M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Ces deux amendements strictement identiques me semblent satisfaits.

En effet, comme nous avons eu l’occasion de nous en expliquer en commission, les OPCA de branche pourront réaliser les abondements complémentaires en fonction précisément des priorités définies par la branche dont ils relèvent dès lors qu’un accord aura été signé au sein de celle-ci.

La situation est évidemment différente pour les OPCA interprofessionnels, à savoir Opcalia et AGEFOS PME, qui pourront traduire les besoins identifiés à l’échelle nationale ou dans des champs plus larges que celui d’une branche particulière. Cette exigence me paraît satisfaite.

C’est pourquoi la commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Le rapporteur a été extrêmement clair : ces amendements sont satisfaits.

Au cas où il y aurait une incompréhension, essayons de voir d’où elle vient. On ne peut pas confondre l’OPCA, qui est un outil à la disposition d’une branche, par exemple, ou d’un accord interprofessionnel, avec ceux qui sont décideurs, les signataires de l’accord dans la branche. S’il existe un accord de branche, l’OPCA abondera automatiquement.

Il faut donc faire attention à ne pas prendre l’OPCA comme un organisme en soi autonome. Il s’agit d’un organisme entre les mains des partenaires sociaux. Certes, les OPCA jouent parfois un rôle si important (M. Jean-Marie Vanlerenberghe s’exclame.) que l’on peut éventuellement considérer qu’ils ont une sorte d’autonomie, mais ce n’est pas là ce que nous souhaitons, les uns et les autres. Nous souhaitons que les OPCA, qui sont d’ailleurs moins nombreux grâce à la réforme, restent des outils entre les mains de ceux qui sont légitimes pour conclure ce type d’accord, à savoir les partenaires sociaux.

Votre amendement est donc satisfait dans les faits, mais je voulais ajouter cette argumentation qui me paraît pouvoir toucher votre sens de la légitimité représentative.

M. le président. Monsieur Cardoux, l'amendement n° 87 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Noël Cardoux. Monsieur le ministre, j’entends bien vos arguments. Cependant il me semble que, depuis hier, nous sommes toujours dans la notion de pari et d’éventualité, si je puis m’exprimer ainsi.

Vous nous dites, les uns et les autres, – et je suis tout prêt à l’admettre – que, normalement, cela devrait fonctionner comme ça, que les amendements sont satisfaits par le texte, que c’est déjà prévu… Cependant, vous le savez, pour reprendre un dicton populaire, « cela va sans dire, mais cela va encore mieux en le disant ».

C’est le sens de nos amendements, qui visent à bien clarifier la situation. Dans ce contexte, sans vouloir engager de polémique inutile, pour donner un signe, nous maintenons l’amendement n° 87 rectifié.

M. le président. Madame Jouanno, l'amendement n° 158 est-il maintenu ?

Mme Chantal Jouanno. Non, je le retire, monsieur le président. Ainsi, nous ne voterons que sur un amendement.

M. le président. L'amendement n° 158 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 87 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 300, présenté par M. Jeannerot, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéas 54 et 62

Remplacer les mots :

facteurs de pénibilité

par les mots :

facteurs de risques professionnels mentionnés à l'article L. 4121–3–1

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 300.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 155, présenté par Mme Jouanno, M. Vanlerenberghe et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 54

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les accords mentionnés au précédent alinéa prévoient que l'abondement du compte personnel de formation est effectué de façon inversement proportionnelle au niveau de formation initiale des salariés de l'entreprise. 

La parole est à Mme Chantal Jouanno.

Mme Chantal Jouanno. Cet amendement va beaucoup vous plaire. En effet, il fait suite à la discussion que nous avons eue hier soir au sujet de la nécessité que ces formations professionnelles bénéficient davantage à ceux qui en ont le plus besoin.

Il s’agit ici encore de ce même débat : il faut tout de même se souvenir qu’en 1971 la formation professionnelle était conçue comme une seconde chance, ce qui n’est pas du tout le cas aujourd'hui. En effet, l’enquête réalisée en 2013 par le Centre d’études et de recherches sur les qualifications, le Céreq, montre très clairement que la demande de formation professionnelle augmente avec le niveau de formation initiale et que les demandeurs d’emploi représentent moins de 12 % des fonds de la formation professionnelle.

En France, comme on le voit dans toutes les enquêtes, le diplôme a toujours une valeur essentielle. C’est pourquoi il est important que les formations délivrent un diplôme. Il faut donc accorder plus d’heures de formation, donc plus d’heures du CPF, à ceux qui, par leur formation initiale, ont moins de diplômes, et moins d’heures à ceux qui ont plus de diplômes. Il faut donc accorder moins d’heures aux cadres afin de permettre un « surabondement » pour les moins qualifiés.

Nous rejoignons ainsi une des préconisations de la Cour des comptes, qui vous est chère : en 2013, dans son rapport sur le marché du travail, elle affirmait très clairement que les dispositifs concernant le marché du travail n’étaient pas suffisamment ciblés.

C’est pourquoi nous proposons cet amendement, qui est rédigé de manière large, car il vise à fixer un objectif ; il devra ensuite être adapté par les partenaires sociaux. Aux termes de cet amendement, l’abondement du compte personnel de formation est effectué de façon inversement proportionnelle au niveau de formation initiale de son titulaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Ma chère collègue, nous comprenons votre intention, qui est louable. Cependant, vous contribuez à véhiculer une idée bien française selon laquelle toute sa vie on doit porter le poids de sa formation initiale.

M. Claude Jeannerot, rapporteur. En réalité, lorsque les salariés capitalisent de l’expérience professionnelle, je ne suis pas convaincu que les niveaux de formation initiale restent le critère le plus discriminant. En revenir sans cesse au niveau de formation initiale ne me semble pas permettre de prendre en compte la totalité de ce qui fait réellement l’expérience professionnelle et de ce qui fait un parcours professionnel.

Je pense donc qu’il faut laisser aux entreprises et aux branches le soin de définir la politique de formation qui leur est adaptée et qui, de toute façon, tel que le système a été organisé, bénéficiera aux salariés les moins qualifiés.

Faisons confiance aux partenaires chargés de prendre en compte les vrais critères. Ces derniers ne sauraient se limiter à la formation initiale.

Aussi, l’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Je ne peux pas vous cacher que je suis très sensible à l’esprit de cet amendement, madame Jouanno.

En effet, il correspond très exactement à ce que nous souhaitons : en tenant compte non seulement des rapports, mais aussi des réalités que nous connaissons, nous souhaitons que ceux qui ont le plus besoin de formation bénéficient le plus des moyens de la formation professionnelle.

Ce n’est évidemment pas le cas aujourd'hui. Il s’agit là de l’une des raisons fondamentales de la réforme de la formation professionnelle qui vous est proposée.

Cet amendement répond-il à ce souhait ? Dans son esprit, oui, puisque les termes « inversement proportionnelle » expriment bien cela :…

M. Michel Sapin, ministre. … si vous avez suivi une formation moins importante au départ, vous avez droit à plus de formation par la suite – c’est là ce que vous voulez exprimer. Je suis donc sensible à cet amendement.

Toutefois, je vois deux inconvénients dans la rédaction que vous proposez. Je cherchais en moi-même, mais je n’ai pas réussi, pour l’instant, à trouver les termes adéquats pour les remplacer.

Le premier inconvénient réside non pas dans la sanctuarisation, mais dans la mise en enfer de la formation initiale des salariés. (M. Jean-Marie Vanlerenberghe s’exclame.) Cela a pour effet de définir tout le reste uniquement par ce que l’on a acquis à l’âge de quatorze ans, seize ans, dix-huit ans, vingt ans ou vingt-huit ans, en fonction de la durée de ses études. Quelque chose me gêne donc ici.

J’en viens au second inconvénient. Les termes « inversement proportionnelle » sont à la fois très expressifs, car ils signifient bien que l’on donne beaucoup plus à ceux qui ont moins, mais il s’agit aussi d’une formule mathématique. Je suis très mauvais en mathématique, mais il me semble bien que cela veut dire quelque chose du point de vue mathématique. Je ne voudrais pas que, par conséquent, cette disposition devienne une règle si contraignante pour les partenaires sociaux qu’ils ne puissent pas s’adapter aux situations individuelles des uns et des autres.

Voilà les raisons pour lesquelles, malgré un sentiment d’adhésion à l’idée qui sous-tend votre amendement, je ne peux pas donner un avis favorable à cet amendement dans sa rédaction actuelle.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Je rependrai de nombreux éléments de l’argumentaire de M. le ministre. La formule « de façon inversement proportionnelle au niveau de formation initiale » est problématique. Comment compter un CAP ou un BEP ? Cela serait un énorme travail. Je sais que le Gouvernement pourrait s’en charger par décret, mais ce serait difficile.

Cependant, je suis moi aussi sensible à l’intention des auteurs de l’amendement. Le compte personnel de formation doit aider davantage ceux qui ont peu de formation de base pour qu’ils puissent combler leur retard. C’est ce qu’on appelle l’égalité des chances. Elle consiste à permettre le rattrapage des personnes qui n’ont pas bénéficié des mêmes chances au départ. Cela suppose de leur consacrer des moyens spécifiques.

Le compte personnel de formation a une double nature. Il a d'abord une nature assurantielle, héritée des Trente Glorieuses, à l’époque du plein-emploi. On travaille, on obtient des points pour la retraite ; on travaille, on obtient des points pour la formation. C’est le système des Trente Glorieuses. Les partenaires sociaux en sont l’expression.

Comme on l’a vu au moment du débat sur les retraites, les choses ne sont plus si simples aujourd'hui. La précarité s’installe en France, avec son lot de vies et de carrières brisées. Comment en tenir compte ? Notre système de retraites était fondé sur la situation de plein-emploi des Trente Glorieuses : on arrivait sans problème au nombre d’annuités requis. Aujourd'hui, la situation a changé, à cause de la crise et de la précarité qui en découle. Il faut en tenir compte. C'est la raison pour laquelle nous avons mis en place, à côté du système d’annuités, un système permettant de prendre en compte la précarité, les interruptions de carrière pour élever un enfant, etc.

Nous sommes au même carrefour en matière de formation professionnelle. Quand on travaille, il est normal qu’on obtienne des droits à formation afin d’améliorer son savoir-faire, voire de changer d’orientation. C’est le système des Trente Glorieuses. Cependant, il faut désormais tenir compte de la crise et de la précarité. Certaines personnes sortent de l’éducation nationale sans diplôme après s’être ennuyées pendant une quinzaine d’années. Ces personnes subissent une triple peine : elles se sont embêtées, elles ont eu de mauvaises notes, elles sortent sans diplôme. Il ne s’agit pas de débattre maintenant de notre système d’éducation sélectif qui fait qu’un tiers des élèves s’embêtent et sortent sans diplôme et donc sans perspectives professionnelles.

Mme Catherine Génisson. Certains s’embêtent mais ont quand même des diplômes !

M. Jean Desessard. Tant mieux pour eux ! La situation est pire pour ceux qui se sont embêtés longtemps et n’ont pas obtenu de diplôme.

Comme nous l’a expliqué M. le ministre, le projet de loi prévoit de mettre en place, à côté du système assurantiel, dans lequel on obtient des droits à formation en travaillant, un système permettant d’abonder le compte de formation des travailleurs précaires, des personnes en situation de handicap, et plus largement des personnes rencontrant des difficultés particulières.

Monsieur le ministre, je fais confiance à ce double système que vous nous proposez. Il comporte à la fois un socle, qui correspond à la situation de plein-emploi des Trente Glorieuses, et une caisse qui permet de tenir compte des situations de précarité et de donner un coup de pouce à ceux qui n’ont pas bénéficié des mêmes chances au départ, afin qu’ils puissent combler leur retard. Même si votre amendement est intéressant, madame Jouanno, je m’en tiens à la logique de ce double système, avec un socle de 150 heures et un abondement complémentaire pour les personnes qui sont dans une situation difficile : précarité, manque de formation, handicap, etc.

M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.

M. Jean-Noël Cardoux. Je pense qu’il existe un certain accord dans cet hémicycle sur le problème de la formation des personnes les plus éloignées de l’emploi, qui sont en situation de précarité. Hier, ont été proposés un certain nombre d’amendements visant à aider ces personnes. Je ferai référence à ceux que notre groupe a présentés. Un amendement de Jean-Claude Carle prévoyait ainsi de réunir au sein d’une formation unique l’acquisition des savoirs de base et une formation qualifiante, afin de permettre à certains jeunes de revenir sur le marché du travail tout en acquérant les savoirs qu’ils n’ont pas pu acquérir au cours de leur formation initiale. Nous avions également présenté un amendement tendant à relever à 250 heures le plafond du compte personnel de formation pour les demandeurs d’emploi et les titulaires du revenu de solidarité active, le RSA.

L’amendement de Chantal Jouanno va dans le même sens. Si nous nous sommes abstenus hier sur l’amendement visant à déplafonner totalement le compte personnel de formation, c’est simplement parce qu’un déplafonnement total déstructurerait l’accord national interprofessionnel, l’ANI. Nous n’en partageons pas moins l’objectif de faire mieux et plus pour les personnes éloignées de l’emploi.

Dans sa rédaction actuelle, l’amendement de Chantal Jouanno affiche une volonté très forte, qui va dans le bon sens, mais sa mise en œuvre ne serait pas facile. Une fois n’est pas coutume, monsieur le ministre, je fais appel à la voie réglementaire : l’amendement pourrait charger le Gouvernement de mettre cette disposition en musique par décret. Puisque nous sommes d'accord sur les objectifs, nous pourrions donner la main au Gouvernement. Notre volonté commune est de venir en aide à ceux qui en ont le plus besoin.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je crois que nous sommes au cœur du problème. Monsieur le ministre, vous avez la possibilité d’envoyer un signe fort en reprenant les propositions qui vous sont faites. Il ne s’agit pas d’imposer une règle systématique, mais de poser un principe : l’abondement du compte personnel de formation serait effectué de façon inversement proportionnelle au niveau de formation.

Il faut définir des priorités. Les choix budgétaires en découlent. Comme cela a été moult fois souligné, l’enveloppe est fermée. Par conséquent, il faut des principes de choix pour déterminer les priorités. Le principe d’un abondement inversement proportionnel au niveau de formation me paraît essentiel.

Ensuite, il y a la question de la mesure du niveau de formation. Je pense qu’il ne faut pas se fonder uniquement sur la formation initiale. Peut-être Chantal Jouanno envisageait-elle elle-même d’aller plus loin. Il y a la formation initiale, mais aussi la formation acquise. L’amendement pourrait être rectifié en ce sens. Il me semble que cette proposition est consensuelle.

M. le président. La parole est à Mme Chantal Jouanno, pour explication de vote.

Mme Chantal Jouanno. Monsieur Desessard, nous ne sommes plus dans la partie socle, mais bien dans la partie abondement.

La rédaction de mon amendement a fait l’objet de plusieurs remarques. Monsieur Savary, vous venez de dire que le niveau de formation initiale n’était pas un critère suffisant. Je rappelle tout de même qu’il joue encore énormément. D’après une étude réalisée par l’INSEE en 2013, parmi les actifs occupant un emploi, 66 % des personnes ayant un diplôme d’un niveau égal ou supérieur à bac+2 ont suivi une formation professionnelle dans l’année, contre 25 % des personnes n’ayant aucun diplôme. Vous le voyez, le niveau de formation initiale a toujours – malheureusement – un impact énorme sur l’accès à la formation professionnelle. Cela étant, je suis disposée à mentionner également la formation acquise, ou d’autres éléments, dans mon amendement. On peut travailler sur ce sujet ; c’est notre rôle de législateur.

Quant à la formule « de façon inversement proportionnelle », elle vise à fixer un objectif. Peut-être existe-t-il d’autres expressions plus adaptées, dans la mesure où cette formule peut se lire de manière plus ou moins ouverte.

Je reviens sur ce que nous avons dit lors de la discussion générale. Nous sommes presque à fronts renversés. Vous nous dites qu’il faut faire confiance aux partenaires sociaux pour qu’ils donnent plus à ceux qui ont moins. Le problème, c’est qu’on leur fait confiance depuis 1971, et que les résultats sont mauvais. À mon sens, il est légitime que le législateur leur fixe l’objectif de faire en sorte que ceux qui ont le moins bénéficient le plus de la formation professionnelle. Cet objectif pourrait éventuellement être détaillé par décret, comme l’a proposé Jean-Noël Cardoux. Il appartiendrait ensuite aux partenaires sociaux d’adapter les dispositions branche par branche. Monsieur le ministre, je suis tout à fait ouverte à des modifications rédactionnelles de mon amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Michel Sapin, ministre. Je cherche à traduire dans le projet de loi la préoccupation qui nous anime tous. On peut avoir des divergences sur les mots, car certains mots pourraient avoir des conséquences inversement proportionnelles à l’objectif visé. Je ne voudrais pas qu’il en soit ainsi.

Au fond, de quoi parlons-nous ? Vous avez raison, madame Jouanno, nous parlons de l’abondement. Que prévoit-on en plus du socle ? C’est un point très important, puisque c’est ce qui permettra de corriger une forme d’échec du système actuel : ce ne sont pas les publics les plus prioritaires qui bénéficient de la formation professionnelle.

Il s’agit de prévoir quelque chose en plus du socle offert à tout le monde. Ce complément sera le fruit d’un accord entre les partenaires sociaux, au niveau de l’entreprise, du groupe, de la branche, etc. Nous fixons un objectif aux partenaires sociaux : le complément doit profiter aux catégories de salariés mentionnées dans le projet de loi. Nous sommes tous d'accord sur ce point. En effet, certains d’entre vous ont proposé de relever le plafond d’heures de formation pour ces catégories de salariés, et en fin de compte on a compris que ce n’était pas la bonne manière de faire. La bonne manière de faire, c’est celle dont nous discutons en ce moment.

L’alinéa 54 de l’article 1er évoque un certain nombre de salariés prioritaires, « les salariés exposés à des facteurs de pénibilité, les salariés occupant des emplois menacés par les évolutions […] technologiques et les salariés à temps partiel ». Il répond ainsi à la préoccupation que beaucoup ont exprimée. Toutefois, je comprends que certains puissent souhaiter que l’on mentionne aussi, éventuellement en tête de liste, les salariés « les moins qualifiés ». Je suis donc prêt à déposer un amendement en ce sens, afin de satisfaire les demandes qui viennent d’être formulées. (M. Jean Desessard applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Monsieur le ministre, je vous remercie de l’écoute dont vous avez fait preuve. Vous avez parfaitement compris notre intention. La seule difficulté portait sur la rédaction. Votre proposition va dans notre sens ; j’allais d'ailleurs vous proposer de parler de qualification plutôt que de formation initiale. De fait, c’est bien le niveau de qualification qui est en jeu. Quant à la formule « de façon inversement proportionnelle », elle ne visait qu’à donner une indication. Cependant, je reconnais qu’il faut la définir plus précisément. Il ne s’agit pas d’appliquer une règle mathématique : ce serait totalement stupide.

Au bénéfice de ces observations, nous acceptons votre proposition, monsieur le ministre.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Jeannerot, rapporteur. M. le ministre a largement anticipé sur mon intervention. Je partage les arguments qu’il a employés. Je pense qu’il faut revoir la formulation de l’amendement. Comme je l’ai souligné tout à l'heure, on ne peut pas s’en tenir au critère du niveau de formation initiale, car il n’est pas pertinent.

J’ajoute pour Mme Jouanno que nous ne sollicitons pas les partenaires sociaux sans fondement, puisque, en même temps qu’un appel à leur confiance, nous souhaitons, au travers de ce texte, mettre en place une organisation et des circuits de financement permettant de garantir que les principaux bénéficiaires des formations seront ceux qui en ont le plus besoin. Il y a donc bien les deux aspects : confiance aux partenaires sociaux et organisation appropriée.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants afin de permettre la mise en forme puis la distribution de l’amendement du Gouvernement.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures trente, est reprise à quinze heures trente-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Je suis donc saisi d’un amendement n° 383, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :

Alinéa 54

Après les mots :

en particulier les salariés

insérer les mots :

les moins qualifiés, les salariés

Mme Chantal Jouanno. Je retire mon amendement n° 155, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 155 est retiré.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 383 ?

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Monsieur le président, je ne peux donner que mon avis personnel, la commission n’ayant pas eu à connaître de cet amendement. À la lumière des discussions que nous venons d’avoir, je suis évidemment favorable à cet amendement présenté par le Gouvernement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 383.

(L'amendement est adopté.) – (Mme Christiane Demontès applaudit.)

M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

L'amendement n° 32, présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud, M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 54

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 6323–13–1. – Le compte personnel de formation est abondé par l’entreprise à la fin de tout contrat à durée déterminée au moment du versement de l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L. 1243–8, à due proportion de la durée du contrat dans l’entreprise, à hauteur de vingt heures par année de travail. Un décret précise les dispositions de cet abondement.

II. – Alinéa 55

Remplacer la référence :

et L. 6323–13

par les références :

, L. 6323–13 et L. 6323–13–1

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Cet amendement se situe dans la même logique de prise en compte des salariés menacés, en l’occurrence les salariés en fin de contrat à durée déterminée, lesquels sont tributaires des aléas de la conjoncture économique pour retrouver un emploi. Il tend donc à prévoir que leur compte personnel de formation soit abondé de façon plus importante.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Notre collègue Jean Desessard suggère qu’un abondement complémentaire du compte personnel de formation soit apporté par l’employeur à l’issue d’un CDD pour compenser le caractère précaire dudit contrat de travail.

Cette hypothèse n’a pas été retenue par les partenaires sociaux dans l’accord. Je rappelle, comme tout à l’heure, que, à l’issue d’un CDD, quel que soit le statut de la personne, c’est-à-dire qu’elle devienne demandeur d’emploi ou salariée dans une autre entreprise, de nombreux abondements complémentaires seront mobilisables et pourront donc transformer son compte personnel de formation en projet de formation.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Même avis.

M. Jean Desessard. Je retire cet amendement, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 32 est retiré.

L'amendement n° 33, présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud, M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 54

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 6323–13–1. – Le compte personnel de formation est abondé par l’entreprise lorsqu’un salarié est licencié au moment du versement de son indemnité de licenciement telle que prévue à l’article L. 1234–9. La hauteur et les modalités de cet abondement sont fixées par décret.

II. – Alinéa 55

Remplacer la référence :

et L. 6323–13

par les références :

, L. 6323–13 et L. 6323–13–1

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. La musique commence à être connue ! Cet amendement concerne les salariés licenciés avec une indemnité de licenciement. Nous restons dans la même logique en demandant que les accords de branche, à partir du moment où ils existent, puissent prévoir un effort pour ces personnes. Cependant, ayant retiré mon amendement précédent, qui portait sur une autre catégorie particulière de salariés, je ne peux que retirer celui-là dès à présent pour tenir compte des arguments de M. le rapporteur.

M. le président. L’amendement n° 33 est retiré.

Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 76 rectifié, présenté par M. Cardoux, Mmes Boog, Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. de Raincourt, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Husson, Mme Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Milon et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary, Reichardt et Mayet, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 58

Après les mots :

sont les formations mentionnées

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

à l’article L. 6323-6 qui figurent sur une liste unique par région élaborée par les conseils régionaux de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles, après concertation avec les commissions paritaires nationales de l’emploi des différentes branches, le comité paritaire interprofessionnel national pour l’emploi et la formation et le comité paritaire interprofessionnel régional pour l’emploi et la formation.

II. – Alinéas 59 à 62

Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :

« Ces listes sont transmises au Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles.

« Ces listes sont révisées annuellement. 

La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.