M. Jean-Jacques Mirassou. En clair, et pour être rapide, monsieur le ministre, car vous connaissez ces chiffres aussi bien que moi, cela se traduit par la bagatelle de 150 000 emplois de fonctionnaires supprimés en cinq ans, sacrifiés les uns sur l’autel de la carte judiciaire, d’autres sur l’autel de la carte scolaire, d’autres encore au nom de la réforme de la Poste, de la gendarmerie ou des trésoreries principales. Aujourd’hui, nous sommes devant ce formidable paradoxe qui veut que l’on demande aux collectivités territoriales de se substituer à l’État, notamment dans le cadre des services publics de proximité, tout en stigmatisant les conseils généraux et les conseils régionaux, trop dépensiers et pléthoriques en personnel aux yeux du Gouvernement. On sait comment cela a fini le 25 septembre 2011, lors des élections sénatoriales !

Le document présenté fait également allusion – il est peut-être utile de l’évoquer, monsieur le ministre – à la suppression de la taxe professionnelle, sans pour autant procéder à un bilan d’étape qui se voudrait objectif. (Mme Nathalie Goulet s’exclame.) S’il existait, ce bilan révélerait d’ailleurs inévitablement que la suppression de cette taxe a entraîné mécaniquement la diminution des capacités d’investissement des collectivités territoriales, des capacités qui sont passées – mais, là encore, vous le savez aussi bien que moi – en ce qui concerne l’investissement public de la nation, de 75 % à 63 %. Bien entendu, cela a suscité des difficultés sérieuses pour les PME, notamment dans le bâtiment et les travaux publics. Ce marché de dupes – car c’est bien de cela qu’il s’agit ! – méritait d’être dénoncé.

Mais cela va plus loin encore : la baisse des investissements publics se traduit forcément par une altération de l’attractivité des communes et des territoires, ce qui est totalement antinomique par rapport au rééquilibrage souhaité à l’échelon de notre pays.

Tout cela va donc à l’encontre du but recherché.

Dans un autre registre, j’évoquerai le SNIT, le schéma national des infrastructures de transport.

La rédaction de ce document a, vous le savez, connu bien des difficultés, notamment du fait d’un manque de cohérence et de perspective politique, qui lui a trop souvent donné les apparences d’un cahier de doléances, s’éloignant, de ce fait, du texte destiné à orienter, pour les décennies à venir, notre politique des transports avec son corollaire, les infrastructures.

Ce manque de vision globale est sans doute dû à l’éloignement – et pour cause ! – de la DATAR, qui aurait pu jouer un rôle d’éclaireur et de fédérateur. On avait pourtant, là encore, l’occasion d’éviter les inexplicables inégalités de traitement entre les territoires, qui ont, du reste, été relevées par nombre de nos collègues.

Je conclurai mon propos en parlant des fonds consacrés, dans le cadre de la politique interministérielle du territoire, à l’offre de soins, des fonds qui ne connaissent qu’une évolution timide.

Ceux qui connaissent bien ce dossier approuvent la multiplication des maisons de santé pluridisciplinaires : cette nouvelle organisation des soins constitue un point de passage forcé. Toutefois, il est illusoire de penser que ces structures pourront, à elles seules, éradiquer les déserts médicaux, de plus en plus nombreux dans nos territoires.

Concernant la sécurité, il est impératif de mettre à la disposition de ce corps médical des plateaux techniques opérants et performants, leur permettant de travailler dans de bonnes conditions ; je pense notamment aux hôpitaux généraux, qui jouaient pleinement leur rôle.

Vous mettez en exergue un certain nombre de solutions innovantes, mais, malheureusement, force est de constater que les moyens ne suivent pas. En effet, avec la loi HPST, la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, vous êtes en train de démanteler, au nom d’une rentabilité illusoire, ces structures hospitalières en mettant en place la fameuse T2A, la tarification à l’activité.

Vous l’aurez compris, nous estimons que la mission « Politique des territoires », à l’instar de ce projet de loi de finances, ne témoigne d’aucune vision stratégique et n’est donc pas en mesure de donner à la France l’élan dont elle a besoin ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre.

M. Antoine Lefèvre. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la mission « Politique des territoires » est là pour tendre au plus près du principe d’égalité entre les territoires. À cet égard, je salue, dans le contexte budgétaire actuel plus que contraint, l’évolution, certes légère, mais existante, voulue par le Gouvernement, des crédits octroyés à cette mission.

Couverture des territoires en téléphonie mobile, accès aux soins, maintien de socles de services publics, aménagement numérique des territoires, tels sont les quatre piliers retenus pour la politique d’aménagement en vue de renforcer la compétitivité et la solidarité de nos territoires et entre nos territoires.

Parallèlement, la réforme des implantations des armées a nécessité la mise en place d’un plan national d’accompagnement des territoires touchés par les restructurations militaires : 82 sites sont concernés.

Le nord-est de la France, qui comprend le département de l’Aisne, concentre l’essentiel des fermetures des sites militaires décidées dans le cadre de la RGPP. Une mission spécifique d’accompagnement a même été créée et confiée au préfet Hubert Blanc.

Dans le cadre de la mise en œuvre du Livre blanc sur la défense, le site de Laon-Couvron fermera ses portes en juillet 2012. Le 1er régiment d’artillerie de marine sera transféré à Châlons-en-Champagne, dans la Marne, département voisin. Cette fermeture concernera plus de 900 militaires et quelque 100 personnels civils, alors que ce territoire connaît déjà de grandes difficultés économiques.

Si l’année 2012 paraît, en partie, consacrée à la redynamisation des territoires affectés par le redéploiement des armées, je souhaite vous interroger, monsieur le ministre, sur le maintien des crédits de reconversion prévus pour le site Laon-Couvron dans le cadre du projet de loi de finances pour 2012, à savoir 10 millions d’euros.

Dans le cadre du CRSD, le contrat de redynamisation des sites de défense, les collectivités territoriales ont souhaité assurer le portage foncier et bénéficier de l’acquisition de cession à l’euro symbolique du site de Laon-Couvron, conformément au décret du 3 juillet 2009.

En effet, y est envisagé le développement d’une infrastructure dédiée à la conduite automobile sportive de loisirs, grâce à l’implication de partenaires spécialisés reconnus.

Comme vous pouvez le constater, les acteurs locaux travaillent à la reconversion du site, et certains investisseurs ont aujourd’hui confirmé leur intérêt.

C’est pourquoi il est nécessaire de recueillir une prompte estimation de la valeur de cette emprise militaire, afin de pouvoir concrétiser, dès le départ de l’armée, un projet qui est porté par tous les élus et attendu par la population.

Au début du mois de septembre dernier, j’avais d’ailleurs alerté Mme la ministre du budget sur le caractère urgent de cette question. À la mi-octobre, les services ministériels se sont rendus sur le site, mais nous ne disposons toujours pas, à ce jour, d’estimation.

Je souhaiterais aussi savoir, monsieur le ministre, où en est le rapport sur la mission Grand Nord-Est que devait remettre le préfet Hubert Blanc en 2009, soit il y a maintenant deux ans.

Enfin, je veux attirer l’attention du Gouvernement sur les opérations de dépollution conduites sur les sites militaires. Il semble que cette variable, au fort impact financier, ne soit pas toujours prise en compte dans le cadre des discussions portant sur le transfert de propriété des emprises venant à être libérées.

Je vous remercie, monsieur le ministre, de vos réponses sur ces questions essentielles, qui concernent de nombreux territoires français. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUCR.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet.

M. Jean-Luc Fichet. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je tiens, tout d’abord, à saluer la pertinence du travail de notre collègue rapporteur pour avis Ronan Dantec, qui a su montrer l’insuffisance de ce budget en direction des territoires pour ce qui concerne tant le programme « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » que les quatre actions du programme « Interventions territoriales de l’État ».

Vous l’avez vous-même reconnu, monsieur le ministre, lors de la présentation de votre budget en commission, le 2 novembre dernier, la charge de travail est lourde en matière d’aménagement du territoire, et le besoin est considérable.

Or vous nous apportez pour toute réponse un budget de misère pour une mission dont l’examen ne nous occupera pas plus d’une heure trente sur la totalité de la discussion du projet de loi de finances… Les collectivités territoriales sont donc la dernière des préoccupations du Gouvernement !

Je concentrerai plus particulièrement mon propos sur l’aménagement du territoire.

La mission « Politique des territoires » représente 334 millions d’euros en autorisations d’engagement et 340 millions d’euros en crédits de paiement.

Alors que les collectivités locales expriment un mal-être frappant et que vous avez rappelé l’importance de ce budget, je m’étonne que l’Assemblée nationale, avec votre bénédiction d’ailleurs, soit parvenue à le minorer de 3 millions d’euros, et ce en vue de « contribuer au redressement des finances publiques ».

Pour ce qui concerne le principal programme « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire », vous prévoyez, en 2012, une baisse des autorisations d’engagement de 5,14 %. C’est autant d’argent en moins pour un programme qui finance des dispositifs essentiels en termes de préservation et de création d’emplois mais aussi d’attractivité de nos territoires.

Ce sont précisément dans les territoires que se jouent aujourd’hui les grands enjeux de demain, et c’est grâce aux politiques d’aménagement du territoire que l’État montre sa confiance aux collectivités locales et, au-delà, aux citoyens. Mais tel n’est, malheureusement, plus le cas depuis plusieurs années.

Les zones rurales et les zones peu denses sont ignorées par votre gouvernement, quand elles ne sont pas vilipendées parce qu’elles seraient dispendieuses ; seules comptent aujourd’hui les grandes agglomérations, et leur centre-ville.

Nous sommes plutôt ici dans une politique dite de « déménagement » du territoire. C’est peut-être un lieu commun que de le dire, mais c’est malheureusement la réalité.

Pour finir de montrer le manque d’engagement de l’État derrière les belles déclarations d’intention faites en matière de développement des territoires, je reprendrai trois exemples, que mes collègues ont déjà cités, mais il m’importe de les exposer de nouveau, ne serait-ce que pour mieux vous convaincre, monsieur le ministre.

Permettez-moi tout d’abord d’évoquer la question du très haut débit.

Malgré la mise en œuvre prévue, en 2012, du programme national « très haut débit » à hauteur d’1,5 million d’euros pour les schémas directeurs territoriaux d’aménagement numérique des collectivités, l’engagement de l’État reste très insuffisant pour lutter contre la fracture numérique. Ce sont les collectivités territoriales qui n’ont plus qu’à mettre de l’argent sur la table !

Monsieur le ministre, les zones rurales attendent toujours des outils de financement. À l’heure actuelle, nos collectivités sont en première ligne pour financer les infrastructures du très haut débit dans les zones non rentables. La responsabilité est à chercher dans la liberté totale que vous avez laissée aux opérateurs privés, lesquels favorisent, naturellement, les secteurs à plus forte densité. Les associations d’élus demandent un engagement budgétaire plus substantiel, et c’est ce que préconise également notre collègue Hervé Maurey dans le rapport d’information qu’il a remis.

Mme Nathalie Goulet. Excellent rapport !

M. Jean-Luc Fichet. Tout à fait !

Monsieur le ministre, que faites-vous concrètement aujourd’hui ?

Dans ma région, la Bretagne, les opérateurs privés ont annoncé un investissement sur seulement 42 % du territoire ! Cela va se traduire par un besoin de financement par les collectivités locales de 1,12 milliard d’euros a minima, avec une participation de l’État avoisinant les 290 millions d’euros. Les chiffres parlent d’eux-mêmes !

L’État n’a pas mis en place de dispositif analogue à celui qui est en vigueur pour l’électricité ou les déchets ménagers, qui permettait d’apporter une source de financement : il sera souvent impossible aux collectivités d’assumer cet investissement colossal. La date butoir de 2025 est absolument incompréhensible, a fortiori celle de 2030, dont il est également fait état.

L’État n’a pas pris la mesure de l’enjeu pour l’ensemble du territoire, mais a simplement fait en sorte de résoudre l’équation pour les zones « rentables », qui sont, en fait, les zones urbaines. La France ne se résume pas à une collection de quelques zones agglomérées denses. Les collectivités ne pourront faire face à cet enjeu – plus de 1 milliard d’euros pour la seule région Bretagne – qu’en mobilisant leurs sources communes de financement.

À l’heure où il est fait état de la « gabegie financière des collectivités locales », on ne peut que s’interroger. Il est plus que temps que l’État, qui a été alerté par de très nombreux élus, quelle que soit leur appartenance politique, prenne réellement conscience de l’enjeu, car, sans le numérique, il n’y aura pas, dans une économie désormais mondialisée, de croissance durable.

Permettez-moi maintenant d’aborder les maisons de santé pluridisciplinaires, un sujet qui a aussi été évoqué à plusieurs reprises.

Pour faciliter l’accès aux soins, il est prévu de créer 250 maisons de santé pluridisciplinaires, pour un budget de 10 millions d’euros en 2012.

Les maires, notamment dans les communes rurales, sont de plus en plus confrontés aux demandes de leurs concitoyens en termes d’offre médicale. Il faut le répéter, la création des maisons médicales est en soi une bonne chose, mais les agences régionales de santé demandent aujourd'hui, à juste titre, que tout projet de maison de santé soit également porté par une association de professionnels de santé. Les collectivités locales ne veulent pas que la maison médicale ait été financée en vain ou qu’elle ne soit pas suffisamment attractive pour des médecins.

Mais si l’on ne construit des maisons pluridisciplinaires de santé que là où il y a des médecins, on n’aura pas vraiment réglé le problème de la désertification médicale !

Ce n’est pourtant pas une fatalité : il nous faudra, à un moment donné, travailler en collaboration avec les médecins pour prévoir des méthodes plus coercitives.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Jean-Luc Fichet. On le sait, le départ du médecin généraliste, c’est d’abord une perte de chiffre d’affaires pour la pharmacie, puis la fermeture de l’officine, et le groupe infirmier resté sur place qui voit sa tâche tellement compliquée qu’il finit, lui aussi, par rejoindre le centre-ville. Voilà comment ces zones rurales – mais les zones périurbaines sont aussi concernées – deviennent de véritables déserts médicaux.

Cela avait été répété à maintes reprises lors de l’examen de la loi HPST, mais on ne nous avait pas entendus. Puis, progressivement, on s’est rendu compte que le mal faisait son œuvre et que les effets étaient absolument dévastateurs.

La loi HPST avait permis quelques petites avancées, que la loi Fourcade a complètement fait disparaître.

M. Jean-Luc Fichet. Même au Sénat, les élus de la majorité présidentielle s’en sont émus.

M. Jean-Luc Fichet. Certes, les maisons de santé pluridisciplinaires constituent une première réponse, mais la participation de l’État n’est pas, je le répète, assez élevée.

Quant aux bourses incitatives de 1 200 euros par mois, elles ne changent rien. Toutes les analyses le prouvent, ce n’est pas de l’argent que veulent les médecins. Ce n’est pas en versant des financements complémentaires que l’on motivera les internes. Ce n’est pas la bonne réponse.

En revanche, on sait que 58 % des Français ont renoncé à consulter un spécialiste à cause des délais. Il faut, en moyenne, 103 jours pour obtenir un rendez-vous chez un ophtalmologiste, et encore, en invoquant l’urgence…

La lutte contre les déserts médicaux est devenue aujourd’hui une nécessité pour tous les élus. La prise de conscience est collective. Mais cette nécessité criante n’a pas encore atteint les oreilles du Gouvernement ! Pourtant, il y a bien urgence.

Dans mon département, la moyenne d’âge des médecins généralistes est aujourd’hui de cinquante-six ans. Par conséquent, si rien n’est fait, dans les quatre ou cinq ans, vous imaginez bien qu’il n’y aura tout simplement plus aucun médecin !

On peut aussi s’interroger sur les coopérations hospitalières mises en place par la loi Bachelot-Narquin. Ce qui, à l’origine, semblait être une bonne chose se traduit, en fait, aujourd’hui, par le renforcement des grands centres hospitaliers et la fermeture de services hospitaliers, voire d’hôpitaux de proximité, ce qui est très grave ! De plus, nous constatons qu’il y a de moins en moins de spécialistes, ceci étant la conséquence de cela.

Le dernier point que je voudrais évoquer, bien que mon temps de parole soit bientôt écoulé, concerne les algues vertes.

Le programme 162 comprend bien une action Eau - Agriculture en Bretagne sur la problématique des nitrates. Mais qu’observe-t-on, sinon que, parallèlement, à cette politique de lutte contre les algues vertes que vous menez, les dispositions que vous avez prises permettent d’augmenter les quantités d’azote épandues à l’hectare ! Cette attitude paradoxale exacerbe les conflits entre une partie du monde agricole et les défenseurs de l’environnement. On croirait presque à un acte volontaire pour empêcher le dialogue et une évolution positive vers de vraies réponses partagées.

Je ne vais pas prolonger mon intervention.

M. le président. Non, en effet, mon cher collègue !

M. Jean-Luc Fichet. Comme vous l’aurez compris, monsieur le ministre, nous ne voterons pas les crédits que vous nous proposez. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Un scoop ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureux de présenter aujourd’hui les crédits pour 2012 de la mission « Politique des territoires ». Ce budget doit nous permettre de relever deux défis majeurs : le renforcement de l’attractivité de tous les territoires et la garantie de l’équilibre entre les territoires.

L’objectif de notre politique – car il en existe bien un, contrairement à ce que j’ai entendu ici ou là ! – est, sur le long terme, de garantir que, malgré les déplacements de plus en plus rapides de la population française, notamment vers le littoral, malgré le renforcement des atouts économiques de certaines régions au détriment d’autres, tout le monde, en France, trouvera sa place, pourra participer au développement économique et bénéficier du même accès aux services publics et au développement des technologies nouvelles comme le numérique.

Derrière la politique des territoires et l’aménagement du territoire, il y a une dimension à laquelle ce gouvernement et cette majorité sont profondément attachés, c’est celle de la fraternité entre les Français et entre les territoires.

Cette mission « Politique des territoires » est dotée de 331 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 337,8 millions d’euros en crédits de paiement. Elle représente seulement 6 % des 5,4 milliards d’euros qui sont consacrés par l’État à l’aménagement du territoire. Cela étant, je le précise notamment pour M. Jean-Jacques Mirassou, mais cela a été aussi abordé par M. Jean-Claude Lenoir, tous les départements ministériels sont évidemment concernés par l’aménagement du territoire, et cette politique reste bien placée sous l’autorité du Premier ministre.

Cette mission comprend deux programmes.

Le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » est géré par la DATAR et doté de 284 millions d’euros. On y trouve la fameuse prime d’aménagement du territoire, la PAT, dont certains d’entre vous ont fait mention dans leurs interventions et dont, je tiens à le dire, je souhaite le maintien.

Nous avons maintenu, à l’euro près, les crédits de la prime d’aménagement du territoire pour 2009-2010. J’ai parfaitement entendu les critiques de la Cour des comptes. Le problème, c’est que, n’étant pas soumise au suffrage des électeurs,...

Mme Nathalie Goulet. Cela dépend ! (Sourires.)

M. Bruno Le Maire, ministre. ... à la sanction des citoyens français, ce qui n’est d’ailleurs, bien entendu, pas son rôle, la Cour n’a pas à rendre compte, en termes de maintien des emplois, de fermeture des usines ou d’installations, de la politique qui est conduite.

Or une politique qui a permis de maintenir 42 000 emplois entre 2007 et 2011, même si elle peut certainement être recentrée, améliorée, mérite, selon moi, d’être maintenue. Par conséquent, nous maintiendrons la prime d’aménagement du territoire et, avec elle, les emplois qu’elle permet de conserver.

M. Bruno Le Maire, ministre. Le programme 162 « Interventions territoriales de l’État », le PITE, géré par le ministère de l’intérieur et doté de 47 millions d’euros, finance notamment – je le précise pour Jean-Luc Fichet – la lutte contre la prolifération des algues vertes en application du plan de lutte contre les algues vertes, dont je suis certain qu’il donnera des résultats sur le long terme.

Comme vous l’avez rappelé, c’est uniquement grâce au travail de coordination et au dialogue entre les agriculteurs, les associations et les responsables locaux que nous arriverons à trouver les bonnes solutions.

Dans le cadre du plan de retour à l’équilibre des finances publiques, les crédits de cette mission diminueront de 4,5 millions d’euros, ce qui représente moins de 1,4 % du budget de cette mission présenté dans le projet de loi de finances pour 2012.

L’effort est réparti de manière équitable.

Les crédits alloués aux contrats de projets État-région, les CPER, sont réduits de 1 million d’euros, mais cela ne remet pas en cause les projets engagés.

Les crédits consacrés aux pôles de compétitivité et aux grappes d’entreprises sont réduits de 2 millions d’euros, mais ils seront réajustés en fonction du nombre de projets qui devraient être soutenus en 2012.

Enfin, les crédits du Fonds national d’aménagement du territoire, le FNADT, sont réduits de 1,5 million d’euros. L’effort portera sur la section générale de ce fonds.

Malgré ces efforts d’économies, qui sont indispensables et dont cette mission ne peut s’exonérer pas plus que n’importe quelle autre d’ailleurs, nous serons en mesure de maintenir les deux grands objectifs de notre politique d’aménagement du territoire.

Le premier objectif consiste à renforcer l’attractivité du territoire, ce qui suppose que trois conditions soient remplies.

La première est l’amélioration de la couverture numérique du territoire, point qui a été souligné par l’ensemble des orateurs.

Aujourd’hui, et c’est un atout majeur, la France est l’un des pays développés les mieux couverts en numérique, avec un accès qui est l’un des moins coûteux, en particulier pour les ménages. Nous devons absolument maintenir et développer cet atout stratégique.

En juin 2010, nous avons lancé un programme national « très haut débit », avec comme objectif 70 % des foyers français raccordés au très haut débit en 2020 et 100 % en 2025. L’objectif est ambitieux, mais il devrait être atteint grâce, notamment, à l’enveloppe initiale de 2 milliards d’euros prévue pour financer les premiers travaux de couverture numérique.

Sur ces 2 milliards d’euros, 900 millions d’euros seront spécifiquement réservés aux projets de raccordement des collectivités dans les zones pour lesquelles les opérateurs n’ont pas pris l’engagement de déployer leurs propres réseaux. J’aurai l’occasion de rencontrer une nouvelle fois les principaux opérateurs pour leur rappeler leurs responsabilités en la matière, car tout ne peut pas reposer sur les efforts de l’État et des collectivités territoriales. Les opérateurs doivent également jouer leur rôle en matière d’aménagement du territoire et ne pas délaisser les territoires les moins peuplés.

Cent millions d’euros seront consacrés à des technologies autres que la fibre pour assurer la montée en débit des zones les plus difficilement accessibles.

J’ai parfaitement conscience que les 900 millions d’euros pour équiper les zones les moins denses ne suffiront pas à couvrir tous les besoins. Nous devons réfléchir au financement du Fonds d’aménagement numérique des territoires, afin de disposer de ressources à la fois suffisantes et pérennes pour garantir la poursuite de ce projet.

M. Hervé Maurey, sénateur de l’Eure, département cher à mon cœur, a fait en ce sens des propositions qui me paraissent intéressantes,...

Mme Nathalie Goulet. Excellentes !

M. Bruno Le Maire, ministre. ... mais il faudra que nous prenions rapidement des décisions sur le financement pérenne de ce Fonds d’aménagement numérique des territoires.

La deuxième condition nécessaire au renforcement de l’attractivité du territoire est la mise en commun de nos atouts à travers la politique des pôles et des grappes.

Je tiens à le dire à Mme Évelyne Didier, avec qui j’avais un point de désaccord sur ce sujet, les politiques de pôles, de regroupement de nos forces, de travail en commun, tout cela marche ! C’est même, à mon avis, l’une des perspectives essentielles pour ce pays, où il existe encore trop de divisions, trop de querelles entre les uns et les autres, trop de difficultés à faire travailler les PME avec les grandes entreprises, trop de difficultés à faire travailler ensemble les laboratoires de recherche et les entreprises qui doivent utiliser les résultats de ces recherches. J’ajoute, en tant que ministre de l’agriculture, qu’il y a encore trop de querelles entre les différents intervenants des filières, les producteurs, les industriels, les transformateurs et les distributeurs.

Ce pays s’en sortira si chacun apprend à travailler un peu mieux avec son voisin...

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Bruno Le Maire, ministre. ... et si on laisse de côté les querelles au profit de la coopération et du dialogue. Voilà ce qui fera la force de la France !

Les pôles de compétitivité et les grappes d’entreprises répondent à cette logique de travail en commun.

S’agissant des pôles de compétitivité, nous avons consacré 1,5 milliard d’euros pour la période 2009-2011 au lancement d’une seconde phase.

S’agissant des grappes d’entreprises, elles doivent permettre aux petites entreprises d’améliorer leur compétitivité et leurs performances en mettant en commun un certain nombre de richesses. Cent vingt-six grappes ont été sélectionnées pour un budget total de 24 millions d’euros sur deux ans.

Pour vous parler très franchement, nous sommes plutôt débordés par la demande, parce que le dispositif donne des résultats. Il permet aussi de mettre en commun des services qui seraient coûteux pour une très petite entreprise, mais qui, à l’échelle de deux, trois, quatre ou cinq petites entreprises, le sont évidemment beaucoup moins.

Enfin, les pôles d’excellence rurale, dont Rémy Pointereau a beaucoup parlé dans son intervention, font également partie des moyens efficaces de redynamisation du territoire rural.

Depuis 2006, nous avons lancé quatre appels à projets nationaux. Au total, nous avons financé 652 projets pour près de 475 millions d’euros. Près d’un demi-milliard d’euros pour les pôles d’excellence rurale, c’est un effort considérable !

Je tiens à dire à Rémy Pointereau que ces pôles continueront à bénéficier de tout le soutien du Gouvernement, en particulier du ministre de l’agriculture.

Une troisième condition est nécessaire au renforcement de l’attractivité du territoire : le soutien à l’Agence française pour les investissements internationaux, l’AFII, qui joue un rôle essentiel pour le développement de l’emploi et la création de richesses dans nos territoires.

M. Aymeri de Montesquiou l’a dit aussi, la France est l’un des pays les plus attractifs en termes d’investissements étrangers.

Les résultats de l’Agence ont été remarquables en 2010 : 782 nouveaux projets d’investissements, en progression de 22 % par rapport à 2009, et près de 32 000 emplois nouveaux ou maintenus. C’est bien la preuve qu’il faut poursuivre cette politique d’attractivité et ce renforcement de l’Agence française pour les investissements internationaux.

À ce titre, la DATAR verse à l’Agence une subvention de 7 millions d’euros pour 2012, complétée par une aide de 15 millions d’euros du ministère de l’économie.