M. Gérard Longuet. La IIIe République est née de l’amendement Wallon !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Absolument ! Même sous la Ve République, nous en avons fait la preuve la semaine dernière, le droit d’amendement est une réalité. Il faut s’en réjouir et en aucun cas dénigrer ce droit !

Mme Nicole Bricq. Vous avez voté une loi sur le dialogue social et vous vous asseyez dessus !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous ne sommes pas nécessairement à la remorque des organisations que vous avez citées. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Ce ne sont pas le MEDEF et les organisations syndicales qui, en principe, font la fiscalité, comme vous nous le conseilleriez ici.

Mme Nicole Bricq. Non, nous vous demandons de les écouter !

M. Jean-Pierre Sueur. On veut les écouter !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est une grave contradiction !

Enfin, j’ai entendu l’expression « fiscalité de classe ». Cela m’a fait réagir. L’impôt sur le revenu au taux progressif constitue-t-il une fiscalité de classe ?

Mme Nicole Bricq. Vous n’arrêtez pas de diminuer la progressivité ! Vous ne cessez pas de lui porter des coups à ce pauvre impôt !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet impôt, est-ce une fiscalité de classe ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Nous avons cité différents cas de figure de personnes qui ont la chance de bénéficier de revenus relativement élevés. S’il leur arrive, hélas ! un problème, il est logique et normal que le revenu de remplacement suive le même sort que le revenu qui est remplacé.

J’en viens à l’amendement n° II-385.

L’Assemblée nationale, je le rappelle, a veillé à introduire une distinction entre, d’une part, l’indemnité journalière pour la partie relative à la compensation du préjudice subi et, d’autre part, la même indemnité en ce qu’elle correspond à un revenu de remplacement. C’est une bonne chose !

Notre excellente collègue député Marie-Anne Montchamp a considéré que ce revenu de remplacement était l’équivalent de l’indemnité qui serait versée en cas de maladie. L’Assemblée nationale a donc décidé de ne fiscaliser que la part de l’indemnité journalière-accident du travail équivalant à l’indemnité journalière de maladie, aujourd’hui soumise à l’impôt sur le revenu. Cette solution présente l’avantage de ne fiscaliser que partiellement les indemnités journalières-accident du travail.

Toutefois, ce dispositif pose des difficultés techniques de mise en œuvre et des difficultés en termes d’équité.

C’est pourquoi je suis amené à vous soumettre le présent amendement : nous conservons le principe d’une fiscalisation partielle des indemnités journalières-accident du travail et nous proposons de fixer la base imposable de ces indemnités forfaitairement, et non plus en valeur.

Le taux forfaitaire serait de 50 %, ce qui correspond à la moyenne entre la part maximale et la part minimale que peut représenter l’indemnité journalière de maladie au sein de l’indemnité journalière-accident du travail, quelle que soit la durée de l’arrêt de travail.

Ce dispositif offre une solution simple, qui pourra être appliquée dans tous les cas de figure, et qui paraît conforme à l’équité. En effet, à l’examen de la version qui nous a été soumise, les rémunérations relativement basses seraient moins bien traitées qu’elles ne le seront avec la formule forfaitaire à 50 %.

Telle est, monsieur le ministre, la nature de la proposition élaborée par la commission des finances pour arriver à un équilibre raisonnable dans cette affaire.

M. le président. L'amendement n° II-28 rectifié, présenté par MM. Jégou, Badré, Détraigne, Dubois, Merceron et Soulage et Mmes Dini et Payet, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

1° À l'article 80 quinquies, après les mots : « alloués aux victimes d'accidents du travail », sont insérés les mots : « qui ne bénéficient pas du maintien de la totalité de leur salaire par l'employeur en vertu d'un contrat individuel ou collectif de travail, des usages ou de sa propre initiative ».

La parole est à M. Denis Badré.

M. Denis Badré. Jean-Jacques Jégou a soulevé, voilà quelques années, un vrai problème de justice fiscale. Une réflexion sur ce thème a fini par s’engager dans un cercle qui s’élargit régulièrement. Je note qu’un certain nombre de personnalités éminentes de la commission des affaires sociales qui, jusqu’à présent, étaient assez opposées à l’ouverture de ce débat - Mme Procaccia le rappelait tout à l’heure –, notamment le rapporteur général de la commission des affaires sociales, Alain Vasselle, et l’ancien président de la commission des affaires sociales, Nicolas About, ont présenté des amendements. Ces propositions nous ont permis d’avancer et de sortir du débat opposant la commission des finances, qui cherche uniquement à faire entrer de l’argent, à la commission des affaires sociales, laquelle s’efforce exclusivement de traiter le sort des malheureux. Cela n’est pas le sujet. Le sujet, c’est la justice fiscale.

Dans ce contexte, Jean-Jacques Jégou, fidèle à sa réflexion de départ mais profitant des apports de tous ceux qui ont bien voulu apporter leur contribution au débat, propose simplement, en complétant l’amendement de la commission des finances, de n’assujettir que les personnes qui bénéficient du maintien de la totalité de leur salaire.

M. le président. L'amendement n° II-225, présenté par MM. About, Biwer, Détraigne, Maurey, Pozzo di Borgo, Borotra, Deneux, Dubois, C. Gaudin, Merceron et Pignard et Mme Payet, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

pour la part qui excède la fraction du gain journalier de base mentionné à l'article L. 323-4 du code de la sécurité sociale

par les mots :

lorsque leur montant n'excède pas 86% du gain journalier de base mentionné à l'article L. 323-4 du code de la sécurité sociale ni la rémunération mentionnée au troisième alinéa du III de l'article L. 241-13 du même code

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° II-34 rectifié ter, présenté par M. Dériot, Mmes Bout, Debré, Desmarescaux et Rozier et MM. Cantegrit et Vasselle, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

pour la part qui excède la fraction du gain journalier de base mentionné à l'article L. 323-4 du code de la sécurité sociale

par les mots :

lorsque leur montant n'excède pas 86 % du gain journalier de base mentionné à l'article L. 323-4 du code de la sécurité sociale

Cet amendement n'est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° II-28 rectifié ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement, qui est dans le même esprit que celui de la commission, prévoit un principe différent de fiscalisation. Toutefois, il n’est pas certain que la formule proposée permette d’aboutir à une solution totalement incontestable.

À titre d’exemple, deux salariés qui recevraient la même indemnité pourraient être traités différemment en termes d’imposition, en fonction d’une circonstance extérieure à cette indemnité, selon qu’ils sont couverts ou non par une convention collective. Cet amendement – même si je partage les intentions de son principal auteur – me paraît présenter un risque de complexité. Il est beaucoup plus simple de ne fiscaliser que 50 % de l’indemnité journalière par référence à la proportion moyenne que représenteraient les indemnités maladie par rapport au total des indemnités accident du travail.

La commission souhaite donc que les auteurs de l’amendement n° II-28 rectifié veuillent bien le retirer au bénéfice de son propre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos II-385 et II-28 rectifié ?

M. Éric Woerth, ministre. Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, le Gouvernement est favorable à l’amendement présenté par la commission, qui a le mérite de la simplicité. Il prend en compte la discussion qui a eu lieu à l’Assemblée nationale et, en fixant un taux forfaitaire d’imposition de 50 %, permet que la mesure soit le plus opérationnel possible. En effet, c’est assez compliqué, il y a des seuils qui varient, etc.

Aux termes de cet amendement, tout ce qui excède la rémunération ou la substitution au travail dans le cadre d’une maladie normale peut être considéré comme un supplément dû au fait qu’il s’agit d’un accident du travail. Dans ce cas-là, on considère – et l’on pousse le raisonnement très loin – que ce n’est pas un revenu de substitution, que cela prend en compte en partie les raisons de l’arrêt de travail – cela n’est pas fiscalisable – et le reste est fiscalisable sur le socle de maladies normales. Avec un forfait à 50 %, on obtient un bon résultat, et c’est simple.

Voilà pourquoi, monsieur Badré, je souhaiterais que vous optiez pour l'amendement de la commission.

M. le président. Monsieur Badré, l’amendement n° II-28 rectifié est-il maintenu ?

M. Denis Badré. J’ai bien entendu la suggestion qui m’a été faite par M. le rapporteur général et M. le ministre de retirer cet amendement, auquel tient beaucoup Jean-Jacques Jégou. Si l’amendement de la commission des finances est adopté, le débat s’ouvrira de nouveau en CMP. Jean-Jacques Jégou pourra, d’ici à la CMP, faire valoir d’autres arguments. Je pense donc ne pas trop m’avancer en retirant cet amendement.

Jean-Jacques Jégou a déjà la satisfaction de voir le débat dans lequel il s’est engagé il y a quelques années progresser sur les vrais sujets, de la bonne manière, sans arrière-pensée et sans susciter de guerre de religion. C’est pour lui une manière de montrer qu’il a posé une bonne question pour laquelle s’élaborent de vraies réponses.

D’autres solutions avaient été envisagées qui n’ont pas pu être défendues à l’instant. C’est notamment le cas de l'amendement n° II-225 de Nicolas About qui pourrait éventuellement être pris en compte pour partie lors de la discussion en CMP. Je ne l’avais pas signé parce que je restais fidèle à l’amendement de la commission.

M. le président. L’amendement n° II-28 rectifié est retiré.

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote sur l'amendement n° II-385.

M. Jean-Pierre Godefroy. Premier point : monsieur le rapporteur général, quel va être le rendement fiscal pour l’État de la disposition que vous proposez ? Si l’on en avait une idée à partir de la proposition issue de l’Assemblée nationale, ce n’est pas le cas ici.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Environ 135 millions d'euros !

M. Jean-Pierre Godefroy. Second point : quand on lit les trois autres amendements, même si deux d’entre eux n’ont pas été défendus, on s’aperçoit que leurs auteurs, notamment notre collègue Jean-Jacques Jégou, qui était très favorable à cette fiscalisation, ont prévu des garde-fous afin d’éviter que les revenus les plus modestes ne soient pénalisés, car, comme nous le disions déjà tout à l’heure, ce risque est réel.

L’ancien président de la commission des affaires sociales Nicolas About a, quant à lui, prévu que ne seraient fiscalisées que les indemnités journalières excédant 1,6 SMIC. Cela veut donc dire que la fiscalisation va aller très bas et toucher des revenus très modestes, contrairement à ce que l’on essaie de nous faire croire. Le rapporteur pour les accidents du travail et maladies professionnelles sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, notre collègue Gérard Dériot, a proposé que soient fiscalisées les indemnités journalières excédant 86 % du revenu journalier antérieur.

On voit bien que tous nos collègues – même ceux qui sont favorables à cette fiscalisation – prennent de réelles précautions pour éviter que ne soient pénalisées –  c’est le risque que nous dénonçons depuis le début de cette discussion – les personnes les plus fragiles. La preuve est donc faite que ce risque est avéré.

Donc, pour ce qui nous concerne, nous ne voterons pas ces amendements qui ne sont que des propositions de rattrapage, pour essayer de ne pas trop faire souffrir les plus modestes, mais qui visent surtout à mettre de l’huile dans les rouages !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre. Le dispositif tel qu’il a été revu et corrigé par le Sénat se traduira par une économie de 135 millions d'euros pour le budget de l’État.

M. Jean-Pierre Godefroy. Alors, ça ne sert pas à grand-chose !

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.

M. Thierry Foucaud. Après le paysan de l’Île-de-Ré contraint de payer l’impôt de solidarité sur la fortune, voici le trader victime d’un accident du travail en se cassant un doigt de pied au volant de sa Porsche !

Mme Nicole Bricq et M. Albéric de Montgolfier. Un doigt de la main !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ce sont les footballeurs qui travaillent avec leurs pieds – et non avec leurs mains, en principe… (Sourires.)

M. Thierry Foucaud. À moins qu’il ne tape sur son clavier avec ses pieds ! (Nouveaux sourires.)

L’amendement présenté par M. le rapporteur général ne change rien. La réparation de l’entier préjudice – dont nous avons parlé tout à l’heure – de l’accidenté du travail n’existe pas et vous voulez encore diminuer ses droits. Rogner sur ses droits, c’est, d’une certaine manière, affirmer qu’il a commis une faute en se blessant.

C’est pourquoi nous désapprouvons cet amendement et, comme nos collègues du groupe socialiste, nous voterons contre.

M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour explication de vote.

M. Charles Guené. Je remercie M. le rapporteur général de nous faire revenir au droit, ce qui, en ce lieu, est important et n’exclut pas la compassion à l’égard des victimes d’accidents du travail.

Cet amendement ne remet aucunement en cause l’indemnisation du préjudice qui, bien sûr, ne sera pas soumise à l’impôt. Mais il s’agit de trouver une voie de droit pour que les indemnités des accidents du travail soient soumises au régime qui leur est applicable.

L’Assemblée nationale, par une construction assez subtile, a essayé de nous ramener dans le droit. Nous avons emprunté ce chemin. Il était important de trouver un système opérationnel, ce qu’a fait M. le rapporteur général avec cette proposition ; par conséquent, je la voterai

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-385.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 45 bis, modifié.

(L'article 45 bis est adopté.)

Article 45 bis
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Article 45 ter

Article additionnel après l'article 45 bis

M. le président. L'amendement n° II-306, présenté par MM. Adnot et C. Gaudin, est ainsi libellé :

Après l'article 45 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - À l'article 93 du code général des impôts, le 1 bis est rétabli dans la rédaction suivante :

« 1 bis.- Les fonctionnaires qui sont autorisés à apporter leur concours scientifique à une entreprise qui assure la valorisation de leurs travaux au titre de l'article L. 413-8 du code de la recherche, peuvent demander que le revenu provenant de cette activité soit soumis à l'impôt sur le revenu selon les règles prévues en matière de traitements et salaires. Cette option est subordonnée à la condition que les rémunérations perçues soient intégralement déclarées par l'entreprise qui les verse.

« La demande doit être adressée au service des impôts du lieu du domicile avant le 1er mars de l'année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est établie. L'option demeure valable tant qu'elle n'a pas été expressément dénoncée dans les mêmes conditions. »

II. La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Cet amendement n'est pas soutenu.

Article additionnel après l'article 45 bis
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Article 45 quater

Article 45 ter

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article 199 decies E est complété par une phrase ainsi rédigée :

« L’indexation de tout ou partie du loyer sur le chiffre d’affaires ou le résultat ne fait pas obstacle à l’imposition dans la catégorie des revenus fonciers. » ;

2° Le 1 de l’article 199 decies F est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les logements visés aux a et c, l’indexation de tout ou partie du loyer sur le chiffre d’affaires ou le résultat ne fait pas obstacle à l’imposition dans la catégorie des revenus fonciers. »

II. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. le président. L'amendement n° II-163, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous voici parvenus dans un domaine différent puisque l’article 45 ter que nous voulons supprimer concerne le régime fiscal dit « Demessine » relatif aux résidences de tourisme.

La commission a été dubitative sur la proposition votée à l’Assemblée nationale et qui permettrait de déclarer, au titre des revenus fonciers, les loyers qui seraient indexés sur le chiffre d’affaires ou le résultat de l’exploitant.

On est dans le cas de figure un peu particulier de résidences de tourisme qui connaissent des problèmes de rentabilité et où des investisseurs se retrouvent en quelque sorte pris au piège. À ce moment-là, il s’agit de monter une formule de reprise.

Vous savez, mes chers collègues, qu’en première partie nous avons voté un amendement qui a pour objet d’allonger la période pendant laquelle cette reprise peut être élaborée. Par cet article, sans doute sous la même inspiration, il nous est proposé de faire une exception assez importante, à mon avis sans précédent, à la définition du revenu foncier. Le revenu foncier est fixe ; en tout cas, ce n’est pas un revenu indexé sur le chiffre d’affaires ou sur le résultat de la société qui l’encaisse.

Tout en comprenant bien que cet article a sans doute été introduit dans le souci de faciliter des reprises d’opérations compromises, nous nous interrogeons sur la portée de cette modification : la notion de revenu foncier recevrait alors une interprétation différente qui s’imposerait erga omnes.

Une telle mesure ne serait pas applicable seulement au cas de figure des résidences de tourisme : elle pourrait constituer un précédent pour d’autres opérations immobilières.

D’une façon générale, l’introduction de telles clauses par les exploitants montre bien que les investisseurs se trouvent en situation de faiblesse. Ainsi, dans le régime Demessine, les investisseurs sont prêts à accepter des dispositions contractuelles inusuelles, voire à caractère léonin, pour conserver leur avantage fiscal et éviter la requalification.

Nous sommes donc dubitatifs sur cet article. Nous ne souhaitons pas qu’il devienne un précédent, ouvert à partir d’une niche fiscale, qui modifierait de manière plus globale les rapports locatifs.

Des mesures de protection des investisseurs de bonne foi ont déjà été votées à l’article 9 bis, et d’autres seront examinées à l’article 45 quater. C'est la raison pour laquelle nous estimons que le présent article n’est pas indispensable, et peut-être même quelque peu dangereux.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement a examiné très attentivement l’amendement de la commission, sur lequel il a émis un avis favorable, et ce pour trois raisons.

Premièrement, l’article 45 ter du projet de loi de finances présente certaines incohérences. Il ferait double emploi avec le dispositif applicable aux investisseurs qui acquièrent des logements destinés à être loués meublés, adopté en loi de finances pour 2009.

Deuxièmement, il ferait également double emploi avec l’article 45 quater du projet de loi de finances, adopté par l’Assemblée nationale, qui permet aux investisseurs représentant au moins 50 % des copropriétaires de substituer au gestionnaire défaillant une ou des entreprises locales qui assurent les mêmes prestations, sur les mêmes périodes, dans des conditions fixées par décret.

Troisièmement, ce type de baux à loyer variable a déjà été expérimenté et présente l’inconvénient de donner lieu chaque année à de multiples discussions entre les propriétaires et l’exploitant sur la réalisation ou non des critères de performance choisis.

Pour l’ensemble de ces raisons, l’amendement n° II-163 nous paraît très judicieux.

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

M. Gérard Longuet. L’adoption de l’amendement n° II-163 entraînera la suppression de l’article 45 ter. Je souhaitais simplement savoir si serait tout de même maintenue, par une autre voie, la possibilité de soutenir les propriétaires investissant dans l’immobilier de tourisme dans des régions qui ne sont pas naturellement favorisées et où le risque économique est sans doute plus élevé que dans les stations établies de montagne ou de bord de mer.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur Longuet, les dispositions déjà votées à l’article 9 bis et celles que nous allons examiner à l’article 45 quater me semblent effectivement de nature à répondre à votre préoccupation. Vous vous en souvenez certainement, nous avons en particulier porté à trois ans la période nécessaire pour trouver un nouveau mode d’exploitation.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-163.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 45 ter est supprimé.

Article 45 ter
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Article 45 quinquies

Article 45 quater

Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Après la quatrième phrase du cinquième alinéa de l’article 199 decies E, sont insérées deux phrases ainsi rédigées :

« La réduction pratiquée ne fait pas l’objet d’une reprise si les copropriétaires substituent au gestionnaire défaillant de la résidence de tourisme une ou un ensemble d’entreprises qui assurent les mêmes prestations sur la période de location restant à couvrir conformément aux prescriptions légales, dans des conditions fixées par décret. Cette faculté leur est ouverte dès lors que la candidature d’un autre gestionnaire n’a pu être retenue après un délai d’un an et qu’ils détiennent au moins 50 % des appartements de la résidence. » ;

2° Le 4 de l’article 199 decies F est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La réduction pratiquée ne fait pas l’objet d’une reprise si les copropriétaires substituent au gestionnaire défaillant de la résidence de tourisme une ou un ensemble d’entreprises qui assurent les mêmes prestations sur la période de location restant à couvrir conformément aux prescriptions légales, dans des conditions fixées par décret. Cette faculté leur est ouverte dès lors que la candidature d’un autre gestionnaire n’a pu être retenue après un délai d’un an et qu’ils détiennent au moins 50 % des appartements de la résidence. » ;

3° Au a de l’article 261 D, les mots : « exploitant qui a » sont remplacés par les mots : « ou plusieurs exploitants qui ont ».

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, sur l'article.

M. Martial Bourquin. Cet article tend à améliorer l’aide apportée aux petits propriétaires, dont beaucoup ont choisi l’investissement dans les résidences de tourisme pour s’assurer un complément de retraite et se sont fait piéger par le miroir aux alouettes de la défiscalisation immobilière. Chacun d’entre nous peut comprendre leur désarroi.

Je note pourtant que les conditions sont nombreuses pour pouvoir bénéficier des dispositions prévues, y compris sur le plan fiscal. Je m’interroge sur les estimations dont le ministère pourrait déjà disposer. Combien de petits propriétaires saisiront réellement l’occasion de cogérer ces résidences ?

Je suis favorable à l’amendement déposé, notamment, par ma collègue Patricia Schillinger et qui vise à accorder plus de temps aux propriétaires pour s’organiser.

Si cet article me paraît de nature à réparer certaines injustices, qui mettent en péril les petits propriétaires, nous ne nous attaquons pas pour autant au fond du problème : la promesse de la niche fiscale en zone rurale, qui a donné lieu à de très nombreux abus et conduit à une déréglementation immobilière, responsable des défaillances des investisseurs.

Les mesures prévues par cet article ne résoudront pas le fait que la demande de résidences de tourisme dans certaines zones est structurellement très inférieure à l’offre. Le mode de gestion des résidences de tourisme n’est pas de nature à modifier en amont notre politique d’aménagement du territoire.

Aussi, j’attends avec beaucoup d’impatience l’évaluation du dispositif des zones de revitalisation rurale qui doit nous être proposée et qui devrait être utilement mise en relation avec cet article.

Les erreurs du passé ne doivent pas se répéter. L’euphorie immobilière est contreproductive pour nos territoires comme pour les investisseurs, quelles que soient leurs motivations d’origine.

M. le président. L'amendement n° II-262, présenté par Mmes Schillinger et Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ils disposent d'une année pour constituer une structure adaptée, après qu'il a été constaté qu'aucun repreneur ne s'est manifesté, sans pour autant réduire la durée de l'engagement de neuf ans.

II. - Alinéa 5

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ils disposent d'une année pour constituer une structure adaptée, après qu'il a été constaté qu'aucun repreneur ne s'est manifesté, sans pour autant réduire la durée de l'engagement de neuf ans.

La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.

M. Jean-Marc Todeschini. Cet amendement a pour objet, une fois qu’a été constatée la défaillance d’un gestionnaire, de permettre aux propriétaires d’une résidence de tourisme de disposer d’une année pour se constituer en société coopérative d’intérêt collectif, après qu’il a été constaté qu’aucun repreneur ne s’est manifesté.

Il s’agit d’améliorer le dispositif Demessine, qui a institué une réduction d’impôt pour favoriser le développement des résidences de tourisme dans les zones de revitalisation rurale, ou ZRR. II est bon de rappeler que ce dispositif a joué un rôle clé dans le développement du tourisme dans ces zones, notamment pour les stations de montagne.

Cependant, les difficultés de certains opérateurs immobiliers et la défaillance de certains gestionnaires placent aujourd’hui les particuliers concernés dans une situation très difficile. En effet, ces défaillances se manifestent généralement en deux temps : l’arrêt du paiement des loyers suivi de celui de l’activité commerciale. Partant, les locaux ne sont plus loués, les loyers non payés, et ce définitivement.

Les propriétaires investisseurs se retrouvent donc avec une perte en termes de loyers, tout en ayant à leur charge les frais d’entretien et le remboursement de leurs emprunts. Qui plus est, ils risquent la reprise de leur avantage fiscal si la résidence n’a pas de repreneur dans un délai d’un an.

Près de 5 400 copropriétaires des Alpes du Nord et du Sud sont ainsi actuellement victimes d’une certaine précarisation du dispositif Demessine.

L’Assemblée nationale a, certes, permis d’assouplir les conditions de reprise de l’activité d’un gestionnaire défaillant. Ainsi, les copropriétaires devraient désormais pouvoir se substituer au gestionnaire défaillant d’une résidence de tourisme en faisant reprendre son activité par une entreprise, ou par un ensemble d’entreprises, qui assure les mêmes prestations sur la période de location restant à couvrir, conformément aux prescriptions légales.

Toutefois, l’organisation d’un tel processus de reprise n’est pas aisée, surtout pour des propriétaires qui ne sont généralement pas des professionnels de l’immobilier. Pour cette raison, après avoir pris acte qu’aucun repreneur ne s’est manifesté, il est important pour les propriétaires de disposer d’une année supplémentaire, après la constatation de la défaillance, pour obtenir l’autorisation préfectorale nécessaire et s’organiser afin de constituer une société coopérative d’intérêt collectif, sans pour autant réduire la durée de l’engagement de neuf ans prévu par le dispositif.