M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Certains affirment qu’il n’y a pas de mandats de trois ans. Or, dans mon département, la croissance démographique a été telle qu’il a fallu créer, au fil du temps, de nouveaux cantons : aujourd'hui, on en compte quarante-trois, contre vingt-neuf en 1968, la population étant passée entre-temps de 600 000 habitants à 1,3 million d’habitants.

M. René-Pierre Signé. Vous avez de la chance !

M. Michel Charasse. Quel tempérament ! (Rires.)

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. On a parfois l’impression que certains sont venus chez nous après avoir été chassés de Paris…

M. Pierre-Yves Collombat. C’est à cause de Chirac !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Je ne ferai pas de commentaires sur ce point, mais chaque fois que des cantons ont été créés, on a tiré au sort : certains conseillers ont effectué un mandat de trois ans, d’autres ont exercé leurs fonctions pendant six ans. Cela se pratique depuis très longtemps.

M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. C’est vieux comme le monde !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Cela étant, dans le cas qui nous occupe, madame Borvo Cohen-Seat, puisque les intéressés ne sont pas encore élus, on ne réduit pas leur mandat ! On fixe la règle pour l’avenir, ce qui est tout à fait légitime : il faut le faire a priori, sinon ce serait effectivement contestable.

M. Michel Charasse. Ce n’est pas un mandat en cours !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Absolument ! De même, nous devons fixer maintenant la règle pour les élections régionales de 2010.

M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.

M. François Fortassin. Cet amendement soulève tout de même une authentique question.

On peut certes considérer qu’un mandat de dix ans est trop long, encore que certains soient élus depuis bien plus longtemps que cela !

M. Michel Charasse. Le mandat du pape n’est pas limité !

M. René-Pierre Signé. On était sénateur à vie, dans le temps !

M. Charles Pasqua. C’était le bon temps ! (Sourires.)

M. François Fortassin. Cela étant, si réduire à trois ans le mandat de conseiller général n’est pas inconstitutionnel, c’est le priver de tout intérêt : il s’agirait d’un « mandat croupion », pour des élus destinés à disparaître.

Je souhaiterais donc déposer un sous-amendement visant à porter à quatre ans le mandat des conseillers généraux qui seront élus en 2011, et à cinq ans celui des conseillers régionaux qui seront élus en 2010 : ainsi, les deux mandats arriveraient à échéance en 2015 et cela permettrait d’éviter le chevauchement des élections locales, tout en donnant un sens au dernier mandat des conseillers régionaux et généraux.

M. le président. Monsieur le sénateur, ce serait non pas un sous-amendement, mais un « sur-amendement ». Par conséquent, à mon grand regret, je ne puis l’accepter ! (Sourires.)

La parole est à M. François-Noël Buffet, pour explication de vote.

M. François-Noël Buffet. Je n’entends pas faire de surenchère. Il convient à mon sens d’en rester à des choses simples, par souci de lisibilité. Les propos de M. le rapporteur et de M. le président de la commission des lois sont frappés au coin du bon sens.

Certes, l’idée de M. Dupont peut paraître séduisante, mais nous faisons ici la loi, or il est clairement établi que cette proposition est anticonstitutionnelle.

Dans ces conditions, le groupe UMP votera contre cet amendement.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote.

M. Jean-René Lecerf. Sur le plan juridique, je n’ai rien à ajouter : M. le président de la commission des lois a tout dit.

J’invoquerai un argument politique, auquel nous devons tous être sensibles, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons dans cet hémicycle : si nous votons cet amendement, imaginez ce que seront les réactions de l’opinion publique ! Nous ferons la première page du Canard enchaîné, qui titrera sur ces élus se croyant autorisés à prolonger pendant des années le mandat qui leur a été confié !

Mes chers collègues, si vous voulez creuser un peu plus encore le fossé entre les électeurs et les élus, vous n’avez qu’à voter cet amendement !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

M. Michel Charasse. Monsieur le président, le débat est un peu confus et il faut donc que les choses soient claires ! Nous pouvons sans inconvénient prolonger un mandat. Nous l’avons déjà fait dans le passé. En procédant ainsi, d’ailleurs, nous remontons aux origines de la République : jusqu’à ce que fût voté l'amendement Wallon, le mandat de Thiers avait été prolongé d’année en année, à plusieurs reprises.

M. René-Pierre Signé. Jusqu’en 1873 !

M. Michel Charasse. Oui, car ensuite, l'amendement Wallon avait été voté !

Faut-il déranger les électeurs pour un mandat réduit ? C’est au fond la question que pose Jean-Léonce Dupont.

M. Henri de Raincourt, ministre. On l’a déjà fait !

M. Michel Charasse. Cet amendement traduit un certain respect à l’égard des électeurs : plutôt que de leur imposer d’élire des futurs morts à trois ans près, autant prolonger de trois ans le mandat de ceux qui sont déjà en place ! (Rires.) Le Morituri te salutant ne s’applique pas dans ce cas-là !

Je rappelle également que l’expérience des mandats courts, que M. le président de la commission des lois vient d’évoquer, n’est pas le meilleur souvenir de la République.

Monsieur le président, sous la Révolution française, vous auriez présidé cette assemblée pour un mois, puisque, tous les mois, on changeait le président de l'Assemblée nationale.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Quand on ne lui coupait pas la tête avant ! (Sourires.)

M. Michel Charasse. C’est cette instabilité dramatique qui a conduit aux excès : la guillotine fonctionnait tous les jours, quelquefois même pour ceux qui occupaient le fauteuil présidentiel et qui, du jour au lendemain, se retrouvaient « raccourcis ».

Mes chers collègues, la loi fixe la durée des mandats. Dans ce domaine, le Parlement a toute liberté : c’est l’une de ses prérogatives. Jean-Léonce Dupont ne fait que tirer les conséquences de ce principe, qui est aussi vieux que la République. Par conséquent, nous pouvons faire ce que nous voulons.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Non !

M. Michel Charasse. Mais si ! Si nous ne fixons pas nous-mêmes un terme à un mandat, celui-ci se poursuit indéfiniment. Je ne vois pas sur quel fondement le Conseil constitutionnel pourrait affirmer que c’est inconstitutionnel.

Quoi que l’on en pense par ailleurs, je trouve que cet amendement témoigne d’une grande considération à l’égard des électeurs et, de ce point de vue, il ne me déplaît pas du tout.

M. le président. Sans m’imaginer en Fouquier-Tinville, qui est l’un de ceux qui ont été « raccourcis »,…

M. Michel Charasse. Il n’a jamais été président de l’Assemblée !

M. le président. … je mets aux voix l'amendement n° 34 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 11, présenté par MM. Krattinger, Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Remplacer l'année :

2014

par l'année :

2015

II. - Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :

Le mandat des conseillers généraux élus en 2008 expire en 2015.

La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. Les conseillers généraux et les conseillers régionaux sont actuellement élus selon des modes de scrutin fortement différenciés, afin de favoriser la constitution d’un lien fort entre les électeurs et les élus à l’échelon du département, d’une part, et de concilier l’objectif de représentation des minorités au sein du conseil régional avec la nécessité de constituer des majorités de gestion stables et pérennes tout en respectant la parité, d’autre part.

Leurs élections respectives ne sont pas simultanées, ce qui permet sans doute de renforcer à la fois leur légitimité et leur visibilité, chaque échelon ayant des compétences et des caractéristiques propres.

Nous l’avons déjà répété maintes fois depuis le début de ce débat, la concomitance ne permet pas de rendre compréhensibles les enjeux d’une élection et de clarifier les fonctions des élus. Elle peut avoir des effets pervers, par exemple susciter la confusion dans l’esprit des électeurs ou provoquer des interférences entre les campagnes électorales.

Qui plus est, dans les pays où l’on vote le même jour et un peu sur tout – le cas des États-Unis a déjà été cité –, la participation est en général plus basse qu’ailleurs. Rien n’est pire, pour la démocratie, que de diluer les enjeux entre des scrutins multiples.

Ce qui nous est proposé aujourd'hui, c’est de faire de l’année 2014 une année charnière pour tout : élections municipales, élections européennes, élections sénatoriales. L’organisation des élections des conseillers généraux et régionaux, du fait de leur concomitance, ne fera qu’alourdir ce calendrier et ne manquera pas de créer de graves difficultés.

Monsieur Courtois, vous avez reconnu, à la page seize de votre rapport, que, en 2004, la simultanéité de quatre scrutins – cantonal, régional, européen et sénatorial – avait engendré des perturbations.

Les pouvoirs publics chargés de l’organisation ou du contrôle des opérations électorales voient nécessairement leur activité alourdie en un tel cas.

En 2004, il n’était cependant pas question des élections locales, comme ce serait le cas en 2014. Nous le savons, les élections municipales sont suivies de l’installation des conseils communautaires. Or, vous prévoyez aussi, dans un autre texte, une réforme de l’élection des conseillers municipaux dans les communes de moins de 3 500 habitants, d’une part, et une réforme de la désignation des conseillers communautaires, d’autre part !

Nous proposons une mesure de sagesse : si réformes il doit y avoir, digérons-les petit à petit. Donnons le temps à nos concitoyens de prendre la mesure de ces réformes, pour que le vote demeure l’acte civique qu’il a toujours été, attendu et respecté !

Pour toutes ces raisons, nous proposons de repousser la concomitance à 2015, afin que soit respecté pleinement le principe de la sincérité des suffrages, sans que soit compromise la bonne organisation de tous les scrutins.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement prévoit que les mandats des conseillers généraux élus en 2011 et les mandats des conseillers régionaux élus en 2010 expireront en mars 2015, afin d’éviter que l’année 2014 ne soit une année électorale excessivement dense.

Si la commission comprend cette préoccupation, elle relève toutefois que si les conseillers régionaux et généraux étaient élus en 2015, cela entraînerait une déconnexion entre les échéances locales et les échéances sénatoriales.

M. Henri de Raincourt, ministre. Eh oui !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Les sénateurs seraient donc élus par des conseillers « en fin de vie », si j’ose dire. Or la commission s’y est toujours opposée. Je vous renvoie d’ailleurs aux débats sur la loi du 15 décembre 2005 prorogeant la durée des mandats des conseillers municipaux et des conseillers généraux renouvelables en 2007.

Cette situation serait, en outre, inédite sous la Ve République.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Il est également défavorable, monsieur le président.

Cet amendement vise à repousser la mise en œuvre de la réforme à 2015. Nous avons bien compris les arrière-pensées qui motivent cette proposition.

L’ADF, l’Assemblée des départements de France, présidée par M. Claudy Lebreton, président socialiste du conseil général des Côtes-d’Armor, a voté une résolution en décembre 2008, signée par les 102 présidents de conseil général, aux termes de laquelle « tous les présidents sont favorables au renouvellement en une seule fois du conseil général » et proposent « que les conseillers généraux élus en 2011 le soient pour trois ans, et qu’en 2014 intervienne un renouvellement intégral sur la base de cantons redécoupés ».

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Les arguments avancés contre cet amendement m’étonnent quelque peu. En effet, repousser la concomitance à 2015 aurait permis de répondre à de nombreuses objections.

Monsieur le rapporteur, le renouvellement des conseils municipaux interviendra en 2014, par conséquent avant l’élection sénatoriale de 2015. Je ne comprends donc pas votre argument.

Par ailleurs, comme cela a déjà été souligné, un grand nombre d’élections se tiendront en 2014. C’est un gros inconvénient, mais je n’y reviens pas.

Si la concomitance intervient en 2015, le dernier mandat des conseillers régionaux aura été de cinq ans, celui des conseillers généraux élus en 2008 de sept ans – soit une prolongation d’une année –, tandis que leurs pairs élus en 2011 auront exercé leurs fonctions pendant quatre ans – soit une durée de mandat décente et digne des grandes démocraties, comme l’a dit M. le secrétaire d'État.

L’année 2015 présente donc tous les avantages : si la création des conseillers territoriaux est adoptée, la réforme votée pourra être mise en place ; sinon, les mandats locaux concernés auront été d’une durée décente. Très franchement, le fait que cette échéance n’ait pas été retenue tendrait à prouver, s’il en était encore besoin, que cette réforme est vraiment bâclée !

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

M. Yves Daudigny. Monsieur le secrétaire d'État, je ne peux pas vous laisser vous appuyer sur l’ADF pour justifier ce projet de loi.

Certes, il est vrai que l’Assemblée des départements de France demande depuis très longtemps que les conseillers généraux soient renouvelés en une seule fois tous les six ans. Des dispositions législatives en ce sens avaient été prises par un gouvernement de gauche, mais elles ont été annulées lorsque la droite est revenue au pouvoir.

Cependant, vous ne pouvez pas vous fonder sur l’ADF pour justifier aujourd'hui la concomitance. L’Assemblée des départements de France, dans sa très grande majorité, est totalement et fermement opposée à la mise en place des conseillers territoriaux.

M. Josselin de Rohan. Ce n’est pas la question !

M. Yves Daudigny. C’est vrai des présidents de conseil général de gauche, mais c’est vrai aussi de nombreux présidents de conseil général appartenant à la majorité présidentielle –nous en avons eu un exemple déclaré aujourd'hui dans cet hémicycle.

Ne prenons pas prétexte d’une position de l’Assemblée des départements de France pour justifier aujourd'hui un projet totalement contraire au maintien de l’échelon départemental comme échelon d’action publique !

M. Josselin de Rohan. Mais ce n’est pas le problème !

M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.

M. François Fortassin. Je peux accepter certains arguments, mais pas s’ils sont spécieux…

Mon département compte 850 grands électeurs, dont 35 seulement seront « en fin de vie » en 2015, pour reprendre l’expression utilisée par M. le rapporteur : ce n’est pas eux qui fausseront le scrutin sénatorial !

Par ailleurs, repousser la concomitance à 2015 présenterait au moins l’avantage de donner du sens aux mandats des futurs conseillers généraux et régionaux, en les portant respectivement à quatre ans et à cinq ans. Cela permettrait surtout d’éviter un écueil : face aux élections des conseils municipaux et des conseils communautaires, celle des conseillers territoriaux, que vous le vouliez ou non, risque de passer à la trappe. Elle sera en effet en quelque sorte anéantie par l’élection municipale, qui intéresse par-dessus tout nos concitoyens.

Puisqu’il s’agit de créer de nouveaux élus, donnons-leur le plus de relief et de dignité possible !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 29, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - L'article L. 210-1 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les partis politiques percevant un financement public doivent assurer la présentation à parité homme, femme de leur candidat titulaire sous peine de sanction financière dont le montant est fixé par décret en Conseil d'État. »

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Nous n’avons de cesse de le rappeler, seul le scrutin proportionnel peut garantir la parité. Mais, devant votre refus persistant de l’instituer, nous proposons de prévoir au moins quelques contraintes.

La loi sur la parité de janvier 2007 tendant à promouvoir l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives a prévu que chaque conseiller général aura un suppléant de sexe opposé, qui le remplacera en cas de vacance par décès ou par démission.

Cela ne change rien au problème : les conseils généraux demeureront les assemblées où la parité reste le plus à la traîne, avec 12,3 % d’élues en 2008. L’obligation pour les candidats d’avoir un suppléant de sexe opposé a très peu fait évoluer les choses, rien n’imposant un nombre égal de candidats titulaires des deux sexes.

L’expérience le montre, il est illusoire de spéculer sur la bonne volonté des partis politiques pour faire progresser la parité. Il faut donc prendre des mesures un peu plus contraignantes.

Le triste bilan des deux élections législatives qui ont suivi la loi de juin 2000 montre bien que les pénalités financières prévues à l’encontre des partis ne respectant pas la parité sont loin d’être la solution. Ces pénalités sont certes quelque peu modestes et insuffisamment dissuasives : les partis, notamment les plus riches d’entre eux, ont préféré payer les amendes plutôt que de promouvoir la parité.

Vous affirmez, monsieur le secrétaire d’État, que la création des conseillers territoriaux fera progresser la parité, puisqu’elle prévaudra, dans les communes, dès le seuil de 500 habitants.

En fait, quand il s’agit de questions stratégiques, il faut laisser la place aux hommes ! Les femmes devraient s’en tenir au quotidien, à la définition des options locales, les grandes instances étant réservées aux hommes…

Grâce à la nouvelle loi, monsieur le secrétaire d’État, des femmes seront systématiquement présentes dans les conseils généraux. Certes, mais à hauteur de 19,3 % des sièges, comme le montrent les calculs de l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes, contre 12,3 % aujourd’hui ! Il s’agira en réalité d’une très faible progression, d’autant que, dans le même temps, la place des femmes dans les conseils régionaux passera de 47,6 % des sièges aujourd’hui à seulement 19,3 % !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir des sanctions financières à l’encontre des partis qui ne présenteraient pas, dans le cadre d’élections au scrutin uninominal, autant d’hommes que de femmes en tant que candidats titulaires.

Cette question, qui est effectivement importante, a vocation à être traitée non pas dans ce projet de loi, mais dans le projet de loi n° 61, relatif à l’élection des conseillers territoriaux.

En conséquence, si cet amendement n’est pas retiré, la commission émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 30, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Les exécutifs des conseils généraux respectent le principe de parité.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement vise à assurer la parité entre les hommes et les femmes au sein des exécutifs départementaux.

Cette proposition est parfaitement conforme à la Constitution, dont l’article 1er dispose que « la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ».

Notre amendement permettrait cependant une avancée significative dans cette lutte en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes. Depuis des décennies, l’égalité en politique est certes formellement acquise, mais nous savons combien sa mise en pratique est encore entravée par le poids des mentalités et des traditions.

Toute avancée de la parité est un pas vers plus de justice et fait reculer la discrimination. Certes, nous n’ignorons pas que cette parité, au sein des exécutifs départementaux, ne peut être mise en place sans un changement du mode de scrutin et l’instauration de la proportionnelle, assortie de l’obligation, pour les partis, de présenter un nombre égal d’hommes et de femmes en tant que candidats titulaires. Sans la proportionnelle, obtenir la parité sera difficile, mais il faudra bien un jour que les partis respectent leurs obligations en la matière !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La commission comprend les motivations des auteurs de cet amendement, mais cette question relève elle aussi du projet de loi n° 61.

Si cet amendement n’est pas retiré, la commission émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Même avis.

Effectivement, la question de la parité sera abordée à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à l’élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale. Nous avons d’ailleurs des réunions de travail très fréquentes sur ce thème avec les responsables des délégations compétentes du Sénat et de l’Assemblée nationale.

Afin de parfaire le texte qui vous sera présenté, trois réunions ont d’ores et déjà eu lieu, et une quatrième est programmée pour le mois de janvier prochain.

En outre, madame le sénateur, à compter de 2010, la parité sera étendue pour la première fois au sein des exécutifs des conseils régionaux, et ce en application de la loi du 31 janvier 2007 que M. Nicolas Sarkozy a fait voter alors qu’il était ministre de l’intérieur. Autre conséquence de cette loi, les postes d’adjoints sont répartis à égalité entre les hommes et les femmes dans les municipalités de plus de 3 500 habitants, seuil abaissé à 500 habitants dans le projet du Gouvernement, ce qui devrait permettre l’élection de plus de 40 000 conseillères municipales, ainsi que de plusieurs milliers de maires.

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai, pour explication de vote.

Mme Bernadette Bourzai. Monsieur le secrétaire d’État, je ne peux pas laisser passer vos propos sans réagir. Vous n’en serez d’ailleurs pas surpris, tant Michèle André et moi-même sommes très sensibles à la question de la parité.

Il est tout de même caricatural d’utiliser comme argument l’abaissement du seuil à 500 habitants et l'augmentation du nombre de femmes élues dans les communes et les communautés de communes pour justifier l’absence de réelles mesures en faveur de la parité dans le cadre de l’élection des conseillers territoriaux. Pourquoi ne pas utiliser le même argument pour justifier le faible nombre de députées et de sénatrices ?

En réalité, vous nous proposez de revenir trente ans en arrière !

M. René-Pierre Signé. C’est la recentralisation !

Mme Bernadette Bourzai. Cela revient à nous dire : commencez donc à faire vos preuves dans les conseils municipaux; on verra bien, par la suite, si vous êtes capables d’être conseillère générale, conseillère territoriale, députée ou sénatrice !

Monsieur le secrétaire d'État, ce genre de discours, nous commençons à en avoir assez !

Mme Bernadette Bourzai. Il faut vous rendre à l’évidence, une bonne fois pour toutes : vous ne nous ferez pas rentrer à la maison…

Mme Bernadette Bourzai. … et revenir à une situation dont nous ne voulons plus !

Monsieur le secrétaire d’État, j’ai commencé ma carrière politique en 1978, quand j’ai entendu le député de la Haute-Corrèze de l’époque, un dénommé Jacques Chirac, déclarer ceci : « Pour moi, la femme idéale, c’est la femme corrézienne, celle de l’ancien temps, dure à la peine, qui sert les hommes à table, ne s’assied jamais avec eux et ne parle pas. »

Eh bien, nous ne nous tairons plus ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Jean-Pierre Fourcade applaudit également.)

M. le président. Il semble que M. Chirac n’ait pas réussi à imposer ses désidératas à son épouse ! (Sourires.)

La parole est à Mme Christiane Hummel, pour explication de vote.

Mme Christiane Hummel. Je voudrais m’adresser à mes collègues femmes dans cet hémicycle : quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégions, sachez que nous avons toutes les mêmes préoccupations sur ces questions. Cependant, les élues membres du groupe UMP estiment que ce n’est ni le lieu ni le moment pour les aborder.

Mme Éliane Assassi et M. Charles Gautier. Ce n’est jamais le moment !

Mme Christiane Hummel. C'est la raison pour laquelle, madame Mathon-Poinat, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. (Mme Catherine Procaccia, MM. René Beaumont et Michel Guerry applaudissent.)

M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour explication de vote.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Chères collègues de la majorité, je suis ravie de constater que vous partagez nos préoccupations !

Je ne retirerai pas cet amendement, car le moment est venu de faire pression, de défendre la parité et de la faire vivre. Ayez au moins un peu de courage pour voter cet amendement, qui, de toute façon, a peu de chances de passer !