Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, rapporteur pour avis.

M. David Assouline, rapporteur pour avis. Monsieur Dominati, ne vous appuyez pas sur Mme le rapporteur général pour étayer vos propos ! Elle ne dit pas, elle, qu’il faut supprimer l’audiovisuel public parce que c’est un monopole, à la différence de ce qu’on voit dans les pays voisins !

M. Philippe Dominati. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

M. Yves Pozzo di Borgo. Moi, je le dis ! (Sourires.)

M. Philippe Dominati. J’ai dit qu’il devrait être réduit !

M. David Assouline, rapporteur pour avis. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez cru bon d’ironiser sur ma créativité en matière fiscale. Or, en l’occurrence, je n’ai rien inventé de nouveau : je rappelle que la résidence secondaire a été soumise à la redevance audiovisuelle jusqu’en 2002. C’est un gouvernement de droite, dirigé par M. Raffarin, sous la présidence de M. Jacques Chirac, qui a exclu les résidences secondaires de l’assiette et mis fin à l’indexation de la progression de la redevance sur le coût de la vie.

L’année dernière, nous avons réussi à convaincre le Gouvernement d’indexer de nouveau la redevance sur le coût de la vie. Les recettes supplémentaires produites par cette mesure ont permis à l’État de diminuer la dotation de France Télévisions. En effet, l’argent provient soit de la redevance soit du budget de l’État ; au demeurant, ce sont toujours les Français qui paient !

Je souhaitais juste sécuriser la recette, la redevance me paraissant plus pérenne que le budget de l’État, qui est aléatoire selon les années. Or l’aléa fragilise le service public.

Nous savons également que, au-delà des grandes phrases, certains ne veulent plus du service public de l’audiovisuel. En tout cas, monsieur Dominati, vous avez clairement dit que vous souhaitiez qu’on en réduise le périmètre. (M. Philippe Dominati acquiesce.)

Au moment de la réforme de l’audiovisuel voulue par Nicolas Sarkozy, nous avions prédit que l’on arguerait un jour du manque d’argent pour supprimer des chaînes. L’argument revient !

J’ai compris qu’il était difficile aujourd'hui d’évoquer une taxe supplémentaire, même si celle-ci est acquittée par des Français qui n’appartiennent pas aux couches populaires. Quoi qu’il en soit, Mme Blandin a maintenu l’amendement. Pour ma part, je souhaitais que ce débat ait lieu dans l’hémicycle. Ensuite, chacun votera comme il l’entend !

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je suis bien entendu solidaire de la position de la commission des finances et je ne voterai pas l’amendement présenté par M. Assouline au nom de la commission de la culture.

Cela étant dit, mes chers collègues, nous en avions déjà débattu l’an dernier, la redevance audiovisuelle est un dispositif archaïque qu’il faudra réformer fondamentalement ; nous en sommes tous conscients.

Il est archaïque parce que son assiette n’est constituée que par certains récepteurs. (Mme la présidente de la commission de la culture acquiesce.) Or nous savons bien que la part de marché de ces récepteurs classiques va s’atrophier. Dès lors, l’assiette de la redevance ne fera que se réduire.

En vertu du principe de neutralité technologique, la raison voudrait que l’on taxe de la même manière tout moyen de réception de programme de télévision, où qu’il se trouve, dans une résidence principale, secondaire, une voiture, une poche, dans l’hémicycle ! (Sourires.) C’est la modernité : nous n’y échapperons pas !

Bien sûr, cela modifie la manière dont nous sommes habitués à examiner ces questions, ce qui peut faire peur. L’an dernier, j’étais prêt, à titre personnel, à présenter un amendement semblable à celui de la commission de la culture, mais j’y ai renoncé parce que mon groupe n’y était pas favorable. Ce débat, cependant, même s’il ne débouche pas dans l’immédiat, ne saurait se réduire à la question limitée de la résidence secondaire.

La question fondamentale, bien plus large, est celle de l’adaptation de notre fiscalité aux évolutions technologiques, en particulier au numérique. Nous avons examiné le cas de la presse et du livre, nous débattons du financement de l’audiovisuel public et nous reviendrons bientôt sur la fiscalité des multinationales américaines qui déséquilibrent le marché de la publicité dans les États consommateurs d’Europe.

Tout cela forme un tout qu’il faudra aborder comme tel. Le Sénat est bien placé pour s’efforcer de faire évoluer les esprits, même si, aujourd’hui, ceux-ci n’étant pas mûrs, il faut voter dans le sens préconisé par la commission des finances.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-162.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° I-129 est présenté par MM. Teston, Filleul et Ries.

L'amendement n° I-155 est présenté par M. Placé, Mmes Archimbaud, Aïchi, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Desessard, Dantec, Gattolin et Labbé.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le b) du 1. de l’article 265 bis du code des douanes est complété par les mots : « et des aéronefs effectuant un vol intérieur ».

L’amendement n° I-129 n'est pas soutenu.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° I-155.

Mme Marie-Christine Blandin. Le carburant utilisé par les avions, à savoir le kérosène, est aujourd’hui totalement exonéré de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers, ou TIPP. Cette situation est une véritable exception.

Le transport ferroviaire est soumis à une taxation de l’énergie qu’il consomme ; le carburant utilisé pour les véhicules individuels est, lui, particulièrement taxé. Même les professionnels, qu’ils soient agriculteurs, pêcheurs ou transporteurs routiers, ne bénéficient que d’une réduction de la taxation du carburant qu’ils utilisent.

Cette situation crée une incroyable distorsion de concurrence entre les différents modes de transport, notamment entre le ferroviaire et l’aérien, comme l’a elle-même souligné l’inspection générale des finances dans son rapport sur les niches fiscales.

Alors que la très importante responsabilité du transport aérien dans les émissions de gaz à effet de serre et le réchauffement climatique n’est plus à démontrer, on se demande bien quelle pourrait être la justification de ce soutien démesuré au transport aérien. On se le demande d’autant plus que la restauration d’une concurrence moins faussée entre l’avion et le rail a été inscrite dans le Grenelle de l’environnement.

Il faut bien comprendre que la taxation du kérosène que nous proposons d’introduire ne concerne que les vols intérieurs, c'est-à-dire ceux qui sont à la fois au départ et à destination du territoire métropolitain. Il est donc exclu que les compagnies aériennes, fussent-elles étrangères ou même low cost, puissent y échapper en ravitaillant leurs appareils à l’étranger.

La seule conséquence de cette mesure, outre une recette fiscale bienvenue, serait, d’après l’inspection générale des finances, une augmentation d’environ 14 % des billets d’avion sur les vols intérieurs. Cette hausse resterait relativement raisonnable et permettrait de déplacer une partie du trafic aérien vers les lignes ferroviaires à grande vitesse.

Certains arguent que les compagnies aériennes intégreront bientôt le système d’échange des quotas. On ne peut que se réjouir du fait que commence enfin à être pris en compte le faramineux coût collectif que représente la lutte contre le changement climatique. Mais ce nouveau dispositif n’a pas vocation à remplacer une détaxation du kérosène.

Il n’est pas admissible que l’État subventionne aujourd'hui le moyen de transport le plus bruyant et le plus polluant.

Je précise que, bien entendu, un décret veillerait à ce que l’outre-mer ne soit pas concernée par ce dispositif puisque notre objectif est de mettre fin à une distorsion de concurrence avec le transport ferroviaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Spontanément, pour ma part, j’étais assez favorable à cet amendement, d’autant que mes collègues Michel Teston, Jean-Jacques Filleul et Roland Ries en ont déposé un identique, qu’ils n’ont toutefois pas défendu ce soir. Nous proposons en effet chaque année, lors de l’examen du projet de loi de finances, la suppression de la détaxation du kérosène au titre de la TIPP, mais pour l’ensemble des vols.

À la lecture de l’amendement de nos collègues, j’ai pensé qu’ils voulaient neutraliser le choix entre l’aérien et le ferroviaire. Puis la commission s’est interrogée et a finalement émis un avis défavorable. En effet, pour aller en Corse, il est difficile de substituer un billet de train à un billet d’avion.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Eh oui !

Mme Chantal Jouanno. On prend le bateau !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Or il s’agit bien du territoire national.

De même, comment fait-on pour se rendre dans les collectivités d’outre-mer ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Bonne question !

Mme Marie-Christine Blandin. Vous ne m’avez pas écoutée !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Si, je vous ai écoutée !

Par ailleurs, la géographie de la France étant ce qu’elle est, certains vols intérieurs, notamment des vols transversaux, sont essentiels. Sans eux, tout déplacement est impossible, car il n’existe pas de mode de transport alternatif, à part la voiture.

Ces considérations montrent que ce dispositif serait un peu compliqué à appliquer.

Certes, la dépense fiscale qui serait ainsi supprimée est d’un coût évalué à 315 millions d’euros, ce qui n’est pas rien, mais je ne sais pas comment pourrait être réglé le problème que soulèverait cette suppression.

Vous avez fait référence, madame Blandin, au marché des quotas européens de CO2. Vous savez que certains sénateurs et députés sont divisés sur la pertinence de ce marché. Pour ma part, je crois à sa pertinence et je suis satisfaite que vous rejoigniez cette position. Des études ont été réalisées qui ont d’ailleurs montré la neutralité du choix entre la taxe et le système d’échange de quotas d’émissions.

N’oublions pas non plus que des compagnies aériennes jouent le jeu de la desserte sur les vols intérieurs. L’exonération leur permet de maintenir leur compétitivité par rapport à des opérateurs low cost, qui, pour leur part, peuvent, sous certaines conditions, profiter d’aides au démarrage financées par les collectivités locales.

La commission a analysé ce sujet en ayant au départ un point de vue favorable, mais elle a finalement décidé d’émettre un avis défavorable sur votre amendement, madame Blandin.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Le Gouvernement est du même avis que la commission des finances.

J’avoue, madame Blandin, que je ne comprends pas très bien quelle est la logique d’une proposition qui tend à réserver l’exonération de taxation des carburants aux seuls vols internationaux et à pénaliser du même coup les transports intérieurs français.

Mme la rapporteure a justement relevé qu’un tel dispositif serait très dommageable pour nos compatriotes d’outre-mer et pour nos compatriotes corses, mais aussi pour tous ceux qui sont amenés à effectuer des vols transversaux.

Mais peut-être désirez-vous, madame Blandin, inciter les gens à acheter des automobiles et à polluer ?

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Non, je m’interroge simplement sur votre logique !

Par ailleurs, d’un point de vue économique, les compagnies low cost qui assurent de plus en plus de vols intérieurs français en se basant juste à côté de notre pays échapperaient à cette mesure. Celle-ci leur rendrait donc un grand service. Nous en viendrions ainsi à pénaliser les transporteurs français !

Enfin, madame, je rappelle que la France milite depuis plusieurs années pour que l’Union européenne applique une taxe environnementale supplémentaire sur les vols entrant en Europe ou la quittant. Et là, il ne s’agit pas du tout de faire de l’humour, car je travaille sur ce sujet depuis des années avec d’autres membres du Gouvernement. La directive 2003/87/CE prévoit que les entreprises de transport aérien, européennes ou non, qui effectuent des vols à partir de l’Europe paieront une taxe environnementale supplémentaire, laquelle entrera en vigueur dès le 1er janvier 2012.

Et, croyez-moi, cela n’a pas été facile à obtenir ! Nous avons été les avocats de cette taxe à l’échelon européen et nous sommes fiers d’avoir eu satisfaction, mais cela nous a valu moult protestations et menaces de rétorsion – j’en ai été témoin dans mes fonctions antérieures et actuelles – de la part des Américains et des Chinois, et de toute une série d’opérateurs aériens. De façon générale, ils sont hostiles à l’idée de payer une taxe environnementale lorsqu’ils desservent l’Europe.

Je ne comprends donc pas pourquoi vous prévoyez de faire exactement le contraire de ce que fait l’Europe, sur l’initiative de la France, madame Blandin : vous souhaitez taxer les vols domestiques et non les vols internationaux ! (Mme Marie-Christine Blandin acquiesce.) Vous avez pourtant consacré toute votre vie, toute votre carrière à la défense de l’environnement, à l’instar du mouvement politique auquel vous appartenez.

Au total, madame Blandin, j’ai même l’impression que l’amendement n° I-155 est contraire aux objectifs que vous cherchez à promouvoir.

Mme la présidente. La parole est à M. Yvon Collin, pour explication de vote.

M. Yvon Collin. Les explications de Mme la rapporteure générale et de M. le secrétaire d’État sont suffisamment convaincantes pour justifier le rejet de cet amendement, chère Marie-Christine Blandin.

Ayant été rapporteur spécial du budget annexe de l’aviation civile pendant dix ans, je sais à quel point le transport aérien est un secteur sensible. Il connaît de nombreuses difficultés et fait face à une concurrence exacerbée, très dure, en particulier de la part des compagnies low cost.

Je pense que nous fragiliserions davantage ce secteur, en particulier notre compagnie nationale, Air France, si nous supprimions pour les vols intérieurs l’exonération de taxe sur les carburants. Ce serait là porter un coup dur aux compagnies aériennes.

Je voterai contre cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. Permettez-moi de réitérer quelques explications ou d’apporter certaines précisions.

Comme je l’ai signalé, l’outre-mer n’est évidemment pas concernée par la mesure que je propose. En revanche, je n’ai pas évoqué le cas de la Corse. Effectivement, il n’y a pas encore de ligne à grande vitesse permettant de relier Nice à Ajaccio ! (Sourires.)

Soyez juste, monsieur le secrétaire d’État ! Vous dites que j’envisage de taxer les vols domestiques, mais pas les vols internationaux. Si mon amendement ne tend pas à prévoir la taxation des vols internationaux, c’est parce que vous vous en chargez, comme vous venez de le dire !

Vous vous demandez ensuite pourquoi je propose un dispositif qui ne s’appliquera qu’à l’intérieur de nos frontières. Je vous demande d’abord comment il pourrait en être autrement. Ensuite, c’est parce que nous savons ce que vous êtes capables de répondre dès lors qu’il s’agit d’instaurer une taxe : c’est un problème qui ne peut être réglé qu’à l’échelle internationale, ça concerne les autres pays, il faut que Mme Merkel soit d’accord, etc. Je ne me contente donc de vous proposer une mesure destinée à s’appliquer en quelque sorte intra muros !

Enfin, le ton triste, grave et pathétique qu’a employé Mme la rapporteure générale, lorsqu’elle a évoqué les zones en difficulté qui avaient besoin d’être desservies par des avions, aurait pu donner à penser à l’hémicycle que je voulais purement et simplement supprimer les vols intérieurs… Non, je souhaite seulement que leur carburant soit taxé de la même manière que celui qui est utilisé par les autres modes de transport !

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.

M. Gérard Miquel. Si cet amendement était adopté, il entraînerait immanquablement une augmentation des prix des vols intérieurs. Or, dans notre pays, toutes les régions ne sont pas logées à la même enseigne en matière de desserte ferroviaire. Dans certaines régions, nos concitoyens ont le choix entre prendre le TGV ou l’avion. Pour ma part, je prends l’avion à Toulouse. Allez donc expliquer à un Toulousain qu’il faut qu’il prenne le TGV… Il n’y en a pas ! Et il n’est pas prêt de le voir passer !

Je ne peux pas approuver une mesure qui serait très inégalitaire, car nos concitoyens vivant dans des régions non desservies par le TGV en feraient les frais.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-155.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° I-58, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l’article 2 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « , au titre de l’année 2009, » sont supprimés ;

2° Au deuxième alinéa, les mots : « au titre de l’année 2009 » sont supprimés ;

La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Nous avons évoqué tout à l’heure assez longuement les transactions financières et l’idée de les taxer enfin ! Ces transactions sont aujourd'hui facilitées, accélérées du fait des technologies modernes. On parle de « trading haute fréquence ».

Cette activité n’est cependant pas complètement déshumanisée, désincarnée. Derrière les machines, les systèmes, les technologies, il y a encore des hommes et des femmes : je veux bien sûr parler des traders, autrement dit, en français, les opérateurs de marché.

Cet amendement vise à pérenniser la taxation des rémunérations exceptionnelles des opérateurs de marché qui fut instaurée dans une loi de finances rectificative pour 2010 pour s’appliquer aux revenus de 2009.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. La commission émet un avis favorable. Si le groupe CRC n’y avait pas pensé, je l’aurais proposé !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Je ne suis pas favorable, monsieur le sénateur, à votre proposition de pérenniser la taxe exceptionnelle sur les bonus des traders mise en place en 2010, c'est-à-dire en pleine crise. Il n’avait pas, alors, été envisagé de la pérenniser.

La modification des pratiques des banques françaises en matière de bonus est désormais une réalité. La France a été et reste l’un des pays leaders des travaux engagés à l’échelon mondial et européen pour encadrer et moraliser les pratiques des banques en matière de bonus.

Ainsi, le Gouvernement a pris en compte les normes professionnelles applicables aux rémunérations des traders adoptées par la profession bancaire, puis fixé les principes applicables dès 2009. La France a, depuis, encadré strictement ces rémunérations.

Les résultats sont d’ailleurs encourageants. Par exemple, le montant total des bonus versés par les banques françaises a diminué entre 2007 et 2011, à la fois en valeur absolue et en proportion : le ratio « bonus/résultats BFI » est ainsi passé de 125 % en 2007 à 100 % en 2009 et à 30 % en 2010. Une véritable réduction est donc constatée.

La mesure que vous proposez serait par ailleurs pénalisante pour nos banques, alors que celles-ci sont déjà soumises à une pression fiscale et concurrentielle très importante. Cette concurrence est d’ailleurs aussi le fait d’institutions financières – d’outre-Atlantique, par exemple – qui n’ont instauré aucune limitation sur les bonus.

Comme beaucoup de Français et comme l’ensemble du Gouvernement, je pense que les bonus posent un problème. C’est pourquoi le Gouvernement les a encadrés pendant la crise.

Enfin, la contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus touchera les salariés des banques qui ont perçu les bonus plus importants.

Je le répète, les contraintes imposées par le Gouvernement ces dernières années ont entraîné une réduction très forte de ce type de rémunération.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-58.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 5.

Articles additionnels après l'article 5
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2012
Article 5 bis (nouveau) (interruption de la discussion)

Article 5 bis (nouveau)

I. – Le code du cinéma et de l’image animée est ainsi modifié :

1° L’article L. 115-6 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Est également regardée comme distributeur de services de télévision toute personne proposant un accès à des services de communication au public en ligne ou à des services de téléphonie, dès lors que la souscription à ces services permet de recevoir, au titre de cet accès, des services de télévision. » ;

2° Le 2° de l’article L. 115-7 est ainsi rédigé :

« 2° Pour les distributeurs de services de télévision :

« a) Des abonnements et autres sommes acquittés par les usagers, à l’exclusion de ceux qui sont passibles de l’impôt sur les sociétés, en rémunération d’un ou plusieurs services de télévision. Le produit de ces abonnements et autres sommes fait l’objet d’une déduction de 10 % ;

« b) Des abonnements et autres sommes acquittés par les usagers, à l’exclusion de ceux qui sont passibles de l’impôt sur les sociétés, en rémunération des offres, composites ou de toute autre nature, donnant accès à des services de communication au public en ligne ou à des services de téléphonie, dès lors que la souscription à ces services permet de recevoir, au titre de cet accès, des services de télévision. Le produit de ces abonnements et autres sommes fait l’objet d’une déduction de 55 %. » ;

3° L’article L. 115-9 est ainsi modifié :

a) Les a à i du 2° sont remplacés par des a à d ainsi rédigés :

« a) 0,5 % pour la fraction supérieure à 10 000 000 € et inférieure ou égale à 250 000 000 € ;

« b) 2,10 % pour la fraction supérieure à 250 000 000 € et inférieure ou égale à 500 000 000 € ;

« c) 2,80 % pour la fraction supérieure à 500 000 000 € et inférieure ou égale à 750 000 000 € ;

« d) 3,50 % pour la fraction supérieure à 750 000 000 € ; »

b) Après le mot : « au », la fin de la dernière phrase du 3° est ainsi rédigée : « d du 2° est majoré de 5,25. »

II. – Le I entre en vigueur à une date fixée par décret qui ne peut être postérieure au 1er janvier 2013.

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Foucaud, sur l'article.

M. Thierry Foucaud. Madame la présidente, si vous le permettez, cette intervention vaudra présentation des amendements que nous avons déposés sur l’article 5 bis.

L’air de rien, l’article 5 bis organise en réalité les conditions d’un prélèvement sur les ressources du Centre national du cinéma et de l’image animée, le CNC.

Le CNC, vous le savez, mène des missions essentielles de service public et d’intérêt général, allant de l’amélioration de la qualité de l’équipement des salles de projection et de spectacle cinématographique à l’aide à la création et à l’écriture de scénarios, en passant par la coopération internationale, le soutien à la réalisation de nombreux premiers films et, par là même, à l’émergence de nouveaux créateurs du cinéma et de l’image animée.

Depuis qu’il existe, le CNC a donc permis à la France de continuer à disposer d’une véritable économie du cinéma, depuis l’existence d’un réseau de salles de proximité jusqu’à la diversité des approches créatrices et la révélation régulière de nouveaux talents.

Le CNC est l’une des chevilles ouvrières d’un dispositif qui permet au cinéma français d’exister et d’être en Europe, à égalité avec le cinéma nord-américain, le plus regardé, le plus riche et le plus varié.

Je note aussi que l’existence du CNC et la tradition française de coopération internationale ont permis que de nombreux auteurs significatifs d’origine étrangère, dont les œuvres font référence dans la cinématographie mondiale, aient pu continuer de travailler et de créer, notamment dans les pays où l’industrie du cinéma n’existe pas, plus ou quasiment plus.

Les Français demeurent de solides amateurs de cinéma et s’obstinent à fréquenter les salles obscures. Il peut donc arriver que les recettes du CNC connaissent une certaine embellie. Les succès publics de quelques films étatsuniens à gros budget comme d’un certain nombre de productions françaises plus modestes, mais ayant néanmoins eu une large audience, ont conduit à une progression du rendement de la taxe perçue sur les entrées.

Dans l’esprit de certains, le CNC, sur cette lancée, semble devenir une sorte de coffre-fort, de réservoir inépuisable, disposant de trop de moyens au regard des missions qui lui sont confiées.

Une telle vision ne nous apparaît pas juste.

Soit on considère que les taxes affectées au CNC rapportent trop par rapport à ses besoins, et l’on peut dès lors, éventuellement, se poser la question de leur quotité. Soit on considère que le CNC bénéficie simplement d’une heureuse conjoncture, qui lui permet de disposer temporairement de ressources plus importantes, sans que cela pose le moindre problème.

Les Français ne vont pas au cinéma pour payer le déficit public. Cela vaut aussi, soit dit en passant, pour le téléspectateur du programme de cinéma diffusé par une chaîne de télévision : il n’a pas à payer le prix des douceurs fiscales réservées à quelques-uns !

Les caisses des établissements publics à missions précisément assignées n’ont pas vocation à devenir les variables d’ajustement d’un équilibre budgétaire hypothétique, que l’on se refuse à atteindre par la voie normale.

C’est donc en vertu de ces observations que le groupe CRC a voulu, dans un premier temps, marquer son opposition au dispositif prévu par l’article 5 bis en demandant la suppression de cet article. Dans un second temps, et dans un souci de compromis, il a souhaité préserver la quotité actuelle de la taxe sur la diffusion télévisée des œuvres cinématographiques.

Le groupe CRC ne peut que s’opposer à une logique fiscale aberrante, en vertu de laquelle le CNC serait le principal contributeur de l’opération d’écrêtement prévu par le présent projet de loi de finances !

Pour toutes ces raisons, à défaut de demander au Sénat d’adopter l’amendement de suppression pure et simple de cet article, que nous retirons, nous ne pouvons que l’inviter à adopter notre amendement rejetant la rectification de la quotité de la taxe sur les éditeurs et distributeurs de services de télévision, autrement dit la TST.