Mme Isabelle Debré et M. Alain Gournac. C’est vous qui l’avez voulu !

M. Jean-François Husson. C’est vous qui l’avez remis sur la table !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Mesurons bien que la décision du Conseil constitutionnel couvre un champ beaucoup plus large que celui de l’ANI et de la loi de sécurisation de l’emploi… (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.) Écouter autrui n’est vraiment pas votre fort !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Vous ne pouvez donc pas laisser le rapporteur général parler ?

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous sommes en démocratie et vous avez évidemment le droit de ne pas être d’accord, mais vous pouvez laisser au moins s’exprimer une opinion contraire à la vôtre, d’autant que, en l’occurrence, vous représentez l’opinion majoritaire !

M. Jean-Claude Lenoir. Théoriquement, la majorité, c’est vous !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je disais donc que la décision du Conseil constitutionnel couvre un champ beaucoup plus large que celui de l’ANI et de la loi de sécurisation de l’emploi puisqu’elle visait en fait toutes les clauses de désignation qui existaient antérieurement à cette loi et qui étaient maintenues après elle.

Mesurons combien il est important aujourd’hui de préserver des régimes de prévoyance intégrés qui existent, qui sont performants, qui sont appréciés dans beaucoup de branches et qui servent parfaitement l’intérêt des salariés.

La solution apportée par le Gouvernement n’est peut-être pas la construction idéale, mais elle permet au moins aujourd’hui de trouver une réponse à ce problème, qui méritait, me semble-t-il, d’être abordé autrement que par le dépôt d’amendements de suppression. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 107 rectifié, 146, 275 et 304 rectifié.

J'ai été saisi de trois demandes de scrutin public, émanant, la première, du groupe UMP, la deuxième, du groupe UDI-UC et, la troisième, du groupe socialiste.

Je rappelle que la commission et le Gouvernement ont tous deux émis un avis défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 47 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l’adoption 217
Contre 126

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

En conséquence, l’article 12 ter est supprimé et les amendements nos 181, 99 rectifié bis, 180, 147, 98 rectifié bis, 305 rectifié, 4 rectifié et 80 n’ont plus d’objet.

Pour la bonne information du Sénat, je rappelle néanmoins les termes de ces amendements.

L'amendement n° 181, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, était ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer le mot :

certains

par le mot :

les

L'amendement n° 99 rectifié bis, présenté par Mmes Procaccia, Deroche et Debré, MM. Milon, Pinton, J. Gautier, Cambon, Gilles, Savary, Cardoux, Mayet et Laménie, Mme Cayeux, M. Husson et Mmes Bruguière et Giudicelli, était ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le salarié bénéficiant à titre personnel ou en tant qu’ayant droit d’une assurance complémentaire santé à la date de signature de l’accord de branche bénéficie à sa demande d'une dispense d'affiliation.

L'amendement n° 180, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, était ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

III. – Le salarié déjà couvert par un contrat souscrit à titre individuel conserve la possibilité de refuser l’adhésion au contrat faisant suite à la clause de recommandation mentionné au I de l’article L. 912-1 du code de la sécurité sociale tout en bénéficiant de la contrepartie mentionnée au même article.

L'amendement n° 147, présenté par MM. Marseille, Roche, Vanlerenberghe et Amoudry, Mmes Dini, Jouanno et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, était ainsi libellé :

I. - Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Dans ce cas, les accords laissent aux entreprises la liberté de retenir le ou les organismes assureurs de leur choix. Ils peuvent, s’ils le souhaitent, recommander aux entreprises de s’adresser à plusieurs organismes mentionnés à l’article 1er de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques ou une ou plusieurs institutions mentionnées à l’article L. 370-1 du code des assurances, sous réserve du respect des conditions définies au II du présent article.

II. - Alinéas 10 à 13

Supprimer ces alinéas.

L'amendement n° 98 rectifié bis, présenté par Mme Procaccia, MM. Husson et Milon, Mmes Debré, Deroche et Cayeux, MM. Pinton, Gilles, Savary, Cardoux, J. Gautier, Cambon, Mayet et Laménie et Mmes Bruguière et Giudicelli, était ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

un ou plusieurs

par les mots :

au moins deux

L'amendement n° 305 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard, Alfonsi, Baylet, Bertrand, Collombat, Esnol et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, était ainsi libellé :

Alinéas 10 à 13

Supprimer ces alinéas.

L'amendement n° 4 rectifié, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, était ainsi libellé :

Alinéa 11

Remplacer les mots :

les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de prévoyance sont assujetties

par les mots :

la contribution de l'employeur destinée au financement des prestations complémentaires de prévoyance est assujettie

L'amendement n° 80, présenté par Mme Dini, était ainsi libellé :

Après l'alinéa 13

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l’affiliation des salariés ou les modalités de calcul des prestations répondent à des caractéristiques déterminées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, les accords collectifs peuvent organiser la couverture de ces risques ou la constitution de ces avantages, pour l’ensemble des entreprises de la branche, auprès d’un des organismes mentionnés au deuxième alinéa du I du présent article qu’ils constituent à cet effet et dont le champ est limité aux entreprises de la branche. Le même arrêté prévoit les modalités de dispense d’adhésion des entreprises lorsque celles-ci avaient institué antérieurement à la date d’entrée en vigueur de l’accord collectif, des couvertures identiques pour chaque risque ou avantage. »

Article 12 ter (nouveau) (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014
Article 8

Articles additionnels avant l'article 8

M. le président. L'amendement n° 63 rectifié, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Avant l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I - À la seconde phrase du septième alinéa du I de l’article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l'organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique, les mots : « qui ne peut excéder 1,8 p. 100, est fixé par décret » sont remplacés par les mots : « est fixé à 0,9 % ».

II - La perte de recettes résultant pour le fonds institué par l’article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l'organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement de bon sens tend à faire passer de 1 % à 0,9 % le taux de la cotisation versée par les établissements hospitaliers au titre du financement du fonds pour l'emploi hospitalier, le FEH.

Aux termes des différents éléments financiers rendus publics par la Caisse des dépôts et consignation, les comptes du FEH sont en effet structurellement excédentaires.

Le fonds a ainsi affiché un résultat net supérieur à 30 millions d’euros par an au cours des cinq derniers exercices, pour des dépenses de l’ordre de 180 millions d’euros.

La diminution de 0,1 point proposée tend ainsi à alléger le montant de la taxe pesant sur les établissements hospitaliers au moment où leurs comptes sont particulièrement contraints.

Par ailleurs, cette diminution ne devrait pas empêcher les comptes du FEH de rester excédentaires puisqu’ils feront théoriquement ressortir, malgré cela, à la fin 2014 un résultat net proche de 14 millions d’euros et des réserves de 27 millions d’euros.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Je comprends bien la préoccupation du rapporteur général qui consiste à tenter de cerner le juste niveau de la contribution des établissements hospitaliers au FEH, au titre du redressement de la CNRACL.

Vous voulez inscrire, monsieur Daudigny, ce taux de contribution dans la loi, alors qu’il est aujourd’hui fixé de manière réglementaire. Je solliciterai de vous le retrait de cet amendement, au profit d’un travail que nous devons engager en concertation avec l’ensemble des parties prenantes.

En effet, nous ne savons pas si le taux que vous proposez serait le taux idoine. Or nous devons évidemment permettre de garantir un fonds de roulement suffisant au FEH tout en réduisant le déficit prévisionnel de la CNRACL qui, aujourd’hui, reste trop important.

Néanmoins, nous avons besoin de répondre aux besoins de compétences des employeurs, ainsi qu’aux attentes des agents. Au fond, nous avons besoin de pouvoir fixer avec une certaine souplesse le niveau de cette juste contribution et de la cotisation afférente.

À défaut du retrait de cet amendement, je me verrai contrainte d’émettre un avis défavorable.

M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° 63 rectifié est-il maintenu ?

M. Yves Daudigny. Oui, monsieur le président. Cet amendement a été adopté par la commission et les éléments que vous venez de nous communiquer, madame la ministre, ne me permettent pas de le retirer.

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.

M. Alain Milon. Nous voterons cet amendement proposé par le rapporteur général pour deux raisons.

Premièrement, hier, nous étions contre le fait que l’on prélève de l’argent du FEH pour le donner à la CNRACL. Cela signifie en effet que le niveau des cotisations versées au fonds est trop élevé.

Deuxièmement, cette diminution d’un taux de cotisation est la seule de ce PLFSS ; tout le reste augmente ! Pour une fois que l’on nous propose une petite diminution, nous y sommes évidemment favorables. (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 63 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 8.

L'amendement n° 82 rectifié ter, présenté par MM. Frassa, Cantegrit, Cointat, del Picchia, Duvernois et Ferrand et Mme Kammermann, est ainsi libellé :

Avant l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L’article L. 136-6 est ainsi modifié :

a) Le I bis est abrogé ;

b) À la première phrase du premier alinéa du III, le mot : « à » est remplacé par le mot : « et » ;

2° L’article L. 136-7 est ainsi modifié :

a) Le I bis est abrogé ;

b) Le second alinéa du VI est supprimé ;

3° L’article L. 245-14 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « mentionnés aux I et II de » sont remplacés par les mots : « visés à » ;

b) La seconde phrase est supprimée ;

4° Au premier alinéa de l’article L. 245-15, la deuxième occurrence du mot : « à » est remplacée par le mot : « et ».

II. – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :

1° La seconde phrase du premier alinéa du I de l’article 15 est supprimée ;

2° À la première phrase du I de l’article 16, les références : « aux I et I bis » sont remplacées par la référence : « au I ».

III. – Les 1° et 3° du I et le 1° du II s’appliquent aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2014.

IV. – Les 2° et 4° du I et le 2° du II s’appliquent aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter de la date de publication de la présente loi.

V. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à IV ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Christophe-André Frassa.

M. Christophe-André Frassa. L’article 29 de la loi de finances rectificative pour 2012 soumet aux prélèvements sociaux, au taux global de 15,5 %, les revenus immobiliers – revenus fonciers et plus-values immobilières – de source française perçus par les personnes physiques fiscalement domiciliées hors de France.

Les revenus fonciers sont désormais imposés aux prélèvements sociaux dus sur les revenus du patrimoine à un taux de 15,5 %, et les plus-values immobilières sont imposées aux prélèvements sociaux sur les produits de placements recouvrés à la source – notamment par l’intermédiaire des notaires –, à l’instar des personnes fiscalement domiciliées en France déjà assujetties à ces prélèvements.

Ces mesures, qui s’ajoutent aux prélèvements déjà appliqués en matière d’imposition sur le revenu, se sont traduites, pour les 60 000 contribuables concernés, par une hausse d’imposition moyenne de près de 4 200 euros.

Présentées au nom de l’universalité des prélèvements sociaux et de la cohérence de l’impôt, elles comportent toutefois nombre d’effets pervers.

Ces mesures ont tout d’abord pour conséquence de taxer les plus-values foncières à près de 50 %, ce qui rend les investissements fonciers nettement moins attractifs que d’autres placements.

Elles créent ensuite des risques de double imposition, les revenus fonciers et les plus-values immobilières faisant parfois l’objet, conformément aux conventions fiscales en vigueur, d’une taxation du pays de résidence.

Elles sont en outre contraires au principe d’équité. La précédente majorité avait repoussé l’idée d’un assujettissement des plus-values foncières des non-résidents aux cotisations sociales, au motif que ces derniers ne bénéficient pas des prestations sociales financées par la sécurité sociale.

Enfin, ces mesures ne tiennent pas compte du refus de la Cour de justice de l’Union européenne d’étendre la CSG et la CRDS aux revenus de source française dès lors que les non-résidents sont assujettis à une imposition sociale dans un autre État membre.

Après consultation des autorités françaises sur la conformité au droit européen de l’extension de la CSG et de la CRDS aux revenus immobiliers perçus par les non-résidents – procédure EU Pilot 2013/4168 –, la direction générale de l’emploi, des affaires sociales et de l’inclusion de la Commission européenne a clôturé le dossier par un avis négatif. Une procédure d’infraction contre la France a, depuis, été ouverte.

Le présent amendement vise à revenir sur ce mécanisme injuste et à préserver le régime fiscal des expatriés.

Alors que la majorité souhaite progressivement alourdir ce régime, comme le met en évidence la proposition émise à la fin de l’année 2012 visant à exiger des Français établis hors de France le paiement du différentiel entre les impôts dont ils s’acquittent à l’étranger et ceux dont ils devraient s’acquitter en France, l’adoption de cet amendement constituerait un signal positif fort à l’intention de nos compatriotes expatriés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Les auteurs de cet amendement proposent de revenir sur les dispositions de l’article 29 de la loi de finances rectificative pour 2012, soumettant aux prélèvements sociaux, au taux global de 15,5 %, les revenus immobiliers – revenus fonciers et plus-values immobilières – de source française perçus par les personnes physiques fiscalement domiciliées hors de France.

L’alignement du régime social applicable aux revenus immobiliers de source française perçus par les personnes physiques fiscalement domiciliées hors de France sur celui des personnes fiscalement domiciliées sur le territoire me paraît tout à la fois juste et équitable.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Juste en ce qu’il porte sur des revenus de nature identique, provenant de biens situés sur le territoire national ; équitable en ce qu’il concerne l’ensemble des investisseurs propriétaires de biens situés en France et domiciliés hors de France.

Cette mesure concerne ainsi près de 60 000 ménages bénéficiant en moyenne de 12 000 euros par an de revenus fonciers sur les biens situés en France au titre des loyers, qu’il s’agisse d’investisseurs étrangers sans lien particulier avec la France, d’expatriés – personnes actives ou retraités installés à l’étranger – ayant conservé des biens immobiliers en France, ou de frontaliers habitant un pays limitrophe, travaillant en France, affiliés à la sécurité sociale française et disposant d’une résidence secondaire ou d’un bien mis en location en France.

Au vu de ces différents éléments, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.

Je veux d’abord rappeler que la mesure prise par le Gouvernement dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2012 était une mesure d’équité puisqu’elle visait à ce que des contribuables, résidant ou non en France, soient traités de la même manière : rien ne justifie en effet que les mêmes dispositifs fiscaux ne s’appliquent pas à l’ensemble des ressortissants français, où qu’ils soient domiciliés.

Je veux enfin insister sur le fait que la mesure adoptée l’an dernier s’applique aussi dans le cadre de conventions internationales. Elle soumet donc les revenus aux prélèvements sociaux pour autant que les conventions internationales aient réservé à la France l’imposition des revenus de source immobilière, ce qui est généralement le cas en application du principe de territorialité. Il n’y a donc pas et il ne peut y avoir, contrairement à ce que vous avez indiqué, monsieur le sénateur, de double imposition.

Les arrêts que vous mentionnez en matière de droit communautaire ne s’appliquaient qu’aux revenus d’activité, ce qui est légitime : le droit communautaire vise en effet à assurer la coordination de régimes de sécurité sociale et à éviter, entre autres, le double assujettissement aux cotisations sociales des revenus du travail des travailleurs migrants ou transfrontaliers.

La même lecture ne peut s’appliquer à des revenus du patrimoine. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 9 août 2012, validant l’article 29 de la loi de finances rectificative pour 2012 que vous souhaitez abroger par votre amendement, précise que les prélèvements sociaux sur les revenus du capital sont des impositions de toutes natures et non des cotisations sociales. Ces prélèvements ne sont pas contributifs, n’ouvrent pas droit à des prestations sociales. Ces revenus n’étant pas imposés dans l’État de résidence du contribuable, il n’y a donc pas de double imposition, ce que le droit communautaire cherche justement à éviter. Bien au contraire, ne pas assujettir ces revenus aboutirait à une forme de double non-imposition.

M. le président. La parole est à M. Christophe-André Frassa, pour explication de vote.

M. Christophe-André Frassa. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, j’ai bien entendu vos remarques. Je pourrais presque dire que je les comprends ! Ce qui me désole, néanmoins, c’est que la France n’arrive pas à tirer les conséquences de jurisprudences européennes.

Vous évoquez, dans vos avis, la décision du Conseil constitutionnel. Pourtant, il n’aura aucune force face à une décision de la CJUE – Cour de justice de l’Union européenne. Les problématiques auxquelles vous faites référence ne tiennent pas compte, par exemple, de l’arrêt de la CJUE de 2000. Je parle d’expérience, puisque je m’étais constitué partie civile dans cette affaire !

J’ai l’impression de faire un bond de plusieurs années en arrière. En 2004, lorsque nous avions déposé une plainte contre l’État français sur l’application de la CSG et de la CRDS aux revenus du travail, on nous avait répondu que tout était parfaitement bordé, que l’administration fiscale avait évidemment longuement mûri son dispositif… Elle avait si bien fait qu’elle commet aujourd'hui la même erreur !

Je trouve un peu navrant que la CJUE soit ainsi amenée, une nouvelle fois, de faire mettre à la France un genou à terre en lui demandant de se rendre à l’évidence : pour l’Union européenne, la CSG et la CRDS sont des cotisations sociales. Seule l’administration fiscale maintient, contre vents et marées, qu’il s’agit d’impôts.

Nous attendrons donc la décision de la CJUE. C’est d’autant plus fâcheux que cela coûtera cher à l’État, qui devra rembourser les sommes indûment perçues.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 82 rectifié ter.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’amendement.)

M. le président. L’amendement n° 162, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le IV de l’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale est abrogé.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Cet amendement a pour objet de renforcer la fiscalité sociale sur les retraites chapeaux, ces mécanismes de rémunération complémentaire profitant essentiellement à une minorité de cadres dirigeants et aux salariés qui sont déjà parmi les mieux payés.

Cette mesure nous paraît d’autant plus légitime que le Conseil constitutionnel, se prononçant sur la loi de finances de 2013, a supprimé la tranche marginale de 21 %, afin de ramener la taxation marginale pesant sur les retraites chapeaux à 68,34 %. Naturellement, nous déplorons l’analyse faite par le Conseil constitutionnel, qui, répondant à une logique purement fiscale, éclipse totalement le fait qu’il s’agit d’une mesure de solidarité.

Il y a pourtant de quoi faire ! En effet, en plus des bonus, stock-options et autres actions gratuites, la moitié des patrons du CAC 40 bénéficient d’une retraite chapeau. L’année dernière, à la même époque, un grand hebdomadaire nous apprenait que ces mécanismes particuliers permettaient à ces personnes de bénéficier d’une rente moyenne de 545 000 euros, venant s’ajouter à la pension du régime obligatoire. Au final, un PDG à la retraite reçoit une pension 41 fois supérieure à celle d’un retraité français. Est-ce à dire que les cadres dirigeants produisent 41 fois plus de richesses que les salariés ? Le groupe CRC est loin d’en être convaincu.

Les entreprises en difficulté, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ne sont pas en reste, il s’en faut. Pour leur rapport sur le sauvetage – coûteux – de Dexia, les magistrats de la Cour des comptes ont épluché les rémunérations versées par la banque franco-belge, y compris après qu’elle a été renflouée à coups de fonds publics. Les résultats sont particulièrement intéressants : on y apprend que six dirigeants français de la banque, en poste jusqu’en 2008, ont perçu d’importantes retraites chapeaux. Ainsi, Pierre Richard, l’ancien patron opérationnel de Dexia, a perçu à la fois une retraite au titre de la fonction publique, une rémunération de 400 000 euros en 2006 et 2007 en tant que président du conseil d’administration et une rente de 563 750 euros au titre de sa retraite chapeau. Cette rente a été réduite de moitié, à 300 000 euros, aux termes d’un accord signé le 13 mars 2013, après que le conseil d’administration eut décidé, fin 2012, d’engager un recours contre son ancien président.

Ce seul exemple suffit à nous conforter dans l’idée qu’il serait tout à fait utile d’adopter la mesure que nous proposons avec cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à supprimer l’exonération de CSG et de cotisations sociales prévue pour les contributions des employeurs au financement des retraites chapeaux.

Les avantages donnés à une certaine catégorie de nos compatriotes par le biais des retraites chapeaux ont été largement rectifiés ces dernières années. Les retraites chapeaux relevant du code de la sécurité sociale subissent une contribution, due par l’employeur, qui a été doublée par l’article 32 de loi de finances rectificative pour 2012. Les taux sont maintenant de 24 %, 32 % et 48 %, selon la catégorie de retraites chapeaux considérée.

Une contribution additionnelle de 30 %, due par l’employeur à partir de huit plafonds de la sécurité sociale, et une contribution à la charge du bénéficiaire s’ajoutent à l’impôt sur le revenu et aux contributions sociales, dont les taux ont été modifiés en loi de finances pour 2012, pour aller jusqu’à 21 % de la rente.

Au total, le taux de prélèvement global est déjà très élevé ; il ne me paraît donc pas judicieux d’aller plus loin. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Les contributions spécifiques sur les retraites chapeaux à la charge de l’employeur et de leur bénéficiaire ont précisément pour objet, et pour effet, de compenser l’absence de cotisations sociales, de CSG et de CRDS, sur le financement par l’employeur de ces avantages.

En effet, la contribution de l’employeur aux retraites chapeaux ne peut pas faire l’objet d’un prélèvement à la charge du salarié, car ces avantages, au stade de leur financement par l’employeur, ne sont ni certains pour le bénéficiaire ni individualisés. Ils ne le deviennent qu’au moment du départ en retraite.

C’est pourquoi il existe une contribution spécifique sur les rentes à la charge du bénéficiaire, qui vise à rattraper l’absence de CSG sur le financement de l’employeur. Ce mécanisme exclut la possibilité d’assujettir à des prélèvements sociaux comme la CSG les sommes que l’employeur consacre à l’acquisition de garanties.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement ne peut être favorable à cet amendement.