M. le président. L'amendement n° 296 rectifié, présenté par Mme Escoffier, MM. Mézard, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Vendasi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Plancade, Requier, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :

Après l’article 33

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 162-18 du code de la sécurité sociale est abrogé.

II. – À la première phrase du septième alinéa de l’article L. 138-10 du code de la sécurité sociale, les mots : « soit un ajustement des prix, soit le versement d'une remise en application de l'article L. 162-18 » sont remplacés par les mots : « un ajustement des prix ». 

III. – L’article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié : 

a) Après le 1°, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :

« La baisse de prix applicable en cas de dépassement par l’entreprise des volumes de vente précités ; ».

b) Au 2°, les mots : « des articles L. 162-18 » sont remplacés par les mots : « de l’article ». 

IV. – À l’article L. 162-37 du code de la sécurité sociale, les mots : « aux articles L. 162-16, L. 162-18 et L. 165-4 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 162-14 et L. 162-16 ». 

V. – Le premier alinéa de l’article L. 165-4 du code de la sécurité sociale est supprimé.

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Depuis les années quatre-vingt-dix, les pouvoirs publics favorisent la voie conventionnelle pour la mise en œuvre de la politique économique du médicament. Le CEPS fixe ainsi les prix des médicaments par le biais de conventions avec les entreprises pharmaceutiques pour une durée déterminée.

En cas de dépassement du chiffre d’affaires prévisionnel, les laboratoires pharmaceutiques disposent de deux instruments de régulation conventionnelle : les baisses de prix ou les remises annuelles.

En vertu de l’article L. 138-10 du code de la sécurité sociale, les laboratoires ont toute liberté pour choisir l’un ou l’autre dispositif. Or ces deux instruments n’ont pas le même impact : si le laboratoire choisit le mécanisme de la baisse de prix, les économies sont répercutées à la fois sur l’assurance maladie et sur le patient, et n’engendrent pas de modification des taux de prise en charge, contrairement au mécanisme des remises. Ce système est donc plus équitable, car il modifie directement la base de remboursement du médicament et en bénéficient aussi bien l’assurance maladie obligatoire que le patient.

Par ailleurs, les remises sont renégociées chaque année, alors que les baisses de prix s’appliquent à toutes les ventes à venir des médicaments considérés.

Pour toutes ces raisons, et dans un souci de régulation du marché du médicament, nous vous proposons, mes chers collègues, de privilégier le mécanisme de la baisse de prix.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ce n’est certainement pas la dernière fois qu’on le dira aujourd'hui, la politique du médicament est extrêmement complexe et peu transparente.

Cela tient, entre autres multiples raisons, à ce que le CEPS et les laboratoires négocient divers éléments : ils peuvent ainsi opter soit pour un ajustement des prix, soit pour une remise sur le chiffre d’affaires de la spécialité en discussion, cette dernière solution étant peu transparente. Aussi est-il préférable de privilégier les baisses de prix.

C’est pourquoi la commission est favorable à ces deux amendements – ils ont le même objet –, qui ne constituent toutefois qu’un premier pas vers une remise à plat de la politique menée en la matière.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.

Nous cherchons à faire baisser les dépenses sur les médicaments. Aujourd'hui, nous disposons, pour ce faire, de deux leviers : la négociation de baisses des prix et les remises.

Permettez-moi de rappeler que le montant global des remises est faible puisqu’il est de l’ordre de 1 % des dépenses remboursables de médicaments. On ne peut donc pas considérer que les remises faussent la vision des prix.

En outre, celles-ci portent très souvent sur des produits pris en charge à 100 % par l’assurance maladie ; cela n’entraîne donc pas de transfert vers les complémentaires santé.

Il s’agit d’un outil de régulation des dépenses et de conventionnement très utile au CEPS, qui sait le manier avec précaution, en privilégiant toujours les baisses de prix.

Bref, cet outil de négociation ne nuit pas aux baisses de prix ; au contraire, il les facilite.

M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote sur l’amendement n° 243.

M. Ronan Kerdraon. Décidément, je ne comprends pas votre position, madame la secrétaire d'État.

Ainsi que l’a très bien rappelé notre collègue Catherine Génisson, nous avons eu de longues discussions sur ce sujet voilà quelques jours, lors de l’examen du projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé : toutes les possibilités de baisses des prix ont été envisagées. Certes, vous n’étiez pas présente, madame la secrétaire d'État, mais votre collègue Xavier Bertrand, qui représentait le Gouvernement lors de ce débat, pourrait en témoigner.

Nous vous proposons des amendements qui vont dans le sens de ce qui est souhaité non seulement par les parlementaires, mais aussi par les assurés sociaux.

Décidément, nous avons une appréciation de la politique du médicament fondamentalement différente de la vôtre ; telle était d’ailleurs, hier soir, notre conclusion sur la troisième partie du présent projet de loi. On est bien ici sur une logique de rupture, et je suis désolé que vous n’ayez pas entendu les explications pourtant claires de nos deux collègues.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 243.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 33, et l'amendement n° 296 rectifié, satisfait, n'a plus d'objet.

L'amendement n° 119 rectifié, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 33

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 1435-5 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le directeur général de l’agence régionale de santé peut décider de diminuer la rémunération prévue au deuxième alinéa s’il constate que le professionnel de santé chargé d’assurer la mission de service public de la permanence des soins ne respecte pas les tarifs opposables. »

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Avec cet amendement, nous poursuivons le débat que nous avons eu au sujet de l’accès aux soins pour toutes et tous, un accès qui passe, selon nous, par la garantie de tarifs opposables.

Nous nous intéressons ici plus particulièrement au respect de ces tarifs dans le cadre de la permanence de soins ; nous avions d’ailleurs déposé un amendement de même nature lors de l’examen de la proposition de loi modifiant certaines dispositions de la loi HPST, présentée par M. Fourcade. Le rapporteur s’était alors déclaré favorable à notre amendement, indiquant qu’il permettait d’aborder un vrai sujet, celui des tarifs pratiqués par les médecins de secteur 2 dans le cadre de la permanence des soins, laquelle est, je le rappelle, une mission de service public.

La réponse que M. Xavier Bertrand avait, quant à lui, faite à Guy Fischer n’était pas satisfaisante, car il s’était contenté de dire : « Je suis contre la philosophie qui inspire les amendements de M. Fischer : des sanctions, des sanctions, des sanctions ! Vous n’avez pas compris que nous sommes dans un système de médecine libérale. »

J’espère, madame la secrétaire d'État, que votre réponse sera plus argumentée et permettez-moi de vous opposer d’ores et déjà quelques arguments.

Selon vous, les sanctions ne seraient pas légitimes. Tiens donc ! Il est rare que votre gouvernement tienne un tel discours : d’ailleurs, dans le cadre du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, il s’est prononcé pour le retrait immédiat des allocations en cas de suspicion de fraude…

Si nous proposons des sanctions, c’est parce que nous estimons que les professionnels de santé qui ne respectent pas les tarifs opposables font obstacle au droit légitime des patients à bénéficier de la permanence des soins. Or je connais peu de cas où la violation d’un droit n’entraîne pas de sanction. Mais il est vrai que Mme Pécresse nous a montré hier qu’elle pouvait faire de ce principe une application à géométrie variable…

Le Gouvernement affirme en outre que nous sommes dans un système libéral. Hélas, nous ne le savons que trop, pour le subir chaque jour ! À cet égard, je formulerai deux arguments, qui fondent notre amendement.

Tout d’abord, il s’agit de la permanence des soins, c'est-à-dire d’une mission de service public. Nous ne sommes donc pas dans la relation habituelle où un patient peut consulter un deuxième médecin si les tarifs pratiqués par le premier ne lui conviennent pas.

Ensuite, le système libéral auquel vous faites référence est essentiellement financé par des fonds publics. Dès lors, il n’y a rien de scandaleux à exiger que l’utilisation de ces fonds soit mieux encadrée ; c’est ce que nous proposons.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. S’il est voté, cet amendement permettra au directeur général de l’ARS de diminuer la rémunération spécifique des professionnels de santé lorsqu’ils participent à la permanence de soins dans les cas où ils ne respecteraient pas les tarifs opposables.

L’article L. 6112-3 du code de la santé publique garantit ces tarifs opposables à tout patient pris en charge au titre de la permanence des soins dans un établissement de santé. Toutefois, la situation n’est pas très claire pour ce qui concerne la permanence des soins en ambulatoire.

En effet, les médecins libéraux qui y participent bénéficient de diverses rémunérations spécifiques et de majorations d’acte dans le cadre de la convention. Les majorations spécifiques ne pouvaient pas, jusqu’à présent, se cumuler avec les dépassements d’honoraires, mais, en vertu de la loi HPST, ce sont désormais les ARS qui vont organiser la permanence des soins en ambulatoire, dans le cadre de cahiers des charges qui sont d’ailleurs toujours en préparation.

Cet amendement est tout à fait pertinent, car il offre un outil aux ARS pour maîtriser les dépassements d’honoraires dans le cadre de la permanence des soins en ambulatoire. Aussi la commission a-t-elle émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. Gérard Dériot. Bien sûr !

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. En tant que secrétaire d’État à la santé, ce qui m’intéresse, c’est d’abord la permanence des soins : faire en sorte que toute personne qui n’a pas d’autre solution puisse bénéficier d’un acte médical en cas de besoin. C’est le cas, par exemple, d’une maman dont l’enfant est malade et qui doit absolument obtenir une réponse médicale.

Ce qui compte avant tout, c’est la disponibilité des médecins pour répondre aux besoins de santé de nos concitoyens, qu’il s’agisse de médecins du secteur 1 ou de médecins du secteur 2. L’objectif ultime, ne l’oublions pas, c’est l’accès de tous aux soins, quel que soit l’endroit où l’on se trouve.

Proposer de mettre en place une rémunération forfaitaire en cas d’astreinte différenciée ne peut conduire, à mon avis, qu’à décourager la participation des médecins du secteur 2 à la permanence des soins. Nous risquons alors d’être confrontés à un déficit de médecins dans certaines zones, notamment dans les zones où le besoin sera le plus criant.

J’ajoute que le Conseil national de l’ordre des médecins recommande que les médecins appliquent les tarifs opposables lorsqu’ils participent à la permanence de soins.

Je considère, madame la sénatrice, que vous proposez une mesure inadaptée, car il n’appartient pas aux ARS de sanctionner les médecins qui ne respectent pas les règles déontologiques.

Ce qui compte, je le répète, c’est de permettre l’accès de tous à une prestation médicale en cas de besoin. Peu importe que le médecin soit de secteur 1 ou de secteur 2 : l’essentiel, c’est la réponse médicale qu’il apporte au malade.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote.

Mme Catherine Deroche. Je veux réagir aux propos de notre collègue Laurence Cohen.

Comparer les médecins, qu’ils soient de secteur 1 ou de secteur 2, à des fraudeurs est tout à fait inadmissible. Les médecins libéraux exercent selon un mode conventionnel. Certes, on peut discuter des dépassements d’honoraires, car il arrive qu’ils soient excessifs ; une étude est d’ailleurs en cours sur ce sujet, et des mesures vont être prises. Mais les médecins libéraux exercent dans un cadre conventionnel qui est tout à fait légal. Dès lors, les comparer à des fraudeurs qui agiraient dans l’illégalité est absolument insupportable.

Par ailleurs, ces attaques permanentes de votre part contre les médecins libéraux sont intolérables. Annoncez clairement la couleur : dites que vous souhaitez supprimer la médecine libérale et fonctionnariser la médecine ! C’est un choix politique : alors, assumez-le ! (Mme Muguette Dini applaudit.)

Mme Isabelle Pasquet. Caricature !

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je rappelle que l’accès aux soins soulève des difficultés dans un certain nombre de territoires. Le département de l’Orne, notamment, connaît des problèmes de démographie médicale. C’est là un sujet sur lequel nous reviendrons lors de l’examen de l’article 34 ter, relatif à l’exercice des médecins étrangers, qui pallient le manque de médecins aussi bien dans nos campagnes que dans certaines de nos zones urbaines et, bien souvent, à l’hôpital.

Mme Bachelot nous avait expliqué que l’État payait les études des médecins, que la sécurité sociale remboursait les prestations et que c’étaient les collectivités locales qui, par le biais des maisons de santé, des pôles de santé libéraux et ambulatoires ou d’autres structures encore, soutenaient l’activité médicale. Bref, elle nous disait, en gros, qu’il ne restait de libéral à la médecine que le choix des médecins de s’installer où ils voulaient et de respecter ou non les astreintes et les tarifs…

Je veux bien que l’on nous oppose ici qu’il ne s’agit pas du bon véhicule législatif, du bon moment ou de la bonne mesure, mais il va bien falloir trouver un moyen un peu plus coercitif pour faire en sorte que soit assurée la permanence des soins à l’hôpital, dans les territoires ruraux et dans les zones urbaines défavorisées.

Pour ma part, j’estime que nous devrions discuter très sérieusement à la fois de mesures coercitives et de sanctions, sans donner l’impression de vouloir crucifier les médecins ou de les considérer comme des délinquants, ce qu’ils ne sont pas.

Il faut tout de même remédier à une situation qui est absolument inadmissible : il y a des Français de seconde zone, qui n’ont tout simplement pas accès aux soins. Ainsi, en matière de démographie médicale, le département de l’Orne se situe avec son voisin, le département de l’Eure, à la dernière place du classement ! Je crains que, pour résoudre ce problème, la câlinothérapie ne suffise pas ! (MM. Jean-Pierre Godefroy et Ronan Kerdraon applaudissent.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. En fait, madame Cohen, vous êtes ni plus ni moins en train de remettre en cause l’existence des SAMI – services d’accueil médical initial – du Val-de-Marne.

Le Val-de-Marne a été le premier département à mettre en place des permanences de soins en dehors des hôpitaux. Les élus se sont beaucoup battus, quelle que soit leur couleur politique, pour y parvenir. Le Val-de-Marne compte aujourd'hui au moins onze SAMI et, dans ceux que je connais, les médecins ne pratiquent pas de dépassements d’honoraires, hormis les majorations prévues en cas de consultation la nuit –ces services sont ouverts jusqu’à minuit – et le week-end.

J’observe que certains SAMI peinent déjà à trouver des volontaires. Alors, avec un tel amendement, vous allez définitivement tuer le système que l’ensemble des municipalités du Val-de-Marne, de droite ou de gauche, y compris celles qui ont un maire communiste, se sont efforcées de mettre en place !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Pas du tout !

M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.

Mme Catherine Génisson. J’atteste, et ce n’est pas par réflexe corporatiste, que la très grande majorité des médecins pratiquent leur art avec humanité et dans le strict respect des règles déontologiques. Il y a néanmoins une minorité pour laquelle ce n’est pas le cas, et l’on y compte, force est de le reconnaître, plus de spécialistes que de généralistes.

En tout cas, nous ne pouvons occulter ces quelques pratiques erratiques, sachant bien que, malheureusement, la fraude est humaine. Nous devons donc dissuader les fraudeurs, et cela concerne – n’est-ce pas, monsieur Milon ? – toutes les catégories de la population.

Je rappelle aussi que Mme Bachelot avait souhaité inscrire dans la loi HPST que les cabinets pratiquant les dépassements d’honoraires affichent différentes informations et notamment que les honoraires demandés sont fixés « avec tact et mesure ».

Par ailleurs, madame la secrétaire d'État, sur l’ensemble des travées de cet hémicycle, vous ne trouverez personne pour contester la priorité qui doit être donnée à la permanence des soins. Mais, aujourd’hui, le système ne fonctionne pas, même si des expériences sont menées ici ou là avec succès, telle celle que vient de décrire Mme Procaccia.

Il convient aussi de régler le problème de la régulation médicale de la permanence des soins, qui constitue une sécurité. Pour inciter les médecins de garde soit à assurer des consultations, soit à faire des visites, il existe une série de dispositifs que les uns et les autres imaginent, souvent avec le soutien des collectivités locales, sur lesquelles le Gouvernement ne se prive pas, par ailleurs, de tirer à boulets rouges, il ne faut pas manquer de le rappeler, surtout quand on parle de l’implantation des maisons de santé.

Le sujet de la permanence des soins est aujourd’hui crucial. Je suis d’ailleurs tout à fait sur la même longueur d’ondes que notre collègue Mme Goulet quand elle dit qu’il faut en finir avec la câlinothérapie et envisager maintenant des réformes structurelles.

Je l’ai dit hier soir, reconnaissons à Mme Bachelot le mérite d’avoir, dans les articles relatifs à l’organisation de la médecine de premier recours, proposé des débuts de solutions. Malheureusement, la proposition de loi de M. Fourcade a tout mis par terre ! À l’époque, on a répondu à la « liste de courses » d’un syndicat médical qui n’appréhende plus vraiment la réalité, qui ne représente plus les jeunes médecins, lesquels sont prêts à travailler avec les politiques et nos concitoyens pour trouver des solutions à ce difficile problème du maintien de la permanence des soins.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.

M. Alain Milon. S’agissant des syndicats médicaux, si vous examinez les résultats enregistrés au niveau des unions régionales des professionnels de santé, vous constaterez que le syndicat auquel il a été fait allusion a réalisé le plein des voix, en tout cas chez les spécialistes. Quant aux jeunes médecins, ils ont reporté leurs suffrages de manière à peu près égale sur les grands syndicats. (Mme Dominique Gillot proteste.)

Sur la permanence des soins, je crois que nous pouvons tous nous rejoindre.

En revanche, il est un peu choquant d’entendre des médecins dire que les études médicales, et donc les étudiants en médecine, coûtent cher à l’État. Le principe selon lequel les études sont gratuites en France vaut pour tout le monde, y compris pour les médecins, et non à l’exception de ces derniers !

Si l’on pense que les études médicales coûtent cher, alors, il faut reconnaître qu’il en est de même pour les études d’ingénieur, les études d’économie, les études vétérinaires… Et tout le monde doit devenir fonctionnaire ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

Par ailleurs, quand on a institué la sécurité sociale pour rembourser les actes médicaux, l’idée était qu’elle allait permettre aux gens d’avoir accès à la santé, et non pas que les médecins ne les soignaient pas avant ! La sécurité sociale est évidemment quelque chose de très bien, et je tiens d’ailleurs à rappeler qu’elle a été mise en place par un homme de droite.

Les médecins signent une convention et, comme l’a dit Mme Génisson, 95 % ou 97 % d’entre eux la respectent. Rares sont les professions au sein desquelles le pourcentage de gens respectant le droit est aussi élevé !

Vous dites que vous voulez mettre en place des maisons médicales financées par les collectivités territoriales. Vous voulez donc une médecine fonctionnaire... (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

M. Gérard Dériot. « Fonctionnaire », ce n’est pas un gros mot !

M. Alain Milon. ... et il faut le dire clairement, alors que nous souhaitons, nous, le maintien de la médecine libérale. Il y a donc une opposition nette entre nous. Nous aurons d’ailleurs l’occasion d’en reparler au cours des mois qui viennent puisque va bientôt se dérouler une campagne présidentielle. Chacun devra s’exprimer sur le sujet et dire ce qu’il souhaite.

Après tout, quand on discute avec les médecins, beaucoup d’entre eux disent : « Le principal, pour nous, c’est qu’on ne nous empêche pas de travailler. Devenir des fonctionnaires, pourquoi pas ? Mais dites-le-nous ! »

Il est maintenant nécessaire d’avoir une vision claire de ce que veut chaque parti politique et de ce que veut chaque candidat à la présidentielle ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Il s’agit d’un débat sérieux, qui ne se prête pas à la caricature. (Rires et exclamations sur les travées de lUMP.)

Moi, ce que je retiens surtout, c’est que notre amendement a été parfaitement compris par M. le rapporteur général et la commission des affaires sociales.

Je suis nouvellement élue dans cette assemblée, mais sachez que, quand j’ai quelque chose à dire, je le dis. Nous n’avons nullement l’intention, ni moi ni le parti auquel j’appartiens, de supprimer la médecine libérale ! La preuve en est que notre collègue Mme Procaccia a décrit ce qui était fait dans le Val-de-Marne, toutes sensibilités politiques confondues, dans l’intérêt des populations.

Il n’en reste pas moins que, à mes yeux, il est nécessaire de sanctionner la fraude – terme que je n’ai d’ailleurs pas employé –, même si, comme l’ont dit les uns et les autres, les fraudeurs constituent des cas isolés. On sanctionne la fraude lorsqu’elle est le fait d’assurés sociaux ; je ne vois pas pourquoi une catégorie professionnelle serait exemptée !

Il me paraît important que notre amendement. soit voté pour montrer que cette volonté de sanctionner les fraudeurs est largement partagée.

M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.

M. Alain Houpert. Je suis tout à fait d’accord avec mon collègue et confrère Alain Milon : la gratuité des études en France participe à l’ascenseur social.

D’ailleurs, 40 % des étudiants en médecine travaillent pendant leurs huit années d’études parce que ce sont des gens d’extraction modeste, mais des gens qui ont une vocation. Ne l’oublions pas, le médecin est là quand tout bascule, pour annoncer la mauvaise nouvelle.

Personnellement, j’ai fait le choix d’être spécialiste en secteur 1. J’ai beaucoup de collègues généralistes ou spécialistes qui sont en secteur 2. En fait, leur choix est contraint, car ils travaillent dans des « beaux quartiers » où les loyers sont prohibitifs. Mais, que l’on exerce en secteur 1 ou en secteur 2, en fin d’année, le revenu net n’est guère différent.

Alors, arrêtons de stigmatiser certains praticiens, d’opposer les uns aux autres. Quel que soit le secteur choisi, nous sommes avant tout des médecins et nous avons une capacité d’empathie parce que nous aimons les gens.

Prenons garde : avec des mesures trop coercitives, les médecins du secteur 2 se rebelleront et ne participeront pas à la permanence des soins.

M. le président. La parole est à M. Jacky Le Menn, pour explication de vote.

M. Jacky Le Menn. En fait, c’est toujours le même débat que nous reprenons d’un texte à l’autre !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Exactement !

M. Jacky Le Menn. Je pense aussi bien à la loi HPST, qui avait permis des avancées intéressantes, qu’à la proposition de loi Fourcade. Nous revenons toujours sur les mêmes sujets !

Mettons de côté, si vous le voulez bien, la croyance de certains selon laquelle, si les médecins devenaient des fonctionnaires, ils travailleraient moins. D’autant qu’il n’est pas question qu’ils le deviennent s’ils ne le souhaitent pas. Là n’est pas le problème, cher collègue Milon !

En revanche, ce qui nous interpelle depuis plusieurs séances, et même depuis plusieurs années, c’est le vieillissement de la population et le fait que, lorsqu’elle est en souffrance, notamment dans les communes rurales, mais aussi dans certains quartiers des grandes villes, elle ne trouve aucun médecin !

M. Jacky Le Menn. Le problème de fond est donc bien celui de la permanence des soins.

Sans aller jusqu’à faire de la câlinothérapie, comme l’a dit Mme Nathalie Goulet, la solution a consisté à inciter les médecins à s’installer dans ces zones qualifiées de « déserts médicaux ». L’assurance maladie a même permis de rémunérer un peu plus les volontaires. Mais cela n’a pas marché !

Faut-il en venir à des moyens coercitifs ? Pourquoi pas ? C’est ce qu’avait proposé en son temps Mme Bachelot dans le cadre de la loi HPST. Mais ses solutions ont été abandonnées, sans même qu’on les ait d’ailleurs essayées. Là encore, un syndicat a fait un lobbying qui a été couronné de succès puisque ces dispositions, pourtant relativement mesurées, ont été supprimées par la loi Fourcade telle qu’elle a finalement été adoptée !

Le problème de la désertification médicale reste donc entier et il va bien falloir, au-delà de nos approches idéologiques, répondre à la question qui se pose à nous : comment faire pour mettre en face d’une personne souffrante, âgée ou moins âgée, un praticien, et éventuellement un praticien spécialiste ?

Le second problème est celui des dépassements d’honoraires.

Je suis d’accord pour que l’on ne stigmatise pas les médecins au seul motif qu’ils ont fait des études coûteuses. Certes, beaucoup d’autres sont dans ce cas sans bénéficier pour autant du même avantage, mais je conviens volontiers que ce n’est pas un argument recevable.

Il n’en reste pas moins que les dépassements d’honoraires sont de plus en plus nombreux chez les spécialistes. Comment faire face à cette réalité qui nous saute aux yeux ?

Il y a bien cette notion de « tact et mesure ». Nous en parlions en commission des affaires sociales : comment chacun apprécie-t-il ce qu’est la bonne « mesure » quand il s’agit d’évaluer le prix de son travail, de ses compétences ? Chacun a forcément tendance à se croire le meilleur, en tout cas meilleur qu’il n’est dans le regard des autres ! Peut-être convient-il de chercher le moyen de plafonner la perception qu’ont les uns et des autres de leur propre pratique professionnelle ?

Avec leur amendement, nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen tentent d’avancer une solution. La permanence de soins étant une mission de service public, peut-être faudrait-il être un peu plus coercitif ?

L’agence régionale de santé doit-elle trancher et pénaliser les médecins qui, estimant leur profession et leur travail très importants, exposent les assurés à des dépassements d’honoraires excédant le tact et la mesure ? Une autre structure doit-elle jouer ce rôle ?

Les agences régionales de santé qui ont été mises en place ont une vision d’ensemble. Elles pourraient donc donner un avis, quitte à ce que celui-ci soit transmis à une organisation de médecins. En tout cas, discutons-en, cherchons une solution !

Actuellement, à certains endroits, on ne trouve pas de médecin et, quand on en trouve un, on le paie très cher ! Alors, les gens renoncent aux soins, ce qui nous renvoie à la discussion d’hier soir. Quand ils reviennent dans le circuit de soins, ils sont beaucoup plus « abîmés » qu’avant ! Par conséquent, les soigner revient plus cher et, sur le plan économique aussi, c’est un gâchis !

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain, pour explication de vote.