M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Mme Najat Vallaud-Belkacem, actuellement en déplacement avec M. le ministre de l’intérieur sur le site d’une école sinistrée.

Pour permettre aux élèves d’accéder au monde professionnel dans les meilleures conditions possibles, la loi du 10 juillet 2014 tendant au développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires, que j’ai défendue, est venue renforcer la dimension pédagogique des stages pour tous les niveaux d’enseignement et mieux protéger les stagiaires contre les abus avérés, des abus qui, au demeurant, ne sont pas si fréquents.

S’agissant plus précisément des stages effectués par les élèves de l’enseignement secondaire dans le temps scolaire, ils doivent être intégrés à un cursus pédagogique. Dans ce cas, la signature d’une convention de stage entre l’établissement scolaire, l’élève et la structure de stage est obligatoire : c’est une question de coresponsabilité.

À cet effet, des conventions types sont disponibles sur le site Éduscol du ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Par ailleurs, la loi du 28 juillet 2011 pour le développement de l’alternance et la sécurisation des parcours professionnels prévoit la possibilité d’accueillir en entreprise des jeunes scolarisés, âgés au minimum de quatorze ans, durant les vacances scolaires, pour une durée maximale d’une semaine, en vue de l’élaboration de leur projet d’orientation professionnelle, qu’ils peuvent vérifier ou infirmer en immersion. Cette catégorie de stages se distingue des « stages scolaires » déjà existants par le fait que ces périodes d’observation en entreprise ne sont pas organisées par les établissements scolaires.

Pour renforcer encore l’accès des jeunes au monde professionnel, nous avons souhaité qu’à la rentrée 2015 chaque élève puisse accéder à une meilleure information, présentée par des professionnels dans les établissements, pour choisir une orientation et construire un projet personnel et professionnel.

L’ensemble des stages en entreprise s’inscrit donc pleinement dans ce parcours d’information, d’orientation et de découverte du monde économique et professionnel.

En outre, et parallèlement, comme vous l’avez signalé, il est nécessaire d’améliorer l’accès aux stages. Dans ce sens et d’ores et déjà, l’Office national d’information sur les enseignements et les professions a créé une plateforme permettant d’obtenir toutes les informations utiles et de rechercher une offre de stage.

Au-delà, pour favoriser des mises en situation professionnelle dans la formation initiale, l’État développera des pôles de stages et de périodes de formation en milieu professionnel au sein de chaque établissement ou réseau d’établissements, avec pour objectif de collecter et de suivre des offres dans les bassins d’emploi. Les branches professionnelles seront sollicitées pour accueillir davantage d’élèves de l’enseignement professionnel en entreprise, afin qu’ils y réalisent leur période de formation en milieu professionnel.

Nous avons la ferme volonté de faire en sorte que les stages ne soient pas réservés à ceux dont les parents disposent d’un réseau relationnel ; vous le savez, c’est un problème. L’État doit être le réseau de ceux qui n’en ont pas, de manière que tous les enfants de la République se voient offrir les mêmes chances d’insertion.

Ces mesures représentent indéniablement un progrès pour les stagiaires. C’est un message de confiance et de coresponsabilité entre les acteurs, les entreprises et les jeunes qui est ainsi lancé, même si, comme vous l’avez souligné, ce dispositif reste perfectible.

M. le président. La parole est à M. Henri Tandonnet.

M. Henri Tandonnet. Je remercie Mme la secrétaire d’État de sa réponse. Les dispositions prises récemment, que ce soit à travers la loi ou par le ministère de l’éducation, vont dans le bon sens, c'est-à-dire vers un accès beaucoup plus large du monde de l’entreprise aux jeunes collégiens et lycéens.

Si j’ai soulevé cette question, c’est que j’ai personnellement rencontré des difficultés. J’ai pu accueillir sans problème un stagiaire lycéen de la région parisienne, y compris durant les grandes vacances scolaires. En revanche, lorsque j’ai voulu réitérer l’expérience dans mon département, je me suis heurté au refus du proviseur du lycée d’Agen.

Comme vous l’avez souligné, il faut ouvrir de plus en plus ces stages, mais il faut aussi que cela se sache dans les collèges et les lycées. J’approuve votre ambition de rendre également accessibles ces stages à des élèves qui n’y ont pas forcément accès via les relations professionnelles de leurs parents. Pour ma part, j’ai toujours ouvert mes activités professionnelles à de très jeunes stagiaires et j’ai pu en constater les effets très bénéfiques. J’espère donc que de telles initiatives se multiplieront dans les années à venir.

modalités d'application de la réforme des rythmes scolaires et intercommunalité

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 881, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Hervé Maurey. Madame la secrétaire d’État, permettez-moi, une fois encore, d’attirer l’attention sur les difficultés résultant de la mise en place de la réforme des rythmes scolaires. J’espère obtenir, cette fois, les réponses qui ne m’ont été apportées ni par MM. Peillon et Hamon ni par l’actuelle ministre, à qui j’ai écrit dès sa prise de fonctions, au mois d’août dernier.

Cette réforme, vous le savez, a entraîné des dépenses très importantes pour les collectivités. Elles sont d’autant moins supportables que les dotations ont diminué en 2014 et qu’elles subiront une baisse extrêmement brutale dans les prochaines années.

Le fonds d’amorçage dont le Gouvernement nous avait annoncé la prorogation l’année prochaine semble désormais réservé aux seules communes éligibles à la « DSU cible » – dotation de solidarité urbaine – et à la « DSR cible » – dotation de solidarité rurale –, donc à un nombre très limité de communes.

Par ailleurs, témoignant s’il en était besoin de l’impréparation de cette réforme, les règles de répartition du fonds d’amorçage entre les communes et les établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – ne permettent toujours pas aux communes, quoi qu’en ait dit ici même le ministre Benoît Hamon en mai dernier, de reverser les crédits aux EPCI si ces derniers n’exercent pas conjointement les compétences « activités périscolaires » et « service des écoles ». Or, vous le savez, dans de très nombreux cas, les EPCI n’exercent que la compétence « activités périscolaires ».

Je tiens par ailleurs à attirer votre attention sur la rigidité avec laquelle les services de l’État ont mis en place la réforme dans le département de l’Eure. En effet, la plupart des demandes de dérogation ou d’expérimentation n’ont obtenu que des réponses négatives, motivées de manière vexante pour les élus. De surcroît, un grand nombre de ces réponses sont arrivées après le départ en vacances des parents et des élèves.

Enfin, je veux également évoquer les difficultés résultant du choix des rectorats d’organiser les consultations sur les programmes de l’école maternelle et le socle commun de connaissances durant le temps scolaire, comme c’est le cas dans mon département. Ce choix oblige les communes à supprimer les TAP, les temps d’activités périscolaires, et à réorganiser les transports scolaires. Il met les parents en difficulté pour trouver des systèmes de garde, ainsi que les communes pour faire face à cette situation.

Je vous demande donc très clairement quelle est la position du Gouvernement sur les points suivants.

Premièrement, quel réexamen les services du ministère feront-ils des refus d’adaptation ou de dérogation du temps scolaire dans le département dont je suis un élu ?

Deuxièmement, quid de la pérennisation réelle du fonds d’amorçage, qui est une nécessité absolue compte tenu du coût de la réforme et de la baisse des dotations annoncée pour les prochaines années ?

Troisièmement, qu’en est-il de la clarification des règles pour que les communes puissent enfin effectivement reverser tout ou partie du fonds d’amorçage à l’EPCI dès lors que c’est ce dernier qui assume la mise en place des rythmes scolaires ?

Quatrièmement, le Gouvernement peut-il s’engager à dresser un bilan complet de la réforme – coût pour les collectivités, avantages pour les enfants et les familles – avant la fin de l’année, afin de décider des suites qu’il convient de donner à cette réforme ?

Cinquièmement, quelle est la position du Gouvernement quant à la mise en place des temps de consultation hors du temps scolaire ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, je répondrai une nouvelle fois à la place de Najat Vallaud-Belkacem.

Il me faut tout d’abord vous rappeler la répartition des compétences entre l’État et les collectivités territoriales en matière d’organisation des temps éducatifs. Le code de l’éducation dispose que l’éducation est un service public national, dont l’organisation et le fonctionnement sont assurés par l’État. Dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires, les décisions d’organisation du temps scolaire relèvent donc de la compétence de l’État. Les décrets du 24 janvier 2013 et du 7 mai 2014 ont apporté des éléments de souplesse nécessaires, permettant aux conseils d’école ou aux maires de proposer des organisations horaires adaptées.

L’organisation des activités périscolaires relève, pour sa part, entièrement de la compétence des communes. Le syndicat intercommunal à vocation scolaire est l’une des formes que peut prendre la coopération intercommunale : c’est un établissement public de coopération intercommunale auquel sont déléguées une ou plusieurs des compétences des communes en matière scolaire.

Pour répondre précisément à votre question, je vous indique que le syndicat intercommunal ne pourra bénéficier des aides financières mises en place par le ministère de l’éducation nationale que dans le cas où il exerce effectivement la compétence d’organisation du temps d’activités périscolaires pour lesquelles ces aides sont prévues, et donc pour lesquelles il assume une charge financière.

La compétence relative au service des écoles comporte, quant à elle, l’acquisition du mobilier et des fournitures, ainsi que le recrutement et la gestion des personnels de service.

Ainsi, monsieur le sénateur, les établissements publics de coopération intercommunale détenteurs de la compétence « activités périscolaires », et qui doivent de ce fait en assurer le financement, auront le bénéfice du fonds d’amorçage. En revanche, et en toute logique, le syndicat intercommunal à vocation scolaire, qui n’est en l’espèce chargé que du service des écoles que j’ai décrit –mobilier, équipements et personnel de service –, ne pourra pas en bénéficier.

Vous le savez, cette réforme est essentielle au bien-être, à l’épanouissement et à la réussite des élèves. Sa mise en œuvre requiert un dialogue permanent entre l’État et les collectivités territoriales sous toutes leurs formes, dans l’Eure comme dans l’ensemble des territoires. Le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche y est particulièrement attentif, tout comme il est attentif à une mise en œuvre sur le terrain souple, collective et convergente d’une mesure qui n’a qu’un objectif : la réussite du plus grand nombre d’enfants dans notre pays.

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Madame la secrétaire d’État, j’ai posé cinq questions et je n’ai obtenu qu’une réponse – vous me direz que ce n’est déjà pas si mal ! –, au sujet de la clarification du versement du fonds d’amorçage : vous avez précisé que les EPCI pouvaient bénéficier d’un reversement dès lors qu’ils sont chargés de la mise en place des rythmes scolaires.

Je rappelle que c’est actuellement la commune qui perçoit les dotations au titre du fonds d’amorçage, mais qu’elle ne pouvait pas reverser ces sommes à l’EPCI, même s’il est chargé de la mise en place des rythmes scolaires, ce qui est complètement absurde !

Si je vous ai bien comprise, ce reversement sera donc possible. Le problème, c’est que M. Hamon m’a dit la même chose au mois de mai dernier et que le ministère de l’intérieur, qui a la compétence et l’autorité sur les préfets, affirme l’inverse. Donc, on est quand même dans une situation juridique complexe ! J’ai écrit au Premier ministre à ce sujet pour avoir un arbitrage ; je ne l’ai pas eu !

Par conséquent, j’aimerais que vos propos de ce matin et ceux que m’avait tenus M. Hamon au mois de mai trouvent une traduction concrète, de manière que les communes qui perçoivent le fonds d’amorçage alors qu’elles n’exercent pas la compétence « rythmes scolaires » puissent effectivement reverser ces fonds aux EPCI qui détiennent ladite compétence.

Sur les autres questions que je vous ai posées, je suis obligé de constater que je n’ai pas eu de réponse : ni sur ma demande de réexamen des refus d’adaptation ou de dérogation du temps scolaire, ni sur la pérennisation du fonds d’amorçage, ni sur la mise en place des temps de consultation hors du temps scolaire.

Puisque vous m’avez dit que cette réforme était merveilleuse pour l’enfant et qu’elle était menée uniquement dans son intérêt, vous auriez pu au moins accéder à ma demande tendant à ce qu’un vrai bilan soit dressé au terme de cette année. (Mme la secrétaire d’État opine.) Vous me faites oui de la tête, mais j’aurais préféré que vous le disiez clairement tout à l’heure.

Je vous confirme que, pour ma part, je souhaite vraiment qu’un bilan réel de la réforme soit établi au bout d’une année. On pourrait ainsi en tirer toutes les conséquences et ne pas la poursuivre s’il devait s’avérer – mais vous me dites que ce ne sera pas le cas – que la réforme n’a pas d’effets bénéfiques pour les enfants, pour les familles, et qu’elle n’est pas supportable pour les collectivités locales compte tenu de la baisse des dotations.

avenir des chambres de commerce et d'industrie

M. le président. Monsieur le ministre de l’économie, M. Longuet et moi-même, qui avons trente-sept ans de présence au Parlement, sommes heureux de vous accueillir dans cet hémicycle, en vous souhaitant une longévité égale à la nôtre. (Sourires.)

La parole est à M. Daniel Laurent, auteur de la question n° 870, adressée à M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.

M. Daniel Laurent. Monsieur le ministre, ma question, à laquelle s’associent ma collègue nouvellement élue Corinne Imbert et certainement de nombreux élus de nos territoires, porte sur les vives préoccupations des chambres de commerce et d’industrie, les CCI. Celles-ci s’étonnent qu’à l’heure où le Gouvernement propose aux entreprises un pacte de responsabilité il organise dans le même temps un véritable démantèlement de l’économie sur les territoires.

Le 27 mai 2014, les présidents des CCI ont adopté une motion de défense des entreprises et pris la décision de suspendre tous leurs travaux en cours avec le Gouvernement, aux niveaux tant national que local.

En effet, alors que, le 28 mai 2013, le Premier ministre signait avec le réseau des CCI de France un pacte de confiance, cette dernière s’est depuis érodée, en premier lieu à la suite de la baisse des ressources affectées aux CCI, de l’ordre de 20 % en 2014.

Depuis, le Gouvernement a inscrit au projet de loi de finances pour 2015 un prélèvement supplémentaire de 500 millions d’euros sur les fonds de roulement de certaines CCI.

Ainsi, dans mon département, la CCI Rochefort et Saintonge se verrait prélever 2 290 605 euros et celle de La Rochelle, 10 532 436 euros, alors que d’autres CCI de la région Poitou-Charentes n’auraient pas à subir de prélèvement sur leur fonds de roulement.

De plus, le projet de loi de finances pour 2015 réduit de 17 % les ressources fiscales des CCI : c’est, selon ce qui a été annoncé à leurs présidents, la première étape d’une diminution totale de 37 % qu’elles devront subir d’ici à 2017.

En privant les chambres consulaires des moyens de soutenir le développement des entreprises et des territoires, on risque d’aboutir à la fermeture des centres de formation d’apprentis, les CFA, et à la réduction du nombre d’apprentis de 100 000 à 70 000 en trois ans.

En Charente-Maritime, la CCI Rochefort et Saintonge ne sera plus en mesure de gérer le CFA-commerce de Saintes, qui forme 600 apprentis par an.

Nous le savons tous, nous manquons d’apprentis dans différents métiers. Or, au lieu d’encourager ces jeunes, vous diminuez les moyens des structures de formation !

Des équipements structurants sont aussi directement menacés, à l’image de l’aéroport de La Rochelle-Île de Ré, qui est géré par la CCI de La Rochelle. Cet aéroport départemental, qui accueille actuellement 215 000 passagers par an, est un équipement touristique et économique essentiel. Il en va de même pour les investissements dans les ports de pêche et de commerce, les parcs d’exposition, les palais des congrès et autres zones d’activité, toutes structures porteuses d’activités économiques et d’emplois.

Enfin, le service même aux entreprises, surtout dans les territoires ruraux comme le mien, est directement remis en cause, car les CCI n’auront plus les moyens d’organiser une présence sur le terrain, d’accompagner les créateurs d’entreprise et les porteurs de projet, de soutenir les clubs et associations...

Les mesures drastiques concernant les CCI inscrites au projet de loi de finances 2015 engendreront, en Charente-Maritime, une centaine de suppressions d’emplois. Au niveau national, ce sont 6 000 emplois, sur les 26 000 collaborateurs très impliqués que compte le réseau des CCI, qui sont menacés.

Si les chambres de commerce et d’industrie consentent à contribuer à l’effort national de réduction des déficits publics, il n’en demeure pas moins qu’il faut leur laisser le temps de mener à bien les réformes structurelles idoines, leur permettre de poursuivre leurs investissements et actions indispensables pour le développement économique de nos territoires.

Tout au long de la campagne sénatoriale que nous venons de vivre, nous avons pu mesurer le désarroi et l’inquiétude des élus et des acteurs socio-économiques quant à l’avenir, notamment au regard de l’incidence sur l’investissement public des baisses des dotations aux collectivités locales ou des incertitudes liées à la réorganisation territoriale, sans parler des modalités d’application de la réforme des rythmes scolaires, que M. Maurey vient d’évoquer.

Nos collègues de l’Assemblée nationale, qui examinent actuellement le projet de loi de finances, ont fait entendre sur tous les bancs les vives préoccupations exprimées dans nos territoires et ont formulé des propositions. Je ne reviendrai pas sur les débats qui ont eu lieu à la fin de la semaine dernière et hier soir, sinon pour dire que les amendements qui ont été adoptés ne changeront concrètement rien aux prélèvements opérés sur les fonds de roulement : ils restent pratiquement identiques.

Gageons qu’une solution satisfaisante sera trouvée in fine, permettant à l’État de faire face à ses contraintes budgétaires et aux CCI de poursuivre leurs missions, même si je n’ai guère d’illusions sur la volonté du Gouvernement. En tout cas, au Sénat, nous nous y emploierons autant que nous le pourrons.

En conséquence, monsieur le ministre, comment envisagez-vous l’avenir des chambres de commerce et d’industrie ? Quels sont les objectifs réels du Gouvernement en matière de gouvernance territoriale de l’ensemble des politiques économiques, qui sont déterminantes ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique. Je veux tout d’abord, monsieur le président, vous remercier de votre message d’accueil.

Monsieur le sénateur Daniel Laurent, je tenais à être présent ce matin, car la question que vous avez posée est importante. En effet, au-delà des aspects financiers, les CCI assument, comme vous l’avez fort bien souligné, des missions essentielles pour nous tous. Je les ai d’ailleurs moi-même rappelées lorsque je suis allé devant l’assemblée générale des chambres de commerce et d’industrie le 19 septembre dernier pour leur expliquer le sens des décisions que nous prenions.

Le rôle des CCI est effectivement majeur en matière d’apprentissage, de services aux entreprises, ainsi que d’aménagement de nos territoires, au travers des aéroports de proximité et de nombreux autres services. Elles jouent aussi un rôle pédagogique important en termes de mise en œuvre de l’ensemble de notre action économique. Nous nous sommes d'ailleurs appuyés sur elles à plusieurs reprises, par exemple lorsqu’il s’est agi d’expliquer le CICE – crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – ou le pacte de responsabilité.

Il n’est pas question ici de remettre en cause le rôle des CCI et leur importance sur le territoire.

Néanmoins, l’esprit de responsabilité, que nous partageons, monsieur le sénateur, nous oblige, au regard de la situation de nos finances publiques et alors que nous appelons tous de nos vœux la baisse des dépenses publiques, à considérer que celle-ci doit s’appliquer de la manière la plus équitable possible à l’ensemble des acteurs de cette dépense publique ; or les CCI en font partie.

Qui plus est, celles-ci ont perçu, pendant plusieurs années, des ressources fiscales qui excédaient leurs besoins. Je rappellerai quelques chiffres qui doivent être gardés en mémoire.

Entre 2002 et 2012, la ressource des CCI a augmenté de 41 % avant de commencer à diminuer en 2014. Elle a augmenté tandis que la dépense de l’État était gelée en volume depuis 2003 et en valeur depuis 2011. Par voie de conséquence, les fonds de roulement des CCI ont sensiblement gonflé jusqu’en 2012.

Ce constat, je n’en accable pas les CCI actuelles ni leurs dirigeants ; je dis simplement « en creux » que nous aurions dû commencer à réguler les finances des CCI et à leur demander des efforts bien plus tôt.

Ceux que nous leur demandons aujourd’hui sont doublement nécessaires : ils ont conduit le Gouvernement à proposer dans le projet de loi de finances, d’une part, un prélèvement sur leurs fonds de roulement de 500 millions d’euros en 2015 et, d’autre part, une diminution du plafond de la taxe pour frais de chambre – la fameuse TFC – de 213 millions d’euros pour cette même année, ce qui représente une baisse de 4 % par rapport au niveau de TFC perçue en 2014.

À ce titre, je voudrais lever plusieurs malentendus.

Tout d’abord, la baisse du plafond de TFC, ce n’est pas « plus d’argent pour l’État », c’est moins d’argent prélevé sur les entreprises. La diminution progressive que nous comptons mettre en œuvre me paraît parfaitement cohérente avec l’ensemble de la politique économique conduite par le Gouvernement : réduction des déficits, d’une part, relance de l’activité, d’autre part.

Par ailleurs, cette taxe finance les activités de service public administratif auprès des entreprises ainsi que la formation. On ne parle ni de la taxe d’apprentissage, qui finance le fonctionnement des structures d’apprentissage, ni des structures et activités telles qu’aéroports, ports, parkings, palais des congrès, formation professionnelle continue, accompagnement des entreprises, etc., qui ne sont pas financées par la TFC ; on ne touche ni aux ressources ni aux fonds de roulement de ces activités.

Ainsi, devant la menace que j’ai déjà entendue selon laquelle plusieurs centres de formation des apprentis pourraient être fermés en représailles des efforts demandés, je réitère l’invitation que j’ai faite aux CCI de faire preuve d’esprit de responsabilité et de chercher plutôt à faire porter l’effort sur des frais de fonctionnement, sur des regroupements de structures. Si des efforts ont été réalisés durant les deux ou trois années précédentes, beaucoup peut encore être fait dans d’autres domaines par les CCI pour réduire leurs dépenses. Si elles partagent avec nous cette priorité en faveur de l’apprentissage, cela doit se refléter dans les choix qu’elles opéreront.

Enfin, nous avons veillé à tenir compte de la réalité des situations locales. Ainsi, malgré le niveau très important atteint par la plupart des fonds de roulement des CCI, le Gouvernement prévoit de ne ponctionner qu’une partie du fonds excédant quatre mois. Au total, une trentaine de CCI ne seraient pas concernées.

Les modalités que doivent revêtir ces efforts sont actuellement, vous l’avez rappelé, débattues au Parlement, et le Sénat aura lui-même à en discuter.

Je regrette que les CCI aient, en quelque sorte, préféré le jeu du pire et n’aient pas souhaité s’organiser entre elles. Il est évident qu’une péréquation régionale aurait été beaucoup plus adaptée dans la mesure où les situations locales sont très différentes. Il est dommage que les CCI n’aient pas fait ce choix. Elles doivent selon moi revenir à la concertation.

L’effort global qui leur est demandé ne saurait être diminué, mais je pense que l’on peut, de la manière la plus intelligente possible, encore améliorer la copie– et ce sera le fruit des débats qui sont menés actuellement et qui se poursuivront au cours des prochaines semaines, notamment ici. L’effort d’ensemble est une nécessité et notre responsabilité est partagée.

Je réaffirme, en conclusion, monsieur le sénateur, notre volonté de poursuivre le travail que nous menons avec les CCI, dont les missions d’intérêt général sont effectivement au cœur de notre économie.

M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent.

M. Daniel Laurent. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, mais vous imaginez bien qu’elle ne va pas complètement satisfaire les CCI.

Nous sommes conscients que la crise économique majeure, dramatique, dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui nous impose de faire des économies.

Toutefois, je constate que les ressources importantes dont ont bénéficié les CCI ont été utilisées à bon escient, dans l’intérêt de nos territoires.

La France est extrêmement diverse. Je représente ici, comme de nombreux autres sénateurs, la France des territoires ruraux. Dans ces territoires, il faudra maintenir des politiques de proximité efficaces, qui soient utiles aux entreprises, qui favorisent l’implantation des petits commerces, et cela, bien sûr, dans l’intérêt des collectivités. Or cette action passe par les CCI.

Il est donc indispensable de continuer à les aider et, surtout, de ne pas amputer leurs budgets, faute de quoi elles ne pourront plus fonctionner, elles ne pourront plus mener les actions significatives qui sont les leurs en faveur des jeunes.

Si j’interviens en ce sens aujourd'hui, c’est parce que c’est important pour notre avenir et pour nos territoires ruraux. Merci, monsieur le ministre, de nous entendre, de nous écouter et d’être efficace dans vos décisions !

alignement du cadre d'emploi des attachés territoriaux de conservation du patrimoine et des bibliothécaires territoriaux sur celui des attachés d'administration