M. Brice Hortefeux, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord remercier à nouveau M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur de la commission des lois, et MM. Jean Faure et Aymeri de Montesquiou, rapporteurs pour avis, pour le travail approfondi qu’ils ont accompli et pour leur engagement, ainsi que les présidents des différentes commissions saisies du texte et l’ensemble des orateurs qui ont apporté leur soutien à ce dernier.

M. Courtois a su rappeler la cohérence de ce projet de loi, en mettant l’accent sur le juste équilibre entre le renforcement des moyens, qui est indispensable, et le respect des libertés.

À l’adresse de Mme Assassi, de M. Anziani et de Mme Klès, je préciserai que quatre textes relatifs à la sécurité intérieure ont été adoptés depuis 2002, et non pas dix-sept ou vingt-trois… Le présent projet de loi est en outre le seul texte à la fois de programmation et d’orientation qui sera présenté au cours de ce quinquennat.

Il ne s’agit pas d’un texte « fourre-tout », comme a pu le déclarer un peu vite M. Jean-Pierre Bel ; c’est au contraire une loi nécessaire car, comme l’a rappelé à juste titre Mme Catherine Troendle, « il n’y a pas de petite délinquance ou de grande délinquance ». La vocation de ce texte est de combattre toutes les formes de délinquance. Je confirme qu’il y aura autant de lois et de règlements que nécessaire, et je retiens d’ailleurs l’invitation de M. Chevènement à recourir davantage aux circulaires, même si je doute qu’elle corresponde tout à fait à la logique parlementaire !

J’ai écouté avec attention les observations des sénateurs socialistes, verts et communistes, qui m’amènent à m’interroger. En effet, j’ai entendu beaucoup de critiques et de mises en cause, souvent excessives, mais guère de propositions concrètes. En fait, vous n’avez pas de doctrine cohérente à proposer aux Français en matière de sécurité. J’ai d’ailleurs observé des contradictions flagrantes dans les propos tenus sur vos travées : vos positions sont aussi diverses que vos sensibilités.

Ainsi, madame Assassi, vous avez cru bon de citer George Orwell, en invoquant le « ministère de la vérité ». Il se trouve que c’est précisément la teneur de votre intervention, le caractère caricatural de vos arguments, une forme de cécité idéologique vous conduisant à ne pas voir la vérité des chiffres et des faits qui nous rappellent Orwell. Vous auriez dû mieux vous renseigner, madame Assassi : Orwell avait coutume de dire, en effet, qu’« il faut constamment se battre pour voir ce qui est au bout de son nez » ! (Sourires sur les travées de lUMP.)

Quant à M. Jean-François Voguet, je lui répondrai que les faits parlent d’eux-mêmes. Il est difficile de nier que, sous le gouvernement de Lionel Jospin, la délinquance globale avait augmenté de 15 %. Faut-il rappeler par exemple, puisque l’on parle beaucoup des atteintes à l’intégrité physique, que leur nombre avait augmenté de 14,47 % entre 2000 et 2001 ? Faut-il également rappeler une nouvelle fois que, depuis sept ans, nous enregistrons une baisse constante de la délinquance globale ? Cela ne signifie pas que tous les problèmes sont réglés ni que les atteintes à l’intégrité physique ne constituent pas un point noir, comme c’est d’ailleurs le cas dans toutes les sociétés post-industrielles, mais il n’en reste pas moins que l’on constate un recul de la délinquance globale, témoignant que l’important travail accompli par nos forces de l’ordre porte ses fruits.

S’inscrivant dans le prolongement direct de cette action, le présent projet de loi n’a d’autre objectif que de renforcer encore la protection de nos concitoyens. Les délinquants s’adaptent, et il serait tout de même curieux de reprocher au Gouvernement de proposer au législateur d’adapter les textes. Nous devons être au moins aussi rapides, sinon plus, que les délinquants. Ce projet de loi doit permettre à l’État de se doter des moyens nécessaires pour lutter contre les nouvelles formes de délinquance, dans le respect, je le répète, des libertés, auxquelles je suis attaché tout autant que vous.

Plusieurs orateurs ont abordé la question des moyens alloués à la politique de sécurité. Je voudrais revenir, en quelques mots, sur la programmation budgétaire annexée au projet de loi.

Je remercierai tout d’abord M. Aymeri de Montesquiou d’avoir remis la politique de sécurité intérieure en perspective. Il a posé la question de la cohérence entre la programmation figurant dans le projet de loi et les engagements pris récemment en matière de réduction des déficits.

La LOPPSI contient effectivement une programmation financière sur cinq ans, de 2009 à 2013, dont la loi de finances établit chaque année une déclinaison précise.

En 2009 et en 2010, même si la LOPPSI n’était pas encore adoptée, les annuités financières ont été entièrement respectées par le Gouvernement, qu’il s’agisse des mesures concernant les personnels ou des efforts de modernisation et d’équipement.

En 2011, dans le cadre du projet de loi de finances qui sera présenté à la fin du mois au Parlement, les grandes lignes de cette programmation seront maintenues et mises en cohérence avec les engagements du Gouvernement en matière de finances publiques. Je vous le dis : les engagements pris envers les personnels seront intégralement respectés, qu’il s’agisse de la police nationale ou de la gendarmerie.

En ce qui concerne maintenant la question des effectifs et des moyens, je voudrais tout d’abord répondre à M. Chevènement. Dois-je vous rappeler, monsieur le ministre d’État, qu’en 2002 les policiers n’étaient pas dotés de gilets pare-balles individuels ? Ils étaient contraints de les partager. Ce temps est révolu : chaque policier a aujourd’hui son gilet pare-balles. Il s’agit d’ailleurs maintenant d’équipements de nouvelle génération, plus légers et plus commodes d’emploi. Dois-je vous rappeler que, entre 1997 et 2002, époque où vous avez eu l’honneur d’exercer les fonctions qui sont actuellement les miennes, les atteintes à l’intégrité physique avaient progressé de 55 %, alors que, sur les sept premiers mois de 2010, l’augmentation n’a été que de 1,26 % ? Je suis très attentif à vos analyses et à vos prises de position, mais il est néanmoins des vérités et des chiffres que je ne peux taire lorsque vous évoquez de supposées carences de notre action.

M. Jean-Pierre Chevènement. Je ne crois pas que le chiffre de 55 % soit exact !

M. Brice Hortefeux, ministre. C’est la vérité des chiffres,…

M. Jean-Pierre Chevènement. Nous vérifierons !

M. Brice Hortefeux, ministre. … lesquels me sont communiqués par l’Observatoire national de la délinquance, organisme pointilleux et vigilant s’il en fut !

M. Jean-Pierre Chevènement. M. Bauer a dû se tromper dans ses statistiques !

M. Brice Hortefeux, ministre. En tout cas, il va de soi que l’erreur ne saurait être de votre fait : c’est un postulat irrécusable ! (Sourires.)

Comme je l’indiquais tout à l’heure, la délinquance d’aujourd’hui n’est pas celle d’hier ni a fortiori celle de demain. J’en parlais avec le grand ministre de l’intérieur que fut Charles Pasqua : ce n’est pas avec les recettes d’il y a quinze ans que l’on peut combattre avec succès la délinquance actuelle, caractérisée notamment par une plus grande violence, par le développement des bandes, qui comportent désormais des filles…

Monsieur Bel, monsieur Anziani, je suis fermement attaché à ce que nos forces de sécurité disposent de moyens humains qui soient à la hauteur de leurs missions : vos chiffres ne sont pas exacts.

À cet instant, je souhaite rétablir quatre vérités.

Première vérité, les effectifs de policiers et de gendarmes présents dans les services auront augmenté d’exactement 4 301 personnes entre le 31 décembre 2000 et le 31 décembre 2010. La baisse de 1 329 emplois prévue initialement en 2010 est compensée par le recrutement en cours, qui s’achèvera en janvier 2011, des 1 500 adjoints de sécurité supplémentaires que m’a accordés le Premier ministre, soit un solde positif, pour l’année 2010, de 171 emplois sur le terrain.

Deuxième vérité, les effectifs des corps de fonctionnaires dit actifs, c’est-à-dire les gardiens de la paix, les officiers et les commissaires, ont progressé, passant de 115 922 en 2001 à 117 270 aujourd’hui.

Troisième vérité, pendant toute la période des dix dernières années, pour la police et la gendarmerie, un effort a été mené pour recruter des personnels administratifs sur les postes de gestion et permettre de remettre ainsi sur le terrain des personnels de police et de gendarmerie. Je tiens bien entendu tous les chiffres à votre disposition.

Quatrième vérité, comme je l’ai déjà indiqué tout à l’heure, les effectifs seront quasiment stabilisés en 2011 puisque, entre le 31 décembre 2010 et le 31 décembre 2011, on comptera au maximum 712 emplois budgétaires de moins dans la police : on retrouvera donc sur le terrain, en 2011, 99,5 % des effectifs de 2010. Bien sûr, ce n’est pas une augmentation, mais on ne saurait parler d’un bouleversement des effectifs ! Il en va d’ailleurs de même des effectifs de gendarmerie, qui connaîtront une baisse de 96 emplois seulement par rapport à l’année précédente dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, qui n’épargne personne.

Au total, la diminution du nombre d’emplois atteindra donc 808, sur les 243 000 emplois qui relèvent du ministère de l’intérieur au titre de la mission « Sécurité ». C’est là une contribution de mon ministère à l’effort gouvernemental de réduction des déficits budgétaires, mais reconnaissez que la situation n’est pas celle qui est trop souvent décrite à partir d’approximations.

En outre, on ne peut pas réduire la stratégie aux seuls effectifs. Le niveau des effectifs est important, bien sûr, et joue un rôle majeur dans l’obtention des résultats, mais l’organisation du travail, la mobilisation, les conditions d’emploi, la répartition entre les services entrent également en ligne de compte : il n’y a pas que le nombre, il y a aussi ce que l’on fait avec les effectifs.

Je remercie M. Jean Faure d’avoir souligné avec force, conviction et talent qu’il est assez curieux de dénoncer une baisse des effectifs lorsque l’on a soi-même soutenu un gouvernement ayant réduit la durée hebdomadaire du temps de travail, ce qui a entraîné une réduction de 10 % – pas de 0,5 % ! - des effectifs. Le fait qu’il ait également mis en exergue l’importance du rapprochement de la police et de la gendarmerie me donne en outre l’occasion de faire taire les Cassandre. Depuis la loi du 3 août 2009, la gendarmerie nationale fait partie intégrante de ce grand ministère de la sécurité qu’est le ministère de l’intérieur. Je veille quotidiennement et personnellement à ce que la gendarmerie nationale prenne toute sa place en son sein et que ce rapprochement s’effectue dans un esprit de complémentarité, d’efficacité et d’équilibre.

Je remercie M. Laménie d’avoir souligné, avec raison, les résultats très positifs du plan « tranquillité seniors » et des efforts qui ont été accomplis, notamment par la gendarmerie, afin d’assurer le succès de cette opération. Dans le même ordre d’idées, la mise en œuvre du plan « tranquillité vacances » a permis d’obtenir un taux de cambriolages presque nul, grâce à une surveillance plus étroite des domiciles des personnes qui avaient signalé auprès des commissariats ou des gendarmeries leur absence pendant l’été. Cela témoigne de la pertinence de cette initiative.

Il n’a jamais été question de fusionner les services judiciaires de la police et de la gendarmerie, ce qui serait d’ailleurs contraire à l’esprit de la loi du 3 août 2009.

Par ailleurs, aucun plan de fermeture massive de 500 brigades de gendarmerie n’a jamais été envisagé. Je le dis notamment à l’adresse de M. Pierre Bordier, dont je connais l’intérêt pour la gendarmerie.

Enfin, je veux rappeler que l’intégration de la gendarmerie au sein du ministère de l’intérieur se fait dans le strict respect de son identité militaire.

En ce qui concerne les synergies opérationnelles, plusieurs mesures ont été prises.

J’ai ainsi décidé de renforcer ou de créer des unités de coordination entre la police et la gendarmerie : unités de coordination des forces mobiles, unités de sécurité dans les transports en commun, unités de lutte contre l’insécurité routière et unités pour les forces d’intervention.

Mme Assassi et M. Bel sont revenus sur la prétendue « politique du chiffre » que nous pratiquerions. C’est naturellement faux ! Certes, la LOPSI 1 de 2002 a ouvert la voie à la « culture du résultat ». Il n’est pas question pour nous de nous en excuser ni de nourrir de complexes sur ce sujet : nous entendons en effet pratiquer la culture du résultat, et la LOPPSI 2 consacre cette évolution en l’élargissant à la notion de performance.

Le bien-fondé de la culture du résultat est démontré, par exemple, par la baisse continue du nombre des atteintes aux biens, par le recul de la délinquance de proximité, par la diminution des atteintes à l’intégrité des personnes et par l’augmentation spectaculaire du taux d’élucidation. Chacun peut constater ces résultats.

En ce qui concerne maintenant le contenu même du projet de loi, j’aborderai trois points essentiels : les moyens humains, les moyens juridiques et les moyens techniques.

Ce projet de loi a tout d’abord pour objet les moyens humains. M. Louis Nègre a souligné à juste titre que les polices municipales constituent, aux côtés de la police et de la gendarmerie nationales, la troisième force de sécurité intérieure. Elles regroupent près de 22 000 personnes, dont un peu plus de 18 000 policiers municipaux stricto sensu.

M. Jean-Patrick Courtois et Mme Catherine Troendle ont rappelé avec raison l’importance des missions des polices municipales. J’ai souhaité que les policiers municipaux puissent disposer de nouveaux moyens juridiques.

Bien entendu, la sécurité intérieure est d’abord l’affaire de l’État : personne ne le conteste. Pour autant, il n’est pas interdit de renforcer les complémentarités entre les services de l’État et les maires, partenaires naturels de l’État dans ce domaine.

Par ailleurs, les entreprises de sécurité privées doivent à mon sens prendre toute leur part dans le combat contre la délinquance. Certains ont agité le spectre de la privatisation des missions régaliennes de l’État, argument ultime lorsque l’on n’a plus grand-chose à dire. Il n’en est bien entendu pas question : au contraire, comme l’a très bien rappelé Jean-Patrick Courtois, le projet de loi vise à assurer une meilleure formation des agents de sécurité, une meilleure régulation et un meilleur contrôle de l’activité de ces entreprises, que ce soit dans le domaine de l’intelligence économique ou dans celui des activités privées de sécurité.

S’agissant des moyens juridiques, comme j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer à plusieurs reprises, je suis convaincu que la première et la meilleure des préventions réside dans la certitude de la sanction, même s’il n’y a pas que cela. MM. Anziani, Mézard et Zocchetto ont évoqué l’échelle des peines. Toutes les propositions du Gouvernement, y compris sur la perpétuité réelle, trouvent leur justification dans la gravité des faits correspondant à la peine envisagée. Nous ne durcissons pas la répression, nous nous intéressons à l’exécution effective de la peine prononcée. Demain, les assassins de policiers ou de gendarmes encourront tout comme aujourd’hui la réclusion criminelle à perpétuité, à cette différence près que, si cette peine est prononcée, le verdict de la cour d’assises ne sera pas virtuel. C’est ce que les Français attendent, et cela me paraît relever du bon sens ! En d’autres termes, les jurés pourront décider, dans un tel cas, que cette peine ne sera jamais aménagée, ou en tout cas pas avant trente ans.

Madame Dumas, je vous remercie du soutien que vous apportez à ce texte. Vous avez mis en exergue les dispositions qui complètent les moyens d’action des forces de l’ordre et de la justice ou renforcent les sanctions existantes dans le domaine de la contrefaçon via internet et de la vente à la sauvette. Je vous indique d’ores et déjà que le Gouvernement soutiendra votre amendement relatif à l’interdiction des faisceaux laser à haute puissance qui servent à des actes de délinquance et peuvent aussi mettre en péril la sécurité aérienne, comme les médias s’en sont fait l’écho à juste titre. Quelque 600 plaintes ont été déposées par des pilotes de ligne depuis le début de l’année 2010.

Concernant le blocage des sites pédopornographiques, lorsque la maison brûle, on ne demande pas au juge l’autorisation d’envoyer les pompiers ! Comment peut-on réclamer une protection efficace et immédiate contre la pédopornographie sans prévoir les moyens nécessaires ? Je précise qu’aucun accès à internet ne sera supprimé ; il s’agit seulement de bloquer les pages ou l’accès aux contenus manifestement illicites.

Le projet de loi prévoit également de nouveaux moyens destinés à mieux protéger les mineurs, mais aussi à responsabiliser les parents. Selon moi, l’un ne va pas sans l’autre.

Je remercie M. Serge Dassault d’avoir rappelé l’importance de la prévention de la délinquance des jeunes de 16 à 18 ans et la nécessité de travailler en amont sur l’insertion professionnelle des jeunes. Quand nos compatriotes entendent la radio annoncer que deux mineurs ayant retiré le casque d’un policier avant de le frapper à coups de marteau ont été présentés au juge des enfants, les bras leur en tombent ! Ne soyons pas déconnectés des réalités : dans l’esprit des auditeurs d’une telle nouvelle, ces jeunes sont avant tout des délinquants, et l’annonce de leur présentation à un juge des enfants peut surprendre des personnes qui ne sont pas au fait de l’organisation de notre système judiciaire.

Je ne suis pas de ceux qui, comme M. Jean-François Voguet, recherchent les raisons du mal-être des délinquants pour les excuser.

M. Jean-François Voguet. Ce n’est pas ce que j’ai fait !

M. Brice Hortefeux, ministre. Pour ma part, je le dis très clairement, je m’intéresse davantage au désarroi des victimes et aux moyens de lutter contre les agissements des délinquants. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Dassault a également abordé la question des contrôles d’identité dans les quartiers. Ces contrôles sont nécessaires. Par une instruction de février 2006, Nicolas Sarkozy a rappelé aux responsables de la police et de la gendarmerie que les contrôles d’identité devaient être opérés dans le respect du droit et de la personne. Cette instruction, qui est toujours en vigueur, souligne également que le vouvoiement doit être la règle stricte dans la communication entre jeunes et forces de l’ordre.

Plusieurs intervenants ont insisté sur le fait que les mesures de couvre-feu pour les mineurs devaient conserver un caractère exceptionnel. Le texte s’inscrit dans cette logique. En effet, le couvre-feu général décidé par les préfets dans un lieu et pour un moment donné, par exemple dans un quartier où se produisent des incidents, en cas de forte présence de trafiquants et de délinquants ou encore dans un contexte tendu lié à une manifestation sportive, restera une mesure exceptionnelle.

Le couvre-feu individuel pour des mineurs connus de la justice, que préconisent de rétablir MM. François-Noël Buffet et Jacques Gautier, me paraît également être une bonne mesure de prévention et de protection. Il s’agit non d’une sanction, mais d’une mesure d’aide aux parents, complémentaire de ce que font notamment les conseils généraux pour les soutenir. Cela étant, si l’on peut tout à fait comprendre que des parents ne parviennent plus à exercer leur autorité sur un adolescent de 16 ou 17 ans, il n’est pas normal qu’ils n’assument pas toutes leurs responsabilités à l’égard d’un enfant de moins de 13 ans !

Je voudrais maintenant répondre à M. Christian Demuynck, notamment sur l’aménagement des peines.

Si j’ai bien compris, monsieur le sénateur, vous souhaitez une modification substantielle du dispositif de la loi pénitentiaire, votée l’année dernière. Sur ce point, la position du Gouvernement a évolué. Mme la garde des sceaux et moi-même avons mené une réflexion sous l’autorité du Président de la République et du Premier ministre : il apparaît que le dispositif adopté l’an dernier n’est pas totalement satisfaisant. L’aménagement automatique des peines de prison inférieures ou égales à deux ans entraîne des effets pervers dommageables et suscite l’incompréhension – légitime à mes yeux – des policiers et des gendarmes, à qui l’on demande par ailleurs de lutter contre la délinquance : savoir que tous les auteurs de délit condamnés à moins de deux ans de prison n’effectueront pas leur peine et reviendront bientôt les narguer dans la rue ne peut que les démotiver… Parallèlement, l’incompréhension n’est pas moindre au sein de la population, qui est excédée par certaines formes de délinquance de proximité.

En conséquence, monsieur Demuynck, le Gouvernement est favorable à un retour, sur ce point, à l’état du droit antérieur à la loi pénitentiaire, ni plus ni moins !

S’agissant enfin des moyens techniques, je ne peux laisser Mme Assassi dire que nous allons imposer des bracelets électroniques aux étrangers. C’est totalement faux ! Seuls seraient visés les terroristes étrangers en voie d’expulsion. Voilà un bel exemple d’amalgame fondé sur une forme d’aveuglement idéologique…

Par ailleurs, les Français plébiscitent la vidéoprotection. Je suis stupéfait que certains d’entre vous s’interrogent encore sur son bien-fondé. Avec les polices municipales, c’est sans conteste un des moyens forts dont disposent les maires pour contribuer à l’amélioration de la sécurité de leurs administrés. On ne peut pas nier éternellement l’évidence !

Les arguments contre la vidéoprotection sont d’ailleurs toujours les mêmes, et mes réponses demeurent également invariables. L’utilisation de cette technique ne constitue en aucun cas une atteinte aux libertés publiques. Nous avons là une illustration spectaculaire de vos contradictions ! Faut-il croire M. Charles Gautier, qui s’est engagé sans états d’âme en faveur de la vidéoprotection, Mme Assassi, qui y est totalement opposée, ou Mme Voynet qui, pour sa part, a signé un amendement visant carrément à remplacer le terme « vidéoprotection » par l’expression « vidéo-voyeurisme » ! Franchement, ce n’est pas très sérieux ! Cela étant, il est sain que, dans une démocratie, de véritables différences se manifestent : pour votre part, vous êtes profondément divisés sur le sujet ; de notre côté, nous sommes totalement favorables à la vidéoprotection, car elle a fait ses preuves.

M. Jean-François Voguet. Cela ne fonctionne pas !

M. Brice Hortefeux, ministre. Restez donc dans votre opposition et gardez vos doutes ! (Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.)

Madame Assassi, comment pouvez-vous encore tenir un tel discours ? Je ne veux pas croire que vous soyez de mauvaise foi, mais comment pouvez-vous affirmer que les images ne sont exploitées qu’a posteriori ? Toutes les analyses, toutes les expériences montrent que leur exploitation en temps réel permet d’empêcher des affrontements, de prévenir des agressions et de protéger les victimes. Je pourrais vous donner bien des exemples à cet égard,…

Mme Éliane Assassi. Moi aussi !

M. Brice Hortefeux, ministre. … concernant notamment la région parisienne, où un combat entre bandes rivales devant se dérouler sur le parvis de La Défense a pu être évité grâce aux systèmes de vidéoprotection installés sur les quais du RER. Mais persistez dans votre opposition, cela ne nous pose aucun problème !

En outre, comme l’a indiqué à très juste titre M. Zocchetto, la vidéoprotection peut permettre d’innocenter des personnes soupçonnées à tort.

Mme Catherine Troendle a raison de prôner l’installation de la vidéoprotection dans les établissements scolaires. J’ai décidé de soutenir ceux d’entre eux qui souhaitent s’engager dans cette voie ; il ne s’agit évidemment pas d’imposer quoi que ce soit.

M. Louis Nègre fait partie de ces maires qui ont fait le choix d’installer la vidéoprotection dans leur commune. Je le félicite de cette initiative et le remercie du soutien qu’il apporte aux propositions du Gouvernement.

Je sais gré à Mme Anne-Marie Escoffier d’avoir fait mention des déplacements que j’ai effectués au cours du mois d’août. Mon activité estivale a échappé à M. Anziani, qui, sans doute mal informé, mais néanmoins péremptoire, a prétendu qu’un de mes collègues du Gouvernement assumait mes fonctions à ma place !

M. Alain Anziani. J’ai juste constaté qu’il avait pris votre place !

M. Brice Hortefeux, ministre. Si nos points de vue divergent, madame Escoffier, nous sommes cependant d’accord, j’en suis convaincu, sur la nécessité de démontrer notre soutien actif en tout point du territoire aux forces de police et de gendarmerie, qui sont parfois malmenées, et aux Français qui sont touchés par une délinquante aussi violente qu’aveugle. La LOPPSI nous donnera les moyens d’agir contre de nouvelles formes de délinquance que vous connaissez par le biais de l’exercice tant de votre mandat que de vos responsabilités professionnelles antérieures. Elle constitue la traduction concrète d’une expérience de terrain face à l’évolution de la délinquance. Ce texte n’opère aucun recul au regard des valeurs de la République : notre seul et unique objectif est d’assurer la sécurité et la tranquillité de nos concitoyens en tout point de notre territoire. Tel est bien l’objectif que nous cherchons à atteindre sous l’autorité du Président de la République.

Madame Klès, j’ai cru comprendre que vous accusiez les policiers et les gendarmes, et moi à leur tête, de manipuler les statistiques. (Mme Virginie Klès fait un signe de dénégation.) Vous me supposez en la matière un pouvoir que je n’ai pas, mais surtout vous accusez de mensonge les policiers et les gendarmes !

Mme Virginie Klès. Ne répondez pas si vous n’avez pas compris ma position !

M. Jean-François Voguet. Tout va très bien, madame la marquise…

M. Brice Hortefeux, ministre. Nos forces de l’ordre font un travail formidable, œuvrant jour et nuit pour assurer la sécurité sur l’ensemble de notre territoire. Je ne laisserai personne les accuser à tort !

Mme Virginie Klès. Vous n’étiez pas là quand je suis intervenue ! Si c’est pour dire des choses pareilles, ne me répondez pas !

M. Brice Hortefeux, ministre. Monsieur Fouché, vous souhaitez, en matière de sécurité routière, un aménagement des sanctions frappant les auteurs de certaines infractions, afin qu’il soit notamment tenu compte de la situation des personnes ayant besoin d’utiliser un véhicule pour exercer leur activité professionnelle. Je suis moi aussi sensible à cette question, mais la loi du 12 juin 2003 a interdit le recours à toute forme de permis blanc pour les auteurs d’infractions graves au code de la route.

Quant au délai de récupération des points, le dispositif du permis à points est précisément destiné à responsabiliser les conducteurs et à leur faire prendre conscience de la nécessité de respecter les règles du code de la route. Nous aurons l’occasion d’en débattre, mais je tenais à préciser ces points.

Tels sont les éléments de réponse que je souhaitais vous apporter, mesdames, messieurs les sénateurs. Vous avez tous souligné, d’une façon ou d’une autre, le devoir du Gouvernement et du Parlement de proposer aux Français des mesures concrètes pour adapter la loi aux évolutions de la délinquance. À l’évidence, nous ne sommes pas toujours d’accord sur les moyens, et nous différons sans doute aussi sur les objectifs d’ensemble de la politique de sécurité, mais je suis certain que nous partageons la volonté d’assurer la sécurité de nos concitoyens. Je l’affirme très sereinement devant vous, le présent projet de loi répond à cette préoccupation, car les mesures qu’il contient sont pragmatiques, adaptées aux nouvelles formes de délinquance et issues d’une expérience du terrain, celle des forces de l’ordre et du Gouvernement mais aussi la vôtre, puisque nombre d’entre elles sont d’origine parlementaire.

En conclusion, je dirai que si la loi ne peut pas tout, elle peut beaucoup. Donnons-nous les moyens aujourd’hui d’aller plus loin et soyons à la hauteur des attentes, très fortes et légitimes, de nos compatriotes sur ces sujets ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure
Discussion générale (suite)

16

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 8 septembre 2010, à quatorze heures trente et le soir :

- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (n° 518, 2009-2010).

Rapport de M. Jean-Patrick Courtois, fait au nom de la commission des lois (n° 517, 2009 2010).

Texte de la commission (n° 518, 2009-2010).

Avis de M. Jean Faure, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 480, 2009-2010).

Avis de M. Aymeri de Montesquiou, fait au nom de la commission des finances (n° 575, 2009 2010).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures quarante.)

Le Directeur adjoint

du service du compte rendu intégral,

FRANÇOISE WIART