compte rendu intégral

Présidence de Mme Catherine Tasca

vice-présidente

Secrétaires :

M. Alain Dufaut,

M. Jean-Noël Guérini.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Mes chers collègues, dans l’attente du représentant du Gouvernement, je vais suspendre la séance pour quelques instants.

M. Guy Fischer. Ce n’est pas sérieux !

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à neuf heures trente-six, est reprise à neuf heures quarante.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

2

Article 23 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la bioéthique
Article 23

Bioéthique

Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi

(Texte de la commission)

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la bioéthique (projet n° 304, texte de la commission n° 389, rapports nos 388 et 381).

Nous poursuivons la discussion des articles.

Titre VII (suite)

RECHERCHE SUR L’EMBRYON ET LES CELLULES SOUCHES EMBRYONNAIRES

Mme la présidente. Dans l’examen du titre VII, nous avons entamé la discussion de l’article 23, dont je rappelle les termes.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi relatif à la bioéthique
Mise au point au sujet d'un vote

Article 23 (suite)

L’article L. 2151-5 du même code est ainsi rédigé :

I. – Aucune recherche sur l’embryon humain ni sur les cellules souches embryonnaires ne peut être entreprise sans autorisation. Un protocole de recherche conduit sur un embryon humain ou sur des cellules souches embryonnaires issues d’un embryon humain ne peut être autorisé que si :

– la pertinence scientifique de la recherche est établie,

– la recherche est susceptible de permettre des progrès médicaux majeurs,

– il est impossible, en l’état des connaissances scientifiques, de mener une recherche similaire sans recourir à des cellules souches embryonnaires ou à des embryons,

– le projet et les conditions de mise en œuvre du protocole respectent les principes éthiques relatifs à la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires.

II. – Une recherche ne peut être menée qu’à partir d’embryons conçus in vitro dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation et qui ne font plus l’objet d’un projet parental. La recherche ne peut être effectuée qu’avec le consentement écrit préalable du couple dont les embryons sont issus, ou du membre survivant de ce couple, par ailleurs dûment informés des possibilités d’accueil des embryons par un autre couple ou d’arrêt de leur conservation. À l’exception des situations mentionnées au dernier alinéa de l’article L. 2131-4 et au troisième alinéa de l’article L. 2141-3, le consentement doit être confirmé à l’issue d’un délai de réflexion de trois mois. Le consentement des deux membres du couple ou du membre survivant du couple est révocable sans motif tant que des lignées de cellules n’ont pas été dérivées de l’embryon.

III. – Les protocoles de recherche sont autorisés par l’Agence de la biomédecine après vérification que les conditions posées au I du présent article sont satisfaites. La décision de l’agence, assortie de l’avis du conseil d’orientation, est communiquée aux ministres chargés de la santé et de la recherche qui peuvent, lorsque la décision autorise un protocole, interdire ou suspendre la réalisation de ce protocole si une ou plusieurs des conditions posées au I du présent article ne sont pas satisfaites.

En cas de violation des prescriptions législatives et réglementaires ou de celles fixées par l’autorisation, l’agence suspend l’autorisation de la recherche ou la retire. Les ministres chargés de la santé et de la recherche peuvent, en cas de refus d’un protocole de recherche par l’agence, demander à celle-ci, dans l’intérêt de la santé publique ou de la recherche scientifique, de procéder dans un délai de trente jours à un nouvel examen du dossier ayant servi de fondement à la décision.

IV. – Les embryons sur lesquels une recherche a été conduite ne peuvent être transférés à des fins de gestation.

V. – Les études sur les embryons ne leur portant pas atteinte peuvent être conduites avant et après leur transfert à fin de gestation, si le couple y consent, dans les conditions fixées au III du présent article.

Mme la présidente. Je rappelle que nous avons entendu les interventions de nos collègues inscrits sur l’article.

Nous passons donc à la discussion des amendements.

Je suis saisie de douze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 124 rectifié, présenté par M. Retailleau, Mme Hermange et MM. Vial, Darniche, B. Fournier et Revet, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 2151-5 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Art. L. 2151-5. – La recherche sur l'embryon, les cellules-souches embryonnaires et les lignées de cellules-souches est interdite. »

Cet amendement n’est pas soutenu.

L'amendement n° 70 rectifié bis, présenté par Mme Hermange, M. P. Blanc, Mme Rozier, M. Revet, Mmes Giudicelli et Henneron, MM. Cantegrit, de Legge, Lardeux, Cazalet, Hyest, du Luart, Darniche, Gilles, Portelli, B. Fournier, Vial, Cointat, Retailleau, Pozzo di Borgo, Couderc, del Picchia, Bailly et Leleux et Mme B. Dupont, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 2151-5 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Art. L. 2151-5. - La recherche sur l'embryon humain et les cellules souches embryonnaires, ou leur utilisation, est interdite, si elle porte atteinte à l'intégrité ou la viabilité de l'embryon ou des cellules souches embryonnaires. »

La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Cet amendement, fruit d’une longue réflexion, vise à essayer de sortir de l’impasse « interdiction-dérogation » ou « dérogation-autorisation », …

M. Guy Fischer. C’est pareil !

Mme Marie-Thérèse Hermange. … en disposant que la recherche sur l’embryon est possible lorsqu’elle ne porte pas atteinte à l’intégrité ou à la viabilité de ce dernier.

Il s’agit non pas de s’opposer à la recherche en tant que telle, mais d’affirmer qu’elle est possible aujourd’hui sans détruire l’embryon.

La recherche sur l’embryon peut se faire sur un embryon qui est rejeté après un diagnostic préimplantatoire.

Elle peut également se faire sur des embryons in vitro durant les heures précédant leur implantation, avec des analyses ultrafines électriques qui portent sur l’ADN et les transformations épigénétiques. Dans ce cas, il faudra bien évidemment obtenir l’accord des parents.

Enfin, la recherche peut se faire sur des embryons congelés « orphelins », abandonnés par leurs parents biologiques, destinés à la destruction par décongélation. On pourrait les étudier in vitro en milieu de culture, jusqu’à leur mort spontanée.

En respectant ces conditions, nous aurions la faculté de conduire des recherches sans porter atteinte à l’intégrité ou à la viabilité de l’embryon.

Tel est l’objet de cet amendement, qui explicite les arguments que j’ai développés hier soir dans mon intervention sur l’article.

Mme la présidente. L'amendement n° 125 rectifié, présenté par M. Retailleau, Mme Hermange et MM. Vial, Bailly, Darniche, B. Fournier et Revet, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Au premier alinéa de l'article L. 2151-5 du code de la santé publique, après le mot : « humain », sont insérés les mots : «, les cellules souches embryonnaires et les lignées de cellules souches ».

Cet amendement n’est pas soutenu.

L'amendement n° 143, présenté par Mme Payet, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 2151-5 du même code est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après les mots : « embryon humain », sont insérés les mots : « et sur les cellules souches embryonnaires » ;

2° Les deuxième à dernier alinéas suivants sont supprimés.

La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Les stocks d’embryons congelés ont été progressivement constitués à la suite des cycles de fécondation in vitro depuis 1994.

En 2004, la loi a autorisé que les embryons congelés surnuméraires soient donnés à la recherche avec l’assentiment des parents. C’est une dérogation qui est en contradiction avec le principe d’interdiction de la recherche sur les embryons.

Je vous rappelle que 149 191 embryons sont conservés et congelés, dont 34 % sans projet parental. Une cinquantaine de programmes de recherche sont répertoriés sur le site de l’Agence de la biomédecine. À ce jour, il n’existe aucune indication thérapeutique.

Deux obstacles importants persistent : le risque lié à la persistance des cellules souches embryonnaires humaines pluripotentes résiduelles dans le greffon ou à l’émergence d’un comportement aberrant des précurseurs greffés ; le risque immunologique de rejet de la part du receveur.

Le rapport de la mission parlementaire de révision des lois de bioéthique fait état des thérapies existantes avec, notamment, les cellules du sang de cordon.

Certaines cellules souches adultes ont prouvé depuis plus de trente ans leur potentiel thérapeutique ; il en est ainsi des thérapies recourant aux cellules souches issues de la moelle osseuse ou du sang périphérique, qui bénéficient déjà à plus de 3 000 malades par an.

Depuis les essais cliniques du docteur Éliane Gluckman, on sait utiliser les cellules du sang placentaire. Le prélèvement de ces cellules ne présente pas de difficultés techniques et ne pose pas de problème de compatibilité. Nous ne devons pas perdre de vue le fait que l’utilisation des embryons pour la recherche conduit à leur destruction et que la course aux annonces cache des conflits d’intérêts majeurs au sein de la communauté scientifique.

Cette précipitation ne respecte pas les malades, qui vivent souvent des situations dramatiques, car on fait naître chez eux de faux espoirs à court terme.

Enfin, je tiens à rappeler que la recherche sur l’embryon n’a pas permis le développement de traitements médicaux et qu’il existe des solutions alternatives. En conséquence, il est urgent de rétablir l’interdiction absolue de la recherche sur l’embryon, car nous devons favoriser une recherche scientifique qui concilie, d’une part, les progrès thérapeutiques et, d’autre part, le respect et l’intégrité de la dignité humaine.

Mme la présidente. L'amendement n° 148, présenté par Mme Payet, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 2151-5 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après le mot : « humain », sont insérés les mots : «, les cellules souches embryonnaires et les lignées de cellules souches » ;

1° bis Après le premier alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :

« À titre exceptionnel, lorsque l’homme et la femme qui forment le couple y consentent, des études ne portant pas atteinte à l’embryon peuvent être autorisées.

« Les études ne peuvent être effectuées qu’avec le consentement écrit préalable du couple dont les embryons conçus in vitro dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation sont issus. Le consentement des deux membres du couple est révocable à tout moment et sans motif.

« Une étude ne peut être entreprise que si son protocole a fait l’objet d’une autorisation par l’Agence de la biomédecine. La décision d’autorisation est prise en fonction de la pertinence scientifique du projet d’étude, de ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques et de son intérêt pour la santé publique. La décision de l’agence, assortie de l’avis du conseil d’orientation, est communiquée aux ministres chargés de la santé et de la recherche qui peuvent, lorsque la décision autorise une étude, interdire ou suspendre la réalisation de ce protocole lorsque sa pertinence scientifique n’est pas établie ou lorsque le respect des principes éthiques n’est pas assuré.

« En cas de violation des prescriptions législatives et réglementaires ou de celles fixées par l’autorisation, l’agence suspend l’autorisation de l’étude ou la retire. Les ministres chargés de la santé et de la recherche peuvent, en cas de refus d’un protocole d’étude par l’agence, demander à celle-ci, dans l’intérêt de la santé publique ou de la recherche scientifique, de procéder dans un délai de trente jours à un nouvel examen du dossier ayant servi de fondement à la décision. » ;

2° Le deuxième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Par dérogation au premier alinéa, les recherches peuvent être autorisées lorsqu’elles sont susceptibles de permettre des progrès médicaux majeurs et lorsqu’il est impossible, en l’état des connaissances scientifiques, et à condition que soit expressément établie, sous le contrôle de l’Agence de la biomédecine, l’impossibilité de parvenir au résultat escompté par le biais d’une recherche ne recourant pas à des cellules souches embryonnaires ou à des embryons. La décision d’autorisation est également prise en fonction de la pertinence scientifique du projet de recherche et de ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques relatifs à la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires.

« Les recherches alternatives à celles sur l’embryon et conformes à l’éthique doivent être favorisées. » ;

3° Le troisième alinéa est supprimé ;

4° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « conduite que sur les embryons » sont remplacés par les mots : « menée qu’à partir d’embryons » et, après le mot : « procréation », il est inséré le mot : « et » ;

b) À la deuxième phrase, le mot : « Elle » est remplacé par les mots : « La recherche » et le mot : « ils » est remplacé par les mots : « les embryons » ;

b bis) Après la deuxième phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« Dans le cas où le couple consent à ce que ses embryons surnuméraires fassent l’objet d’une recherche, il est informé de la nature des recherches projetées afin de lui permettre de donner un consentement libre et éclairé. » ;

c) Sont ajoutés les mots : « tant que les recherches n’ont pas débuté » ;

5° Le cinquième alinéa est ainsi modifié :

a) Les deux premières phrases sont ainsi rédigées :

« Les projets de recherche sont autorisés par l’Agence de la biomédecine après vérification que les conditions posées au sixième alinéa du présent article sont satisfaites. Les décisions rendues par l’Agence de la biomédecine sont motivées. » ;

b) À la fin de la dernière phrase, les mots : « lorsque sa pertinence scientifique n’est pas établie ou lorsque le respect des principes éthiques n’est pas assuré » sont remplacés par les mots : « lorsqu’une ou plusieurs des conditions posées au même sixième alinéa ne sont pas satisfaites » ;

c) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« L’avis du conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine est motivé. »

La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Il s’agit d’un amendement de repli qui vise à rétablir le texte initial et donc à réaffirmer dans la loi le principe d’interdiction assorti de dérogations, ce qui me semble plus convenable.

Mme la présidente. L'amendement n° 169, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 2151-5 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après le mot : « humain », sont insérés les mots : «, les cellules souches embryonnaires et les lignées de cellules souches » ;

2° Après le premier alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :

« À titre exceptionnel, lorsque l’homme et la femme qui forment le couple y consentent, des études visant notamment à améliorer les techniques d’assistance médicale à la procréation et ne portant pas atteinte à l’embryon peuvent être autorisées.

« Les études ne peuvent être effectuées qu’avec le consentement écrit préalable du couple dont les embryons conçus in vitro dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation sont issus. Le consentement des deux membres du couple est révocable à tout moment et sans motif.

« Une étude ne peut être entreprise que si son protocole a fait l’objet d’une autorisation par l’Agence de la biomédecine. La décision d’autorisation est prise en fonction de la pertinence scientifique du projet d’étude, de ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques et de son intérêt pour la santé publique. La décision de l’agence, assortie de l’avis du conseil d’orientation, est communiquée aux ministres chargés de la santé et de la recherche qui peuvent, lorsque la décision autorise une étude, interdire ou suspendre la réalisation de ce protocole lorsque sa pertinence scientifique n’est pas établie ou lorsque le respect des principes éthiques n’est pas assuré.

« En cas de violation des prescriptions législatives et réglementaires ou de celles fixées par l’autorisation, l’agence suspend l’autorisation de l’étude ou la retire. Les ministres chargés de la santé et de la recherche peuvent, en cas de refus d’un protocole d’étude par l’agence, demander à celle-ci, dans l’intérêt de la santé publique ou de la recherche scientifique, de procéder dans un délai de trente jours à un nouvel examen du dossier ayant servi de fondement à la décision. » ;

3° Le deuxième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Par dérogation au premier alinéa, les recherches peuvent être autorisées lorsqu’elles sont susceptibles de permettre des progrès médicaux majeurs et lorsqu’il est impossible, en l’état des connaissances scientifiques, de mener une recherche similaire sans recourir à des cellules souches embryonnaires ou à des embryons. La décision d’autorisation est également prise en fonction de la pertinence scientifique du projet de recherche et de ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques relatifs à la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires.

« Les recherches alternatives à celles sur l’embryon et conformes à l’éthique doivent être favorisées. » ;

4° Le troisième alinéa est supprimé ;

5° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « conduite que sur les embryons » sont remplacés par les mots : « menée qu’à partir d’embryons » et, après le mot : « procréation », il est inséré le mot : « et » ;

b) À la deuxième phrase, le mot : « Elle » est remplacé par les mots : « La recherche » et le mot : « ils » est remplacé par les mots : « les embryons » ;

c) Après la deuxième phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Dans le cas où le couple consent à ce que ses embryons surnuméraires fassent l’objet d’une recherche, il est informé de la nature des recherches pratiquées afin de lui permettre de donner un consentement libre et éclairé. » ;

d) La dernière phrase est complétée par les mots : « tant que les recherches n’ont pas débuté » ;

6° Le cinquième alinéa est ainsi modifié :

a) Les deux premières phrases sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :

« Les projets de recherche sont autorisés par l’Agence de la biomédecine après vérification que les conditions posées au sixième alinéa du présent article sont satisfaites.» ;

b) À la dernière phrase, les mots : « lorsque sa pertinence scientifique n’est pas établie ou lorsque le respect des principes éthiques n’est pas assuré » sont remplacés par les mots : « lorsqu’une ou plusieurs des conditions posées au même sixième alinéa ne sont pas satisfaites » ;

c) Il est ajouté une phrase ainsi rédigée :

« L’avis du conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine est motivé. »

La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé. Ne nous voilons pas la face : nous sommes à l’un des moments-clés de ce projet de loi.

M. Guy Fischer. Oui, le plus important !

M. Xavier Bertrand, ministre. Je ne sais pas s’il s’agit du point le plus important, monsieur Fischer, mais en tout cas c’est l’un des éléments-clés.

Pour poser le débat clairement, nous pouvons remarquer que si certains sont pour l’interdiction totale, d’autres souhaitent au contraire changer de système. Il me semble qu’un vrai point d’équilibre peut être trouvé, notamment par le maintien de la situation actuelle. En effet, elle se caractérise par un principe d’interdiction, et j’ai bien conscience des réserves qu’il peut y avoir par rapport au basculement vers un système d’autorisation complète, qui ne convient ni à nombre de nos concitoyens ni à nombre de parlementaires. Mais ne peut-on pas considérer que cette situation permet des avancées ?

La France n’a évidemment pas perdu son statut et sa situation en matière de recherche sur le plan international.

Mme Marie-Thérèse Hermange. C’est une évidence !

M. Xavier Bertrand, ministre. Certes, on peut trouver quelques scientifiques disant qu’ils aimeraient aller plus loin, et je peux les comprendre ; mais le rôle qui est le nôtre, celui de médiation et d’impulsion dans la société, me conduit en tout cas à penser que les dispositions actuellement en vigueur constituent un équilibre.

Revenir en arrière en adoptant un principe d’interdiction totale ne me paraît pas être la bonne voie pour la France. Je le dis très clairement. En revanche, avoir ce principe – parce que je crois aux valeurs et aux principes –, tout en permettant des dérogations bien encadrées, nous permet aussi de continuer à avancer en étant fidèles à nos valeurs. Changer, passer de l’autre côté de la barrière, ce n’est plus du tout la même chose.

Mes chers collègues, quand vous avez des positions aussi diamétralement opposées les uns et les autres, et que le texte de loi exige une solution, peut-être pouvez-vous vous dire de manière très apaisée et sereine que la voie de l’équilibre vaut la peine d’être suivie ? J’y crois profondément. L’amendement que vous proposez, madame Payet, s’inscrit également dans cet esprit.

Je peux vous dire que, comme au sein de la Haute Assemblée, les débats ont été importants à l’Assemblée nationale, en commission des affaires sociales. D’ailleurs, on remarque bien que, médiatiquement, c’est sur ce sujet-là que se focalisent un certain nombre de commentaires, de tribunes et de débats entre les uns et les autres.

Bien sûr que la question de l’anonymat sur le don de gamètes est importante ! Bien sûr que la question de la gestation pour autrui est importante ! Tout l’est !

Mais ici, on touche à l’un des débats structurants sur les valeurs qui sont les nôtres, et aussi sur les avancées possibles et nécessaires en matière de recherche. Je plaide vraiment avec conviction en faveur de cette position, qui est une solution d’équilibre.

Les tenants de l’interdiction totale ne s’y retrouvent pas tout à fait, c’est vrai ! Ceux de l’autorisation totale non plus. Mais, mesdames, messieurs les sénateurs, convenez qu’il n’y a pas de majorité aujourd’hui, ni pour l’une, ni pour l’autre.

Dans ces conditions-là, dans un monde qui change, si vous en restez à des positions totalement opposées et qui s’anéantissent l’une l’autre, la France recule.

Nous avons la possibilité de continuer à avancer. Je vous demande donc, au-delà des passions – et elles sont légitimes ! –, de réfléchir à la voie proposée par le Gouvernement, qui est celle d’un équilibre, équilibre que j’assume.

Certains nous disent en effet que nous n’allons pas assez loin dans l’autorisation, d’autres nous disent au contraire que nous allons trop loin compte tenu des dérogations prévues ; mais étant donné les rapports de force dans la société et au sein du monde de la recherche, c’est cette position qui irait le plus dans l’intérêt de notre pays. Telle est ma conviction.

Mme la présidente. L'amendement n° 107, présenté par M. Ralite, Mmes Gonthier-Maurin et Labarre, MM. Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

I. - Les recherches sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires sont autorisées lorsqu’elles remplissent les conditions suivantes :

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Cet amendement, dont le premier signataire est mon collègue Jack Ralite, concerne l’un des trois points qui cristallisent le débat. Ce sujet est en en effet au cœur de ce qui apparaîtra pour les uns, dont les membres de notre groupe font partie, comme une avancée, et pour les autres, pour des raisons que nous pouvons comprendre mais que nous ne partageons pas, comme une forme de statu quo. Nous nous sommes ainsi réjouis de la modification dans le bon sens de cet article par la commission des affaires sociales du Sénat, puisque c’est une des décisions ayant suscité le plus de débats au sein de cette instance.

En effet, la recherche sur les embryons et les cellules souches embryonnaires est un enjeu fondamental de ce texte. Elle est porteuse de grands espoirs pour la recherche médicale qui poursuit un objectif d’intérêt général, et le régime d’autorisation encadré que reconnaît désormais implicitement cet article est pour nous l’attitude la plus adaptée. Je crois que le point fondamental est le passage de cette interdiction dérogatoire à une autorisation encadrée.

Il faut d’ailleurs bien noter que l’enjeu est avant tout symbolique : ce régime d’autorisation sous conditions ne changera pas fondamentalement la pratique actuelle d’interdiction avec dérogations. Cette autorisation serait en effet soumise aux mêmes conditions que celles qui sont prévues actuellement.

Il est donc plus logique de consacrer la légitimité de l’existant plutôt que de le cantonner à une interdiction de principe contradictoire avec la pratique.

À travers notre amendement, nous souhaitons simplement lever définitivement toute ambiguïté en affirmant clairement et en toute lettre le principe d’autorisation de la recherche sur les embryons et les cellules souches embryonnaires.

Cela aurait le mérite de clarifier le statut de cette recherche scientifique en balayant tout soupçon infondé sur cette dernière. Rappelons à ce titre que la recherche sur les embryons n’est permise que sur ceux qui sont conçus dans le cadre de l’assistance médicale de procréation et ne font plus l’objet d’un projet parental ; cette recherche n’est autorisée que si les parents y consentent, et alors que ces embryons seront sinon détruits.

Si la plus grande prudence est de mise, dans ce cas précis les problèmes éthiques sont franchement limités, pour ne pas dire simplement inexistants : il ne s’agit en aucun cas de la destruction d’une vie humaine, comme l’affirment les défenseurs d’une interdiction absolue de recherche, et, au-delà du débat dangereux sur le statut juridique de l’embryon, la seule question qui se pose en matière de recherche embryonnaire est la suivante : doit-on l’autoriser sur des embryons destinés à être détruits ?

C’est bien pour mettre fin à cette discorde qui trouve appui sur des conceptions religieuses et non scientifiques de la vie que nous devons éliminer toute possibilité de confusion.

Le travail scientifique de recherche sur l’embryon, dès lors qu’il est assorti de protections et de conditions, est aussi honorable, éthique et nécessaire que les autres recherches, qui sont d’ailleurs permises à tout âge de la vie et même après la mort !