M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Vous avez dit que l’économie réalisée sur la charge de la dette était prise en compte dans les 4 milliards. Eh bien, ce n’est pas vrai !

M. Francis Delattre. Nous n’avons jamais dit cela ! (Murmures sur plusieurs travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Quant à l’effet de l’inflation, c’est un vrai souci, monsieur le président Marini. Le fait que l’inflation soit faible modifie effectivement un certain nombre de paramètres.

On peut considérer que cela joue dans les deux sens : vous l’avez dit, un certain nombre de dépenses pourraient être tempérées par une inflation moindre. Toutefois, en ces temps de budgets contraints, les administrations sont parfois tentées de ne pas tenir franchement compte de la faible inflation et de continuer à dépenser les mêmes sommes en volume. Il faut donc être très prudent sur la portée du phénomène.

Néanmoins, ce que vous avez dit à propos de la masse salariale est vrai. Pour autant, à ce stade, nous n’avons pas l’intention de revoir les prévisions pour 2014 ; il faudra y réfléchir pour 2015.

D’un autre côté, le faible niveau de l’inflation explique en partie la moindre augmentation des recettes. L’effet est assez direct pour la TVA, mais ce peut être aussi le cas pour d’autres recettes de l’État, y compris les impôts.

D’aucuns affirment que ces effets contraires se compensent. L’influence générale me semble pourtant plutôt défavorable, du moins concernant le déficit. (M. le président de la commission des finances acquiesce.)

Par ailleurs, vous avez évoqué les pays qui financent la dette française. Vous me demandez pourquoi les Japonais, les Chinois et, en général, les Asiatiques achètent des titres de notre dette. C’est à eux qu’il faut leur poser la question ! Selon vous, c’est qu’ils anticipent une déflation durable ! Eh bien, il faut le leur demander !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Certes, mais nous vous auditionnons plus fréquemment que votre homologue japonais ! (Sourires.)

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je vous le concède.

Cela étant, vous le savez, et sans doute mieux que moi, il n’est pas toujours facile de trouver le prêteur en dernier ressort s’agissant d’émissions qui passent par beaucoup d’intermédiaires. Nous posons régulièrement cette question à l’agence France Trésor, et nous-mêmes n’obtenons pas toujours des réponses pleinement satisfaisantes.

Au sujet de la déflation, je rappelle que la Banque centrale européenne a abaissé ses taux, qu’elle a racheté un certain nombre de titres et qu’elle a accordé 600 milliards d’euros de prêts à long terme aux banques. J’en conviens, il faudrait aller plus loin. Il y aurait beaucoup à dire sur ce point !

Pour ce qui est des impatriés, le régime existant est déjà très favorable. La non-taxation en France, pendant cinq ans, d’une partie des revenus, ce n’est pas rien. En outre, pendant cette même durée de cinq ans, les biens étrangers ne sont pas pris en compte pour le calcul de l’ISF. Voilà tout de même des dispositions très généreuses ! Vous proposez d’étendre ce régime à d’autres types de biens. Je crains que les propositions que vous avez esquissées ne soient pas vraiment conformes à la Constitution. En particulier, dans la mesure où elles créeraient une inégalité de traitement entre les cadres établis en France et les cadres impatriés, je ne suis pas certain que le principe d’égalité devant l’impôt y trouve son compte.

Nicole Bricq et vous-même avez évoqué l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne en date du 12 juin dernier, relatif à un régime fiscal appliqué aux Pays-Bas. Je vous rejoins pour dire qu’il faudra en tirer les conséquences et ouvrir l’intégration entre les sociétés sœurs, filles d’une même mère européenne.

Selon ce que j’ai cru comprendre, vous souhaiteriez que l’on aille plus loin.

Mme Nicole Bricq. Et surtout plus vite !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. En effet, vous allez au-delà des cas où les sociétés mères sont établies dans un seul État membre de l’Union européenne. Il faudra travailler sur ce sujet. Je crois que nous serons en mesure de vous faire des propositions dans le prochain projet de loi de finances. En tout cas, c’est l’objectif que fixe votre serviteur ! Nous pourrons partir des bases que vous avez posées aujourd’hui, mais, sur ce dossier technique et complexe, il conviendra de vérifier un certain nombre de points.

Mme Nicole Bricq. Très bien !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Beaucoup de choses ont été dites au sujet du pacte de responsabilité. Pour les uns, on irait trop vite, pour d’autres, pas assez ; le CICE ne servirait à rien, etc.

Monsieur Delattre, je dois tout de même vous rappeler que, depuis le début de l’année, 7 milliards d’euros ont été versés aux entreprises de notre pays !

Mme Nicole Bricq. Et elles les ont pris sans hésiter !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. La France n’a jamais vu un soutien aussi massif aux entreprises. Dire que ce n’est rien me paraît tout de même assez méprisant, sachant que de nombreux entrepreneurs viennent nous voir aujourd’hui en nous expliquant qu’ils n’avaient pas très bien compris ce dispositif à l’origine, mais qu’ils y adhèrent désormais et qu’il ne faut surtout pas y toucher !

J’ajoute que, à ce jour, seuls ont été versés les CICE pour les entreprises clôturant leur exercice au 31 décembre 2013. Nous arriverons donc, d’ici à la fin de l’année, au niveau annoncé, c’est-à-dire aux alentours de 13 milliards d’euros, puis à 20 milliards d’euros en année pleine, lorsque le taux passera à 6 %.

Mme Nicole Bricq. Sans oublier les accords sur la chimie !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Ce qu’il faut dire à ces chefs d’entreprise, c’est que l’année prochaine leur CICE sera, toutes choses égales par ailleurs, majoré de 50 % !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Eh oui !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Actuellement, ce crédit d’impôt est de 4 %. Il va être porté à 6 %. Monsieur Delattre, vous avez l’habitude du calcul mental : vous admettrez donc que le CICE augmentera de moitié ; celui qui aura reçu 100 000 euros en recevra par conséquent 150 000,…

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. M. Delattre va être content !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … toutes choses égales par ailleurs, je le répète, c’est-à-dire si l’entreprise ne change pas de catégorie, si le volume de salariés reste le même.

Plutôt que de dénigrer ce dispositif, mieux vaut donc, à mon sens, saluer les initiatives qui ont été prises.

M. Francis Delattre. Je n’ai fait que citer Eurostat !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Eurostat a beaucoup de mérites mais, en l’occurrence, c’est le secrétaire d’État au budget qui vous donne des chiffres en direct ! C’est du live ! (Sourires.)

De même, vous avez tourné en dérision les montants perçus au titre des avoirs détenus à l’étranger. Certains contribuables sont venus, tels des repentants vêtus d’une robe de bure, nous avouer qu’ils détenaient un compte à l’étranger. (Mme Nicole Bricq rit.) Vous avez parlé de « prétendues » recettes. Non ! Je peux vous le dire : à ce jour, nous avons dépassé le milliard d’euros de produit d’impôt récupéré. Ce ne sont pas des prévisions !

M. Francis Delattre. Depuis quand, le milliard ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Depuis le 1er janvier, monsieur Delattre ! Et nous avons bon espoir de dépasser les montants que nous avons annoncés. Si le rythme observé au cours des six premiers mois de l’année se confirme, je crois que vous serez surpris des volumes atteints !

M. Francis Delattre. Mais c’est un fusil à un coup !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Non, monsieur le sénateur ! Comme vous êtes assez assidu aux travaux budgétaires, ce que je salue, vous m’avez certainement déjà entendu dire que, à ce jour, 25 000 dossiers ont été déposés, représentant chacun un volume moyen de 900 000 euros. Si j’arrondis ce montant à 1 million d’euros – je m’octroie une marge d’erreur de 10 % ! –, cela fait 25 milliards d’euros d’avoirs.

Compte tenu de leur importance, la plupart de ces avoirs sont assujettis à l’ISF. Certains sont en outre assujettis à l’impôt sur les revenus qu’ils dégagent. Cela signifie que, de toute manière, l’assiette de l’impôt sur la fortune va s’élargir. Même avec un ISF moyen s’élevant à 1 % – c’est encore un ordre de grandeur –, cela représente pour l’État une ressource pérenne d’environ 250 millions d’euros.

Il s’agit d’un calcul de coin de table, je vous l’accorde. Mais je pense très sérieusement que cette estimation se révélera en deçà de la réalité.

Certes, il n’y aura pas 1 milliard ou 1,5 milliard d’euros de recettes pérennes supplémentaires chaque année, mais nous en tirerons probablement plus de 250 millions d’euros chaque année.

M. Francis Delattre. Ah, c’est très bien !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je laisse ces éléments à votre appréciation.

Mesdames, messieurs les sénateurs, pardonnez-moi de ne pas avoir répondu à toutes vos interrogations. J’ai conscience d’avoir déjà été long. Je conclurai en revenant sur le prétendu dérapage de l’endettement.

À mon sens, chacun gagnerait à faire preuve d’un peu plus d’humilité, au regard de ses propres responsabilités.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. De fait, si l’on compare l’augmentation de la dette depuis deux ans à son évolution pendant les cinq années précédentes, franchement, il n’y a pas photo !

Mme Michèle André. Très bien !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Monsieur Delattre, je reprendrai une image que vous avez employée : quand une coupe déborde, on a tendance à en rendre responsables ceux qui ont versé la dernière goutte, oubliant souvent que d’autres l’ont bien remplie auparavant ! Voilà pourquoi je dis qu’il faut faire preuve d’humilité sur ce sujet.

M. Francis Delattre. Je ne me sens pas concerné !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je constate simplement qu’il y a des majorités et des oppositions successives. J’ai entendu vos propos, et je les trouve tout de même un peu excessifs.

Cela étant, je remercie tous les orateurs de la qualité de leurs interventions. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste – MM. André Gattolin et Robert Tropeano applaudissent également.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte adopté par l’Assemblée nationale.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2014
Article 1er

Article liminaire

La prévision de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques pour 2014 s’établit comme suit :

 

Prévision d’exécution 2014

Solde structurel (1)*

-2,3

Solde conjoncturel (2)**

-1,5

Mesures exceptionnelles (3)*

-

Solde effectif (1 + 2 + 3)**

-3,8

* En points de produit intérieur brut potentiel.

** En points de produit intérieur brut.

 

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article liminaire.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'article.)

Mme Nicole Bricq. C’est ridicule ! Franchement, vous ne vous grandissez pas !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’article liminaire ! C’est incroyable !

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

RESSOURCES AFFECTÉES

Article liminaire
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2014
Article 1er bis

Article 1er

I. – Les contribuables domiciliés en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts bénéficient, au titre de l’imposition des revenus de l’année 2013, d’une réduction d’impôt sur le revenu lorsque le montant des revenus du foyer fiscal défini au 1° du IV de l’article 1417 du même code est inférieur à 14 145 € pour la première part de quotient familial des personnes célibataires, veuves ou divorcées et à 28 290 € pour les deux premières parts de quotient familial des personnes soumises à imposition commune. Ces limites sont majorées de 3 536 € pour chacune des demi-parts suivantes et de la moitié de cette somme pour chacun des quarts de part suivants.

II. – Le montant de la réduction d’impôt est égal à 350 € pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et à 700 € pour les contribuables soumis à imposition commune.

Par dérogation, pour les contribuables mentionnés au I du présent article dont le montant des revenus défini au 1° du IV de l’article 1417 du code général des impôts excède 13 795 € pour la première part de quotient familial des contribuables célibataires, veufs ou divorcés et 27 590 € pour les deux premières parts de quotient familial des contribuables soumis à imposition commune, ces limites étant majorées de 3 536 € pour chacune des demi-parts suivantes et de la moitié de cette somme pour chacun des quarts de part suivants, le montant de cette réduction d’impôt est limité à la différence entre la limite de revenu applicable mentionnée au I du présent article et le montant de ces revenus.

La réduction d’impôt s’applique sur le montant de l’impôt sur le revenu calculé dans les conditions fixées à l’article 197 du même code.

III. – Le 5 du I du même article 197 est applicable.

La réduction d’impôt n’est pas prise en compte pour l’application du plafonnement mentionné à l’article 200-0 A du même code.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er n'est pas adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2014
Article 1er ter

Article 1er bis

Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le dernier alinéa du 1 de l’article 150-0 D est complété par les mots : « , ni au gain net mentionné au I de l’article 163 bis G » ;

2° Le II bis de l’article 150-0 D ter est complété par un 4° ainsi rédigé :

« 4° À l’avantage et au gain mentionnés au dernier alinéa du 1 de l’article 150-0 D. »

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er bis.

(L'article 1er bis n'est pas adopté.)

Article 1er bis
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Article 1er quater

Article 1er ter

I. – Le II de l’article 199 ter S du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Les trois dernières phrases du 1 sont supprimées ;

2° Le même 1 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Par exception :

« a) Lorsque le devis ou la facture visant tout ou partie des travaux financés ne permettent pas de justifier les informations figurant dans le descriptif mentionné au 5 du même I, l’entreprise réalisant ces travaux est redevable d’une amende égale à 10 % du montant des travaux non justifié. Cette amende ne peut excéder le montant du crédit d’impôt. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent a ;

« b) Lorsque la justification de la réalisation ou de l’éligibilité des travaux n’est pas apportée par le bénéficiaire dans le délai prévu au 5 dudit I, à l’exception des cas mentionnés au a du présent 1, l’État exige du bénéficiaire le remboursement de l’avantage indûment perçu. Celui-ci ne peut excéder le montant du crédit d’impôt majoré de 25 %. Un décret en Conseil d’État définit les modalités de restitution de l’avantage indu par le bénéficiaire de l’avance remboursable sans intérêt. » ;

3° Au 3, les références : « aux 1 et 2 » sont remplacées par les références : « au premier alinéa du 1 et au 2 ».

II. – Le I s’applique aux offres d’avance émises à compter de l’entrée en vigueur du décret prévu au même I et, au plus tard, au 1er janvier 2015.

Mme la présidente. L'amendement n° 7 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Fortassin, Baylet, Bertrand, C. Bourquin et Collombat, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Requier, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 5, après la deuxième phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Sans préjudice des dispositions du présent a, l'entreprise peut avoir recours à un tiers pour vérifier l'éligibilité des travaux.

La parole est à M. Robert Tropeano.

M. Robert Tropeano. La Haute Assemblée a adopté cet amendement en première lecture, ainsi qu’un autre amendement du RDSE portant sur le même article, mais que les députés n’ont pas remis en cause et dont les dispositions figurent dans le texte.

Cet article 1er ter a pour objet de simplifier et de faciliter l’accès à l’éco-prêt à taux zéro, ou éco-PTZ, utilisé pour financer les travaux d’amélioration de la performance énergétique des logements. Ce dispositif repose actuellement sur des établissements de crédit ayant conclu une convention avec l’État. Or ces derniers ont souvent des difficultés à évaluer l’éligibilité des travaux à l’éco-PTZ.

C’est pourquoi, afin de renforcer l’attractivité de ce dispositif et donc de favoriser la rénovation énergétique des logements, l’article 1er ter transfère la responsabilité d’attester de l’éligibilité des travaux des banques vers les entreprises les réalisant. En cas de devis ou de facture non conforme aux exigences de l’éco-PTZ, l’entreprise devra acquitter une amende.

Si le but visé via cet article est louable, nous nous inquiétons de l’impact négatif que cette mesure pourrait avoir sur certaines entreprises, en particulier les plus petites d’entre elles, qui sont majoritaires dans le secteur du bâtiment. Les TPE et les PME concernées ne disposent ni des moyens ni des compétences nécessaires pour évaluer la compatibilité des travaux qu’elles effectuent avec un grand nombre de critères, qui eux-mêmes évoluent régulièrement, pour bénéficier de l’éco-PTZ.

Nous proposons donc, par cet amendement – qui, je le répète, avait été adopté ici en première lecture –, de permettre à ces entreprises de recourir à un tiers vérificateur pour attester l’éligibilité des travaux à l’éco-PTZ. Cet ajout est absolument indispensable dans la mesure où il ne revient pas à des entreprises artisanales du bâtiment de maîtriser l’ensemble des conditions fixées par l’État pour bénéficier d’une aide publique telle que l’éco-PTZ, d’autant que la réglementation évolue assez fréquemment.

Sans la mise en place de cette possibilité de recourir à un tiers vérificateur, des entreprises se retrouveraient seules à assumer l’entière responsabilité de l’éligibilité des travaux, sans aucune possibilité de s’assurer face au risque d’erreur. Cela ne nous semble pas acceptable et serait contraire à la volonté du Gouvernement de simplifier la vie des entreprises.

C’est la raison pour laquelle je vous invite, mes chers collègues, à adopter très largement, comme en première lecture, cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. En première lecture, sur cet amendement qui avait déjà été déposé par les mêmes collègues, la commission des finances avait souhaité connaître l’avis du Gouvernement. Le Gouvernement en avait demandé le retrait, précisant cependant qu’il était prêt à travailler sur ce sujet mais qu’il craignait que le recours au tiers vérificateur n’alourdisse les procédures applicables. Le Gouvernement avait en outre souligné que l’intervention de ce tiers vérificateur n’irait pas sans créer un coût supplémentaire pour les entreprises.

Comme l’a indiqué M. le secrétaire d’État à l’Assemblée nationale, où des amendements identiques avaient été déposés, rien n’interdit actuellement aux entreprises de recourir par contrat aux services d’un tiers vérificateur.

Compte tenu de ces différents éléments, la commission des finances, suivant en cela ma suggestion, demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. L’argumentation du Gouvernement reste la même. Bien entendu, une entreprise peut toujours faire appel à un tiers vérificateur. Rien ne l’interdit, et il n’est pas indispensable que la loi le prévoie explicitement. Si une entreprise souhaite bénéficier d’un conseil, avoir une assurance, c’est son affaire. Cela relève du droit privé.

L’inconvénient de cet amendement est qu’il pourrait laisser à penser que l’entreprise réalisant les travaux pourrait s’exonérer de sa responsabilité, car c’est elle qui sera, le cas échéant, comptable de ce qui ne serait pas conforme aux engagements qu’elle aura pris au regard de l’éligibilité à l’éco-PTZ. C’est la première raison pour laquelle le Gouvernement ne souhaite pas voir cet amendement adopté.

La seconde est que la généralisation de ce type d’assistance, par le recours à des bureaux de contrôle comme on en connaît un certain nombre, pourrait engendrer des surcoûts – car ces contrats donneraient évidemment lieu à paiement –, mais aussi des lourdeurs et des délais que le Gouvernement n’entend pas voir se multiplier.

Je vous invite donc, monsieur le sénateur, à retirer cet amendement. À défaut, j’en demanderai le rejet.

M. Robert Tropeano. Je retire l’amendement, madame la présidente !

Mme la présidente. L'amendement n° 7 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'article 1er ter.

(L'article 1er ter est adopté.)

Article 1er ter
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Article 1er quinquies

Article 1er quater

L’article 569 du code général des impôts est ainsi rédigé :

« Art. 569. – I. – Les paquets, cartouches et tous conditionnements de produits du tabac fabriqués, importés ou en provenance d’un autre État membre de l’Union européenne et introduits en France doivent être revêtus d’un identifiant unique, imprimé ou apposé de façon inamovible et indélébile, qui n’est en aucune façon dissimulé ou interrompu et permet d’accéder à des informations relatives aux mouvements de ces produits du tabac.

« Les personnes concernées par le commerce des produits du tabac, du fabricant au dernier opérateur avant le premier détaillant, enregistrent l’entrée de toutes les unités de conditionnement en leur possession, ainsi que tous les mouvements intermédiaires et la sortie définitive des unités de conditionnement.

« Les personnes qui interviennent dans la chaîne d’approvisionnement des produits du tabac conservent un relevé complet et précis de toutes les opérations concernées.

« Les fabricants de produits du tabac fournissent à toutes les personnes concernées par le commerce de ces produits, du fabricant au dernier opérateur avant le premier détaillant, y compris les importateurs, entrepôts et sociétés de transport, l’équipement nécessaire pour enregistrer les produits du tabac achetés, vendus, stockés, transportés ou soumis à toute autre manipulation. Cet équipement permet de lire les données enregistrées et de les transmettre sous forme électronique à une installation de stockage de données.

« II. – Les fabricants et les importateurs de produits du tabac concluent un contrat de stockage de données avec un tiers indépendant, dans le but d’héberger l’installation de stockage des informations mentionnées au I.

« Le tiers, au regard notamment de son indépendance et ses capacités techniques, de même que le contrat de stockage de données sont approuvés par la Commission européenne.

« Les activités du tiers indépendant sont contrôlées par un auditeur externe, lequel est proposé et rémunéré par le fabricant de tabac et approuvé par la Commission européenne. L’auditeur externe soumet au ministre chargé des douanes et à la Commission européenne un rapport annuel dans lequel sont en particulier évaluées les irrégularités éventuelles liées à l’accès aux données stockées par le tiers indépendant.

« III. – L’installation de stockage de données est physiquement située sur le territoire de l’Union européenne.

« La Commission européenne, le ministre chargé des douanes et l’auditeur externe ont pleinement accès aux installations de stockage de données.

« Les informations mentionnées au I sont enregistrées dans des traitements automatisés de données à caractère personnel et sont soumises à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

« Elles ne peuvent pas être modifiées ou effacées par une personne concernée par le commerce des produits du tabac.

« IV. – Outre l’identifiant unique mentionné au I, toutes les unités de conditionnement des produits du tabac mentionnés au même I comportent un dispositif de sécurité infalsifiable, composé d’éléments visibles et invisibles. Le dispositif de sécurité est imprimé ou apposé de façon inamovible et indélébile, et n’est en aucune façon dissimulé ou interrompu.

« V. – Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, définit les modalités d’application du présent article. »

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 16 rectifié bis est présenté par MM. Bérit-Débat, Mirassou, Todeschini, Vaugrenard, Caffet et Germain.

L'amendement n° 33 est présenté par M. Gattolin, Mme Archimbaud, M. Placé et les membres du groupe écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

Le I de l’article 569 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, le mot : « cigarettes » est remplacé, deux fois, par les mots : « tabacs manufacturés » ;

2° À la première phrase du second alinéa, les mots : « par et » sont supprimés.

La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour présenter l’amendement n° 16 rectifié bis.

M. Claude Bérit-Débat. En présentant cet amendement, je m’interroge sur l’opportunité pour le Gouvernement d’être revenu sur l’amendement de MM. Laurent Grandguillaume et Thierry Solère adopté en première lecture à l’Assemblée nationale, concernant la traçabilité.

Je pense en effet que, quelle que soit la légitimité des arguments juridiques que vous avez évoqués à cette occasion, monsieur le secrétaire d’État, l’article 1er quater tel qu’il est rédigé aujourd’hui ne répond tout simplement pas aux besoins en matière de traçabilité, et ce pour plusieurs raisons.

D’abord, alors que le Gouvernement s’est résolument engagé à renforcer les exigences de déontologie et de transparence, si ce texte est maintenu en l’état, quoiqu’on en dise, la législation continuera à laisser l’industrie du tabac organiser son propre contrôle. Permettez-nous de douter de l’efficacité et même de l’effectivité d’un contrôle ainsi réalisé… Donc, ne serait-ce que pour cette raison, il faut revenir sur ce texte.

Ensuite et surtout, il y va de la santé publique de nos concitoyens. Sachant qu’une cigarette consommée en France sur quatre aurait suivi un parcours illégal, il apparaît indispensable de renforcer la lutte contre les circuits parallèles ; à cet égard, la traçabilité constitue l’outil d’excellence.

Pour justifier votre amendement, vous avez évoqué la directive Tabacs et son article 15. Or l’obligation créée par cette directive ne porte que sur l’objectif d’instaurer la traçabilité. Rien ne vous empêchait, dès lors, conformément à l’article 288 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de faire en sorte que cette procédure de traçabilité soit organisée non par l’industrie du tabac elle-même, mais par un institut indépendant.

De plus, au-delà de la directive Tabacs, je vous rappelle l’existence de la convention-cadre de l’Organisation mondiale de la santé de 2014 pour la lutte antitabac, que la France a ratifiée. Il y a aussi son protocole visant à éliminer le commerce illicite de tabac, que la France a signé en 2013, mais pas encore ratifié. Or ce protocole dispose que la procédure de traçabilité doit être indépendante. Monsieur le secrétaire d’État, quand la France entend-elle ratifier ce protocole très important ?

Enfin, il ne faut pas oublier la dimension fiscale et, plus généralement, économique de notre proposition. En effet, premièrement, le marquage des paquets ferait rentrer plusieurs milliards d’euros supplémentaires dans les caisses de l’État. Deuxièmement, la traçabilité concerne non seulement le tabac, mais aussi de multiples produits et permettrait de créer une véritable filière, source de plusieurs centaines, voire de plusieurs milliers d’emplois. Un certain nombre d’acteurs économiques sont d’ailleurs déjà prêts à répondre à un appel d’offre de l’État pour se charger de cette traçabilité.

Transparence, santé publique, conformité aux engagements internationaux de notre pays, recettes fiscales supplémentaires et création d’emplois : vous le voyez, les raisons sont nombreuses pour justifier que le Gouvernement avance sur cette question et donne donc un avis favorable sur cet amendement qui, je l’espère, sera voté par l’ensemble de nos collègues.