M. Roger Madec. Monsieur le secrétaire d’État, l’article 76 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a créé un régime public de retraite additionnelle et obligatoire, dénommé « retraite additionnelle de la fonction publique » par le décret n° 2004–569 du 18 juin 2004 relatif à la retraite additionnelle de la fonction publique, modifié notamment les 30 décembre 2010 et 28 décembre 2011.

L’établissement de retraite additionnelle de la fonction publique, l’ERAFP, est l’établissement public administratif chargé de la gestion du régime de retraite additionnelle de la fonction publique, qui permet aux 4,6 millions de fonctionnaires concernés d’acquérir des droits à une retraite additionnelle. Ce régime est financé à parité par les fonctionnaires et par les employeurs.

Les contraintes qui lui sont imposées par l’arrêté du 26 novembre 2004 portant application du décret n° 2004–569 du 18 juin 2004 sont extrêmement sévères : ses 18 milliards d’euros d’actifs doivent être investis à 65 % au moins en obligations, les autres formes de placements ne pouvant dépasser 25 % pour les actifs à revenu variable et 10 % pour l’immobilier.

Or les caractéristiques du marché obligataire altèrent, depuis au moins deux ans et de manière durable, les perspectives de rendement associées à cette classe d’actifs, au point que le risque de destruction de valeur sur le portefeuille de l’ERAFP n’est pas exclu.

En outre, cette allocation d’actifs empêche l’établissement public de jouer son rôle au service de l’économie durable, alors que les caractéristiques de son passif – très longue durée de ses engagements et exceptionnelle importance de sa liquidité – le conduiraient naturellement à investir à long terme et à apporter aux entreprises le capital patient dont elles ont besoin.

Revoir les limites d’investissement fixées par le cadre réglementaire actuel permettrait à l’ERAFP d’investir directement dans des fonds ouverts et d’employer ses actifs à des fonctions socialement utiles, telles que l’innovation pour le soutien à l’emploi, le financement des PME-PMI, des collectivités territoriales et des établissements de santé, le logement, dont celui des fonctionnaires, la gestion durable des forêts, les infrastructures, ou encore la transition énergétique et écologique.

Au moment où le Gouvernement a engagé une action volontariste en matière de logement, il apparaît indispensable de revoir ces contraintes fixées il y a de nombreuses années et qui ne correspondent pas nécessairement aux besoins actuels.

Élu du nord-est parisien, je constate au quotidien les difficultés croissantes des petites et moyennes entreprises pour accéder au crédit dans le but d’assurer leur développement, ainsi que les tensions dues au déficit de logements sociaux. De fait, à Paris, les fonctionnaires ne sont pas épargnés, hélas, par la crise du logement social.

Dans ces conditions, je considère qu’il est à la fois juste, pertinent et conforme à l’intérêt général de consacrer une partie des avoirs considérables de l’ERAFP à des investissements favorables à notre économie et au financement du logement social, notamment à destination des fonctionnaires qui ne trouvent pas à se loger en Île-de-France alors même qu’ils sont des serviteurs de l’État.

Ce point de vue est largement partagé par le conseil d’administration de l’ERAFP qui, à plusieurs reprises, a exprimé une position similaire et unanime en faveur d’une évolution des contraintes actuelles, qui privent l’établissement public de possibilités d’intervention conformes à la charte de l’investissement socialement responsable, à la fois pour le financement de notre économie réelle et pour le logement. Il s’agirait de diversifier les placements dans ces deux directions tout en conservant des règles de prudence très strictes.

Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement envisage-t-il d’accroître la part des actifs à revenu variable et d’autoriser les placements dans des fonds dits ouverts ?

Ces mesures permettraient sans aucun doute de renforcer le volontarisme du Gouvernement en matière de relance de notre économie et de répondre en partie au déficit criant de logements sociaux dans notre pays.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Roger Madec, je vous prie d’excuser l’absence de M. Sapin, ministre des finances et des comptes publics, dont je répète qu’il est à Aulnay pour un déplacement consacré aux services de la douane.

L’allocation actuelle des actifs de l’établissement de retraite additionnelle de la fonction publique a été élaborée pour répondre à un souci prudentiel, au regard de la nature des engagements du régime. C’est pourquoi les dispositions de l’arrêté du 26 novembre 2004 portant application du décret n° 2004–569 du 18 juin 2004 limitent la proportion des actifs les plus volatils.

Le Gouvernement est conscient des contraintes posées par la réglementation existante et de la diminution du taux de couverture de l’ERAFP, dans le contexte actuel de baisse des taux. Néanmoins, toute évolution du cadre réglementaire actuel devrait tenir compte de la spécificité du passif de l’ERAFP, ainsi que des couples rendement-risque impliqués par une modification du portefeuille d’actifs.

C’est la raison pour laquelle il a été demandé à l’ERAFP de réaliser une étude pour déterminer le portefeuille d’investissements optimal au regard des passifs de ce régime. Cette étude permettra au Gouvernement d’ajuster les règles d’allocation des actifs, de manière à favoriser le financement des entreprises tout en préservant la sécurité des épargnants.

Nous ne manquerons évidemment pas, monsieur le sénateur, de vous tenir informé du résultat de cette étude.

M. le président. La parole est à M. Roger Madec.

M. Roger Madec. Monsieur le secrétaire d’État, je partage votre souci de prudence, destiné à assurer le meilleur usage possible des actifs pour les fonctionnaires.

J’ai bien compris qu’une étude avait été lancée, ce qui marque une évolution de la position du Gouvernement. J’espère que les résultats de cette étude iront dans le sens des souhaits du conseil d’administration.

J’espère en particulier qu’une partie des actifs pourra être investie dans le logement social, car il serait dommage qu’un établissement public disposant de liquidités ne puisse pas servir la politique du logement social, qui est une priorité du Gouvernement.

usage des titres de restaurant

M. le président. La parole est à M. Christian Cambon, auteur de la question n° 701, transmise à M. le secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget.

M. Christian Cambon. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur l’usage des « tickets restaurant ».

Comme vous le savez, ces « chèques déjeuner » sont distribués par les entreprises et font l’objet de règles précises. Ils sont cofinancés par le salarié et par l’employeur, lorsqu’il n’existe pas de possibilité de restauration sur le lieu de travail.

Selon la législation, ces titres de restaurant permettent d’acheter un repas ou une préparation alimentaire dans les établissements qui les acceptent. Depuis les premières initiatives, qui datent des années soixante, les habitudes de consommation des Français ont évolué, et avec elles l’utilisation des titres de restaurant.

En effet, depuis le 30 novembre 2010, un décret a permis aux détaillants en fruits et légumes d’accepter des titres-restaurant pour régler les achats. Ainsi, le salarié peut utiliser ces bons pour déjeuner à la table d’un restaurant, mais aussi auprès d’une boulangerie, d’une charcuterie, d’une supérette ou d’une moyenne surface, l’essentiel étant de consommer un produit à consommation immédiate.

En ces temps de morosité économique, cette souplesse permet aux salariés, qui voient fondre leur pouvoir d’achat, de consommer différemment et plus économiquement.

Or, depuis le 1er janvier 2014, ces différents points de vente sont assujettis à des taux de TVA très différents.

En effet, pour une supérette qui vend des produits pour déjeuner avec un titre-restaurant, le taux est de 5,5 %, contre 10 % pour un restaurant.

Dans une boulangerie, les sandwichs ou salades vendues avec assaisonnement et couverts, étant considérés comme de consommation immédiate, sont taxables à 10 %, alors que le pain, les viennoiseries et pâtisseries, étant considérés comme à consommation différée, sont soumis au taux de 5,5 %.

Un titre de restaurant est souvent utilisé pour acheter dans un même lieu un produit taxé à 5,5 % et un autre à 10 %. Vous conviendrez que, dans un tel maquis fiscal, il est très difficile de s’y retrouver.

En 2012, 40 % du chiffre d’affaires des titres-restaurant a été réalisé dans des circuits de distribution alimentaire autres que la restauration. L’utilisation du titre-restaurant s’est donc considérablement éloignée de l’usage défini initialement. Ce sont environ 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires perdus pour les restaurateurs.

Dès lors, et vous le comprendrez aisément, les organisations professionnelles demandent qu’une logique fiscale un peu plus compréhensible soit prise en compte, avec l’application d’un même taux de TVA intermédiaire pour tous les produits non bruts ayant déjà subi une transformation et pouvant être consommés immédiatement.

Selon les professionnels, le manque à gagner en termes de chiffre d’affaires représente, tenez-vous bien, l’équivalent de 20 000 emplois qui pourraient être immédiatement créés dans la restauration.

Compte tenu de la situation actuelle du marché de l’emploi, et sachant que près de 150 000 emplois ne sont pas pourvus dans le secteur, je pense qu’un effort de la part du ministère des finances s’impose.

Face à une telle concurrence, assez déloyale, quelles mesures le Gouvernement souhaite-t-il mettre en place pour équilibrer les taux de TVA lors de l’utilisation des titres-restaurant et rendre le système plus logique et compréhensible par tous ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Monsieur le sénateur, cher Christian Cambon, vous avez appelé l’attention du Gouvernement sur le taux de taxe sur la valeur ajoutée, ou TVA, applicable aux produits alimentaires et aux ventes à emporter ou à livrer de produits alimentaires préparés en vue d’une consommation immédiate.

Vous l’avez rappelé, les ventes à emporter ou à livrer de produits alimentaires préparés en vue d’une consommation immédiate, à l’instar des ventes à consommer sur place, sont soumises au taux réduit de 10 %, hormis pour les boissons alcoolisées, où le taux normal s’applique.

Par leur nature et leur conditionnement autorisant une consommation dans les instants suivant l’achat, les produits comme les sandwichs, les salades salées avec couverts ou avec assaisonnement séparé et les salades sucrées – même composées d’un seul fruit – avec couverts sont toujours réputés être des produits vendus à emporter en vue d’une consommation immédiate, quel que soit leur emballage.

Ils se distinguent des autres produits alimentaires destinés à être conservés par le consommateur, tel que le pain, et soumis à ce titre au taux réduit de la TVA de 5,5 %. Ces dispositions s’appliquent indépendamment du lieu de vente de ces produits, que celui-ci offre ou non un service de restauration sur place et quel que soit le mode de paiement utilisé, les tickets restaurants en étant un parmi d’autres.

Cette distinction entre la consommation immédiate ou ultérieure des produits vendus à emporter a été mise en place en 2011. Cette mesure a permis de ne pas recréer une distorsion de concurrence entre la restauration rapide et la restauration traditionnelle, comme c’était le cas avant la baisse de la TVA dans les restaurants à compter du 1er juillet 2009.

M. le président. La parole est à M. Christian Cambon.

M. Christian Cambon. Monsieur le secrétaire d’État, à la lecture même des règles particulièrement complexes de ce dispositif, je pense que vous-même avez sombré dans une certaine perplexité (M. le secrétaire d’État sourit.) ; entre les salades sucrées avec couverts et les salades salées sans fourchette, le système n’est pas facile à comprendre ! (Sourires.)

Je réitère donc ma demande. Je sais bien que le ministère des finances a toujours de nombreux arguments à nous opposer pour ne pas faciliter la compréhension des mécanismes fiscaux… Mais puisqu’on parle depuis longtemps de réforme fiscale, j’espère bien qu’il y aura quelque part un article ou un petit volet qui permettra d’y voir plus clair.

Il s’agit, et c’est l’enjeu le plus sérieux du débat, de donner plus de moyens à nos restaurateurs, notamment en baissant leurs charges. Encore une fois, il y a là un fort potentiel de créations d’emplois pour peu que l’on parvienne à préserver les professionnels concernés d’une TVA plus pénalisante pour les uns que pour les autres.

mesures destinées à favoriser l'accession aux voitures électriques

M. le président. La parole est à M. Jean Besson, auteur de la question n° 761, adressée à M. le ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique.

M. Jean Besson. J’attire l’attention du Gouvernement sur l’opportunité industrielle d’une transition énergétique des transports en France, notamment concernant les voitures électriques.

Après avoir reçu la synthèse du débat national sur la transition énergétique, puis installé le Conseil national de la transition écologique au mois de septembre dernier, il apparaît urgent, à l’aune de la présentation de la loi sur la transition énergétique, de donner une direction claire à l’industrie automobile et énergétique en France.

Alors que nombre de nos concitoyens s’interrogent sur un potentiel rééquilibrage de la fiscalité entre le gazole et l’essence, ils sont malheureusement trop peu incités à se tourner vers des technologies d’avenir moins polluantes. Dans le cadre des priorités industrielles réaffirmées par le Gouvernement, l’orientation des consommateurs vers les véhicules à énergies alternatives, notamment fonctionnant à l’électricité, doit clairement être soutenue par une politique économique incitative.

Ces filières d’avenir bénéficient d’un potentiel énorme pour favoriser le redressement productif de la France, pour notre économie, nos emplois, notre indépendance énergétique, mais également pour pallier les phénomènes de pollutions ; nous l’avons vu voilà quelques semaines à Paris, ainsi que dans la région de Lyon et de Grenoble, cher André Vallini.

Alors que ces véhicules écologiques permettent de créer de nouveaux débouchés pour le développement des énergies renouvelables, il est regrettable de constater que certaines mesures freinent leur élan. C’est le cas notamment s’agissant du bonus écologique accordé à ceux qui souhaitent acquérir une voiture électrique. En effet, le bonus écologique octroyé aux voitures propres n’est plus le même selon le mode d’acquisition du véhicule, qu’il soit au comptant ou en location longue durée. Pour exemple, le bonus pour une Renault Zoé, véhicule tout électrique, passe de 6 300 euros à 4 100 euros pour un achat en location longue durée. La location longue durée, ou location avec option d’achat, est pourtant la solution privilégiée par un acquéreur de voiture électrique sur deux. Cela constitue donc un frein important pour plus de 50 % des acquéreurs potentiels.

C’est aussi le cas pour nos collectivités locales. À titre d’exemple, dans le syndicat départemental d’énergie que je préside, le choix de modèles hydrides pour le renouvellement de notre flotte de véhicules de service a été en partie motivé par le montant du bonus dont la collectivité a pu bénéficier lors de l’attribution du marché public pour une location longue durée.

C’est pourquoi je souhaite interroger le Gouvernement sur les mesures qu’il compte adopter en faveur du développement de l’industrie des voitures électriques en France. J’aimerais notamment savoir s’il envisage de mettre en œuvre d’autres leviers d’accession à ce type de véhicules pour les acheteurs les plus modestes.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Monsieur le sénateur, cher Jean Besson, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique, qui est retenu ce matin à Bercy.

Levier indispensable à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et des pollutions atmosphériques locales, l’électromobilité peut et doit être mise au service de notre souveraineté énergétique.

Vous l’avez souligné, le véhicule électrique connaît aujourd'hui un véritable essor ; en 2013, les ventes ont ainsi progressé de 50 % par rapport à 2012.

Le véhicule électrique va changer les villes et les vies de nos concitoyens. C’est un véhicule écologique, à zéro émission, sans nuisance sonore, et de surcroît économique à l’usage.

Notre pays est déjà le premier marché d’Europe pour les véhicules électriques et hybrides de nouvelle génération, sur lesquels nos constructeurs ont pris une avance technologique reconnue, puisqu’ils produisent sur le territoire national des véhicules qui se vendent de mieux en mieux. L’État joue pleinement son rôle pour conforter la place de leader de notre pays et de notre industrie dans ce développement.

Ainsi, le bonus écologique a été consolidé à 6 300 euros pour les véhicules électriques et des discussions interministérielles sont en cours au sujet des achats en location longue durée.

Par ailleurs, la commande de véhicules de l’État, notamment des ministères, a été réorientée au minimum à 25 % vers les véhicules électriques et hybrides. L’État est ainsi passé de moins de 100 véhicules électriques et hybrides en 2012 à plus de 1 270 en 2013 !

L’État apporte également son soutien à l’innovation dans l’électromobilité au travers du programme des investissements d’avenir. On peut citer par exemple le projet ESSENCYELE, porté par Valeo, qui doit permettre de développer un nouveau système d’hybridation pour véhicules à essence, ce que l’on appelle « l’hybride rechargeable », ou le projet Badge, porté par Renault, qui vise le développement d’une nouvelle génération de batteries pour véhicules électriques.

Enfin, face à la peur de la panne, qui retient encore de nombreux Français d’adopter le véhicule électrique, l’un des trente-quatre plans de la Nouvelle France industrielle a été confié au préfet Francis Vuibert pour amplifier et structurer le réseau national de bornes de recharges électriques.

Vous le constatez, tous les leviers possibles sont actionnés. On peut citer notamment le programme d’investissements d’avenir, dont une enveloppe de 50 millions d’euros vient encourager les initiatives des collectivités locales.

C’est également la vocation de la proposition de loi, donc d’origine parlementaire, facilitant le déploiement d’un réseau d’infrastructures de recharge de véhicules électriques sur l’espace public qui sera discutée ici même le 3 juin prochain et qui permettra d’accélérer le déploiement de réseaux à maille nationale dans notre pays.

M. le président. La parole est à M. Jean Besson.

M. Jean Besson. Monsieur le secrétaire d’État, je vois que vous êtes convaincu de l’importance de ce dossier. J’imagine que notre collègue Jean-Claude Lenoir l’est également,…

M. Jean Besson. … compte tenu de son engagement sur les questions énergétiques.

Je salue la position du Gouvernement, qui s’inscrit parfaitement dans le cadre de la politique, chère à notre ministre, de « patriotisme économique ».

Je crois en effet qu’il est vital pour notre pays d’opter pour des mesures de protection des intérêts stratégiques, notamment en matière énergétique. Toutes ces mesures en faveur des voitures électriques, domaine dans lequel la France est incontestablement un des leaders mondiaux, vont évidemment dans le bon sens.

Monsieur le secrétaire d’État, mon cher collègue Jean-Claude Lenoir, les conseils généraux et leurs syndicats d’énergie font de gros efforts. Certes, l’État, notamment les ministères, agit, mais les collectivités territoriales ne sont pas en reste.

recherches minières et permis de villeranges

M. le président. La parole est à Mme Renée Nicoux, auteur de la question n° 778, adressée à M. le ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique.

Mme Renée Nicoux. Monsieur le secrétaire d’État, en novembre 2013, un permis exclusif de recherches de mines d’or, de cuivre, d’argent, d’antimoine, de zinc, d’étain, de tungstène et autres substances connexes a été octroyé pour une durée de trois ans à la société Cominor, filiale du groupe La Mancha Resources Inc., basée au Canada. Ce permis, dit de « Villeranges », porte sur sept communes creusoises et couvre une superficie de plus de quarante-sept kilomètres carrés.

L’octroi de ce permis soulève de nombreuses interrogations dans la population, très peu informée de la démarche. Certes, la demande, déposée en janvier 2011, a été soumise à consultation publique du 24 juillet au 4 septembre 2013, mais très peu d’habitants en ont eu connaissance. Et les maires du secteur concerné estiment ne pas avoir obtenu toutes les informations voulues lors de la réunion qui s’est tenue à la préfecture de la Creuse, en présence de la société exploitante, au mois de juillet 2013.

Aujourd’hui, les inquiétudes vont grandissantes, malgré plusieurs réunions d’information organisées par le directeur général de Cominor.

Ces craintes sont d’autant plus vives en Creuse que le site concerné se situe sur la seule nappe souterraine du département, avec les deux puits dits de Varennes, sur la commune de Lussat, alimentant le syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable du bassin de Gouzon.

À proximité se trouvent également un double site Natura 2000, le bassin de Gouzon et l’étang des Landes, ainsi que les vallées de la Tarde et de la Voueize. La réserve naturelle de l’étang des Landes, remarquable par la diversité de sa flore et de sa faune, abrite des centaines d’espèces d’oiseaux, d’insectes et de plantes, dont certaines, très rares, sont protégées au niveau régional, national ou même communautaire et constituent un patrimoine exceptionnel, reconnu d’intérêt européen. Ce site est une véritable richesse touristique pour le département. Il est la vitrine de la politique écologique du conseil général, qui ambitionne de faire de la Creuse un éco-département. C’est d’ailleurs l’ensemble de ces considérations qui a conduit le conseil général, le 19 mai dernier, à adopter à l’unanimité une motion demandant le retrait de ce projet.

Certes, il ne s’agit pour l’instant que d’un permis de recherches, mais l’investissement de 3 millions d’euros de la société dans cette opération rend très probable une exploitation prochaine.

C’est pourquoi je vous demande, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir me préciser dans quelles conditions ce permis de recherches exclusif a été attribué à la société Cominor et selon quelles modalités il pourrait se transformer en autorisation d’exploiter. Si tel devait être le cas, quelle procédure précise serait alors mise en place ? Une nouvelle consultation auprès des communes et des habitants serait-elle organisée et, dans cette hypothèse, comment les avis formulés seraient-ils pris en compte ?

Plus généralement, pouvez-vous, compte tenu des risques environnementaux, des impacts sur la production et les activités liées au tourisme, m’indiquer dans quelles conditions une telle exploitation pourrait être avantageuse pour le territoire et ses habitants et, plus largement, dans quel projet d’avenir et quel choix de société il s’inscrit ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Madame la sénatrice Renée Nicoux, vous avez bien voulu attirer l’attention d’Arnaud Montebourg, ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique, sur le permis dit « Villeranges », octroyé pour trois ans à la société Cominor le 18 novembre 2013.

La demande de permis de recherches avait recueilli un avis favorable des services déconcentrés de l’État. L’instruction menée par les services au niveau central avait conclu que l’entreprise possédait les capacités techniques et financières nécessaires pour mettre en œuvre le projet. Le Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies, le CGEIET, a également émis un avis favorable sur la demande.

Le projet de décision a fait l’objet d’une procédure de mise à disposition du public de portée nationale, dont les résultats ont été pris en compte avant l’adoption de la décision d’attribution.

Le permis ne confère à la société Cominor que l’exclusivité du droit de recherches. Pour pouvoir réaliser concrètement des travaux de recherches, cette société devra, en fonction de l’importance et de l’impact potentiel des travaux envisagés, déposer soit une simple déclaration soit une demande d’autorisation d’ouverture des travaux auprès du préfet de la Creuse. C’est dans le cadre de cette procédure que sont examinés les enjeux environnementaux du dossier. Les technologies proposées sont évaluées.

Il est veillé à la prise en compte des zones à forte sensibilité environnementale, en l’occurrence à la réserve naturelle de l’étang des Landes, que vous avez évoquée.

Dans le cas d’une demande d’autorisation, une étude d’impact devra être réalisée. Celle-ci sera soumise à l’avis de l’autorité environnementale et à enquête publique. À l’occasion de cette dernière, tous les avis pourront bien sûr s’exprimer.

Si la société Cominor souhaitait procéder à une exploitation du site au terme de l’exploration, une demande de concession minière devrait être déposée auprès des services d’Arnaud Montebourg. Elle entraînerait une nouvelle instruction par le préfet, avec consultation des maires concernés et enquête publique d’un mois. Ensuite, une instruction ministérielle portant sur l’analyse des capacités techniques et financières de la société, notamment ses capacités à valoriser au mieux le gisement dans le respect de l’environnement, serait conduite. Les avis du Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies et, en cas d’acceptation, du Conseil d’État seraient enfin sollicités.

Comme pour un permis de recherches, une concession ne confère pas le droit de procéder à des travaux. Un dossier d’ouverture de travaux serait de nouveau à déposer auprès du préfet. Une procédure complète telle que celle que j’ai décrite serait de nouveau requise. Enfin, après délivrance de l’autorisation d’ouverture de travaux et tout au long de l’activité d’exploitation, l’entreprise serait soumise à la police des mines, exercée par le préfet du département.

Vous le voyez, madame la sénatrice, le code minier encadre strictement la procédure d’octroi des permis, afin d’assurer que les enjeux environnementaux et sociaux attachés à tout projet d’exploration et d’exploitation minière soient pris en compte de manière satisfaisante. Dans le cadre de la réforme en cours du code minier, l’attention portée à ces enjeux sera encore renforcée. Ensemble, Parlement et Gouvernement, nous devons œuvrer à renforcer l’acceptabilité d’une activité créatrice de valeur et d’emplois pour notre pays.