défaut de financement de plus de 550 millions d’euros pour 2009.

Dans ces conditions, il était indispensable que le programme 109 fasse l’objet d’une rallonge budgétaire. C’est chose faite dans le projet de loi de finances rectificative pour 2009, qui procédera à une ouverture de crédits de 558 millions d’euros, soit 11,3 % du total des crédits ouverts en loi de finances initiale.

Ce complément de dotation permettra, d’une part, de couvrir les besoins de 2009 pour 342 millions d’euros et, d’autre part, de rembourser la dette de l’État à l’égard des organismes sociaux au titre des années antérieures, pour 217 millions d’euros.

Voilà donc, pour 2010, une base de départ qui semble bien meilleure que ce que nous avons connu précédemment, et nous nous en félicitons.

Il vous appartiendra, monsieur le secrétaire d’État, de veiller à ce qu’une dette ne se reconstitue pas, d’autant que, en loi de finances initiale pour 2011, nous aurons besoin de mobiliser des sommes très importantes pour répondre aux besoins de crédits de paiement liés à la montée en puissance des projets de rénovation urbaine.

Cela m’amène au dernier point de mon intervention, que je ne peux terminer sans évoquer le lourd chantier que nous devrons mener à bien l’année prochaine afin de préparer la sortie de ce que j’avais appelé « un pis-aller budgétaire ».

En effet, pour la période triennale 2009-2011, le financement de pans entiers des politiques du logement et de la ville a été transféré à la charge du 1 % logement, à hauteur de 480 millions d’euros pour l’ANAH et de 770 millions d’euros pour l’ANRU, auxquels il faudra ajouter, exceptionnellement, 150 millions d’euros pour le financement du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés, le PNRQAD. Mais cette solution n’apporte pas de réponse pérenne au financement des opérateurs majeurs de la mission.

En ce qui concerne l’ANAH, il faut rappeler que le changement de mode de financement a été effectué si brutalement qu’il a mis en péril l’année dernière sa situation financière. À la fin de l’année 2008, l’Agence a dû, faute de trésorerie, clore son exercice en novembre et mettre en place, avec l’Agence France Trésor et l’appui des ministères de tutelle, une convention d’avance de trésorerie d’un montant maximal de 240 millions d’euros, en attente des versements au titre du 1 % logement pour 2009.

Dans le même temps, l’État a transféré à l’ANAH sa compétence en matière de résorption de l’habitat insalubre, mais il lui a aussi transféré un reliquat de « dettes » d’engagements dépassant 50 millions d’euros, qui s’ajouteront au montant de ceux qui restent à couvrir à la fin de l’année 2009, soit environ un milliard d’euros, ce qui n’est pas rien !

Concernant l’ANRU, la situation n’est pas meilleure et deviendra tout simplement intenable à compter de la fin de l’année 2010 puisque le programme national de rénovation urbaine – PNRU – arrive dans une phase active de réalisation des opérations prévues dans les conventions.

À la fin de l’année 2010, la trésorerie de l’ANRU sera définitivement asséchée et il faudra prévoir, dès 2011, des ressources annuelles de l’ordre de 1,6 milliard d’euros, largement supérieures à la contribution annuelle imposée aujourd’hui au 1 % logement.

Le système de financement de l’ANAH et de l’ANRU mis en place en 2008 n’est donc pas viable, et il conduit de surcroît inexorablement à l’épuisement des ressources du 1 % logement.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. C’est faux !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Non, monsieur le secrétaire d’État, puisque l’on remplace des prêts à l’ANRU par des subventions…

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Sur trois ans, pas sur vingt ans !

Mme Odette Terrade. Et ce n’est pas nous qui le disons !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Je le dis parce que je le démontre.

Le système de financement de l’ANAH et de l’ANRU doit donc être revu et l’année 2010 doit impérativement être mise à profit pour élaborer un schéma réaliste et pérenne de financement des interventions de ces deux agences.

Sous réserve de ces observations et de l’amendement à caractère budgétaire qu’elle vous présentera, la commission des finances vous demande d’adopter les crédits de la mission « Ville et logement ». (M. le président de la commission des finances applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, en remplacement de M. Pierre André, rapporteur pour avis de la commission de l’économie.

M. Gérard Cornu, en remplacement de M. Pierre André, rapporteur pour avis de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, madame le secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je m’exprime en effet au nom de notre collègue Pierre André, qui n’a pu être présent ce soir.

Vous le savez, la politique de la ville vise à réduire les écarts entre les quartiers en difficulté et les autres quartiers urbains de nos villes. Comme le rappelait le Président de la République dans son discours du 8 février 2009 relatif au plan « Espoir banlieues », « la politique de la ville a été conçue pour intervenir de manière spécifique, comme effet levier, dès lors que les politiques de droit commun de l’État et des collectivités territoriales se sont pleinement exercées ».

Aujourd’hui, plus de 8 millions de nos concitoyens vivent dans un quartier éligible à la politique de la ville : c’est dire l’enjeu de cohésion nationale auquel cette politique publique est confrontée. Pourtant, elle est sans doute celle qui suscite les plus vifs débats, opposant souvent deux attitudes.

D’un côté, s’expriment ceux qui doutent de son utilité, considérant que les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances, surtout lorsque les médias relayent les faits divers qui surviennent dans nos quartiers dits « sensibles ». De l’autre, se trouvent ceux qui considèrent que la politique de la ville fonctionne finalement plutôt bien et qu’il ne faut surtout pas en changer, craignant que toute réforme ne se traduise par un désengagement financier des partenaires.

M. Pierre André, rapporteur pour avis, estime que cette politique garde plus que jamais sa pertinence. Il remarque que les changements opérés dans ce budget 2010 sont peu nombreux, celui-ci s’inscrivant finalement dans la continuité de l’année précédente, conformément à la programmation triennale des finances publiques.

Aussi relève-t-il, pour 2010, plusieurs points.

Tout d’abord, l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances reste le principal opérateur de la politique de la ville. Par ailleurs, la nouvelle gouvernance de la politique de la ville est désormais bien établie et repose sur le secrétariat général du comité interministériel des villes, le SG-CIV, qui sera chargé de préparer les travaux du comité, celui-ci étant l’instance de pilotage et de décision présidée par le Premier ministre, qui doit se réunir au moins deux fois par an.

Ensuite, l’avenir des dispositifs de zones franches urbaines est de plus en plus incertain, alors même que leurs effets sur l’emploi ont été démontrés par l’Observatoire national des zones urbaines sensibles, l’ONZUS.

Enfin, l’effort de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine doit être salué, notamment du fait de sa participation au programme national de requalification des quartiers anciens dégradés en plus du programme national de rénovation urbaine. Toutefois, le financement de cette agence s’annoncera problématique à partir de 2012 ; c’est pourquoi nous souhaiterions que le Gouvernement s’exprime sur ce point.

Cette relative stabilité de la maquette budgétaire n’interdit toutefois pas de s’interroger sur les modalités d’intervention de la politique de la ville. En avril dernier, notre collègue Pierre André s’est ainsi vu confier une mission par le Premier ministre afin de proposer une méthode opérationnelle de révision de la géographie des zones urbaines sensibles et des contrats urbains de cohésion sociale.

Son constat est simple : « l’action par zonage n’a pas fait la preuve de son efficacité ». Selon lui, malgré la multiplication des actions conduites dans les territoires prioritaires, les écarts avec le reste de la ville ne se sont pas véritablement réduits, notamment dans le domaine clé de l’emploi. Au contraire, en confinant l’action publique aux quartiers, le zonage trop strict a produit des effets pervers.

La sortie du zonage est donc le point d’entrée de la réforme proposée. Notre collègue constate « qu’aucun territoire prioritaire n’est jamais sorti de son zonage ». Il suggère donc de remplacer le contrat urbain de cohésion sociale et les nombreux dispositifs associés par un contrat unique signé entre le maire et le préfet, et adossé à la durée du mandat municipal. Dans cette perspective, les crédits devront être répartis suivant de nouveaux critères et de telle sorte que les communes les plus pauvres soient aidées en priorité.

Notre collègue suggère en définitive de redonner au maire un rôle pour agir autour d’un véritable projet territorial. Madame le secrétaire d’État, nous savons que vous êtes loin de partager toutes ces options. Pourtant, nos divergences ne portent pas sur les constats, unanimement partagés. C’est pourquoi nous espérons que le Gouvernement fera preuve de sagesse en suivant les recommandations d’élus locaux qui sont concernés au premier plan par cette politique.

Sous le bénéfice de ces observations, je vous propose, mes chers collègues, d’adopter les crédits de la mission « Ville et logement ». (Applaudissements sur les travées de lUMP. – Mme Anne-Marie Escoffier applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, en remplacement de M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis de la commission de l’économie.

Mme Bariza Khiari, en remplacement de M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je m’exprime au nom de mon collègue Thierry Repentin, qui n’a pu être présent ce soir.

La crise économique n’est pas sans conséquence sur la situation du logement en France. Ainsi, 340 000 logements ont été mis en chantier sur les douze derniers mois, soit un repli de 20 % par rapport aux douze mois précédents. (M. le secrétaire d’État opine.) Or, 270 000 ménages supplémentaires arrivent chaque année sur un marché qui accuse déjà un déficit évalué à 800 000 logements. En clair, la France manque de logements, surtout là où elle en aurait le plus besoin, puisque, paradoxalement, c’est là où les besoins sont les plus importants que construire coûte le plus cher.

C’est donc dans son contexte qu’il faut analyser le budget du logement. Certes, ce budget, évalué à près de 7 milliards d’euros, augmente de 6 % par rapport à l’année dernière. Toutefois, permettez-moi, monsieur le secrétaire d’État, de relativiser ce chiffre. En effet, il ne résulte pas d’un effort particulier du Gouvernement en faveur du logement mais s’explique en réalité par la hausse des aides personnalisées au logement qui, comme vous le savez, s’accroissent mécaniquement sous l’effet de la montée du chômage, celui-ci pesant directement sur la situation financière des ménages.

À cet égard, je m’inquiète de l’avenir du financement de ces aides puisqu’il provient en partie des cotisations des employeurs, amenées à décroître sous l’effet de la crise. Pourtant celles-ci sont aujourd’hui indispensables pour nos concitoyens.

En ces temps d’interrogation sur le pouvoir d’achat, le logement est bel et bien devenu un critère pertinent pour mesurer les disparités de conditions de vie entre les ménages aisés et les ménages les plus modestes Depuis une vingtaine d’années, ce poste de dépenses n’a fait qu’augmenter, passant de 14 % du budget des ménages en 1988 à près de 30 % aujourd’hui.

J’en viens maintenant à la prévention de l’exclusion et à l’insertion des personnes vulnérables. Je dois vous dire mon étonnement lorsque, le 20 novembre dernier, j’ai découvert, sans doute comme vous, monsieur le secrétaire d’État, que 56 % des Français estiment qu’ils pourraient un jour se retrouver sans abri. Le constat est douloureux pour la France : aujourd’hui, près de 8 millions de personnes, soit plus de 13 % des Français, sont confrontés à la pauvreté. Aussi, je ne peux que m’étonner de constater une diminution des crédits consacrés à cette politique, alors même que la situation sociale se dégrade du fait de la crise économique.

S’agissant du développement et de l’amélioration de l’offre de logement, comment justifier que les crédits accusent une baisse de plus de 15 %, alors que ces dotations sont indispensables pour financer la construction de logements sociaux et la réhabilitation du parc privé ?

Je ne peux donc que regretter le désengagement progressif de l’État, inacceptable dans la mesure où la mobilisation des opérateurs du logement social ne cesse de s’amplifier et que les collectivités locales sont de plus en plus mises à contribution. À cet égard, je doute que la réforme du 1 % logement soit totalement maîtrisée. En effet, celui-ci devrait théoriquement contribuer au financement de l’ANAH à hauteur de 480 millions d’euros par an en 2009, en 2010 et en 2011. Or ce versement accuse déjà un retard en 2009, puisque seulement 200 millions d’euros ont été versés à ce jour.

Je remarque ensuite que 480 millions d’euros sont budgétés cette année pour produire 110 000 nouveaux logements sociaux. C’est bien, mais est-ce suffisant, face à l’ampleur des besoins, 60 % des ménages français étant éligibles à l’attribution d’un logement social ? Surtout, le Gouvernement fait passer l’enveloppe budgétaire consacrée au logement social de 550 millions d’euros à 480 millions d’euros cette année. Si l’on en juge par les chiffres, ce sont les subventions unitaires moyennes qui seront revues à la baisse.

Monsieur le secrétaire d’État, n’y a t-il pas un paradoxe à voir l’État diminuer sa participation alors même que vous nous demandez de développer le logement social ?

Pour finir, j’insisterai sur un sujet qui intéresse particulièrement notre commission : la promotion de l’habitat durable. J’ai la conviction que le secteur du logement peut apporter sa contribution à la lutte contre le changement climatique, ce secteur représentant pas moins de 40 % de la consommation d’énergie finale dans notre pays. De nombreux logements demeurent « énergivores », le nombre de « passoires thermiques » étant évalué à 7 millions. Or les propriétaires concernés sont souvent modestes et la rénovation de ce parc est très coûteuse. C’est pourquoi notre commission soutient le « verdissement » de la législation fiscale dans ce domaine.

En définitive, la crise que nous traversons doit être l’occasion de refonder la politique du logement pour l’adapter aux besoins des personnes et l’orienter résolument vers l’édification d’un habitat durable.

Répondre à cette exigence serait triplement bénéfique pour la société. Premièrement, cela permettrait d’assurer la pérennité d’un parc respectueux de l’environnement ; deuxièmement, nos concitoyens pourraient ainsi réduire la facture d’un poste de dépense aujourd’hui incontournable ; troisièmement, nous disposons là d’un gisement d’emplois non négligeable.

Pour conclure, vous comprendrez que, à titre personnel, M. le rapporteur pour avis appelle à voter contre ce budget, la commission de l’économie ayant, pour sa part, émis un avis favorable à l’adoption de ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)