M. Michel Mercier, garde des sceaux. Parce qu’il faut le faire avant le 27 avril prochain !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Mais ces dispositions auraient dû être adoptées avant le 15 août 2010.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Non ! Elles doivent entrer en vigueur le 27 avril.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Dont acte. Dans ces conditions, la commission émet un avis de sagesse sur cet amendement. (M. le président de la commission des lois acquiesce.) Chacun pourra ainsi prendre ses responsabilités.

Mme Éliane Assassi. Le groupe CRC s’abstient !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 9 bis B est rétabli dans cette rédaction.

Article 9 bis B (supprimé)
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Article 9 bis

Article 9 bis C

(Supprimé)

M. le président. L'amendement n° 28, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L'avant-dernière phrase du cinquième alinéa de l'article 706-53-5 du code de procédure pénale est ainsi rédigée :

« Lorsque la personne est en état de récidive légale, le régime de présentation mensuelle s'applique de plein droit. »

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Le Gouvernement souhaite rétablir cet article, qui renforce la cohérence et l’efficacité des dispositions du FIJAIS, le fichier judiciaire des auteurs d’infractions sexuelles, en cas de récidive légale.

En cas de récidive, la loi a posé le principe d’une obligation mensuelle de présentation de la personne condamnée devant les services de police pour justifier de sa situation. Elle a toutefois prévu que l’obligation de présentation mensuelle devait être nécessairement ordonnée par la juridiction ; or celle-ci omet parfois de le faire dans son jugement.

Il est donc plus simple de prévoir que cette obligation, comme c’est le cas de l’inscription au FIJAIS, résulte de plein droit de la condamnation en cas de récidive, sans exiger que cela figure expressément dans le jugement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. La commission des lois ne partage pas le point de vue du Gouvernement puisqu’elle a supprimé l’article 9 bis C, qui permettait à l’autorité administrative de se substituer à l’autorité judiciaire pour décider d’une mesure restrictive de liberté, en l’espèce le régime de présentation mensuelle pour les personnes fichées au FIJAIS et condamnées en récidive légale.

Nous avons estimé qu’il convenait d’inviter le parquet à requérir systématiquement la mesure de présentation mensuelle, lorsqu’il y a lieu, et de privilégier les voies de recours contre les décisions des juridictions plutôt que de permettre à l’autorité administrative d’imposer elle-même une mesure que la juridiction aurait omis de mentionner dans sa décision.

La commission a donc émis un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. En ce qui concerne l’amendement précédent, nous avons fait preuve collectivement de compréhension compte tenu de l’échéance évoquée par M. le ministre.

S’agissant du présent amendement, Mme le rapporteur a très bien exposé le problème de fond qui se pose. En effet, si je vous ai bien compris, monsieur le garde des sceaux, il s’agit de rendre l’obligation de présentation mensuelle automatique pour parer au fait le magistrat oublierait de la notifier dans son jugement. Autrement dit, on considère que, dans la mesure où un magistrat est susceptible de ne pas prendre une décision, mieux vaut inscrire dans la loi que la décision est prise de toute façon.

C’est un drôle de raisonnement et c’est une conception de l’indépendance des magistrats que nous ne pouvons partager. Nous sommes très attachés à la liberté des magistrats et nous entendons qu’on les laisse faire leur travail !

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. M. le président de la commission des lois fait preuve du zèle ardent des néophytes ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Pas du tout !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Que n’avez-vous eu la même foi dans les magistrats lorsqu’il s’est agi la libération conditionnelle, en prévoyant des tiers ou des quarts de peine ? Pourquoi, alors n’avez-vous pas laissé au juge le soin de décider de tout cela ?

M. Alain Anziani. Et les peines planchers ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Les peines planchers, le juge peut les écarter sans problème !

Je constate que, vers quinze heures, vous suivez une règle et que, vers dix-neuf heures quinze, vous en adoptez une autre !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Pas du tout, c’est une argutie qui n’a pas de fondement !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 9 bis C demeure supprimé.

Chapitre III

Dispositions relatives à l’exécution des peines de confiscation

Article 9 bis C (supprimé)
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Article 9 ter

Article 9 bis

(Non modifié)

I. – La première phrase du neuvième alinéa de l’article 131-21 du code pénal est ainsi rédigée :

« La confiscation peut être ordonnée en valeur. »

II. – Après l’article 706-141 du code de procédure pénale, il est inséré un article 706-141-1 ainsi rédigé :

« Art. 706-141-1. – La saisie peut également être ordonnée en valeur. Les règles propres à certains types de biens prévues aux chapitres III et IV du présent titre s’appliquent aux biens sur lesquels la saisie en valeur s’exécute. » – (Adopté.)

Article 9 bis
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Article 9 quater

Article 9 ter

(Non modifié)

I. – L’article 131-21 du code pénal est ainsi modifié :

1° Au cinquième alinéa, les mots : « lorsque celui-ci, mis en mesure de s’expliquer sur les biens dont la confiscation est envisagée, n’a » sont remplacés par les mots : « ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition, lorsque ni le condamné, ni le propriétaire, mis en mesure de s’expliquer sur les biens dont la confiscation est envisagée, n’ont » ;

2° Au sixième alinéa, après le mot : « condamné », sont insérés les mots : « ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition ».

II. – La première phrase de l’article 706-148 du code de procédure pénale est ainsi rédigée :

« Si l’enquête porte sur une infraction punie d’au moins cinq ans d’emprisonnement, le juge des libertés et de la détention peut, sur requête du procureur de la République, autoriser par ordonnance motivée la saisie, aux frais avancés du Trésor, des biens dont la confiscation est prévue en application des cinquième et sixième alinéas de l’article 131-21 du code pénal lorsque la loi qui réprime le crime ou le délit le prévoit ou lorsque l’origine de ces biens ne peut être établie. » – (Adopté.)

Article 9 ter
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Article 9 quinquies

Article 9 quater

(Non modifié)

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa de l’article 707-1 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Néanmoins, les poursuites pour le recouvrement des amendes et l’exécution des confiscations en valeur sont faites au nom du procureur de la République par le comptable public compétent ou, dans les cas où la confiscation en valeur s’exécute sur des biens préalablement saisis, par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués.

« L’exécution des autres confiscations est réalisée au nom du procureur de la République par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués lorsqu’elles portent sur des biens meubles ou immeubles mentionnés aux 1° et 2° de l’article 706-160, même s’ils ne lui ont pas été préalablement confiés. L’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués procède, s’il y a lieu, aux formalités de publication. » ;

1° bis L’avant-dernier alinéa du même article 707-1 est ainsi rédigé :

« La prescription de la peine est interrompue par les actes ou décisions du ministère public, des juridictions de l’application des peines et, pour les peines d’amende ou de confiscation relevant de leur compétence, du Trésor ou de l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, qui tendent à son exécution. » ;

2° Après le mot : « prévues », la fin du 3° de l’article 706-160 est ainsi rédigée : « aux articles L. 2222-9 du code général de la propriété des personnes publiques et 707-1 du présent code ; ». – (Adopté.)

Article 9 quater
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Article 9 sexies

Article 9 quinquies

(Non modifié)

L’article 713-40 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les frais d’exécution de la décision de confiscation sont imputés sur le total des montants recouvrés.

« Les sommes d’argent recouvrées et le produit de la vente des biens confisqués, déduction faite des frais d’exécution, sont dévolus à l’État français lorsque ce montant est inférieur à 10 000 € et dévolus pour moitié à l’État français et pour moitié à l’État requérant dans les autres cas. » ;

2° Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le montant recouvré, déduction faite de tous les frais, est partagé selon les règles prévues au présent article. » – (Adopté.)

Article 9 quinquies
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Article 10

Article 9 sexies

(Non modifié)

À la deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article L. 325-1-1 du code de la route, les mots : « à l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués » sont remplacés par les mots : « au service des domaines ». – (Adopté.)

Chapitre IV

Dispositions diverses

Article 9 sexies
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Article 11 (supprimé)

Article 10

La présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna. – (Adopté.)

Article 10
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Intitulé du projet de loi

Article 11

(Supprimé)

M. le président. L'amendement n° 34, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le deuxième alinéa de l'article 12 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Ils assurent également la protection des bâtiments abritant les administrations centrales du ministère de la justice. »

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Il s’agit de donner une base légale au fait que les agents de l’administration pénitentiaire qui, désormais, assurent la sécurité du ministère de la justice, place Vendôme, puissent être armés.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Ils gardent le garde des sceaux ! (Sourires.)

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Je demande au Sénat de rétablir l’article 11, qui vise à permettre à ces surveillants de remplir leurs missions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. La commission des lois a supprimé cette disposition, car elle a considéré qu’il s’agissait d’un cavalier législatif. La commission n’a pas débattu sur la question de savoir si ces personnels devaient être armés ou non, mais elle a émis un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 34.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 11 demeure supprimé.

Article 11 (supprimé)
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Intitulé du projet de loi

M. le président. L'amendement n° 29, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet intitulé :

Projet de loi de programmation relatif à l’exécution des peines

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Je souhaite revenir un instant sur l’amendement précédent.

Les agents de l’administration pénitentiaire qui assurent la protection du ministère de la justice ne sont pas dans une situation de complète sécurité. Je regrette donc beaucoup l’avis défavorable de la commission. Je respecte, bien sûr, les positions défendues par Mme le rapporteur, mais il me semble qu’il y a que bien d’autres endroits, notamment devant les palais nationaux, où les gardes sont armés !

M. Jean-Louis Carrère. Il faut arrêter de supprimer des postes de gendarmes !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Place Vendôme, nous n’avons plus de gendarmes ni de gardes !

M. Jean-Louis Carrère. La faute à la RGPP !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Pour ce qui est l’amendement n° 29, il vise à rétablir l’intitulé initial du projet de loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Monsieur le ministre, puisque je vous mets en colère, permettez-moi de vous répondre très gentiment.

Les agents de l’administration pénitentiaire ont-ils vocation à garder le ministère de la justice ? Un débat serait nécessaire sur ce point. Ces personnels sont chargés des transfèrements ; maintenant, ils doivent surveiller le ministère. Or celui-ci n’est pas une prison, que je sache !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Ils sont armés partout, sauf là !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Contrairement à ce que vous pensez, que des agents de l’administration pénitentiaire soient amenés à garder le ministère de la justice n’a rien d’une évidence !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. À Bercy, ce sont des douaniers !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Que voulez-vous, à force de supprimer des postes de policiers et de gendarmes, vous manquez de personnel pour garder le ministère !

Pour en revenir à l’amendement n° 29, l’actuel titre du projet de loi a été choisi par la commission. Nous sommes donc défavorables à la modification proposée par le Gouvernement. Notre intitulé, je l’espère, fera réfléchir les députés.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Vote sur l'ensemble

Intitulé du projet de loi
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Hyest. Faut-il voir le verre à moitié vide ou le verre à moitié plein ?

Certes, un grand nombre de dispositions ont été conservées, notamment dans l’annexe, mais le texte a été surchargé de mesures complètement contradictoires : suppression des peines planchers, obligations relatives au numerus clausus, etc. Le projet de loi s’en trouve défiguré.

Nous sommes contre les dispositions que la majorité sénatoriale a ajoutées et nous ne sommes pas satisfaits de la suppression de mesures positives, notamment celles qui prévoyaient la construction de certains établissements.

M. Jean-Louis Carrère. Vous allez voter contre le texte ?... (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Jacques Hyest. Monsieur Carrère, laissez-moi terminer, s’il vous plaît !

Comment voulez-vous que nous votions un texte aussi altéré ?

M. Jean-Louis Carrère. Je comprends ! (Nouveaux sourires sur les mêmes travées.)

M. Jean-Jacques Hyest. Pourquoi ne pas avoir déposé une motion tendant à opposer la question préalable, comme je l’ai dit tout à l’heure à M. Michel ? La situation aurait été plus claire : nous aurions pu voter contre !

Au lieu de cela, vous avez habilement essayé de faire passer un certain nombre de mesures que nous réprouvons, car elles modifient profondément le code de procédure pénale, alors que vous nous disiez, pas plus tard que ce matin, qu’il fallait cesser de le changer tout le temps !

Pour tous ces motifs, le groupe UMP, monsieur le garde des sceaux, votera contre ce texte, qui s’éloigne trop du projet initial du Gouvernement.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Eh oui !

M. Jean-Louis Carrère. Nous avons beaucoup de peine pour vous ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Jacques Hyest. Votre compassion me va droit au cœur, monsieur Carrère, mais je vous la rendrai un jour, n’ayez crainte !

M. le président. La parole est à Mme Virginie Klès.

Mme Virginie Klès. Monsieur Hyest, nous allons finir par ne plus savoir sur quel pied danser : quand nous déposons une motion tendant à opposer la question préalable, vous nous dites qu’il vaudrait mieux discuter le texte et l’amender en séance et, quand nous discutons du texte en séance et que nous l’amendons, vous nous dites que vous auriez préféré avoir à vous prononcer sur une question préalable !

Cette fois, nous avons choisi d’améliorer le texte. Que le résultat final ne vous plaise pas, ma foi, cela ne m’étonne pas outre mesure puisque nous n’avons pas toujours la même façon de voir les choses…

Grâce à l’intense travail de Mme la rapporteur, ce texte est devenu beaucoup plus acceptable à nos yeux.

Je ne répéterai pas tout ce qui a déjà été dit sur la façon un peu cavalière d’engager la procédure accélérée. Comme d’habitude, après un fait divers, certes dramatique, nous avons eu un discours, une annonce, des promesses et un nouveau texte de loi. Beaucoup de choses ont été dites aussi sur l’insécurité juridique qu’engendre cette façon de légiférer, mais aussi sur les partenariats public-privé et sur le risque d’endettement très lourd de l’État qu’induisait le texte qui nous a été transmis. Or il a été profondément modifié. Que notre rapporteur en soit remerciée !

Nous voterons donc ce projet de loi dans la rédaction qui résulte des travaux du Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Le projet de loi initial était un symptôme de plus des dérives sécuritaires du Gouvernement et trahissait sa tendance maladive à laisser les faits divers et l’émotion lui dicter sa politique pénale.

En présentant un tel texte, il avait fait le pari d’une croissance exponentielle de la délinquance, se fixant une priorité absolue : enfermer. Il a ainsi misé sur une politique peu ambitieuse et a cherché à promouvoir une image peu valorisante de notre société.

La commission des lois, sous l’impulsion de notre rapporteure, Nicole Borvo Cohen-Seat, a fait le choix de redéfinir complètement le texte en mettant un terme à l’accroissement du parc pénitentiaire, en abrogeant des dispositions relatives aux peines planchers, en posant le principe de l’aménagement systématique des peines d’emprisonnement d’une durée égale ou inférieure à trois mois, en intégrant un mécanisme destiné à prévenir la surpopulation pénale et en posant le principe de l’atténuation de la responsabilité pénale des auteurs d’infractions dont le discernement est altéré au moment des faits.

Ainsi, notre commission a fait le choix de ne plus penser la détention selon une logique d’exclusion et d’élimination sociale.

Il était effectivement temps de reconsidérer complètement la privation de liberté. Contrairement à ce qui a été sous-entendu, voire dit depuis hier soir, affirmer que la prison ne doit plus être envisagée comme un lieu où l’on « purge sa peine », ce n’est pas adopter une position peu soucieuse des victimes. C’est, au contraire, être du côté des victimes que de se préoccuper de la réinsertion des condamnés, afin que chacun puisse vivre en sécurité.

Des pays européens ont fait le choix de remplacer les prisons actuelles par des lieux de vie fermés ; c’est le cas de la Suède ou de l’Espagne. Les personnes privées de leur liberté y exercent leur activité professionnelle dans le respect du droit du travail et vivent dans des conditions de dignité et de sociabilité aussi proches que possible de celles qui ont cours à l’extérieur.

Pour notre part, nous souhaitons suivre ce chemin, et ce projet, tel qu’il va être voté dans quelques instants, en fournit, me semble-t-il, les premiers jalons.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Je me félicite que la commission se soit ralliée à la position que j’avais défendue et qui consistait à ne pas déposer de motion tendant à opposer la question préalable sur ce projet de loi. Nous avons voulu montrer que nous étions fidèles aux conclusions des commissions d’enquête menées autour de l’an 2000, particulièrement au Sénat,…

M. Jean-Jacques Hyest. Non, ce n’est pas vrai !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. … qui avaient pointé un grand nombre de questions et ont péniblement abouti, au bout de dix ans,…

M. Jean-Jacques Hyest. À qui la faute ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. … à la loi pénitentiaire, que la majorité d’alors a votée.

Nous n’avons pas non plus proposé toutes les dispositions qu’il serait pourtant nécessaire d’adopter pour permettre que la loi pénitentiaire s’applique concrètement. Si nous ne l’avons pas fait, c’est, d’abord, parce que nous n’avons pas la possibilité d’engager des dépenses supplémentaires et, ensuite, parce que ce sujet nous paraît mériter une réflexion approfondie, ce que ne permet pas la procédure d’urgence qui nous a été imposée pour la discussion de ce texte, à la veille, encore une fois, d’échéances électorales qui permettront au peuple de dire ce qu’il souhaite.

On ne peut donc pas maintenant nous dire que nous aurions dû déposer une question préalable.

M. Jean-Jacques Hyest. Il ne s’agit pas de cela !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Monsieur Hyest, vous avez vous-même manifesté, d’une façon qui m’a franchement déplu, votre scepticisme lorsqu’il m’a été proposé de faire ce rapport. Vous avez affirmé, avec un haussement d’épaule, que nous étions seulement capables de déposer une question préalable. Nous avons au contraire montré que nous pouvions proposer un texte.

M. Jean-Jacques Hyest. C’est bien !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Si j’en crois les explications de vote que nous venons d’entendre, ce texte va être voté et l’Assemblée nationale sera ainsi obligée, quoi qu’il lui en coûte, de se prononcer avec rapidité sur ce que nous proposons.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je remercie toutes celles et tous ceux qui ont participé à ce débat, durant lequel ont été abordées des questions très importantes. Chacun a pu exprimer ses positions, comme il se doit au sein d’une assemblée démocratique.

Je tiens également à remercier les trois présidents de séance, M. le président de la commission des lois et Mme Borvo Cohen-Seat, qui rapportait pour la première fois, me semble-t-il, au nom de la commission des lois, sur un texte important.

Je salue son travail. Naturellement, nous ne pouvions pas être d’accord : ses positions appartiennent au passé, les miennes sont modernes. (Sourires.) Mais, hormis cette petite différence (Nouveaux sourires.), j’ai été heureux de débattre avec elle. Nous nous retrouverons dans quelques jours, car j’ai la faiblesse de penser que le texte ne demeurera pas en l’état.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
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