M. Christian Cointat. N’importe quoi !

Mme Marisol Touraine, ministre. C’est sans doute, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, parce que vous avez l’expérience de l’absence de concertation avec les partenaires sociaux … (Mêmes mouvements.)

Mme Catherine Procaccia. Comment pouvez-vous dire cela devant Gérard Larcher ?

M. Gérard Larcher. Ce serait presque comique !

Mme Isabelle Debré. Vous faites preuve d’une agressivité bien inutile !

Mme Marisol Touraine, ministre. … que vous imaginez que le Gouvernement est aujourd’hui en mesure d’apporter des réponses, alors que les discussions n’ont pas commencé !

Vous avez également raison de souligner, madame Printz, que la réforme que nous allons présenter au Parlement doit être une réforme de justice, permettant de répondre à des situations comme celles que connaissent les femmes, dont le niveau de pension reste très significativement inférieur à celui des hommes.

Nous devons aussi prendre en compte les carrières hachées et la pénibilité du travail, tout ce à quoi le Gouvernement précédent a refusé obstinément de s’atteler (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste – Nouvelles protestations sur les travées de l’UMP.), préférant adopter une approche purement médicale de la pénibilité !

Les questions de la pénibilité, de la retraite des femmes, des carrières hachées, de l’emploi des seniors seront donc posées, …

M. Jean Desessard. Très bien !

Mme Marisol Touraine, ministre. … ainsi que celle de l’entrée dans la vie active des jeunes qui doivent savoir comment construire leur carrière dans la perspective d’une retraite future.

M. Christian Cointat. Des mots, des mots !

Mme Marisol Touraine, ministre. Nous voulons que toutes ces questions soient sur la table et trouvent des réponses positives, constructives et justes. C’est l’esprit dans lequel le Gouvernement a aujourd’hui engagé son travail. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz, pour la réplique.

Mme Gisèle Printz. Madame la ministre, je vous remercie de vos propos. Comme vous, je pense qu’il est primordial de débattre du système des retraites et des pensions en concertation avec l’ensemble des acteurs concernés

La pénibilité et les inégalités salariales entre hommes et femmes me tiennent particulièrement à cœur, et je pense que vous saurez promouvoir les bonnes solutions. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur plusieurs travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson.

M. Jean Louis Masson. Madame le ministre, quand on parle de justice et d’efforts partagés avec équité, on évoque systématiquement les fonctionnaires. Or, si beaucoup des gouvernements qui se sont succédé ont parlé des fonctionnaires, presque tous ont fait semblant d’oublier les régimes spéciaux ! (Marques d’approbations sur les travées de l'UMP.)

M. Jean Louis Masson. C’est pourtant là que se trouve la situation la plus anormale, la plus disproportionnée, notamment en regard du régime général.

M. Jean Desessard. Et les parachutes dorés ?

M. Jean Louis Masson. Il faut reconnaître que les menaces de grève sont un puissant facteur de dissuasion…

Toutefois, madame le ministre, telle ou telle corporation, sous prétexte qu’elle peut bloquer la France entière en faisant grève, a-t-elle le droit, au moment où l’on demande des efforts à tout le monde, de bénéficier d’avantages tout à fait exorbitants vis-à-vis aussi bien des fonctionnaires que des ressortissants du régime général ?

J’aimerais, madame le ministre, que vous soyez un peu plus claire sur cette question des régimes spéciaux, que vous précisiez vos intentions en la matière.

La solution d’équité, d’autres l’ont dit avant moi, c’est le système de retraite par points. Or, là aussi, vous êtes pour le moins évasive. Pourtant, avec un tel système, il n’y a plus le régime du privé, celui des fonctionnaires et puis les régimes spéciaux : tout le monde se retrouve sur le même plan, c’est-à-dire qu’on parvient à une réelle situation d’équité.

Dès lors, madame le ministre, le problème pour vous n’est pas de parler d’équité mais de la faire. Et pour cela, au lieu de parler, il faudrait agir ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)

M. Jacky Le Menn. Que ne l’avez-vous fait ?

M. Jean Louis Masson. Je voudrais conclure en rendant hommage à la CFDT, qui est un des rares syndicats à avoir le courage de ses opinions…

M. Jean Desessard. Vous n’allez pas leur porter chance ! (Sourires.)

M. Jean Louis Masson. … et à ne pas faire de la démagogie comme, hélas, beaucoup d’autres syndicats en font, étant toujours systématiquement contre tout, sachant très bien que l’on va dans le mur mais fermant les yeux en disant : après nous, les mouches ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Que suis-je venue faire ici, monsieur le sénateur ? Je suis venue au Parlement, le lieu où l’on parle, pour utiliser les mots que nous poserons sur la réforme que nous préparons.

Après toutes ces paroles, monsieur Larcher, vous aurez à débattre d’un texte qui témoignera de notre volonté d’inscrire nos régimes de retraite dans la durée.

Vous avez posé beaucoup de questions, monsieur Masson, mais ce n’est pas nécessairement en appliquant les mêmes règles à des situations différentes que l’on aboutit à la plus grande équité.

Je prendrai l’exemple des droits familiaux : ils sont plus avantageux dans le secteur privé que dans la fonction publique et dans les régimes spéciaux.

De même, les fonctionnaires partent à la retraite avec une pension calculée à partir de leur salaire, indépendamment de toute prise en compte des primes, ce qui aboutit à des différences tout à fait significatives.

M. Jean Desessard. Nous pourrions aussi parler des primes en liquide ! (Sourires.)

Mme Marisol Touraine, ministre. L’objectif qui doit être le nôtre – c’est en tout cas celui du Gouvernement – est de faire en sorte que l’effort demandé à chacun soit le même, que l’effort demandé à l’ensemble des catégories soit de même nature et que, en contrepartie de cet effort, le niveau des pensions versées soit acceptable pour l’ensemble de nos concitoyens. Cet effort, nous allons le demander aux Français afin de pouvoir garantir la pérennité de nos systèmes de retraite.

Pour ce qui est du système par points, j’ai déjà eu l’occasion d’indiquer qu’il ne s’agissait pas de la recette qui nous permettrait de sortir des difficultés. Encore une fois, l’exemple le plus abouti, le plus intéressant et incontestablement le mieux structuré est celui qui a été mis en place en Suède, au bout d’une période de quinze ans.

M. Jean Desessard. Il ne s’agit pas d’un système par points, madame la ministre, mais d’un système par répartition selon les tranches d’âge !

Mme Marisol Touraine, ministre. Ce système par points a pourtant abouti à une dégradation très forte des pensions des Suédois au cours des dernières années.

Vous le voyez, monsieur Masson, ce qui apparaît parfois comme une solution miracle se révèle, à l’arrivée, n’être qu’un miroir aux alouettes ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour la réplique.

M. Jean Louis Masson. Madame le ministre, vos propos manquent toujours autant de précision. J’espérais que le Saint-Esprit allait tomber sur le banc du Gouvernement… (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Annie David. S’il existe !

M. Jean Louis Masson. … et que j’allais obtenir une réponse, mais il n’en a rien été !

D’abord, vous n’avez pas répondu sur la question des régimes spéciaux, ce qui est tout de même affligeant et témoigne d’un manque de courage.

Vous avez ensuite rejeté le système des retraites par points en expliquant que tous les cas sont différents. Il faut quand même être honnête, madame le ministre ! En quoi la situation d’un chauffeur de poids lourd qui travaille dans le privé, qui n’est jamais chez lui, qui roule la nuit, le jour, est-elle si différente de la situation d’un conducteur de locomotive ? Un employé d’EDF qui plante en été quelques poteaux électriques est-il dans une situation si différente de celle de l’employé d’une entreprise de travaux publics qui creuse des tranchées, été comme hiver, et qui a des horaires beaucoup plus stricts ?

Je crois qu’il ne faut pas dire n’importe quoi !

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Masson.

M. Jean Louis Masson. Nous sommes face à un vrai problème à cet égard, et faire semblant de croire qu’il n’existe pas, c’est un peu se moquer des Français ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions cribles thématiques sur l’avenir des retraites.

Avant d’aborder le point suivant de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures.)

M. le président. La séance est reprise.

6

Organisme extraparlementaire

M. le président. M. le Premier ministre a demandé M. le président du Sénat de lui faire connaître le nom d’un sénateur titulaire et d’un sénateur suppléant désignés pour siéger au sein du conseil consultatif des Terres australes et antarctiques françaises, conformément à l’article 1er du décret n° 2013-452 du 31 mai 2013.

Conformément à l’article 9 du règlement du Sénat, la commission des lois a été saisie de cette désignation.

Les nominations au sein de cet organisme extraparlementaire auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.

7

Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : proposition de loi autorisant l'expérimentation des maisons de naissance
Article 1er (Texte non modifié par la commission)

Maisons de naissance

Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi autorisant l’expérimentation des maisons de naissance, présentée par Mme Muguette Dini, à la demande du groupe UDI-UC (proposition de loi n° 548 [2010-2011], texte de la commission n° 369, rapport n° 368).

Je vous rappelle que nous avons entamé l’examen de cette proposition de loi le 28 février dernier et que la discussion générale a été close.

Nous passons à la discussion des articles du texte de la commission.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi autorisant l'expérimentation des maisons de naissance
Article additionnel après l’article 1er

Article 1er

(Non modifié)

À titre expérimental, et pour une durée de deux ans après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement peut autoriser la création de structures dénommées : « maisons de naissance », où des sages-femmes réalisent l’accouchement des femmes enceintes dont elles ont assuré le suivi de grossesse, dans les conditions prévues aux articles L. 4151-1 et L. 4151-3 du code de la santé publique. Ces autorisations portent sur une durée maximale de cinq ans.

La maison de naissance doit être attenante à une structure autorisée pour l’activité de gynécologie-obstétrique avec laquelle elle passe obligatoirement une convention. L’activité de la maison de naissance est comptabilisée avec celle de cette structure.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l'article.

Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 1er de cette proposition de loi est sans aucun doute le plus important puisqu’il pose les bases légales nécessaires à l’expérimentation des maisons de naissance.

Nous l’avons dit dans la discussion générale, nous sommes favorables à la possibilité pour les femmes de choisir un mode d’accouchement plutôt qu’un autre. Il n’appartient pas à la loi de faire primer une méthode sur une autre : cela relève d’un choix personnel, qu’il nous faut évidemment respecter.

De la même manière, nous sommes conscients que la reconnaissance de la formation de sage-femme au grade de master 2 ainsi que l’élargissement de leur champ de compétences nécessitent une revalorisation de la profession, ce que nous avons toujours soutenu.

Les sages-femmes doivent, y compris au sein des établissements publics, pouvoir bénéficier d’une autonomie d’action plus large et obtenir, dans leur exercice en tant que professionnels libéraux ou dans le cadre de structures, une revalorisation de la nomenclature des actes.

Or ces sujets si importants ne sont pas abordés dans cette proposition de loi. Il nous semble pourtant – et les rencontres que nous avons eues avec les professionnels concernés le prouvent – qu’il s’agit là d’une demande commune à toute la profession.

Toutefois, nous ne perdons pas de vue le contexte dans lequel se situe l’examen de ce texte. Dois-je rappeler ici que de nombreuses structures publiques ou privées non lucratives ferment, soit victimes d’un financement insuffisant, en raison de l’application de la tarification à l’activité – T2A –, soit sous un prétexte sécuritaire, par exemple le fait que la maternité ne réaliserait pas suffisamment d’actes ? Je pense aux menaces pesant sur les maternités des Bluets, des Lilas ou de Vire.

Cet argument est d’autant plus étonnant que le seuil de 300 actes est régulièrement mis en avant, les autorités sanitaires considérant qu’en dessous de ce nombre, les professionnels de santé souffriraient d’un manque de pratique mettant en danger la santé des femmes et des enfants à naître.

Est-ce à dire, madame la ministre, que les maisons de naissance créées à titre expérimental qui réaliseraient moins de 300 naissances annuelles, ce qui est fort probable, notamment les premières années, seraient immédiatement fermées pour le même motif ? La question se pose.

Pour notre part, si nous sommes favorables au libre choix des femmes d’opter ou non pour un accouchement plus naturel, nous sommes opposés à ce que les maternités de niveau 1, celles qui accueillent les futures mamans dont la grossesse et le déroulement de l’accouchement ne présentent a priori aucun risque, c’est-à-dire la majorité, se voient imposer des règles différentes de celles applicables aux maisons de naissance.

Comme d’autres, je regrette la surmédicalisation des accouchements, qui est surtout le fait des maternités de niveau 3. Celles-ci, sous l’impulsion de la loi HPST – loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires – et sous l’effet conjugué de la T2A et de la convergence tarifaire, sont devenues ce que certains osent appeler des « usines à bébés ».

Or il serait sans aucun doute opportun de s’interroger sur le mouvement qui a conduit à cet état de fait.

Comment ignorer que la fermeture massive des maternités de proximité, essentiellement de niveau 1, avec le transfert des patients vers des maternités plus importantes et plus médicalisées, contribue à cette surmédicalisation ?

Je regrette qu’aucune mesure ne soit prise pour garantir le maintien de ces maternités publiques, qui offrent aux femmes qui le souhaitent – et elles demeurent très largement majoritaires – un cadre médicalisé sans outrance ainsi qu’un accompagnement personnalisé et humain.

Tout cela nous conduit à formuler, au travers de nos amendements, une proposition alternative à celle de notre rapporteur. Si ce qui compte pour vous, mes chers collègues, est de garantir aux femmes un accompagnement moins médicalisé et plus proche des aspirations de certaines femmes qui revendiquent le droit à un accouchement plus naturel, je suis certaine que vous lui donnerez une suite favorable.

Il s’agit clairement pour nous de concilier ces aspirations, que l’on peut entendre, avec celle de l’immense majorité de nos concitoyennes, puisque 75 % d’entre elles font confiance au service public hospitalier, en proposant que ce nouveau mode d’accompagnement relève de ce dernier.

C’est la force et le devoir du service public de santé que de s’adapter, et je suis convaincue que les professionnels s’engageront volontiers dans ce nouveau challenge. La période d’expérimentation devrait d’ailleurs nous en apporter la preuve.

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 1, présenté par Mmes Cohen, Pasquet et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

1° Alinéa 1, première phrase

Remplacer les mots :

de structures dénommées

par les mots :

d’unités fonctionnelles ou services dénommés

2° Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots :

doit être attenante à 

par les mots :

constitue une unité fonctionnelle ou un service d’

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Plutôt que d’expérimenter la création de maisons de naissance aux formes juridiques incertaines, qui pratiqueront des tarifs dont on ignore tout pour l’instant, dont on ne sait pas, par conséquent, quels publics seront susceptibles de vouloir y être accueillis, et alors qu’on ne connaît pas non plus la nature juridique des établissements auxquels elles seront adossées, nous préconisons que cette expérimentation ne puisse se dérouler que dans les établissements publics de santé et dans les maternités privées à but non lucratif.

En commission, cet amendement a reçu un avis défavorable au motif que les sages-femmes qui interviendraient alors dans ces services demeureraient sous l’autorité d’un médecin.

Je comprends la motivation des professionnels concernés, mais je me demande si cette expérimentation a pour but de répondre aux besoins d’une partie des parturientes ou aux demandes des professionnels de santé. Je suis pour ma part convaincue qu’il nous faut trouver une solution médicale conciliant ces deux aspirations.

Nos concitoyennes et nos concitoyens n’accepteraient pas que le désir légitime de reconnaissance professionnelle et financière des sages-femmes prenne le pas sur des principes fondamentaux comme celui du refus de l’utilisation de moyens publics au profitation de structures pratiquant une politique tarifaire de nature à induire une sélection des patients par l’argent.

Par ailleurs, avec l’adoption de cet amendement, la navette parlementaire pourrait être mise à profit pour trouver une solution permettant de faire en sorte que les services ou unités ainsi constitués puissent être dirigés par des sages-femmes.

Pourquoi ne pas se servir de l’exemple des centres de santé ? Depuis l’adoption de la loi HPST, les établissements publics de santé ont la possibilité d’ouvrir des centres de santé et ces derniers peuvent être dirigés par des professionnels non-médecins.

Dès lors, pourquoi ne pas adopter cet amendement, qui réglerait bien des questions – tarifs, sécurité, juste utilisation des crédits publics – et nous laisserait le temps de la navette pour parfaire le dispositif afin que la direction de cette unité soit confiée aux pratiquantes elles-mêmes ? Ce serait très constructif.

M. le président. L'amendement n° 8 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard et Alfonsi, Mme Laborde et MM. Mazars, Requier et Tropeano, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

La maison de naissance doit être attenante au service de gynécologie-obstétrique de l’établissement autorisé pour cette activité, avec lequel elle passe obligatoirement une convention après avoir recueilli l'avis favorable du chef de ce service.

La parole est à M. Gilbert Barbier.

M. Gilbert Barbier. Au regard de l’exigence de sécurité, il n’est pas possible d’installer les maisons de naissance n’importe où sur le territoire : chacune d’elles doit absolument être attenante ou en tout cas très proche – peu importe l’adjectif retenu – d’un service de gynécologie-obstétrique.

J’ajoute un élément qui a été repoussé en commission mais qui me semble fondamental : cette maison de naissance ne pourra fonctionner que si le chef de service de gynécologie-obstétrique voisin approuve le principe des relations étroites entre la maison de naissance et son service puisque celui-ci devra être en mesure de répondre immédiatement à un problème qui se poserait dans la maison de naissance.

J’ai rencontré des chefs de service de gynécologie-obstétrique qui sont hostiles au principe des maisons de naissance. Faut-il leur en imposer une ? Il y va du bon déroulement de cette expérimentation que d’obtenir l’accord exprès du chef de service de gynécologie-obstétrique.

M. le président. L'amendement n° 13 rectifié, présenté par Mmes Génisson, D. Gillot, Alquier, Campion, Claireaux et Demontès, MM. Godefroy, Jeannerot et Kerdraon, Mmes Duriez et Ghali, MM. Labazée, Le Menn, Cazeau et J.C. Leroy, Mmes Meunier, Printz, Emery-Dumas et Schillinger, MM. Teulade et Vergoz, Mme Lepage et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

La maison de naissance doit être contiguë à une structure autorisée pour l'activité de gynécologie-obstétrique avec laquelle elle passe obligatoirement une convention et avec laquelle un accès direct est aménagé, permettant notamment un transfert rapide des parturientes en cas de complication.

La parole est à M. Ronan Kerdraon.

M. Ronan Kerdraon. Dans la création de ces maisons de naissance, la priorité absolue est la sécurité.

Des progrès importants ont été réalisés grâce à la médicalisation des naissances. Respecter le choix de certaines femmes pour un suivi moins médicalisé et plus personnalisé de leur accouchement doit s’accompagner de la mise en place de toutes les garanties de sécurité nécessaires vis-à-vis des parturientes et des enfants à naître dans ces maisons de naissance.

C’est pourquoi nous souhaitons préciser que ces maisons doivent être « contiguës » et non pas seulement « attenantes » à une maternité. Il s’agit ainsi de permettre, en cas de complication, un transfert rapide et facile des parturientes par un accès direct aménagé vers le service de gynécologie-obstétrique.

M. le président. L'amendement n° 2, présenté par Mmes Cohen, Pasquet et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots :

une structure autorisée

par les mots :

un établissement public de santé ou à un établissement de santé privé d'intérêt collectif autorisé

La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Dominique Watrin. La logique de cet amendement est la même que celle de l’amendement n° 1 : l’argent public doit aller exclusivement à des structures publiques ou à visée clairement non lucrative.

Si l’amendement n° 13 rectifié, qui vient d’être présenté, est adopté, il est à craindre que, en cas de difficulté, des femmes ne soient transférées dans des structures commerciales où se pratiquent d’importants dépassements d’honoraires.

J’espère que, si notre amendement n° 2 n’est pas adopté, et si des maisons de naissance sont adossées à des cliniques commerciales, les députés sauront profiter de la navette parlementaire pour prévoir que, dans de telles situations, les cliniques commerciales recevant en urgence une patiente transférée d’une maison de naissance seront contraintes d’appliquer les tarifs pratiqués dans les établissements publics de santé, c’est-à-dire sans dépassement d’honoraires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muguette Dini, auteur de la proposition de loi et rapporteur de la commission des affaires sociales. Les amendements nos 1 et 2 du groupe CRC visent à restreindre l’expérimentation sur deux plans : d’une part, les maisons de naissance seraient des unités dites « fonctionnelles » à l’intérieur des maternités ; d’autre part, elles ne pourraient être créées que dans des établissements publics et privés à but non lucratif.

En commission, nous avons estimé que ces restrictions n’entraient pas du tout dans l’esprit de la proposition de loi que j’ai déposée. En effet, celle-ci entend justement donner aux maisons de naissance une certaine autonomie, qui est consubstantielle au projet même, mais aussi indispensable pour permettre un accompagnement global et autoriser les sages-femmes libérales à y participer.

En outre, la restriction aux établissements publics et privés à but non lucratif fait courir des risques de contentieux sur le fondement d’une rupture du principe d’égalité.

La commission a donc émis un avis défavorable sur les amendements nos 1 et 2.

Les amendements nos 8 rectifié et 13 rectifié visent à reformuler la phrase de la proposition de loi qui prévoit que « la maison de naissance doit être attenante à une structure […] de gynécologie-obstétrique avec laquelle elle passe obligatoirement une convention ».

L’amendement n° 13 rectifié tend à remplacer le mot « attenante » par le synonyme « contiguë » et ajoute qu’un accès direct doit être aménagé entre les deux structures pour permettre un transfert rapide des parturientes en cas de complication.

Au regard de cette précision utile, qui n’entame pas les chances de réussite de l’expérimentation, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

Quant à l’amendement n° 8 rectifié, il prévoit également que la maison de naissance doit être attenante au service de gynécologie-obstétrique, mais il requiert en outre un avis favorable du chef de ce service avant que ne soit conclue la convention entre l’établissement et la maison de naissance. Or c’est la maternité, privée ou publique, qui s’engage et pas uniquement le chef de service, dont l’avis peut varier et qui peut, de toute façon, changer.

Considérant que l’amendement n° 8 rectifié introduit des rigidités supplémentaires et contient des dispositions qui relèvent, non de la loi, mais du cahier des charges ou du décret en Conseil d’État, la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d’abord de vous dire mon plaisir de vous retrouver à l’occasion du débat au fond sur cette proposition de loi autorisant l’expérimentation des maisons de naissance.

Avec l’amendement n° 1, Mme Cohen défend en fait les filières d’accouchement physiologique dans les maternités, telles qu’elles existent aujourd’hui. Je suis, pour ma part, tout à fait favorable au développement de salles d’accouchement physiologique dans les maternités. Pour autant, ce développement ne me semble pas en contradiction avec l’expérimentation d’une autre démarche, qui est celle des maisons de naissance. Ces deux démarches se complètent plus qu’elles ne s’opposent.

Pour cette raison, je sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, j’y serais défavorable.

Comme la commission, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 8 rectifié, car les précisions qu’il tend à apporter quant à l’organisation des relations entre la maison de naissance et la maternité relèvent de l’organisation interne de celle-ci ou de dispositions réglementaires : elles n’ont donc pas vocation à se trouver dans un texte de loi.

L’amendement n° 13 rectifié introduit avant tout un débat sémantique. Nous sommes d’accord sur le fait que la maison de naissance doit être accolée à la maternité. Est-ce le mot « attenante » ou le mot « contiguë » qui est le plus propre à assurer cette absolue proximité ? Je m’en remets, sur ce point, à la sagesse de la Haute Assemblée.

J’en viens à l’amendement n° 2.

Tout d’abord, nous ne pouvons pas, en l’état actuel du droit, établir de différences entre les établissements auxquels pourraient être accolées des maisons de naissance. Il est donc impossible de réserver le principe d’expérimentation des maisons de naissances à un certain type d’établissements de santé. L’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 2 est donc défavorable.

Je souhaite néanmoins dire à Mme Cohen et à M. Watrin que je partage une des préoccupations qu’ils ont exprimées : il est effectivement nécessaire de mettre en place des dispositifs qui nous permettent de mieux contrôler les dépassements d’honoraires, et la question des accouchements ne peut pas rester en dehors de ce débat.

Cela étant, je tiens à préciser que, en cas d’urgence et de nécessité médicale d’accueillir dans une maternité privée une femme provenant d’une maison de naissance, il va de soi – c’est la loi ! – que, s’agissant d’une mission de service public, ce sont les tarifs opposables qui s’appliqueraient. Donc, dans le cas où une femme accoucherait dans une maison de naissance et devrait être reçue en urgence dans un établissement de santé, qu’il soit public ou privé, il ne pourrait pas lui être appliqué de dépassement d’honoraires.