M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 2

Remplacer le mot :

transmet

par le mot :

soumet

II. - Alinéa 3

Remplacer les mots :

l'une des

par les mots :

une ou plusieurs

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Pour ma part, outre une amélioration rédactionnelle, je me contente de remplacer les mots : « l’une des » commissions par l’expression : « une ou plusieurs ».

Je ne souhaite pas ouvrir ici le débat sur le rôle de la commission des affaires européennes, mais je pense que nous devons respecter l’architecture actuelle, avec les commissions permanentes, d’un côté, et la commission des affaires européennes, de l’autre.

Certes, chacun peut donner son avis, y compris la commission des affaires européennes, mais il me semble nettement préférable d’adopter la rédaction que je propose.

M. le président. L'amendement n° 12, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

l’une des

par les mots :

une ou plusieurs

La parole est à Mme Anne-Marie Payet, au nom de la commission des affaires sociales.

Mme Anne-Marie Payet, au nom de la commission des affaires sociales. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 56, 27 rectifié et 12 ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 56, dont l’adoption irait à l’encontre des prérogatives du Gouvernement dans la conduite des relations internationales.

Comme je l’ai expliqué, je préfère la rédaction de l’amendement n° 6 à celle de l’amendement n° 27 rectifié.

M. Bernard Frimat. C’est votre droit !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je ne veux pas ouvrir un débat sur les rôles respectifs de la commission des affaires européennes et des commissions permanentes. Par ailleurs, je suis évidemment favorable au fait de remplacer « transmet » par « soumet ».

Enfin, l’amendement n° 12 serait satisfait par l’adoption de mon amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les quatre amendements en discussion commune ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 56.

J’ai bien compris qu’il y avait un accord non encore tout à fait abouti entre M. Frimat et M. le rapporteur sur l’amendement n° 27 rectifié…

M. Bernard Frimat. Cela s’appelle un désaccord !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Le Gouvernement émet donc un avis de sagesse sur l’amendement n° 6.

Quant à l’amendement n° 12, il serait satisfait par l’adoption de l’amendement n° 6.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 56.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'amendement n° 12 n'a plus d'objet.

L'amendement n° 34, présenté par MM. Arthuis et Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

, qui peuvent proposer l’adoption d’une résolution sur le programme de stabilité mentionné à l’alinéa précédent, selon des modalités fixées par le règlement de chaque assemblée

La parole est à M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. Cet amendement concerne le projet de programme de stabilité, qui est transmis à l’une des commissions.

L’article 12 prévoit que les commissions peuvent exprimer un avis. Nous souhaitons qu’il puisse y avoir une appréciation plus nuancée qu’un simple avis et que la commission ait la possibilité de proposer l’adoption d’une résolution sur le programme de stabilité.

Par cet amendement, nous suggérons donc que l’avis puisse déboucher sur une proposition de résolution.

À l’instar des résolutions européennes mentionnées à l’article 88-4 de la Constitution, desquelles elles se rapprochent par leur objet et pourront s’inspirer sur le plan de la procédure, ces résolutions d’un type nouveau seraient élaborées dans des conditions prévues par le règlement de chaque assemblée, qui serait libre de s’organiser selon ses souhaits.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Les résolutions européennes n’ont rien à voir avec ce que vous proposez, monsieur Arthuis !

Je ferai le même commentaire que sur l’amendement de M. Fischer : par une résolution européenne, nous donnons notre avis sur des projets d’actes européens, directives ou règlements etc. Ici, il s’agit de donner notre avis sur un document que le gouvernement français transmettra aux institutions de l’Union européenne.

Monsieur Arthuis, l’avis prévu à l’article 12 peut être tout à fait explicite et contenir tout ce que vous voudrez qu’il contienne. Il s’agit, d’ailleurs, d’un apport de l’Assemblée nationale. Mais prévoir que cet avis débouche sur une résolution au sens de l’article 34-1 de la Constitution risque de handicaper le Gouvernement dans les éventuelles négociations qu’il aura à conduire à l’échelon européen.

Je dois avouer que j’avais pensé à une disposition similaire, mais je pense que votre amendement met à mal l’équilibre, auquel nous avons eu déjà bien du mal à parvenir, entre les résolutions de l’article 34-1 et les résolutions européennes de l’article 88-4. Je souhaiterais que vous le retiriez. À défaut, j’émettrai un avis très défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Je comprends tout à fait le souhait de M. Arthuis, mais le terme de « résolution » est déjà utilisé dans un sens bien précis à l’article 34-1 de la Constitution.

Vous voulez donner une forme plus solennelle à l’avis prévu à l’article 12 et faire jouer un rôle aux commissions permanentes, si j’ai bien compris votre intention. Or les résolutions prévues à l’article 34-1 de la Constitution donnent plutôt la part belle aux groupes politiques.

Il est donc préférable de ne pas utiliser le même terme pour faire référence à deux procédures différentes. Dans la mesure où les deux assemblées mettront un peu de temps avant de s’accorder sur une rédaction commune, je vous propose, monsieur Arthuis, à ce stade du débat, de retirer votre amendement, qui n’est visiblement pas en l’état prêt à être adopté. Nous pourrions alors travailler à une solution susceptible de vous donner satisfaction d’ici à la deuxième lecture. Le Gouvernement s’y engage.

M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° 34 est-il maintenu ?

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. Je vous remercie, monsieur le garde des sceaux, de la proposition que vous venez de formuler.

Peut-être serait-il convenable, néanmoins, de voter cette disposition pour que la navette nous offre l’occasion de rechercher une rédaction plus satisfaisante ?

Si je retire maintenant cet amendement, ce que je propose disparaît purement et simplement.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. J’ai pris un engagement devant vous, monsieur Arthuis !

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. Dans ce cas, je retire cet amendement et je prends date pour la deuxième lecture, en vous faisant une confiance totale, monsieur le garde des sceaux.

M. le président. L'amendement n° 34 est retiré.

Je mets aux voix l'article 12, modifié.

(L'article 12 est adopté.)

Article 12
Dossier législatif : projet de loi  constitutionnelle relatif à l'équilibre des finances publiques
Intitulé du projet de loi constitutionnelle

Article 13

Le vingt et unième alinéa de l’article 34, les articles 39 et 42, les premier, troisième et cinquième alinéas de l’article 47, les premier et troisième alinéas de l’article 47-1 et les articles 48, 49, 61 et 70 de la Constitution, dans leur rédaction résultant de la présente loi constitutionnelle, et l’article 46-1 de la Constitution entrent en vigueur dans les conditions fixées par les lois organiques nécessaires à leur application.

Le 4° de l’article 1er de la présente loi constitutionnelle entre en vigueur dans les mêmes conditions. – (Adopté.)

Article 13
Dossier législatif : projet de loi  constitutionnelle relatif à l'équilibre des finances publiques
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Intitulé du projet de loi constitutionnelle

M. le président. L'amendement n° 28 rectifié, présenté par MM. Marc, Frimat, Collombat et Yung, Mme Bricq, MM. Frécon, Daudigny, Desessard, Bérit-Débat, Sergent et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi l’intitulé de ce projet de loi :

Projet de loi constitutionnelle relatif à la communication gouvernementale sur l’équilibre des finances publiques

La parole est à M. François Marc.

M. François Marc. Cet amendement est une sorte d’anticipation sur les explications de vote, puisqu’il a vocation à substituer à l’intitulé actuel : « Projet de loi constitutionnelle relatif à l’équilibre des finances publiques », un nouvel intitulé : qui se lit ainsi : « Projet de loi constitutionnelle relatif à la communication gouvernementale sur l’équilibre des finances publiques. (Rires sur les travées du groupe socialiste.)

En effet, nous avons entendu depuis quelques heures des déclamations particulièrement probantes sur la nécessité qu’il y avait à faire preuve d’une grande vertu budgétaire. Si, comme Diderot, on peut penser que l’habitude de la sagesse dispense presque toujours de la vertu, voit-on pour autant que le Gouvernement nous a habitués à faire preuve de sagesse budgétaire ces dernières années ? Incontestablement, non !

Toutes les niches fiscales et tous les cadeaux accordés aux uns et aux autres font qu’aujourd'hui la France souffre d’une perte de substance de la ressource fiscale.

Peut-on aujourd'hui parler d’un virage,…

M. Bernard Frimat. D’une impasse !

M. François Marc. … d’un changement d’attitude, d’une conversion du Gouvernement à la vertu ?

M. François Marc. La réponse, très clairement, mes chers collègues, est négative !

La commission des finances n’a-t-elle pas examiné ce matin un texte dont nous débattrons prochainement dans lequel le Gouvernement prévoit de continuer à amenuiser les recettes de la fiscalité en France, puisque l’impôt sur la fortune va être délesté annuellement de 2 milliards d’euros de recettes ?

M. Guy Fischer. Dès la semaine prochaine !

M. François Marc. Incontestablement, monsieur le garde des sceaux, nous avons le sentiment que le présent projet de loi constitutionnelle n’est que l’habillage d’une opération de communication gouvernementale.

Vos ambitions affichées et vos propositions ne sont pas crédibles. Indéniablement, le vice est toujours présent puisque, dès la semaine prochaine, il nous sera proposé de réduire encore les recettes et de déséquilibrer le budget de l’État.

Cet amendement tend à apporter un éclairage pertinent sur le sens du projet de loi constitutionnelle qui nous est présenté. C'est la raison pour laquelle il paraît opportun de l’adopter.

M. Bernard Frimat. Imparable !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Nous remercions M. Marc de sa participation à ce débat et de son humour, il est vrai un peu particulier.

M. Jean-Claude Frécon. Il n’est pourtant pas de Corrèze ! (Sourires.)

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il peut y avoir de l’humour ailleurs qu’en Corrèze !

Mme Nicole Bricq. En Seine-et-Marne, par exemple ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je l’espère, bien que certains en soient moins convaincus ! (Nouveaux sourires.)

En tout état de cause, je ne peux approuver cet amendement, car l’équilibre des finances publiques est une référence indispensable dans cette révision constitutionnelle.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Défavorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Vote sur l'ensemble

Intitulé du projet de loi constitutionnelle
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi constitutionnelle, je donne la parole à M. Jean-Pierre Bel, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Bel. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, les débats sur le projet de loi constitutionnelle au sein de la Haute Assemblée l’ont clairement mis en lumière : le groupe socialiste, que j’ai l’honneur de présider, juge sévèrement cette initiative et ne s’y associe aucunement.

M. Jean-Pierre Bel. Mes collègues ont explicitement exprimé nos réserves de fond au cours de la discussion générale. Vous me permettrez, à présent, au nom de notre groupe, de procéder à l’explication de vote.

Avec ce texte, la Constitution, norme suprême de notre édifice juridique, est utilisée comme support à une opération aux préoccupations partisanes. C’est là une conception de l’action réformatrice – en l’occurrence, de l’agitation réformatrice - que nous ne partageons pas et qui nous paraît tout à fait préjudiciable.

La vraie question, la seule question qui compte, est celle de la situation de nos finances publiques. C’est à celle-là qu’il nous faut répondre ; c’est contre la constante dégradation des comptes de l’État depuis maintenant bientôt dix années que nous devons agir. Or le projet de loi constitutionnelle ne réglera aucune des graves difficultés que connaît notre pays.

En effet, sur le fond, le texte qui nous est proposé n’apportera aucune amélioration concrète. Surtout, il ne pourra pas suppléer ce qui restera toujours indispensable : je veux parler de la volonté politique. Et ce n’est pas moi qui le dis, mais la Cour des comptes qui le dénonce, dans son dernier rapport public : « L’existence de nombreuses règles n’a pas empêché la dégradation structurelle des finances publiques françaises au cours des dernières années. À l’inverse, les pays qui ont le mieux traversé la crise ou qui ont engagé les actions les plus vigoureuses pour redresser leurs comptes publics n’ont pas tous eu besoin d’en afficher. »

Même en Allemagne, que vous aimez citer en exemple, la règle introduite dans la loi fondamentale ne s’appliquera qu’à compter de 2016, alors même que la situation financière de ce pays s’est déjà améliorée.

Nous l’avons dit tout au long de cette discussion, que n’avez-vous respecté les règles vertueuses que vous voulez édicter aujourd’hui !

Des finances publiques saines reposent sur des choix politiques adaptés, non sur l’adoption incessante de règles nouvelles. En jouant ainsi au pompier pyromane, vous ne parvenez pas à masquer l’échec de vos politiques et vous ne réussissez pas plus à camoufler les conséquences financières des cadeaux fiscaux que vous avez octroyés tout au long du dernier quinquennat.

Je ne doute pas personnellement de la sincère volonté du président de la commission des finances de mettre fin aux déficits publics ni même de celle de certains collègues de la majorité qui constatent bien que l’on ne peut continuer ainsi. Cependant, nos débats ne sont tout de même pas une histoire des institutions et des mécanismes financiers racontée aux enfants !

La victime collatérale de votre projet de loi constitutionnelle, monsieur le garde des sceaux, est une nouvelle fois le Parlement, et singulièrement le Sénat, comme mes collègues l’ont souligné dans leurs interventions.

L’essence même de la démocratie réside dans le fait que le Parlement a pour principale prérogative de voter la loi, de consentir l’impôt et d’adopter le budget. Avec le texte qui nous est présenté, le droit d’initiative est encadré au point de s’en trouver bridé. Je note, au passage, que c’est la prétendue volonté de renforcer le Parlement qui avait guidé la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008…

Je souligne également qu’il nous est proposé de supprimer les lois de programmation des finances publiques introduites par la même révision constitutionnelle il y a moins de trois ans. Il est vrai qu’il n’en a pas été fait grand usage !

Mes chers collègues, je suis au regret de devoir affirmer avec force que ce projet de loi constitutionnelle est rempli d’arrière-pensées. En réalité, il constitue une tentative de diversion…

M. Jean-Pierre Bel. … pour détourner l’attention de vos échecs successifs et incriminer un prétendu laxisme de la gauche, de cette même gauche qui a géré avec rigueur les comptes de la nation, notamment entre 1997 et 2002,…

M. Didier Guillaume. Et c’était autre chose !

M. Jean-Pierre Bel. … et qui gère les finances locales avec le souci constant que chaque euro dépensé soit un euro utile !

Monsieur le garde dans sceaux, le Gouvernement, depuis quelques semaines, est dans la repentance mal assumée. Il en a été ainsi encore la semaine dernière, à l’Assemblée nationale, lorsque vous avez décidé, enfin, de renoncer au bouclier fiscal, mesure pourtant emblématique du mandat de Nicolas Sarkozy. Aujourd'hui, ici, au Sénat, vous voulez effacer d’un coup de baguette magique la mauvaise image que vous avez donnée en accumulant les déficits publics depuis plus de neuf ans.

Nous n’avons donc pas de leçon à recevoir en matière de finances publiques. En revanche, nous ne nous prêterons pas au jeu de dupes qui nous est proposé. C’est pourquoi je vous confirme solennellement que notre groupe s’opposera à ce projet de loi constitutionnelle. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, les sénateurs du groupe CRC-SPG voteront contre ce projet de loi constitutionnelle instaurant une loi-cadre d’équilibre des finances publiques.

Nous avons expliqué tout au long de cette discussion les raisons de notre opposition. Nous refusons l’intégration dans notre Constitution des règles d’orthodoxie budgétaire, si chère à la Commission européenne. En fait, nous refusons la camisole financière européenne, véritable camisole budgétaire constitutionnalisée par ce texte.

Nous refusons cette prétendue « règle d’or » qui vise à inscrire dans le marbre l’hyper-austérité pour l’immense majorité de notre peuple et le maintien des privilèges pour quelques-uns.

Quel symbole ! Une semaine après l’adoption de cette « règle d’or », nous examinerons l’allégement considérable de l’ISF pour deux milliards d’euros financés par la collectivité et, bien entendu, inscrits en déficit.

Les cadeaux aux plus riches, les exonérations fiscales et sociales massives, les niches fiscales ne sont pas remises en cause par le Gouvernement, elles sont mêmes encouragées depuis 2002 et leur création est accélérée par Nicolas Sarkozy depuis quatre ans.

Vous nous parlez de « règle d’or », alors que le premier geste du nouveau chef de l’État en juillet 2007 a été d’accorder 10 milliards d’euros aux plus favorisés, notamment au travers du fameux bouclier fiscal.

Et M. Sarkozy finit son septennat comme il l’a commencé, en accordant un nouveau cadeau aux grandes fortunes, trois fois plus important que le bouclier fiscal, dont l’abrogation ne dupe personne.

Aujourd’hui, ce sont 100 milliards d’euros de recettes fiscales qui manquent à l’appel et, plutôt que de les réclamer à ceux qui peuvent les payer, vous réduisez massivement la dépense publique en cassant le service public, en démantelant les trois fonctions publiques, en supprimant des dizaines de milliers de postes de fonctionnaire.

Nous refusons donc l’inscription de l’austérité comme valeur constitutionnelle.

Nous voterons contre ce projet de loi constitutionnelle, car le principe même de la loi-cadre porte atteinte aux droits du Parlement. Comment accepter qu’un vote engage le Parlement pour trois, quatre, cinq ou dix ans?

C’est inacceptable sur le plan du droit de chaque parlementaire à amender, à proposer, droit constitutionnel par excellence.

C’est inacceptable sur le plan de la démocratie, puisqu’une majorité pourra influencer, encadrer, corseter, les choix d’une nouvelle majorité qui tiendrait pourtant sa légitimité du suffrage universel. Le suffrage universel ne doit-il pas rester la valeur cardinale de la République ?

Enfin, nous contestons la confirmation du Conseil constitutionnel comme gardien de l’orthodoxie budgétaire libérale, puisqu’il examinera la conformité de toute loi à ces lois-cadres d’austérité.

La mise sous tutelle du Parlement prend vraiment de multiples formes qui sont autant de raisons pour nous de voter contre ce projet de loi constitutionnelle. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le sujet mériterait un long développement, mais je vais très volontairement abréger mon intervention, puisque mes collègues se sont déjà exprimés dans le même sens. La majorité du groupe du Rassemblement démocratique et social européen et la totalité des radicaux de gauche en son sein s’opposeront à ce projet de loi constitutionnelle.

Les raisons sont multiples, mais celle qui, au premier chef, justifie notre opposition, c’est le numéro d’illusionniste auquel le Gouvernement se livre ici. Il est tout de même assez cocasse que, dans un projet de loi sur les finances, il ne soit jamais question de recettes ni de dépenses. Pourtant, on le sait très bien, pour parvenir à l’équilibre financier, il faut prendre en considération les dépenses incompressibles et celles sur lesquelles des économies sont possibles. Or il n’y a aucune ligne directrice en ce sens dans le présent texte.

Par ailleurs, il a été fait grand usage d’un mot que l’on a semble-t-il redécouvert pour l’occasion, celui de « vertu ». Qu’à cela ne tienne : que des couventines viennent donc vertueusement siéger à notre place - si nous en cherchons, nous en trouverons dans le pays -, et alors la vertu sera la règle dans cette maison ! (Sourires.)

On a aussi inventé des expressions, comme le « rabot fiscal », qui est d’ailleurs devenu une lime à ongles au fil des semaines et des mois. (Nouveaux sourires.)

Monsieur le garde des sceaux, être souriant comme vous l’êtes ne vous empêche pas selon moi d’être autiste. Il est en effet très difficile de vous faire vous écarter de votre ligne directrice – on a d’ailleurs du mal à la saisir – et vous préférez camper sur des positions idéologiques sans jamais écouter les propositions de l’opposition. C’est là une attitude qui me paraît anormale.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. J’en parlerai au préfet… (Sourires.)

M. François Fortassin. Vous pourrez en parler à M. le préfet. Faites votre travail pour que vos amis soient élus, mais, soyez sans crainte, nous essaierons de les contrecarrer localement ! (Nouveaux sourires.)

Enfin, je vois dans ce texte une volonté de corseter le Parlement,…

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Mais non !

M. François Fortassin. … qui n’est pas acceptable. C’est également un coin enfoncé dans l’idée forte, que nous devons tous partager, de décentralisation. On a le sentiment que l’État veut tout régenter, sentiment que l’on a connu dans d’autres temps, mais on croyait cette ère révolue. En tout cas, comptez sur nous pour ne pas vous laisser faire ! (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Christian Cointat.

M. Christian Cointat. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la commission des lois, grâce à l’impulsion et aux propositions de son président-rapporteur, a considérablement amélioré un texte qui était totalement inacceptable à mes yeux quand il a été transmis au Sénat.

J’ai voté tous les articles, mais je l’ai fait plus par solidarité que par conviction. Je vais même dire toute la vérité : je ne l’ai fait que par solidarité et non par conviction. (Ah ! sur plusieurs travées du groupe socialiste.)

En effet, par nature, je suis très méfiant envers ceux qui veulent nous emmener à marches forcées vers la vertu, surtout si, à l’arrivée, ce sont des menottes qui nous attendent. À trop vouloir imposer la vertu, on ne fait que prouver qu’elle n’est pas naturelle.

M. Guy Fischer. Très bien !

M. Christian Cointat. Je préfère le courage et la responsabilité à l’obligation et à la contrainte…

M. Didier Guillaume. Il a raison !

M. Christian Cointat. … et, surtout, à la magie des mots en politique. Car, comme le disait Rivarol, « tout doit être à proportion, y compris la vertu ».

Alors, je resterai solidaire, donc je ne voterai pas contre ce texte, mais, comme je ne suis pas convaincu, je m’abstiendrai.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.